SEANCE DU 16 NOVEMBRE 2000


M. le président. « Art. 37. - I. - Aux interventions définies à l'article 1er de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975 relative aux institutions sociales et médico-sociales s'ajoute l'hébergement, à titre temporaire, des personnes en situation de précarité nécessitant un traitement et un suivi médical, psychologique et social, infectées par le virus de l'immunodéficience humaine, ou atteintes par des maladies chroniques sévères.
« II. - Les appartements de coordination thérapeutique assurant les missions définies au I du présent article relèvent des dispositions de l'article 3 de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975 précitée.
« III. - Les dépenses de fonctionnement des appartements de coordination thérapeutique mentionnés au II du présent article sont prises en charge par les régimes de l'assurance maladie, sans préjudice d'une participation des collectivités locales.
« Les modalités d'application des I, II et III du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat.
« IV. - Les gestionnaires d'appartements de coordination thérapeutique bénéficiaires d'un agrément sur le fondement de l'article L. 162-31 du code de la sécurité sociale à la date de publication de la présente loi disposent, à compter de cette même date, d'un délai d'un an pour solliciter l'autorisation mentionnée à l'article 9 de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975 précitée et selon la procédure fixée par l'article 3 de la même loi. L'agrément devient caduc si cette autorisation n'a pas été sollicitée à l'expiration de ce délai.
« V. - Les centres mentionnés au 9° de l'article 3 de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975 précitée peuvent assurer leurs missions dans les centres mentionnés à l'article 185 du code de la famille et de l'aide sociale. »
Par amendement n° 28 rectifié, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose de rédiger comme suit le I de cet article :
« I. - L'article 1er de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975 relative aux institutions sociales et médico-sociales est complété par un 7° ainsi rédigé :
« 7° Assurent l'hébergement, à titre temporaire, des personnes en situation de précarité nécessitant un traitement et un suivi médical, psychologique et social, infectées par le virus de l'immunodéficience humaine, ou atteintes par des maladies chroniques sévères. »
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Cet amendement, tout comme d'ailleurs l'amendement n° 29, que nous allons examiner dans un instant, est de nature rédactionnelle.
Je n'entends pas donner de leçon en la matière, je répéterai simplement ce qu'on m'a dit sur ce point : il convient de modifier directement le contenu de la loi du 30 juin 1975, quand bien même il serait envisagé d'insérer prochainement cette disposition dans un nouveau code.
Je rappelle que le législateur, lorsqu'il élabore une loi, ne doit tenir compte que des textes existants et non pas des projets de code - en l'occurrence le code de la famille et de l'action sociale - élaborés par une instance non élue, ou des projets de loi déposés par le Gouvernement mais non encore adoptés.
Cela étant, il ne me semble pas nécessaire de débattre pendant trois heures de cette question. Si vous n'êtes pas d'accord, j'y renoncerai, mais j'estime qu'il s'agit d'une erreur législative qu'il nous faut corriger.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés. Nous n'avons pas la même façon d'appréhender les textes que M. le rapporteur, puisque le Conseil d'Etat nous a recommandé de ne pas écrire nos projets en prévision d'une codification législative à venir. Nous n'avons donc pas inscrit cette disposition au sein de la modification du code de la famille et de l'action sociale qui est actuellement en cours, sous l'égide de M. Bardou.
Par conséquent, le Gouvernement est défavorable à cet amendement, comme il le sera à l'amendement n° 29.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 28 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 29, M. Descours, au nom de la commission des afaires sociales, propose de rédiger comme suit le II de cet article :
« II. - Après le onzième alinéa de l'article 3 de la même loi, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 10° Appartements de coordination thérapeutique. »
La commission et le Gouvernement se sont exprimés sur cet amendement.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 29, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 30, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose de supprimer le III de cet article.
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Je tiens à dire tout de suite, pour que l'on ne me fasse pas de procès d'intention, que je reconnais tout à fait l'utilité des appartements thérapeutiques. Mais, au-delà de leur caractère médical, nous voulons insister - mais je crois que c'est inutile, parce que tout le monde est d'accord - sur l'importance des aspects médico-sociaux dans le fonctionnement de ces organismes, ce qui conduit à s'interroger sur la part que doit prendre concrètement l'assurance maladie dans leur financement.
Avec cet amendement de suppression, nous voulons tirer la sonnette d'alarme. Là encore, la loi de financement de la sécurité sociale ne doit pas devenir une sorte de texte fourre-tout, une session de rattrapage de textes portant diverses mesures d'ordre social ou du projet de loi de modernisation sanitaire que nous attendons.
L'absence de conséquences financières pour l'assurance maladie nous fait douter de la recevabilité de cette disposition au sein d'une loi de financement. J'ai déjà condamné cette dérive à l'occasion de l'examen des articles précédents, et je poursuis dans la même logique.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. L'assurance maladie finance déjà en partie les appartements de coordination thérapeutique, qui sont des dispositifs indispensables à la bonne application des soins.
M. Charles Descours, rapporteur. Cela, c'est vrai !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Nous savons que certains malades, notamment des malades infectés par le virus de l'immunodéficience humaine ou, VIH, ou encore victimes de maladies chroniques graves, ont besoin d'un hébergement stable, d'un suivi psychologique et social de qualité prenant en compte la totalité de leurs besoins pour pouvoir suivre leur traitement, améliorer leur santé, et donc réduire les risques de développer des résistances auxdits traitements.
C'est cette observation, liée à une coordination médicale et sociale ainsi qu'à l'accompagnement social, qui nous a conduits à proposer que l'assurance maladie prenne en charge la totalité des appartements de coordination thérapeutique.
Je souhaite donc le rejet de l'amendement n° 30.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 30.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Les sénateurs socialistes auraient volontiers voté l'article 37 tel qu'il nous a été transmis par l'Assemblée nationale. Il présente, en effet, un intérêt significatif en matière de suivi et de gestion des risques.
Les appartements de coordination thérapeutique, sous réserve d'un agrément, peuvent être pris en charge par l'assurance maladie : l'engagement de l'Etat avait été décidé pour donner une impulsion et encourager leur mise en place.
Après une période d'expérimentation, il apparaît justifié que ces structures, qui relèvent du soin, soient assumées par l'assurance maladie et que leur coût soit intégré dans l'ONDAM médico-social.
Ces appartements accueillent des personnes atteintes par le VIH et des individus en situation de très grande précarité, qui doivent pouvoir bénéficier des meilleures conditions d'accueil ainsi que d'un accompagnement.
Concernant le deuxième volet de cet article, qui appréhende la prise en charge des situations d'alcoolisation, là encore, il s'agit de soins à travers des consultations au profit de personnes hébergées en centre d'hébergement et de réadaptation sociale, et nous souscrivons, bien sûr, à la prise en charge par le budget de la sécurité sociale de ces consultations. Il s'agit là d'une évolution positive !
Mais je voudrais, madame la secrétaire d'Etat, à l'occasion de l'examen de cet article, évoquer deux questions qui me semblent déterminantes pour l'évolution de cette pathologie lourde, qui pénalise gravement notre pays socialement, économiquement et financièrement.
La première est celle de la prévention. Par le passé, son financement était inscrit au chapitre 47-15-40 de la loi de finances. Or ces crédits ont, semble-t-il, été supprimés sans faire l'objet de transfert dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Vous allez nous rassurer, je n'en doute pas, madame la secrétaire d'Etat, car je suis persuadée que le Gouvernement attache toute l'importance qui convient à la prévention en ce domaine.
Ma seconde question, madame la secrétaire d'Etat, concerne le financement des réseaux qui se sont constitués pour la prise en charge coordonnée des malades de l'alcool. Je préside un tel réseau dans ma région, et je me permets d'insister sur la nécessité de leur assurer un financement stable et clarifié. Les intervenants et les soignants de ces réseaux ont une action essentielle dans la prise en charge globale et coordonnée de ces malades !
Madame la secrétaire d'Etat, pouvez-vous nous indiquer vos intentions en ce domaine ?
M. Charles Descours, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Là encore, je ne voudrais pas m'engager sur un débat de fond. J'ai ici le projet de loi de rénovation de l'action sociale et médico-sociale que le Gouvernement a déposé à l'Assemblée nationale. Le texte du 9° du I de l'article 9 reprend les termes de cet article 37 ! Mais, comme ce projet n'est pas encore adopté, le Gouvernement se sert de la loi de financement de la sécurité sociale pour y inclure certaines parties de ce texte. (Mme la secrétaire d'Etat fait un signe de dénégation.) Vous ne pouvez le nier, madame le secrétaire d'Etat, car vous avez signé ce texte !
Ce que je vous reproche, c'est de faire du projet de loi de financement de la sécurité sociale un texte fourre-tout en l'absence d'un projet de loi portant diverses mesures d'ordre social.
Sur le fond, je sais que certains, y compris parmi mes amis, sont d'accord, mais nous ne pouvons que nous élever contre la procédure utilisée.
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Monsieur le président, M. Descours vient de résumer ma position de fond sur cette affaire.
Il est bien évident que les appartements de coordination thérapeutique jouent - je suis bien placé pour le savoir - un rôle éminent. Au demeurant, ils ne sont pas assez nombreux et il faudrait les développer. Les malades concernés, même lorsqu'ils sont consolidés dans l'évolution de leur maladie, ne sont pas réinsérables immédiatement, loin de là ! Ils ont besoin d'être suivis socialement, psychologiquement, médicalement. Par conséquent, je considère que, indiscutablement, ces appartements sont indispensables.
Cela dit, je reconnais que la position de la commission est juste : il appartient à un autre texte d'en décider, il est inutile de charger celui-ci de telles dispositions.
Voilà pourquoi je voterai l'amendement de la commission.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Je souhaite apporter une réponse aux questions qui m'ont été posées.
Non, il ne s'agit pas d'un cavalier législatif, mais de faire prendre en charge par l'assurance maladie la partie « coordination thérapeutique » de ces appartements, qui participent réellement au traitement des pathologies graves. La meilleure preuve en est que le transfert du financement de l'hébergement social est apparu techniquement impossible. Celui-ci continuera donc d'être supporté par la loi de finances de l'Etat, nous en discuterons demain à l'Assemblée nationale et plus tard ici, au Sénat.
L'objet de l'article 37 est donc bien de prendre en charge la partie thérapeutique des appartements de coordination.
En ce qui concerne le financement des réseaux, madame Dieulangard, l'article 29, que nous avons examiné tout à l'heure, procède à des avancées sur ce sujet et permettra leur rémunération directe, qu'il s'agisse des réseaux de prévention de l'alcoolisme ou d'autres types de réseaux. Nous pourrons cependant continuer à avancer avec vous dans la réflexion sur ces questions si cela paraît nécessaire.
En ce qui concerne le financement de la prévention de l'alcoolisme, les consultations d'alcoologie délivrées dans les centres d'hébergement et de réadaptation sociale supposent un transfert vers l'assurance maladie de 25 millions de francs ; en revanche, les autres dispositifs de prévention de l'alcoolisme relèvent du fonds national de prévention, d'éducation et d'information sanitaire, lequel est doté de 64 millions de francs. M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 30, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 37, modifié.

(L'article 37 est adopté.)

Article additionnel après l'article 37