SEANCE DU 1ER FEVRIER 2001


M. le président. La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Ma question s'adresse à M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.
Monsieur le secrétaire d'Etat, la bulle télécoms a fini par exploser. C'est un nouveau revers pour le Gouvernement, l'Humanité allant même jusqu'à évoquer un « fiasco ».
Une fois de plus, le Gouvernement s'est trompé, ou, pire - mais je n'ose le croire -, peut-être le Gouvernement nous a-t-il trompés.
Pourquoi, monsieur le secrétaire d'Etat, cette obstination à refuser d'entendre le Sénat sur des sujets aussi importants que les télécommunications, l'énergie ou La Poste ?
La Haute Assemblée avait proposé une transparence complète pour l'attribution des licences UMTS en se référant aux procédures d'appel d'offres traditionnelles. Le président du Sénat, lui-même, l'a affirmé haut et fort.
Vous avez préféré la méthode « élection de Miss France » (Sourires.) et ainsi privilégié le principe de sélection comparative, toujours subjectif.
A cet instant de mon propos, je voudrais citer Abraham Lincoln : « Vous pouvez tromper quelques personnes tout le temps, vous pouvez tromper tout le monde un certain temps, mais vous ne pouvez tromper tout le monde tout le temps. »
Est-il normal et dans les compétences du Gouvernement d'intervenir dans le système économique à ce point et, de plus, sans l'accord du Parlement, comme l'a dit tout à l'heure notre collègue Pierre Laffitte ? Curieusement, dans la même période, à grand renfort de communication, le Gouvernement annonce des baisses d'impôts, souvent d'ailleurs au détriment des collectivités territoriales. Ce mécanisme que vous avez choisi revient à créer de toutes pièces une assiette fiscale et un prélèvement obligatoire de fait sur les utilisateurs de nouvelles technologies, qui, au bout du compte, sont ceux qui vont payer la facture. Question de bon sens.
Deux des candidats ayant déclaré forfait, vous proposez que soit engagé un appel complémentaire à candidatures pour tenir votre objectif de 120 milliards de francs de recettes. Voilà bien de quoi il s'agit, car vous les avez déjà engagés quelque part.
J'ignore les mécanismes de cette procédure, mais je ne doute pas, monsieur le sécrétaire d'Etat, que les responsables des collectivités territoriales, à qui on impose des règles drastiques de mise en concurrence pour les attribution de marchés publics, soient aussi étonnés que moi aujourd'hui.
Monsieur le sécrétaire d'Etat, je doute de votre attachement aux principes de concurrence, de loyauté et de transparence dans l'attribution de ces licences. Je doute aussi de vos déclarations optimistes, la main sur le coeur, sur l'accès du plus grand nombre au meilleur prix et sur la couverture suffisante du territoire.
Aussi, au bout du compte, qu'allez-vous faire ? Abaisser le prix des licences ? Vous avez prétendu hier soir, sur une chaîne de télévision, vouloir le maintenir. Il vous reste alors la possibilité d'en allonger la durée. Mais quelle sera cette durée dans un système où les nouvelles technologies sont passées de mode dans les quatre ans ?
Quelle est votre position, monsieur le secrétaire d'Etat, sur ces points fondamentaux pour l'avenir du téléphone mobile de troisième génération, avant que n'arrive la quatrième ? (Applaudissements sur les travées de l'Union centristes, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie. J'espère, monsieur Hérisson, que certains de vos propos ou certaines de vos assertions à caractère personnel ont dépassé quelque peu votre pensée. Je vais, pour ma part, vous répondre de manière très posée et, si vous le voulez bien, très cordiale.
Nous nous sommes ralliés à la sélection comparative parce que les enchères ne sont pas traditionnelles dans notre droit - c'est une méthode plus anglo-saxonne que française - parce que nous avons vu les difficultés qu'elles ont engendrées à l'étranger, et notamment l'assèchement financier qu'elles ont provoqué en Allemagne et en Grande-Bretagne, parce que, enfin, en accord avec l'ART, avec laquelle, conformément à la loi sur les télécommunications, nous nourrissons un dialogue permanent, nous avons pensé que la sélection comparative était la meilleure des solutions.
Je tiens à vous rassurer, monsieur le sénateur : nous voulons garantir dans la totalité du processus, que ce soit l'instruction actuelle du dossier ou la sélection qui a eu lieu hier, l'égalité entre l'ensemble des opérateurs, la non-discrimination, la transparence totale du processus - en particulier au travers de l'information régulière du Parlement - et la concurrence.
Dans la deuxième série que nous lancerons dans quelques mois, nous pourrons, en effet, jouer sur plusieurs paramètres, comme je l'ai dit tout à l'heure à M. Laffitte : la durée, le montant, le calendrier.
Cela étant, les objectifs du Gouvernement - il faut bien le répéter après votre question quelque peu polémique - restent les mêmes : mettre l'UMTS à la disposition du plus grand nombre - particuliers, entreprises, collectivités ; assurer l'équilibre des territoires, l'aménagement du territoire n'étant pas la moindre donnée de cette sélection ; assurer une juste rémunération du spectre hertzien proportionnée à la valeur qu'en retirent les opérateurs, sans mettre en cause leur viabilité économique ; enfin, favoriser le développement des industries de télécommunication et des technologies de l'information présentes en France, et donc favoriser le développement de l'emploi.
Voilà, monsieur le sénateur : les choses sont simples, claires et transparentes. Elles sont décidées. Elles expriment une politique, et c'est la politique du Gouvernement. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Pierre Hérisson. Ce n'est pas la bonne !
M. Gérard Larcher. C'est une politique variable !

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