SEANCE DU 12 NOVEMBRE 2002


M. le président. Avant de mettre aux voix les conclusions du rapport de la commission des affaires économiques sur la proposition de loi n° 37, je donne la parole à M. Yves Coquelle, pour explication de vote.
M. Yves Coquelle. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au terme de l'examen de la proposition de loi modifiant la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, force est de constater que le texte initial qui nous a été présenté n'est pas sorti amélioré de la discussion.
M. Guy Fischer. C'est le moins que l'on puisse dire !
M. Yves Coquelle. Nous regrettons profondément que vous n'ayez rien retenu de la formidable intervention de Jack Ralite, qui faisait pourtant état d'un vote unanime du Haut Comité pour le logement des personnes défavorisées contre la remise en cause de la loi SRU que vous avez engagée.
Cette proposition de loi est crispée sur une conception profondément inégalitaire du développement urbain à venir, qui oppose artificiellement la construction ou la réalisation de logements sociaux avec l'harmonie et l'équilibre.
Nous avons démontré que la grande réticence manifestée par certains n'avait d'autre origine que le profond mépris dont ils font preuve à l'égard des familles qui demeurent aujourd'hui dans le parc locatif social.
Le reste, mes chers collègues, n'est en quelque sorte que littérature, ou plutôt adaptation de la législation aux seuls impératifs définis par une vision pour le moins étroite de l'urbanisme et, plus largement, de la politique de la ville.
Il s'agit donc de faire en sorte que tout puisse continuer comme avant, comme si de rien n'était, comme si la situation dégradée que connaît le secteur du logement n'existait pas et qu'aucun besoin ne se manifestait en la matière.
Ces choix ne permettront évidemment pas de relancer la construction de logements locatifs sociaux dans les communes qui en sont aujourd'hui largement dépourvues, pas plus qu'ils ne faciliteront, au demeurant, la réalisation de nouveaux programmes là où le patrimoine social est d'ores et déjà significatif.
Les habitants de notre pays ont besoin d'une autre politique du logement que celle qui se dessine au fil des déclarations ministérielles ou à travers le soutien accordé par le Gouvernement à ce type d'initiative parlementaire, qui ne rend pas ses auteurs plus honorables qu'avant.
Ils ont besoin d'autre chose que du choix politique de la liquidation du parc social de fait, de la remise en question du niveau des aides personnelles au logement, de l'absence de financement adapté à l'accession sociale à la propriété.
Ils ont besoin d'autre chose que de propositions de loi de ce genre, qui ne visent qu'à encourager le statu quo.
N'oublions jamais, mes chers collègues, que l'un des plus redoutables moteurs de la violence urbaine est la perception concrète des inégalités sociales ; or c'est bien ce qui se réaliserait si cette loi était promulguée.
Ce sont clairement des choix de classe que vous venez d'exprimer !
Nous ne pouvons évidemment voter que contre la proposition de loi telle qu'elle ressort de nos travaux. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.).
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Gérard Larcher, président de la commission. A près de cinq heures du matin, nous pouvons dire que nous avons largement utilisé le temps d'initiative parlementaire !
Vous ne m'en voudrez pas de remercier d'abord M. le rapporteur, qui, depuis le mois de juin dernier, s'efforce d'analyser les causes des blocages issus de la loi SRU, tant en matière de logement que d'urbanisme.
Je voudrais associer à ces remerciements tous les collègues qui, en commission comme en séance publique, se sont associés à cette réflexion et l'ont enrichie.
Les rapports entre la commission et le Gouvernement n'ont pas été faciles ce soir, mais cela fait partie du débat parlementaire. Je tiens donc à remercier aussi M. le ministre et ses collaborateurs.
Le Sénat a préféré le contrat à la contrainte. Il a fait le choix de la confiance aux élus locaux, s'inscrivant ainsi dans la droite ligne du projet de loi constitutionnelle relatif à la décentralisation voulu par M. le Premier ministre, que nous avons adopté la semaine dernière.
Nous avons, il convient de le souligner, rappelé l'importance de la mixité sociale. Ce texte ne l'abroge pas.
M. Roland Muzeau. Si !
M. Gérard Larcher, président de la commission. Nous avons aussi vécu un moment de libre expression parlementaire. Y compris au sein de la majorité qui soutient le Gouvernement, nous avons parfois entendu des divergences. Peut-être les avons-nous trop montrées, mais il en va ainsi dans le débat d'opinion.
Je voudrais toutefois tirer un enseignement pour l'avenir. J'ai bien entendu M. le ministre avancer la date de la fin de l'année pour l'examen de son projet de loi. Gardons-nous de la précipitation, qui pourrait nous conduire à ne pas préparer suffisamment certains points.
Comme je le disais ce matin devant les membres de la commission, il nous faut être vigilants quand des amendements d'importance sont déposés. Donnons-nous le temps de les analyser, de rapprocher les points de vue. Tel est mon souhait pour l'avenir.
Je tenais également à remercier les collaborateurs de la commission, qui sont fortement sollicités pendant cette période et qui, dans très exactement trois heures trente, seront présents à la réunion du bureau de la commission. Je les félicite de la qualité de leurs travaux ainsi que de leur mobilisation autour des commissaires en cette période de l'année.
Permettez-moi enfin, monsieur le président, tout en remerciant la présidence d'avoir conduit, avec compétence et attention l'ensemble des débats, de remercier l'ensemble des personnels du Sénat, qui n'avaient sans doute pas prévu une nuit aussi longue.
M. le président. L'ensemble du personnel sera sensible à ces compliments !
La parole est à M. le ministre.
M. Gilles de Robien, ministre. Monsieur le président, je vous remercie d'avoir assuré la présidence de cette séance publique avec autant de tact, de diplomatie et de courtoisie. Je remercie également le président de la commission et le rapporteur qui, par leur spontanéité et leur franchise, ont permis de vrais échanges, ainsi que l'ensemble des sénateurs qui ont travaillé sur des textes un peu disparates.
S'agissant de l'article 55, je retiendrai surtout l'idée selon laquelle les procès d'intention que l'opposition nous faisait il y a peu n'ont plus lieu d'être, puisque l'affirmation de la mixité sociale a été faite. Les objectifs sont supérieurs à ceux que vous aviez évoqués voilà deux ans !
Au cours de nos débats, nous n'avons exclu aucune commune du dispositif. Par conséquent, nous sommes exempts de reproches de la part de l'opposition. La majorité a donc bien travaillé.
Je voulais enfin vous donner rendez-vous. Nous aurons à connaître des règles d'urbanisme dans le projet de loi portant diverses dispositions dans le domaine de l'urbanisme, de l'habitat et de la construction, qui sera examiné à l'Assemblée nationale dans trois semaines et au Sénat probablement - l'ordre du jour n'ayant pas encore été fixé - le 20 décembre prochain. En outre, mesdames, messieurs les sénateurs, nous aurons un grand rendez-vous dans trois ans ; nous ferons alors le point sur la récolte de ce que nous avons semé ce soir.
Dépasserons-nous, en termes de mixité sociale, les objectifs de l'opposition ? En ce qui me concerne, compte tenu du travail qui a été fait, j'en suis persuadé. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Braye, rapporteur. Je souhaite à mon tour remercier M. le ministre et les membres de son cabinet, en espérant qu'à l'avenir nous parviendrons à nouer des contacts plus étroits avant l'examen des textes, de façon à mieux nous comprendre dans le débat. Cela me semble particulièrement important.
Je remercie moi aussi les administrateurs de la commission et, bien sûr, je remercie tous mes collègues de leur soutien, car c'est grâce à leur présence jusqu'à cette heure tardive que nous sommes parvenus à un résultat.
Je termine, mes chers collègues, en remerciant le président de la commission, M. Gérard Larcher, véritable ami depuis fort longtemps : nous n'aurions pas obtenu le résultat que nous avons obtenu s'il n'avait été là à des moments déterminants.
Merci à tous, et bonne nuit ! (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix, modifiées, les conclusions du rapport de la commission des affaires économiques sur la proposition de loi n° 37 (2002-2003).

(La proposition de loi est adoptée.)

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