SEANCE DU 10 MAI 2001


M. le président. « Art. 14 ter . - L'article 1er de la loi n° 75-534 du 30 juin 1975 d'orientation en faveur des personnes handicapées est ainsi rédigé :
« Art. 1er . - La personne handicapée doit pouvoir accéder aux droits fondamentaux reconnus à tous les citoyens et notamment la liberté de choix du mode de vie, l'accès aux soins, à l'éducation, à la formation et à l'orientation professionnelle, à l'emploi, au logement, la garantie d'un minimum de ressources adapté, l'intégration sociale, l'accès au sport, aux loisirs et à la culture, la possibilité de circuler librement.
« Garantir à la personne handicapée l'accès à ces droits fondamentaux constitue une obligation nationale. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 83, M. Seillier, au nom de la commission des affaires sociales, propose de rédiger comme suit cet article :
« L'article L. 114-1 du code de l'action sociale et des familles est ainsi rédigé :
« Art. L. 114-1. - La prévention et le dépistage du handicap et l'accès du mineur ou de l'adulte handicapé physique, sensoriel ou mental aux droits fondamentaux reconnus à tous les citoyens, notamment aux soins, à l'éducation, à la formation et à l'orientation professionnelle, à l'emploi, à la garantie d'un minimum de ressources adapté, à l'intégration sociale, à la liberté de déplacement et de circulation, à une protection juridique, aux sports, aux loisirs, au tourisme et à la culture constituent une obligation nationale.
« La personne handicapée a droit à la compensation des conséquences de son handicap quels que soient l'origine et la nature de sa déficience, son âge ou son mode de vie. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 328, présenté par M. Vasselle, et tendant, à la fin du second alinéa du texte proposé par l'amendement n° 83 pour l'article L. 114-1 du code de l'action sociale et des familles, à remplacer les mots : « ou son mode de vie » par les mots : « et à la garantie d'un minimum de ressources lui permettant de couvrir la totalité des besoins essentiels de la vie courante. »
Par amendement n° 351, M. Chabroux, Mme Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de compléter in fine le texte présenté par l'article 14 ter pour l'article 1er de la loi n° 75-534 du 30 juin 1975 par un alinéa ainsi rédigé :
« A cet effet, le Gouvernement adresse tous les deux ans au Parlement un rapport d'évaluation de la mise en oeuvre de cette obligation nationale. Il est assisté dans sa mission par un conseil national consultatif des personnes handicapées dont la composition et le fonctionnement sont déterminés par décret. »
La parole est à M. Seillier, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 83.
M. Bernard Seillier, rapporteur. L'article 14 ter, introduit à l'Assemblée nationale malgré quelques réticences initiales du Gouvernement, a pour objet de revoir la rédaction de l'article 1er de la loi d'orientation du 30 juin 1975 en faveur des personnes handicapées.
Même si l'on pouvait avoir des interrogations sur l'opportunité de réviser la loi de 1975 dès la discussion de ce projet de loi, il m'apparaît que les associations de personnes handicapées ont accueilli très favorablement cette initiative de divers députés de l'opposition à l'Assemblée nationale.
Les personnes handicapées sont d'autant plus attachées à cette marque d'attention que le chantier de la révision de la loi de 1975 relative aux handicapés n'est, semble-t-il, guère avancé et que la perspective d'un projet de loi en la matière paraît assez lointaine.
Le présent amendement tend à reprendre le texte de l'article 14 ter, en procédant à quelques rectifications.
Le premier alinéa a pour objet de codifier le texte de l'article 14 ter au sein du nouveau code de l'action sociale et des familles, de rétablir au rang des obligations nationales la prévention et le dépistage du handicap, d'inclure parmi les droits fondamentaux de la personne handicapée le droit à une protection juridique, de rappeler les différentes catégories de personnes handicapées, qu'elles soient mineures ou adultes, et les différentes natures de handicaps - sensoriel, physique ou mental - afin de garantir que tous sont traités sur un pied d'égalité, et, enfin, de rappeler que les personnes handicapées doivent accéder librement au tourisme dans les mêmes conditions que tous les citoyens.
Le second alinéa a pour objet d'instituer explicitement un droit à compensation pour les personnes handicapées. Il s'agit d'une demande très forte des associations représentatives des personnes handicapées. Il semble que le texte actuel soit encore bien timide dans ce domaine.
M. le président. La parole est à M. Vasselle, pour défendre le sous-amendement n° 328.
M. Alain Vasselle. Monsieur le président, je vous fais parvenir le texte du sous-amendement tel que je souhaite le rectifier.
M. le président. Je suis en effet saisi d'un sous-amendement n° 328 rectifié, présenté par M. Vasselle, et tendant à compléter le second alinéa du texte proposé par l'amendement n° 83 pour l'article L. 114-1 du code de l'action sociale et des familles par les mots : « , et à la garantie d'un minimum de ressources lui permettant de couvrir la totalité des besoins essentiels de la vie courante. »
Vous avez la parole pour le défendre, monsieur Vasselle.
M. Alain Vasselle. Ce sous-amendement vise à faire en sorte que l'application de la loi assure véritablement aux handicapés un niveau de ressources leur permettant de faire face à la fois aux besoins essentiels de la vie courante et à l'ensemble des besoins qui sont énumérés au premier alinéa de l'article L. 114-1.
Je me permets d'appeler l'attention sur deux points.
D'abord, pour bien connaître le fonctionnement d'un foyer occupationnel, je sais que les familles qui ont des enfants majeurs handicapés placés dans ces établissements se trouvent confrontées aujourd'hui à un double problème.
Premier problème : ces enfants, pour bénéficier de l'allocation personnalisée au logement, doivent justifier - c'est une demande très récente de la caisse d'allocations familiales - leurs ressources. Et si les parents déclarent sur leur feuille d'impôts leur enfant handicapé, ce qui leur permet de bénéficier d'une demi part supplémentaire, ce sont les ressources des parents qui sont prises en compte pour le calcul de l'allocation personnalisée au logement. En fait, cela prive nombre de handicapés adultes du bénéfice de l'APL.
Or les mesures fiscales qui avaient ainsi été prises en leur temps en faveur des familles ayant un enfant handicapé visaient bien à leur permettre de bénéficier d'un avantage qui tienne compte de la situation dans laquelle elles se trouvent.
Second problème : aujourd'hui, malheureusement, l'évolution de l'allocation aux adultes handicapés, même si celle-ci a été revalorisée dans la loi de financement de la sécurité sociale de 2001, est encore très nettement insuffisante eu égard à la demande de forfait journalier faite par les conseils généraux.
J'ai des exemples très précis. L'allocation aux adultes handicapés représente aujourd'hui environ 3 600 francs. Le forfait journalier réclamé par le conseil général de l'Oise, mon département, n'est pas loin de 100 francs par jour. A un adulte handicapé qui reste trente jours dans l'établissement, il est donc réclamé 3 000 francs. Il ne lui reste donc plus que 600 francs pour ses transports, ses loisirs, son assurance personnelle, son habillement.
Je vous laisse imaginer, madame le secrétaire d'Etat, ce que cela représente pour certaines familles ! Celles qui ont des ressources personnelles très modestes ne peuvent pas faire face aux besoins essentiels de la vie courante de leurs enfants handicapés.
Si j'ai souhaité compléter l'amendement de la commission, c'est donc pour que le Gouvernement veille, au moment de l'application de la loi, à ce que les jeunes adultes handicapés placés dans un foyer occupationnel aient un niveau de ressources leur permettant de faire face aux besoins de la vie courante, à égalité avec les autres citoyens qui, eux, heureusement, ne sont pas victimes de handicaps.
M. Chabroux va demander qu'un bilan soit présenté régulièrement au Parlement sur la manière dont cet article de la loi sera appliqué. J'espère que nous pourrons ainsi faire régulièrement le point sur l'évolution des ressources qui sont accordées aux jeunes adultes handicapés dans ces établissements.
M. le président. La parole est à M. Chabroux, pour présenter l'amendement n° 351.
M. Gilbert Chabroux. Cet amendement a pour objet la création d'un Conseil consultatif national des personnes handicapées.
Ce Conseil assiste le Premier ministre. Sa composition, ainsi que son fonctionnement, sont déterminés par décret. Il a pour mission de donner son avis sur la mise en oeuvre des propositions et des orientations de la politique du handicap dans tous les domaines de la vie sociale. Il peut se saisir de tous les sujets afférents aux conditions d'exercice des droits fondamentaux pour les personnes handicapées. Il assiste le Premier ministre dans la rédaction d'un rapport d'évaluation qui est adressé au Parlement tous les deux ans.
Cette mesure facilite la mise en oeuvre d'un véritable suivi des actions engagées. Elle permet aussi que soit minimisé le risque d'inégalité territoriale dans la mise en application de cette obligation nationale qu'est la garantie de l'accès aux droits fondamentaux pour la personne handicapée.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 328 rectifié et l'amendement n° 351 ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. La commission émet un avis favorable sur le sous-amendement n° 328 rectifié.
Sur l'amendement n° 351, qui comprend deux éléments, à savoir, tout d'abord, un rapport d'évaluation sur la mise en oeuvre de l'obligation nationale et, ensuite, une référence au conseil national consultatif des personnes handicapées, je suis dans l'embarras. Si cet amendement avait été un sous-amendement à l'amendement n° 83, j'aurais pu émettre un avis favorable. Mais, puisqu'il porte sur l'article 14 ter, pour lequel nous proposons une nouvelle rédaction, je suis obligé d'émettre un avis défavorable.
Toutefois, son auteur acceptera peut-être de le transformer en un sous-amendement à l'amendement de la commission.
M. le président. Monsieur Chabroux, souhaitez-vous accéder à la proposition de M. le rapporteur ?
M. Gilbert Chabroux. Volontiers, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 351 rectifié, présenté par M. Chabroux, Mme Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés, et tendant à compléter in fine le texte proposé par l'amendement n° 83 pour l'article L. 114-1 du code de l'action sociale et des familles par un alinéa, ainsi rédigé :
« A cet effet, le Gouvernement adresse tous les deux ans au Parlement un rapport d'évaluation de la mise en oeuvre de cette obligation nationale. Il est assisté dans sa mission par un conseil national consultatif des personnes handicapées dont la composition et le fonctionnement sont déterminés par décret. »
Ce sous-amendement est accepté par la commission.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 83 et sur les sous-amendements n°s 328 rectifié et 351 rectifié ?
Mme Paulette Guinchard-Kunstler, secrétaire d'Etat. L'amendement n° 83 affaiblit les dispositions adoptées par l'Assemblée nationale qui font obligation de garantir aux personnes handicapées l'accès à plusieurs droits fondamentaux.
Il tend à créer un droit à la compensation des conséquences du handicap, sans en préciser ni le contenu ni la portée et, là encore, sans qu'en aient été définies les conséquences financières et les financeurs.
Une fois menée à bien la rénovation de la loi sur les institutions sociales et médico-sociales, il conviendra de poser les axes d'une rénovation des dispositions issues du second texte fondateur : la loi d'orientation en faveur des personnes handicapées. C'est dans ce cadre que pourra se poursuivre et déboucher la réflexion déjà engagée sur l'initiative du Gouvernement sur les conditions du développement de l'autonomie des personnes handicapées et la création de mécanismes nouveaux de compensation du handicap.
J'entends bien les remarques qui sont faites, mais je crois qu'il est nécessaire de travailler sur l'ensemble des dossiers à fond pour éviter d'avoir à examiner les dossiers l'un après l'autre.
Sans nier les situations que vous avez décrites, monsieur Vasselle, je considère qu'il convient de mener un travail de fond qui doit s'appuyer sur un vrai débat relatif à la notion de droit à compensation.
Le sous-amendement n° 351 rectifié de M. Chabroux fait obligation au Gouvernement de remettre à intervalles rapprochés un rapport sur les conditions dans lesquelles est mise en oeuvre une obligation nationale. Il est rédigé, lui aussi, en termes très généraux et il peut revêtir un caractère quelque peu contraignant et, surtout, trop formel tant qu'une portée plus pratique ne sera pas donnée au droit affirmé, de manière encore assez théorique, dans cet article 14 ter . Cette concrétisation devrait d'ailleurs être l'un des objectifs de la révision des dispositions inscrites en 1975 dans la loi d'orientation en faveur des personnes handicapées.
Par ailleurs, ce sous-amendement décrit le rôle du conseil national consultatif des personnes handicapées de manière trop restrictive par rapport à ses missions actuelles.
Voilà pourquoi le Gouvernement souhaite le retrait de ce sous-amendement.
Je note également que le Gouvernement a déposé un sous-amendement à l'amendement n° 84 portant sur l'article 14 quater, qui définirait le rôle du conseil national consultatif des personnes âgées et du conseil départemental consultatif des personnes handicapées.
M. le président. Monsieur Chabroux, le sous-amendement n° 351 rectifié est-il maintenu ?
M. Gilbert Chabroux. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. Le sous-amendement n° 351 rectifié est retiré.
Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 328 rectifié.
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. J'ai bien entendu la réponse de Mme la secrétaire d'Etat. Je la remercie d'être attentive à nos préoccupations et d'avoir le souci de faire évoluer la loi de manière à donner satisfaction à la fois aux familles de handicapés, mais également aux élus qui sont en contact permanent avec ces familles.
Je ne veux pas mettre en cause votre volonté, madame la secrétaire d'Etat, mais je souligne que tous les ministres qui se sont succédé depuis maintenant près de deux décennies et sous tous les gouvernements ont tenu le même discours que vous, et que rien n'a changé. Je l'ai entendu dire par Mme Veil, puis par M. Barrot, et, avant vous, par Mme Aubry.
Maintenant, de nouvelles échéances électorales approchent et je crains que cette question ne soit reportée à une prochaine législature. En attendant, les familles devront continuer à vivre dans les mêmes conditions.
C'est la raison pour laquelle il me semble qu'il vaut mieux tenir que courir et adopter aujourd'hui une disposition qui n'est pas parfaite, nous en avons conscience, qui nécessiterait sans aucun doute des aménagements complémentaires et qui aurait mieux sa place dans une réforme globale. Mais, à défaut de cette réforme globale, prenons au moins les quelques dispositions qui permettront de donner un minimum d'assurance à ces familles qui ne peuvent plus continuer à vivre dans ces conditions.
Je me permets donc d'insister auprès de nos collègues pour qu'ils approuvent l'amendement de M. le rapporteur et le sous-amendement que j'ai présenté.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. L'article 14 ter de ce projet de loi de modernisation sociale propose une nouvelle rédaction de l'article 1er de la loi du 30 juin 1975 d'orientation en faveur des personnes handicapées.
Il tend notamment à supprimer le principe selon lequel « la prévention et le dépistage des handicaps » constituent une obligation nationale, mais il ne prévoit pas de véritable droit à compensation.
Chacun s'accordera sur le fait que les apports de cet article sont pour le moins fragiles, eu égard aux aspirations et aux revendications légitimes des personnes handicapées. J'ai entendu les représentants de certaines associations dire qu'il était « uniquement d'ordre déclaratif, sans portée nominative ». C'est d'ailleurs presque un euphémisme.
Que le législateur et les pouvoirs publics rappellent le caractère fondamental de l'accès des personnes handicapées aux droits offerts à tous les citoyens, soit ! Mais je ne crois pas que ces personnes et les associations qui soutiennent leurs revendications ne demandent que des discours consensuels et des paroles apaisantes. Maintenant, il faut agir.
M. Alain Vasselle. Très bien !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Il faut maintenant cesser de multiplier les déclarations de principe, qui n'entraînent, concrètement, aucune amélioration de la vie quotidienne des personnes handicapées.
Ces personnes et les associations se mobilisent depuis de nombreuses années, travaillant, réfléchissant, se concentrant, formulant des revendications précises et des propositions détaillées, afin d'inscrire, dans la pratique, les justes principes décrits dans cet article 14 ter .
Je souhaite, madame la secrétaire d'Etat, et en disant cela je ne me fais que le relais de nombreuses associations de personnes handicapées, que, comme l'a suggéré à l'Assemblée nationale Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité lors de la première lecture de ce projet de loi, une grande réforme de la loi de 1975 soit présentée plutôt que de petites modifications entreprises touche par touche, de façon parfois non cohérente, comme vous l'avez souligné tout à l'heure. Il faut maintenant prendre des mesures cohérentes.
Je pense que la réforme de cette loi-cadre ne peut se faire par le seul projet de loi rénovant l'action sociale et médico-sociale. Je note, à cette occasion, que ce projet de loi, pourtant très attendu, a d'ailleurs disparu de l'ordre du jour du Sénat d'ici à la fin de la session.
Quoi qu'il en soit, j'insiste pour dire que ce projet de loi ne concernera qu'une partie des préoccupations et de la vie des personnes handicapées et, bien d'autres domaines doivent être étudiés, mis à plat et rénovés pour pouvoir parler de véritable réforme.
Le 11 janvier 2001, Mme Gillot suggérait qu'elle était favorable à une éventuelle « ouverture d'une révision de la loi d'orientation de 1975 » sur d'autres questions que les établissements d'accueil et l'action sociale et médico-sociale. Nous attendons la concrétisation de ces propos.
Les personnes handicapées, vous le savez, madame la secrétaire d'Etat, s'interrogent de plus en plus sur cette question. Des rumeurs commencent à circuler, annonçant ou niant la préparation d'un tel projet de loi, pourtant tant attendu, d'un projet de loi qui cristallise l'attention de ces personnes et serait plus que bienvenu d'un point de vue juridique autant qu'économique, sanitaire et social.
Qu'en est-il ? Des consultations sur cet éventuel projet de loi ont-elles été prévues ? Comment sont-elles organisées ?
Madame la secrétaire d'Etat, je crois que, sur ces questions de forme, comme sur le fond de ce que pourrait être une réforme de la loi d'orientation de 1975, les personnes handicapées et leurs associations appellent vivement de leurs voeux une réponse claire et précise.
J'évoquerai maintenant deux questions essentielles qui montrent qu'en dépit des lois ou en raison de dispositions législatives inexistantes, décalées ou mal appliquées, le sort réservé aux personnes handicapées n'est guère digne de notre pays. Il s'agit, d'abord, de la scolarisation et, ensuite, de l'emploi des personnes handicapées.
Ce sont là deux moyens d'intégration des personnes handicapées.
Une personne handicapée qui a un emploi, qui est intégrée, n'a plus de problèmes...
M. Alain Vasselle. Ceux qui le peuvent !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Si les personnes handicapées recevaient une bonne formation scolaire et professionnelle, elles formuleraient moins de revendications.
S'agissant de la scolarisation des enfants et des adolescents handicapés, comment expliquer que persistent de nombreuses difficultés en matière d'intégration à l'école, voire de scolarisation de ces jeunes ? Je pense, par exemple, aux enfants handicapés mentaux. Les listes d'attente pour l'entrée dans les établissements spécialisés sont, notamment, de plus en plus importantes.
M. Alain Vasselle. C'est vrai !
Mme Marie-Claude Beaudeau. De nombreuses familles attendent la création de postes d'instituteurs spécialisés pour garantir à leur enfant la scolarisation la plus complète possible. Des enfants scolarisés en classe d'intégration, les fameuses CLIS, voient leur cursus stoppé à la fin du primaire parce qu'il n'existe pas de dispositif identique au niveau du collège dans leur département. On constate également un manque défaut de véritable formation et de sensibilisation des enseignants et des directeurs d'établissement, à l'accueil et à la prise en charge de ces élèves. Il faut le dire ! Ce n'est peut-être pas complètement leur faute, mais il y a beaucoup à faire.
Les exemples ne sont que trop nombreux. Ils révèlent que le plan « Handiscol », proposé par le Gouvernement il y a plus d'un an et demi, n'a que très partiellement atteint ses objectifs, madame la secrétaire d'Etat. Je reviendrai sur cette question à l'occasion de la défense d'un autre amendement.
Parallèlement au problème de la scolarisation, il faut soulever la question de l'emploi des personnes handicapées. Comment s'en étonner puisque l'accès au travail est largement conditionné par la scolarité, je le disais tout à l'heure, par l'accès aux études et la réussite aux différents échelons de la vie scolaire et universitaire ?
Vous le savez, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, dans notre pays, 220 000 personnes handicapées travaillent, soit un taux de 3,90 %, d'ailleurs en diminution, bien en dessous du taux proratisé de 6 % prévu par la loi de 1987 et actualisé en 1991.
Pour ne pas allonger les débats, monsieur le président, je ne reviendrais pas sur les conditions d'embauche, de rémunération, d'évolution de carrière des personnes handicapées et, plus généralement, sur leur place au travail.
En revanche, j'aborderai brièvement la question des cotisations des entreprises à l'AGEFIP, cotisations bien trop insignifiantes pour être réellement dissuasives et, plus encore, la question du mode de décompte des travailleurs handicapés en milieu ordinaire.
Les modalités de décompte des catégories de bénéficiaires sont telles, madame la secrétaire d'Etat, que le taux d'emploi des personnes handicapées, qui est déjà faible, est tout à fait irréaliste, c'est-à-dire largement surestimé ! Et la loi prévoit implicitement ce mécanisme, qui est connu, mais qui mérite, je crois, d'être dénoncé.
L'article L. 323-4 du code du travail dispose que, selon des modalités déterminées par décret, les bénéficiaires sont pris en compte une fois et demie, deux ou plusieurs fois : si leur handicap est important ; s'ils remplissent ceratine sconditions d'âge ; s'ils reçoivent une formation au sein de l'entreprise.
L'article D. 323-2 de ce même code, issu de décret du 7 février 2000 prend acte de l'article L. 323-2 et détermine, selon le handicap, l'âge, le passé salarial de la personne handicapée, les modalités et la nature de sa prise en compte dans le cadre de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés.
Tels sont, madame la secrétaire, mes chers collègues, les quelques éléments sur lesquels je voulais attirer votre attention aujourd'hui. Je le redis, ce ne sont que deux exemples parmi une vériable masse de problèmes non résolus pour les personnes handicapées. Mais je les trouve symboliques du fait qu'ils posent la question de l'insertion des personnes handicapées.
Ces dernières considèrent que, depuis trois ans, elles ont été largement écoutées, mais que les choses n'avancent pas. C'est pourquoi, avec mon groupe, je souhaite véritablement que le Gouvernement se saisisse plus rapidement encore de cette question et que vienne enfin à l'ordre du jour du calendrier gouvernemental et parlementaire une réforme concertée et efficace de la loi de 1975.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 328 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, l'amendement n° 83, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 14 ter est ainsi rédigé.

Articles additionnels après l'article 14 ter