SEANCE DU 25 NOVEMBRE 2002


M. le président. L'amendement n° I-32, présenté par MM. Ostermann et Besse, Mme Bout, MM. Cornu, Del Picchia, Doublet, Eckenspieller, Fournier, Ginésy, Murat, Natali, Oudin, Peyrat, Rispat, Schosteck et Vasselle, est ainsi libellé :
« Après l'article 8 ter , insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans la première phrase du premier alinéa du I de l'article 154 du code général des impôts, les mots : "de 2 600 euros" sont remplacés par les mots : "d'une rémunération égale au plus à trente-six fois le montant mensuel du salaire minimum interprofessionnel de croissance".
« II. - Dans le second alinéa du I du même article, le nombre : "trente-six" est remplacé par le nombre : "soixante-douze".
« III. - La perte de recettes pour l'Etat résultant des I et II ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 403, 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Joseph Ostermann.
M. Joseph Ostermann. Lorsque l'épouse d'un artisan ou d'un commerçant occupe un emploi salarié dans l'entreprise de son mari, son salaire est réintégré pour une grande part dans le bénéfice de l'entreprise. Il en est ainsi pour la part de son salaire dépassant 2 600 euros par an, sauf si l'entreprise adhère à un centre de gestion agréé. Une partie plus ou moins importante de son salaire est donc assimilée, fiscalement, à un bénéfice et non à un salaire.
Cette règle est absurde sur le plan de l'assurance sociale. En effet, alors que le salaire du conjoint supporte en totalité les cotisations d'assurance maladie, vieillesse, etc., du régime général, une partie de celui-ci est une nouvelle fois soumise à ces cotisations au titre du régime des travailleurs non salariés.
Il est par conséquent indispensable de mettre un terme à cette anomalie que constitue le bas plafonnement de la déductibilité du salaire du conjoint à 2 600 euros.
Le présent amendement vise donc à relever ce plafond à trente-six fois le SMIC pour les entreprises non adhérentes à un centre de gestion agréé et à soixante-douze fois le SMIC pour les entreprises adhérentes.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Comme l'indique M. Joseph Ostermann, il est vrai qu'il existe un double assujettissement, comme rémunération et comme bénéfice, aux cotisations sociales pour la part du salaire du conjoint qui excède le plafond. Cela paraît incontestable et c'est bien une anomalie.
Pour cette raison, notre collègue propose de relever fortement les plafonds de l'article 154 du code général des impôts. Or - et ce sont là des objections que je tiens à signaler - l'objet du plafonnement étant d'assurer la sincérité du bénéfice déclaré, il est difficile de l'augmenter dans des proportions aussi importantes sans favoriser quelques dérives.
S'agirait-il de véritables rémunérations traduisant la réalité de services accomplis pour l'entreprise ? Peut-être, dans bien des cas de figure. Ne pourrait-il y avoir des situations plus contestables ? Ce sont quelques-une des questions que je me permets de soumettre à la Haute Assemblée.
Il m'a été dit par ailleurs que, sur l'initiative du secrétaire d'Etat aux PME, M. Renaud Dutreil, qui est très fécond, puisqu'il est déjà à l'origine d'un projet sur l'initiative économique, le Gouvernement réfléchissait à un autre projet sur le développement des entreprises susceptible d'englober différents sujets importants pour les activités agricoles, commerciales et artisanales. D'après les informations qui m'ont été communiquées, ce projet de loi, qui serait présenté en 2003, permettrait notamment d'améliorer le sort du conjoint d'un non-salarié. Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous en dire plus à ce sujet ?
Sur l'amendement de notre collègue M. Ostermann, la commission s'en remet à l'avis du Gouvernement, tout en rappelant qu'il lui est déjà arrivé de voter un amendement analogue.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert, ministre délégué. C'est d'un sujet ancien qu'il s'agit, en effet, puisque cette question de la déductibilité du salaire du conjoint est bien connue de tous ceux qui ont approché, de près ou de loin, une entreprise individuelle.
Je me souviens de gens qui ont changé de régime matrimonial pour ne pas rester sous le régime de la communauté, puisque les règles et la situation juridique diffèrent selon que l'on est soumis au régime de la communauté ou au régime de la séparation de biens. Il est d'autant plus difficile, dans ces conditions, de traiter les cas de manière identique. En effet, lorsque les époux sont soumis à un régime de communauté de biens, cette communauté lie les intérêts des deux époux. On considère alors que le conjoint participe en fait à l'exploitation et a vocation à la propriété d'une quote-part des résultats qui sont réalisés.
Le principe même de la déduction du salaire qui lui est versé et qui présente en réalité le caractère d'une affectation du bénéfice et non celui d'une charge apparaît comme une dérogation au principe de la détermination du bénéfice imposable et toute autre solution serait source d'abus ou de contentieux, les intéressés pouvant être tentés, en effet, de majorer la part du conjoint pour diminuer le bénéfice taxable. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle la législation est plus favorable lorsque l'entreprise a adhéré à un centre de gestion agréé.
On ne peut pas non plus comparer les règles d'assiette de l'impôt sur le revenu et le calcul des cotisations sociales, puisque les régimes sont différents.
Je ne puis affirmer que les curseurs sont placés au bon endroit, cher ami Ostermann, mais, comme l'a dit M. le rapporteur général, puisque le Sénat va examiner, au début de l'année prochaine, un texte sur l'entreprise, je pense que ce sera une meilleure occasion pour revoir l'ensemble de ces dispositifs. Cela me conduit à vous demander de bien vouloir retirer votre amendement, que vous pourriez-nous proposer à nouveau lors de l'examen du projet de loi que j'évoquais.
M. le président. Votre amendement est-il maintenu, monsieur Ostermann ?
M. Joseph Ostermann. Au bénéfice des informations qui me sont communiquées, tant par M. le rapporteur général que par M. le ministre, je retire cet amendement, tout en précisant que nous serons très attentifs au projet de loi qui nous sera présenté.
M. le président. L'amendement n° I-32 est retiré.
L'amendement n° I-33 présenté par MM. Ostermann, Bailly et Besse, Mme Bout, MM. Braun, Braye, Cornu, Del Picchia, Doublet, Dubrule, Eckenspieller, Fournier, Ginésy, Murat, Natali, Peyrat, de Richemont, Rispat, Trillard et Vasselle, est ainsi libellé :
« Après l'article 8 ter , insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 199 quater D du code général des impôts, il est rétabli un article 199 quater E ainsi rédigé :
« Art. 199 quater E . - Les titulaires de revenus passibles de l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux imposés d'après leur bénéfice réel peuvent bénéficier d'une réduction de leur cotisation d'impôt sur le revenu égale à 35 % de l'excédent plafonné à 1 524 euros par an, des dépenses de formation professionnelle exposées au cours de l'année, par rapport aux dépenses de même nature au cours de l'année précédente.
« La formation visée à l'alinéa précédent doit être dispensée par des organismes agréés par l'Etat et avoir pour objet l'acquisition, le maintien ou le perfectionnement de la qualification professionnelle de ces contribuables.
« Les dispositions du présent article s'appliquent aux dépenses de formation, à l'exclusion des frais de voyage et de déplacement, d'hébergement et de restauration, exposées au cours des années 2003 à 2006, sur option du contribuable irrévocable jusqu'au terme de cette période.
« L'option doit être exercée au titre de 2003 ou au titre de l'année de création ou de la première année au cours de laquelle le contribuable expose les dépenses visées au premier alinéa.
« Sont également prises en compte les dépenses exposées au profit du conjoint collaborateur du chef d'entreprise, au sens de l'article 1er de la loi n° 82-596 du 10 juillet 1982 relative aux conjoints d'artisans et de commerçants travaillant dans l'entreprise familiale. Cette réduction d'impôt est égale à 35 % des dépenses exposées chaque année. Le montant des dépenses retenues pour le calcul de la réduction d'impôt ne peut excéder 1 524 euros au cours de la période 2003 à 2006.
« Lorsque les dépenses de formation exposées au cours d'une année sont inférieures à celles exposées au cours de l'année qui précède, il est pratiqué une amputation, égale à 35 % du montant de la différence, sur la réduction d'impôt suivante.
« Les dispositions du 5 du I de l'article 197 sont applicables.
« Un décret fixe les conditions d'application du présent article, notamment en ce qui concerne les obligations incombant aux contribuables et aux organismes agréés. »
« II. - La perte de recettes pour l'Etat résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 403, 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Joseph Ostermann.
M. Joseph Ostermann. La reconduction de la réduction d'impôt pour formation du chef d'entreprise et de son conjoint collaborateur constituerait un encouragement à la formation des chefs d'entreprise et de leur conjoint, formation nécessaire pour leur permettre de rester compétitifs.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement tend à rétablir l'article 199 quater E du code général des impôts en visant à restaurer, pour les années 2002 à 2005, la réduction d'impôt pour formation du chef d'entreprise et de son conjoint collaborateur, objectif qui paraît légitime.
Il convient toutefois de rappeler que le dispositif avait un caractère expérimental et que sa suppression, en 1998, était due à son très faible succès. Selon le ministère des finances, moins de mille demandes auraient été présentées. Faut-il réintroduire dans notre code des dispositions qui sont nécessairement complexes, qui viennent se greffer sur la législation fiscale, qui nécessitent une page de législation et qui n'ont pas un nombre considérable d'utilisateurs ? Je me permets de poser la question.
Sans contester l'utilité de l'objectif, il me semble qu'il convient de réfléchir à un système plus significatif et plus simple en vue de l'examen du texte sur l'initiative économique auquel il a été fait allusion précédemment, et l'année 2003 sera le bon rendez-vous pour traiter de ce sujet.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert, ministre délégué. Pour compléter l'information donnée par M. le rapporteur général, ce dispositif a eu un succès plus que limité, puisque moins d'une entreprise sur mille en a bénéficié. Quand je sais le soin tout particulier que la commission des finances apporte à éviter le bavardage législatif, je pense qu'il ne faut pas accumuler les dispositifs.
Etant donné que vous allez avoir l'occasion de réfléchir aux dispositifs les plus appropriés pour soutenir l'entreprise, et donc à une solution susceptible de répondre au souci qui est le vôtre, je vous propose d'y penser dès maintenant, mais je ne suis pas sûr qu'il faille rétablir un dispositif comme celui-ci, d'autant qu'il n'a manifestement pas été perçu par les bénéficiaires comme étant utile à leurs besoins. Cela m'amène, à ce stade, à vous demander de retirer votre amendement.
M. le président. Maintenez-vous votre amendement, monsieur Ostermann ?
M. Joseph Ostermann. Nous allons réfléchir à une simplification du dispositif. En attendant, je retire l'amendement.
M. le président. L'amendement n° I-33 est retiré.
L'amendement n° I-34, présenté par MM. Ostermann, Besse et Bizet, Mme Bout, MM. Cornu, Del Picchia, Doublet, Eckenspieller, Fournier, Ginésy, Murat, Natali, Peyrat, Rispat et Vasselle, est ainsi libellé :
« Après l'article 8 ter , insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 244 quater E du code général des impôts, il est inséré un article 244 quater F ainsi rédigé :
« Art. 244 quater F . - Les entreprises immatriculées au répertoire des métiers peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des emprunts contractés pour financer leur adaptation à la réglementation en vigueur, la mise aux normes de sécurité de leurs machines et équipements de travail, le respect des règles d'hygiène des denrées alimentaires et de salubrité des installations, ainsi que leurs investissements dans le domaine des technologies nouvelles.
« Le crédit d'impôt est égal à 50 % des intérêts payés au titre des emprunts y ouvrant droit pendant les cinq premières années à compter de la signature du contrat.
« Le montant de ce crédit d'impôt est plafonné chaque année à 1 600 euros. »
« II. - La perte de recettes pour l'Etat résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Joseph Ostermann.
M. Joseph Ostermann. Le présent amendement vise à ouvrir à l'artisan qui emprunte la possibilité de bénéficier d'un crédit d'impôt d'un montant équivalant à une bonification, à condition que le prêt finance dans la limite de 1 600 euros par an, d'une part des investissements d'adaptation à la réglementation ou tendant à permettre la mise aux normes de sécurité, le respect des règles d'hygiène des denrées alimentaires et de salubrité des installations, c'est-à-dire des investissements pour lesquels il n'y a pas de retour sur investissement possible, d'autre part des investissements dans les nouvelles technologies auxquelles les petites entreprises n'ont pas accès avec la même facilité que les plus grandes.
L'artisanat, dont les marges sont faibles, les capacités d'autofinancement réduites et les conditions d'accès au crédit souvent pénalisantes, doit être soutenu dans sa dynamique d'investissement en vue de l'adaptation aux nouvelles contraintes qui lui sont imposées.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement vise à instaurer au profit des artisans effectuant des investissements un crédit d'impôt égal à 50 % des intérêts d'emprunts payés pendant cinq ans dans la limite de 1 600 euros par an. Il doit s'agir d'investissements destinés à la mise en conformité avec les règlements de sécurité, d'hygiène ou de salubrité et des investissements pratiqués dans le domaine des technologies nouvelles.
Ce dispositif mérite certainement une expertise plus approfondie. Outre qu'il est difficile de définir son coût, la mesure proposée paraît encore relativement complexe dans sa formulation. Toutefois, compte tenu de l'intérêt des idées qui ont été exprimées, peut-être serait-il convenable que la mise au point se précise en vue de la discussion du texte de Renaud Dutreil sur l'initiative économique, auquel il a déjà été fait allusion.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert, ministre délégué. Chacun sait que les dépenses de mise aux normes qui ont un caractère obligatoire sont déductibles des résultats des entreprises. Faut-il instituer un crédit d'impôt supplémentaire ? Sans doute aurait-il pour effet d'aider ceux qui ont tardé à se mettre aux normes et cela ne serait pas tout à fait illogique, même si, à titre personnel, je me pose un certain nombre de questions quand je vois la somme des normes s'abattant sur ceux qui exercent des activités sur notre territoire. Mais c'est un autre débat !
Monsieur Ostermann, je pense, comme vous, qu'il faudrait aider l'artisanat, le petit commerce et, globalement, les activités modestes de nos provinces à travailler dans de meilleures conditions. Mais cela ne sera possible qu'en allégeant le formalisme administratif dont on les accable, et non pas en surajoutant en permanence des dispositifs fiscaux supplémentaires. C'est la raison pour laquelle je suis très circonspect quant à l'utilité d'une telle disposition.
Ainsi que l'a dit M. le rapporteur général, vous disposez de deux mois environ, mesdames, messieurs les sénateurs, pour y réfléchir, mais je ne serai pas au banc du Gouvernement à cette occasion pour vous répondre. Mon souhait est de ne pas multiplier les normes, car ce n'est pas ainsi que nous simplifierons la vie des entreprises. Je voudrais donc qu'on limite au maximum les dispositifs trop complexes.
A ce stade, il me semble préférable de retirer cet amendement et de le soumettre de nouveau au Sénat, le cas échéant aménagé, lors de l'examen du texte sur les entreprises.
M. le président. Monsieur Ostermann, l'amendement est-il maintenu ?
M. Joseph Ostermann. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° I-34 est retiré.
L'amendement n° I-35, présenté par MM. Ostermann, Besse et Bizet, Mme Bout, MM. Cornu, Eckenspieller, Ginésy, Murat, Natali, Oudin et Rispat, est ainsi libellé :
« Après l'article 8 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 719 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le paiement des droits d'enregistrement peut être fractionné selon des modalités fixées par décret. »
« II. - La perte de recettes pour l'Etat résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Joseph Ostermann.
M. Joseph Ostermann. Les cessions de fonds de commerce et opérations assimilées sont en principe constatées par un acte qui doit être enregistré dans le mois suivant la signature de l'acte.
Conformément au principe général en la matière, le droit doit être intégralement acquitté avant l'enregistrement.
Pour l'acquéreur, le paiement de cet impôt - 4,8 % sur la fraction du prix excédant 23 000 euros - peut constituer un frein à la reprise d'une entreprise. C'est pourquoi il est proposé de permettre le fractionnement des paiements de ce droit. Cette possibilité est déjà prévue dans le cas des acquisitions totales ou partielles d'entreprises en redressement ou en liquidation judiciaire, ainsi qu'en cas de mutation par décès.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Le présent amendement tend à autoriser le paiement fractionné des droits de mutation à titre onéreux des fonds de commerce.
Je rappelle que l'article 1717 du code général des impôts autorise déjà le paiement fractionné ou différé, selon des modalités définies par décret, des droits d'enregistrement et de la taxe de publicité foncière. Peut-être serait-il utile, monsieur le ministre, de compléter le décret considéré et peut-être pourriez-vous nous éclairer sur ce point ?
Cependant, la possibilité de paiement fractionné est surtout intéressante pour les droits de mutation à titre gratuit. Ces droits sont élevés et ils peuvent être motivés par des événements complètement imprévus.
En ce qui concerne les droits de mutation à titre onéreux, leur taux est faible - 4,8 % - et le redevable a déjà pu effectuer une mise de fonds pour l'achat de son entreprise. S'il est en mesure d'acheter l'entreprise, en règle générale, il peut payer les droits fiscaux de 4,8 %.
En outre, le produit des droits de mutation à titre onéreux des fonds de commerce est réparti entre l'Etat, les départements et les communes. Et, dès lors que l'on touche à ces impôts, les finances locales en sont quelque peu affectées.
Enfin, d'après mes informations, dans le projet de loi relatif à l'initiative économique que présentera M. Renaud Dutreil - mais, là, il s'agit d'un premier « paquet », si je ne me trompe -, pourrait éventuellement figurer le principe du paiement fractionné de l'impôt sur les plus-values de cession d'un fonds de commerce ou d'une entreprise, en fonction du calendrier de règlement du prix. Cette mesure irait, me semble-t-il, dans le sens préconisé avec sagacité par Joseph Ostermann. Peut-être pourrait-il donc attendre l'examen de ce projet de loi, qui sera soumis au Parlement dans les semaines à venir, afin d'avoir en partie au moins satisfaction ?
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert, ministre délégué. M. le rapporteur général a bien expliqué les enjeux de cette disposition. Je crois, monsieur Ostermann, que les droits d'enregistrement ne sont plus un problème : nous les avons tous connus à 20 % ; ils s'élèvent aujourd'hui à 4,80 %.
Je n'ai pas eu connaissance de difficultés qui seraient liées à l'obligation de procéder à un paiement fractionné de ces droits d'enregistrement. En revanche, comme M. le rapporteur général l'a précisé, c'est la plus-value qui est dégagée à l'occasion des cessions de fonds de commerce, qui pose problème. C'est sans doute le frein le plus important à la transmission des fonds de commerce dans nos provinces.
Je veux bien que nous continuions à additionner des dispositifs dérogatoires ! Mais si tous ceux qui réfléchissent à l'avenir de l'artisanat et du petit commerce voulaient bien nous dresser la liste complète des nécessaires allégements de formalités administratives, je suis intimement convaincu que nous rendrions davantage service aux petites entreprises. La solution ne réside pas dans des mécanismes extraordinairement compliqués, qui ne correspondent pas vraiment à des besoins avérés des entreprises.
Je crois savoir ce dont il s'agit, parce que je connais le domaine des droits de mutation, qu'ils soient à titre onéreux ou à titre gratuit, et je ne pense pas que ce fractionnement soit décisif. La modification de la taxation des plus-values, qui n'est d'ailleurs pas une mince affaire du point de vue du coût budgétaire, est en revanche beaucoup plus attendue.
Bref, il faut que vous mettiez à profit les semaines à venir pour travailler sur toutes ces mesures visant à soutenir l'artisanat et le petit commerce. Mais - je tiens à le redire -, il faut vraiment déterminer ce qui est du domaine fiscal et ce qui relève des formalités administratives. En matière de simplification administrative, tout est encore à inventer ! (M. Gérard Longuet fait un signe d'assentiment.)
M. le président. Monsieur Ostermann, l'amendement est-il maintenu ?
M. Joseph Ostermann. Comme pour les autres amendements, nous affinerons la rédaction des mesures proposées et nous représenterons celles-ci lors de la discussion du projet de loi sur l'initiative économique.
Par conséquent, je retire l'amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° I-35 est retiré.
L'amendement n° I-36, présenté par MM. Ostermann, Besse, Doublet, Eckenspieller, Natali, Oudin et Rispat, est ainsi libellé :
« Après l'article 8 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Les deuxième et troisième alinéas du 1° de l'article 726 du code général des impôts sont ainsi rédigés :
« - pour les actes portant cessions de parts de fondateurs ou de parts bénéficiaires et de titres en capital, souscrits par les clients des établissements de crédits mutualistes ou coopératifs ;
« - pour les cessions de parts sociales dans les sociétés dont le capital n'est pas divisé en actions ; »
« II. - Le deuxième alinéa du 2° du même article est ainsi rédigé :
« - pour les cessions de participations dans des personnes morales à prépondérance immobilière y compris les cessions de parts ou de titres de capital souscrits par les clients des établissements de crédit mutualistes ou coopératifs à prépondérance immobilière ; »
« III. - La perte de recettes pour l'Etat résultant des I et II ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus par les articles 403, 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Joseph Ostermann.
M. Joseph Ostermann. L'article 726 du code général des impôts établit une distinction entre les droits exigibles en matière de cession de droits sociaux selon que les cessions concernent des sociétés par actions - les sociétés anonymes, ou d'autres sociétés, comme les sociétés à responsabilité limitée. Depuis 1991, les premières bénéficient, en effet, d'un droit préférentiel de 1 % plafonné à 3 049 euros par mutation, alors que les secondes sont assujetties au taux de 4,8 %.
Rien ne justifie une telle différence de traitement, qui pénalise injustement les petites sociétés d'artisans ou de commerçants, notamment celles qui sont généralement constituées sous la forme de SARL.
Par le présent amendement, nous proposons donc une harmonisation à 1 % dans la limite de 3 049 euros, quelle que soit la forme sociétaire.
M. Roland du Luart. Excellent !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement prévoit une harmonisation des droits exigibles en matière de cession des droits sociaux en ce qui concerne les sociétés par action et les autres sociétés.
L'objectif est naturellement de tendre à la neutralité fiscale, quelle que soit la nature juridique des entreprises. Il serait en effet logique que les coûts fiscaux de cession soient identiques. C'est là une distorsion bien connue qui s'exerce au détriment de certaines catégories d'entreprises.
Sur le plan juridique, l'existence de deux taux distincts est liée au fait que le régime des cessions de droits sociaux dans des entreprises qui ne disposent pas d'un capital divisé en actions est assimilé au régime des cessions de fonds de commerce. Or les droits de mutation à titre onéreux des fonds de commerce s'élèvent à 4,8 %.
Notre collègue Joseph Ostermann propose d'abaisser cette taxe de 4,8 % à 1 %. Il est clair que le coût de cette mesure serait de l'ordre de 200 millions à 300 millions d'euros pour le budget de l'Etat. Mais il est non moins clair, pardonnez-moi de me répéter, qu'il faudrait parvenir à une véritable neutralité fiscale, quelle que soit la structure juridique donnée à l'exploitation.
Peut-être faut-il trouver un taux intermédiaire, mais en ce qui concerne les fonds de commerce non personnalisés, les SARL et les sociétés par actions, dès lors qu'il s'agit des mêmes exploitations économiques, des mêmes métiers ou activités, aucune raison ne justifie un traitement fiscal différent.
Sans doute cette réflexion peut-elle déboucher sur des mesures dans le cadre du premier projet de loi de M. Dutreil relatif à l'initiative économique. J'ai cru comprendre que l'on allait se diriger vers une harmonisation des droits sur les cessions de parts sociales de fonds de commerce ou d'immobilier à usage industriel et commercial et qu'il était question d'étendre aux cessions de parts sociales l'exonération de 23 000 euros qui est actuellement applicable aux cessions de fonds de commerce.
A ce stade du débat, la commission suggère à M. Ostermann de retirer son amendement, dans l'attente de l'examen du projet de loi de M. Dutreil. Mais, à l'évidence, elle serait intéressée par les remarques du Gouvernement sur le fond du sujet.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert, ministre délégué. Je ne suis pas sûr que nous puissions parvenir, demain, à une égalité de traitement en matière de droits de mutation s'agissant des actions et des parts sociales. Le différentiel est très ancien et une harmonisation aurait un coût non négligeable.
Je souhaite également attirer votre attention sur le fait que le présent amendement ne résout pas les problèmes, puisqu'il aboutit à traiter différemment, sur le plan fiscal, le fonds de commerce selon qu'il est en société ou en entreprise personnelle. Je ne crois pas que tel soit votre objectif, monsieur le sénateur, ce qui montre la difficulté d'intervenir en matière fiscale.
Comme l'a dit M. le rapporteur général, nous voulons travailler sur la fiscalité des cessions de parts des petites et moyennes entreprises et maintenir l'unité de perception des droits dus sur les cessions d'actifs professionnels. Le projet de loi « Agir pour l'initiative économique » va dans ce sens. Il vous sera proposé d'accorder un abattement de 23 000 euros sur la valeur des sociétés dont les titres sont cédés.
Les réformes en la matière sont donc en cours d'approfondissement. Je vous propose, monsieur Ostermann, de retirer votre amendement pour le proposer de nouveau à l'occasion de l'examen du texte « Agir pour l'initiative économique ».
M. le président. Monsieur Ostermann, l'amendement est-il maintenu ?
M. Joseph Ostermann. Je reconnais qu'il s'agit de 300 millions d'euros ; c'est un montant relativement important. Mais tout à l'heure, monsieur le ministre, vous préconisiez la simplification. Nous proposons de passer à 1 % pour tout le monde, ce qui simplifie les choses !
Néanmoins, en attendant le texte annoncé, je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° I-36 est retiré.

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