SEANCE DU 8 DECEMBRE 2000


M. le président. En accord avec la commission des finances, j'appelle en discussion les amendements n° II-40 et II-37 rectifié, qui tendent à insérer des articles additionnels après l'article 53 sexies.
Par amendement n° II-40, MM. Laffitte, Vallet, Joly et de Montesquiou proposent d'insérer, après l'article 53 sexies, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le Gouvernement remet chaque année un rapport au Parlement sur les conséquences de la numérisation des fréquences UHF et VHF, sur la répartition des fréquences entre les différents opérateurs, de télécommunications, de radio ou de télévision, et sur les recettes tirées de la cession des licences d'exploitation qui leur sont attribuées.
« A l'occasion du dépôt de ce rapport, un débat est organisé au Parlement, auquel participent le ministre chargé de la recherche, le ministre chargé de la recherche, le ministre chargé de l'industrie et le ministre chargé de la communication. »
La parole est à M. Laffitte.
M. Pierre Laffitte. Cet amendement a pour objet de demander au Gouvernement de remettre chaque année au Parlement un rapport sur les conséquences de la numérisation des fréquences, en particulier UHF et VHF, et d'organiser, à l'occasion du dépôt de ce rapport, un débat au Parlement auquel participeront les ministres chargés de la recherche, de l'industrie et de la communication.
Tout le monde est désormais bien conscient que les fréquences sont un bien très rare, dont l'usage devient essentiel en raison des « chocs » entre besoins concurrents : audiovisuel, télécommunications, services tels que télétravail, télémédecine, télééducation, etc. Il faut donc remettre à plat le spectre des fréquences. Elles sont gérées par l'Agence nationale des fréquences et sont utilisées ou pilotées par les militaires, le Conseil supérieur de l'audiovisuel et l'Autorité de régulation des télécommunications, selon leurs usages actuels.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean Clouet, rapporteur spécial. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je partage le souci de M. Laffitte de voir soumis au Parlement un rapport sur les conséquences de la numérisation, et le fait que ce rapport soit annuel me semble une excellente chose.
En revanche, je ne vois pas quelles raisons fondamentales militeraient en faveur d'un débat chaque année au Parlement. Outre le fait qu'une telle procédure serait très lourde, cette question relève du domaine réglementaire et non législatif.
Par conséquent, M. Laffitte et les co-auteurs de cet amendement accepteraient-ils de ne conserver que le premier alinéa de cet amendement n° II-40, afin de supprimer la demande de débat ? Le Gouvernement serait alors favorable à l'amendement. Dans le cas contraire, il s'en remettrait à la sagesse de l'assemblée.
Enfin, je rappelle à M. le sénateur Laffitte que cet amendement ne vise que la télévision numérique hertzienne de terre, c'est-à-dire un élément seulement parmi tous les moyens technologiques ! Nous n'allons pas organiser un débat annuel pour chaque technologie !
M. le président. Monsieur Laffitte, que pensez-vous de la proposition du Gouvernement ?
M. Pierre Laffitte. Je rectifie mon amendement pour qu'il vise l'ensemble du spectre des fréquences - je pense notamment aux fréquences L 5, qui sont nécessaires, entre autres, à l'utilisation de GALILEO. C'est d'autant plus nécessaire que les choses évoluent d'une façon très rapide dans ce domaine, M. le secrétaire d'Etat en conviendra. (M. le secrétaire d'Etat fait un signe d'assentiment.)
Le début du premier alinéa de l'amendement rectifié se lit donc ainsi : « Le Gouvernement remet chaque année un rapport au Parlement sur l'utilisation de l'ensemble du spectre des fréquences, sur la répartition des fréquences... » (Le reste sans changement.)
Par ailleurs, au second alinéa, je souhaite préciser qu'à l'occasion du dépôt de ce rapport sur l'utilisation de l'ensemble du spectre des fréquences un débat est organisé au Parlement, auquel participent le ministre chargé de la recherche, le ministre chargé de l'industrie, le ministre chargé de la communication « et le ministre chargé de la défense ».
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° II-40 rectifié, présenté par MM. Laffitte, Vallet, Joly et de Montesquiou, et tendant à insérer, après l'article 53 sexies , un article additionnel ainsi rédigé :
« Le Gouvernement remet chaque année un rapport au Parlement sur l'utilisation de l'ensemble du spectre des fréquences, sur la répartition des fréquences entre les différents opérateurs, de télécommunications, de radio ou de télévision, et sur les recettes tirées de la cession des licences d'exploitation qui leur sont attribuées.
« A l'occasion du dépôt de ce rapport, un débat est organisé au Parlement, auquel participent le ministre chargé de la recherche, le ministre chargé de l'industrie, le ministre chargé de la communication et le ministre chargé de la défense. »
Quel est l'avis du Gouvernement sur cet amendement II-40 rectifié ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, il y a confusion, me semble-t-il, ou peut-être ai-je mal compris.
J'ai indiqué que le Gouvernement acceptait le dépôt d'un rapport devant le Parlement portant sur l'utilisation du spectre des fréquences, pour l'ensemble des technologies, mais qu'il trouvait que l'organisation d'un débat chaque année était une procédure trop lourde.
Or M. le sénateur Laffitte vient de reprendre, dans l'énoncé oral de la rectification de son amendement, la notion de débat.
M. Pierre Laffitte. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Laffitte.
M. Pierre Laffitte. Monsieur le secrétaire d'Etat, je maintiens la nécessité d'un débat organisé au Parlement afin que nous puissions nous exprimer sur le rapport annuel et sur les conséquences importantes, tant politiques qu'économiques et culturelles, de l'évolution de l'usage des fréquences. Le ministre de la défense est aussi très concerné par ce débat.
M. le président. Quel est, en définitive, l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° II-40 rectifié ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. M. Laffitte maintenant l'alinéa prévoyant un débat au Parlement, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-40 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 53 sexies .
Par amendement n° II-37 rectifié, MM. Laffitte, Vallet, Joly et de Montesquiou proposent d'insérer, après l'article 53 sexies, un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est institué, à l'article 66-01 du budget du ministère de l'industrie, un fonds spécifique, alimenté par une partie des recettes qui seront tirées de la cession des licences d'attribution des fréquences hertziennes rendues disponibles par le processus de numérisation des bandes de fréquences UHF et VHF.
« Ce fonds a pour objet de financer le développement des recherches industrielles dans le domaine des télécommunications, des logiciels et de l'électronique lié au développement de la société de l'information. »
La parole est à M. Laffitte.
M. Pierre Laffitte. Cet amendement, qui concerne uniquement les fréquences hertziennes rendues disponibles par le processus de numérisation, tend à instituer un fonds spécifique destiné à financer le développement des recherches industrielles dans le domaine des télécommunications, des logiciels électroniques liés au développement de la société de l'information.
Ce fonds serait alimenté par une partie des recettes provenant du réaménagement du spectre des fréquences, notamment de la cession des licences d'attribution des fréquences hertziennes rendues disponibles par le processus de numérisation des bandes de fréquences UHF et VHF.
Cela permettra d'attribuer trente-six fréquences, six d'entre elles étant réservées en priorité aux émissions de télévision hertzienne existantes.
Chacune de ces licences peut être attribuée soit gratuitement, soit moyennant une contribution, comme cela a été le cas pour les bandes affectées à des opérateurs UMTS.
Dans la bande VHF, le coût des infrastructures pour déployer ces fréquences sur le territoire serait de l'ordre du quart ; c'est tout l'intérêt d'un tel usage pour l'aménagement du territoire.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean Clouet, rapporteur spécial. Nous sommes favorables aux objectifs de M. Laffitte. Toutefois, la création d'un nouveau fonds, alors que nous en avons déjà à ne plus savoir qu'en faire, et l'affectation de recettes budgétaires à des dépenses précises sont assez déplaisantes.
Par conséquent, la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement va plus loin que la sagesse proverbiale évoquée par M. Clouet, puisqu'il est hostile à cet amendement.
La loi du 1er août 2000 n'a pas retenu de redevance pour l'utilisation des fréquences numériques hertziennes, pour plusieurs raisons. Le législateur a privilégié le développement d'une offre en clair ; le démarrage doit s'effectuer le plus rapidement possible ; enfin, les chaînes « historiques » vont avoir à faire face au simulcast.
Par ailleurs, la volonté d'introduire de nouvelles chaînes et d'offrir aux télévisions de proximité la possibilité d'être présentes paraît contradictoire avec le paiement d'une redevance pour l'utilisation du spectre hertzien.
Le CSA doit donc examiner les candidatures en privilégiant la capacité et les engagements des candidats à couvrir le territoire national, la qualité des programmes proposés ainsi que la défense du pluralisme, orientation qui nous paraît bonne et suffisante.
Par conséquent, je demande à M. Laffitte de bien vouloir retirer son amendement. Le Gouvernement comprend et partage les intentions qui le sous-tendent, mais l'argument de M. le rapporteur spécial selon lequel il ne faut pas créer un énième fonds me paraît extrêmement pertinent.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-37 rectifié.
M. Pierre Laffitte. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Laffitte.
M. Pierre Laffitte. L'amendement précédent adopté par le Sénat permettra, au cours du débat qui s'instaurera, et qui se justifie plus que jamais, de revoir le problème.
Les propos de M. le ministre correspondent exactement à une stratégie adoptée qu'il semble utile de remettre en question. En effet, je ne crois pas que l'utilisation optimale des trente-six fréquences hertziennes numériques terrestres du domaine UHF-VHF soient la diffusion audiovisuelle par numérique hertzien terrestre, ce qui provoquerait de graves problèmes aux diffusions par câble ou par satellite, et les diffuseurs ne pourraient les payer à leur valeur intrinsèque supérieure à celle des licences UMTS puisque le déploiement est plus aisé.
Certes, nous avons voté la loi du 1er août 2000, mais nous sentons bien désormais que la valeur effective de ces licences est de l'ordre de 1 000 milliards de francs, et ce que cela représente, notamment pour l'aménagement du territoire, la formation à distance, la santé, etc. D'ici un ou deux ans, chacun sera convaincu qu'il est sage de reconnaître une décision un peu hâtive.
J'accepte de retirer l'amendement ; mais nous aurons l'occasion de revenir sur cette question.
M. le président. L'amendement n° II-37 rectifié est retiré.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant l'industrie (et La Poste).

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