SEANCE DU 30 NOVEMBRE 2002


M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-6 rectifié, présenté par MM. Hoeffel, Grignon, Ostermann, Lorrain et Richert, est ainsi libellé :
« Après l'article 62 bis , insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'Etat s'engage à indemniser les Alsaciens Mosellans incorporés de force dans les organisations paramilitaires du régime nazi.
« II. - La perte de recettes résultant du I est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° II-27, présenté par Mme Printz, M. Chabroux et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Après l'article 62 bis , insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« L'Etat s'engage à assurer le financement complémentaire nécessaire à l'indemnisation des femmes incorporées de force dans les organisations paramilitaires du régime nazi. »
La parole est à M. Daniel Hoeffel, pour défendre l'amendement n° II-6 rectifié.
M. Daniel Hoeffel. Cet amendement a un double objet. Il vise, tout d'abord, à rappeler avant l'oubli le sort tragique des incorporés de force d'Alsace-Moselle, abandonnés à leur sort par l'annexion de fait. Ainsi, 40 000 d'entre eux sont morts sous un uniforme qui n'était pas le leur. Ils méritent notre respect.
Cet amendement tend aussi à appeler l'attention sur la situation des incorporés de force masculins et féminins dans les organisations paramilitaires qui, contrairement à ceux qui l'ont été dans les organisations militaires, n'ont pas été indemnisés. Nos collègues Joseph Ostermann et Gisèle Printz l'ont évoqué tout à l'heure ; notre collègue Jean-Pierre Masseret connaît bien le problème et ses éventuelles solutions.
Monsieur le secrétaire d'Etat, cette requête tient à coeur à l'ensemble des élus de notre région et nous serions heureux si, en toute équité, une solution pouvait enfin être trouvée à cet aspect d'un chapitre douloureux de l'histoire tourmentée de l'Alsace et de la Moselle.
Il nous a paru nécessaire d'évoquer ce problème à la veille du quarantième anniversaire du traité de l'Elysée, symbole d'une amitié franco-allemande à laquelle nous sommes attachés. Une solution concrète à cette question apporterait un surcroît de sérénité à la cérémonie de commémoration. (Applaudissements.)
Mme Hélène Luc. Nous sommes d'accord avec vous !
M. le président. La parole est à Mme Gisèle Printz, pour présenter l'amendement n° II-27.
Mme Gisèle Printz. Je ne vais pas m'étendre plus longuement sur cet amendement qui va dans le même sens que celui de M. Hoeffel. Je voudrais toutefois insister sur le fait que ce sont surtout les femmes qui n'ont pas été indemnisées.
M. Jean-Pierre Masseret. C'est juste.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jacques Baudot, rapporteur spécial. La commission souhaiterait connaître l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Hamlaoui Mékachéra, secrétaire d'Etat. Les Alsaciens et les Mosellans ont subi, du fait de l'annexion nazie, ainsi que vous l'avez rappelé, une situation incontestablement dramatique. Beaucoup se sont retrouvés dans des difficultés extrêmes, que l'histoire n'a pas toujours contribué à apaiser, il faut bien le reconnaître. Le cas le plus emblématique est celui des incorporés de force, les « malgré-nous », qui ont bénéficié de régimes d'indemnisation distribués par le biais de la fondation de l'Entente franco-allemande.
L'absence de règlement de certaines situations suscite manifestement des sentiments d'injustice qui perdurent ; tel est le cas des enrôlés de force dans le RAD. Certains, qui furent exposés au danger des combats, ont bénéficié de compensations par assimilation aux malgré-nous ; d'autres, en revanche, en sont toujours exclus. Il s'agit souvent de femmes engagées dans des services administratifs allemands.
Jusqu'à présent, la jurisprudence de l'arrêt Cocher de 1973 n'envisage pas d'ouverture à leur profit puisqu'elle entend réserver l'indemnisation à ceux qui ont été contraints de servir sous commandement allemand ou qui ont servi soit dans l'aviation allemande, soit dans la police.
Pour autant, je suis pleinement convaincu de la sensibilité de ce dossier. Je suis disponible pour l'évoquer et, si possible, pour le régler en concertation avec toutes les parties prenantes.
Bien entendu, la fondation de l'Entente franco-allemande doit être sollicitée pour participer aux échanges avec les parlementaires intéressés.
J'espère vous avoir convaincus, mesdames, messieurs les sénateurs, de la manière ouverte et dénuée d' a priori dont nous abordons ce dossier.
C'est pourquoi, monsieur le sénateur, madame la sénatrice, je sollicite le retrait de ces amendements auxquels nous sommes extrêmement sensibles.
M. le président. Monsieur Hoeffel, l'amendement est-il maintenu ?
M. Daniel Hoeffel. Monsieur le secrétaire d'Etat, à condition que le retrait de l'amendement signifie non pas le relâchement mais, au contraire, la persévérance dans l'effort à entreprendre avec toutes les parties prenantes, je le retire. C'est un acte de confiance en l'action que vous comptez mener avec conviction en faveur de la défense de ce dossier. (Applaudissements.)
Mme Hélène Luc. C'est dommage !
M. le président. L'amendement n° II-6 rectifié est retiré.
L'amendement n° II-27 est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Masseret. Je retire cet amendement. De toute façon, l'article 40 de la Constitution aurait été invoqué et s'appliquerait.
Comme Daniel Hoeffel, j'espère simplement que les parlementaires alsaciens et mosellans seront associés au dialogue avec la fondation Entente franco-allemande, qui détient de nombreuses cartes dans ses mains.
M. le président. L'amendement n° II-27 est retiré.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jacques Baudot, rapporteur spécial. A titre personnel, en tant que Lorrain du sud, je participerai, avec les Mosellans et les Alsaciens, à cette action.
M. Daniel Hoeffel. Merci !
M. le président. Nous avons terminé l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant les anciens combattants.
Alors que le Sénat s'apprête à examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant le ministère des sports, je vous informe que la France a gagné le double en Coupe Davis. L'avantage d'être président est de pouvoir l'annoncer avant le ministre lui-même ! (Sourires.)

(M. Daniel Hoeffel remplace M. Bernard Angels au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. DANIEL HOEFFEL
vice-président

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