SEANCE DU 18 DECEMBRE 2001


M. le président. Art. 33 bis . - I. Dans le 9 de l'article 145 du code général des impôts, après les mots : « lorsque son prix de revient », sont insérés les mots : "apprécié collectivement ou individuellement pour les entités visées ci-dessus,".
« II. - Les dispositions du I sont applicables pour l'imposition des résultats des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2001. »
L'amendement n° 97, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
« I. - Avant le I de l'article 33 bis , ajouter un paragraphe ainsi rédigé :
« IA. - Le b ter du 6 de l'article 145 du code général des impôts est complété par les mots : "à l'exception des titres visés au troisième alinéa de l'article L. 511-31 du code monétaire et financier".
« II. - Pour compenser la perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du I ci-dessus, compléter in fine cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« III. - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de l'éligibilité au régime des sociétés mères et filiales des participations détenues par un organe central dans les caisses régionales sous forme de CCI ou de CCA sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'article 33 bis modifie l'application du régime des sociétés mères et filiales pour l'ajuster aux réalités particulières des groupes bancaires mutualistes.
Je rappelle qu'actuellement les titres dépourvus de droit de vote ne peuvent ouvrir droit à l'application du régime dit mère-fille. Ce régime, vous le savez, permet de ne pas imposer les dividendes versés par une filiale à sa société mère.
La règle actuelle pose problème au regard des modifications en cours des structures du Crédit agricole, sujet que notre collègue M. Deneux connaît particulièrement bien. En effet, l'organe central, la Caisse nationale de Crédit agricole, la CNCA, va détenir 25 % du capital des caisses régionales sous forme de certificats coopératifs d'associés, CCA, et de certificats coopératifs d'investissement, CCI, cela afin que le « véhicule » coté, celui qui fait appel à l'épargne, soit représentatif de l'activité de banque de détail du Crédit agricole. Or les titres dont il s'agit sont sans droit de vote et la Caisse nationale de crédit agricole devrait donc, si aucune modification n'était apportée au droit en vigueur, être imposée sur les dividences perçus.
M. Gérard César. Tout à fait !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Afin de maintenir la neutralité fiscale de l'opération de restructuration, il est proposé de rendre les titres dont il s'agit éligibles au régime « mère-filles » lorsqu'ils sont détenus par un organe central, c'est-à-dire lorsque ce sont des titres de caisses régionales détenus par leur propre organe central.
Tel est le sens de l'amendement que la commission des finances vous soumet, mes chers collègues.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement, qui vise à rendre éligibles au régime des sociétés mères les certificats coopératifs d'investissement et les certificats coopératifs d'associés détenus par des organes centraux de groupes bancaires mutualistes.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Quel dommage !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. En effet, cette proposition est directement contraire à la logique du régime des sociétés mères, régime qui est réservé aux participations conférant un pouvoir d'influence aux sociétés qui les détiennent. Or ce pouvoir ne peut résulter que de l'exercice du droit de vote, dont sont dépourvus les CCA et les CCI, qui ne confèrent qu'un droit financier.
En outre, une réponse positive à cette proposition présenterait un risque sérieux de contagion sur les autres titres sans droit de vote, notamment sur les actions à dividende prioritaire sans droit de vote.
En tout état de cause, la proposition ne paraît pas de nature à répondre au problème ici posé. En effet, quand bien même l'absence de droit de vote des CCI et des CCA ne constituerait plus un obstacle à l'application du régime des sociétés mères, encore faudrait-il que les autres conditions de ce régime soient réunies. Or, en pratique, compte tenu de la dispersion du capital des structures émettrices de CCI et de CCA, les organes centraux des groupes bancaires mutualistes ne peuvent pas respecter l'une de ces conditions, qui exige qu'une société mère détienne au moins 5 % dans le capital de la société filiale.
Par conséquent, monsieur le rapporteur général, votre proposition aurait des effets incohérents, car elle dénaturerait le régime des sociétés mères sans régler la situation des organes centraux. Pour cette raison, j'y suis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 97, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 99, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
« I. - Avant le I de l'article 33 bis , ajouter un paragraphe ainsi rédigé :
« IB. - Au début du 9 de l'article 145 du code général des impôts, les mots : "Une participation détenue en application de l'article 6 de la loi n° 88-50 du 18 janvier 1988 relative à la mutualisation de la Caisse nationale de crédit agricole ou" sont remplacés par les mots : "La participation des caisses visées à l'article L. 512-34 du code monétaire et financier dans le capital de la structure de contrôle de leur organe central, ou celle détenue en application". »
« II. - Pour compenser la perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du I ci-dessus compléter in fine l'article 33 bis par un paragraphe ainsi rédigé :
« IV. - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de l'éligibilité au régime des sociétés mères et filiales des participations détenues par les caisses régionales de crédit agricole dans le capital de la structure de contrôle de leur organe central sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous restons sur le même problème.
Actuellement, les participations des Caisses régionales du Crédit agricole dans leur organe central, la Caisse nationale du Crédit agricole, ou CNCA, sont éligibles au régime « mère-filles », qui permet de ne pas imposer les dividendes perçus sur ces participations. Or la structure du Crédit agricole va être modifiée. Désormais, en effet, les participations des caisses régionales seront regroupées dans une société holding qui détiendra elle-même 70 % du capital de la CNCA. L'interposition de la holding ne permet plus aux participations des caisses régionales de bénéficier du régime « mères-filles ».
Pour assurer, là encore, la neutralité fiscale de l'opération du Crédit agricole, il faut prévoir que les participations des caisses régionales dans le capital de la holding, c'est-à-dire la structure de contrôle de l'organe central, soient éligibles au régime « mère-filles ».
Madame le secrétaire d'Etat, j'ai bien entendu tout à l'heure vos objections. Il est vrai que les deux amendements sont liés. La commission des finances souhaiten en effet, une adaptation spécifique en faveur d'organismes bancaires mutualistes à organe central qui cherchent une solution pour drainer des fonds propres sur les marchés financiers.
J'en conviens avec vous, nous préconisons de « tordre » un peu le régime « mère-filles » tel qu'il s'applique jusqu'ici. Reconnaissons toutefois que des adaptations juridiques ont déjà été consenties au Crédit agricole pour lui permettre de réaliser cette grande opération. Reconnaissons aussi que, compte tenu de l'architecture institutionnelle du Crédit agricole, cette opération de recours à l'épargne publique est loin d'être simple. Reconnaissons enfin que cette opération conditionne certainement la stratégie du groupe et la place qu'il prendra sur les différents marchés pour les dix ans qui viennent au moins.
Nous avons la chance de voir une grande institution faire évoluer sa culture sans pour autant lui être infidèle. Nous avons la chance de voir cette grande institution, qui représente maintenant, dans une large mesure, les espoirs de développement des milieux économiques qui l'ont fait naître, constituer, avec les autres organismes bancaires de statut classique, une seule et même maison commune, une seule et même fédération française des banques.
L'adaptation proposée ici, de nature à faire prévaloir la neutralité fiscale dans la mise en oeuvre de l'opération de recours au marché, n'est sans doute pas, il est vrai, tout à fait dans la ligne de ce qui a été admis jusqu'ici par la doctrine fiscale, mais la portée économique de cette mutation nous semble mériter une exception qui, pour s'appliquer au Crédit agricole et à l'opération financière qu'il entreprend, me semble être correctement bordée.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Les groupes bancaires mutualistes, dont le Crédit agricole, bénéficient d'ores et déjà d'une situation dérogatoire par rapport au droit commun en matière de régime mère-filles, vous l'avez rappelé. Lors de l'examen de la loi de finances rectificative pour 2000, on a admis, dans le cadre de ce régime, le maintien dans ce régime, pour les seuls groupes bancaires mutualistes, du seuil en valeur absolue de 150 millions de francs qui venait d'être supprimé par la loi de finances pour 2001.
Cependant, la logique de cette mesure de maintien du droit antérieur consistait à neutraliser les effets d'une réforme qui se révélait pénalisante, compte tenu de la structure juridique très particulière de ces groupes, et alors même que cette structure juridique résulte de la volonté non pas des groupes eux-mêmes mais des pouvoirs publics.
Or l'amendement que vous proposez aujourd'hui me semble relever d'une logique assez différente et, à mon sens, il va trop loin. Il s'agit non plus de prendre en compte la structure juridique des groupes bancaires mutualistes, telle qu'elle est prévue par les textes qui régissent les établissements, mais, en quelque sorte, de neutraliser, au regard du régime des sociétés mères, les effets de la restructuration voulue par la Caisse nationale du Crédit agricole dans le cadre de l'introduction en bourse d'une fraction de son capital. Vous admettrez que c'est un peu différent.
M. Gérard César. Cette opération est une réussite !
Constituer, avec les autres organismes bancaires de statut classique, une seule et même maison commune, une seule et même fédération française des banques.
L'adaptation proposée ici, de nature à faire prévaloir la neutralité fiscale dans la mise en oeuvre de l'opération de recours au marché, n'est sans doute pas, il est vrai, tout à fait dans la ligne de ce qui a été admis jusqu'ici par la doctrine fiscale, mais la portée économique de cette mutation nous semble mériter une exception qui, pour s'appliquer au Crédit agricole et à l'opération financière qu'il entreprend, me semble être correctement bordée.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Les groupes bancaires mutualistes, dont le Crédit agricole, bénéficient d'ores et déjà d'une situation dérogatoire par rapport au droit commun en matière de régime mère-filles, vous l'avez rappelé. Lors de l'examen de la loi de finances rectificative pour 2000, on a admis, dans le cadre de ce régime, le maintien dans ce régime, pour les seuls groupes bancaires mutualistes, du seuil en valeur absolue de 150 millions de francs qui venait d'être supprimé par la loi de finances pour 2001.
Cependant, la logique de cette mesure de maintien du droit antérieur consistait à neutraliser les effets d'une réforme qui se révélait pénalisante, compte tenu de la structure juridique très particulière de ces groupes, et alors même que cette structure juridique résulte de la volonté non pas des groupes eux-mêmes mais des pouvoirs publics.
Or l'amendement que vous proposez aujourd'hui me semble relever d'une logique assez différente et, à mon sens, il va trop loin. Il s'agit non plus de prendre en compte la structure juridique des groupes bancaires mutualistes, telle qu'elle est prévue par les textes qui régissent les établissement, mais, en quelque sorte, de neutraliser, au regard du régime des sociétés mères, les effets de la restructuration voulue par la Caisse nationale du Crédit agricole dans le cadre de l'introduction en bourse d'une fraction de son capital. Vous admettrez que c'est un peu différent.
M. Gérard César. Cette opération est une réussite !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Accepter une telle mesure serait risquer d'entraîner des demandes équivalentes de la part des autres groupes bancaires qui souhaitent adapter leurs structures. Gardons-nous, donc, de mesures fiscales sélectives. Toutefois, je comprends bien votre souhait, que nous partageons tous, de voir le Crédit agricole évoluer et se développer.
Il me semble que le problème pourrait être plus aisément résolu si l'on modifiait la loi de 1988 sur la mutualisation du Crédit agricole par l'institution d'une obligation de détention du holding de contrôle incombant aux caisses régionales. Par voie de conséquence, le texte adopté l'an dernier serait applicable à la nouvelle situation du Crédit agricole.
Au bénéfice de cette explication et de cette ouverture, je souhaite que vous retiriez cet amendement, monsieur le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Madame le secrétaire d'Etat, l'ouverture que vous venez de faire est intéressante, appréciable même. Puis-je vous demander, cependant, de quelle manière et dans quels délais vous envisageriez de la traduire dans la pratique législative, compte tenu du calendrier qui est à présent le nôtre, compte tenu de l'opération d'introduction en bourse qui a été réalisée et compte tenu aussi des conséquences fiscales qu'elle emporte dès le 31 décembre 2001 ?
M. Gérard César. Et voilà !
M. Roland du Luart. C'est une vraie question !
M. Alain Gournac. Une bonne question !
M. le président. Mes chers collègues, laissez réfléchir le Gouvernement ! (Sourires.)
M. Hilaire Flandre. Jusqu'après les élections !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, Mme le secrétaire d'Etat. Il semble que deux solutions sont envisageables. La première consisterait à laisser le soin à la navette, qui se raccourcit de plus en plus, à mesure que nous avançons dans nos travaux, de régler cette question. L'autre solution, peut-être plus sage en termes de réflexion et de mise au point des textes, consisterait à adopter cette disposition à un moment quelconque durant l'année 2002. Cela devrait être suffisant pour régler la question, monsieur le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je remercie Mme le secrétaire d'Etat de s'efforcer de répondre à nos préoccupations. Dans l'immédiat, c'est plutôt la première branche de l'alternative que je préconise : votons donc l'amendement de la commission, ...
M. Alain Gournac. Très bien !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... pour essayer, dans les heures et les jours qui viennent, d'ajuster le dispositif. Si nous n'y parvenons pas, le problème devra être traité dans le courant de l'année 2002 par tout véhicule adéquat et en maîtrisant la date d'application.
M. Alain Gournac. C'est une bonne solution !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mes chers collègues, par conséquent, c'est à titre en quelque sorte conservatoire que je vous demande de bien vouloir voter cet amendement, compte tenu des explications et des avancées formulées par Mme le secrétaire d'Etat.
M. Alain Gournac. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 99, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 33 bis, modifié.

(L'article 33 bis est adopté.)

Article 33 ter