SEANCE DU 17 OCTOBRE 2000


M. le président. « Art. 29. - L'article 36 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 précitée est ainsi modifié :
« 1° Le 2 est ainsi rétabli :
« 2. a) D'obtenir ou de tenter d'obtenir d'un partenaire commercial un avantage quelconque ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu. Un tel avantage peut notamment consister en la participation, non justifiée par un intérêt commun et sans contrepartie proportionnée, au financement d'une opération d'animation commerciale, d'une acquisition ou d'un investissement, en particulier dans le cadre de la rénovation de magasins ou encore du rapprochement d'enseignes ou de centrales de référencement ou d'achat ;
« b) D'abuser de la relation de dépendance dans laquelle il tient un partenaire ou de sa puissance d'achat ou de vente en le soumettant à des conditions commerciales ou obligations injustifiées ; »
« 2° Au 4, après les mots : "rupture brutale", sont insérés les mots : "totale ou partielle" ;
« 3° Le 5 est ainsi rédigé :
« 5. De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. Lorsque la relation commerciale porte sur la fourniture de produits sous marque de distributeur, la durée minimale de préavis est double de celle qui serait applicable si le produit n'était pas fourni sous marque de distributeur. A défaut de tels accords, des arrêtés du ministre chargé de l'économie peuvent, pour chaque catégorie de produits, fixer, en tenant compte des usages du commerce, un délai minimum de préavis et encadrer les conditions de rupture des relations commerciales, notamment en fonction de leur durée. Les dispositions qui précédent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure » ;
« 4° Après le 6, il est inséré trois alinéas ainsi rédigés :
« Sont nuls les clauses ou contrats prévoyant pour un producteur, un commerçant, un industriel ou un artisan, la possibilité :
« a) De bénéficier rétroactivement de remises, de ristournes ou d'accords de coopération commerciale ;
« b) D'obtenir le paiement d'un droit d'accès au référencement préalablement à la passation de toute commande. » ;
« 5° L'avant-dernier alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« L'action est introduite devant la juridiction civile ou commerciale compétente par toute personne justifiant d'un intérêt, par le ministère public, par le ministre chargé de l'économie ou par le président du Conseil de la concurrence lorsque ce dernier constate, à l'occasion des affaires qui relèvent de sa compétence, une pratique mentionnée au présent article.
« Lors de cette action, le ministre chargé de l'économie et le ministère public peuvent demander à la juridiction saisie d'ordonner la cessation des pratiques mentionnées au présent article. Ils peuvent aussi, pour toutes ces pratiques, faire constater la nullité des clauses ou contrats illicites, demander la répétition de l'indu et le prononcé d'une amende civile dont le montant ne peut excéder 2 millions d'euros. La réparation des préjudices subis peut également être demandée. » ;
« 6° Le dernier alinéa est ainsi rédigé :
« Le juge des référés peut ordonner la cessation des pratiques discriminatoires ou abusives ou toute autre mesure provisoire. »
Sur l'article, la parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. En prélude à l'examen de cet article, je voudrais insister sur le fait que la loi ne doit donner ni trop ni trop peu d'indications au juge. C'est un équilibre délicat à trouver !
Dans le domaine traité par l'article 29, l'objectif principal est de renforcer la sanction des abus de dépendance. S'il faut faire la guerre à la fausse coopération commerciale, mais il faut fournir au juge des éléments d'appréciation sans pour autant prétendre à décrire dans le texte tous les cas qui pourront être rencontrés.
La rédaction que nous proposons pour cet article n'englobe pas les coopératives d'achat dans l'interdiction générale d'imposer des conditions commerciales ou des obligations sans contrepartie réelle ou proportionnée. Préciser, comme le voudraient certains de nos collègues, qui ont assurément d'excellentes intentions, que tout référencement sans passation préalable d'une commande est prohibé par la loi oblige nécessairement à prévoir une exception pour ces coopératives d'achat puisque leur raison d'être est précisément le référencement de produits à destination de leurs associés.
C'est une difficulté incontournable à laquelle nous sommes exposés.
Nous voulons tous, du moins en principe, une loi qui soit égale pour tous les agents économiques placés dans une même situation.
Nous faisons confiance au juge, d'autant que nous espérons qu'il sera éclairé par la Commission des pratiques commerciales, dont nous avons précisé le rôle.
Nous espérons aussi que les tribunaux, du fait de leur spécialisation, affirmeront de plus en plus leurs compétences en droit de la concurrence.
C'est cette confiance en la justice qui explique notre suppression, sur laquelle nous n'avons peut-être pas suffisamment insisté jusqu'ici, des clauses nulles de plein droit prévues dans la version initiale de l'article 29.
Nous avons essayé de trouver un juste milieu législatif entre le trop et le trop peu de précisions. Nous avons voulu affirmer notre confiance dans le juge et nous avons aussi souhaité le respect de la liberté contractuelle. C'est en son nom qu'a été supprimé le recours à un arrêté ministériel pour la fixation des délais minimaux de préavis de rupture des relations commerciales. Il ne faut pas se tromper sur le sens de notre démarche en ce domaine. Peut-être y reviendrons-nous, mais j'insiste sur la nécessité de respecter la liberté contractuelle tout en pourchassant les abus.
Madame le secrétaire d'Etat, je suis amené à vous interroger sur le point de savoir si le Gouvernement a l'intention de prendre une circulaire d'interprétation de la notion d'abus de dépendance économique. Il y a des précédents en ce domaine : la circulaire Scrivener de 1978, la circulaire Delors de 1984, qui avaient, en leur temps, interprété la législation en vigueur en matière de coopération commerciale.
Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat. Monsieur le rapporteur, je souhaite seulement, en cet instant, vous répondre sur la circulaire d'interprétation.
Nous avons indiqué, à l'Assemblée nationale, que nous nous donnions un an avant de prendre éventuellement une circulaire si cela s'avère nécessaire. Mais il n'y a pas eu d'engagement formel et a priori de mettre au point, dès la promulgation de la loi, une circulaire d'interprétation.
M. le président. Sur l'article 29, je suis saisi de seize amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 207, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose de rédiger comme suit l'article 29 :
« L'article L. 442-6 du code de commerce est ainsi rédigé :
« Art. L. 442-6. - Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou artisan :
« 1. De pratiquer, à l'égard d'un partenaire économique, ou d'obtenir de lui des prix, des délais de paiement, des conditions de vente ou des modalités de vente ou d'achat discriminatoires et non justifiées par des contreparties réelles en créant, de ce fait, pour ce partenaire, un désavantage ou un avantage dans la concurrence ;
« 2. D'abuser de l'état de dépendance dans laquelle il tient un partenaire, du fait notamment de sa puissance d'achat ou de vente de produits destinés à la consommation courante des ménages, en le soumettant à des conditions commerciales ou obligations sans contrepartie réelle ou proportionnée.
« Ces abus peuvent notamment consister à :
« a) Obtenir ou tenter d'obtenir d'un partenaire commercial un avantage quelconque qui ne correspond à aucun service effectif ou est manifestement disproportionné au service rendu, tel que :
« - la participation non justifiée par un intérêt commun au financement d'une opération d'animation commerciale, d'une acquisition ou d'un investissement, en particulier dans le cadre de la rénovation de magasins ou encore du rapprochement d'enseignes ou de centrales de référencement ou d'achat ;
« - l'exigence, préalablement à la passation de toute commande, d'un droit d'accès au référencement ou de conditions qui ne sont pas assorties d'un engagement écrit sur un volume d'achat proportionné et, le cas échéant, d'un service demandé par le fournisseur et ayant fait l'objet d'un accord écrit ;
« - l'octroi, à titre rétroactif, de remises, de ristournes ou d'accords de coopération commerciale ;
« b) Subordonner l'octroi d'un avantage tarifaire à l'achat d'un assortiment de produits fabriqués ou vendus par une même entreprise ou un même groupes d'entreprises ;
« c) Obtenir ou tenter d'obtenir, sous la menace d'une rupture brutale, totale ou partielle, des relations commerciales, des prix, des délais de paiement, des modalités de vente ou des conditions de coopération commerciale manifestement dérogatoires aux conditions générales de vente ;
« d) Imposer, unilatéralement, des normes de configuration de produits achetés ou référencés en ayant recours à des systèmes d'information électroniques.
« 3. De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale ainsi que de la particulière vulnérabilité des fournisseurs de produits sous marque de distributeur et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure.
« 4. De participer directement ou indirectement à la violation de l'interdiction de revente hors réseau faite au distributeur lié par un accord de distribution sélective ou exclusive exempté au titre des règles applicables du droit de la concurrence.
« 5. Pour les produits et services non visés à l'article L. 443-1 de dépasser sans motif légitime le délai contractuel de paiement ou, à défaut d'accord contractuel, le délai de paiement indiqué dans les conditions générales du vendeur, lorsque celui-ci est supérieur ou égal à trente jours à compter de la livraison du produit ou de la prestation de service ; les réparations accordées s'ajoutent aux pénalités pour retard de paiement calculées au taux mentionné à l'article L. 442-6 et à compter du trentième jour suivant la livraison du produit ou de la prestation du service.
« L'action est introduite devant la juridiction civile ou commerciale compétente par toute personne justifiant d'un intérêt, par le ministère public, par le ministère chargé de l'économie ou par le président du Conseil de la concurrence lorsque ce dernier constate une pratique mentionnée au présent article, à l'occasion des affaires qui relèvent de sa compétence ou lorqu'il a été saisi par la commission visée à l'article 28.
« Lors de cette action, le ministre chargé de l'économie et le ministère public peuvent demander à la juridiction civile ou commerciale d'ordonner la cessation des pratiques mentionnées au présent article. Ils peuvent aussi, pour toutes ces pratiques, faire constater la nullité des clauses ou contrats illicites, demander la répétition de l'indu et le prononcé d'une amende civile, dont le montant ne peut excéder 2 millions d'euros.
« Le juge des référés peut ordonner la cessation des pratiques discriminatoires ou abusives ou toute autre mesure provisoire. »
Cet amendement est assorti de neuf sous-amendements.
Les deux premiers sont présentés par M. Hérisson, au nom de la commission des affaires économiques.
Le sous-amendement n° 631 tend, au septième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 207 pour l'article L. 442-6 du code de commerce, après le mot : « commande », à insérer les mots : « ferme, définitive et significative ».
Le sous-amendement n° 632 vise, après le huitième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 207 pour l'article L. 442-6 du code de commerce, à insérer un nouvel alinéa ainsi rédigé :
« Pour apprécier la proportionnalité de la contrepartie, le contrat doit mentionner une estimation financière du coût et du profit de l'avantage et du service. »
Par sous-amendement n° 458 rectifié, Mme Terrade, M. Loridant, Mme Beaudeau, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de rédiger comme suit la première phrase du douzième alinéa du texte présenté par l'amendement n° 207 pour l'article L. 442-6 du code de commerce : « De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit et motivé tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce et ne pouvant être inférieure à six mois, par des accords interprofessionnels. »
Les trois sous-amendements suivants sont identiques.
Le sous-amendement n° 633 est présenté par M. Hérisson au nom de la commission des affaires économiques.
Le sous-amendement n° 346 est déposé par MM. Bourdin et Pépin.
Le sous-amendement n° 375 est présenté par MM. Ostermann, Fournier, Le Grand, Cornu, Courtois, Cazalet, César, Francis Giraud, Murat, Oudin et Bizet.
Tous trois tendent, dans la première phrase du 3. du texte proposé par l'amendement n° 207, après le mot : « préavis écrit », à insérer les mots : « et motivé ».
Par sous-amendement n° 374 rectifié, MM. Ostermann, Fournier, Le Grand, Cornu, Courtois, Cazalet, César, Francis Giraud, Murat, Oudin et Bizet proposent, après la première phrase du 3. du texte présenté par l'amendement n° 207, d'insérer une phrase ainsi rédigé : « Cette durée est au minimum de trois mois. »
Par sous-amendement n° 634, M. Hérisson, au nom de la commission des affaires économiques, propose, après la première phrase du douzième alinéa du texte présenté par l'amendement n° 207 pour l'article L. 442-6 du code de commerce, d'insérer une phrase ainsi rédigée : « Ces derniers peuvent encadrer les conditions de rupture des relations commerciales, y compris en fixant les modalités d'indemnisation. »
Enfin, par sous-amendement n° 347, MM. Bourdin et Pépin proposent de compléter le douzième alinéa du texte présenté par l'amendement n° 207 pour l'article L. 442-6 du code de commerce par une phrase ainsi rédigée : « A défaut d'accord interprofessionnel ou d'arrêté ministériel, le délai de préavis est de six mois minimum. »
Par amendement n° 639, le Gouvernement propose :
I. - De rédiger ainsi le premier alinéa de l'article 29 :
« L'article L. 442-6 du code de commerce est ainsi modifié : »
II. - Après le premier alinéa de cet article d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les 2°, 3°, 4° et 5° du I deviennent respectivement les 3°, 4°, 5° et 6° du I. »
III. - Dans le deuxième alinéa de cet article, de remplacer les mots : « le 2 est ainsi rétabli » par les mots : « le 2° du I est ainsi rédigé ».
IV. - Dans le cinquième alinéa de cet article, de remplacer la référence : « 4 » par la référence : « 4° ».
V. - Dans les sixième et septième alinéas de cet article, de remplacer la référence : « 5 » par la référence : « 5° ».
VI. - Après le septième alinéa de cet article, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les II et III deviennent respectivement les III et IV ».
VII. - De rédiger ainsi le premier alinéa du 4° de cet article :
« 4° Le II est ainsi rédigé : »
VIII. - Dans le premier alinéa du 5° de cet article, de remplacer les mots : « l'avant-dernier alinéa est remplacé par » par les mots : « le III est remplacé par ».
IX. - De rédiger ainsi le premier alinéa du 6° de cet article :
« 6° Le IV de l'article L. 442-6 du code de commerce est ainsi rédigé : »
Par amendement n° 376, MM. Cornu, Courtois, Cazalet, Francis Giraud, Murat et Oudin proposent :

I. - De remplacer les 1°, 2°, 3° et 4° de l'article 29 par dix alinéas ainsi rédigés :
« 1° Les sept premiers alinéas sont remplacés par neuf alinéas ainsi rédigés :
« Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, prestataire de services, grossiste ou importateur, commerçant, industriel ou artisan :
« 1. De pratiquer, à l'égard d'un partenaire économique, ou d'obtenir de lui des prix, des délais de paiement, des conditions de vente, des modalités de vente ou d'achat ou un avantage quelconque,
« a) manifestement dérogatoires au barème de prix ou aux conditions générales de vente ;
« b) ne correspondant à aucun service ou contrepartie effectivement rendus en créant, de ce fait, pour ce partenaire un désavantage ou un avantage dans la concurrence ;
« c) et, dans le cadre des services spécifiques, disproportionnés au regard de la valeur du service rendu ;
« 2. D'abuser de l'état de dépendance économique dans lequel se trouve, à son égard, le partenaire en le soumettant à des conditions commerciales injustifiées ;
« 3. De subordonner l'achat d'un produit ou service à la vente d'un autre produit ou service ;
« 4. De rompre, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte des relations commerciales antérieures ou des usages reconnus par des accords professionnels. Les dispositions précédentes ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou de force majeure.
« 5. De participer directement ou indirectement à la violation de l'interdiction de revente hors réseau faite au distributeur lié par un accord de distribution sélective ou exclusive exempté au titre des règles applicables du droit de la concurrence. »
« II. - En conséquence, de remplacer les mentions : "5°." et "6°.", par les mentions : "2°." et "3°." ».
Les deux amendements suivants sont présentés par M. Hérisson, au nom de la commission des affaires économiques.
L'amendement n° 144 vise à compléter le troisième alinéa (2. a ) de l'article 29 par les dispositions suivantes : « pour apprécier la proportionnalité de cette contrepartie, le contrat doit comporter une estimation financière du coût et du profit de l'avantage et du service ; ».
L'amendement n° 145 tend à compléter le quatrième alinéa (2. b ) de l'article 29 par les dispositions suivantes : « constitue notamment un abus de puissance de vente le fait de subordonner l'octroi d'une remise ou ristourne tarifaire à l'achat de plusieurs produits ou références fabriqués ou vendus par une même entreprise ou un même groupe d'entreprises ».
Par amendement n° 412, MM. Carle et Raffarin proposent, après le quatrième alinéa de l'article 29, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ...) De subordonner l'octroi d'une remise ou ristourne tarifaire à l'achat de plusieurs produits ou références fabriqués ou vendus par une même entreprise ou un même groupe d'entreprises. »
Par amendement n° 8 rectifié, MM. Franchis, Huchon, Deneux, Souplet, Bécot, Machet, Moinard, Nogrix, Le Breton et Marquès proposent de remplacer les trois premières phrases du septième alinéa de l'article 29 par deux phrases ainsi rédigées :
« De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit et motivé tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usagers du commerce, par des accords interprofessionnels. A défaut d'accord interprofessionnel ou d'arrêté ministériel, le délai de préavis est de six mois minimum. »
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 146 est présenté par M. Hérisson, au nom de la commission des affaires économiques.
L'amendement n° 427 est déposé par MM. Paul Girod, Joly, Mouly et Soucaret.
Tous deux tendent, dans la première phrase du septième alinéa de l'article 29, après les mots : « sans préavis écrit », à insérer les mots : « et motivé ».
Par amendement n° 475, MM. Paul Girod, Joly, Mouly et Soucaret proposent de compléter la première phrase du septième alinéa de l'article 29 par une phrase ainsi rédigée : « Cette durée est au minimum de six mois. »
Par amendement n° 406, MM. Franchis, Huchon, Deneux, Souplet, Bécot, Machet, Moinard, Nogrix, Le Breton et Marquès proposent de remplacer les deuxième et troisième phrases du septième alinéa de l'article 29 par un membre de phrase ainsi rédigé : « En l'absence d'usages ou d'accord interprofessionnel, ce préavis est au minimum de six mois ; ».
Par amendement n° 378, MM. Cornu, Courtois, Cazalet, Francis Giraud, Murat et Oudin proposent de supprimer la troisième phrase du second alinéa du 3° de l'article 29.
Les deux amendements suivants sont présentés par M. Hérisson, au nom de la commission des affaires économiques.
L'amendement n° 147 vise à compléter le septième alinéa de l'article 29 par les dispositions suivantes : « des accords interprofessionnels peuvent encadrer les conditions de rupture des relations commerciales, y compris en fixant les modalités d'indemnisation. »
L'amendement n° 148 tend à rédiger ainsi les neuvième, dixième et onzième alinéas de l'article 29 :
« Sont nuls les clauses ou contrats prévoyant pour un producteur, un commerçant, un industriel ou un artisan, la possibilité :
« a) De bénéficier rétroactivement de remises, de ristournes ou d'accords de coopération commerciale ;
« b) D'obtenir, sauf pour les coopératives de commerçants, d'artisans ou de pharmaciens, le paiement d'un droit d'accès au référencement préalablement à la passation de toute commande ferme, définitive et significative. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 352, présenté par MM. Dussaut, Plancade, Bellanger, Mme Boyer, MM. Bony, Lejeune, Le Pensec, Pastor, Raoult, Rinchet, Trémel et les membres du groupe socialiste et apparentés et tendant à rédiger comme suit le dernier alinéa de l'amendement n° 148 :
« b) D'obtenir le paiement d'un droit d'accès au référencement préalablement à la passation de toute commande ferme et définitive. »
Les deux derniers amendements sont identiques.
L'amendement n° 9 est présenté par MM. Franchis, Huchon, Deneux, Souplet, Bécot, Machet, Moinard, Nogrix, Le Breton et Marquès.
L'amendement n° 377 est déposé par MM. Cornu, Courtois, Cazalet, Francis Giraud, Murat et Oudin.
Tous deux tendent à rédiger ainsi le b) du 4° de l'article 29 :
« b) D'obtenir le paiement d'un droit d'accès au référencement sans contrepartie réelle. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 207.
M. Philippe Marini, rapporteur. Il s'agit là d'un amendement qui nous a demandé beaucoup de travail. Pour le mettre au point, nous avons consulté beaucoup de spécialistes de ces questions, des juristes compétents en droit de la concurrence, des membres du Conseil de la concurrence et, bien entendu, des professionnels des différents métiers concernés.
Cet amendement de synthèse a deux objets : d'abord, il vise à une clarification rédactionnelle ; il tend ensuite à intégrer certains sujets de fond qui nous semblent importants.
Du point de vue rédactionnel, il faut distinguer les pratiques discriminatoires des abus de dépendance et des autres pratiques prohibées. En outre, il faut regrouper tout ce qui concerne les abus de dépendance et y inclure la puissance de vente, laquelle relevait jusqu'à présent exclusivement de l'abus de position dominante, également visé à l'article 8 de l'ancienne ordonnance de 1986 que nous rétablissons dans sa version initiale.
C'est donc de manière tout à fait volontaire que notre amendement établit une symétrie entre l'abus de puissance d'achat et l'abus de puissance de vente. L'examen concret des situations rencontrées dans le domaine, si complexe, de la distribution montre en effet que, s'il existe des cas où le distributeur est amené à abuser de sa position de marché lorsqu'il est un intermédiaire obligé pour écouler des produits, il y a aussi des situations dans lesquelles des commerçants, éventuellement indépendants ou regroupés en réseau de différentes natures juridiques, se trouvent dans des situations critiques, ou critiquables, de dépendance à l'égard d'un fournisseur - par exemple d'un fournisseur de produits de marque - disposant d'une position de marché prédominante.
Il faut donc veiller à cette symétrie si l'on veut faire progresser le droit, et cela est conforme à la volonté de clarification qui sous-tend l'amendement n° 207.
Par ailleurs, cet amendement vise à intégrer différents sujets de fond, comme la prohibition des abus liés aux nouvelles technologies ou l'impossibilité, qu'il faut bien constater, pour le ministre de demander des dommages et intérêts au nom des victimes, conformément à la vieille formule de notre droit selon laquelle « nul ne plaide par procureur ».
M. le président. La parole est à M. Hérisson, rapporteur pour avis, pour présenter les sous-amendements n°s 631 et 632.
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. Comme M. le rapporteur l'a indiqué, l'amendement n° 207 a été élaboré à l'issue de nombreuses consultations et d'un travail en profondeur. Selon le scénario déjà suivi à l'amendement n° 205, la commission des affaires économiques propose donc quatre sous-amendements à cet amendement et retire ses amendements n°s 144, 145, 146, 147 et 148.
L'article 29 prévoyait initialement la nullité des dispositions contractuelles obligeant le fournisseur à verser un droit d'accès au référencement avant la passation de toute commande. La commission des finances a préféré considérer cette pratique comme un abus de puissance d'achat engageant la responsabilité de son auteur. Quoi qu'il en soit, afin de prévenir l'écueil d'une commande trop vague, la commission des affaires économiques souhaite préciser que cette commande doit être ferme, définitive et significative. C'est l'objet du sous-amendement n° 631.
Quant au sous-amendement n° 632, je rappelle que la commission des affaires économiques avait souhaité viser les accords de gamme dans les abus de puissance de vente, mais l'amendement n° 207 de la commission des finances concernant le dixième alinéa du texte proposé pour l'article 29 nous donne satisfaction.
M. le président. Les amendements n°s 144, 145, 146, 147 et 148 sont retirés, et le sous-amendement n° 352 n'a plus d'objet.
La parole est à M. Le Cam, pour présenter le sous-amendement n° 458 rectifié.
M. Gérard Le Cam. L'article 29 du projet de loi porte sur la question des pratiques commerciales pour le moins surprenantes que mettent en oeuvre les grands groupes de la distribution dès lors qu'ils sont en situation d'imposer aux producteurs leurs règles et principes de fonctionnement.
Il renforce a priori les garanties offertes aux fournisseurs à l'égard des distributeurs, ce qui, en soi, ne peut pas être considéré comme négatif.
On soulignera d'ailleurs à ce propos que la manière dont sont aujourd'hui régies les relations entre distributeurs et fournisseurs est, pour l'essentiel, à la base d'un double phénomène : d'une part, la faiblesse du résultat d'exploitation des producteurs - singulièrement des producteurs de denrées agricoles - et, d'autre part, l'importance du crédit fournisseurs dans la marge commerciale des distributeurs, puisqu'il constitue aujourd'hui l'essentiel de cette marge.
Nous pensons donc indispensable que l'article 29 offre, quand il modifie l'article L. 442-5 du code de commerce, le plus de garanties possibles aux producteurs en imposant aux distributeurs de motiver clairement les raisons qui les conduisent à rompre une relation commerciale et à respecter, en cas de rupture de la relation commerciale, un préavis de mise en oeuvre de cette rupture.
M. le président. La parole est à M. Hérisson, rapporteur pour avis, pour défendre le sous-amendement n° 633.
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. Nous traitons ici du problème de la rupture abusive de la relation commerciale.
Pour la commission des affaires économiques, les dispositions sur le déréférencement brutal, total ou partiel, doivent être définies de façon plus précise qu'elles ne le sont aujourd'hui. Il faut ainsi exiger que le déréférencement soit motivé par écrit, car cette exigence préserve la liberté contractuelle des parties et permet au juge du contrat d'exercer réellement son contrôle en cas de contentieux.
M. le président. Le sous-amendement n° 346 est-il soutenu ?...
Le sous-amendement n° 375 est-il soutenu ?...
Le sous-amendement n° 374 est-il soutenu ?...
La parole est à M. Hérisson, rapporteur pour avis, pour défendre le sous-amendement n° 634.
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. Nous restons dans le domaine de la rupture abusive de la relation commerciale.
En vue de préciser les dispositions législatives relatives au déréférencement, il serait souhaitable que, de manière plus générale, les conditions de rupture, y compris les conditions d'indemnisation d'une relation commerciale, soient précisées dans des accords interprofessionnels.
M. le président. Le sous-amendement n° 347 est-il soutenu ?...
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat, pour défendre l'amendement n° 639.
Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat. C'est un amendement de codification.
M. le président. L'amendement n° 376 est-il soutenu ?...
La parole est à M. Carle, pour défendre l'amendement n° 412.
M. Jean-Claude Carle. Cet amendement vise à faire face aux pratiques d'abus de puissance de vente, voire à la concurrence déloyale, qu'exercent certains grands groupes à l'égard de fournisseurs plus petits, en particulier de PME, qui ne disposent pas d'une gamme de produits aussi large qu'eux.
M. le président. La parole est à M. Franchis, pour défendre l'amendement n° 8 rectifié.
M. Serge Franchis. Les dispositions sur le déréférencement brutal, total ou partiel, doivent être définies de façon plus précise : le déréférencement doit, notamment, être motivé par écrit.
Dans la pratique, les fournisseurs sont soumis à des cahiers des charges contractuels pour la mise en oeuvre desquels ils sont parfois conduits à des investissements importants. Or le respect de ces cahiers des charges ne les met pas à l'abri d'un déréférencement, total ou partiel.
D'une part, cette exigence préserve la liberté contractuelle des parties, mais elle permet aussi au juge du contrat d'exercer réellement son contrôle en cas de contentieux. L'obligation de motivation évitera également au distributeur d'utiliser le déréférencement comme arme de négociation. Le respect d'une durée de préavis ne suffit pas à elle seule à rendre la rupture non fautive.
D'autre part, une durée minimum de préavis doit être prévue par la loi. Au-delà du déréférencement d'un fournisseur, ce sont des emplois de salariés et de fournisseurs qui sont en jeu. Cette durée ne devrait pas être inférieure à six mois, compte tenu de ce qui vient d'être indiqué.
M. le président. La parole est à M. Paul Girod, pour défendre les amendements n°s 427 et 475.
M. Paul Girod. L'amendement n° 427 sera satisfait si le sous-amendement n° 633 est adopté. De même, l'amendement n° 475 sera satisfait si le sous-amendement n° 374 est adopté.
Par conséquent, en attendant de connaître le sort de ces deux sous-amendements, je maintiens mes amendements, mais je dis d'emblée que je me rallierai à la position de la commission des affaires économiques. Si l'amendement n° 207 de la commission des finances est voté, je serai bien entendu pleinement satisfait, sous réserve du vote des sous-amendements.
M. le président. La parole est à M. Franchis, pour défendre l'amendement n° 406.
M. Serge Franchis. Il s'agit d'un amendement de repli. Il est motivé par les mêmes raisons que l'amendement n° 8 rectifié.
M. le président. L'amendement n° 378 est-il soutenu ?...
La parole est à M. Franchis, pour défendre l'amendement n° 9.
M. Serge Franchis. Cet amendement traite de la situation des coopératives des commerçants, ou des groupements, dont l'activité essentielle, voire exclusive, est de référencer les fournisseurs.
La coopérative se borne à négocier avec les fournisseurs les conditions auxquelles les associés pourront acheter les marchandises. Il est donc impossible, a priori, de lier la validité du contrat de référencement à une passation préalable de commande, sauf à remettre en cause l'existence même des coopératives de commerçants dont le référencement est l'activité principale.
Bien entendu, il est important de veiller à ce qu'aucun accès au référencement ne puisse donner lieu à une rémunération si celle-ci n'est pas justifiée par une contrepartie réelle. C'est l'objet de l'amendement n° 9.
M. le président. L'amendement n° 377 est-il soutenu ?...
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur. En ce qui concerne les sous-amendements n°s 631, 632 et 633, la commission émet un avis de sagesse favorable.
Le sous-amendement n° 458 rectifié est satisfait par l'un des sous-amendements de la commission des affaires économiques. Il en est de même pour ce qui concerne le sous-amendement n° 346.
La commission émet un avis favorable sur le sous-amendement n° 634.
L'amendement n° 639 n'aura plus d'objet, car nous avons réécrit l'article.
L'amendement n° 412 sera satisfait par l'un des sous-amendements de la commission des affaires économiques.
L'amendement n° 8 rectifié est, pour l'essentiel, satisfait par les sous-amendements n°s 346 et 374.
L'amendement n° 427 est satisfait par l'un des sous-amendements de la commission des affaires économiques.
J'en viens à l'amendement n° 475...
M. Paul Girod. Me permettez-vous de vous interrompre, monsieur le rapporteur ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Je vous en prie.
M. le président. La parole est à M. Paul Girod, avec l'autorisation de M. le rapporteur.
M. Paul Girod. Comme le sous-amendement n° 374 rectifié n'a pas été défendu, je transforme mon amendement en sous-amendement à l'amendement n° 207 de la commission des finances.
M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 475 rectifié, présenté par M. Paul Girod.
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. S'agissant donc du sous-amendement n° 475 rectifié, la commission pourrait émettre un avis favorable si M. Paul Girod remplaçait « six mois » par « trois mois ».
M. le président. Monsieur Paul Girod, acceptez-vous de modifier ainsi votre sous-amendement ?
M. Paul Girod. Oui, monsieur le président. Les naissances prématurées sont souvent les meilleures venues. (Sourires.)
M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 475 rectifié bis, présenté par MM. Paul Girod, Joly, Mouly et Soucaret et tendant à compléter le douzième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 207 pour l'article L. 442-6 du code de commerce par une phrase ainsi rédigée : « A défaut d'accord interprofessionnel ou d'arrêté ministériel, le délai de préavis est de trois mois minimum. »
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Dans ces conditions, la commission émet un avis favorable sur ce sous-amendement.
L'amendement n° 406 est satisfait dans son principe puisqu'il s'agit de la même idée.
Le sous-amendement n° 352 est satisfait par l'un des amendements ou sous-amendements de la commission des affaires économiques.
L'amendement n° 9 n'est pas compatible, sur le plan rédactionnel, avec l'amendement n° 207 de la commission.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat. Je voudrais tout d'abord saluer la qualité des travaux. Je fais mienne la déclaration de M. le rapporteur. Il y a un véritable échenillage du texte et c'est un beau travail.
L'amendement n° 207 me pose problème, comme d'ailleurs pratiquement tous les autres.
En faisant de l'abus de dépendance le dénominateur commun, fût-il accompagné du terme « notamment », des pratiques abusives définies à l'article 29, l'amendement affaiblit la portée du texte et la protection recherchée en faveur des petites et moyennes entreprises. En effet, il risque de créer une confusion entre ces dispositions et celles de l'article L. 422-1-2 du code de commerce, qui vise expressément les abus de dépendance économique susceptibles de porter atteinte à la concurrence sur un marché.
En outre, l'amendement relie la notion de dépendance économique à la puissance d'achat ou de vente des seuls produits destinés à la consommation courante des ménages, pour lesquels n'existe aucune définition, ce qui risque de restreindre encore le champ d'application du texte. Dans le cadre restreint ainsi délimité, l'amendement abandonne le dispositif spécifique prévoyant la nullité des contrats ou clauses relatifs à l'obtention rétroactive des ristournes et d'accords de coopération commerciale, ainsi qu'à l'exigence des droits de référencement préalable à toute commande, qui compte parmi les abus les plus manifestes constatés à l'heure actuelle.
En revanche, l'amendement introduit dans un point 2 c) une disposition visant à interdire l'octroi d'avantages tarifaires en contrepartie de l'achat de plusieurs produits d'un fabriquant. Cette disposition constitue une limitation de la politique commerciale des fournisseurs sur un point qui ne donnait pas lieu jusqu'à présent à des abus particuliers mais qui conduit à renforcer la distribution face aux fournisseurs. C'est pourquoi j'émets un avis défavorable.
S'agissant de la possibilité de saisir la justice à la place des petites entreprises, nul ne plaide par procureur, avez-vous dit. Les exceptions sont suffisamment nombreuses dans notre droit pour admettre que, en l'occurrence, si on ne prévoit pas la possibilité de le faire, on se retrouvera devant la situation dans laquelle nous sommes actuellement. En effet, les plus petits fournisseurs, notamment ceux qui n'ont pas de service à leur disposition, hésitent toujours à se plaindre car se plaindre c'est être définitivement exclu des futurs appels d'offres privés. C'est ce que nous disent chaque jour les fournisseurs, en particulier les PME.
Là, on peut avoir besoin d'un procureur, sauf à reconnaître que la situation d'aujourd'hui serait due à un concours de circonstances exceptionnelles, par exemple à la météorologie. On est obligé de dire que si le juge n'est pas sollicité, alors qu'il pourrait l'être compte tenu de tous les éléments que vous avez obtenus au cours de vos auditions comme tout le monde, il y a parfois besoin d'un procureur. C'est pourquoi je suis défavorable à cet amendement.
J'en viens au sous-amendement n° 631. C'est le corollaire de l'opposition du Gouvernement à la rédaction de l'article L. 442-6 du code de commerce proposée par l'amendement n° 207. A partir du moment où j'ai pris cette position, je ne peux pas soutenir non plus le sous-amendement n° 631. Au demeurant, les dispositions présentées n'amélioreraient pas les conditions de recours contre les pratiques en cause. En effet, le juge vérifie bien sûr la réalité de la commande dans toutes ses composantes. Je ne vois donc pas ce que nous aurions collectivement à gagner dans ces bonnes relations économiques.
S'agissant du sous-amendement n° 632, la nouvelle rédaction proposée pour l'article L. 442-6 du code de commerce par l'amendement n° 207 tend à diminuer la protection des fournisseurs. On ne peut donc pas ajouter cette protection. Il me semble préférable de laisser au juge son pouvoir souverain d'appréciation quant à la proportionnalité entre l'avantage et la contrepartie.
Tout à l'heure, vous faisiez appel au droit. En l'occurrence, on est en plein dans l'argumentaire premier de M. le rapporteur lorsqu'on parlait de proportionnalité et on est au coeur de ce sujet. Je ne peux vous suivre sur ce point. Par conséquent, j'émets un avis défavorable sur ce sous-amendement.
Le sous-amendement n° 633 en appelle à la motivation. On peut imaginer qu'un motif soit écrit. Pour l'instant, le fait de ne pas en appeler strictement à la motivation laisse tout pouvoir au juge d'aller loin pour savoir pourquoi il y a eu cette attitude de la part de l'acteur économique visé par la procédure.
En revanche, s'il suffit d'écrire un motif pour qu'il n'y ait pas de poursuites possibles, je pense que ces motifs seront toujours trouvés. S'agissant de l'exemple excellent de cet été, qu'un certain nombre d'entre vous connaissent car ils habitent le sud de notre pays, le motif trouvé était la qualité à l'oeil d'un certain nombre de produits. Donc, je pense que le motif peut être trouvé. Mieux vaut laisser au juge la possibilité de chercher au-delà de ce motif qui serait écrit. Aussi, je ne peux pas être favorable au sous-amendement n° 633 car le dispositif qu'il prévoit est moins fort.
Quant au sous-amendement n° 634, c'est la fixation a priori par de tels accords - je ne reprends pas l'argumentaire que j'ai développé sur le corollaire de l'amendement n° 207 - des modalités d'indemnisation en cas de non-respect des durées de préavis. Cela constituerait un facteur de rigidité préjudiciable aux entreprises victimes, alors même que les juges apprécient souverainement les spécificités de chaque litige. Plus on encadre dans le texte et moins il y aura de recherche de la part du juge. Donc, je m'oppose également au sous-amendement n° 634.
J'en viens au sous-amendement n° 458 rectifié. Prévoir un délai minimal de six mois, c'est, là aussi, une bonne idée. Il s'agit, en fait, de laisser du temps à l'entreprise qui perd le référencement. Mais lorsque le juge s'interrogera sur le dossier, il s'arrêtera à la durée de six mois. Aujourd'hui, s'agissant des affaires que nous avons à connaître, le juge apprécie les faits en tenant compte d'un préavis qui peut aller de trois mois à deux ans. En ce qui concerne les quelques affaires qui sont portées devant lui, le juge va au-delà de six mois. Certes, il va parfois en deça. Je pense qu'il faut lui laisser cette marge d'appréciation. Les contrats ne sont pas tous les mêmes ; les relations ne sont pas toutes les mêmes ; la taille de l'entreprise qui demande un jugement n'est pas toujours la même, sa force non plus. Il faut donc laisser au juge la faculté d'aller au-delà des six mois. Donc, ce qui, au départ, était un bon motif devient, ensuite, préjudiciable à certaines entreprises.
S'agissant du sous-amendement n° 475 rectifié bis, même si le délai a été ramené à trois mois, on est dans la problématique que je viens de décrire. On peut en effet exiger trois mois. Cependant, dans les affaires actuellement examinées, certains juges sont allés jusqu'à deux ans, en estimant que dans différents types de produits, on pouvait aller au-delà. Il ne faut pas encadrer de façon rigide les préavis minimums. Je ne sais pas ce que cela apporte. En effet, à la limite, fixer un plancher c'est partiquement ériger en règle ce qui sera écrit. Nous souhaitions, nous, que ce ne soit pas écrit, pour laisser au juge le maximum d'appréciation. Mais tout cela est évidemment discutable, monsieur Paul Girod.
L'amendement n° 412 vise également à protéger les distributeurs des fournisseurs. En effet, les fournisseurs subordonnent l'importance de certaines de leurs remises au fait que les distributeurs référencent plusieurs de leurs produits. Cette possibilité - vous aviez d'ailleurs repris cet argument - profite à tous les producteurs, petits et grands, et constitue l'un des moyens d'action de ceux-ci face aux distributeurs.
Si de telles pratiques étaient utilisées par un producteur bénéficiant d'une position dominante sur un marché au détriment des autres producteurs, elles pourraient être sanctionnées en tant que pratiques anticoncurrentielles sur le fondement des dispositions du 2° de l'article L. 420-2-1 du code de commerce.
Nous retrouvons toujours ce même cas de figure - j'y reviendrai d'ailleurs tout à l'heure - à savoir que l'idée est bonne mais que nous nous heurtons ensuite à une difficulté.
L'amendement n° 8 rectifié reprend tout d'abord la notion de motif explicite que j'évoquais tout à l'heure. Si le référencement avait un motif et que la distribution peut en trouver un et l'écrire, le juge serait obligé de classer l'affaire. Il s'agit d'un véritable sujet d'inquiétude, contrairement à la volonté manifestée par ceux qui l'ont proposé. De même, la disposition selon laquelle, à défaut d'accord interprofessionnel ou d'arrêté interministériel, le délai de préavis serait de six mois minimum entraînerait une extrême rigidité entre commerçants et entrepreneurs. Dans de trop nombreux cas, elle deviendrait la règle, ce qu'il faut éviter. Je ne reviendrai pas sur les propos que j'ai tenus tout à l'heure sur les affaires jugées.
S'agissant de l'amendement n° 427, sous réserve d'un préavis tenant compte de la relation antérieure, la liberté de mettre fin à une relation commerciale est le pendant du principe de la liberté de contracter. C'est ce qui nous a inspirés. Imposer toujours la motivation du préavis serait sans effet, sauf à définir les critères de recevabilité du motif. Le juge pourrait être conduit, en l'absence de cette motivation, à la provoquer. Après la première affaire jugée suivant la promulgation de cette loi, tout le monde invoquerait un motif. On en revient alors à la même idée que j'exposais tout à l'heure. S'agissant de six mois, je vous renvoie aux propos déjà tenus.
J'en viens à l'amendement n° 406.
Il s'agit toujours de la fixation d'une durée minimale d'un préavis de rupture. Je ne rappellerai pas les dangers que j'ai décrits. On pourrait ajouter que, lorsqu'un grand fabricant de produits à marque propre répond à un appel d'offres pour des produits de marque de distributeur, il bénéficie d'un préavis de six mois alors qu'il ne fait qu'utiliser des capacités de production excédentaires. Cela ne peut qu'être défavorable à des PME qui, elles, consentent des investissements importants pour fabriquer ces produits et qui peuvent avoir besoin d'un à deux ans. Le juge peut estimer que la recherche-développement d'une petite entreprise qui a passé un accord préalable avec la grande distribution conduirait au moins à fabriquer ce produit un ou deux ans pour amortir les frais de recherche-développement, ce qui n'est pas le cas de très grosses entreprises qui ont beaucoup de gammes. Si l'on prévoit six mois, la recherche-développement dans les petites entreprises va sûrement s'en trouver atteinte.
L'amendement n° 9 vise à remettre en cause une disposition de la loi tendant à combattre certains des abus les plus manifestes actuellement rencontrés.
S'agissant de la situation particulière des structures à statut coopératif, qui exercent un rôle de centrales de référencement, l'amendement n'atteindra pas l'objectif escompté dans la mesure où la potentialité de commandes auprès des adhérents coopérateurs ne constitue pas en elle-même une contrepartie réelle.
Nous avons longuement discuté de ce point avec les représentants du secteur coopératif. Laurent Fabius avait rappelé ce fait lors d'une réponse à une question. Ces dispositions ne s'appliquent pas aux coopératives, comme ces dernières l'avaient d'ailleurs reconnu lors d'un entretien. Cet amendement n'a donc pas lieu d'être ; il est justifié par un souci qui est fondé, mais qui a déjà obtenu une réponse. Par conséquent, je demande le retrait de l'amendement n° 9.
M. le président. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 631.
M. Philippe Marini, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Je voudrais rappeler à nos collègues que l'amendement n° 207 vise à qualifier « l'octroi, à titre rétroactif, de remises, de ristournes ou d'accords de coopération commerciale » de comportement abusif, susceptible, par conséquent, d'engager la responsabilité de son auteur et de l'obliger à réparer le préjudice causé.
J'insiste sur le fait que nous considérons également comme abusif le comportement qui vise à « obtenir ou tenter d'obtenir, sous la menace d'une rupture brutale, totale ou partielle, des relations commerciales, des prix, des délais de paiement, des modalités de vente ou des conditions de coopération commerciale manifestement dérogatoires aux conditions générales de vente ».
L'intention des commissions est manifestement de rétablir l'équilibre et l'équité des relations commerciales. Par cette rédaction, nous y arriverions à mon avis au moins aussi bien qu'aux termes du dispositif qui nous a été transmis par l'Assemblée nationale. Sur l'objectif, sur la nécessité d'établir cet équilibre, de moraliser en quelque sorte les pratiques, nous nous rejoignons complètement.
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Hérisson, rapporteur pour avis.
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. Madame le secrétaire d'Etat, j'ai bien entendu votre argumentaire, qui faisait référence au nouveau code de commerce. A cet égard, je tiens à rappeler les difficultés auxquelles nous avons été confrontés pour l'examen de ce texte : entre la première lecture à l'Assemblée nationale de ce projet de loi dont nombre de dispositions proposaient des modifications à l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence et la première lecture au Sénat, le nouveau code de commerce a été publié au Journal officiel, abrogeant ladite ordonnance et en codifiant les dispositions.
Vous avez argumenté tout à l'heure, madame le secrétaire d'Etat, en prenant comme référence le nouveau code de commerce que nous avons travaillé « en cavalier », si je puis dire.
Pour l'avenir, je demande instamment au Gouvernement, en cas de dispositions nouvelles prêtes à être promulguées, de ne plus nous placer dans la situation extrêmement désagréable qui a été la nôtre : il nous a fallu, en quarante-huit heures, reprendre sous forme de sous-amendements des amendements qui avaient été préparés et avaient fait l'objet de commentaires de la part des personnes que nous avions auditionnées alors que le nouveau code de commerce n'avait pas encore été publié.
Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat. Monsieur le rapporteur pour avis, je vous donne acte de votre remarque. Il aurait été préférable que ce texte soit présenté avec les deux références, afin de nous éviter des erreurs.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 631, repoussé par le Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 632, repoussé par le Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Monsieur Le Cam, le sous-amendement n° 458 rectifié est-il maintenu ?
M. Gérard Le Cam, Je le retire, monsieur le président.
M. le président. Le sous-amendement n° 458 rectifié est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 633, repoussé par le Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(Le sous-amendemnt est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 634, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 475 rectifié bis .
M. Paul Girod. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. J'étais le premier signataire de l'amendement n° 475, que j'avais déposé avec trois de mes collègues. Je tiens à indiquer que la transformation de l'amendement en sous-amendement à l'amendement n° 207 engage bien entendu MM. Joly, Mouly et Soucaret et qu'il ne s'agit pas seulement d'une opération Paul Girod !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 475 rectifié bis, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 207, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 29 est ainsi rédigé, et les amendements n°s 639, 412, 8 rectifié, 427, 406 et 9 n'ont plus d'objet.
Les services feront la coordination entre l'amendement n° 207, qui vient d'être adopté, et l'amendement n° 21 du Gouvernement, qui a été adopté à l'article 28 ter.

Article additionnel après l'article 29