SEANCE DU 6 NOVEMBRE 2001


M. le président. La parole est à M. Pelchat, auteur de la question n° 1159, adressée à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.
M. Michel Pelchat. Monsieur le ministre, j'ai souhaité attirer votre attention sur les interrogations et critiques suscitées par le projet de nouveau couloir aérien au-dessus de l'Essonne desservant l'aéroport d'Orly, projet officiellement présenté par Eurocontrol le 24 septembre dernier.
Une alternative à ce tracé a été élaborée par le comité de coordination contre le couloir aérien, le C4A, présidé par M. Michel Doumax, avec le plein soutien de M. Jean-Marc Tyberg, président de l'association Sud Essonne Démocratie en Ligne.
La proposition de trajectoire du C4A tient compte des contraintes techniques et de sécurité inhérentes à un tel dossier tout en cherchant à préserver au mieux les populations et l'environnement concernés. Elle présente en outre le mérite d'aborder la question des couloirs de départ alors que, jusqu'à présent, le débat ne s'est polarisé que sur le seul couloir d'arrivée. La trajectoire de décollage ainsi envisagée créerait beaucoup moins de nuisances sonores que celle qui est actuellement préparée par la direction générale de l'aviation civile, la DGAC, sans concertation, sans la moindre information, selon la politique - qui lui est d'ailleurs habituelle - du fait accompli.
C'est pourquoi de nombreux élus du sud de l'Essonne ne comprennent pas le refus catégorique opposé au projet du C4A.
Quatre arguments critiques ont, certes, été soulevés par Eurocontrol à l'encontre de ce projet : des zones militaires « écornées », le croisement de couloirs de départ et d'arrivée, l'impossibilité de gérer deux flux d'arrivées parallèles en étape de base et la modification des procédures de décollage d'Orly face à l'est. Cependant, à tous ces inconvénients, des remèdes peuvent être apportés, et vous les connaissez, monsieur le ministre.
Je vous demande par conséquent quelles directives vous entendez donner pour que la réflexion sur le projet de nouveau couloir aérien se poursuive dans un véritable climat de dialogue avec la population et ses élus.
Entendez-vous respecter votre engagement de retirer le projet de couloir au-dessus de l'Essonne élaboré par la DGAC et refuser la proposition d'Eurocontrol, qui n'est d'ailleurs qu'un « sosie » du projet de tracé initial, eu égard aux récentes conclusions de l'autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires, l'ACNUSA, dont vous connaissez la position ?
Entendez-vous imposer désormais une procédure transparente et respectueuse des règles de la concertation avec la population pour tous nouveaux projets de couloirs aériens, de décollage comme d'arrivée, et pour toutes modifications des conditions de survol par les avions, dès lors qu'elles entraînent des conséquences durables sur la qualité de vie, l'environnement et la sécurité des populations survolées ?
Telles sont, monsieur le ministre, les différentes questions auxquelles je souhaiterais que vous puissiez répondre.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, je vous trouve...
M. Michel Pelchat. Sévère !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. ... excessif et injuste !
Je vous trouve excessif quand vous laissez entendre qu'il n'y a pas de concertation, mais peut-être n'avez-vous pas toujours été présent aux réunions qui ont eu lieu, y compris avec les élus, depuis environ un an et demi. J'ai précisément choisi de ne pas m'en tenir au seul projet de la DGAC afin qu'il ne soit pas imposé comme un élément incontournable mais qu'il puisse être discuté et comparé.
Je vous trouve injuste, parce que, contrairement à ce que vous laissez entendre, mais peut-être ne l'avez-vous pas su, Eurocontrol a été impliqué pour étudier les projets proposés et donner son avis de principe à la demande des élus. Autrement dit, les choses ne se déroulent pas du tout comme vous le dites.
Vous auriez tenu les mêmes propos deux ans, voire un an et demi plus tôt, j'aurais, bien sûr, été un peu vexé par leur véhémence, mais vous auriez eu raison. En revanche, depuis un an et demi, il s'est passé, ne l'oubliez pas, beaucoup de choses, car, quand je m'engage, je tiens parole !
J'ai souhaité qu'une concertation s'instaure, j'ai souhaité que tous les projets soient étudiés. Aujourd'hui, le processus est en cours et l'ACNUSA a été mise en place.
L'expertise comparative de l'agence Eurocontrol sur la problématique d'ensemble de la réorganisation des couloirs aériens et sur les différentes solutions proposées indique, vous l'avez dit, que la proposition du comité C4A présente plusieurs inconvénients.
Tout d'abord, cette proposition risque de créer une zone d'engorgement dans le sud-est de la région parisienne, alors que le projet de réorganisation a aussi comme ambition de supprimer une zone d'engorgement dans le nord-ouest. Elle peut donc générer des effets pervers majeurs.
Elle pose ensuite un problème, qui est essentiel, de sécurité du fait de l'interférence de ce couloir d'arrivée à Orly avec les couloirs d'arrivées en provenance du sud-est et à destination du Bourget et de Roissy. L'assemblage de deux flux parallèles pour alimenter l'axe final d'atterrissage à Orly face à l'ouest n'est, d'autre part, pas gérable par les contrôleurs aériens sans une dégradation considérable de la capacité et de la fluidité.
Enfin, en ce qui concerne les départs - vous le voyez, nous ne parlons pas que des arrivées ! - les analyses d'impact sonore montrent que la proposition du C4A augmente le nombre de personnes survolées de 10 000, alors que la proposition d'Eurocontrol le diminue de 157 000. Tout dépend, bien sûr, de l'endroit où l'on se trouve mais, globalement - vous avez bien sûr, monsieur le sénateur, comme moi-même, le souci de l'intérêt général - ...
M. Michel Pelchat. De tout le département !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. ... il faut reconnaître que la proposition du C4A n'est pas la plus performante en termes d'environnement.
Enfin, comme l'a indiqué le ministère de la défense le 6 septembre dernier - c'est donc tout récent - au comité de pilotage de l'étude, on ne peut négliger l'impact qu'aurait cette proposition sur les activités militaires, en particulier sur les bases de Châteaudun et d'Orléans.
L'avis rendu public par l'Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires indique qu'elle « ne peut donner un avis favorable en l'absence d'un certain nombre de dispositions ». Vous pourriez donc me dire que l'ACNUSA ne donne pas un avis favorable,...
M. Michel Pelchat. Non !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. ... ce qui serait exact : elle ne peut le faire « en l'absence d'un certain nombre de dispositions ».
M. Michel Pelchat. Voilà !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je suis donc attentif à tout ce qui se dit, monsieur le sénateur.
Dans son avis, l'ACNUSA prend également acte des « nets progrès qui ont été réalisés en matière de concertation et d'information du public », soit exactement le contraire de ce que vous avez affirmé !
Cet avis constate, par ailleurs, que « le sujet est bien d'assurer la sécurité et de résoudre les problèmes d'encombrement dans le nord-ouest de la région parisienne » et que « le nombre de personnes exposées à des bruits élevés sera inférieur à ce qu'il est aujourd'hui ».
Tel est le constat de l'ACNUSA, autorité véritablement indépendante dont vous avez vous-même voté le principe sur proposition du Gouvernement !
L'ACNUSA souhaite, d'une part, une limitation de l'impact des nuisances nocturnes et, d'autre part, des garanties de respect du dispositif élaboré. Certaines de ces dispositions figuraient déjà dans ses recommandations émises en avril dernier. Elles sont à l'étude et j'ai même soutenu certaines d'entre elles, le 24 avril, lors de la discussion de la proposition de loi visant à plafonner le niveau du bruit émis par les avions décollant et atterrissant la nuit sur les aéroports français. A l'époque, j'ai d'ailleurs dit que le Gouvernement était favorable à la fixation d'une valeur maximale de bruit durant la nuit autour des aéroports disposant d'un plan de gêne sonore.
Certaines des remarques de l'ACNUSA sont plus nouvelles. J'en ai immédiatement demandé une analyse très précise à mes services et je rencontrerai très prochainement le président de l'ACNUSA à ce sujet.
Vous le voyez, monsieur le sénateur, ma détermination à poursuivre l'étude du projet dans un esprit de responsabilité et de dialogue est entière.
M. Michel Pelchat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Pelchat.
M. Michel Pelchat. Monsieur le ministre, poursuivons le dialogue parce que nous ne sommes apparemment pas d'accord ; nous n'avons ni la même analyse ni les mêmes informations.
Je peux vous garantir que si, ce matin, je suis venu vous poser cette question, c'est parce que j'en ai été saisi par les élus de l'Essonne, de l'ensemble de l'Essonne - pas seulement du nord-ouest du département, lequel, d'ailleurs, n'est pas spécifiquement concerné par les nouveaux couloirs, qui auraient même tendance à alléger la circulation aérienne sur ce secteur. Soucieux de l'intérêt général du département que je représente, je me suis donc fait ici l'écho des préoccupations des élus du secteur qui, lui, est directement concerné.
Ce que j'ai constaté pour ma part c'est un refus de l'ACNUSA. Certes, de nombreuses réunions ont eu lieu avec les élus directement intéressés, notamment ceux du sud de l'Essonne, parmi lesquels un certain nombre de parlementaires, je pense notamment à M. Georges Tron, député, qui s'est préoccupé de cette question et a assisté à de nombreuses réunions. Mais entendre et écouter les élus est une chose ; accepter leurs remarques et leurs propositions en est une autre !
Or, jusqu'à présent, les propositions des élus, et notamment des élus du C4A, n'ont jamais été prises en considération - y compris lorsqu'elles émanaient de M. Doumax - et aucune n'a été retenue. En outre, elles sont souvent déformées, voire caricaturées. C'est en tout cas l'impression des membres du C4A - et c'est aussi un peu la mienne -, ce qui est regrettable, connaissant leur sérieux et leur volonté de régler le problème.
Par ailleurs, nous ne sommes pas non plus d'accord sur les chiffres, monsieur le ministre. Selon les miens, 400 000 habitants de l'Essonne seraient survolés avec le projet de la DGAC, 200 000 avec le projet d'Eurocontrol et seulement 20 000 avec le projet du C4A. Mes chiffres s'opposent donc à ceux que vos services vous ont indiqués !
Je pense qu'à ce stade la concertation doit reprendre non seulement avec l'ACNUSA et Eurocontrol, mais aussi avec l'ensemble des élus concernés et notamment avec les élus du C4A. Je vous demande donc, monsieur le ministre, de charger vos services de la relancer avec la volonté d'aboutir.

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