SEANCE DU 12 DECEMBRE 2001


M. le président. L'amendement n° 4, présenté par M. Paul Girod, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du I du texte proposé par l'article 1er pour l'article L. 4424-2 du code général des collectivités territoriales, remplacer (deux fois) les mots : "dispositions réglementaires" par les mots : "dispositions législatives ou réglementaires". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Paul Girod, rapporteur. J'ai rappelé à l'instant la philosophie de la commission spéciale sur l'article 1er, qui concerne les pouvoirs expérimentaux à caractère réglementaire et législatif de l'Assemblée de Corse.
Si vous le permettez, monsieur le président, je défendrai en une seule fois les amendements n°s 4, 5, 6 et 7 ; en effet, ils tendent à revenir à la rédaction précédemment adoptée par le Sénat, qui rétablit et améliore les modalités d'application de l'article 26 du statut de 1991 donnant à l'Assemblée de Corse, pour reprendre une expression de l'Ancien Régime, un droit de remontrance à l'égard du pouvoir central sur les dispositions réglementaires ou législatives, en vigueur ou en préparation, concernant la Corse.
Ils limitent toutefois ce droit à un pouvoir de représentation vis-à-vis du Gouvernement, sans permettre aucune dérive - qui nous semblerait tout à fait inopportune et, par-dessus le marché, inconstitutionnelle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. Le Gouvernement ne peut qu'être défavorable à la réécriture de l'article 1er, qui se limite à reprendre les dispositions actuellement en vigueur sur le pouvoir de proposition de l'Assemblée de Corse en matière législative et réglementaire.
L'amendement tend à supprimer la faculté, pour le législateur, d'habiliter la collectivité territoriale à exercer un pouvoir réglementaire dans le champ de ses compétences et de l'autoriser à expérimenter des dispositions dérogatoires à la loi, bien que le projet de loi fixe à cette faculté un encadrement strict.
J'émets donc un avis défavorable sur l'amendement n° 4, ainsi que, par avance, sur les amendements n°s 5, 6 et 7.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 4, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 5, présenté par M. Paul Girod, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :
« Supprimer le II du texte proposé par l'article 1er pour l'article L. 4424-2 du code général des collectivités territoriales. »
La commission et le Gouvernement se sont déjà exprimés.
Je mets aux voix l'amendement n° 5, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 6, présenté par M. Paul Girod, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :
« Supprimer le III du texte proposé par l'article 1er pour l'article L. 4424-2 du code général des collectivités territoriales. »
La commission et le Gouvernement se sont déjà exprimés.
Je mets aux voix l'amendement n° 6, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 7, présenté par M. Paul Girod, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :
« Supprimer les premier et deuxième alinéas et les deux premières phrases du troisième alinéa du IV du texte proposé par l'article 1er pour l'article L. 4424-2 du code général des collectivités territoriales. »
La commission et le Gouvernement se sont déjà exprimés.
Je mets aux voix l'amendement n° 7, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 8, présenté par M. Paul Girod, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :
« Supprimer les deux dernières phrases du troisième alinéa du IV du texte proposé par l'article 1er pour l'article L. 4424-2 du code général des collectivités territoriales. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Paul Girod, rapporteur. Nos collègues de l'Assemblée nationale, qui ont une imagination souvent fertile, ont essayé d'encadrer la possibilité supposée d'expérimentation législative.
Nous avons prévu un certain nombre de dispositifs d'application de l'article 26 du statut de 1991. Les députés, eux, sur l'initiative de l'un des partis de la majorité plurielle, ont élaboré une curieuse procédure passant par l'institution, au sein de chaque assemblée, d'une commission chargée d'évaluer les expérimentations. Cela m'inspire quelques réflexions.
D'abord, les expérimentations n'auront jamais lieu, soyons clairs. Monsieur le ministre, cela s'assimile aux bandes-annonces que l'on projette avant le film ; mais la bande-annonce ne sera jamais le film ! Or l'article 1er n'est qu'une bande-annonce.
Il faut être sérieux : ou bien l'article 1er est inconstitutionnel - hypothèse qu'avancent certains de nos collègues, notamment M. Autexier, et à laquelle je souscris - et le Conseil constitutionnel l'invalidera ; ou bien il est constitutionnel, parce que l'on considère qu'il ne fait que prévoir la présentation de lois ultérieures dont la constitutionnalité sera examinée au cas par cas, et ce sont celles-ci qui seront sûrement inconstitutionnelles, puisque la Constitution de la Ve République ne nous donne pas la compétence de notre compétence et ne nous permet pas de déléguer le pouvoir législatif, à qui que ce soit.
Qui plus est, aucune loi ne sera jamais présentée au Parlement dans le cadre prévu par l'article 1er : nous sommes à la fin de 2001 ; la loi ne sera pas promulguée, dans le meilleur des cas, avant le 15 janvier 2002 ; nous pouvons imaginer que le calendrier parlementaire ne nous laissera pas le temps, entre le 15 janvier 2002 et le 1er mars 2002, de voter une éventuelle loi de dérogation, qui sera donc renvoyée à la législature suivante. Celle-ci débutera, si j'ai bien compris, le 18 juin - belle date ! - 2002. Le nouveau gouvernement, une fois constitué, aura certainement, alors, d'autres priorités. Il préférera probablement régler quelques problèmes financiers, fiscaux, économiques, d'ordre public ou de sécurité !
Un projet de loi d'habilitation ne pourrait donc être examiné par le Parlement, dans le meilleur des cas, qu'au mois d'octobre ou de novembre 2002, et l'on peut prévoir que le débat durera au moins deux mois. La promulgation de la loi, si elle n'est pas inconstitutionnelle, n'interviendrait donc pas avant janvier 2003, pour servir de base à une expérimentation dont on devrait tirer les leçons en vue d'une révision constitutionnelle en 2004 !
Cet article 1er, monsieur le ministre, veuillez excuser la familiarité du terme, c'est du vent ! Vous créez une atmosphère sur du vent, et c'est ce qui rend inéluctable la désillusion dans l'île !
J'admire, au demeurant, la manière dont nos collègues de l'Assemblée nationale ont prévu d'évaluer un tel texte, au cas - fort improbable, à mon avis - où il entrerait en application : ils envisagent de créer une nouvelle commission permanente - ce qui, encore une fois, est inconstitutionnel - alors même qu'existe déjà l'Office d'évaluation de la législation, auquel appartiennent certains collègues ici présents, et dont c'est précisément la mission.
Par conséquent, la disposition que l'Assemblée nationale introduit par le troisième alinéa du IV du texte présenté pour l'article L. 4424-2 du code général des collectivités territoriales est sans intérêt, peut s'avérer dangereux et, éventuellement, être sanctionné. Nous en demandons donc la suppression.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. Défavorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 8.
M. Nicolas Alfonsi. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Alfonsi.
M. Nicolas Alfonsi. L'article 1er traduit toute l'ambiguïté du dispositif que nous examinons. Il faut savoir que, durant toutes les discussions de Matignon, pas une voix ne s'est élevée pour proposer le début du commencement d'une matière ou d'une compétence dans laquelle pourrait s'exercer notre génie législatif.
Le droit positif est actuellement totalement virtuel, en état d'apesanteur, et ce jusqu'en 2004. Mais nous sommes en même temps au coeur du débat politique, puisque existe désormais un droit, une délégation complexe, M. le rapporteur l'a évoquée, et c'est sur cette disposition que, dans quelque temps, nous pourrons nous appuyer pour demander d'aller plus loin, alors qu'elle n'aura jamais entraîné d'effet pratique.
Telle est la situation.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 9, présenté par M. Paul Girod, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :
« A la fin du premier alinéa du VI du texte proposé par l'article 1er pour l'article L. 4424-2 du code général des collectivités territoriales, remplacer les mots : "propositions, demandes et avis mentionnés aux I à IV" par les mots : "propositions mentionnées au I". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Paul Girod, rapporteur. L'amendement n° 9, qui tend à revenir au texte d'origine, vise à améliorer le fonctionnement de l'article 26 du statut de 1991. Il en va d'ailleurs de même de l'amendement n° 10.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. Défavorable, ainsi que, par avance, sur l'amendement n° 10.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 9, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article L. 4424-2 du code général des collectivités territoriales.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 4424-2-1
DU CODE GÉNÉRAL DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES