SEANCE DU 16 MAI 2001


ITINÉRAIRE À TRÈS GRAND GABARIT
ENTRE BORDEAUX ET TOULOUSE

Suite de la discussion et adoption
d'un projet de loi déclaré d'urgence

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la réalisation d'un itinéraire à très grand gabarit entre le port de Bordeaux et Toulouse.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Rispat.
M. Yves Rispat. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les 133 milliards d'euros de carnet de commandes dont dispose, depuis le début de l'année, le groupe européen aéronautique EADS, qui réunit le français Aérospatiale, l'allemand Dasa et l'espagnol Casa, permet à notre industrie aéronautique de s'appuyer sur l'équivalent de cinq ans d'activité pour réussir son développement.
EADS, le leader euroépen de l'aéronautique et de l'espace, va indirectement faire bénéficier les Etats de l'Union européenne des retombées financières et fiscales de ce chantier primordial des super jumbo A 380, qui peut-être considéré comme le plus grand chantier économique européen de ce début du xxie siècle.
Avec de tels chiffres, il convient de rappeler que le coeur d'EADS est Airbus, à Toulouse, qui assure les deux tiers des ventes de l'entreprise : il est fondamental que les habitants du sud-ouest de la France, qui vont seuls subir les inconvénients de l'itinéraire à très grand gabarit entre le port de Bordeaux et Toulouse, puissent aussi bénéficier des retombées positives de cette grande aventure de l'aéronautique mondiale.
Oui, la réalisation d'un itinéraire à très grand gabarit entre le port de Bordeaux et Toulouse est urgente, et l'utilisation d'une procédure exceptionnelle dans le cadre de l'expropriation se justifie, la prise de possession immédiate par l'Etat de terrains dont l'acquisition est nécessaire à la réalisation des travaux d'aménagement constituant un intérêt national.
Sur cette urgence, le Sénat se prononcera favorablement sans doute, mais, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte qui est soumis aujourd'hui à notre examen aura des impacts défavorables sur les populations.
Cet itinéraire entre le port de Bordeaux et Toulouse privera de nombreux résidents et propriétaires de la pleine jouissance de leurs biens. Je citerai ainsi la station thermale de Cazaubon-Barbotan, située sur l'itinéraire, première de notre département et septième de France, qui ne doit pas être défigurée mais, bien au contraire, protégée.
L'Etat s'arroge des pouvoirs d'expropriation dans l'intérêt national. Des agriculteurs, des commerçants, des professions libérales, des personnes âgées, n'en vont pas moins subir, du fait des travaux, toutes sortes de nuisances en même temps qu'une irrémédiable modification de leurs itinéraires de vie.
Rendre possible le transport de sections de fuselage de cinquante mètres de longueur, huit mètres de largeur et quatorze mètres de hauteur dans des convois comptant jusqu'à six camions, soit des convois de près de 300 à 400 mètres, engendrera des nuisances et perturbera durablement les déplacements sur les axes des départements de Gironde, des Landes, du Gers et de la Haute-Garonne.
Le Parlement s'apprête à reconnaître d'intérêt national 250 kilomètres de route, en autorisant des expropriations pour réaliser, dans des délais réduits et avec tous les risques d'une procédure d'urgence, le sacrifice des intérêts individuels et locaux pour les intérêts collectifs et nationaux.
Les nuisances environnementales et les contraintes occasionnées sur ces 250 kilomètres toucheront non seulement les habitants mais aussi toutes les collectivités locales, villes, communautés de ville et conseils généraux.
Tous leurs projets devront tenir compte des nouvelles contraintes qu'imposent le grand gabarit et la nationalisation de l'itinéraire.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. C'est un progrès !
M. Yves Rispat. Non seulement les routes latérales, mais aussi tous les projets d'aménagement de ce périmètre seront soumis aux contraintes juridiques et pratiques du très grand gabarit.
Dans le département du Gers, l'économie agricole et touristique sera atteinte.
Je souhaite que le Gouvernement prévoie les compensations nécessaires pour corriger, en termes d'aménagement du territoire, les retombées négatives de cet itinéraire à très grand gabarit et ramène les délais d'exécution du contrat de plan Etat région à trois ans.
Je suis en effet convaincu que l'aménagement de l'itinéraire à très grand gabarit ne sera une réussite que si toutes les mesures collectives et individuelles ont pour contrepartie une forte compensation nationale.
En ce qui concerne les expropriations, je souligne, en tant que sénateur du Gers, l'urgence de la mise en place des fonds nécessaires pour que les intérêts particuliers qui seraient amenés à être sacrifiés à l'intérêt général fassent l'objet d'une juste et suffisante compensation.
Les entreprises et exploitations agricoles de même que les personnes physiques concernées doivent être prioritaires, et elles attendent avec vigilance des mesures.
Les incidences du projet sur le réseau routier de communication, particulièrement sur la route nationale 124, doivent également faire l'objet d'une compensation.
Alors que l'Etat impose aux populations des quatre départements de la Gironde, des Landes, du Gers et de la Haute-Garonne des contraintes et des nuisances, il est fondamental qu'il s'engage à réaliser sur toute la traversée du département du Gers et de l'itinéraire à très grand gabarit la mise à deux fois deux voies de la RN 124, car ce sera un moyen de compenser les nuisances de circulation : 120 kilomètres de cette route seront utilisés par ledit itinéraire. Plus que jamais, la RN 124 sera indispensable aux entreprises et aux populations dont les déplacements seront affectés.
Sur la RN 124, il est nécessaire d'engager immédiatement des travaux pour en faire un itinéraire capable d'assurer le surcroît de transports, et pour relier par la suite les régions Midi-Pyrénées et Aquitaine, avec la future liaison entre Pau et Bordeaux.
De même, la RN 21 sera nécessaire aux services de sécurité amenés à intervenir et palliera le blocage de l'itinéraire à très grand gabarit.
Monsieur le ministre, l'absence explicite de référence à la RN 124 dans les compensations serait donc une erreur, et elle serait très mal comprise par les populations.
L'engagement de l'Etat devrait porter sur la réalisation entre le 1er janvier 2002 et le 31 décembre 2006 des travaux sur la RN 124 afin d'assurer la mise à deux fois deux voies de cet itinéraire en appui au programme de compensation de l'itinéraire à très grand gabarit.
Par ailleurs, j'apporte mon plein soutien à l'amendement présenté par M. le rapporteur et visant à la création d'un fonds de péréquation de la taxe professionnelle. Pour être plus réalistes, peut-être pourrait-on envisager à défaut une convention partenariale ou particulière qui engloberait à la fois le département de la Haute-Garonne, Toulouse et la région Midi-Pyrénées ?
En tout cas, il faut un outil de solidarité pour le partage des retombées économiques du projet, afin que ces dernières puissent bénéficier à toutes les communes et collectivités concernées ainsi qu'à l'aménagement du territoire de l'ensemble de la région.
Je conclurai mon intervention en insistant à nouveau sur la nécessité d'être encore plus à l'écoute des populations et de leur fournir des réponses précises.
Sur l'ensemble du trajet, la constitution d'associations opposées au projet se multiplie, les élus des communes et des cantons concernés sont inquiets et s'interrogent.
De nombreuses personnes se sont mobilisées, en particulier, vous l'avez rappelé, monsieur le ministre, dans la vallée de la Save, un des poumons verts de Toulouse. Elles ont émis de fortes critiques sur l'opacité du dispositif, critiques compréhensibles puisque le message sur les compensations n'est pas assez clair.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Comment ?
M. Yves Rispat. Reconnaisez-le, monsieur le ministre, vous êtes vous-même plein d'incertitude en ce qui concerne la dernière portion de l'itinéraire.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Mais non !
M. Yves Rispat. Avec 800 milliards de francs de commandes engagées et des perspectives à long terme dix fois plus importantes, accordez-nous, monsieur le ministre, que nous devrions pouvoir trouver facilement les moyens de donner satisfaction à tous et d'adopter des solutions conformes aux souhaits des populations tout en finançant l'équipement routier.
Le volume des compensations nécessaires est peu de chose au regard de l'importance du projet industriel. Je crois donc que seul un message clair sur les dividendes dont bénéficieront les populations locales - dividendes qui ne doivent pas uniquement profiter aux actionnaires et partenaires mondiaux d'EADS, et c'est un langage que vous ne pouvez que comprendre, monsieur le ministre - permettra la réussite de ce projet d'enjeu national et européen qu'en ce début de XXIe siècle nous nous devons de favoriser. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants, de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. César.
M. Gérard César. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je me réjouis, et je ne pense pas être le seul, que la France ait été choisie parmi nos partenaires européens pour accueillir l'assemblage de l'Airbus 380.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Il a fallu se battre !
M. Gérard César. En tant qu'élu girondin, vous le comprendrez, j'avais une préférence pour le site de Bordeaux et M. le président aurait certainement souhaité, lui aussi, que le projet se réalise à Bordeaux.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Ah ! C'est le Sud-Ouest !
M. Jean-Pierre Plancade. Quel bel esprit de solidarité interrégionale !
M. Gérard César. Le site de Bordeaux, qui accueille déjà Aérospatiale, la SOGEMA, Dassault et d'autres entreprises de ce secteur d'activité, est tout à fait opérationnel.
M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur. Et ainsi, le Gers n'aurait pas eu de problème ! (Sourires.).
M. Gérard César. En effet, cela aurait réglé le problème de façon très simple : on faisait tout à Bordeaux et le problème était réglé puisque l'on évitait le parcours au long cours traversant la Gironde, une partie des Landes, le Gers et la Haute-Garonne.
Cela étant dit, je prends acte de la décision de confier la construction de l'Airbus A 380 à l'agglomération toulousaine. Ce choix doit d'ailleurs être l'occasion pour les deux grandes métropoles régionales du grand Sud-Ouest, qui possèdent des atouts communs, de développer une coopération et des synergies autour de leurs activités de pointe complémentaires, telles que l'aéronautique, le secteur spatial ou encore la haute technologie. Le port de Bordeaux, premier port du Sud-Ouest, qui a déjà réalisé de nombreux équipements, sera ainsi amené à s'adapter et à se développer pour occuper demain une place privilégiée sur la façade atlantique européenne.
Ce choix de tracé doit également être l'occasion de conforter les projets d'infrastructures routières déjà programmés dans le grand Sud-Ouest, en particulier en Aquitaine, cette région ayant longtemps été la grande oubliée des politiques de désenclavement.
L'établissement de la « deux fois deux voies » entre Bordeaux et Pau, la transformation de la RN 124, la liaison Toulouse-Bayonne en « deux fois deux voies » et l'amélioration progressive de la RN 21 offriront une chance de développement en même temps qu'un accès par les Pyrénées centrales à notre voisine l'Espagne.
Toutefois, si la réalisation d'une liaison spécifique à grand gabarit dans des délais très courts est justifiée par le calendrier de l'A 380, cela ne dispense pas pour autant d'une concertation en amont du projet. Or, celle-ci a été, à ce jour, quasi inexistante. Force est de constater que le débat d'aujourd'hui ne porte ni sur la décision de réaliser cet itinéraire, puisqu'elle est déjà prise, ni sur le choix du tracé, qui ne relève pas de notre compétence.
On peut comprendre l'étonnement, les inquiétudes, voire le malaise des maires, des élus locaux et de la population qui découvrent un beau matin dans la presse qu'une route va traverser leur village ou leur propriété et que des risques d'expropriation pèsent sur eux ! Les interrogations sur les conséquences environnementales et paysagères ainsi que sur l'impact des nuisances pour l'activité des collectivités locales et de leurs habitants sont légitimes. J'insiste donc, monsieur le ministre, sur l'importance de la concertation avec l'ensemble des acteurs intéressés et plus particulièrement avec les élus.
De même, nous souhaiterions un calendrier précis pour la mise en place de la procédure d'extrême urgence en matière d'expropriation. Les élus et les populations ne comprendraient pas que, pour le moindre projet, une enquête publique a priori et des études d'impact soient nécessaires, alors que pour cet énorme projet - que je ne conteste pas d'ailleurs - vous allez appliquer l'enquête publique a posteriori.
Une des interrogations qui demeurent concerne la Gironde et le débarquement des matériels dans le port de Pauillac. Je veux parler du passage des barges sous le pont de pierre de Bordeaux, monument historique classé datant du xixe siècle et principal axe de circulation de la ville. Bien que des études aient été faites et qu'en juillet 1995 une porte du Béluga, le gigantesque avion-cargo d'Airbus Industries, ait franchi le pont sur une barge, la question ne semble pas encore avoir été tranchée...
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Ça passe !
M. Gérard César. Beaucoup de conditions doivent être remplies pour ce passage puisque l'imposant convoi devra franchir l'ouvrage à marée basse et hors période de crue du fleuve.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Tous les jours, il y a marée basse !
M. Gérard César. Deux fois, et là nos statistiques sont fiables ! (Sourires.)
Par ailleurs, la largeur des barges ne laissant que très peu d'espace de chaque côté, il ne faudrait pas qu'une fausse manoeuvre vienne endommager les piliers et donc la solidité du pont, d'autant qu'il y a des remous et des tourbillons à cet endroit.
Je souhaite, monsieur le ministre, obtenir des précisions sur la faisabilité de cette opération et sur le dispositif de protection du pont de pierre qui est prévu. Le groupe de travail composé de représentants de EADS, du port autonome de Bordeaux, de la communauté urbaine, des services de l'Etat et du maire de Bordeaux a-t-il rendu son rapport ?
Par ailleurs les communes concernées par cet itinéraire à grand gabarit doivent être étroitement associées à la définition des modalités de réalisation des travaux. Il convient surtout de faire en sorte que ce projet n'ait aucune incidence financière sur leur budget. Les collectivités territoriales ne doivent pas être démunies. Au contraire, elles doivent percevoir les compensations appropriées, en particulier à travers la prise en charge des travaux d'aménagement sur leurs territoires. Il en est ainsi des améliorations ou des créations de routes, de déviations, de carrefours, de l'enfouissement des lignes électriques et téléphoniques, mais aussi de l'aspect paysager des opérations.
A titre d'exemple, je veux citer la commune de Bernos-Beaulac, traversée, du Nord au Sud, par cette liaison. Le maire de cette commune, que j'ai contacté officiellement, me confirme qu'il avait, avec son conseil municipal, décidé de lancer un programme d'aménagement de bourg, en particulier de trois carrefours et d'une place, orienté surtout vers la sécurité de tous.
Une première tranche de travaux, cofinancée par la DGE - donc par l'Etat - et par le conseil général de la Gironde, d'un montant de 1,6 million de francs devait être lancée rapidement, puisque les arrêtés de subvention sont pris. Que vont devenir ces travaux ? Allez-vous, monsieur le ministre, sans heurter les caciques de l'Organisation mondiale du commerce et au titre du contrat de plan ou avec le financement de EADS, prendre en charge la totalité des travaux qui devront s'inscrire forcément au titre de la sécurité routière, d'une part, et au titre des futurs aménagements à réaliser pour le passage de l'A 380, d'autre part ?
Dans ce cas de figure, il est nécessaire que les relais techniques et financiers soient pris en charge en totalité par l'Etat et que soit délestée financièrement - puisqu'il s'agit d'un itinéraire de délestage - la commune de Bernos-Beaulac qui subira de plein fouet les nuisances.
S'agissant de l'aspect paysager, Mme le ministre de l'environnement ne s'exprime pas sur l'ensemble du projet et sur l'abattage des arbres, pas plus qu'elle ne l'a fait pour les inondations de la Somme.
M. Pierre Lefebvre. Hors sujet !
M. Gérard César. Certes, le plan « paysage et sécurité » prévoit la replantation de deux arbres pour chaque arbre coupé ; monsieur le ministre, vous l'avez dit tout à l'heure.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. C'est-à-dire deux fois plus !
M. Gérard César. Nous sommes d'accord !
Mais lorsqu'on sait qu'il faut trente à quarante ans pour qu'un arbre puisse être considéré comme tel, on peut se poser des questions sur les conditions de cette replantation. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous donner des précisions supplémentaires ?
Pour que le projet industriel de l'A 380 soit une chance pour tous les départements et communes traversés par cet itinéraire, l'Etat et EADS doivent s'engager plus avant et donner les moyens d'un véritable développement économique, avec des retombées fiscales. La commission des affaires économiques du Sénat, comme vient de l'indiquer le rapporteur M. de Montesquiou, proposera un mécanisme de péréquation de la taxe professionnelle au profit des départements touchés, auquel nous souscrivons.
Dans le cas où cette péréquation de la taxe professionnelle ne pourrait être mise en oeuvre, il serait bon, monsieur le ministre, de signer des conventions financières avec les soixante-deux communes concernées. La démarche d'aménagement équilibré du territoire est à ce prix. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants. - M. Plancade applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Plancade.
M. Jean-Pierre Plancade. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les différentes autorités politiques, économiques et administratives se sont prononcées, à de nombreuses reprises, pour un itinéraire routier qui permette le passage de convois à grand gabarit entre Bordeaux et Toulouse.
En effet, il s'agit de donner à ces deux métropoles régionales des infrastructures suffisantes pour leur permettre de continuer, en synergie, le développement de leurs industries par la mise en oeuvre de grands projets industriels de dimension nationale et européenne. C'est aussi tout le sens de ce projet de loi.
Il s'inscrit parfaitement dans la politique de développement économique et d'aménagement du territoire en Midi-Pyrénées et en Aquitaine, décidée par le Gouvernement et dont les fondements ont été posés lors du contrat de plan Etat-région 2001-2006. Cet axe bimodal permettra la liaison du pôle industriel international de Toulouse à l'Atlantique et sera ainsi un facteur déterminant du désenclavement du grand Sud-Ouest.
Il n'est peut-être pas inutile de rappeler que cet itinéraire générera immédiatement, par-delà le développement économique attendu une fois cet axe réalisé, des milliers d'heures de travail pour nos entreprises, qui seront favorables au maintien et au développement de l'emploi.
Ce projet présente donc un intérêt économique et social indiscutable pour les quatre départements et pour les deux grandes régions du Sud-Ouest, qui seront désormais reliées. Pour toutes ces raisons, monsieur le ministre, le groupe socialiste soutiendra le projet de loi, sans équivoque et sans chantage.
Et pourtant, pourtant,...
M. Ladislas Poniatowski. C'est une jolie chanson ! (Sourires.)
M. Jean-Pierre Plancade. ... je ne peux m'empêcher, monsieur le ministre, de regretter vivement plusieurs choses, que d'autres orateurs ont évoquées avant moi.
D'abord, la façon dont ce dossier a été présenté aux élus : il faut bien le dire, ils ont été mis devant le fait accompli. Depuis, il est vrai, les services de l'Etat n'ont ménagé ni leur temps ni leur peine, et se sont mis à la disposition des élus, Mme Imbert, députée d'une des circonscriptions traversées par l'itinéraire, me l'a largement confirmé.
M. Pierre Hérisson. C'est la carotte et le bâton !
M. Jean-Pierre Plancade. Ensuite, le sentiment, partagé par plusieurs d'entre nous, qu'a été peut-être sacrifiée sur l'autel de l'urgence une réflexion suffisante sur le tracé qui nous a été soumis, au motif que l'un des utilisateurs potentiels doit pouvoir acheminer les pièces nécessaires à l'assemblage de l'avion gros porteur A 380 dès septembre 2003.
Pour ce cas précis, nous craignons que des solutions alternatives - l'autoroute, la voie fluviale, et même la voie des airs, peut-être par des dirigeables - n'aient été trop rapidement abandonnées. J'ai entendu ce que vous avez dit, monsieur le ministre ; je pense cependant que l'on pourrait continuer d'envisager un développement des études en ce qui concerne l'utilisation de dirigeables.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. On a regardé, vraiment !
M. Jean-Pierre Plancade. Je voudrais vous faire part des inquiétudes qui subsistent chez les élus locaux, comme dans les nombreuses associations qui se sont constituées autour de ce projet.
Même s'il est vrai que les services de l'Etat, je le répète, notamment en Haute-Garonne, font preuve d'ouverture, de disponibilité - et je sais que vous êtes intervenu souvent - il n'en demeure pas moins que cette concertation doit impérativement aller plus loin que de simples réunions d'information.
M. Gérard César. Oui !
M. Jean-Pierre Plancade. Si nous voulons que ce projet important soit réussi - et nous le souhaitons - il faut aussi qu'il soit accepté.
M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur. C'est vrai !
M. Jean-Pierre Plancade. Il est essentiel que soient associés à son élaboration l'ensemble des acteurs concernés. En effet, nous avons rencontré nombre de personnes, beaucoup d'élus et de nombreuses associations préoccupés par les conséquences éventuelles de cet itinéraire routier.
D'ailleurs, à ce propos, il est intéressant de noter que plus on se rapproche de Toulouse et plus les motivations sont différentes. j'ai entendu mes collègues du Gers et de la Gironde parler de la compensation communale, ce qui est parfaitement légitime.
M. Gérard César. Merci, monsieur Plancade !
M. Jean-Pierre Plancade. Mais plus on se rapproche de l'agglomération et moins le problème est financier.
M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur. Effectivement !
M. Jean-Pierre Plancade. Le problème ne se pose pas dans les mêmes termes, il se pose plus en termes d'environnement qu'en termes financiers. Habitant l'agglomération toulousaine, je suis obligé de souligner cet aspect ici, plus que d'autres aspects qui ont été largement évoqués par ceux qui m'ont précédé à cette tribune.
Même si nous devons faire en sorte que les indemnisations éventuelles prennent en compte ceux qui pourraient être pénalisés directement par ce tracé, parce qu'ils sont situés dans la zone d'expropriation, il faudrait aussi prendre en compte, monsieur le ministre, ceux qui seront touchés par l'itinéraire sans être situés dans le périmètre d'expropriation et qui verront la valeur de leur bien considérablement diminuée sans pouvoir être compensée.
M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur. En effet !
M. Jean-Pierre Plancade. Nous devons avoir cette préoccupation.
Les autres préoccupations, et de notre point de vue elles sont beaucoup plus importantes, portent sur l'environnement, la qualité de la vie et la sécurité. Les questions qui sont revenues de façon récurrente, permanente et forte sont les suivantes : quelles mesures seront prises pour protéger la traversée de nos villages, pour assurer la sécurité des piétons et des scolaires, pour ralentir de façon efficace la circulation, éventuellement pour limiter le trafic routier ?
Cet itinéraire, tel qu'il nous est présenté aujourd'hui, traverse - vous les avez évoqués - des sites naturels : la vallée de la Save et la forêt de Bouconne, autant de « poumons verts » de l'agglomération toulousaine où de nombreux habitants ont choisi de vivre dans un environnement naturel et calme, protégé des bruits et des dangers, supposés ou réels, de la métropole.
S'il existe un consensus autour de la nécessité de relier Toulouse et le port autonome de Bordeaux par une voie à grand gabarit, l'inquiétude est immense parmi la population de voir cet axe devenir rapidement une voie à grande circulation, voire à grande vitesse. Les craintes ne portent donc pas sur les convois hors gabarit, car on sait que toutes les précautions seront prises pour que leur passage se fasse dans les meilleures conditions. Elles portent davantage sur les conséquences d'un itinéraire aménagé et gratuit qui risque de devenir une voie très fréquentée et, d'aucuns le craignent, trop fréquentée. (M. le rapporteur opine.)
L'augmentation du trafic aurait des conséquences environnementales très fortes dans la vallée de la Save et la forêt de Bouconne, secteurs traditionnellement protégés. Les risques de saturation de la traversée des villages inquiètent beaucoup les élus locaux. En l'espace de trois semaines, on a d'ailleurs vu leur avis évoluer. C'est pourquoi il semble indispensable, monsieur le ministre, d'aller plus loin encore dans la concertation et la nécessité d'associer les élus locaux et les riverains à l'élaboration du tracé de cet axe, mais aussi, et surtout, aux conditions de son utilisation. De plus, il est urgent d'accentuer l'effort de communication et d'explication, car les mesures de sécurité et de protection de l'environnement sont, hélas ! encore trop peu connues de la population, même si d'aucuns multiplient leurs efforts en vue d'assurer une meilleure information.
Ce projet, monsieur le ministre, s'il est bien accompagné, recevra l'entier soutien de la population et des élus, conscients de l'enjeu économique et social pour les deux régions concernées, et pour l'agglomération toulousaine en particulier.
L'affaire est importante, monsieur le ministre. Des manifestations ont eu lieu la semaine dernière. Il faut que vous ayez présent à l'esprit le fait qu'au moins 40 % de ceux qui participaient à ces manifestations travaillent à Aérospatiale. Bien entendu, ils sont favorables à la construction de l'A XXX. Il y a donc là une contradiction. Nous devons écouter leurs arguments.
C'est pourquoi nous serons particulièrement vigilants s'agissant de votre réponse, monsieur le ministre. Mais nous avons compris l'urgence et le groupe socialiste souhaite que notre assemblée adopte ce texte sans modification. Nous ne nous associerons donc pas à un amendement qui retarderait la réalisation de ce projet.
Cependant, en commission, nous avons émis l'idée d'une convention avec les communes et les associations de riverains sur les engagements que l'Etat pourrait prendre en matière de sécurité, d'environnement, d'indemnisation, de compensation ou de tout autre problème soulevé par cet itinéraire. Cela dans un souci de transparence et de démocratie, principes auxquels tiennent particulièrement nos concitoyens - ces principes ont été largement évoqués au cours des deux manifestations publiques - attachement qu'ils ont souvent exprimé, notamment à l'occasion des dernières consultations locales.
C'est de la façon dont sera traité ce dossier avec la population et avec les élus que dépendra la réussite de cette réalisation, et en particulier le succès du passage des futurs convois à grand gabarit. Il s'agit, ici et maintenant, d'un exercice de démocratie de proximité. L'occasion est donnée au Gouvernement d'avoir un comportement exemplaire, de faire de la politique autrement, de dire ce que l'on va faire et de faire ce que l'on a dit.
M. Pierre Lefebvre. Bonne idée !
M. Jean-Pierre Plancade. Nos concitoyens y sont attentifs et y seront très sensibles. Je sais, monsieur le ministre, que c'est votre souci. Vous l'avez développé- vous êtes souvent intervenu dans le département - mais il est impératif de réussir. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'extrême urgence, procédure peu fréquente, témoigne, s'il en faut, de l'importance de ce projet d'itinéraire à grand gabarit dont nous débattons ce soir.
Il s'agit en effet de combler le retard pris dans le développement d'une région. Les équipements prévus, s'ils faciliteront la construction de l'avion A 380, serviront bien d'autres objectifs généraux. A cet égard, chacun comprendra que, par ses effets induits, le projet que nous examinons mettra la région de Toulouse dans une position favorable, et facilitera sa concurrence avec la Catalogne voisine. Nous devons cependant avoir le souci constant de préserver l'environnement. Je souhaite que cette question soit examinée avec une attention particulière.
Plus largement encore, les politiques économiques, les politiques de transport et d'environnement que nous poursuivons doivent être cohérentes, et nous devons faire en sorte que tous nos équipements concourent à un développement durable. Je crois que les impératifs de l'aménagement du territoire ne peuvent être dissociés des dispositifs destinés à faire prospérer un secteur industriel.
Si l'on s'en tenait aux deux articles du projet de loi qui nous est soumis, il s'agirait uniquement de se prononcer sur la possibilité de recourir à la procédure d'expropriation dans le cadre de terrains bâtis ; notre collègueLadislas Poniatowski l'a rappelé tout à l'heure, et je n'y reviendrai donc pas.
Toutefois, les enjeux du texte sont plus vastes.
S'agissant des retombées économiques, la nécessité de l'itinéraire est directement liée à l'obligation d'acheminer entre le port autonome de Bordeaux et l'agglomération de Toulouse les pièces en provenance de Saint-Nazaire, de Hambourg ou de Chester, en Grande-Bretagne, pour l'assemblage de l'A 380 ; les avantages d'un tel projet pour la région de Toulouse sont évidents et pas seulement pour l'aéronautique : il s'agit d'améliorer et de procéder à un véritable aménagement du territoire dans ce secteur.
Quelques chiffres permettent d'illustrer ces retombées économiques. Aujourd'hui, le pôle aéronautique et spatial représente, à Toulouse, 180 établissements, 22 000 salariés et 26,5 milliards de chiffres d'affaires. Ce sont, à terme, 9 000 emplois directs et 20 000 emplois en sous-traitance qui sont en jeu. Je ne citerai pas, bien sûr, les micro-projets, toutes les initiatives, tous les acteurs du tissu industriel et commercial qui pourront bénéficier globalement des retombées de ce grand projet.
Je regrette toutefois la faiblesse des études sur les aspects environnementaux. Précipitée, la mise en oeuvre de ce projet semble ne pas avoir pris en compte tout son impact sur l'environnement, notamment sur la faune et la flore locales. Monsieur le ministre, il faudra des efforts supplémentaires dans ce sens, et nous pensons que vous pouvez le faire.
Les associations opposées au projet se multiplient, et les médias n'ont pas toujours un rôle constructif dans ce domaine. Les élus des communes ou cantons concernés par le tracé s'interrogent. Voilà quelques jours, une manifestation a rassemblé nombre de personnes qui contestaient l'absence de concertation, l'opacité entourant le projet, et s'inquiétaient des dommages éventuels causés à l'environnement. Il va falloir non seulement les rassurer, mais aussi leur apporter nombre d'explications. Il s'agit en effet de populations de proximité, qui ont droit à des garanties suffisantes.
Elu rhône-alpin, j'envie mes collègues de la région Midi-Pyrénées qui voient désormais se concrétiser un grand projet d'aménagement du territoire. Nous en aurions bien besoin aussi chez nous, monsieur le ministre : les projets existent - vous voyez de quoi je veux parler ! - mais ils ne trouvent pas de traduction aussi efficace et déterminée.
Le maire de Toulouse et ceux qui soutiennent ce projet nous ont convaincus du bien-fondé de ce dernier.
J'attends que vous apportiez quelques précisions sur les inquiétudes que je viens d'exprimer.
Monsieur le ministre, mes collègues de l'Union centriste et moi-même voterons ce texte, qui répond à une situation exceptionnelle. S'y opposer reviendrait à condamner les chances de l'industrie aéronautique européenne, le rayonnement de la France en Europe et dans le monde. Ce texte permettra aussi d'apporter une amélioration globale et indispensable de la circulation sur la liaison entre le port autonome de Bordeaux et l'agglomération de Toulouse. (Applaudissements.)
M. Jean-Pierre Plancade. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la valorisation du potentiel économique d'un pays, d'une région ou de toute zone ne s'est jamais réalisée sans que se développent parallèlement les transports, qu'ils soient routiers, ferrés ou qu'ils résultent de l'aménagement des voies navigables.
Mme Hélène Luc. Eh oui !
M. Pierre Lefebvre. Effets d'entraînements industriels, multiplication du commerce et des échanges, parfois au long cours, augmentation des déplacements des populations se rendant sur leur lieu de travail, toute dynamique de croissance et de développement suscite progressivement un désenclavement des territoires grâce à la mise en place d'un réseau de transport qui contribue au maillage des espaces socio-économiques.
L'Etat, en tant que premier responsable de l'aménagement du territoire, soucieux de promouvoir un développement économique équilibré des régions, a largement contribué à cette tâche. Il y participe encore aujourd'hui avec, dans le cadre de la décentralisation, l'appui, voire dans certains cas - et nous avons de bonnes raisons de penser qu'ils seront de plus en plus nombreux -, le relais de nouveaux acteurs tels que les régions, les regroupements intercommunaux, les communautés de pays, les villes, mais aussi l'Union européenne.
L'insuffisance d'infrastructures de capacités pour assurer, entre autres, la circulation de convois exceptionnels entre différents pôles industriels et technologiques peut donc constituer un handicap au développement de l'activité économique.
Le projet de loi relatif à la réalisation d'un itinéraire à très grand gabarit entre le port de Bordeaux et Toulouse, que nous examinons ce soir, répond précisément à cette préoccupation. Il devrait permettre aux deux grandes métropoles du sud-ouest de la France de s'insérer dans le commerce nord-européen grâce au développement des activités portuaires de Bordeaux. Il devrait également permettre de valoriser les atouts industriels à la pointe des technologies nouvelles dans les domaines de l'aérospatiale et de l'aéronautique grâce au pôle toulousain, susceptible d'irriguer économiquement le sud de la région Midi-Pyrénées.
Cet itinéraire sera donc utilisé pour convoyer les pièces d'assemblage de l'avion gros porteur d'Airbus, l'A 380, un fleuron de l'industrie européenne, pouvant transporter jusqu'à 800 passagers. C'est un exemple réussi d'une Europe de la coopération,...
Mme Hélène Luc. Eh oui ! Très bien !
M. Pierre Lefebvre. ... associant plusieurs nations - la France, l'Allemagne, la Grande-Bretagne et l'Espagne - à travers un partenariat industriel et technologique, valorisant synergies techniques, atouts et avancées en matière de recherche-développement, au bénéfice de l'emploi. Les éléments construits dans les unités de production d'EADS, à Chester, en Grande-Bretagne, à Hambourg, les pièces en provenance des usines de Saint-Nazaire seront donc assemblés à Toulouse, et c'est là une victoire que nous avons ainsi remportée.
Les retombées économiques pour le tissu industriel régional et pour l'ensemble des quelque 500 sous-traitants sont évidentes. Elles s'inscrivent en outre sur le long terme puisque la production de l'avion s'étalera sur une vingtaine d'années.
L'emploi en sera le premier bénéficiaire avec, à la clé, la création d'environ 6 000 emplois sur le plan local et, de sources ministérielles, de quelque 40 000 emplois sur le plan national.
M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur. Européen !
M. Pierre Lefebvre. Voilà qui n'est pas rien !
Mais, si cet itinéraire a pour objectif d'assurer la liaison du pôle technologique et industriel de Toulouse à l'Atlantique, il s'inscrit incontestablement dans une ambition beaucoup large : l'amélioration des relations d'échange entre différents pôles de développement régionaux européens et la redynamisation économique du sud-ouest de la France. Il constitue, à n'en pas douter, une première étape, décisive s'il en est, du désenclavement routier des régions Aquitaine et Midi-Pyrénées.
Première étape d'une amélioration des liaisons internes du grand Sud-Ouest, cet itinéraire contribue à assurer une meilleure fluidité du trafic, que celui-ci soit lié, par exemple, à l'exploitation économique de la forêt landaise, à l'agro-industrie du département du Gers ou au transit des camions ravitaillant les grandes surfaces.
Il répond aussi, à notre sens, aux exigences d'aménagement et de développement durable du territoire des régions Aquitaine et Midi-Pyrénées, exigences inscrites dans le dernier contrat de plan Etat-région pour les années 2000-2006.
En ce sens, il s'inscrit aussi dans la continuité de la loi d'orientation du 25 juin 1999 pour l'aménagement et le développement durable du territoire, dont l'une des ambitions était précisément de développer les infrastructures routières et les réseaux de transport du grand Sud-Ouest.
L'actuel projet de loi vise donc simplement à accélérer la réalisation de cet itinéraire spécial, à permettre à l'Etat de prendre possession des terrains concernés pour des raisons d'ordre économique et industriel qui justifient le recours à une procédure d'extrême urgence.
Les collectivités territoriales, dont les budgets - il faut le souligner - ne seront aucunement mis à contribution, en seront les premières bénéficiaires.
En écoutant les intervenants qui m'ont précédé à cette tribune, en particulier M. le rapporteur, je me demandais s'ils prenaient vraiment en compte l'intérêt national.
M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur. Il fallait mieux écouter !
M. Pierre Lefebvre. Il me semble que tout est ramené de l'intérêt général à l'intérêt particulier.
En ce qui me concerne, c'est bien la première fois que j'entends des élus dire d'un tel aménagement routier qu'il entraînera des nuisances telles qu'il sera nécessaire de les indemniser. Et ces élus sont souvent les premiers à réclamer des autoroutes, ce qui n'a rien à voir avec le projet qui nous concerne aujourd'hui, qui reste une route à grande circulation. En quoi une route élargie par endroits et sans pont l'enjambant, sans poteaux téléphoniques et électriques et, de plus, évitant les agglomérations par des déviations provoquerait-elle des nuisances telles qu'il faille les indemniser ?
Ces collègues ont posé la question d'un aménagement équilibré du territoire, mais ils le font, me semble-t-il, d'une manière qui n'est pas acceptable, comme une espèce de chantage.
Force est de reconnaître cependant que, sur le plan environnemental, la réalisation de cet itinéraire aura des conséquences certaines.
M. Emmanuel Hamel. Vous le reconnaissez !
M. Pierre Lefebvre. Nul ne nierait qu'une telle infrastructure routière aura une incidence sur le paysage, comme nul ne niera qu'elle sera source de soucis pour les personnes concernées par les mesures d'expropriation. Mais chacun sait aussi à quel point il est difficile de concilier les exigences économiques et la valorisation du potentiel d'emploi avec les questions de l'environnement. Le Gouvernement s'est toutefois engagé fermement à ce que les nuisances en ce domaine soient les plus limitées possible.
La mise en oeuvre d'un plan environnemental s'inscrivant dans le programme national « Paysage et sécurité » lancé par le Gouvernement devrait permettre de réduire au minimum les nuisances occasionnées par la multiplication, en particulier, des contournements d'agglomérations.
En outre, à travers les « plans de gestion d'arbres d'alignement », il est prévu - et M. le ministre l'a confirmé - de replanter deux arbres pour chaque arbre coupé. A cela s'ajoutent des programmes d'enfouissement des lignes électriques et téléphoniques sur l'ensemble du parcours.
Nous sommes sensibles à de telles mesures qui sont soucieuses de l'environnement et qui mobilisent les nouvelles technologies. Mais nous n'oublions pas l'intérêt général ni le fait que ce projet de loi vise aussi à permettre le développement d'un bassin d'emplois et d'une industrie qui est le fleuron de notre pays.
Pour toutes ces raisons, nous sommes favorables à l'adoption de ce projet de loi sans modification. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen et sur les travées socialistes.)
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, toutes les interventions que j'ai entendues ce soir participent d'une démarche tout à fait positive.
M. le rapporteur a eu raison d'affirmer d'entrée de jeu que la réalisation de l'avion gros porteur A 380 représente une chance qu'il ne faut pas gâcher. Le simple fait d'obtenir que le siège social d'Airbus, qui est désormais une société européenne intégrée de plein exercice, reste à Toulouse constituait un pari difficile, qui a été gagné.
En outre, il n'était pas non plus évident pour tout le monde que le montage d'un tel avion, formidable prouesse technologique, s'effectuerait dans notre pays et non pas à Hambourg ou ailleurs. L'enjeu est considérable, puisqu'il y va de 120 000 emplois en Europe, dont 40 000 en France, qu'ils soient directs ou induits, et pas seulement dans le Sud-Ouest.
Ce projet de loi vise notamment à résoudre les problèmes de délais qui ont été évoqués. La décision de réaliser l'avion gros porteur a été prise en décembre dernier, voilà cinq mois de cela : je suis d'accord avec vous, mesdames, messieurs les sénateurs, quand vous soulignez que la concertation est nécessaire, mais mesurez dans quelle situation nous avons été placés !
Certes, il faut bien sûr tenir compte des problèmes qui se posent s'agissant du tracé proposé ou des contraintes existant à certains endroits, mais l'essentiel, non seulement pour le Gouvernement mais aussi pour les industriels de tout le bassin d'activité toulousain et les élus que vous êtes, c'est cette chance extraordinaire qui, comme vient de l'indiquer à l'instant M. Lefebvre, s'offre à notre pays. Ce n'est pas par esprit cocardier que je le dis, mais les premiers A 380 qui seront livrés en 2006 partiront bien de Toulouse et porteront nos couleurs. (M. Joyandet fait le « V » de la victoire.)
M. Jean-Pierre Plancade. Bravo !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. J'estime que ce point méritait d'être souligné.
Cela étant, je précise, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, que l'itinéraire initialement proposé et qui a été rejeté par le conseil général du Lot-et-Garonne imposait l'abattage d'au moins deux fois plus d'arbres que celui qui nous intéresse aujourd'hui. De plus, il concernait seize villages, au lieu de sept, et il coûtait plus cher.
M. Poniatowski m'a interrogé sur l'extrême urgence de la saisine du Parlement, mais il me semble que je viens de répondre à sa question : si nous ne pouvons pas procéder aux premiers essais de l'avion en 2003, nous ne serons pas en mesure d'honorer la commande pour 2006 et la région de Toulouse ne bénéficiera pas d'un bon accès à l'océan.
Pour autant, j'ai très clairement entendu votre message, mesdames, messieurs les sénateurs, s'agissant de l'impérieuse nécessité de consulter. M. Plancade y a insisté tout à l'heure : nous devons engager le débat, tous les élus doivent y être associés, ainsi que les populations concernées, et l'information doit circuler.
De ce point de vue, nous sommes entrés, depuis le 9 avril dernier, dans une nouvelle phase. En effet, les préfets ont déjà réuni l'ensemble des maires de leurs départements, et je puis vous dire que, avant la fin de ce mois, l'administration de l'équipement et le bureau d'études techniques les auront tous rencontrés individuellement.
Je voudrais aussi ajouter, à l'adresse de M. Poniatowski, qu'il n'existe pas de projet « ficelé » que l'on aurait sorti tout prêt des cartons. Ce n'est pas ainsi que les choses se passent ! Un itinéraire a été choisi, qui est constitué de routes existantes et d'aménagements à définir en liaison avec les élus et les populations. En juin se tiendront, dans chaque commune, les réunions publiques de concertation prévues par le code de l'urbanisme. L'instruction mixte aura lieu cet été, et l'enquête d'utilité publique se déroulera au mois d'octobre. Elle précédera, comme le souhaitait M. César, toute réservation d'emprise et tout début de réalisation.
Tel est donc le mécanisme. Il est vrai que le processus est accéléré au regard des éventuelles procédures d'expropriation, mais, même dans ce cas, les propriétaires ne subiront aucun préjudice financier.
Cela dit, j'ai cru comprendre que M. le rapporteur regrettait que le projet n'ait pas donné lieu à un débat public préalable, et je souhaiterais lui apporter quelques précisions sur ce point.
Tout d'abord, la loi Barnier prévoit que de tels débats ne doivent être organisés que pour les projets d'autoroute ou de voie expresse à deux fois deux voies, avec un seuil minimal de 4 milliards de francs. Or l'opération qui nous occupe ne coûtera pas 4 milliards de francs ! Les conditions requises n'étaient donc pas réunies.
M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur. Je l'ai dit.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Par ailleurs, la commission nationale du débat public a été saisie officiellement et a décidé, en toute indépendance, de ne pas organiser de débat public. Elle a fait connaître cette décision par un avis rendu voilà deux jours.
M. Alain Joyandet. Opportunément !
M. Ladislas Poniatowski. Quelles raisons a-t-elle invoquées ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Les raisons expliquant cette décision tiennent sans doute aux conditions prévues par la loi Barnier auxquelles j'ai fait référence.
Cela étant, d'une façon plus générale, c'est toute la question de ces procédures de débat public qui est posée, et le Gouvernement est tout à fait disposé à envisager l'amélioration de la législation existante, afin de trouver des solutions aux difficultés réelles que l'on rencontre en cette matière.
En ce qui concerne l'environnement, je me réjouis que l'ensemble des intervenants aient fait allusion à cette problématique, qui est d'ailleurs maintenant intégrée dans toute démarche sociale ou économique.
S'agissant du milieu naturel, tout le monde s'accorde à reconnaître qu'il ne subira aucune atteinte, puisque l'itinéraire emprunte des routes existantes. En outre, comme M. Lefebvre l'a indiqué, des lignes électriques seront enterrées, ce qui est donc plutôt positif de ce point de vue, et les arbres seront replantés en nombre deux fois plus grand qu'aujourd'hui, même s'il ne s'agira bien sûr pas d'arbres centenaires. J'ai bien compris que le Sénat souhaitait qu'ils ne soient pas trop petits, mais tel ne sera pas le cas ! C'est donc, là encore, une perspective de développement qui est ouverte.
M. Ladislas Poniatowski. Il y aura des petits oiseaux dessus ! (Sourires.)
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Vous avez affirmé, monsieur le rapporteur, que le ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement n'avait pas été associé à notre réflexion. C'est faux !
M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur. C'est lui qui le prétend !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je tiens à préciser que les directions régionales de l'environnement ont bien évidemment été associées aux études, qu'elles n'ont pas émis d'objection...
M. Gérard Larcher. Cela vaut pour d'autres projets !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. ... et qu'aucune zone retenue au titre de Natura 2000, au sens de la directive « habitat », n'est touchée par l'itinéraire. (Exclamations sur les travées du RPR.)
M. Pierre Hérisson. Heureusement !
M. Gérard Larcher. En revanche, pour les tourterelles !...
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je vous fournis des éléments qui vous seront utiles quand vous expliquerez la situation aux populations, mesdames, messieurs les sénateurs !
Pour ce qui concerne le milieu urbain, c'est non pas le choix de l'itinéraire ou la rapidité de sa réalisation qui ont été contestés, mais, en règle générale, d'après ce que j'ai lu et entendu, des éléments d'aménagement, parfois des détails. Cependant, les choses sont loin d'être figées, puisqu'ils doivent justement être examinés en concertation avec les élus et les populations. Cette concertation débute à peine, je le répète, et elle sera exemplaire,...
M. Jean-Pierre Plancade. Ah !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. ... y compris s'agissant de la partie fluviale de l'itinéraire.
M. Jean-Pierre Plancade. Très bien !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. A cet égard, je voudrais confirmer à M. César que c'est bien un passage sous le pont de pierre de Bordeaux qui est envisagé. (Sourires.)
M. le président. Je vous rassure, monsieur le ministre, il n'avait aucune inquiétude !
M. Gérard Larcher. Il ne pensait pas que c'était par-dessus, monsieur le ministre ! (Sourires.)
M. Jean-Pierre Plancade. Le pont résistera !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. En tout état de cause, je serai très vigilant quant au strict respect de la sécurité de l'ouvrage, qui sera assurée par tous les moyens techniques appropriés, et à son insertion dans le site, car je sais ce que cet ouvrage représente pour le patrimoine bordelais.
M. Gérard César. Et pour la circulation !
M. Gérard Larcher. Là, c'est dessus ! (Nouveaux rires.)
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Afin d'apporter toutes les garanties techniques, j'ai missionné l'ingénieur général Bois, spécialisé dans les ouvrages d'art et qui surveille ce pont depuis les travaux de remise en état effectués au cours de la dernière décennie. Il devra également examiner la possibilité d'aménager un passage local par la berge, dès lors que les conditions que je viens de préciser ne pourraient être respectées. Nous ne prendrons aucun risque, je vous le garantis.
Par ailleurs, je tiens à redire qu'aucune phase de consultation du public n'a vu ou ne verra sa durée réduite au regard des obligations légales ou des nécessités de la concertation. Comme je l'ai indiqué en introduction, mesdames, messieurs le sénateurs, il est hors de question de retarder l'aménagement des itinéraires utiles au développement des régions concernées. Il convient au contraire de l'accélérer...
M. Pierre Hérisson. ... partout où c'est possible !
M. Alain Joyandet. Nous, on veut bien !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. J'ai parfois entendu des demandes un peu excessives. Pour un peu, il aurait fallu tout réaliser en trois ans, mais ce ne sera peut-être pas possible !
Quoi qu'il en soit, il ne s'agit nullement de choisir entre accélérer l'aménagement de l'axe Agen-Auch et de la RN 21, celui de l'axe Auch-Toulouse et de la RN 124 ou celui de la liaison Langon-Pau. Tous les besoins régionaux en dessertes routières seront pris en considération, comme je m'y étais engagé auprès du rapporteur du projet de loi à l'Assemblée nationale, M. Montané.
A cet égard, je confirme que la RN 21 ne remplit pas seulement une fonction locale. Je m'engage par conséquent à ce que la version définitive des schémas de services tienne compte des voeux qui ont été exprimés au cours de la consultation par le rapporteur du Sénat, M. de Montesquiou, par le président de l'association de développement de cet axe, M. Philippe Martin, et par les conseils régionaux d'Aquitaine et de Midi-Pyrénées, car cette route constitue en effet une voie de développement pour les régions du grand Sud-Ouest.
A ce titre, je suis également favorable à ce que les études de la première opération nouvelle à envisager sur cet axe, la déviation de Lectoure, puissent débuter dans le cadre des crédits d'études non individualisés du contrat de plan.
Le projet de schéma de services collectifs des transports, adopté par le Gouvernement le 26 octobre dernier, intègre pour la première fois une liaison rapide et sûre à deux fois deux voies entre Langon et Pau, liaison indispensable au développement de l'Aquitaine.
M. Jean-Pierre Plancade. C'est Byzance !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. J'ai donc donné mon accord : l'accélération des procédures satisfera M. Althapé, et certainement pas que lui.
M. Jean-Pierre Plancade. C'est Noël en mai !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. A la suite de l'engagement pris sur ce point par le Gouvernement, lors de la discussion de ce projet de loi à l'Assemblée nationale, le préfet de la région Aquitaine, préfet de la Gironde, a engagé la concertation avec l'ensemble des collectivités territoriales appelées à se prononcer sur la bande des 300 mètres. Les dossiers d'avant-projet sommaire définitifs, élaborés à l'issue de cette concertation, seront achevés avant la fin de l'année 2001 en vue d'une consultation des concessionnaires potentiels pour le premier semestre 2002. Cette procédure permettra de choisir l'option répondant le mieux aux objectifs de l'Etat et des autres collectivités.
En ce qui concerne la déviation d'Aire-sur-l'Adour - partie intégrante de l'itinéraire inscrit au contrat de plan entre l'Etat et la région Aquitaine -...
M. Jean-Pierre Plancade. A ce rythme, c'est bientôt la région Midi-Pyrénées qui va être défavorisée, monsieur le ministre ! (Sourires.)
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. ... l'instruction mixte, actuellement en cours, s'achèvera à la fin de ce mois-ci. Le projet fera alors l'objet de l'enquête d'utilité publique. La déclaration d'utilité publique pourrait intervenir à la fin de cette année et les travaux commencer au printemps 2002. Décidément, il va s'en passer des choses au printemps 2002 ! (Sourires.)
M. Gérard Larcher. Cela va plus vite que pour la RN 10 !
M. Jean-Pierre Plancade. Et même plus vite que pour le TGV !
M. Alain Joyandet. C'est la soirée de la fée Jean-Claude ! (Rires.)
M. le président. Ne vous laissez pas distraire, monsieur le ministre !
M. Jean-Pierre Plancade. Surtout quand il s'agit de l'Aquitaine !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Cependant, la liaison Langon-Pau ne pourra pas être utilisée, même partiellement, comme liaison à très grand gabarit entre Bordeaux et Toulouse.
En effet, monsieur Plancade, la hauteur des convois exceptionnels exigerait que tous les ponts franchissent cette autoroute à 14 mètres de hauteur, ce qui n'est pas possible compte tenu de la configuration du terrain. Le coût environnemental et financier serait d'ailleurs considérable, et le délai de construction des ouvrages neufs est incompatible avec l'objectif recherché.
Je tiens à rassurer également M. Althapé : une concertation avec les services de secours permettra, en tout état de cause, de tenir compte de tous les impératifs, notamment l'accessibilité totale et permanente de tous les véhicules d'intervention d'urgence.
Je suis donc très clair : non seulement toutes les dispositions seront prises pour que les véhicules d'urgence puissent toujours passer, mais ils bénéficieront, en outre, d'un itinéraire dégagé des autres véhicules sur la section fermée à la circulation entre quinze et vingt kilomètres.
Les travaux qui sont déjà envisagés pour aménager la traversée de Bernos-Beaulac, en Gironde, non seulement ne seront pas remis en cause - je réponds là à une interrogation de M. César - mais seront complétés par tous les aménagements nécessaires à la constitution de l'itinéraire une fois leur compatibilité vérifiée.
Concernant la RN 124, évoquée par M. le rapporteur et par M. Rispat, son aménagement à deux fois deux voies entre Auch et Toulouse est également inscrit au projet de schéma de services collectifs de transports. L'accélération notable de l'aménagement de cet axe, prévue dans le cadre du XIIe Plan avec une dotation de plus de un milliard de francs, doit se poursuivre dans la perspective de son achèvement, en intensifiant notamment les études et procédures concernant la déviation de Gimont, à l'occasion de la clause de revoyure de 2003.
Entre Auch et l'Atlantique et, surtout, entre Auch et la liaison Langon-Pau, la sécurité et la fluidité de la RN 124 doivent être bien évidemment améliorées, sans créer pour autant un appel de trafic de transit supplémentaire - problème auquel il faut toujours veiller - parce que ce serait néfaste à la fois en termes d'environnement et au regard de la vocation touristique importante du département.
La rectification des virages et la réalisation des créneaux de dépassement pourraient être envisagées au XIIIe Plan, après une étude de l'itinéraire.
Je voudrais également rassurer M. Hérisson dont je reconnais le souci de l'intérêt général. Parlant de la région Rhône-Alpes, il a dit : « Mais vous devez savoir de quoi je parle. » J'ai pensé que M. Hérisson allait parler de l'A 41.
M. Pierre Hérisson. Absolument, vous avez compris !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je commence à vous connaître tous un peu ! (Sourires.)
M. Jean-Pierre Plancade. Cela devient magique, monsieur le président !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Il y a l'A 41, bien sûr, monsieur Hérisson, mais vous savez comme moi que nous avons prorogé la déclaration d'utilité publique. Je m'y étais engagé devant vous, et je l'ai fait.
Une subvention publique d'équilibre sera nécessaire, comme je l'ai dit, notamment à Mme la présidente de la région. Je ne sais si elle vous a bien traduit mon propos.
M. Pierre Hérisson. Non, mais je préfère que ce soit vous qui me le disiez, monsieur le ministre ! (Sourires.)
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur Hérisson, sachez que, dès que toutes les collectivités locales m'auront confirmé leur accord de principe sur une participation, l'appel à la concession pourra être lancé. Donc, allez-y, mettez-vous d'accord. Moi, j'attends. Car cela dépend aussi de vous, monsieur Hérisson.
En ce qui concerne Rhône-Alpes, je rappelle la décision du sommet franco-italien du 29 janvier dernier de réaliser la liaison ferroviaire nouvelle à travers les Alpes. D'ailleurs, il faudra sûrement envisager le même dispositif pour les Pyrénées...
M. Jean-Pierre Plancade. La traversée centrale des Pyrénées !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Puisque vous l'évoquez, monsieur Plancade, je considère que le problème de la traversée pyrénéenne est aussi important que celui des traversées alpines, et peut-être plus.
M. Louis Althapé. Oui, peut-être plus !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Aujourd'hui, je parle de mémoire, chaque année 20 millions de tonnes de marchandises traversent les Pyrénées ; 75 % sont acheminées par la route et à peine 4 à 5 millions de tonnes par la voie ferrée. A l'horizon 2020, ce qui est prévisible, c'est la traversée d'au moins 230 millions de tonnes par les Pyrénées.
M. Jean-Pierre Plancade. C'est deux fois plus que dans les Alpes !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Si nous laissons les choses en l'état, si nous ne rééquilibrons pas, si nous ne multiplions pas par quatre, par cinq, voire par six le trafic ferroviaire, nous sommes sûrs d'aller à l'asphyxie.
M. Louis Althapé. Et Pau-Canfranc ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Et Perpignan-Figueras ? Et peut-être une traversée centrale supplémentaire ? Oui, vous voyez mon sentiment, il s'agit là d'un vrai débat.
Monsieur Rispat, la discussion a été engagée avec le maire de Barbotan dans un esprit très constructif ; si cela était indispensable, une déviation serait envisagée.
J'en viens maintenant aux questions posées par la plupart des orateurs, à commencer par l'impact économique du pôle aéronautique. Ce sont 40 000 emplois directs qu'il faut en attendre, pas tous en Midi-Pyrénées et en Aquitaine, mais tout de même.
Vous avez également évoqué la nécessité d'une meilleure répartition. Bien sûr, les retombées en matière d'emploi sont essentielles ; vous souhaitez aller le plus loin possible, et c'est légitime, raison pour laquelle, après avoir longuement discuté avec M. Noël Forgeard, administrateur gérant d'Airbus, avec le président du conseil général du Gers, M. Philippe Martin, et avec les rapporteurs du Sénat et de l'Assemblée nationale, MM. de Montesquiou et Montané, il nous est apparu nécessaire que soit proposée par Airbus une convention partenariale de développement avec les collectivités territoriales concernées.
M. Jean-Pierre Plancade. Très bien !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Depuis trente ans, Airbus contribue largement au développement économique de la région Midi-Pyrénées et, plus généralement, du grand Sud-Ouest. M. Forgeard m'a fait connaître son intention de renforcer cette contribution en intégrant les préoccupations que vous avez exprimées.
Ainsi, Airbus accueillera une structure spécifique adaptée à cet objectif et, j'y insiste, dotée de ressources propres. Elle aura pour mission de contribuer au développement durable et équilibré des départements concernés. Cette structure, qui s'appellera « Airbus Développement », mettra initialement et prioritairement l'accent sur les collectivités territortiales traversées ou concernées par l'itinéraire à grand gabarit dont Airbus sera un utilisateur important. En partenariat avec les acteurs territoriaux, Airbus Développement aura cinq missions en appui aux collectivités territoriales, aux chambres de commerce ou à leurs services de développement.
D'une part, dans le domaine aéronautique, il s'agira d'aider les entreprises à répondre aux appels d'offres d'Airbus ou de ses sous-traitants, d'inciter à l'implantation, dans les zones concernées, des fournisseurs ou des sous-traitants d'Airbus. D'autre part, dans le secteur économique plus généralement, il s'agira d'apporter une assistance technique à la réalisation de projets d'entreprise, d'aider à l'exportation, d'apporter, dans le cadre de projets ciblés, ses compétences, son savoir-faire en recherche et développement au regard de la qualité de production et des transferts de technologies. J'ai reçu l'assurance de M. Forgeard que ce projet se concrétiserait rapidement.
Telle est, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, la démarche du Gouvernement. Je suis convaincu que votre vote positif, succédant à celui de l'Assemblée nationale, permettra d'engager rapidement toutes les procédures pour la réalisation de ce formidable projet. (Applaudissements.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, compte tenu de l'heure et de la séance consacrée à l'ordre du jour réservé, qui doit être ouverte, ce matin, par M. le président du Sénat, à neuf heures trente, je vous invite à la plus grande concision.

Article 1er