SEANCE DU 25 NOVEMBRE 2002


M. le président. « Art. 4 bis . - I. - Le g du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° Le troisième alinéa est ainsi modifié :
« a) Dans la deuxième phrase, les mots : ", un ascendant ou un descendant" sont supprimés ;
« b) Dans la cinquième phrase, les mots : ", de membres de son foyer fiscal ou de ses descendants et ascendants" sont remplacés par les mots : "ou des membres de son foyer fiscal" ;
« c) Les sixième et septième phrases sont supprimées ;
« 2° Dans la deuxième phrase du dixième alinéa, les mots : ", un ascendant ou un descendant" sont supprimés. »
« II. - Les dispositions du I sont applicables aux logements acquis neufs ou en l'état futur d'achèvement à compter du 9 octobre 2002 et aux logements que le contribuable fait construire et qui ont fait l'objet, à compter du 9 octobre 2002, de la déclaration d'ouverture de chantier prévue à l'article R. 421-40 du code de l'urbanisme. Elles sont également applicables aux locaux affectés à un usage autre que l'habitation acquis à compter du 9 octobre 2002 et que le contribuable transforme en logements. »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-144, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« « Supprimer cet article. »
L'amendement n° I-217, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Complétez le II de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les logements acquis avant le 9 octobre 2002, lorsque la location est suspendue à l'issue d'une période d'au moins trois ans au profit d'un ascendant ou d'un descendant du contribuable, la déduction forfaitaire s'applique au taux de 14 % et ce dernier ne bénéficie pas, pendant la période de mise à disposition du logement au profit d'un ascendant ou d'un descendant, de la déduction au titre de l'amortissement. Cette période de mise à disposition, qui ne peut excéder neuf ans, n'est pas prise en compte pour la durée de location minimum de neuf ans. »
L'amendement n° I-218, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« A. - Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
« III. - Le e du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° Le deuxième alinéa est ainsi modifié :
« a) Dans la troisième phrase, les mots : ", un ascendant ou un descendant" sont supprimés (deux fois) ;
« b) Les sixième et septième phrases sont supprimées. »
« 2° Dans la première phrase du troisième alinéa, les mots : ", ou de ses descendants ou ascendants" sont supprimés. »
« IV. - Les dispositions du III ci-dessus sont applicables aux logements qui ne peuvent donner lieu au régime prévu au g du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts et qui, répondant aux normes d'habitabilité telles que définies par décret, sont acquis à compter du 22 novembre 2002 et loués par une personne physique ou une société non soumise à l'impôt sur les sociétés en vertu d'un bail conclu à compter de cette même date.
« Pour les logements acquis avant le 22 novembre 2002 répondant aux obligations fixées au e du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts, lorsque la location est suspendue à l'issue d'une période d'au moins trois ans au profit d'un ascendant ou d'un descendant du contribuable, la déduction forfaitaire s'applique au taux de 14 % et la période de mise à disposition du logement au profit d'un ascendant ou d'un descendant n'est pas prise en compte pour la durée de location minimale de six ans. Cette période de mise à disposition ne peut excéder neuf ans. »
« B. - Pour compenser la perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du A ci-dessus, compléter in fine cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'ouverture du dispositif fiscal en faveur du logement locatif ancien aux ascendants et descendants du contribuable pour les logements acquis et les baux conclus à compter du 22 novembre 2002 est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Thierry Foucaud, pour défendre l'amendement n° I-144.
M. Thierry Foucaud. L'article 4 bis soulève un certain nombre de questions.
Le dispositif existant d'incitations à l'investissement locatif dit « Besson » marquerait le pas, selon les auteurs de l'amendement à l'origine de l'article 4 bis, puisque la dépense fiscale afférente s'élèverait, en 2003, à un peu plus de 500 millions d'euros.
Mais quelle est cette conception de la famille qui anime les membres de la majorité parlementaire ? Ainsi, chaque initiative, chaque marque de solidarité familiale devrait avoir une traduction fiscale ? Si vous étiez logiques, chers collègues de la majorité, vous adopteriez une disposition permettant la déduction du revenu imposable des cautions solidaires exigées des parents de jeunes locataires d'HLM par certains organismes ou par certaines agences immobilières.
Proposer une nouvelle incitation fiscale en faveur de l'investissement dans le secteur locatif privé s'apparente à une véritable provocation, dès lors que l'on garde en mémoire la baisse programmée des crédits du ministère des transports, du logement, du tourisme et de la mer, s'agissant notamment de l'enveloppe PLA-PALULOS, c'est-à-dire les prêts locatifs aidés et les primes à l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale.
Vous préférez vous en tenir à une disposition qui est clairement destinée à ceux qui ont la possibilité de réaliser des investissements immobiliers, ce qui n'est pas le cas de la majorité des Français, ceux-ci étant soit locataires, soit simples accédants à la propriété, c'est-à-dire, dans un premier temps, propriétaire de leurs dettes !
Adopter l'article 4 bis en l'état reviendrait à ajouter à ce projet de loi de finances, qui en est déjà fort pourvu, et alors même que la situation des comptes publics est pour le moins préoccupante, une mesure destinée à ne profiter qu'à quelques-uns, dont les revenus leur permettent de jouir déjà de toutes les autres formules d'optimisation fiscale que la législation en vigueur offre. Transformer la solidarité familiale en source d'évasion fiscale n'est pas et ne doit pas être à l'ordre du jour. C'est la raison pour laquelle nous vous invitons à adopter cet amendement de suppression de l'article 4 bis.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter les amendements n°s I-217 et I-218 et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° I-144.
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'amendement n° I-217 apporte une précision rédactionnelle. Je ne suis pas complètement persuadé que cette disposition doive figurer dans la loi mais, à l'inverse, je suis certain qu'il faut pouvoir répondre clairement à la question ici posée.
Je le rappelle, c'est sur l'initiative de l'un de nos collègues, M. Jean-Pierre Plancade, sénateur de la Haute-Garonne, que, voilà quelques années, le régime dit « Besson » a été légèrement ajusté. C'était tout ce que nous avions pu obtenir du gouvernement de l'époque, avec le concours actif de cet excellent collègue. Si je ne m'abuse, d'ailleurs, le groupe socialiste du Sénat aurait voulu aller bien plus loin encore.
A l'époque, le régime Besson ne pouvait pas s'appliquer à la location, à des ascendants ou à des descendants du contribuable. Il y avait un blocage complet sur ce sujet. Nous avions pu obtenir une sorte de régime suspensif de l'avantage fiscal au cas où un bien répondant aux conditions du régime Besson se trouverait, à un moment donné, être loué à un ascendant ou à un descendant ; il y avait donc neutralisation du dispositif fiscal, jusqu'au jour où un tiers serait, à nouveau, entré dans les lieux.
Monsieur le ministre, par cet amendement n° I-217, je pose la question de savoir si le régime Plancade subsiste à l'intérieur du nouveau dispositif.
Il est important que les contribuables relevant déjà du régime « Besson neuf » puissent continuer à bénéficier du mécanisme de suspension de l'avantage fiscal en cas de location aux ascendants ou aux descendants. Cette souplesse nous semble toujours aussi nécessaire.
L'amendement n° I-218 est, quant à lui, plus ambitieux, puisqu'il tend à instaurer une certaine symétrie entre le secteur du neuf et celui de l'ancien.
Nous ne sommes naturellement pas favorables aux effets d'aubaine, mais nous souhaitons un réel entraînement de la vie économique.
Nous proposons donc de subordonner le bénéfice de la mesure susvisée à l'acquisition de logements anciens en vue de leur location. On acquiert des logements anciens, on doit les rénover, on les met en location. Pourquoi exclure le marché de l'ancien ? Pourquoi avoir cette vision tronquée du marché de l'immobilier et cette attitude discriminatoire à l'égard de l'ancien ? Pourquoi favoriser les promoteurs de réalisations neuves et défavoriser les opérations de réhabilitation réalisées à l'unité dans des immeubles anciens, par exemple dans les centres-villes des villes moyennes de province qui nous tiennent beaucoup à coeur, monsieur le ministre ?
L'amendement de la commission des finances, cumulé avec les mesures déjà adoptées par l'Assemblée nationale, ferait évoluer assez sensiblement le régime Besson, dont nous avions beaucoup critiqué, ces dernières années, le caractère exagérément étroit, au point qu'il faudrait, pour tenir compte de cette évolution très qualitative, parler désormais d'un « dispositif Besson-Lambert » ou « Lambert-Besson » ! (Sourires.) Si l'amendement n° I-218 était adopté, il serait tout à fait opportun de changer ainsi l'appellation, comme le suggère M. le président de la commission des finances.
Il s'agirait donc de réserver l'ouverture aux ascendants et descendants du contribuable aux nouvelles acquisitions dans l'ancien, comme cela a été fait pour le neuf, et d'accroître par là même le marché locatif dans l'ancien.
Pour répondre aux objections parfois formulées - tout à l'heure encore, par M. Foucaud -, je rappelle que les conditions d'octroi du régime fiscal en faveur du logement locatif privé sont très précises : sont prévues des contraintes en termes de ressources du locataire et de loyer, et le fait qu'il s'agisse d'un membre de la famille ne change rien.
Monsieur le ministre, il est véritablement nécessaire de développer le marché locatif, tant dans l'ancien que dans le neuf. Ce nouveau dispositif que nous propose la commission sera parachevé, lors de l'examen de la deuxième partie du projet de loi de finances, par une revalorisation du taux de déduction forfaitaire sur les revenus fonciers, que nous proposons de porter de 25 % à 40 %. S'agissant d'un article non rattaché, nous ne pouvons pas encore l'examiner pour l'instant, mais c'est bien toute la panoplie des mesures qu'il faut avoir présente à l'esprit pour apprécier la portée du dispositif proposé.
S'agissant de l'amendement n° I-144 présenté par notre collègue Thierry Foucaud, il est clair que son inspiration est totalement opposée à celle tant du Gouvernement que de la majorité de l'Assemblée nationale et de la commission des finances du Sénat, raison pour laquelle l'avis de la commission - M. Foucaud n'en sera pas surpris - ne peut qu'être défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert, ministre délégué. S'agissant de l'amendement n° I-144, l'avis du Gouvernement est en effet défavorable, puisque cet amendement vise à supprimer une mesure de nature à encourager la construction de logements neufs et à dynamiser un secteur d'activité particulièrement important pour l'emploi.
L'amendement n° I-217 pose un problème rédactionnel : il est incomplet. Il est indispensable, en effet, de maintenir en vigueur les dispositions antérieures pour les logements que le contribuable a fait construire avant le 9 octobre 2002, donc qu'il a acquis avant cette date en vue de les transformer en logements. A défaut, on obtiendrait, en ce qui concerne ces logements, l'effet inverse de celui qui est recherché.
Cet amendement me donne cependant l'occasion de réaffirmer solennellement que le dispositif de suspension est maintenu pour les investissements réalisés antérieurement. Je demanderai d'ailleurs à mes services de rappeler l'existence de cette mesure par une note en italiques, insérée dans le code général des impôts. De plus, l'existence et la pérennité de cette mesure seront également rappelées dans l'instruction administrative qui commentera les nouvelles dispositions, ainsi que dans la notice de la déclaration des revenus fonciers et dans les dépliants d'information.
Ce sont là, me semble-t-il, des garanties de nature à satisfaire la légitime préoccupation de précision que vous avez formulée et qui devraient vous permettre de retirer votre amendement, monsieur le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est le cas, monsieur le ministre : je le retire !
M. le président. L'amendement n° I-217 est retiré.
Veuillez poursuivre, monsieur le ministre délégué.
M. Alain Lambert, ministre délégué. Je serai direct : le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement n° I-218, car il est, sinon contradictoire, du moins concurrent avec la disposition préalablement adoptée qui vise à soutenir les logements neufs et l'activité de construction immobilière. Cela étant, monsieur le rapporteur général, vous connaissez la sensibilité qui est la mienne sur tous ces sujets, et je ne suis pas opposé à ce qu'une réflexion soit engagée sur le régime applicable aux logements anciens, que vous avez qualifié tout à l'heure de « Besson-Lambert », ce qui était me faire beaucoup d'honneur !
Différentes pistes sont possibles et mériteraient d'être expertisées avec la participation, d'une part, des professionnels, et, d'autre part, de mon collègue Gilles de Robien. C'est pourquoi, à ce stade de la réflexion, le Gouvernement souhaite le retrait de l'amendement n° I-218 ; à défaut, il demanderait au Sénat de le repousser.
M. le président. Monsieur le rapporteur général, l'amendement n° I-218 est-il maintenu ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le président, la commission n'est pas convaincue par l'argumentation de M. le ministre et maintient l'amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-144.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-218.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 4 bis , modifié.
(L'article 4 bis est adopté.)

Articles additionnels après l'article 4 bis