SEANCE DU 16 NOVEMBRE 2000


M. le président. « Art. 25. - Les 3°, 3° bis et 4° de l'article L. 135-6 du code de la sécurité sociale sont remplacés par les 3° à 7° ainsi rédigés :
« 3° Les montants résultant de l'application de l'arti- cle L. 251-6-1 ;
« 4° Une fraction égale à 50 % du produit des prélèvements visés aux articles L. 245-14 à L. 245-16 ;
« 5° Les versements du compte d'affectation institué par le II de l'article 23 de la loi de finances pour 2001 n° du ;
« 6° Toute autre ressource affectée au fonds de réserve en vertu de dispositions législatives ;
« 7° Le produit des placements effectués au titre du fonds de réserve. »
Sur cet article, je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 20 rectifié, présenté par MM. Vasselle et Descours, au nom de la commission des affaires sociales, tend à rédiger comme suit cet article :
« I. - Avant l'article L. 135-6 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 135-5-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 135-5-1. - Il est créé un établissement public de l'Etat à caractère administratif dénommé fonds de réserve pour les retraites. Sa mission est de gérer les sommes qui lui sont affectées afin de constituer des réserves destinées à consolider le financement des régimes obligatoires de base de retraite.
« Ce fonds est doté d'un comité de surveillance, chargé de déterminer les orientations générales de la politique de placement des actifs du fonds, en respectant les objectifs et l'horizon d'utilisation de ses ressources, et d'un directoire responsable, devant le comité de surveillance, de la mise en oeuvre de cette politique.
« Chaque année avant le 30 juin, le comité de surveillance remet au Parlement un rapport détaillé sur les orientations de gestion du fonds et les résultats obtenus. Ce rapport rend compte notamment des appels d'offres auxquels il a été procédé pour l'attribution des mandats de gestion administrative ou financière, ainsi que des conditions et modalités d'exercice des droits de vote attachés aux titres en capital. Ce rapport est rendu public.
« Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application de cet article. »
« II. - Le IV de l'article 2 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 (n° 98-1194 du 23 décembre 1998) est abrogé à l'exception de son 6°.
« III. - L'article L. 135-6 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
« 1° Dans le premier alinéa, les mots "affectées aux missions définies au deuxième alinéa de l'article L. 135-1" sont supprimés.
« 2° Dans le troisième alinéa (2°), les mots : "de la première section" sont remplacés par les mots : "du fonds mentionné à l'article L. 135-1". »
L'amendement n° 107 rectifié, présenté par M. Domeizel et les membres du groupe socialiste et apparentés, vise à rédiger comme suit l'article 25 :
« I. - Après l'article L. 135-5, il est inséré, dans le code de la sécurité sociale, un chapitre additionnel ainsi rédigé :
« Chapitre...
« Fonds de réserve des retraites ».
« II. - L'article L. 135-6 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Art. L. 135-6. - Il est créé un fonds dont la mission est de gérer les sommes qui lui sont affectées afin de constituer les réserves destinées à contribuer à la pérennité des régimes obligatoires d'assurance vieillesse.
« Ce fonds, dénommé "Fonds de réserve des retraites", est un établissement public national à caractère administratif. Il est géré par la Caisse des dépôts et consignations sous l'autorité et le contrôle d'un conseil d'administration qui comprend des représentants de l'Etat, des membres du Parlement et des représentants des organisations syndicales de personnels et des organisations d'employeurs les plus représentatives au plan national, ainsi que des personnalités qualifiées.
« La durée du mandat des membres du conseil d'administration est fixée à six ans, renouvelable une fois.
« Le conseil d'administration est présidé par l'un des représentants de l'Etat.
« Un décret en Conseil d'Etat précise la composition du conseil d'administration ainsi que les conditions d'exercice du mandat de gestion confié à la Caisse des dépôts et consignations et les conditions de fonctionnement du fonds.
« Le fonds est représenté en justice et dans tous les actes de la vie civile par le directeur général de la Caisse des dépôts et consignations.
« Le Fonds de réserve des retraites est exonéré de l'impôt sur les sociétés prévu au 5 de l'article 206 du code général des impôts.
« Le transfert des biens, droits et obligations du fonds visé à l'article L. 135-1 au fonds visé ci-dessus est effectué à titre gratuit et ne donne lieu à aucune indemnité ou perception de droits ou de taxes, ni à aucun versement de salaires ou honoraires au profit des agents de l'Etat. »
« III. - Après l'article L. 135-6, il est inséré, dans le code de la sécurité sociale, trois articles ainsi rédigés :
« Art. L. 135-7. - Les ressources du fonds sont constituées par :
« 1° Une fraction, fixée par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget, du solde du produit de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés visé au deuxième alinéa de l'article L. 651-2-1 ;
« 2° Tout ou partie du résultat excédentaire du Fonds de solidarité vieillesse mentionné à l'article L. 135-1, dans des conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé du budget ;
« 3° Le cas échéant, en cours d'exercice, un montant représentatif d'une fraction de l'excédent prévisionnel de l'exercice excédentaire du Fonds de solidarité vieillesse mentionné à l'article L. 135-1 tel que présenté à la Commission des comptes de la sécurité sociale lors de sa réunion du second semestre de ce même exercice ; un arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget détermine les montants à verser ainsi que les dates de versement ;
« 4° Les montants résultant de l'application de l'article L. 251-6-1 ;
« 5° Une fraction égale à 50 % du produit des prélèvements visés aux articles L. 245-14 à L. 245-16 ;
« 6° Les versements du compte d'affectation institué par le II de l'article 23 de la loi de finances pour 2001 (n° du décembre 2000) ;
« 7° Toute autre ressource affectée au Fonds de réserve pour les retraites ;
« 8° Le produit des placements effectués par le fonds.
« Art. L. 135-8. - Les dépenses du fonds sont constituées par :
« 1° A partir de 2020, les versements au profit des régimes obligatoires d'assurance vieillesse visés à l'article L. 222-1 et aux 1° et 2° de l'article L. 621-3, dans des conditions prévues par les lois de financement du code de la sécurité sociale après avis du conseil d'orientation des retraites institué par le décret n° 2000-393 du 10 mai 2000.
« 2° Le remboursement annuel à la Caisse des dépôts et consignations des frais exposés par celle-ci pour la gestion du fonds.
« L'excédent des recettes sur les dépenses est affecté aux réserves mentionnées à l'article L. 135-6.
« A partir de 2020, les réserves constituées peuvent participer à l'équilibre du fonds en complément de ses recettes.
« Art. L. 135-9. - Le fonds est soumis au contrôle de deux commissaires aux comptes nommés par le conseil d'administration. Les commissaires aux comptes sont choisis sur la liste mentionnée à l'article L. 225-219 du code de commerce et exercent leurs fonctions dans les conditions prévues par cette loi, sous réserve des adaptations rendues nécessaires par le statut juridique du fonds et qui sont fixées par décret en Conseil d'Etat. Les dispositions des articles L. 242-25 et L. 242-26 du code de commerce sont applicables.
« Dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, le fonds fait l'objet d'audits actuariels périodiques mis en oeuvre par le conseil d'administration. »
« II. - Le code de la sécurité sociale est modifié comme suit :
« 1. Les deuxième et quatrième alinéas de l'article L. 135-1 sont supprimés ;
« 2. Au troisième alinéa du même article, les mots : "dans les missions mentionnées aux premier et deuxième alinéas" sont supprimés ;
« 3. A la fin du premier alinéa de l'article L. 251-6-1, les mots : "au Fonds de réserve pour les retraites mentionné au deuxième alinéa de l'article L. 135-1" sont remplacés par les mots : "au Fonds de réserve pour les retraites mentionné à l'article L. 135-6" ;
« 4. Dans le premier alinéa de l'article L. 651-1, après les mots : "Fonds de solidarité vieillesse mentionné à l'article L. 135-1" sont insérés les mots : "et du Fonds de réserve pour les retraites mentionné à l'article L. 135-6" ;
« 5. L'article L. 651-2-1 est modifié comme suit :
« a) Le deuxième alinéa est ainsi rédigé : "Tout ou partie du solde du produit de la contribution résultant de l'application des dispositions de l'alinéa précédent est versé soit au Fonds de solidarité vieillesse mentionné à l'article L. 135-1, soit au Fonds de réserve pour les retraites mentionné à l'article L. 135-6" ;
« b) Dans le troisième alinéa, les mots : "et le Fonds de solidarité vieillesse" sont remplacés par les mots : "le Fonds de solidarité vieillesse et le Fonds de réserve pour les retraites" ;
« 6. A la fin du second alinéa de l'article 26 de la loi n° 99-532 du 25 juin 1999 relative à l'épargne et à la sécurité financière, les mots : "fonds de réserve géré par le Fonds de solidarité vieillesse en application de l'article L. 135-1 du code de la sécurité sociale" sont remplacés par les mots : "Fonds de réserve pour les retraites mentionné à l'article L. 135-6 du code de la sécurité sociale".
« III. - 1. Les dispositions du présent article entrent en vigueur au 1er janvier 2001.
« 2. A titre transitoire et jusqu'à une date fixée par décret et qui ne peut être postérieure au 31 décembre 2001 :
« - les produits mentionnés à l'article L. 135-7 sont centralisés et placés par le fonds institué à l'article L. 135-1 ;
« - les sommes gérées par la deuxième section du Fonds institué à l'article L. 135-1 au 31 décembre 2000 demeurent gérées par ledit Fonds.
« Le Fonds de solidarité vieillesse mentionné à l'article L. 135-1 du code de la sécurité sociale suit l'ensemble de ces opérations dans les comptes spécifiques ouverts au titre de la deuxième section du Fonds, maintenus à cet effet à titre transitoire, selon les règles en vigueur au 31 décembre 2000. »
La parole est à M. Vasselle, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 20 rectifié.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Cet amendement porte sur le fonds de réserve.
Institué voilà maintenant deux ans, ce fonds entre dans sa troisième année. Depuis sa création, aucun dispositif n'a été mis en place pour assurer la gestion de ses ressources. Comment seront-elles placées ? Quels types de produits financiers dynamiques permettraient à ce fonds d'atteindre les 1 000 milliards de francs annoncés par le Gouvernement ?
Actuellement, la gestion est assurée par le comité de gestion du Fonds de solidarité vieillesse.
Avec l'amendement n° 20 rectifié, nous proposons une nouvelle rédaction de l'article 25 du projet de loi.
Cet amendement a pour premier effet de supprimer l'affectation au fonds de réserve du produit des licences UMTS. En plein accord avec la commission des finances, dont l'amendement est ainsi satisfait, nous préférons « combler davantage le trou de la dette publique » plutôt que de faire un « tas » à côté.
Mais cet amendement a pour principal objet d'esquisser un statut pour le fonds de réserve.
Nous partons du constat que le Fonds de réserve des retraites constitue la seule mesure proposée par le Gouvernement pour garantir demain le paiement des retraites.
Il y a, bien sûr, le Conseil d'orientation des retraites. Ses observations sont très certainement inestimables, mais elles ne sont, en revanche, pas convertibles en argent comptant pouvant assurer le paiement des pensions.
Or ce fonds de réserve ne constitue aujourd'hui qu'une section au sein du Fonds de solidarité vieillesse. Les conséquences que cette situation implique pour sa gestion ne sont pas minces.
Je vous rappelle que l'équipe du FSV est composée de moins de dix personnes et que ses instruments de gestion sont limités à des obligations d'Etat.
Un fonds appelé, en principe, selon le Gouvernement, à gérer à terme 1 000 milliards de francs doit à l'évidence bénéficier d'un statut qui assure à la fois son efficacité et sa transparence.
Nous ne sommes pas les premiers à en faire le constat. Nous ne sommes pas non plus les premiers à faire des propositions. Ainsi M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis de la commission des finances de l'Assemblée nationale, a suivi le même cheminement que nous. Nous reprenons ses propositions et nous les améliorons.
Que voulons-nous ?
En premier lieu, il n'est pas concevable que ce fonds ne soit pas placé sous l'étroit contrôle du Parlement ; c'est la première exigence.
En second lieu, ce fonds de réserve doit offrir toutes les garanties, tant pour la gestion administrative que pour la gestion financière.
Le fonds doit, selon les prévisions gouvernementales, générer près de 300 milliards de francs d'intérêts. Cette espérance n'a de sens que si elle est accompagnée d'une gestion dynamique des fonds. Les obligations ne permettront pas, seules, de cumuler 300 milliards de francs de produits financiers. Cela signifie que des mandats de gestion doivent être attribués périodiquement.
D'aucuns trouveront qu'il s'agit là de procédures bien inutiles et coûteuses, d'autant que certains se disent prêts à assumer telle ou telle partie de la gestion du fonds à leurs frais. Une telle vision des choses m'apparaît erronée, car elle repose sur l'idée que ce qui est gratuit n'a pas de coût. Or, mes chers collègues, en la matière, nous prenons des décisions importantes. En effet, le fonds de réserve, par l'usage qu'il fera des droits de vote attachés aux parts sociales qu'il détiendra dans des sociétés, possédera un pouvoir de fait extraordinaire.
La commission des affaires sociales pense qu'il est de sa responsabilité de s'assurer que les intérêts du fonds seront ceux des retraités présents et futurs, et qu'ils ne seront pas détournés à d'autres fins.
C'est en prenant en compte tous ces soucis que nous vous proposons la création d'un établissement public dont les organes rendront, chaque année, un rapport détaillé au Parlement, rapport qui sera rendu public, car tous, au premier rang desquels se trouvent les partenaires sociaux, sont concernés par le fonds de réserve.
Ainsi seront assurées l'efficacité financière et la transparence juridique des sommes affectées à ce fonds. Telles sont, mes chers collègues, les conclusions de la commission des affaires sociales sur l'article 25 du présent projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Domeizel, pour présenter l'amendement n° 107 rectifié.
M. Claude Domeizel. Vous connaissez la position du groupe socialiste sur ce fonds de réserve. Depuis sa création, en 1998, nous posons les mêmes questions : qui va gérer le fonds ? Comment vont être placées ces sommes considérables ? Après deux ans d'existence, alors que les sommes affectées à ce fonds vont atteindre 50 milliards de francs, il nous paraît temps d'y répondre.
Nous attendons beaucoup de ce fonds de réserve, qui est l'un des piliers de la réforme que le Gouvernement met en place avec détermination et méthode. Ce sera, à partir de 2020, un fonds de lissage.
Compte tenu des enjeux du Fonds de réserve des retraites et des sommes considérables qu'il devra gérer, il est indispensable, à notre avis, de créer un établissement public placé sous l'autorité et le contrôle d'un conseil d'administration paritaire.
Cet amendement réécrit donc l'article 25. Il a pour objet de créer cet établissement public et d'en prévoir les modalités de fonctionnement. Il fixe également les ressources du fonds de réserve et organise les conditions du transfert de ses avoirs actuellement consignés dans le fonds de solidarité vieillesse. Il prévoit la période transitoire de ce transfert, dont nous proposons qu'il soit terminé le 31 décembre 2001.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 107 rectifié ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. L'amendement n° 107 rectifié est intéressant puisqu'il a le même objectif que l'amendement n° 20 rectifié de la commission des affaires sociales. Cependant, nous avons l'illusion de penser que le nôtre est meilleur, à la fois dans sa rédaction et dans son contenu. (Exclamations sur les travées socialistes.) Cela ne vous surprend pas !
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Il est moins long !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Effectivement !
Je vois à son sourire que M. Fischer est plus disposé à voter le nôtre que le vôtre car il tient, comme nous, à ce que le Parlement soit complètement associé à la gestion du dispositif et puisse en assurer la surveillance.
Nous avons le souci de veiller à une véritable indépendance et à la compétence des gestionnaires. En outre, il est important que la transparence de la gestion administrative de ce fonds soit assurée grâce à une attribution périodique par appel d'offres.
Je ne suis pas certain qu'il soit bon de confier a priori la gestion de ce fonds à la Caisse des dépôts et consignations, non pas que je mette en doute la compétence de son personnel, mais parce qu'il paraît souhaitable, pour assurer une meilleure dynamique et générer des produits financiers plus importants, de procéder par appels à la concurrence, car il existe sur le marché des groupements ou des financiers qui pourront certainement mieux valoriser le placement de ces fonds.
Enfin, nous proposons d'assurer également la transparence de la gestion financière en recourant à une gestion administrative indépendante et à la passation d'appels d'offres pour l'attribution des mandats de gestion. Il en est de même en ce qui concerne l'usage des droits de vote attachés aux parts sociales que le fonds détiendra dans les sociétés et sur lesquels le Parlement est amené à exercer un contrôle tout particulier.
Voilà les raisons pour lesquelles, mes chers collègues, nous préférons notre rédaction à celle de l'amendement n° 107 rectifié. Je ne doute pas que M. Domeizel l'aura compris et qu'il préférera, dès lors, retirer son amendement pour se rallier à celui de la commission.
M. Guy Fischer. On aura tout entendu !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements 20 rectifié et 107 rectifié ?
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Nous sommes là devant une conjonction de volontés sénatoriales !
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. De propositions !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. En effet, mais tout de même fondées sur une volonté.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Tout à fait !
On nous reproche assez de ne pas faire de propositions !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Votre amendement tend à rendre autonome le fonds de réserve pour les retraites en instituant un établissement public administratif spécifique dédié à cette mission. Nous comprenons votre volonté de créer une telle structure.
Le Gouvernement partage, vous le savez, votre souhait en matière de compétence des gestionnaires de ce fonds, de transparence dans la gestion et d'information légitime et complète du Parlement. Le Premier ministre l'a d'ailleurs annoncé, au mois de mars dernier, lorsqu'il a présenté les mesures relatives à l'avenir des retraites.
Vous le savez aussi, une mesure de ce type avait été présentée par le Gouvernement dans l'avant-projet de loi dont il avait saisi le Conseil d'Etat et les caisses de sécurité sociale. Toutefois, à la suite des observations du Conseil d'Etat, le Gouvernement a préféré retirer cette disposition afin de mieux en expertiser les contours et de mener une concertation large sur ce sujet.
La question est en effet complexe et vos interventions successives, messieurs Vasselle et Domeizel, montrent bien la complexité du dispositif à mettre en place et l'intérêt qu'il y a à bien approfondir la réflexion sur le sujet.
Le mode de gestion et l'organisation de la structure doivent être mûrement réfléchis pour assurer la transparence du dispositif et la délégation de gestion confiée à des professionnels. Les modalités d'association des partenaires sociaux doivent également être définies. Compte tenu de leur complexité et de l'intérêt qu'il y a à bien préciser les responsabilités des uns et des autres, les modalités d'association des partenaires doivent être également vraiment précisées.
Le Gouvernement s'engage donc à conduire ces travaux dans les meilleurs délais et à introduire les dispositions législatives nécessaires dans le projet de loi de modernisation sociale qui sera présenté au Parlement au mois de janvier prochain. Cela nous laisse deux mois pour vous associer à cette réflexion.
Dans cette attente, vous pouvez être rassurés, car le FSV est placé dans de bonnes mains. En effet, il est présidé par M. Michel Laroque - fils de Pierre Laroque, l'inventeur de la sécurité sociale - qui aura à coeur de rendre transparente la gestion de ce fonds.
M. Lucien Neuwirth. Il y a des dynasties qui se font ! On revient à l'Ancien Régime !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Non, monsieur le sénateur, ce n'est pas une dynastie ! « Bon sang ne saurait mentir ». L'information selon laquelle un inspecteur général des affaires sociales préside aujourd'hui le FSV ne vise qu'à vous rassurer sur la transparence et sur l'efficacité de cette gestion.
Je vous demande, par conséquent, de bien vouloir retirer cet amendement, aussi bien vous, monsieur le rapporteur, que vous, monsieur Domeizel, afin de nous laisser le temps d'affiner la réflexion qui servira de base à la proposition que nous vous présenterons dans les meilleures conditions au mois de janvier prochain.
M. le président. Monsieur Domeizel, maintenez-vous l'amendement n° 107 rectifié ?
M. Claude Domeizel. Madame la secrétaire d'Etat, j'ai tout particulièrement retenu de votre argumentation que vous vous êtes vous-même engagée dans cette voie, mais que l'avis du Conseil d'Etat méritant réflexion, vous aviez initié une concertation.
Vous comprendrez qu'après avoir réclamé ce dispositif en 1998, après l'avoir redemandé en 1999, je souhaitais vivement qu'il soit inscrit dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001. Je conçois cependant qu'il faille se donner le temps.
J'ai noté à cet égard que vous aviez promis d'inscrire ce texte à l'ordre du jour du Parlement le plus rapidement possible. Je retire donc l'amendement.
M. le président. L'amendement n° 107 rectifié est retiré.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Tout en remerciant M. Domeizel d'avoir retiré son amendement, je voudrais dire ce qu'il n'a pas osé dire lui-même, c'est-à-dire qu'il est convaincu que la rédaction de l'amendement de la commission des affaires sociales est celle qui correspond le mieux à l'attente de tous.
M. Claude Domeizel. Pas du tout !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Quoi qu'il en soit, je crois qu'on a trop attendu.
Madame le secrétaire d'Etat, trois ans, cela suffit, et il est important que nous, majorité sénatoriale, adressions un message fort à l'opinion publique, que nous fassions part de notre détermination et de notre volonté d'avancer sur la réforme des retraites.
Nous ne pouvons pas attendre plus longtemps sur cette question du fonds de réserve. Nous maintenons donc l'amendement n° 20 rectifié.
M. Lucien Neuwirth. Supprimer l'article 25, c'est plus simple !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 20 rectifié.
M. Guy Fischer. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Nous sommes au coeur d'un débat que tout le monde considère certainement comme très important. Mais notre collègue M. Vasselle, avec la majorité de la commission, avance à visage masqué. (Exclamations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.) Car si Mme la secrétaire d'Etat a demandé de retirer les deux amendements, il est clair que, pour notre part, nous avions fait notre choix : entre M. Domeizel et M. Vasselle, nous avions choisi M. Domeizel ! (Sourires.)
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Cela m'étonne !
M. Jean Chérioux. Vous aviez choisi par affinité ou par conviction ?
M. Guy Fischer. Par conviction !
Ces deux amendements relèvent en effet de deux conceptions diamétralement opposées de la gestion du fonds de réserve pour les retraites.
Pour ce qui concerne l'amendement n° 20 rectifié, je suis contraint de dire que sa lecture m'a quelque peu étonné. La commission des affaires sociales propose en effet, ni plus ni moins, de procéder à la privatisation pure et simple de la gestion du fonds de réserve en le plaçant délibérément dans les nébuleuses de la sphère financière et boursière. Les sommes en jeu sont tellement importantes !
Vous avez pu constater depuis quarante-huit heures que nous ne faisions pas de concession et, lorsque le Gouvernement annonce que le fonds sera alimenté par 300 milliards de francs, nous nous interrogeons !
On notera en effet avec le plus grand intérêt que la mission essentielle des organes de gestion du fonds consistera à valoriser au mieux les sommes accumulées - et c'est là que nous nous interrogeons et que nous nous posons en sentinelle, comme je l'ai dit lors de la discussion générale - quitte à gager son intervention sur des montages financiers et boursiers aléatoires incertains, ce qui est sans doute la meilleure façon de porter atteinte à la raison d'être du fonds, à savoir la consolidation des régimes obligatoires de retraite.
Nous attendons avec beaucoup d'intérêt de voir comment se répartira le placement entre obligations et actions. Cela est certainement au coeur du débat que nous avons en ce moment.
Certes, nous anticipons par rapport à ce que proposera le Gouvernement dans quelques semaines ou dans quelques mois, mais nous attirons solennellement son attention sur ces problèmes. Devra-t-on un jour regretter l'assèchement du fonds dans une opération du style Crédit lyonnais parce que quelques dizaines de milliards de francs auraient été gaspillés.
Je crois qu'il n'en sera pas ainsi, mais nous tenons à faire part aujourd'hui de nos préoccupations. Il s'agit de préoccupations assez éloignées, quant au fond, de ce que doit être une loi de financement de la sécurité sociale, à moins de considérer une bonne fois pour toutes que l'argent de la sécurité sociale puisse être aventuré sur les marchés.
M. Domeizel a retiré son amendement. Je le regrette parce qu'il s'appuyait sur le concret, ce qui ne nous étonne pas parce que nous connaissons l'enracinement de notre collègue dans la réalité de son département et ses compétences en tant que président de la CNRACL.
Avec cet amendement, nous aurions donné au fonds de réserve pour les retraites une valeur juridique, voire une personnalité juridique en en confiant clairement la gestion à l'établissement public financier par excellence, la Caisse des dépôts et consignations. Là, nous sommes d'accord.
Il n'aura échappé à personne qu'il est préférable pour nous que cette activité de gestion soit effectuée sous mandat et non comprise dans le périmètre de la holding CDC finances, constituée à partir de la direction des activités bancaires et financières.
Je pose le problème dès aujourd'hui. Selon vous, la gestion sous mandat du fonds de réserve est acceptable dès lors qu'elle est proche de celle qui a été mise en oeuvre pour l'IRCANTEC ou la CNRACL. Avec ce dossier, nous sommes de toute évidence au coeur de la question de l'avenir du système de retraite par répartition.
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. M. Fischer a posé le vrai problème, à savoir le problème de la gestion. A l'évidence, il s'agit de tous les fonds qui vont servir à garantir les retraites de nos enfants et de nos petits-enfants. Cependant la réponse qu'il donne n'est pas la bonne. Croire que la garantie est plus grande parce que l'on prend comme gestionnaire un établissement public n'est pas une bonne solution.
Il a évoqué l'affaire du Crédit lyonnais. C'était une société nationalisée. Il est mal tombé !
Il a parlé aussi d'éviter des montages boursiers. Il a raison. Il ne faut pas de montage, il faut une gestion comme celle des SICAV, des fonds communs de placement. Ainsi, on ne risque pas de s'aventurer dans des opérations hasardeuses.
Comme on est pressé, madame le secrétaire d'Etat, il n'y a pas besoin de chercher très longtemps, ni même d'avoir recours à la grande sagesse du fils de Pierre Laroque, qui a été mon professeur à Sciences-Po, il suffit de transposer des modèles qui existent déjà.
Il y a la participation, les plans d'épargne d'entreprise qui sont gérés par des fonds communs de placement, il existe des modes de fonctionnement - en particulier le système des conseils de surveillance qui permet aux partenaires sociaux d'examiner comment fonctionne la gestion - et il y a aussi des solutions très simples et souples en ce qui concerne le recours à la gestion de tel ou tel organisme.
Ce qui est certain, en tout cas, c'est que s'en remettre aveuglément à la Caisse des dépôts et consignations - pour laquelle j'ai beaucoup de respect - n'est pas une bonne solution. Il faut prendre les meilleurs. Pour cela, il faut recourir, comme l'a très justement dit M. Vasselle, à des appels d'offres, mais en les renouvelant.
Il ne faut pas faire confiance indéfiniment à tel ou tel : il peut se tromper, on peut s'en apercevoir, il faut, par conséquent, une gestion souple.
Encore une fois, madame le secrétaire d'Etat, je vous renvoie à votre collègue qui s'occupe de ces questions - c'est sans doute le ministre des finances - pour qu'il vous explique comment fonctionnent les fonds communs de placement d'entreprise, ceux qui gèrent les plans d'entreprise. Vous verrez que des possibilités existent pour assurer une bonne gestion.
M. Claude Domeizel. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Domeizel.
M. Claude Domeizel. Je voudrais d'abord confirmer que si j'ai retiré mon amendement, ce n'est pas du tout à la demande de la commission (sourires) , c'est parce que Mme le secrétaire d'Etat m'a donné les explications qui m'ont permis de le faire. Le groupe socialiste votera contre l'amendement de la commission pour deux raisons.
Tout d'abord, les auteurs de cet amendement auraient dû, comme moi-même, accéder à la demande de retrait de Mme le secrétaire d'Etat.
Ensuite, les dispositions qu'ils proposent sont très différentes des nôtres.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 20 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 25 est ainsi rédigé.

Article 26