SEANCE DU 14 NOVEMBRE 2002


M. le président. « Art. 10. - Les personnels des services de la police et de la gendarmerie nationales désignés et spécialement habilités à cet effet ainsi que les personnels de l'Etat investis par la loi d'attributions de police judiciaire et habilités peuvent accéder, pour l'exercice de leurs missions de police judiciaire, aux informations, y compris nominatives, figurant dans les traitements automatisés de données personnelles mentionnées à l'article 9 de la présente loi et détenus par chacun de ces services. L'habilitation précise la nature des données auxquelles elle autorise l'accès.
« L'accès aux informations définies au premier alinéa est ouvert aux magistrats du Parquet et aux magistrats instructeurs. »
La parole est à M. Robert Bret, sur l'article.
M. Robert Bret. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous tenons à attirer votre attention sur les dispositions prévues par cet article concernant la consultation des fichiers informatiques.
Ce que nous redoutons le plus, ce n'est pas l'utilisation des fichiers informatiques - à condition, bien sûr, que l'usage soit restreint -, mais la banalisation de l'accès aux fichiers.
En effet, si la possibilité d'utiliser des fichiers de police à des fins d'enquêtes administratives ou judiciaires est effective, il convient cependant de rester attentif aux dangers que cela peut comporter.
L'habilitation donnée aux policiers, gendarmes et personnels de l'Etat doit être suffisamment précise afin d'éviter toutes sortes d'abus dans l'usage de ces fichiers et afin que le moins de personnes possible puissent y accéder.
Cependant, cette dernière proposition risque d'être difficile à appliquer puisque, en l'état, ce seraient environ 400 000 personnes - c'est la CNIL qui l'indique - qui seraient en position de solliciter cette base de données, dans le cadre, précisément, de tâches administratives nombreuses et permanentes.
A l'heure actuelle, quelque 40 000 officiers de police judiciaire seulement sont habilités à consulter le système de traitement des infractions constatées.
Les fichiers de police ne doivent pas devenir une sorte de second casier judiciaire, plus facilement accessible mais pas forcément plus fiable. En effet, la Commission nationale de l'informatique et des libertés relève de nombreuses erreurs de saisie, et il arrive ainsi que des témoins, entendus dans le cadre d'enquêtes, soient inscrits au registre du STIC en tant que coupables de crimes ou de délits.
Voilà exactement ce que nous voulons éviter, mais cela risque malheureusement de se produire si la loi ne prévoit pas un accès plus restreint à ces bases de données personnelles. C'est pourquoi nous voterons contre l'article 10.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 4 est présenté par M. Courtois, au nom de la commission.
L'amendement n° 177 est présenté par M. Dreyfus-Schmidt, Mmes André et Blandin, MM. Badinder, Frimat, Charles Gautier, Mahéas, Mermaz, Peyronnet, Sueur et les membres du groupe socialiste et apparenté.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer cet article. »
L'amendement n° 178, présenté par M. Dreyfus-Schmidt, Mmes M. André et Blandin, MM. Badinter, Frimat, Charles Gautier, Mahéas, Mermaz, Peyronnet, Sueur et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit cet article :
« Le procureur de la République peut communiquer aux personnels des services de la police et de la gendarmerie nationale désignés et spécialement habilités à cet effet, ainsi qu'aux personnels de l'Etat spécialement investis par la loi d'attribution de police judiciaire, pour l'exercice de leurs missions de police judiciaire, les informations, y compris nominatives, figurant dans les traitements automatisés de données personnelles mentionnées à l'article 9 de la présente loi et détenus par chacun de ces services.
« L'accès aux informations définies au premier alinéa est ouvert, dans le respect des droits des parties, aux magistrats du Parquet et aux magistrats instructeurs. »
L'amendement n° 79, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le début du premier alinéa de cet article :
« Les personnels spécialement habilités des services de la police et de la gendarmerie nationales désignés à cet effet, ainsi que les personnels spécialement habilités de l'Etat... »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 4.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement a pour objet de supprimer l'article 10. Il s'agit d'un amendement de conséquence, puisque les dispositions de l'article 10 ont été reprises à l'article 9.
M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt, pour défendre l'amendement n° 177.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il est satisfait, si j'ose dire, par l'amendement de la commission !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les deux amendements identiques ?
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Favorable.
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour présenter l'amendement n° 178.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Si les deux précédents amendements sont adoptés, il n'aura plus d'objet.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour présenter l'amendement n° 79.
M. Michel Charasse. Si les amendements identiques, auxquels M. Sarkozy s'est déclaré favorable, sont adoptés, l'amendement n° 79 n'aura plus d'objet lui non plus, puisque l'article 10 se trouvera supprimé.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 4 et 177.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 10 est supprimé et les amendements n°s 178 et 79 n'ont plus d'objet.

Article 11