SEANCE DU 24 NOVEMBRE 2000


M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Schosteck pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Schosteck. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au nom du groupe du RPR, j'indique que nous voterons naturellement ce texte avec beaucoup de satisfaction.
A l'instar d'autres collègues du Sénat, nous avons été très sensibles au fait que le Gouvernement ait choisi notre assemblée pour examiner en première lecture ce texte qui intéresse évidemment en particulier, mais pas seulement, les collectivités territoriales.
Toutefois, je regrette que l'urgence ait été déclarée. J'en comprends le motif, mais cette procédure est toujours ennuyeuse car, au fil des discussions, des aménagements techniques, par le jeu normal de la navette, pourraient être adoptés de façon sans doute plus pertinente. Mais c'est ainsi et, en l'occurrence, nous le comprenons.
Je voudrais rendre hommage au remarquable travail - je l'ai déjà dit avant-hier, c'est une vérité première - accompli par notre rapporteur, M. Hoeffel, qui, avec sa courtoisie et sa fermeté habituelles, a permis de clarifier une matière qui, parfois, est assez technique.
M'exprimant au nom du groupe du Rassemblement pour la République, je ne saurais oublier le travail remarquable de spécialiste effectué par mon collègue AlainVasselle, à qui je rends hommage.
Le groupe du RPR votera donc ce texte, en souhaitant qu'il soit encore amélioré par la navette, hélas, très courte. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. Monsieur le ministre, je voterai ce texte qui contribuera certainement à mettre un terme à la précarité observée dans la fonction publique. Certes, il devra, nous n'en doutons pas, être renforcé, mais nous attendons beaucoup de la mise en place des différents groupes de travail en charge de moderniser les diverses filières de la fonction publique.
Comme je l'ai dit en défendant des amendements, ce texte est conforme aux engagements de la gauche d'aller plus vite dans ce sens pour éviter de retomber dans les errements du passé.
L'actualité des négociations conduites aujourd'hui entre le Gouvernement et les organisations syndicales pour un rattrapage du pouvoir d'achat nous amène, bien évidemment, à souhaiter qu'un accord intervienne, afin que les agents au service de l'Etat, qui ont dû payer un lourd tribut ces dernières années à la réduction des déficits publics, puissent bénéficier à leur tour d'une partie des fruits de la croissance retrouvée. C'est tout simplement une mesure de justice sociale et la reconnaissance du travail accompli, souvent dans des conditions difficiles, par ceux qui ont en charge le fonctionnement du service public.
J'en profite pour dire que l'efficacité du service public, et donc l'efficacité de l'Etat, sont des éléments incontournables de la réconcialiation entre nos concitoyens et la classe politique.
Pour l'ensemble de ces raisons, assurer une juste rémunération des fonctionnaires et de tous ceux qui participent au service de l'Etat est une nécessité incontournable.
Pour en revenir au texte qui nous est proposé, nous attendons du Gouvernement qu'il aille plus loin dans la modernisation du service public, notamment par un élargissement des cadres d'emplois et par des formes de mutualisation des services, et nous espérons que le recours à des personnels précaires deviendra enfin l'exception dans l'ensemble des services publics.
A ce propos, comme je l'ai dit au début de la discussion, nous regrettons que ce texte visant à la réduction de la précarité n'ait pas pris en compte les agents de La Poste.
Cela dit, nous le voterons, tout en insistant sur la nécessité qu'il y a de poursuivre le dialogue social dans la fonction publique et de fournir au service public - c'est le moment, puisque nous entamons la discussion budgétaire - les moyens nécessaires à l'accomplissement de ses missions, dans l'intérêt des collectivités territoriales et des agents de la fonction publique, mais aussi, plus généralement, dans l'intérêt de nos concitoyens.
M. le président. La parole est à M. Domeizel.
M. Claude Domeizel. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le présent projet de loi était fort attendu pour résorber l'emploi précaire dans la fonction publique et plus particulièrement, permettez-moi de le dire, dans la fonction publique territoriale, l'emploi précaire concernant environ 350 000 personnes. Les maires, les agents concernés et les membres du conseil d'administration de la CNRACL ont manifesté beaucoup d'intérêt à l'égard de ce projet de loi.
Si les amendements adoptés l'ont positivement enrichi, le groupe socialiste regrette que la majorité du Sénat ait adopté un amendement prévoyant une mesure contraire au but recherché : je veux parler du recrutement sans recours aux concours dans les communes de moins de 2 000 habitants. On ne peut pas, comme je l'ai dit, laisser un robinet ouvert pour reconstituer un « stock » de non-titulaires.
M. Alain Vasselle. Vos collègues à l'AMF étaient pour !
M. Claude Domeizel. Monsieur Vasselle, nous ne sommes pas à l'Association des maires de France ! Ici, nous donnons notre point de vue.
M. Alain Vasselle. Le langage est différent selon le lieu !
M. Claude Domeizel. Je me permets également d'insister sur un sujet qui me tient à coeur.

Depuis la promulgation de la loi de 1984, je n'ai eu de cesse de me préoccuper des fonctionnaires momentanément privés d'emploi, non seulement parce qu'ils sont dans une situation très difficile, mais aussi parce que cela coûte cher à la collectivité.
Pour ne citer qu'un exemple, un fonctionnaire momentanément privé d'emploi ne connaît pas son employeur. Il ne peut pas remplir de fiche. Il ne peut pas non plus prétendre aux avantages de sa propre retraite faute de service effectif, notion qui devrait être précisée.
Par conséquent, je souhaite que les amendements qui concernent les fonctionnaires momentanément privés d'emploi et qui ont été rejetés par la majorité soient réexaminés lors de la navette, quitte à ce qu'ils soient modifiés.
Mais nous ne voterons pas pour autant contre le texte tel qu'il a été modifié. Nous nous abstiendrons, tout en précisant que cette abstention se rapproche malgré tout d'un vote positif !
M. le président. La parole est à M. Machet.
M. Jacques Machet. Le groupe de l'Union centriste votera, bien sûr, ce texte et remercie son rapporteur, M. Daniel Hoeffel, qui est un des leurs, et tous ceux et toutes celles qui se sont attachés, au cours de cette matinée, à trouver par trois fois un consensus. Cela va dans le bon sens ! (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et du RPR.)
M. le président. La parole est à Mme Heinis.
Mme Anne Heinis. Au nom du groupe des Républicains et Indépendants, je veux remercier M. Hoeffel du travail tout à fait important, plein de mesure, de sagesse et de prospection qu'il a fait sur ce texte.
Sur ce problème qui nous préoccupe tous, nous avons essayé, ensemble, avec M. le ministre aussi, de progresser dans l'intérêt des personnes concernées, c'est-à-dire les fonctionnaires, en particulier ceux de nos collectivités territoriales, auxquels nous sommes tous très attachés.
Notre groupe votera ce texte qui, nous l'espérons, aura des effets positifs et qui ne manquera pas, au cours de la navette, d'être encore amélioré, ce qui est un objectif constant et toujours souhaitable. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. Daniel Hoeffel, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Hoeffel, rapporteur. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi de faire trois brèves observations en conclusion de notre débat.
D'abord, nous vous remercions du caractère constructif du dialogue qui s'est instauré, au premier chef avec vous, monsieur le ministre, malgré les contraintes, que nous connaissons, qui s'imposent à un membre du Gouvernement, celui-ci devant respecter un certain nombre de principes. Elles n'ont pas été incompatibles avec votre volonté de dialogue avec les membres du Sénat.
M. Jacques Machet. Très bien !
M. Daniel Hoeffel, rapporteur. Ensuite, je constate que de nombreuses dispositions essentielles ont été adoptées à l'unanimité. Je voudrais dire à cet égard qu'il n'est jamais facile, pour un rapporteur, de convaincre des membres de l'assemblée, siégeant tantôt ici, tantôt là, de retirer un amendement qui est le fruit d'un travail approfondi ou d'émettre un avis défavorable sur un amendement qu'ils considéraient comme tout à fait raisonnable. C'est pourtant le travail ingrat que doit réaliser celui qui s'exprime au nom d'une commission.
Mes chers collègues, vous avez souvent su faire preuve d'abnégation et de compréhension, et chacun, avec son style et sa personnalité, a apporté un élément constructif à l'élaboration finale de notre position.
Je terminerai par une observation sur l'urgence.
S'agissant de l'urgence déclarée sur ce texte, si nous la regrettons, nous reconnaissons toutefois que l'utilisation de cette procédure a été partiellement compensée par le fait que ce texte a d'abord été déposé sur le bureau du Sénat.
S'agissant de l'urgence dans les faits, beaucoup des dispositions adoptées doivent s'appliquer le plus rapidement possible, vous l'avez rappelé, monsieur le ministre.
Etant donné que nous ne pourrons procéder à un nouvel examen de ce texte, faute d'une seconde lecture, nous veillerons, lors de la commission mixte paritaire, à ce que les points de vue puissent se rapprocher, sans pour autant que soient sacrifiés les principes sur lesquels nous nous sommes appuyés. Mais rien, à ce stade, ne nous incite à croire que l'impossible ne sera pas réalisable. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Michel Sapin, ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Michel Sapin, ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat. Je tiens tout d'abord à vous remercier, les uns et les autres, d'avoir accompli un travail très constructif malgré des conditions difficiles dues au fait que nous avons siégé en séance de nuit et que l'examen de la fin de ce texte a été reporté à ce vendredi matin. Je sais que M. Vasselle en a beaucoup souffert ! (« Nous aussi ! » sur de nombreuses travées.)
M. Claude Domeizel. Je devais être à Grenoble ce matin !
M. Michel Sapin, ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat. Tous en ont souffert, mais certains l'ont fait savoir ! (Sourires.)
Notre débat s'est caractérisé par une convergence de volontés pour rechercher des solutions destinées à résorber aujourd'hui la précarité et à prévenir demain son retour.
Avant de revenir sur nos points de désaccord, je tiens à vous remercier infiniment, monsieur le rapporteur, du caractère très constructif de votre travail, de la volonté que vous avez mise à défendre votre position, de votre sens du dialogue bien connu et de la compréhension, qui tient bien sûr à votre expérience politique grande que vous avez manifestée à l'égard du travail accompli par un membre du Gouvernement.
Je souhaite revenir sur la question de l'urgence, qui, je le sais peut vous choquer, les uns ou les autres, même si j'ai souhaité que ce projet de loi soit examiné en premier par le Sénat.
Voici les données du problème. En juillet, nous avons conclu un accord avec les organisations syndicales. En septembre - car la procédure est lourde - les conseils supérieurs se sont réunis et ont donné un avis favorable. En octobre, le conseil des ministres a adopté le texte. En novembre, le Sénat en discute pour l'adopter.
Il était difficile de faire plus vite, sachant qu'il importe que le dispositif soit en place le 1er janvier prochain afin que l'on puisse passer d'un plan de résorption à l'autre, car, et vous m'en excuserez, je considère celui-ci doté de qualités supplémentaire ; par rapport au précédent mais ce n'est peut-être que vanité d'auteur ! (Sourires.)
Je voudrais maintenant, et je conclurai sur cet aspect, monsieur le président, relever deux points de désaccord.
En premier lieu, mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez souhaité restreindre un peu le champ de titularisation possible avec l'amendement visant à porter de deux à quatre mois la présence effective requise pour qu'un collaborateur en place puisse être titularisé.
En second lieu, avec l'amendement portant sur les communes de moins de 2 000 habitants, vous avez élargi à nouveau le champ de la contractualisation et donc de la précarité.
En somme, d'un côté, vous avez fermé le champ de la titularisation et, de l'autre, vous avez un peu ouvert le champ de la contractualisation et de la précarisation.
Sur ces deux points, le Sénat est donc en contradiction avec la position que j'ai exprimée ; je vous le dis très naturellement, cela fait partie du débat.
Bien entendu, devant l'Assemblée nationale, je défendrai la position que je viens de défendre devant vous ; je vous le dis en toute honnêteté.
Au demeurant, nombre d'amendements tendant à clarifier, à améliorer et à compléter le texte ont été adoptés et, de ce travail, je tenais à vous remercier les uns et les autres. (Applaudissements.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
M. Claude Domeizel. Le groupe socialiste s'abstient.

(Le projet de loi est adopté.)

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