SEANCE DU 10 DECEMBRE 2002


M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi de finances, je donne la parole à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au moment où je m'exprime et alors que nous nous apprêtons à voter le projet de loi de finances pour 2003, chacun, ici, est saisi par l'émotion et la tristesse en pensant à notre ami et collègue Robert Calméjane.
Permettez-moi maintenant, mes chers collègues, de revenir sur les travaux que nous avons conduits pendant ces trois semaines.
Nous sommes entrés dans une ère nouvelle : celle de la première année d'application de la loi organique relative aux lois de finances. Cette ère nouvelle est, pour les acteurs des finances publiques, pour nous comme pour le Gouvernement, celle de la responsabilité. La commission des finances a voulu proposer au Sénat de relever ce défi, et le Sénat l'a relevé d'éclatante manière.
Nous avons, pendant vingt jours, parlé du budget de l'Etat avec intensité, en nous appuyant sur le travail approfondi du rapporteur général et de plus de cent rapporteurs au total, soit plus de quarante rapporteurs spéciaux et soixante rapporteurs pour avis ; deux cent trente d'entre vous, mes chers collègues, ont participé à cet immense débat.
Je voudrais vous remercier pour l'excellence de vos contributions au débat. Elle ont fait honneur au Sénat.
Permettez que je rende un hommage particulier au rapporteur général, Philippe Marini. Je salue son talent, sa conviction, sa compétence, son efficacité. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste. - Applaudissements sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.) Il a su donner le ton et le rythme aux discussions.
Je veux aussi saluer les ministres, dont un grand nombre se sont prêtés avec bonheur au jeu des questions et des réponses.
Comme vous venez de le rappeler, monsieur le président, nous avons mené dix débats sous cette forme. Ce n'est pas une situation des plus confortables pour les ministres.
J'observe que cette nouvelle procédure est entrée dans les moeurs. Mais le président de la commission des finances que je suis reste, bien sûr, ouvert, mes chers collègues, à vos critiques et suggestions pour améliorer les débats, leur donner plus d'intensité, les rendre pleinement interactifs.
Toutes les commissions saisies pour avis et la plupart d'entre vous, mes chers collègues, ont eu l'occasion de participer cette année à cette expérimentation : il conviendra d'en tirer le bilan. Je me permets d'observer, d'ores et déjà, que cette discussion budgétaire n'a pas été marquée par la lenteur, la langueur et les lourdeurs habituelles.
Certains ministres n'ont, semble-t-il, pas été confrontés à la traditionnelle trilogie : « liturgie, litanie, léthargie ».
Je veux naturellement remercier M. le ministre pour la considération qu'il porte au Sénat. J'ai relevé chez Alain Lambert la fidélité aux convictions formées sur ces bancs. Pour ses anciens collègues, c'est très appréciable. (Applaudissements sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Je remercie aussi, monsieur le ministre, les membres de votre cabinet, qui ont constamment été à notre écoute.
Je remercie enfin la présidence de séance, grâce à qui cette discussion est restée, comme toujours, parfaitement organisée de bout en bout, sans débordement, à peu de choses près, dans le calendrier initialement défini.
Merci à vous, monsieur le président, ainsi qu'aux vice-présidents pour leur courtoise vigilance. Merci aussi aux différents services du Sénat qui nous ont aidé dans notre tâche. (Applaudissements.)
Mes chers collègues, souvenons-nous : ce dont nous avons parlé pendant vingt jours, c'est de l'argent des Français. Le Gouvernement n'en est que le gestionnaire ; c'est en leur nom que le Parlement autorise le prélèvement et la dépense. Cette autorisation, nous ne devrions l'accorder qu'en tremblant, en nous souvenant que chaque euro prélevé provient du travail des Français et que chaque euro dont nous votons la dépense dans l'enthousiasme leur appartient.
La France est dans une situation budgétaire mauvaise, inquiétante même. L'Etat sera, en 2003, en déficit de 46 milliards d'euros, et l'ensemble de nos finances publiques représentera 2,6 % de la richesse produite l'année prochaine. C'est ainsi qu'une partie importante des dépenses, plus de 15 % au total, est financée par l'endettement.
Sommes-nous sûrs, mes chers collègues, que les Français souhaitent vraiment que nous continuions à endetter leurs enfants, à prélever sur ce blé en herbe pour payer des emplois surnuméraires à l'éducation nationale ou au ministère de l'agriculture, à financer l'oisiveté de certains chercheurs improductifs ou encore à augmenter les crédits des opérations de communication du ministère de l'environnement ? (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Robert Bret. Ils apprécieront !
M. Marc Massion. Discours idéologique !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Discours de vérité.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Lorsque nous votons les dépenses, sommes-nous sûrs que les Français souhaitent que nous leur fassions payer des impôts pour subventionner des associations ou organismes qui dissimulent, sous une bannière désintéressée, humanitaire, valant certificat de bonne gestion, un épais matelas de trésorerie placé en bourse ? (Protestations sur les mêmes travées.)
Mme Hélène Luc. C'est inadmissible de critiquer ainsi les associations !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Voilà les questions que nous devons nous poser. Dans la situation actuelle du budget de l'Etat, chaque fois que nous répondons à ces questions par l'affirmative, nous faisons un choix implicite, celui d'augmenter la dette des Français, celui de prélever des impôts pour payer les intérêts de cette dette et celui d'augmenter la charge qui pèsera sur les enfants de ce pays, qui sont encore à l'école et que nous nous préparerons, par notre inaction, à écraser du poids de nos retraites.
M. Jean-Louis Carrère. Et la défense !
M. Jean Arthius, président de la commission des finances. Je voudrais, mes chers collègues, vous rendre attentifs à tout cela.
Sur proposition de sa commission des finances, le Sénat a choisi cette année de tourner le dos à cette irresponsabilité et d'entrer dans l'ère nouvelle en appliquant, comme l'a proposé le rapporteur général, le principe de précaution, principe qui seul permet, selon une autre expression à la mode, le développement durable. C'est trahir ce principe de développement durable que de sacrifier l'avenir au présent !
Il nous a semblé que, après avoir affirmé pendant des années qu'il était nécessaire de réduire la dépense publique, il convenait peut-être, enfin, de le faire.
M. Claude Estier. Vous ne l'avez pas fait !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. En 1958, le général de Gaulle a introduit dans la Constitution un dispositif interdisant aux parlementaires d'augmenter la moindre dépense et de réduire une recette sans la compenser par l'augmentation d'une autre. C'est le fameux article 40 de la Constitution, qui part du postulat en matière de finances publiques les assemblées parlementaires ne sont bonnes qu'à ruiner le pays en réduisant toujours les impôts et en augmentant constamment les dépenses.
Or, dans trois ans, mes chers collègues, chacun de nous aura le droit de proposer l'augmentation des crédits des programmes, et même de créer de nouveaux programmes, en compensant les crédits nouveaux par des baisses d'autres crédits. Je vous demande d'être très attentifs : cela aura lieu très bientôt et sera pour nous une révolution.
Nous devions prouver que nous étions mûrs pour cette révolution, et nous l'avons fait. Les propositions sont certes symboliques, mais tout de même ! Le Sénat n'a pas réduit les recettes, il les a augmentées de près de 400 millions d'euros, ressources nouvelles qui reviendront en 2004, en 2005 et en 2006. Le Sénat n'a pas non plus augmenté les dépenses, il les a réduites d'environ 31 millions d'euros.
Mme Hélène Luc. Sur les réserves des universités !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Cette réduction est très modeste et a été obtenue parfois dans la douleur, au prix d'âpres débats.
Mme Hélène Luc. Les ministres étaient contre !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Mais elle démontre qu'une assemblée parlementaire peut prendre ses responsabilités en matière budgétaire. Oui, madame Luc, elle peut prendre des responsabilités !
MM. Jean-Claude Carle et Pierre André. Très bien !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Si nous avons fait ce choix cette année, c'est parce que le Gouvernement nous a fait connaître, au moment où il venait devant le Sénat débattre du présent projet de loi de finances, que le budget pour 2003 subirait, par rapport aux prévisions initiales, une moins-value de recettes fiscales évaluée à 700 millions d'euros.
M. Claude Estier. Mais l'Assemblée nationale avait voté le budget la veille !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C'est l'honneur du Gouvernement que de jouer ainsi la carte de la sincérité. Il en est ainsi terminé de la pratique du budget d'affichage et du budget mensonger !
Rendons hommage au Gouvernement, qui a décidé de rompre avec cette mauvaise manière budgétaire ! Le Sénat a rappelé à plusieurs reprises au Gouvernement que c'est le Parlement qui décide à quel niveau doivent être fixées les recettes et les dépenses de l'Etat.
M. René-Pierre Signé. Budget en trompe-l'oeil !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Cette compétence n'appartient pas au ministre du budget ; elle n'appartient pas même au Premier ministre, dont les arbitrages ne sont pas opposables au Sénat, contrairement à ce que peuvent croire certains ministres.
Cette réaffirmation de la vocation originelle du Parlement est aussi dans l'esprit de la loi organique relative aux lois de finances, dont l'un des buts est de redonner à l'autorisation parlementaire toute sa force et tout son contenu, alors qu'elle n'en avait plus que le vernis.
Mes chers collègues, la commission des finances répète depuis des années que, pour faire face aux défis de l'avenir - je pense en particulier au fardeau des retraites et au poids croissant de nos dépenses de santé -, il faut entamer une politique résolue d'allégement des dépenses structurelles. Aujourd'hui, la commission soutient le Gouvernement, mais elle n'a pas changé d'avis. Elle suit une voie difficile, souvent désagréable à emprunter, nos débats l'ont montré. Mais c'est, j'en suis convaincu, une voie nécessaire.
Dès le début de l'année prochaine, nous contrôlerons l'exécution des crédits des ministères. Nous devons à tous les Français d'être sûrs que l'argent qu'ils versent est utilisé au mieux de leurs intérêts, et nous serons au rendez-vous que vous nous avez fixé, monsieur le ministre, sur la situation de l'exécution en 2003.
Nous sommes tous ici conscients de la nécessité et de l'urgence qu'il y a à réformer l'Etat pour mettre un terme aux dysfonctionnements de la puissance publique et réduire les dépenses publiques. La loi organique du 1er août 2001 nous offre le levier de la réforme.
En réduisant symboliquement le montant des crédits, le Sénat vous encourage, monsieur le ministre, vous et tous vos collègues du Gouvernement, à mettre sous tension l'appareil d'Etat pour qu'il se réforme. Croyez en notre confiance. Notre vote en constitue la plus belle expression. Tout, ici, est question de volonté politique. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'Union pour un mouvement populaire, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. René-Pierre Signé. On dirait qu'ils n'ont jamais été battus !
M. le président. Monsieur Signé, voulez-vous intervenir ? (Non ! Non ! sur plusieurs travées de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Roger Karoutchi. Surtout pas ! Ce ne serait pas intéressant !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous achevons l'examen du projet de loi de finances dans une période économique particulièrement difficile.
Nous allons avoir, d'ici peu, connaissance des chiffres de clôture de l'année 2002, donc des chiffres du déficit effectif.
Nous savons, monsieur le ministre, que tenir ce déficit est un combat quotidien. Nous avons voulu, par nos votes, par nos propositions, par notre contribution active à la politique du gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, être à vos côtés dans la tâche si difficile qui est la vôtre ! (Murmures sur les travées du groupe socialiste et sur celles du groupe CRC.)
Dans quelques jours, mes chers collègues, le Sénat examinera le projet de loi de finances rectificative de fin d'année, et c'est bien l'ensemble des textes financiers qu'il faudra juger globalement.
La commission des finances a fait de son mieux dans une situation qui n'est pas simple, et nous n'avons pas choisi la facilité.
Nous avions, l'an dernier, dénoncé la « grande illusion ». Nous observons que le budget pour 2003 est un budget de transition vers une politique nouvelle. (Nouveaux murmures sur les mêmes travées.) Ce n'est pas encore la politique nouvelle, mais c'est la bonne façon d'y parvenir, et d'y parvenir rapidement, pour mettre en place les réformes dont notre pays a besoin.
Mes chers collègues, nous sommes, je le suppose, tous fiers de voir que, dans l'arène internationale, la France pèse de tout son poids, la France exprime sa voix originale, la France peut faire halte à la guerre ou contribuer à l'éviter.
M. René-Pierre Signé. Fanfaron !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Tout cela ne peut être séparé de la manière dont nous gérons nos propres affaires. Tout cela ne peut pas être séparé du sérieux dont nous devons faire preuve lorsqu'il s'agit de l'argent des Français et de son utilisation.
Un pays respectable sur le plan international est un pays qui sait trouver en lui-même les moyens de sa véritable autonomie, de sa capacité de décision. Et c'est bien pour cette raison, mes chers collègues - ce n'est pas une fantaisie comptable ! -, que nous souhaitons voir d'ici peu d'années disparaître la part de l'emprunt qui est consacrée aujourd'hui à boucler le fonctionnement de l'Etat ; c'est parce que nous croyons à la France, parce que nous sommes convaincus qu'elle doit être capable de poursuivre son chemin, sa voie originale et d'inspirer le respect dans le monde, à commencer par ses partenaires de l'Union européenne !
L'Europe est une belle opportunité, une belle vision. Mais, dans cette Europe qui se construit, il nous faut comprendre que la France doit gérer ses propres affaires avec sérieux et, j'ose le dire, avec rigueur, car nous sommes observés ! Nous sommes dans un monde ouvert, où les performances des uns et des autres se comparent à chaque instant !
Si nous voulons imprimer notre marque à l'Europe, il nous faut être sérieux dans notre propre gestion !
M. Raymond Courrière. Discours pompeux !
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission des finances a, sur bien des points dont nous avons traité, une grande chance avec le « patrimoine » qu'elle s'est constitué. En voyant en face de moi le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, Alain Lambert, je ne peux que lui exprimer beaucoup de reconnaissance,...
M. Jean-Louis Carrère. Et allons-y pour les violons !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... pour le travail qu'il a effectué, des convictions qu'il a exprimées et qui demeurent les siennes, des convictions que nous nous sommes forgées ensemble au sein de la commission des finances du Sénat.
M. Raymond Courrière. Sa modestie doit souffrir !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le ministre, vous avez su, par les réponses que vous avez apportées au cours de ce débat, nous montrer que, malgré les difficultés de l'heure, vous demeuriez l'homme attaché à une vision à la fois équitable et efficace de la gestion des finances publiques de notre pays.
M. René-Pierre Signé. C'est un hommage au docteur Coué !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je voudrais aussi unir dans les mêmes remerciements le président Jean-Arthuis. En reprenant les rênes de notre commission, ce dernier a poursuivi le travail déjà accompli, il est demeuré dans le même esprit,...
M. Jean-Louis Carrère. Hélas !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... se souvenant de tout ce que nous avions fait ensemble depuis déjà quelque temps.
Mes chers collègues, si nous sommes en mesure de peser sur les délibérations en matière de loi de finances, c'est bien parce que nous faisons preuve de continuité dans nos positions, parce que celles-ci sont étayées par des études patientes et fouillées, fondées sur des réalités tout à fait concrètes.
Je suis peut-être présomptueux, mais l'expérience de cinq budgets, sous différentes conjonctures politiques, me permet de dire que, lorsque nos avançons une idée ou une proposition, c'est qu'elle a été étudiée, approfondie, et il n'est pas si facile de la battre en brêche.
M. Gérard Braun. Tout à fait !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mes chers collègues, je voudrais naturellement remercier toutes celles et tous ceux qui ont permis à cette discussion de se dérouler de manière aussi constructive : au premier chef vous-même, monsieur le président, mais aussi les vice-présidents, qui ont su mener nos travaux de façon parfaitement équilibrée, malgré quelques interjections, surtout en cette phase finale. Mais celles-ci relèvent, en cet instant, d'un exercice obligé. C'est sans doute, en quelque sorte, la conclusion de la litanie !
Nous ne vous reprocherons pas, chers collègues de gauche, d'apporter, en forme de touche finale, ces quelques vociférations qui ne tiennent pas lieu d'arguments. De fait, des arguments, chers collègues, dans le débat sur les finances publiques, nous n'en avons guère entendus de votre part ! Ce qui est sûr, c'est que la manière dont l'Etat a été géré ces cinq dernièrse années ne plaide pas pour vous ! (Applaudissements sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Raymond Courrière. C'est vraiment de la provocation !
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'un d'entre vous souhaite-t-il m'interrompre ?
M. le président. Laissez parler M. le rapporteur général, mes chers collègues !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il nous provoque !
M. Philippe Marini, rapporteur général. A condition que ce soit seulement par un à la fois, j'accepterai volontiers d'être interrompu !
M. Louis Mermaz. Eh bien, moi, je souhaite vous interrompre, monsieur le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Faites donc, cher collègue !
M. le président. La parole est à M. Louis Mermaz, avec l'autorisation de M. le rapporteur général.
M. Louis Mermaz. J'écoute toujours les orateurs avec la plus grande patience.
Il est vrai que cette séance finale ne manque pas de pittoresque. Cela étant, monsieur le rapporteur général, je crois que, même si vous y mettez beaucoup de talent et si vous employez une très bonne langue, vous êtes dans le registre de la provocation.
Vous le savez, depuis que la République existe, c'est-à-dire depuis plus de 150 ans, on dit régulièrement : « Qu'ont donc fait nos prédécesseurs ? » Mais la ficelle est un peu usée ! (Protestations sur de nombreuses travées de l'Union pour un mouvement populaire.)
Mieux vaut se tourner vers l'avenir. Chaque gouvernement, chaque majorité apporte sa pierre à l'édifice, et ce qui importe aux Français, c'est de savoir ce qu'on fera demain plutôt que de savoir ce qui a été fait avant-hier. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mes chers collègues, il n'y a, de ma part, nulle intention de polémiquer. (Rires et exclamations sur les mêmes travées.) Le rapport de MM. Nasse et Bonnet se suffit à lui-même, qui fait apparaître 15 milliards d'euros de dérapage sur le seul premier semestre de l'année 2002.
M. Jean-Louis Carrère. N'importe quoi !
M. Dominique Braye. Les chiffres sont là !
M. Philippe Marini, rapporteur général. En ce qui nous concerne, s'agissant de la méthode, pour la première fois, nous avons mis en perspective l'ensemble des prélèvements obligatoires, ceux qui relèvent de la loi de finances et ceux qui relèvent de la loi de financement de la sécurité sociale. Pour la première fois nous avons eu connaissance, en même temps que du projet de loi de finances, du programme pluriannuel transmis à l'Union européenne.
Nous voyons s'esquisser la possibilité prochaine de nous prononcer sur le plafond annuel de recours à l'emprunt.
Nous avons souhaité que des comptes consolidés du secteur public viennent s'ajouter aux éléments d'appréciation indispensables à la représentation nationale.
S'agissant de la fiscalité, nous avons voulu réaffirmer l'autonomie des collectivités locales à la veille d'une réforme essentielle, celle de la décentralisation.
Nous avons tenu, dans une période où les marchés financiers connaissent une vie très contrastée, à donner des signaux positifs à l'épargne, pour faire en sorte que l'investissement, dans notre pays et en Europe, soit servi par une épargne susceptible de déboucher sur des perspectives favorables.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. La corbeille !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous avons donc, grâce à vous, monsieur le ministre, pu apporter quelques améliorations qui étaient attendues par un grand nombre d'acteurs de l'économie et des marchés.
Nous avons pensé également à la fiscalité du logement : nous avons voulu perfectionner le régime de l'immobilier locatif, dit « dispositif Besson », qui est devenu, grâce à nos votes et grâce à vous, un dispositif « Besson-Lambert ».
Nous avons également réformé, pour le rendre plus conforme aux intentions d'origine, le régime des plans d'épargne logement et nous avons modernisé le compartiment des sociétés immobilières cotées.
Nous avons aussi tracé des perspectives pour les réflexions de l'an prochain sur la fiscalité du patrimoine, qu'il s'agisse de la fiscalité sur les biens de nature professionnelle, de la fiscalité sur les patrimoines privés ou des droits de succession : tous ces jalons que nous avons posés dans le débat parlementaire, nous espérons, monsieur le ministre, qu'ils seront utilisés comme il convient dans les réflexions qui seront menées au cours de l'année 2003.
Bien entendu, nous avons veillé, lors de la présentation des budgets auprès de chaque membre du Gouvernement, à calculer au plus juste les crédits. Cela n'a pas fait que des heureux, nous en sommes bien conscients, mais il faut bien comprendre, mes chers collègues - je sollicite votre indulgence - que cette vision rigoureuse est une vision de responsabilité et qu'il n'est strictement pas possible de procéder autrement quand on prépare l'avenir pour l'intérêt général.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous remercie encore de votre participation active et de toutes les contributions que vous avez apportées à nos débats. Que le vote de cet après-midi soit de bon augure pour les orientations futures de la politique de réforme, de la politique économique et sociale de notre pays en Europe ! (Applaudissements sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Raymond Courrière. Amen !
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation des débats décidée le 5 novembre 2002 par la conférence des présidents, chaque groupe dispose de dix minutes, à l'exclusion de la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe, qui dispose de cinq minutes.
La parole est à M. Jacques Pelletier.
M. Jacques Pelletier. Je voudrais à mon tour saluer la mémoire de Robert Calméjane, dont la disparition si brutale nous émeut tous beaucoup. Robert Calméjane était un excellent collègue, homme de conviction, sympathique, convivial. J'adresse, au nom de mon groupe, nos condoléances très attristées à sa famille et à ses collègues du groupe de l'UMP.
Sous l'impulsion de son président, Christian Poncelet, notre assemblée a beaucoup évolué pour s'adapter à la modernité du territoire et pour correspondre à une réalité politique sans pour autant céder à l'emprise majoritaire.
Le rôle du Sénat est non seulement d'approuver ou de contester le Gouvernement mais aussi de manifester constamment le souci de protection des collectivités locales, des citoyens, des libertés, des minorités, dans l'élaboration législative.
Il doit être un pouvoir équilibrant, une voix différente, un forum d'idées et de contacts. Nul doute que, pour assumer cette fonction, le Sénat doit échapper aux dichotomies artificielles et affirmer l'originalité de sa physionomie.
Dans ce contexte, sa pluralité est un atout. Loin d'être un frein au consensus, elle fait la qualité de sa réflexion et la richesse de ses débats.
De ce fait, le Palais du Luxembourg a toujours été perçu comme un lieu où le débat était plus libre, plus serein et, souvent, plus fécond.
La discussion budgétaire, rénovée sous l'impulsion d'Alain Lambert, de Jean Arthuis et de Philippe Marini, s'inscrit dans cette perspective, celle d'une chambre indépendante où ne résonneront pas les échos de débats aliénés. J'en sais gré à tous nos collègues et au premier d'entre nous, le président Christian Poncelet.
L'un de mes illustres prédécesseurs sur les travées de mon groupe, Georges Clemenceau, vantait avec raison « les pays où l'on parle ». Il est ainsi un groupe où l'on s'exprime dans la diversité, et une assemblée où l'on débat dans un cadre budgétaire dynamisé.
Aussi, je félicite à nouveau le président de la commission des finances et le rapporteur général, ainsi que tous nos collègues qui ont fait de cet exercice un moment d'intense responsabilité.
Parmi toutes celles qui nous incombent, l'examen d'une loi de finances nous offre l'occasion de contrôler la politique du pays en accordant au Gouvernement, qui a la charge de définir et de conduire cette dernière, les moyens de le faire et, à tout le moins, les conseils pour y parvenir.
Au sein de notre groupe, certains de mes collègues soutiennent la majorité nationale sans en être des inconditionnels.
D'autres se situent dans l'opposition tout en refusant le systématisme. C'est dans cet esprit remarquable que se nourrissent nos échanges : je m'attacherai à défendre ce havre de liberté et de tolérance qui n'a cessé de nourrir notre réflexion.
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Jacques Pelletier. Notre foi commune en des méthodes démocratiques de dialogue et d'écoute mutuelle nous permet, malgré des divergences réelles, de nous retrouver pour déterminer, le plus souvent possible, des attitudes communes face aux événements.
Fidèles à leurs engagements politiques, mes collègues considèrent le projet de loi de finances comme un texte fondamental, son examen comme un acte responsable.
Nous allons donc nous exprimer, à l'issue d'un long débat où chacun aura pu librement exprimer son opinion et constater presque toujours, dans la courtoisie, les diverses oppositions qui font la richesse et l'honneur de notre assemblée.
Celle-ci a cherché à combattre, mes chers collègues, un alourdissement de la charge fiscale par rapport au PIB, et la dérive des déficits publics.
Au-delà de la responsabilité, la commission des finances du Sénat s'est attachée à flatter la cohérence financière. Cela nous ressemble. Les représentants des grands électeurs que nous sommes font passer leurs passions après la raison.
Cette dernière, monsieur le ministre, nous incite à dépenser moins, en diminuant toujours davantage les dépenses publiques et la charge de la dette, à dépenser mieux en recentrant l'action de l'Etat sur l'essentiel, à offrir au pays les conditions d'un environnement favorable à la création de richesses et à restaurer durablement les grands équilibres.
Fidèles à la volonté de tolérance qui nous anime dans l'encouragement de nos diverses sensibilités, et toujours avec un esprit critique et avisé, nous nous exprimerons cet après-midi, monsieur le ministre, dans une sympatique diversité : les uns dans l'acceptation des orientations définies par notre Haute Assemblée, les autres par fidélité à des convictions que je salue. (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste et de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Miquel.
M. Gérard Miquel. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à mon tour, je veux saluer la mémoire de notre collègue Robert Calméjane, qui vient de s'éteindre au Sénat. Je le fais avec d'autant plus d'émotion qu'il avait des racines lotoises puisque sa famille est originaire d'un petit canton de mon département.
Monsieur le ministre, je ne peux m'associer au florilège de compliments que vous venez d'entendre. En effet, le groupe socialiste n'a cessé d'attirer l'attention du Gouvernement et de la majorité sénatoriale sur les graves défauts du projet de budget pour 2003, et ce dès que les grandes lignes en ont été connues. Mais, loin d'améliorer ce projet de budget, la majorité, à l'Assemblée nationale comme au Sénat, a aggravé les risques qu'il fait courir aux Français.
M. Jean-Pierre Masseret. Eh oui !
M. Gérard Miquel. Ses carences sont légion ; aussi m'attacherai-je à souligner les plus graves d'entre elles, en articulant mon propos autour de quelques points.
Le projet de budget pour 2003 n'est manifestement pas sincère.
M. André Lejeune. C'est vrai !
M. Gérard Miquel. Il est entaché de duplicité, comme l'était le collectif budgétaire voté au mois de juillet. Cela deviendra sans doute, dorénavant, une marque de fabrique.
Tout d'abord, ce projet de budget est fondé sur une prévision de croissance qui est non pas volontariste, comme voudrait le faire croire le Gouvernement, mais franchement irréaliste. En effet, hormis le Gouvernement, personne n'ose soutenir que la croissance pourrait atteindre 2,5 % en 2003.
M. Jean-Pierre Demerliat. Evidemment !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Vous vous en réjouissez ?
M. Gérard Miquel. Ainsi les conjoncturistes s'accordent-ils sur une hypothèse de croissance de 1,8 %, que l'OCDE a fixée à 1,9 % et la Commission européenne à 2 %. Le MEDEF, pour sa part, mise sur une croissance comprise entre 1,5 % et 2 %.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Alors, il faut réduire davantage les crédits !
M. Gérard Miquel. Ensuite, l'amendement déposé par le Gouvernement devant le Sénat tendant à réduire les prévisions de recettes fiscales de 700 millions d'euros nous conduit légitimement à douter de la sincérité de ce budget. Il sonne, en effet, comme un aveu : le Gouvernement reconnaît que le texte qui a été déposé devant l'Assemblée nationale, puis adopté, ne reposait pas sur une estimation raisonnable des recettes fiscales.
Ce n'est pas en révisant de 700 millions d'euros les recettes fiscales que le budget pour 2003 sera plus crédible, tant il était biaisé dès l'origine.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Comment fallait-il faire ?
M. Gérard Miquel. Cette situation inédite fait en outre peser sur le projet de loi de finances un risque non négligeable d'inconstitutionnalité.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Absolument !
M. Gérard Miquel. Le projet de budget soumis au vote du Parlement était déjà virtuel ; il est devenu, avec cet amendement, à géométrie variable.
En outre, le Gouvernement a déjà prévenu qu'il n'exécuterait pas le texte voté par le Parlement en raison de la mise en oeuvre d'un gel massif de crédits dès le début de l'année 2003.
Enfin, il a fixé le déficit public à 2,6 % du PIB alors que la Commission européenne estime qu'il existe un risque réel de voir le déficit dépasser la barre des 3 % en 2003. Et comment ne pas partager son inquiétude lorsque l'on constate que le déficit s'est creusé de 20 % depuis le mois de juin ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il faut encore réduire les dépenses !
M. Gérard Miquel. Toutes ces manoeuvres constituent malheureusement un recul démocratique patent. Soyons lucides, mes chers collègues : le Sénat s'apprête à voter un budget virtuel, à géométrie variable, dont le Gouvernement a déjà annoncé qu'il ne l'exécuterait pas. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
J'aborde maintenant le deuxième point de mon propos : le caractère anti-européen du projet de budget pour 2003.
Alors que le Président de la République s'était engagé, au nom de la France, à équilibrer les finances publiques en 2004 au plus tard, le Gouvernement repousse l'échéance à 2007, et encore, si la croissance le permet. Son piètre volontarisme en la matière ne peut en effet dépasser cet obstacle.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il faut donc encore réduire les dépenses !
M. André Lejeune. Vous ne faites que vous répéter, monsieur Marini. Quel discours stérile !
M. Gérard Miquel. Inévitablement, le commissaire européen Pedro Solbes en a conclu que les orientations budgétaires du gouvernement français n'étaient pas en ligne avec les engagements passés de la France.
Consciente des conséquences du ralentissement économique, la Commission européenne avait pourtant assoupli la rigueur du calendrier. La mauvaise gestion du Gouvernement, notamment ses baisses d'impôt irresponsables, a contraint la Commission à lancer contre la France une procédure d'avertissement.
Il n'y a pas de quoi être satisfait ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Je vous rappelle que la gauche avait, quant à elle, qualifié la France à l'euro. Le recul est aujourd'hui certain ! (Nouveaux applaudissements sur les mêmes travées. - Rires sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Pas toute seule !
M. Gérard Miquel. Oui, mes chers collègues, il n'y a que les vérités qui blessent !
J'en viens au troisième point néfaste de ce budget : son austérité et ses mesures inégalitaires pour les collectivités locales.
Certes, le contenu du texte transmis au Sénat a été amélioré sur ce point, mais, par rapport au budget de 2002, le compte n'y est toujours pas. Le Gouvernement développe un discours attrayant pour les collectivités locales, mais, concrètement, les actes ne suivent pas.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Vous voudriez plus de dépense ?
M. Gérard Miquel. Le contrat de croissance et de solidarité est reconduit en 2003, mais la belle promesse de la majorité sénatoriale d'en porter l'indexation à 50% de hausse du PIB n'est pas tenue, par démagogie.
La droite avait voté cette mesure en 2002, nous aurions souhaité qu'elle persiste en 2003. La gauche avait considérablement amélioré le pacte Juppé. (Rires sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire.) La droite est incapable de faire de même avec le contratJospin.
M. Louis de Broissia. C'est épatant !
M. Gérard Miquel. Oui, mes chers collègues ! Sans doute la gauche constitue-t-elle l'horizon indépassable de la droite aujourd'hui ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. - Rires sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire.)
Le fait est que l'année 2003 sera rude pour les collectivités locales.
M. Dominique Braye. Heureusement que le ridicule ne tue pas !
M. Gérard Miquel. La dotation globale de fonctionnement progressera seulement de 2 %, contre 3,9 % en 2002. La dotation forfaitaire des communes, elle, diminuera carrément, puisque son taux d'évolution sera compris entre 1,03 % et 1,26 %, soit moins que celui de l'inflation, qui atteindrait 1,5 %.
Par ailleurs, l'Etat soustrait aux communes le montant de la régularisation de la dotation globale de fonctionnement pour 2001, soit 100 millions d'euros. En effet, par un tour de passe-passe, il affecte cette somme aux dotations de solidarité mais, en contrepartie, il diminue sa propre contribution à ces dotations. Avec l'abandon du plafonnement des baisses de la dotation de compensation de la taxe professionnelle, pour les communes, les départements et les régions défavorisées, le Gouvernement porte, une fois encore, un rude coup à la péréquation.
M. Raymond Courrière. Très bien !
M. Gérard Miquel. Le Gouvernement affiche une volonté décentralisatrice, mais ce n'est que pour transférer le déficit de l'Etat aux collectivités locales et permettre au Président de la République de respecter au moins une partie de ses promesses électoralistes de baisses d'impôts. Son objectif est d'ailleurs, comme il l'a annoncé, d'échanger de la liberté contre de l'argent. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Le quatrième point négatif de ce budget est l'absence de pilotage économique et de lutte contre le chômage. Alors que les Français souffrent cruellement du ralentissement économique et du chômage, le projet de budget pour 2003 ne contient aucune mesure pour les endiguer.
Les mesures fiscales favorisent essentiellement les Français les plus aisés.
M. Roland Courteau. Evidemment !
M. Gérard Miquel. Le pouvoir d'achat supplémentaire ainsi accordé sera donc largement épargné, sans bénéfice pour l'économie. Il aurait été préférable de relancer la consommation populaire en doublant, par exemple, le montant de la prime pour l'emploi, comme s'y était engagée la gauche. Les travailleurs rémunérés au SMIC auraient bénéficié d'un treizième mois.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Si vous dépensez plus, que devient le déficit ?
M. Gérard Miquel. L'abandon de la politique de lutte contre le chômage est, quant à elle, dramatique pour les Français. Les crédits du ministère de l'emploi chutent de 6 %. Le nombre de contrats emploi-solidarité, les CES, et de contrats emplois consolidés, les CEC, baissent. Les emplois-jeunes sont carrément supprimés.
M. Roger Karoutchi. Mais non !
M. Gérard Miquel. Le Gouvernement apporte sa contribution à l'emploi en mettant directement au chômage des dizaines de milliers de Français ! Voilà la vérité ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
En outre, la droite sénatoriale a pris le relais du Gouvernement en amputant le budget du ministère de l'emploi de 5 millions d'euros supplémentaires. Le précédent gouvernement a fait reculer le chômage : 900 000 personnes ont retrouvé un emploi.
M. Roger Karoutchi. Grâce à la croissance !
M. Gérard Miquel. Par manque de volonté, l'actuel gouvernement ne sera pas en mesure d'apporter un tel progrès aux Françaises et aux Français. (Nouveaux applaudissements sur les mêmes travées.)
Si le projet de budget pour 2003 a des conséquences désastreuses sur l'économie à court terme, il compromet aussi, à plus long terme, le développement économique et le niveau de vie des Français.
La réduction drastique des moyens consacrés à l'éducation et à la recherche, encore accrue par le Sénat, conduit la France à tourner le dos à l'avenir.
Pourtant, à l'évidence, nos entreprises ont plus que jamais besoin de salariés qualifiés pour faire face à la concurrence internationale. A l'évidence, la nation requiert des citoyens éduqués à leurs droits et à leurs devoirs pour faire face à la crise politique révélée par l'élection présidentielle.
Mais le budget pour 2003 ne répond pas à ces exigences.
J'en viens au cinquième et ultime point de mon intervention : les injustices sociales du budget 2003.
Ce budget accumule les mesures clientélistes en faveur des Français les plus aisés : le plafonnement du quotient familial est relevé de fait de 6 % pour 84 000 bénéficiaires et le plafond de la réduction d'impôt pour emplois à domicile est relevé à 10 000 euros pour 70 000 bénéficiaires.
La baisse de l'impôt sur le revenu profite essentiellement aux plus aisés.
Vous nous dites, monsieur le ministre, qu'il s'agit de récompenser l'initiative. Mais la moitié des Français ne prennent-ils pas d'initiatives ?
Il s'agit, dites-vous également, de récompenser l'effort de ceux qui créent des richesses. Mais le travail pénible et mal payé ne doit-il pas aussi être récompensé ? (Très bien ! et applaudissements sur les mêmes travées.)
M. Dominique Braye. Démago !
M. Gérard Miquel. Quant au discours que nous sert la droite sur l'amélioration de l'attractivité du territoire, il ne vise bien sûr qu'à masquer la revanche sociale qui anime son action.
Sous le gouvernement Jospin, la France a bénéficié d'une croissance plus élevée que celle des pays européens. Mais, aveuglée par son dogmatisme idéologique, la droite trouve naturel d'en déduire que notre pays souffre d'un déficit d'attractivité.
M. Dominique Braye. Vous avez gaspillé la croissance !
M. Gérard Miquel. Les mêmes recettes donnant les mêmes résultats, vous êtes dans l'incapacité de créer le climat de confiance indispensable à la relance de notre économie, contrairement à ce qu'avait réussi le gouvernement de Lionel Jospin dès son arrivée en 1997. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. - Exclamations sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Dominique Braye. Bravo Lionel ! C'est pour cela que les Français en veulent encore !
M. Gérard Miquel. Pour toutes ces raisons, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe socialiste votera contre ce budget de régression économique et de régression sociale. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. - Protestations sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Louis de Broissia. Cela vaut mieux !
M. Dominique Braye. Cela veut dire qu'il est bon !
M. le président. La parole est à M. Michel Mercier.
M. Michel Mercier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au moment de prendre la parole au nom du groupe de l'Union centriste, je voudrais, comme les orateurs précédents, m'associer au deuil qui frappe le Sénat en la personne de notre collègue Robert Calméjane. Je voudrais assurer sa famille ainsi que les membres de son groupe, l'Union pour un mouvement populaire, que les sénateurs et les sénatrices de l'Union centriste partagent leur peine et s'associent à leur chagrin.
Au moment où il nous appartient de voter le budget pour l'exercice 2003, je souhaite vous dire, monsieur le ministre, que nous avons bien conscience que présenter pour l'année à venir un projet de budget qui allie rigueur et volontarisme n'est pas un exercice facile.
Notre collègue M. Gérard Miquel, qui vient de me précéder à la tribune, a la mémoire courte ! (Marques d'approbation sur les travées de l'Union centriste et de l'Union pour un mouvement populaire, ainsi que sur certaines travées du RDSE.) Je sais bien qu'en politique il faut oublier le plus rapidement possible les choses pour envisager l'avenir plutôt que le passé. Il arrive néanmoins que, de temps en temps, le passé obère l'avenir : monsieur le ministre, la situation que le Gouvernement a trouvée en juin dernier était particulièrement dégradée !
M. Raymond Courrière. On en reparlera l'année prochaine !
M. Michel Mercier. On nous a laissé un budget avec des recettes surestimées, des mesures annoncées non financées, des dépenses publiques à la dérive, alors même que les collectivités locales étaient accablées de charges nouvelles.
Telle était la situation il y a quelques mois avec le budget de 2002 et ceux qui l'avaient soutenu.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est incontestable !
M. Michel Mercier. Le vote du budget par le Sénat intervient - nous le savons bien - dans un contexte économique particulièrment incertain : d'une part, les risques d'un conflit en Irak, dont nous imaginons aisément les conséquences probables sur les cours de l'énergie et sur les échanges mondiaux, s'amplifient ; d'autre part, des signes de reprise - faibles et contradictoires - apparaissent aux Etats-Unis. Tous ces indices rendent difficile une prévision à court terme. Essayer de présenter un budget qui marque à la fois une volonté politique claire et une rigueur certaine dans la gestion des finances de la France est un exercice particulièrement délicat dans une telle conjoncture.
Au milieu de ces difficultés, vous avez essayé, monsieur le ministre, avec l'aide, il faut le rappeler, de la commission des finances, de son président Jean Arthuis et de son rapporteur général Philippe Marini, de lancer les prémices de réformes et de prôner une attitude nouvelle du Gouvernement, s'agissant à la fois du rôle que doit remplir une loi de finances et de la façon d'en gérer l'exécution.
Ces changements d'attitude annoncent une réforme profonde de l'Etat et, de ce point de vue, le Gouvernement a su faire preuve à la fois de courage politique et de lucidité.
Un certain nombre de points me semblent favorables, même si nous aurions souhaité que le Gouvernement fasse parfois preuve de plus de courage et aille plus loin dans sa vision des choses.
Tout d'abord, monsieur le ministre, le Gouvernement a décidé, compte tenu de l'évolution de la conjoncture et de la réalité de la perception des recettes en 2002, de déposer au Sénat un amendement tendant à diminuer les recettes. C'est un acte nouveau.
Lors du vote du budget de 2002, la situation était la même. Pourtant, le gouvernement de l'époque ne nous avait pas dit que les recettes diminueraient !
M. Raymond Courrière. Vous avez voté contre !
M. Michel Mercier. Nous avons donc discuté alors d'un budget que nous savions totalement irréaliste et irréalisable. C'est la vérité !
M. Raymond Courrière. Je ne vois pas en quoi cela vous gêne puisque vous avez voté contre !
M. Michel Mercier. Ce qui nous gêne, cher collègue, c'est que la sincérité budgétaire, dans ce pays, ne devrait appartenir à personne, mais devrait au contraire être le propre de tous. (Applaudissements sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Notre regret, c'est que le gouvernement que vous avez soutenu n'ait pas fait preuve de la même sincérité. (Applaudissements sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Raymond Courrière. Attendez janvier 2003 !
M. Michel Mercier. Le dépôt de cet amendement au Sénat est un acte de sincérité et, comme vous le disiez ce matin, monsieur le ministre, de respect à l'égard du Parlement et, à travers lui, du pays.
Je note également avec intérêt, pour faire table rase de certaines critiques qui se sont élevées ces jours derniers à l'Assemblée nationale sur le rôle respectif des deux assemblées, que c'est au Sénat, et pour la première fois, que le Gouvernement a déposé cet amendement tendant à supprimer des recettes.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Le lendemain du vote à l'Assemblée nationale !
M. Michel Mercier. C'est extrêmement intéressant, et c'est tout à fait enrichissant pour le bicamérisme dans notre pays !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je le répète, c'était le lendemain du vote à l'Assemblée nationale !
M. Michel Mercier. Cet effort de sincérité, nous aurions d'ailleurs souhaité, monsieur le ministre, qu'il aille plus loin.
Un budget est un acte de prévision, nous le savons tous. Il ne s'agit pas de dire qu'il doit être réalisé à la virgule près, et je reviendrai sur ce point dans quelques minutes. Toutefois, le Gouvernement ayant reconnu que les recettes seraient moins importantes que prévu, nous aurions souhaité, monsieur le ministre, que vous abaissiez à due concurrence les dépenses.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !
M. Michel Mercier. Un budget, c'est aussi un acte de pédagogie.
M. Raymond Courrière. C'est pour cela que vous supprimez des postes à l'éducation nationale !
M. Michel Mercier. Lorsqu'il y a moins de recettes, il faut prévoir moins de dépenses, et l'idée selon laquelle, lorsqu'il n'y a plus d'argent, on peut toujours retrouver des fonds pour maintenir le niveau de dépenses est à bannir.
Mme Hélène Luc. Il y a plus pour le militaire et moins pour l'école !
M. Michel Mercier. Il nous faut approfondir notre travail de réforme. Vous vous y êtes engagé. Mais nous aurions souhaité voir diminuer à due concurrence les dépenses.
La commission des finances du Sénat s'est impliquée courageusement dans cette voie car, sous la Ve République, il revient très naturellement et normalement au Gouvernement de préparer le budget et au Parlement de le voter. La répartition des rôles ne doit pas être changée entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif.
Il y avait une occasion à saisir et vous l'avez saisie. Mais, si le cas devait se reproduire, il faudrait faire mieux encore.
Je souligne un autre point extrêmement favorable, monsieur le ministre : vous nous avez indiqué, dès le début de la discussion budgétaire, que le Gouvernement témoignait de sa volonté en matière économique en estimant la croissance à 2,5 %.
Nous comprenons parfaitement le choix du Gouvernement. Il ne s'agit pas de couper les bras aux acteurs économiques ; il s'agit, au contraire, de leur donner un signal vrai et de leur montrer que l'Etat est derrière eux dans la dure bataille qu'ils mènent, à la fois pour le développement de l'économie et pour l'emploi.
Dans le même temps, nous savons bien que la conjoncture est ce qu'elle est. Or vous nous avez annoncé dès le début de la discussion budgétaire que le Parlement serait étroitement associé aux opérations d'exécution du budget que le Gouvernement pourra être amené à mettre en oeuvre en cours d'année. Nous voulons vous faire part de notre satisfaction à l'égard de ce changement profond de méthode.
Nous savons que l'exécution est une chose et que la prévision en est une autre. Que le rôle du Parlement ne soit pas limité aux prévisions est, pour nous, un véritable progrès et nous y voyons d'ores et déjà l'une des conséquences de la modification de la loi organique, dont vous êtes l'un des principaux auteurs, monsieur le ministre.
A l'issue de l'examen par le Sénat du projet de budget pour 2003, le groupe de l'Union centriste se félicite de l'adoption d'un certain nombre de mesures de fond très positives.
S'agissant des recettes - malgré la poursuite de la baisse de l'impôt sur le revenu - vous avez su à la fois conserver les diminutions qui avaient été acquises lors du vote du mois de juin et aller plus loin alors que la conjoncture ne s'y prêtait guère. Vous affirmez ainsi une volonté politique très claire, à laquelle nous souscrivons tout à fait.
Ce qui a été fait en ce qui concerne la réduction d'impôt pour les emplois à domicile va également dans le bon sens, à la fois pour le développement de l'emploi et pour l'aide qui est apportée aux familles.
La baisse des charges fiscales nous paraît être la bonne méthode pour soutenir l'économie. Dans le même temps, le salaire minimum a été augmenté, ce qui est bien.
S'agissant de la fiscalité locale et des concours financiers que l'Etat apporte aux collectivités locales, deux points nous semblent devoir être soulignés.
Il s'agit, d'abord, de l'effort que le Gouvernement a fait en adossant les dotations et les concours financiers qu'il accorde aux collectivités locales sur l'augmentation du PIB. Rien ne l'y obligeait. Il l'a fait alors que la situation économique n'était pas facile, que la situation budgétaire était particulièrement délicate, et nous voulons dire notre satisfaction sur ce point.
La deuxième réforme engagée consiste à reconnaître aux collectivités locales une plus grande liberté pour la fixation des taux des impôts locaux.
Monsieur le ministre, vous savez que, sur ce point, nous aurions souhaité que vous alliez plus loin, que seule la responsabilité peut limiter les hausses d'impôts, l'encadrement administratif ne faisant qu'encourager leur augmentation. Mais nous savons que la voie du pragmatisme et du réalisme doit nous conduire à ne faire simplement qu'un pas après l'autre ! L'année prochaine, vous finirez bien par aller jusqu'au bout du chemin !
Par ailleurs, vous recentrez la dépense publique vers l'investissement, notamment dans le domaine militaire, et nous voulons vous faire part de notre satisfaction sur ce point après le retard pris. Mais nous tenons aussi à rappeler que ces dépenses n'ont de sens véritable que si nous pouvons les replacer dans le cadre d'un effort européen de défense.
A côté de ce recentrage vers l'investissement public, le fait que les grandes fonctions régaliennes de l'Etat que sont la justice et la sécurité intérieure soient parmi les secteurs les plus favorisés ne peut que recueillir le soutien et l'assentiment des membres du groupe de l'Union centriste.
L'ensemble de ces points nous semblent positifs et je tenais à le souligner. Dans le même temps, je ne pouvais qu'insister sur les difficultés dans la situation particulièrement difficile qui entoure l'élaboration et le vote de ce projet de budget.
Nous souhaitons que, l'année prochaine, le Gouvernement puisse faire d'autres pas dans le sens de la réforme. Notre groupe sera ainsi particulièrement attentif à l'allégement de la TVA et à la modification de la taxation du patrimoine. Il s'agit là de mesures en faveur, à la fois, de l'attractivité de notre pays et de la compétitivité de nos entreprises.
Nous souhaitons véritablement que le Gouvernement puisse aller de l'avant. Notre soutien et notre aide ne lui manqueront pas chaque fois qu'il souhaitera exercer sa volonté de réforme.
L'allégement des impôts implique, bien évidemment, une maîtrise de la dépense publique dans le cadre de ce que M. Jean Arthuis appelle « un règlement de copropriété » entre partenaires européens. Nous souhaitons que le Gouvernement puisse, dans ce cadre européen, faire l'application la plus intelligente possible d'un pacte de stabilité qui est, certes, très décrié, mais qui demeure indispensable.
La réduction de la dépense dans notre pays passe par deux grandes réformes, celle du système de sécurité sociale, avec la réforme des retraites et de l'assurance maladie, et celle de l'Etat, par la voie de la décentralisation.
Nous devons impérativement rendre la sphère publique plus compétitive. La décentralisation doit être, en parallèle, poursuivie et approfondie. Ces deux réformes, celle de notre système social et celle de notre système administratif, ont le même objet : rendre l'Etat plus visible et plus compétitif.
Que nous tentions de rétablir la confiance entre l'Etat et les collectivités locales et leurs élus, que le Gouvernement, par les mesures qu'il annonce dans ce budget, tente de rétablir la confiance entre l'Etat et les citoyens, voilà, je crois, deux objectifs particulièrement importants sur lesquels, là encore, le soutien de notre groupe ne vous manquera pas, monsieur le ministre.
Pour terminer, je voudrais évoquer le problème des collectivités locales, ce qui est bien normal dans cette assemblée.
Le Gouvernement a accepté de lancer un certain nombre de discussions avec les collectivités locales, notamment sur l'allocation personnalisée d'autonomie, l'APA. Il faut que nous rappelions très clairement que la loi créant cette allocation a été votée sans que son financement n'ait été prévu en aucune sorte...
M. Jean-Patrick Courtois. C'est vrai !
M. Michel Mercier. ... et que la situation des départements est, de ce fait, catastrophique. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste.)
Nous savons bien qu'il y a un besoin, tout le monde le sait. Nous savons également qu'on ne peut durablement satisfaire un besoin qu'en prévoyant son financement.
En ne prévoyant pas de financement, le Gouvernement précédent a créé de l'illusion, disons-le très clairement. Il nous appartient maintenant de trouver les solutions pour rendre pérenne cette allocation de prise en charge de la dépendance. Nous y arriverons, parce que le Gouvernement a ouvert une discussion franche, loyale et la plus large possible avec les départements.
Mme Hélène Luc. Ce sont les départements qui paieront !
M. Michel Mercier. Une fois le financement trouvé, nous pourrons dire clairement que la prise en charge de la dépendance a été réalisée, mais ce sera non par ceux qui ont créé l'allocation mais par celles et ceux qui auront assuré ledit financement. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'Union pour un mouvement populaire, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
De ce point de vue, le groupe de l'Union centriste est prêt à travailler avec le Gouvernement dans le sens de la réforme, de la clarté et de la responsabilité. C'est la raison pour laquelle ses membres lui apporteront leur soutien en votant ce projet de budget pour 2003. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'Union pour un mouvement populaire, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi tout d'abord de vous dire que le groupe communiste républicain et citoyen s'associe à l'hommage rendu par M. le président du Sénat à notre regretté collègue Robert Calméjane.
Après vingt jours d'examen, d'abord des recettes, puis des dépenses, de ce budget pour 2003, l'impression que nous avons est pour le moins déroutante.
Avec moins de 2 % de croissance cette année et 80 000 chômeurs de plus en un trimestre, la situation économique se dégrade et, avec elle, la situation des comptes de la protection sociale ou de l'assurance chômage.
La presse se fait même l'écho d'une dégradation plus importante encore du déficit que celle qui est prévue par le collectif de fin d'année.
Les Françaises et les Français, quel qu'ait été leur vote du printemps dernier, attendent la satisfaction de leurs besoins.
Or que voit-on, cette année, au coeur du débat de cette loi de finances ?
Regardons la première partie.
Quels impôts a-t-on décidé de baisser ? L'impôt sur le revenu, mais surtout pour les tranches les plus élevées ! Cette mesure a été complétée par le relèvement de la réduction des charges pour emplois à domicile.
On aurait pu faire bien autre chose avec les 3,3 milliards d'euros ainsi dépensés, notamment répondre aux besoins en matière de santé publique, de logement ou d'éducation.
Prenons l'exemple des hôpitaux en Ile-de-France. Ce matin, un directeur de service, à la maternité de Gonesse, a démissionné : il ne peut plus assurer la sécurité, faute d'infirmiers (Exclamations sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire et de l'Union centriste) ;...
M. Dominique Braye. Les 35 heures, c'est qui ?
M. Thierry Foucaud. ... faute de médecins. Une vingtaine d'autres maternités seraient en passe d'en faire autant.
M. Jean Chérioux. C'est votre héritage !
M. Thierry Foucaud. Vos décisions, mesdames, messieurs de la majorité sénatoriale, vont aggraver encore cette situation.
M. Dominique Braye. C'est nul !
M. Thierry Foucaud. C'est vrai aussi pour les services d'urgence.
M. Dominique Braye. Les 35 heures !
M. Thierry Foucaud. Je tenais à vous donner cet exemple. Ce n'est peut-être qu'un détail pour vous,...
M. René-Pierre Signé. Ce n'est pas un détail !
M. Thierry Foucaud. ... mais cela montre qu'avec les 3,3 milliards d'euros nous aurions pu faire autre chose ! (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)
On a aussi ajouté, pour préserver l'épargne, cet incroyable amendement sur l'imputation des moins-values boursières à échéance de dix ans, mesure éminemment circonstancielle,...
Mme Nicole Borvo. Et urgente !
M. Thierry Foucaud. ... à l'examen de la chute du CAC 40, mais qui nous amène à nous poser cette question récurrente : qui sont ces libéraux qui, lorsque cela va mal sur les marchés financiers, appellent au secours les deniers publics ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Les 200 millions d'euros ainsi mobilisés auraient sans doute été plus utiles pour faire droit à des mesures d'une autre portée.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur Foucaud, me permettez-vous de vous interrompre ?
M. Thierry Foucaud. Je vous en prie.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, avec l'autorisation de l'orateur.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mon cher collègue, vous évoquez une mesure que nous avons votée, à savoir le report sur dix ans en avant des moins-values boursières, mais il n'y a aucune raison que cette mesure coûte un sou au budget de l'Etat pour 2003 ! Elle est destinée à donner un signal positif aux marchés, qui en ont besoin.
Mais je comprends que, pour vous, un bon marché est un marché qui « se casse la figure » et où les épargnants perdent de l'argent ! C'est probablement cela que vous considérez comme étant un bon marché. (Applaudissements sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire, de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Monsieur le rapporteur général, j'ai répondu à cette question. Il est donc inutile d'y revenir et je maintiens, bien sûr, ce que je viens de dire !
Mais, définitivement, il semble bien que la majorité sénatoriale préfère toujours venir au secours de la bourse au lieu de soutenir la dépense publique, et donc l'emploi. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Et, pour faire bon poids, le Gouvernement, sous la pression de M. le rapporteur général, a informé notre Haute Assemblée de la prochaine réforme de l'impôt de solidarité sur la fortune, qui est, comme nul ne l'ignore ici, la priorité des priorités en matière de réforme fiscale. N'est-ce pas, monsieur le rapporteur général ?
Cette année 2003, pour qui est imposé au taux supérieur de l'impôt sur le revenu, propriétaire immobilier et, éventuellement, imposable au titre de l'ISF, les perspectives d'allègement fiscal sont réelles.
En revanche, si l'on est salarié, payé environ 1 500 euros par mois, automobiliste, fumeur et que l'on est contraint de manger en dehors de son domicile, peu de changements sont à attendre. La feuille d'impôt sur le revenu évoluera peu, l'essence coûtera plus cher et la TVA sur la restauration n'a toujours pas baissé...
Les quelques euros de baisse d'impôt sur le revenu seront largement consommés par la hausse des impositions locales et, entre autres, par l'explosion de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères ou la hausse du foncier bâti consécutive à l'accroissement des dépenses sociales des départements.
Parce que nous avions des choix et des propositions fort différents de ceux du projet de loi initial et de ceux de la majorité sénatoriale, nous n'avons aucun regret à avoir quant aux suites données au débat.
A la vérité, nous sommes même fiers d'avoir proposé la hausse de l'impôt sur les sociétés sur les bénéfices distribués, d'avoir préconisé l'allégement de l'impôt sur le revenu pour les retraités, d'avoir agi dans le sens d'une réduction de la fiscalité locale pour les revenus les plus modestes et d'avoir soutenu la baisse du taux normal de la TVA ou le gel des taxes sur l'essence.
De même, nous avons soutenu des propositions pour accroître les moyens des collectivités locales et éviter ainsi la flambée des impôts locaux.
Nous avons également proposé la pérennisation des emplois-jeunes.
M. Jean-Louis Carrère. Très bien !
M. Thierry Foucaud. Leur suppression fera « économiser » 1 milliard, mais mettra 180 000 jeunes au chômage ; ce sont autant d'emplois en moins ; ce sont des satisfactions de besoins en moins, ce sont des recettes en moins et, bien sûr, c'est de la croissance en moins ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Nous avons ainsi fait place aux aspirations réelles des habitants de notre pays, à mille lieues, bien sûr, des orientations libérales qui animent ce budget et qui sont encore aggravées par la discussion de la deuxième partie.
En vertu de simples considérations comptables, on a taillé 2 millions d'euros dans le budget des universités et, singulièrement, dans les crédits de fonctionnement des établissements d'enseignement supérieur.
Chers collègues de la majorité sénatoriale, vous avez taillé dans le budget pour la promotion des droits de la femme, dans celui de la lutte contre la toxicomanie, dans le budget du développement culturel, dans celui de l'aide publique au développement, dans celui de l'insertion sociale des jeunes en difficulté. Vous avez aussi réduit de 6 millions d'euros les crédits destinés aux tarifs sociaux des transports franciliens. Dois-je poursuivre ?
Posons la question autrement : de quelle France rêvez-vous, mes chers collègues ? Rêvez-vous d'une France où les étudiants s'entassent dans des salles de cours bondées (Mme Nelly Olin s'exclame), où les femmes en détresse seraient livrées à elles-mêmes et à la dureté de la vie, où la culture déserterait nos villes de banlieue et nos cantons ruraux, où les jeunes sans emploi seraient livrés pieds et poings liés aux employeurs et donc à leur merci.
Mme Nelly Olin. N'étiez-vous pas dans la majorité plurielle ?
M. Thierry Foucaud. Ce n'est sans doute pas ce pour quoi ont voté les Français au printemps dernier...
M. Philippe Marini, rapporteur général. En tout cas, ils ne sont pas nombreux à avoir voté pour Robert Hue !
M. Thierry Foucaud. ... et ce n'est pas ainsi que vous ferez de l'UMP le grand parti populaire de droite dont vous rêvez, à l'image de vos amis espagnols ou allemands.
En ce qui nous concerne, nous avons souhaité une autre politique que celle que vous nous proposez pour la France qui travaille, qui lutte, qui souffre... (Exclamations sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire et de l'Union centristre, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Dominique Braye. La France qui pleure !
M. Thierry Foucaud. ... la France qui espère et se rassemble, notamment à l'image des agents du secteur public le 26 novembre dernier, des salariés de France Télévisions depuis plusieurs semaines, des salariés de dizaines d'entreprises privées qui exigent aujourd'hui le respect de leur dignité, la préservation de l'outil de travail et, bien entendu, de l'emploi au moment où se multiplient les plans sociaux de Marseille à Lille et de Nantes à Strasbourg.
M. Dominique Braye. A cause de vous !
M. Thierry Foucaud. Sur ce point, le Gouvernement fait encore droit, comme il a été rappelé tout à l'heure, aux seules demandes du MEDEF (Protestations sur les mêmes travées) en se hâtant, bien entendu, de réformer la loi de modernisation sociale, en tentant de faire passer en force, avant la fin de la session, un projet de loi et en suspendant un certain nombre de dispositions essentielles.
Cette année, plus de 16 milliards d'euros d'allégements de cotisations sociales seront ainsi versés, dépassant le budget du travail dans lequel ont été supprimés les emplois-jeunes, comme je l'ai dit tout à l'heure.
Quel mépris pour la France d'en bas que de donner ainsi au seul patronat les moyens de peser plus encore sur le devenir de milliers et de milliers de salariés !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Pourquoi le MEDEF est-il mécontent, alors ?
M. Thierry Foucaud. Que les aspirations de la grande majorité des Français n'aient pas été entendues dans ce débat n'est pas pour nous surprendre. Pour autant, cela a pu contribuer à la clarté sur les intentions réelles de ce gouvernement.
Même si votre politique est habillée plus ou moins élégamment, de quelques impératifs européens ou d'une apparence de sincérité, elle est et demeure anti-sociale.
Oui, elle ne vise essentiellement qu'à répondre à ceux qui, à longueur de pages du courrier des lecteurs du Figaro, se plaignent de payer trop d'impôts, trop de cotisations sociales, en fait trop de tout.
M. Louis de Broissia. C'est un discours tout en nuances !
M. Thierry Foucaud. D'autant qu'en général les mêmes se jettent sur les pages « saumon », où on leur apprend à optimiser leurs placements immobiliers et à échapper autant que faire se peut à la rigueur de l'ISF.
Ces choix politiques ne nous éviteront ni la récession, ni le développement du chômage, ni le creusement des déficits, qui vont encore déraper et hypothéquer l'avenir.
De même, la méthode du « gel » technocratique des crédits, à peine votés par le Parlement, trouvera encore à s'appliquer sans entraves. Pour toutes ces raisons, vous comprendrez que nous ne puissions que voter, sans la moindre hésitation, contre ce projet de loi de finances pour 2003.
Enfin, je me permettrai d'adresser mes plus vifs remerciements à l'ensemble des personnels du Sénat (Ah ! et applaudissements sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire, de l'Union centriste et sur certaines travées du RDSE) - je vous remercie de les applaudir -, dont je salue le professionnalisme, je dirai, même le courage pour avoir su transcrire avec autant de précision les discours qui ont été prononcés durant ces trois semaines. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC, du groupe socialiste et sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Josselin de Rohan. (Applaudissements sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. René-Pierre Signé. La France d'en haut !
M. Josselin de Rohan. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi tout d'abord de me faire l'interprète de la tristesse profonde de notre groupe devant le décès de notre ami Robert Calméjane. Il était un parlementaire courageux, chaleureux et fidèle à ses convictions. Il nous manquera. Je remercie ceux de nos collègues qui nous ont exprimé leur sympathie dans ce moment si douloureux pour la famille de Robert Calméjane et pour les membres de son groupe.
Le projet de loi de finances, sur lequel nous allons nous prononcer porte l'empreinte d'une conjoncture incertaine, mais aussi celle de la gestion précédente. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. René-Pierre Signé. Ça y est !
M. Josselin de Rohan. Ne vous impatientez pas, mes chers collègues, vous allez en entendre pas mal ! (Rires et applaudissements sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire ainsi que sur certaines travées de l'Union centriste. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Jean-Louis Carrère. Vous aussi !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Le contraire nous aurait étonnés !
M. Josselin de Rohan. Le projet de budget pour 2003 mérite le qualificatif de budget transitionnel dans la mesure où il établit le départ entre le possible et le souhaitable.
L'environnement national et international retentit sur nos finances publiques. La crise financière, la chute des cours boursiers donnent de la morosité à l'économie mondiale. La hausse du prix du pétrole, la réappréciation de l'euro par rapport au dollar, une demande plus faible que prévue dans la zone euro, notamment en Italie et en Allemagne, la perspective d'un conflit au Moyen-Orient affectent nos entreprises et ne stimulent guère la croissance de notre économie.
La gestion du gouvernement précédent rend très malaisé le retour rapide à l'équilibre budgétaire préconisé par les instances européennes.
L'exécution du budget 2002 et la croissance du déficit ont montré combien hasardeuses étaient les hypothèses sur lesquelles il se fondait. M. le rapporteur général l'avait d'ailleurs justement souligné l'an dernier. Les dépenses de l'Etat n'ont pas diminué entre 1999 et 2001 alors que l'état favorable de la conjoncture et l'absence de réformes structurelles auraient à tout le moins dû dégager des marges d'action pour un environnement moins favorable.
M. Jean-Patrick Courtois. C'est vrai !
M. Josselin de Rohan. En effet, 40 000 emplois civils ont été créés en cinq ans...
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Des policiers, des gendarmes !
M. Josselin de Rohan. ... dans un pays où 25 % des actifs travaillent directement ou indirectement pour le secteur public sans que celui-ci ait toujours gagné en qualité. Pendant cette période 1997-2002, les dépenses de la fonction publique sont passées de 40,7 % à 43,4 % du budget général.
Avec les 35 heures, les emplois-jeunes, les contrats territoriaux d'exploitation, la couverture maladie universelle, les services départementaux d'incendie et de secours et l'allocation personnalisée d'autonomie, l'Etat et les collectivités locales ont hérité d'engagements antérieurs non financés qui constituent de véritables bombes budgétaires mettant en péril les finances publiques par l'aggravation spectaculaire des charges. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Dans le même temps, tout au long de la mandature précédente, le budget de la défense et, au sein de celui-ci, les crédits d'équipement ont servi de variable d'ajustement, au point d'affecter très durement, les capacités opérationnelles de l'armée française.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Tu parles !
M. Josselin de Rohan. Les blindés ont un âge moyen de vingt-cinq ans, la moyenne d'âge des avions est de quinze ans, celle des frégates de vingt ans, et il est parfois impossible de trouver des pièces de rechange ! Permettez-moi de vous dire que c'est une situation consternante au moment où l'environnement international est aussi menaçant. (Vifs applaudissements sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. - Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
M. René-Pierre Signé. Qu'avez-vous fait entre 1993 et 1997 ?
M. Josselin de Rohan. Monsieur Signé, calmez-vous ! (Rires sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire.) Vous êtes la démonstration vivante que le talent n'est pas héréditaire et que votre prédécesseur a tout emporté dans sa tombe ! (Très vives protestations et brouhaha sur les travées du groupe socialiste.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Signé au musée !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. L'héritage, vous connaissez !
M. Bernard Piras. C'est un scandale !
Mme Hélène Luc. C'est de mauvais goût !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est honteux !
M. Jean-Louis Carrère. C'est maladroit !
M. Bernard Piras. Nous exigeons des excuses !
M. Josselin de Rohan. Faute d'une politique dynamique de gestion de la dette en haute conjoncture, qui aurait allégé nos contraintes, nous assistons à une dérive inquiétante de la dette négociable, qui a augmenté de 1 000 milliards en cinq ans et atteint 15 000 euros par Français. (Le brouhaha s'amplifie sur les travées du groupe socialiste.)
M. Bernard Piras. Des excuses ! Nous voulons des excuses !

(Le tumulte couvre la voix de l'orateur qui s'interrompt, déclenchant alors une salve d'applaudissements sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Mes chers collègues, je vous en prie ! Seul M. de Rohan a la parole.
M. Josselin de Rohan. Je comprends que le remords les tenaille, car la dette de l'Etat, à ce jour, représente 670,7 milliards d'euros, correspondant à 45,8 % du PIB, soit 79,91 % de la dette publique et près de six fois la dette des collectivités locales. Nous attendions de leur part un peu de contrition ! (Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Henri de Raincourt. Mais oui !
M. Josselin de Rohan. Mais il ne faut pas se faire trop d'illusions, les socialistes pardonnent toujours aux autres les offenses qu'ils leur ont faites. Dommage ! (Rires sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire.)
Si nous voulons que notre pays profite pleinement du retour à la croissance de l'économie mondiale et en retire les dividendes économiques et sociaux, il convient de changer de cap.
Nous félicitons le Gouvernement pour la sincérité dont il a fait preuve en minorant de 700 millions d'euros les recettes pour prendre en compte le fléchissement de la croissance, attitude qui contraste avec les pratiques de sous-estimation, et de surestimation des recettes, des dépenses que nous avions dénoncées en leur temps.
De même, la volonté de procéder à une régulation dynamique des dépenses de l'Etat, afin de maintenir l'objectif de stabilisation du déficit et de strict maîtrise des dépenses, traduit un souci de transparence auquel nous sommes sensibles.
Conformément aux engagements du Président de la République en matière de baisse de l'impôt sur le revenu (Bravo ! sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire) , la proposition de baisser de 6 % l'ensemble des taux du barème en pérennisant la minoration de 5 % accordée au titre des impôts de 2001 constitue un signe clair pour ceux qui subissent de lourdes et excessives contraintes fiscales. (Protestations sur les travées du groupe socialiste. - Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Claude Estier. Pour les riches !
M. Josselin de Rohan. Ce n'est en aucune manière une injustice ! C'est au contraire une mesure d'équité.
La volonté des Français de voir affermi l'Etat républicain et mieux garantie leur sûreté a été prise en considération grâce à l'augmentation des crédits consacrés à la police, à la gendarmerie, à la justice et à la défense nationale.
Aujourd'hui, l'impératif est non pas de dépenser plus, mais de dépenser mieux. La réduction des dépenses au niveau des crédits effectivement consommés est un pas significatif dans la bonne direction. Mais il est des mesures qui nous semblent symboliques d'une véritable volonté de renverser une dérive inquiétante : ce sont celles qui conduisent à accroître de 1,9 milliard d'euros en une année les investissements civils et militaires, qui avaient diminué de 1,5 milliard d'euros en cinq ans. Notre collègue Jacques Oudin ne nous a-t-il pas appris qu'alors que la SNCF avait très sensiblement accru le nombre de ses agents jamais le niveau d'investissement dans le ferroviaire n'avait été aussi bas ? Bel exemple d'incohérence des politiques publiques ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les travées du groupe CRC.) Mme Nicole Borvo. Vous êtes mal placé pour attaquer la SNCF !
M. Josselin de Rohan. Parce qu'elles auront un effet bénéfique pour notre économie, nous nous réjouissons des décisions prises par le Gouvernement à propos du Crédit Lyonnais et de France Télécom. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) L'ère du ni-ni est, nous l'espérons, révolue. (Bravo ! et applaudissements sur les travées pour un mouvement populaire.) Pour combien a pesé, dans la situation de France Télécom, l'impossibilité de payer en actions ses acquisitions d'entreprise, parce qu'il ne fallait pas que la part de l'Etat dans le capital de la société diminue ?
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Eh oui !
M. Josselin de Rohan. Nous attendons que la conjoncture permette une reprise des privatisations et que le gouvernement Raffarin fasse aussi bien, sinon mieux que le gouvernement Jospin dans ce domaine et que le produit des privatisations conduise singulièrement au désendettement de l'Etat et au financement des retraites.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. La corbeille !
M. Josselin de Rohan. Sous réserve que l'environnement international n'y fasse pas obstacle, nous souhaitons que 2004 voie le Gouvernement mener avec vigueur le redressement de nos finances publiques et la réforme de l'Etat, la mise en oeuvre de politiques dynamiques en faveur des entreprises et la rénovation de l'architecture de nos finances locales. Il pourra s'inspirer des recommandations très judicieuses de la commission des finances, de son président et de son rapporteur général, que je félicite pour leur excellent travail, mais également sur la loi organique du 1er août 2001, qui donne au Parlement les moyens d'être informé sur les évolutions économiques constatées depuis l'établissement du rapport économique, social et financier, sur les orientations prises au regard de nos engagements européens et sur l'évaluation à moyen terme des ressources de l'Etat.
Comme l'a noté avec beaucoup de justesse le rapporteur général, réduire le déficit et la dette, c'est préserver les générations futures. Ce faisant, il était en accord avec un expert, M. Laurent Fabius, qui disait ceci : « Pour dégager des marges de manoeuvre pour l'action publique et se préparer au futur choc démographique, il conviendrait d'effacer le triplement du poids de la dette publique dans le PIB intervenu depuis 1980 et de le ramener à vingt points de PIB à l'horizon 2020. Ce schéma suppose l'équilibre des finances publiques à partir de 2004. » M. Fabius ne devait pas lire M. Fabius, car il a peu contribué à ce retour à l'équilibre !
En tout cas, vous avez démontré, monsieur le rapporteur général, que, dans les faits, et sous réserve d'un effort prolongé, l'horizon pour le retour du poids de la dette à vingts points de PIB se situe davantage en 2030 qu'en 2025.
Laisser dériver notre endettement conduirait à obérer gravement, et de manière irresponsable, la situation de ceux qui nous succéderont, car les dettes devant être remboursées, ce qui sera remboursé ne sera pas investi. La réforme de l'Etat devient, pour reprendre votre expression, « une ardente obligation ».
Les moyens en financement et en personnel doivent être mis en regard des missions que la société assigne à son administration. Ces missions évoluent avec le temps. Le « toujours plus » consolide et fige des structrures qui, souvent, n'ont plus ni justification ni efficacité.
Nous devons impérativement saisir l'opportunité que nous fournit la pyramide des âges de la fonction publique pour procéder à des redéploiements d'effectifs et à des requalifications de personnels.
L'implantation territoriale des agents publics doit être repensée, les gains de productivité liés aux nouvelles technologies recherchés, la décentralisation prise en compte. Nous devons chercher un taux de remplacement raisonnable pour les agents partis à la retraite et non le remplacement nombre par nombre. Ce que les Espagnols ou les Portugais ont fait, nous pouvons le faire. Pourquoi n'en serions-nous pas capables ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire.) Au demeurant, la sur-administration n'est pas la bonne administration !
Le taux élevé des prélèvements obligatoires, l'aggravation des contraintes législatives et réglementaires qui pèsent sur nos entreprises ont gravement affecté leur compétitivité, mais aussi l'attractivité de notre pays. Ils ont été source de démotivation, de découragement et de délocalisation.
Les modifications intervenues dans l'application de la loi sur les 35 heures comme celles qui sont envisagées par la loi de modernisation sociale ont atténué certaines de ces rigidités. Les dispositions adoptées par le Sénat relatives aux sociétés foncières et aux épargnants en actions vont également dans le bon sens. Le débat sur la fiscalité du patrimoine a été entamé et sera repris lors de la discussion du projet de loi relatif à l'initiative économique. Nous nous en réjouissons !
Le monde de l'entreprise doit pouvoir renouer avec l'Etat un dialogue mis à mal ces dernières années et établir avec les pouvoirs publics des relations confiantes. Ce sera, là aussi, un vrai changement. (Bravo ! sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire.)
Rénover les finances locales nous paraît enfin indispensable à la lumière des lois constitutionnelles et organiques relatives à la décentralisation.
Il faut mettre fin à la diminution constante intervenue entre 1997 et 2002 de la part des recettes fiscales dans les budgets locaux.
Cette diminution traduisait une recentralisation des finances locales et une restriction spectaculaire de l'autonomie des collectivités locales, ainsi qu'une incitation à l'irresponsabilité. La réforme constitutionnelle rendra cette dérive plus difficile, mais une remise en ordre des ressources des collectivités locales est inéluctable si l'on veut que la décentralisation ait un sens, un fondement, et ne soit pas une illusion.
La spécialisation de l'impôt par type de collectivité locale mérite d'être étudiée, comme l'affectation des « quatre vieilles » aux communes et à leurs groupements, l'affectation aux départements et aux régions de la taxe intérieure sur les produits pétroliers, la TIPP, ou de la taxe générale sur les activités polluantes, la TGAP. On peut également envisager le vote de taxes additionnelles à des impositions perçues par l'Etat ou la sécurité sociale.
En tout état de cause, et quelles que soient les modalités adoptées, le statu quo n'est plus possible. Il est source de confusion, de complexité et de conflits entre l'Etat et les collectivités locales. Il est malsain que la part prise par l'Etat dans les recettes fiscales ou quasi fiscales des collectivités locales s'élève à 30 %. Il est humiliant - le mot n'est pas trop fort - et démotivant pour les collectivités locales de dépendre pour plus de 50 % de leurs ressources de dotations de l'Etat. J'espère que nous nous engageons dans une réforme profonde. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Raymond Courrière. On en reparlera !
M. Josselin de Rohan. Mes chers collègues, les Français se sont prononcés en juin dernier pour l'alternance et nous la leur devons.
Nous savons qu'il va falloir lutter contre la rigidité et l'inertie des structures,...
M. Robert Bret. L'extrême droite !
M. Josselin de Rohan. ... les habitudes, les routines et certains intérêts particuliers, mais nous sommes décidés à procéder sans faiblesse aux réformes que nous nous sommes engagés à réaliser. (Bravo ! et applaudissements sur les mêmes travées.)
Nous sommes pour un Etat fort qui assume pleinement ses prérogatives régaliennes, mais nous sommes opposés à l'étatisme.
Un Etat moderne, plus économe des deniers publics et plus efficace, n'implique nullement l'affaiblissement du service public. Nous savons que la très grande majorité des agents publics, dont le dévouement à leur tâche est exemplaire, sont attachés à la continuité, à l'égalité et à l'adaptabilité du service public et n'acceptent pas qu'il soit synonyme de maintien des droits acquis et de dépenses inutiles ou excessives. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Hélène Luc. Hypocrisie !
M. Josselin de Rohan. Pour nous, l'emploi doit procéder d'abord tout de l'initiative et du secteur marchand, plus que du secteur public. Ce sont avant tout les emplois productifs qui sont source de richesse.
Mme Nicole Borvo. Bien sûr ! C'est pour cela que l'on n'a pas d'infirmières, d'éducateurs, de médecins !
M. Josselin de Rohan. Nous ne croyons pas que le travail soit aliénant. Au contraire, il épanouit et il ennoblit. Nous n'acceptons pas que le travail soit rationné : il faut le multiplier ! (Applaudissements sur les travées de l'Union pour un mouvement populaire.) Nous sommes pour la solidarité, et non pour l'assistanat !
Mme Nicole Borvo. C'est pourquoi on réduit les crédits de la recherche !
M. Josselin de Rohan. Nous sommes pour la responsabilité, et non pour la mise en tutelle !
Nous savons qu'au sein de l'Union européenne et dans le monde nous ne serons considérés, suivis et respectés que pour autant que nous jouirons d'une économie prospère, d'entreprises dynamiques et de finances publiques maîtrisées.
Confiants dans la volonté du Gouvernement de répondre à ces aspirations, le groupe de l'Union pour un mouvement populaire l'assure de son soutien et votera le projet de loi de finances pour 2003, sans hésitation ni restriction. (Mmes et MM. les sénateurs de l'Union pour un mouvement populaire et de l'Union centriste, ainsi que certains sénateurs du RDSE, se lèvent et applaudissent longuement.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Cent vingt minutes pour la droite et vingt minutes pour la gauche !
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'Union pour un mouvement populaire, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Alain Lambert, ministre délégué. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la vie réserve de grands bonheurs, mais aussi des souffrances. Ainsi, avec la concision de ceux qui m'ont précédé à cette tribune, je veux, au nom du Gouvernement, partager votre émotion et votre tristesse à l'instant du décès de Robert Calméjane, que beaucoup d'entre nous comptions comme ami.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les explications de vote sur le budget sont au Sénat le moment le plus politique de l'année : chaque groupe exprime le sens qu'il veut donner à son engagement au service de notre pays.
Permettez à l'ancien collègue que je suis de vous dire que vivre ce moment à vos côtés, au nom du Gouvernement, est pour moi un privilège, et je veux remercier chacune et chacun de sa participation, de son soutien, ou de sa courtoise opposition.
Je souhaite remercier l'ensemble du Sénat, de son président au plus humble de ses agents (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste), en distinguant tout particulièrement la commission des finances, son président et son rapporteur général, du travail qui a été mené et dont, chaque jour de cette discussion, j'ai pu mesurer la qualité. Je suis fier d'être issu de cette commission.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le budget sur lequel vous allez vous prononcer dans quelques instants, solennellement, à la tribune est une réponse aux attentes fortes exprimées en avril et mai dernier par nos compatriotes.
M. René-Pierre Signé. Avec 19 % !
M. Alain Lambert, ministre délégué. Pour ne pas allonger le débat, je citerai seulement quelques exemples.
Les Français ont souhaité plus de sécurité : ce budget répond sans délai à cette légitime attente et des résultats concrets sont constatés sur le terrain. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'Union pour un mouvement populaire, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Les Français ont voulu rompre avec la spirale infernale de la hausse des impôts. La baisse de l'impôt sur le revenu a été réalisée dès 2002 ; les contribuables l'ont constaté ! (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'Union pour un mouvement populaire, ainsi que sur certaines travées du RDSE. - Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Michel Sergent. Les riches !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous verrons !
M. Alain Lambert, ministre délégué. Mesdames, messieurs les sénateurs de l'opposition, un pays n'a aucune chance de mobiliser son peuple lorsqu'il lui confisque plus de 50 % du fruit de son travail ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'Union pour un mouvement populaire, ainsi que sur certaines travées du RDSE.) Les Français ont voulu que leur travail soit davantage reconnu et respecté. Ils se sont sentis trahis par une loi sur les 35 heures qui aura abouti à créer rien de moins que six SMIC différents !
Dès son entrée en fonctions le Gouvernement a souhaité réparer cette injustice et les allégements de charges en sont la preuve. Les salariés sauront à qui ils le doivent !
Il y aurait beaucoup d'autres exemples à citer pour illustrer la détermination du Gouvernement à aller de l'avant, à restaurer l'Etat dans son autorité et ses pérogatives, à libérer toutes les énergies des Français, à les inviter à entreprendre, à reconnaître la valeur de leur travail, de l'initiative, à rendre à ceux qui sont enfermés par l'assistance le droit à vivre des fruits de leur travail, à leur rendre l'irremplaçable sentiment de fierté qu'éprouve toute personne lorsqu'elle exerce une activité...
M. Michel Dreyfus-Schmidt. En supprimant des emplois !
M. Alain Lambert, ministre délégué. ... et qu'elle est reconnue et respectée pour la qualité de son oeuvre.
C'est le sens de la politique qui est menée par le Gouvernement, sous l'autorité du Président de la République. C'est le sens de la politique qu'ont voulue les Français en avril et mai dernier. (M. Michel Dreyfus-Schmidt s'exclame !)
Qu'il me soit permis de me réjouir de la qualité du débat et des travaux conduits en commun entre le Sénat, sa commission des finances plus particulièrement, et le Gouvernement, en saluant les avancées remarquables qui ont été réalisées lors de cette discussion et dont M. le rapporteur général a bien voulu faire état tout à l'heure.
S'agissant de la sincérité du budget, je veux remercier la majorité sénatoriale d'avoir reconnu sa propre marque de fabrique. Les exigences démocratiques de respect de la représentation nationale, que j'ai apprises à vos côtés, m'ordonnent plus de devoirs qu'à d'autres à ce sujet. Pour avoir en votre nom dénoncé le mensonge budgétaire, je m'interdis, naturellement, d'y succomber aujourd'hui ou demain.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Pas à l'Assemblée nationale !
M. Alain Lambert, ministre délégué. La traduction sincère et sans doute unique, jusqu'à aujourd'hui, que nous avons faite au Sénat des moins-values fiscales anticipées pour 2003 à partir de l'effet base 2002 en est un exemple.
J'ai entendu l'opposition sénatoriale, notamment Gérard Miquel, que j'apprécie par ailleurs, émettre des doutes sur cette sincérité. Que ce dernier ne m'en veuille pas de rappeler qu'à pareille époque, l'an passé, je n'ai entendu aucun orateur socialiste nous mettre en garde sur une dérive probable de 50 % du déficit en 2002 !
M. Jean-Louis Carrère. Vous le creusez !
M. Alain Lambert, ministre délégué. Il ne m'en voudra donc pas de me méfier aujourd'hui de ses prévisions. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'Union pour un mouvement populaire, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Je veux assurer à l'opposition sénatoriale que le Gouvernement est et restera attentif au débat et au dialogue démocratiques. Personne ne peut prétendre détenir seul la vérité ! Beaucoup d'avancées seront d'ailleurs plus fécondes pour la France si elles font l'objet d'un consensus plus large.
A tous ceux qui se sont exprimés à ce sujet, notamment Gérard Miquel et Thierry Foucaud, à tous ceux qui s'inquiètent et qui réclament des politiques de soutien à la croissance, je répondrai clairement ceci : grâce aux baisses d'impôts et de charges, grâce au relèvement du pouvoir d'achat des bas salaires, grâce à l'assouplissement des 35 heures, grâce à l'encouragement au travail, le Gouvernement fait plus pour la croissance et pour l'emploi que le corset législatif dans lequel la France a été enserrée pendant cinq ans. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'Union pour un mouvement populaire, ainsi que sur certaines travées du RDSE. - Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Mesdames, messieurs les sénateurs, en remerciant chaleureusement par avance la majorité sénatoriale qui soutient le Gouvernement et qui, j'en suis sûr, votera le projet de loi de finances pour 2003, je voudrais, à l'instant de conclure, vous dire que ce budget construit par le Gouvernement dès le lendemain de l'alternance et enrichi par les travaux du Sénat, est un appel aux Françaises et aux Français qui veulent la réussite de leur pays et qui y croient, un appel aux Françaises et aux Français qui sont vigilants et respectueux de l'avenir de leurs enfants, un appel aux Françaises et aux Français qui ont l'amour de leur pays et la générosité de lui offrir le meilleur d'eux-mêmes.
Offrons-leur la possibilité, mesdames, messieurs les sénateurs, de participer à la construction de l'avenir. Soyez les messagers de l'espoir et de la confiance. Ouvrez aux Françaises et aux Français des perspectives longues et fortes. Car, contrairement à la légende, ils ne craignent pas l'effort ; ils attendent simplement qu'il soit reconnu et encouragé.
Invitons-les à partager un grand dessein, à partager une ambition pour leur pays, qu'ils aiment et dont ils veulent être fiers, ce pays dont ils savent qu'il est le bien le plus précieux qu'ils ont en commun et que nous appelons ensemble : la France. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'Union pour un mouvement populaire, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Cent quarante minutes pour la droite et vingt minutes pour la gauche !
M. le président. Monsieur le ministre, mes chers collègues, ainsi qu'il en a été décidé, nous allons interrompre nos travaux pendant quelques instants pour permettre la réalisation de photographies panoramiques de l'hémicycle. A cet effet, je vous invite à demeurer à votre place.
A l'issue de cette courte suspension de séance, nous procéderons au vote à la tribune de l'ensemble du projet de loi de finances pour 2003.
La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures vingt, est reprise à dix-huit heures quarante-cinq.)