SEANCE DU 22 OCTOBRE 2002


M. le président. L'amendement n° 37, présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel, Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Avant l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Les heures supplémentaires constituent, pour les entreprises qui n'ont pas recours à la modulation ou à l'annulation des horaires, la première variable d'ajustement à leur disposition pour faire face aux variations d'activité auxquelles elles sont confrontées.
« Leur utilisation apporte une réponse aux surcroîts ponctuels d'activité, en particulier lorsqu'ils sont imprévisibles, et doit donc être limitée à cet objet. »
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. L'article 2 conduit à la banalisation des heures supplémentaires, qui deviendront des heures structurelles, logique qui permettra de revenir à un dispositif de 39 heures grâce au coût très faible - plus 10 % - des quatre premières heures supplémentaires. Comme dans la discussion générale, je ne fais ici que citer M. le Premier ministre, qui s'exprimait ainsi à Strasbourg, le 6 septembre dernier.
Or ces heures supplémentaires ne peuvent être considérées comme des heures structurelles : elles constituent pour les entreprises qui n'ont pas recours à la modulation ou à l'annualisation des horaires la première variable d'ajustement à leur disposition pour faire face aux variations d'activité auxquelles elles sont confrontées. Leur utilisation apporte une réponse aux éventuels surcroîts d'activité, en particulier lorsqu'ils sont imprévisibles, et doit donc être limitée à cet objet.
L'amendement que nous présentons donne une définition des heures supplémentaires et de leur objet conforme aux dispositions de l'accord national interprofessionnel sur l'emploi du 31 octobre 1995. Il faut rappeler que, lors de l'instauration en 1982 du contingent d'heures supplémentaires, il a été précisé que celles-ci devaient se justifier par un surcroît d'activité. L'accord national interprofessionnel du 31 octobre 1995 vise quant à lui les pointes d'activité imprévisibles.
La chambre sociale de la Cour de cassation a de longue date confirmé la validité de ces critères que nous souhaitons voir maintenus.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Ce qui vient d'être dit ne s'applique évidemment pas à l'ensemble des entreprises, et M. le ministre y répondra sans doute sur le fond.
La commission a quant à elle émis un avis défavorable.
L'article L. 212-5 du code du travail définit les heures supplémentaires et il apparaît donc inutile de les définir à nouveau, a fortiori de manière restrictive.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement qui vise, en effet, à introduire une nouvelle définition des heures supplémentaires conforme à l'accord national interprofessionnel de 1995, accord auquel le gouvernement que vous souteniez ne devait cependant pas être favorable, monsieur Godefroy, car j'observe que la loi du 19 janvier 2000 reprend la définition des heures supplémentaires qui figure à l'article L. 212-5 du code du travail.
Selon cette définition extrêmement simple, les heures supplémentaires sont les heures effectuées au-delà de la durée hebdomadaire du travail. Il n'y a donc aucune raison, me semble-t-il, pour ne pas suivre des propositions qui étaient les vôtres lors de l'examen des lois Aubry.
Je ne peux laisser dire par ailleurs, sans autre précision, que nous avons décidé de rémunérer à 10 % les quatre premières heures supplémentaires. Vous savez en effet que cette disposition ne concerne que les entreprises de moins de vingt salariés et que vous l'avez vous-mêmes mise en oeuvre. Nous avons seulement décider de prolonger de trois ans sa durée d'application. (Très bien ! sur les travées du RPR.)
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau pour explication de vote.
M. Roland Muzeau. Je tiens à expliquer pourquoi les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen soutiennent l'amendement qui vient de nous être présenté et qui vise à inscrire dans le code du travail la définition des heures supplémentaires.
Le texte que nous examinons modifie en profondeur le régime des heures supplémentaires et le niveau du contingent annuel. Nous pensons que nombre d'employeurs utiliseront ces deux leviers pour contourner l'obligation de respecter la durée légale du travail en recourant abusivement aux heures supplémentaires.
Pour éviter les dépassements réguliers et structurels de la durée légale, il convient donc de confirmer législativement le rôle des heures supplémentaires et leur caractère exceptionnel, au sens de l'accord national interprofessionnel du 31 octobre 1995 comme de la jurisprudence, laquelle précise en outre que les heures supplémentaires doivent être motivées par un surcroît d'activité.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 37.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 2