SEANCE DU 14 JUIN 2001


M. le président. « Art. 1er. - L'article premier de la loi n° 97-179 du 28 février 1997 relative à l'instruction des autorisations de travaux dans le champs de visibilité des édifices classés ou inscrits et dans les secteurs sauvegardés est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Une commission départementale du patrimoine est instituée dans chaque département. Elle est présidée par le représentant de l'Etat dans le département ou son représentant. Elle comprend en outre le directeur régional des affaires culturelles ou son représentant, un architecte des Bâtiments de France affecté dans le département désigné par le préfet, deux membres élus par le conseil général en son sein, un maire désigné par le président de l'association départementale des maires et deux personnalités qualifiées désignées l'une par le préfet et l'autre par le président du conseil général. »
La parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je suis heureux que le Sénat soit à nouveau amené à débattre de la question du recours à l'égard des décisions des architectes des Bâtiments de France.
Comme j'ai déjà eu l'occasion de le souligner à cette tribune en 1997, il ne s'agit nullement de remettre en cause l'action globalement positive menée par les architectes des Bâtiments de France conjointement avec les élus locaux, élus qui sont - il convient de le rappeler - particulièrement attachés à la conservation du patrimoine historique de leur commune ainsi qu'à l'amélioration et à la préservation de l'environnement et du cadre de vie dans lequel s'intègrent ces monuments.
Certaines décisions excessives doivent toutefois être évitées. Il arrive, par exemple, que la démolition d'un immeuble particulièrement dégradé en vue de créer un parking en milieu urbain devienne source de conflit faute de dialogue alors que la responsabilité en matière de sécurité incombe au maire. Or, créer un parking en milieu urbain nécessite souvent, sinon toujours, la démolition d'un immeuble ancien.
La possibilité d'introduire un recours non contentieux à l'encontre des décisions des architectes des Bâtiments de France est donc nécessaire, mais il s'agit malheureusement d'un véritable « serpent de mer ».
Force est en effet de constater que la loi du 28 février 1997 n'a pas produit les effets escomptés, et ce notamment du fait de l'inadaptation du décret relatif à la composition et au fonctionnement des commissions.
Non seulement il a fallu attendre deux ans pour que ce décret soit publié, mais, en plus, il n'est nullement satisfaisant pour plusieurs raisons.
Premièrement, comme le soulignent notre collègue Pierre Fauchon dans l'exposé des motifs de sa proposition de loi et notre rapporteur Philippe Richert, ces commissions, composées de trente membres, ne comprennent que huit élus qui sont, de plus, nommés par le préfet de région. Par conséquent, les avis des architectes des Bâtiments de France ne sont que rarement contestés.
L'esprit de la décentralisation est donc manifestement bien lointain dans cette organisation.
En outre, il faut bien avouer qu'il est extrêmement difficile de réunir trente personnes. Il est par conséquent nécessaire et urgent d'introduire davantage de souplesse dans la composition des commissions et de veiller à un meilleur équilibre entre personnalités qualifiées et élus.
Il me paraît en effet important, dans l'esprit de la décentralisation, non seulement de développer un dialogue entre l'Etat et les collectivités locales sur les mesures nécessaires à la préservation du patrimoine, mais aussi de mettre fin au caractère unilatéral des décisions prises par l'Etat, en l'occurrence par certains architectes des Bâtiments de France.
Tel était d'ailleurs l'objet de la proposition de loi que j'ai déposée en 1995. Elle visait à créer une commission, départementale également, qui avait une composition souple et équilibrée : elle comprenait ainsi trois maires, deux personnalités qualifiées, un architecte désigné par l'ordre, l'architecte des Bâtiments de France et le directeur départemental des affaires culturelles ; le tout étant présidé par le préfet.
Le texte que nous examinons aujourd'hui relève approximativement du même esprit en créant une commission départementale à structure allégée et équilibrée. J'y suis, par conséquent, tout à fait favorable. Il me semble d'ailleurs important que le législateur fixe lui-même dans la loi la composition de ces commissions, afin de s'assurer de l'efficacité du dispositif voté, l'expérience de la loi de 1997, loi qui laissait ce soin au Gouvernement par décret, n'étant pas à renouveler.
Je tiens toutefois à émettre une réserve quant aux propositions de notre rapporteur sur les articles suivants. Il me paraît, en effet, peu souhaitable de permettre à chaque pétitionnaire de saisir la commission. Cette possibilité risque, à mon sens, d'entraîner un engorgement de la commission et de conduire, par conséquent, une fois encore à son inefficacité. Il serait ainsi préférable de réserver les possibilités de recours au maire ou à l'autorité compétente pour délivrer les autorisations.
Dans cet esprit, je souhaite au moins que la saisine de la commission émanant d'un pétitionnaire soit immédiatement portée à la connaissance du maire ou du service instructeur.
Cette réserve étant faite, je me rallie à la proposition qui vient d'être présentée par M. le rapporteur. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants.)
M. Michel Duffour, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Michel Duffour, secrétaire d'Etat. Je souhaite rappeler que le Gouvernement est défavorable à la création de cette commission du fait des pouvoirs qui lui sont donnés et du niveau administratif qui est choisi.
En effet, le niveau départemental n'est pas le plus pertinent pour réunir en nombre suffisant les experts compétents et pour apprécier avec le recul indispensable le recours contre une décision d'une autorité administrative. Ce n'est qu'au niveau de la région qu'on peut attendre un travail scientifique satisfaisant et recueillir des avis suffisamment compétents.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Article 2