SEANCE DU 19 OCTOBRE 2000


M. le président. La parole est à M. Fournier.
M. Bernard Fournier. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adressait à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.
La politique agricole que le Gouvernement conduit a profondément déçu le monde paysan. Depuis trois ans, nous assistons à une chute vertigineuse du nombre d'implantations de jeunes agriculteurs. Dans le même temps, vous refusez toute baisse de charges sociales ou fiscales et, ignorant les difficultés des agriculteurs, vous cédez aux pressions environnementalistes en créant de nouveaux impôts. Je pense notamment à la TGAP, la taxe générale sur les activités polluantes.
S'agissant du contrat territorial d'exploitation, les paysans se sont vu, si je puis m'exprimer ainsi, vendre le miroir aux alouettes...
M. René-Pierre Signé. C'est faux !
M. Bernard Fournier. Je rappelle que, pour 2000, le Premier ministre avait annoncé la signature de 50 000 CTE. Or, à ce jour, 1 300 contrats seulement ont été effectivement signés, soit à peine 2,5 % de l'objectif que vous vous étiez assigné. La montagne a donc accouché d'une souris !
Malgré vos efforts pour faire signer des contrats collectifs par les chambres d'agriculture et les coopératives, aucune évolution positive ne se dessine, semble-t-il.
Où sont donc passés les contrats territoriaux d'exploitation ?
M. Alain Gournac. A la trappe !
M. Bernard Fournier. En effet, cet échec patent pose un problème. Le financement des CTE s'intègre dans le plan de développement rural français approuvé cet été par la Commission. Il prévoit 950 millions de francs de dotation budgétaire, ainsi qu'une somme équivalente de cofinancement, résultant de la modulation que vous avez mise en place et provenant d'un prélèvement sur les aides directes.
Or, malgré l'échec des CTE, la modulation reste effective : le prélèvement est acquis mais n'est pas redistribué. Ainsi, un milliard de francs vont être ponctionnés sans que ces fonds soient utilisés au titre des CTE ; faut-il le rappeler, c'est un point du revenu agricole qui part en fumée !
Peut-on indiquer à la représentation nationale la destination de la « cagnotte » de un milliard que le ministère de l'agriculture s'est constituée aux dépens des agriculteurs ? (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie, tout d'abord, de bien vouloir excuser M. Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche, qui participe actuellement à une conférence européenne organisée à Clermont-Ferrand par la Mutualité sociale agricole et consacrée à l'exclusion en milieu rural.
Les contrats territoriaux d'exploitation sont plus nombreux que vous ne l'avez indiqué, monsieur le sénateur : à ce jour, 2 600 contrats territoriaux d'exploitation ont été agréés et 1 882 ont été signés. (Rires sur les travées du RPR.)
M. Alain Gournac. On reste loin du compte !
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Mais une démarche a également été engagée au niveau collectif : 753 projets ont été validés, qui concernent plus de 60 000 agriculteurs.
Certes, la montée est plus lente...
M. Alain Gournac. Très lente !
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. ... que ce qui avait été prévu au départ, mais M. Glavany a souhaité que le montage des dossiers prenne en compte la situation de chaque exploitation. Je ne doute pas que, malgré l'opposition de certaines organisations agricoles, on observera un accroissement du nombre de contrats territoriaux d'exploitation dans les prochains mois.
Vous avez évoqué, par ailleurs, la modulation des aides. Celle-ci ne concerne que les agriculteurs qui reçoivent plus de 200 000 francs d'aides directes au titre de la politique agricole commune. Seuls 12 000 agriculteurs, ceux qui reçoivent le plus d'aides et qui ont les plus gros revenus, subiront une diminution de ces aides supérieure à 5 %.
Mais il n'y a pas de cagnotte, monsieur le sénateur ! (Exclamations sur les travées du RPR.) Les sommes qui proviennent de la modulation des aides sont prélevées dans un souci de justice et de redistribution ; elles sont reversées dans l'enveloppe qui sert à financer les contrats territoriaux d'exploitation. De plus, pour chaque franc venant de la politique agricole commune, l'Etat met, lui aussi, un franc.
Voilà donc des sommes qui sont destinées aux petits agriculteurs et qui leur parviendront bien. La volonté du Gouvernement est d'aider toute l'agriculture et de favoriser l'installation des jeunes agriculteurs. Si, dans ce dernier domaine, les sommes n'ont pas été intégralement consommées, c'est aussi - et c'est un problème général, dont les chambres d'agriculture et les syndicats se font d'ailleurs l'écho - en raison de la difficulté à trouver des candidats à l'installation. (Applaudissements sur les travées socialistes. - Mme Luc applaudit également.)

REVENDICATIONS DES BURALISTES