SEANCE DU 6 JUIN 2001


M. le président. Par amendement n° 135 rectifié bis , M. Valade et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent d'insérer, après l'article 13, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le IV de l'article 42 de la loi de finances pour 2001 (n° 2000-1352 du 30 décembre 2000) est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les communes qui appartiennent à un établissement public de coopération intercommunale faisant application à compter du 1er janvier 2001 des dispositions du I de l'article 1609 nonies C du code général des impôts, le taux voté par la commune au titre de l'année précédente est majoré du taux appliqué la même année par l'établissement public de coopération intercommunale. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Cet amendement est-il soutenu ? ...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je le reprends, monsieur le président.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 135 rectifié ter .
La parole est à M. le rapporteur général pour le défendre.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement a pour objet de tenir compte du taux antérieurement pratiqué par un établissement public de coopération intercommunale pour calculer la compensation de l'abattement sur les bases de taxe foncière sur les propriétés bâties acquittée par les organismes d'HLM versée aux communes membres de cet EPCI soumis au régime de la taxe professionnelle unique à compter du 1er janvier 2001.
Il s'agit de réparer un oubli de l'article 42 de la loi de finances pour 2001, à savoir le cas spécifique de communes appartenant à un EPCI qui a adopté le régime de la taxe professionnelle unique le 1er janvier 2001.
La compensation selon le régime légal actuellement en vigueur est calculée en 2001 à partir des seuls taux communaux de l'année 2000, c'est-à-dire avant que les communes aient pu répercuter dans leurs taux les taux antérieurement pratiqués par l'EPCI.
Comme cet établissement public ne perçoit plus la taxe sur le foncier bâti, il ne perçoit pas non plus la compensation qui aurait dû lui revenir. Il s'ensuit une perte nette pour les communes et l'EPCI, et un gain pour l'Etat, situation à laquelle, vous le comprendrez, nous souhaitons remédier, monsieur le secrétaire d'Etat. Ce dispositif se traduira par une situation plus conforme à l'équité.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, qui concerne l'intercommunalité et la répartition des compensations de l'Etat aux collectivités locales.
Cet amendement trouverait plus sa place en loi de finances de fin d'année.
Des points techniques appellent plusieurs observations dont je vous fais grâce, car nous aurons à y revenir à l'occasion d'autres amendements.
M. le président. Personne ne demande la parole ? ...
Je mets aux voix l'amendement n° 135 rectifié ter , repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 13.
Par amendement n° 137 rectifié bis , M. Valade et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent d'insérer, après l'article 13, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - le III de l'article 7 de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les communes membres d'un établissement public de coopération intercommunale faisant application des dispositions du I de l'article 1609 nonies C du code général des impôts, la compensation est égale au produit obtenu en multipliant la perte de base résultant chaque année de l'exonération par le taux de la taxe foncière sur les propriétés bâties voté en 1996, majoré le cas échéant du taux voté la même année par l'établissement public de coopération intercommunale. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575-A du code général des impôts. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je le reprends, monsieur le président.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 137 rectifié ter .
La parole est à M. le rapporteur général, pour le défendre.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Dans le même esprit que le précédent, cet amendement a pour objet de calculer les compensations versées aux communes appartenant à un EPCI à taxe professionnelle unique en tenant compte du taux de taxe foncière antérieurement pratiqué par cet établissement public.
Monsieur le secrétaire d'Etat, le projet de loi dont nous discutons comporte des dispositions très éparses et très diverses, notamment celles dont nous avons discutées hier dans les premiers articles qui, avec la réforme de l'ingénierie publique concernent bien la gestion des collectivités territoriales. Il n'est donc pas anormal, me semble-t-il, que certains correctifs puissent être apportés à la fiscalité locale dès lors qu'il s'agit de besoins qui ont été concrètement identifiés et qui, pour les collectivités dont il s'agit, monsieur le secrétaire d'Etat, ont vraiment un caractère d'urgence.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Exactement !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Je ne reprendrai pas mon argumentation antérieure sur la place de ce débat, même si j'ai bien entendu M. Marini.
Je rappelle simplement que l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties en faveur des immeubles situés dans les zones franches urbaines est en voie d'extinction. En effet, cette exonération porte essentiellement sur les immeubles existants au 1er janvier 1997. Prévue pour cinq ans, elle cessera donc de s'appliquer à compter du 1er janvier 2002. C'est la raison pour laquelle la disposition proposée ne me paraît ni bien placée dans ce texte, ni appropriée au contexte. Le Gouvernement souhaite donc le retrait, sinon le rejet, de cet amendement.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Je ne veux surtout pas retarder les débats, mais je souhaite insister, après M. le rapporteur général, sur le fait que ces dispositions viennent vraiment à propos, monsieur le secrétaire d'Etat.
Il s'agit de réparer des effets qui n'ont pas pu être anticipés au moment où ces établissements publics ont fait le choix de la taxe professionnelle unique. Ce choix était une recommandation du Gouvernement ; il a produit des effets secondaires négatifs, auxquels il convient de remédier. Si ces effets secondaires n'étaient pas corrigés à l'occasion d'un texte comme celui-ci, les communes et les groupements qui sont allés dans le sens indiqué par l'Etat, c'est-à-dire dans le sens de la mise en place de la taxe professionnelle unique, seraient pénalisés.
C'est une situation que le Gouvernement ne saurait à son tour accepter, raison pour laquelle il faut que le Sénat vote les amendements que M. le rapporteur général reprend au nom de la commission des finances.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 137 rectifié ter , repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 13.
Par amendement n° 138 rectifié bis , M. Valade et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent d'insérer, après l'article 13, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le cinquième alinéa a du 3° du V de l'article 1609 nonies C du code général des impôts, la référence : "1383 B" est insérée avant la référence : "1390".
« II. - La perte de recettes résultant pour les communes des dispositions du I ci-dessus est compensée par une majoration à due concurrence de la dotation globale de fonctionnement.
« III. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de la majoration de la dotation globale de fonctionnement prévue au II ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je le reprends, monsieur le président !
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 138 rectifié ter.
La parole est à M. le rapporteur général pour le présenter.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement complète le précédent. Il a pour objet de déduire de l'attribution de compensation versée par les établissements publics de coopération intercommunale à taxe professionnelle unique à leurs communes membres la compensation de l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties accordée aux communes situées en zones franches urbaines.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement ne dit pas, monsieur le président de la commission des finances, que certaines de vos remarques ne sont pas justifiées, pas plus qu'il ne prétend qu'il n'y a pas de problème de compensation. Simplement, ce projet de loi portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier ne peut traiter d'un problème aussi vaste, qui trouvera sa solution lors de la discussion de la loi de finances.
Telle est la raison pour laquelle le Gouvernement souhaite le retrait, sinon, le rejet de cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 138 rectifié ter , repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 13.
Par amendement n° 136 rectifié, M. Valade et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent d'insérer, après l'article 13, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le V de l'article 1636 B septies du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, pour les communes membres d'un établissement public de coopération intercommunale faisant application des dispositions du I de l'article 1609 nonies C, les taux plafonds applicables aux taxes foncières et à la taxe d'habitation sont ceux mentionnés au I. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je le reprends.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement 136 rectifié bis .
La parole est à M. le rapporteur général, pour le présenter.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ces dispositions sont urgentes, monsieur le secrétaire d'Etat, car les collectivités qui sont victimes des effets secondaires évoqués tout à l'heure doivent gérer leur budget et équilibrer leurs dépenses. C'est bien beau de nous dire d'attendre la loi de finances pour 2002, mais, par définition, cette loi de finances ne prendra effet qu'au 1er janvier 2002. Dans l'intervalle, il y a l'année 2001. Pourquoi veut-on faire subir une perte à ces collectivités en 2001 ?
Comme l'amendement précédent et l'ensemble de ceux de cette série, l'amendement n° 136 rectifié bis a pour objet de supprimer des dispositions qui ne sont pas ou ne sont plus adaptées au régime fiscal de la taxe professionnelle unique, afin de mettre le droit en accord avec les évolutions de la fiscalité intercommunale et de ne pas pénaliser ceux qui se lancent dans l'aventure de la TPU. Car c'est une aventure que de suivre les conseils du Gouvernement ! On peut se demander, d'ailleurs, monsieur le président de la commission, lorsque l'on suit les conseils du Gouvernement, si on a raison de le faire ! (Sourires.)
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. On peut avoir de mauvaises surprises !
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'ar-ticle 1636 B septies du code général des impôts prévoit que les taux des taxes foncières et de la taxe d'habitation d'une commune ne peuvent excéder deux fois et demie le taux moyen constaté l'année précédente dans le département ou deux fois et demie le taux moyen national.
Lorsqu'une commune est membre d'un EPCI à fiscalité propre, les taux plafonds sont diminués du taux appliqué l'année précédente par l'EPCI.
Ce dispositif n'est pas adapté aux communes membres d'un EPCI qui applique pour la première année la taxe professionnelle unique dite « sèche », c'est-à-dire sans fiscalité mixte. En effet, la première année, le taux plafond est encore réduit du taux pratiqué l'année précédente par l'EPCI, alors que le taux de la commune augmente généralement beaucoup, puisque la commune répercute dans ses taux le taux antérieurement voté par l'EPCI. Les communes sont alors plus facilement susceptibles d'atteindre le plafond.
Dans ces cas-là, si le contrôle de légalité est tatillon, le préfet peut demander à la commune de revoter ses taux. C'est ce qui s'est passé dans le département de la Gironde, d'où la sensibilité de nos collègues signataires de cet amendement.
Il est ici proposé de lever l'obstacle du contrôle de légalité tatillon et, en l'occurrence, infondé, monsieur le secrétaire d'Etat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Je ne suis pas d'accord avec vous, monsieur le rapporteur général : même si ces amendements étaient adoptés aujourd'hui et repris en deuxième lecture à l'Assemblée nationale, ils n'auraient aucune incidence pour les communes concernées, puisque les taux sont votés, et ne pourraient jouer que l'année prochaine, en 2002.
En tout état de cause, je vous le rappelle, monsieur le rapporteur général, le dispositif que vous voulez supprimer a pour objet de limiter le niveau maximum de la pression fiscale - EPCI et communes - sur les ménages en ce qui concerne les taxes foncières, les propriétés non bâties ainsi que sur les agriculteurs. Est-ce à dire que vous êtes favorable aujourd'hui à une augmentation de la pression fiscale sur les agriculteurs ? Je ne le crois pas. Or, c'est bien ce à quoi aboutirait votre amendement. Donc, je vous demande d'y réfléchir avant de le soutenir.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous avons bien réfléchi et nous ne partageons pas votre avis !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Monsieur le secrétaire d'Etat, le Gouvernement a pris une position très nette en faveur de la taxe professionnelle unique. Or, la mise en place de cette taxe produit des effets que j'ai qualifiés tout à l'heure de secondaires et que M. le rapporteur général a parfaitement expliqués : des taux peuvent actuellement avoir été « retoqués » - pardonnez-moi cette expression -, disons rejetés par le contrôle de légalité, il en résulte que les taux ne sont pas actuellement en vigueur. Cela paraît extravagant, mais telle est pourtant la situation et il faut y mettre fin !
Vous semblez dire à M. le rapporteur général qu'il est, au fond, porteur d'un amendement qui viserait à accroître la fiscalité. Ce n'est pas du tout dans sa nature et je veux vraiment le défendre. C'est un procès que, franchement, il ne mérite pas. D'autres seraient peut-être justifiés, mais pas celui-là ! (Sourires.)
Dans la réalité, ce qui compte pour le redevable, c'est que le taux cumulé entre le taux communal et le taux communautaire ne soit pas majoré.
Dans la mise en place de la taxe professionnelle unique, l'établissement de coopération ne perçoit plus qu'un seul impôt : la taxe professionnelle. Les redevables n'acquittent plus la taxe sur le foncier bâti ni la taxe d'habitation au titre de la communauté urbaine ou de l'établissement public de coopération intercommunale, en général.
On retrouve donc, au niveau communal, une fiscalité qui était jusqu'alors prélevée par la communauté. Naturellement, cette addition de l'ancienne fiscalité communale et de la fiscalité communautaire transférée sur la fiscalité communale aboutit à des taux qui sont réputés trop élevés.
Il faut que vous puissiez sortir de cette situation, monsieur le secrétaire d'Etat, et pas seulement en « diabolisant » le pauvre rapporteur général, qui n'y est pour rien !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 136 rectifié bis, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 13.
Par amendement n° 143, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose d'insérer, après l'article 13, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article L. 145-36 du code de commerce est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, les loyers des baux des locaux à usage exclusif de bureaux de plus de 1 000 mètres carrés, des locaux commerciaux de plus de 1 000 mètres carrés et des locaux de stockage de plus de 5 000 mètres carrés sont, sauf convention contraire des parties, fixés par référence aux prix pratiqués pour des locaux équivalents. »
« II. - L'article L. 145-37 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, les loyers des baux visés au deuxième alinéa de l'article L. 145-36 du présent code ne sont pas révisables pendant toute la durée du bail, sauf convention contraire des parties. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je sollicite quelques instants votre attention sur cet amendement, qui traite d'un sujet économiquement fort important.
La Cour de cassation, par un arrêt du 19 avril 2000, a estimé - et c'est a priori une décision assez surprenante - qu'un loyer commercial révisé de manière triennale ne peut excéder la valeur locative du bien donné à bail. Cet arrêt pose un réel problème de compréhension et d'application. En effet, jusqu'à présent, le loyer fixé au début du bail faisait l'objet d'une révision triennale limitée au jeu des indices - hausse ou baisse de l'indice du coût de la construction - sauf modification des facteurs locaux de commercialité.
Par ailleurs, une autre jurisprudence - un arrêt de la cour d'appel de Paris du 16 juin 2000 - a souligné que le bail commercial demeure de nature conventionnelle et que la totale liberté des parties lors de sa conclusion leur permet de fixer un loyer ne correspondant pas nécessairement à la valeur locative, loyer qui, pour les parties, a vocation à s'appliquer pour toute la durée du bail.
Si l'on devait autoriser tous les trois ans une modification judiciaire du loyer en se recalant systématiquement sur la valeur locative du bien mis à bail, modification dont l'ampleur n'aurait été envisagée ni par les parties ni par les textes législatifs et réglementaires en vigueur, on assisterait, monsieur le secrétaire d'Etat, à un véritable bouleversement de l'économie de la convention intervenue entre les parties et on créerait à leur égard un élément très préoccupant d'imprévisibilité et d'insécurité juridique.
L'arrêt du 19 avril 2000 de la Cour de cassation a fait naître une forte incertitude dans les milieux professionnels, dans l'esprit des investisseurs qui se portent en particulier sur le marché professionnel de Paris. Ces incertitudes sont préjudiciables au développement de l'immobilier d'entreprise : bureaux, locaux de stockage, d'entreposage et locaux d'activité.
Il n'échappera à personne que ce secteur joue un rôle économique majeur. Il représente, en effet, pour les travaux réalisés en constructions neuves et en opérations d'entretien, 86 milliards de francs de chiffre d'affaires annuel, 180 000 emplois directs et 110 000 emplois indirects.
Dans une phase où l'on s'interroge, mes chers collègues, sur le ralentissement de la croissance, dans une période où la situation du marché de l'immobilier professionnel est un témoignage significatif de l'allure de l'économie, on ne peut qu'être sensible aux questions que se posent les professionnels de ce secteur.
Notre amendement vise à répondre à leurs inquiétudes.
Il concerne plus particulièrement les seules grandes opérations locatives, c'est-à-dire celles que les bailleurs négocient avec de grandes entreprises. En d'autres termes, nous ne visons que le marché de produits professionnels entre deux parties professionnelles et dotées d'un fort pouvoir de négociation.
Il convient, de notre point de vue, d'assurer une stabilité des relations contractuelles entre le propriétaire et le locataire, s'agissant, en l'occurrence, de baux portant sur des locaux de plus de 1 000 mètres carrés pour des bureaux et des locaux commerciaux, et de plus de 5 000 mètres carrés pour des locaux de stockage.
Nous suggérons de ne pas soumettre ces baux à révision pendant toute la durée du bail, sauf convention contraire des parties évidemment, car la loi des parties demeure le principe de base, celles-ci pouvant en décider autrement dans leurs relations contractuelles. Nous proposons que les loyers des locaux dont la superficie est supérieure au seuil que j'ai indiqué puissent être fixés, pour toute la durée du bail, par référence aux prix pratiqués sur le marché pour des locaux équivalents.
L'absence de révision, à la hausse comme à la baisse, en cours de bail permettrait à chacune des parties d'avoir une visibilité de ses engagements ou de son investissement immobilier sur le long terme et mettrait fin aux incertitudes juridiques nées de l'arrêt de la Cour de cassation.
De plus, cette visibilité serait un élément puissant pour faciliter la titrisation du marché des prêts immobiliers. Il s'agit là d'un compartiment des opérations financières qui a tout à fait vocation à se développer sur la place de Paris, comme cela a été le cas dans le passé, par exemple en Grande-Bretagne ou aux Pays-Bas.
Mes chers collègues, je me suis efforcé de résumer de la manière la plus brève, la plus synthétique possible, ce sujet, qui est d'une ampleur économique considérable.
La commission des finances estime que cette proposition est de nature à faciliter la compétitivité des sites parisiens aux yeux des grands investisseurs professionnels et à permettre le développement de compartiments spécialisés du marché financier à Paris.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Le président de la commission des finances ne m'a pas du tout convaincu tout à l'heure.
Et après avoir proposé la hausse de la fiscalité pour les agriculteurs, voilà que la commission propose la hausse des loyers pour les entreprises.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Pas du tout !
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Actuellement, le loyer est plafonné lors du renouvellement du bail, une baisse étant possible en cas de révision triennale. Or vous proposez le déplafonnement en cas de renouvellement du bail et la suppression de la révision triennale pour les locaux commerciaux ayant des surfaces importantes.
J'ai bien compris, monsieur le rapporteur général, que, comme le Gouvernement, vous êtes attaché aux dispositions du code de commerce destinées à protéger les petits commerçants. Le dispositif que vous proposez vise en effet les surfaces importantes, donc les preneurs et les bailleurs importants. J'ai bien écouté votre démonstration, qui était très technique. Mais je constate qu'il est urgent d'attendre en la matière de connaître la jurisprudence.
Votre amendement paraît faire écho à une jurisprudence d'avril 2000, qui semble avoir ému, comme vous l'avez rappelé, les intéressés. Or, d'après les informations en notre possession, la Cour de cassation s'apprête à rendre des arrêts sur le sujet. Il conviendrait donc de tirer les conséquences de la jurisprudence, qui peut avoir des implications économiques et financières non négligeables, comme vous l'avez rappelé.
Votre amendement paraît prématuré et je souhaite que nous puissions attendre l'évolution de la jurisprudence.
Le Gouvernement émet donc aujourd'hui un avis défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 143, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 13.

Article 14