Art. 12
Dossier législatif : projet de loi pour l'initiative économique
Art. 12 bis

Article additionnel après l'article 12

M. le président. L'amendement n° 230, présenté par Mme Terrade, MM. Foucaud, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

« Après l'article 12, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« Après l'article L. 784-1 du code du travail, il est inséré un chapitre comprenant un article ainsi rédigé :

« Chapitre... : dispositions relatives aux bénéficiaires d'un contrat d'accompagnement.

« Art. L. ... _ Les bénéficiaires d'un contrat d'accompagnement à la création d'une activité économique visé aux articles L. 127-1 à L. 127-7 du code de commerce, ou les entrepreneurs dont l'activité a trouvé son origine dans un contrat d'accompagnement, bénéficient de tous les avantages accordés aux salariés par la législation sociale et ceux prévus par les livres III, IV et VI du présent code. Les obligations mises par cette législation à la charge de l'employeur bénéficiaire dudit contrat d'accompagnement comme pour ses salariés incombent à l'entreprise principale cocontractante. »

La parole est à Mme Odette Terrade.

Mme Odette Terrade. Nous avons alerté la Haute Assemblée sur le recul par rapport à notre législation sociale qu'impliquent certaines dispositions de ce projet de loi.

L'article 10, notamment, est propice à une exploitation des nouveaux entrepreneurs et, plus globalement, à une dégradation des conditions de travail de ces ex-salariés.

Dans ces conditions, nous souhaitons, à travers cet amendement, apporter des garanties assurant aux bénéficiaires d'un contrat d'accompagnement une protection sociale inspirée de celle qui s'applique aux gérants non salariés.

Ces nouveaux entrepreneurs pourraient ainsi bénéficier d'un certain nombre de protections à l'égal des gérants non salariés et d'un certain nombre de droits à l'égal des salariés.

Si, sur le plan juridique, ces créateurs d'entreprise peuvent être considérés comme indépendants, nous savons bien que, sur le plan économique et social, tel n'est pas le cas. Il est donc nécessaire de leur offrir une sécurité sociale au sens large du terme, c'est-à-dire comportant un certain nombre de droits sociaux.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Annick Bocandé, rapporteur. L'adoption de cet amendement serait contraire à la philosophie de l'article 10 du projet de loi et, notamment, aux dispositions des articles L. 127-1 et L. 127-5 du code de commerce.

Les bénéficiaires du contrat proposé à l'article 10 ne sont pas les salariés des accompagnateurs et ne doivent pas être considérés comme tels. Il s'agit de personnes physiques non salariées à temps plein. L'article L. 127-5 proposé à l'article 10 dispose que l'activité du bénéficiaire doit être clairement distinguée de l'activité propre de l'accompagnateur et exercée de façon autonome.

Ainsi, entre le bénéficiaire et l'accompagnateur, il n'y a pas le lien de subordination qui existe entre un salarié et son employeur à travers le contrat de travail.

L'autonomie des parties est justifiée par la nécessité de prévenir le travail dissimulé, c'est-à-dire d'éviter que des entreprises n'utilisent le contrat d'accompagnement pour s'exonérer des contraintes liées à l'embauche d'un salarié.

Telles sont les raisons pour lesquelles la commission est défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat. Comme l'a indiqué Mme le rapporteur, les bénéficiaires d'un contrat d'accompagnement ne sont pas des salariés, ce sont des entrepreneurs en devenir. En effet, à l'issue du contrat d'accompagnement et si leur projet se concrétise, ils seront des entrepreneurs au plein sens du terme.

Outre son caractère très général qui la rend inapplicable, la proposition vise en fait à absorber dans le statut de salarié, supposé à tort être l'unique statut protecteur, toute personne passant dans un dispositif d'accompagnement à la création d'entreprise.

Je crois qu'il faut considérer le statut de créateur d'entreprise comme un statut tout à fait comparable, quoique de nature différente à celui de salarié et ne pas vouloir en permanence réintégrer dans le statut de salarié ceux qui sont destinés à devenir entrepreneurs.

Le Gouvernement s'oppose donc à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 230.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Art. additionnel après l'art. 12
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Art. additionnel après l'art. 12 bis

Article 12 bis

M. le président. « Art. 12 bis. - I. - L'article L. 120-3 du code du travail est ainsi rédigé :

« Art. L. 120-3. - Les personnes physiques immatriculées au registre du commerce et des sociétés, au répertoire des métiers, au registre des agents commerciaux ou auprès des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales pour le recouvrement des cotisations d'allocations familiales sont présumées ne pas être liées par un contrat de travail dans l'exécution de l'activité donnant lieu à cette immatriculation.

« Toutefois, l'existence d'un contrat de travail peut être établie lorsque les personnes citées au premier alinéa fournissent directement ou par une personne interposée des prestations à un donneur d'ouvrage dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l'égard de celui-ci. Dans un tel cas, il n'y a dissimulation d'emploi salarié, au sens du quatrième alinéa de l'article L. 324-10, que si des éléments de preuve permettent d'établir que le donneur d'ouvrage a passé contrat avec ces personnes dans le but principal d'éluder les obligations qui auraient pesé sur lui en tant qu'employeur. »

« II. - Il est inséré, après l'article L. 120-3 du même code, un article L. 120-3-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 120-3-1. - Lorsqu'un donneur d'ouvrage a passé contrat avec une société régulièrement immatriculée au registre du commerce et des sociétés, la qualification de dissimulation de travail salarié ne peut pas être retenue contre lui à moins que des éléments de preuve ne permettent d'établir que ledit donneur d'ouvrage a imposé des conditions contractuelles plaçant les dirigeants ou les salariés de cette société dans un lien de subordination juridique permanente à son égard, dans le but principal d'éluder les obligations qui auraient pesé sur lui en tant qu'employeur. »

Je suis saisi de sept amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 127 rectifié est présenté par MM. Godefroy, Raoul et Massion, Mme Boyer, MM. Angels, Picheral, Piras, Saunier, Trémel, Courteau, Bel, Dussaut, Masseret et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée.

L'amendement n° 229 est déposé par Mme Terrade, MM. Foucaud, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

« Supprimer cet article. »

L'amendement n° 187 rectifié, présenté par MM. Hérisson, Carle, Barraux, Vial, Mouly, Trucy, Courtois, Murat et Sido, est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit cet article :

« L'article L. 120-3 du code du travail est ainsi rédigé :

« Art. L. 120-3. _ Les personnes physiques immatriculées au registre du commerce et des sociétés, au répertoire des métiers, au registre des agents commerciaux ou auprès des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales pour le recouvrement des cotisations d'allocations familiales, ainsi que les dirigeants des sociétés régulièrement immatriculées au registre du commerce et des sociétés, et leurs salariés, sont présumés ne pas être liés avec le donneur d'ouvrage par un contrat de travail dans l'exécution de l'activité donnant lieu à cette immatriculation.

« Toutefois, l'existence d'un contrat de travail peut être établie lorsque les personnes citées au premier alinéa fournissent directement ou par une personne interposée des prestations à un donneur d'ouvrage dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l'égard de celui-ci. Dans un tel cas, il n'y a dissimulation d'emploi salarié que s'il est établi que le donneur d'ouvrage s'est soustrait intentionnellement à l'accomplissement de l'une des formalités prévues aux articles L. 143-3 et L. 320 du code du travail. »

L'amendement n° 179 rectifié, présenté par MM. Hérisson, Barraux et Fournier, est ainsi libellé :

« I. - Dans le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 120-3 du code du travail, après les mots : "les personnes physiques", insérer les mots : "ou les dirigeants des personnes morales".

« II. - En conséquence, dans le même alinéa, remplacer le mot : "présumées" par le mot : "présumés".

L'amendement n° 180 rectifié, présenté également par MM. Hérisson, Barraux et Fournier, est ainsi libellé :

« Dans le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 120-3 du code du travail, après les mots : "contrat de travail", insérer les mots : "avec leur donneur d'ouvrage". »

L'amendement n° 184 rectifié, déposé par MM. Trucy, Courtois, Murat, Mouly, Vial, Barraux et Hérisson, est ainsi libellé :

« Compléter le texte proposé par le II de l'article 12 bis pour insérer un article L. 120-3-1 du code du travail par un alinéa ainsi rédigé :

« Le statut juridique d'associé, d'actionnaire ou de mandataire social au sein d'une personne morale commerciale qui a passé contrat avec un donneur d'ouvrage ne peut être requalifié que si, préalablement, la nullité de cette personne morale est prononcée. »

L'amendement n° 181 rectifié, présenté par MM. Hérisson, Barraux et Fournier, est ainsi libellé :

« Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

« ... _ Après l'article L. 120-3 du code du travail, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :

« Art. L. ... . - Les obligations visant à assurer l'identité d'un réseau de distribution et de services ne caractérisent pas en tant que telles le lien de subordination juridique permanente. »

La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour défendre l'amendement n° 127 rectifié.

M. Jean-Pierre Godefroy. Cet amendement a pour objet de supprimer l'article 12 bis.

Cet article rétablit la présomption de non-salariat qui avait été mise en oeuvre en 1994 par Alain Madelin, alors ministre de l'industrie, et qui avait été heureusement supprimée par Martine Aubry dans la loi du 19 janvier 2000.

Désormais, les personnes physiques dès lors qu'elles seront immatriculées aux répertoires des organismes consulaires seront présumées ne pas être liées par un contrat de travail. En cas de contentieux, l'existence d'un contrat de travail pourra être établie par l'existence d'un lien de subordination juridique permanent.

Afin de ne laisser aucune échappatoire, il faudra que des éléments de preuve permettent d'établir que le donneur d'ouvrage a passé contrat avec ces personnes dans le but principal d'éluder les obligations qui pèsent sur lui en tant qu'employeur.

Enfin, la qualification de travail dissimulé ne pourra être retenue contre le donneur d'ordre dès lors qu'il aura passé contrat avec une société immatriculée, sauf éléments de preuve permettant d'établir que les obligations contractuelles pesant sur cette société l'ont placée dans un lien de subordination juridique permanent.

On voit la facilité qu'il y aura à apporter de telles preuves, non seulement quant à l'existence du lien juridique, mais quant à sa permanence !

La deuxième condition, dans son énoncé même, précise, avec naïveté peut-être, les motivations des employeurs qui agissent ainsi et auquel cet article 12 bis apporte en quelque sorte sa bénédiction : il s'agit d'éluder les obligations juridiques et sociales qui pèsent sur eux en tant qu'employeur. Il est d'ailleurs significatif que le développement le plus important de ce système frauduleux ait concerné d'abord des métiers dangereux, comme les travaux forestiers ou le transport routier de courte distance.

C'est donc finalement à cette catégorie d'employeurs que la majorité, à l'Assemblée nationale, a choisi d'apporter ce que vous appelez la sécurité juridique. Le problème est que cette sécurité juridique des uns s'oppose non seulement à la sécurité juridique des salariés de fait, mais aussi à leur santé.

Ce n'est pas un hasard si les juges requalifient souvent le contrat de prestation de services qui leur est présenté en contrat de travail. C'est bien parce qu'ils constatent qu'il y a une relation salariale de fait, dissimulée sous une qualification frauduleuse.

Avec cet article revient donc dans le code du travail la présomption de non-salariat chère aux libéraux. Selon cette conception, ce n'est pas en effet un contrat de travail qui doit lier une entreprise à un salarié, c'est un contrat de prestation de services qui doit régler les rapports entre un donneur d'ordres et un prestataire de services. Ainsi serait préservé le dogme de la liberté des contractants et de la concurrence pure et parfaite. Les contraintes et les complications du code du travail disparaissent et cessent de nuire au dynamisme économique. En réalité, la responsabilité de l'employeur à l'égard des gens qu'il emploie a surtout pour premier intérêt de disparaître.

Le point d'achoppement de cette théorie est qu'elle bute sur la réalité des rapports de force. La liberté des uns devient l'assujettissement des autres aux contraintes qu'ils ne peuvent refuser et la concurrence favorise le dumping financier et social par ceux qui doivent gagner leur vie comme ils le peuvent.

La présomption de non-salariat, ou encore la volonté de généraliser le contrat de prestation de services, n'est que la matérialisation juridique de la liberté du plus fort et de l'assujettissement des plus faibles.

Elle est donc en contradiction avec notre vocation de législateur, qui est, nous voulons l'espérer, de favoriser des rapports économiques et sociaux justes et équilibrés. Nous ne pouvons donc que rejeter cet article.

M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam, pour présenter l'amendement n° 229.

M. Gérard Le Cam. L'article 12 bis résultant d'un amendement introduit à l'Assemblée nationale revient sur la loi Madelin de 1994, qui instituait la présomption simple de non-salariat des travailleurs.

La loi dite « loi Aubry II », en 2000, avait supprimé fort heureusement cette présomption et donc permis de requalifier un certain nombre de contrats de travail.

Cette procédure de requalification peut, comme le soulignent utilement les rapporteurs, aboutir à une condamnation pénale des dirigeants de l'entreprise donneuse d'ordres pour travail dissimulé.

Bien que vous ayez pris des précautions dans la rédaction des dispositions de l'article L. 120-3-1, vous n'avez guère atténué nos craintes.

Nous sommes convaincus que cet article rend possible la dissimulation de l'essaimage, du tâcheronnage et du marchandage, bref, le développement de la fausse sous-traitance.

Cette réécriture du code du travail n'est pas favorable aux salariés et peut conduire à tous les abus imaginables.

Dans sa rédaction actuelle, l'article L. 120-3 du code du travail contraint « celui qui a recours aux services d'une personne physique » titulaire d'un contrat de travail à respecter ses obligations d'employeur. Il offre des garanties protectrices aux travailleurs.

Nous continuons de penser - nous en avons là incontestablement la preuve - que le projet de loi a pour objectif d'assouplir les normes qui réglementent la sous-traitance. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons supprimer cet article.

M. le président. La parole est à M. Pierre Hérisson, pour présenter les amendements n°s 187 rectifié, 179 rectifié, 180 rectifié, 184 rectifié et 181 rectifié.

M. Pierre Hérisson. L'amendement n° 187 rectifié vise à rétablir un équilibre de traitement entre les personnes physiques et les personnes morales en ajoutant la mention de ces dernières au premier alinéa de l'article L. 120-3.

Il s'agit de limiter, par une formulation plus équilibrée de la seconde phrase du deuxième alinéa, les cas où serait établie la dissimulation d'emploi salarié, de manière à éviter toute requalification systématique, tout en permettant cette requalification dans les situations d'infraction flagrante portant atteinte à la concurrence loyale entre les entreprises. La référence au quatrième alinéa de l'article L. 324-10 peut être supprimée puisque le contenu de cet alinéa est repris dans le texte.

En outre, nous supprimons l'article L. 120-3-1, pour l'essentiel redondant par rapport à l'article L. 120-3 ainsi rédigé.

En ce qui concerne l'amendement n° 179 rectifié, l'actuelle rédaction de l'article 12 bis ne permet pas d'atteindre pleinement l'objectif visé dans ce projet de loi puisqu'elle ne prend en considération que les contrats passés par les entrepreneurs qui choisissent d'exercer leur activité individuellement, en tant que personnes physiques. Or l'activité d'entrepreneur s'exerce souvent par l'intermédiaire d'une personne morale. De nombreux entrepreneurs préfèrent créer une société dont ils sont les dirigeants. Le présent projet de loi les y incite d'ailleurs en supprimant l'exigence de capital minimum pour les SARL.

En principe, la présence d'une personne morale régulièrement immatriculée au registre du commerce et des sociétés devrait être suffisante pour présumer l'absence de contrat de travail entre le dirigeant de la société et son contractant. C'est pourquoi la loi du 11 février 1994, dite « loi Madelin », ne faisait pas référence aux dirigeants de personne morale.

Il arrive pourtant de plus en plus fréquemment que les tribunaux refusent de tenir compte de l'existence d'une personne morale et croient déceler la présence d'un contrat de travail liant le dirigeant de la société en requalifiant le contrat liant le donneur d'ouvrage à la société.

S'il est évidemment souhaitable que le juge soit en mesure de sanctionner et de mettre fin à des situations anormales en les requalifiant, cette démarche doit rester prévisible et exceptionnelle.

Il n'y a donc plus aujourd'hui de raison de distinguer les entrepreneurs individuels et ceux qui recourent à une société pour des raisons d'organisation patrimoniale.

C'est pourquoi il convient d'étendre la présomption de non-salariat aux dirigeants de sociétés régulièrement immatriculées au registre du commerce et des sociétés.

Cette présomption de non-salariat n'interférera en rien avec la possibilité offerte à certains dirigeants de personne morale de cumuler leur mandat social avec un contrat de travail.

L'amendement n° 180 rectifié a en fait un objet très voisin de celui de l'amendement n° 179 rectifié.

L'amendement n° 184 rectifié vise à lever un frein à la création d'entreprise en supprimant toute ambiguïté sur les liens de subordination qui pourraient être supposés entre gérants mandataires et fournisseurs.

S'agissant de l'amendement n° 181 rectifié, il convient de prendre en considération la situation des réseaux de distribution et de services, quel que soit leur mode juridique d'organisation et d'exploitation, qui peuvent être placés, du fait de l'attitude de certaines juridictions, dans une situation d'insécurité juridique en raison même de l'existence d'une organisation en réseau.

On rencontre notamment ce type de réseaux, qui peut s'articuler autour de la franchise mais également autour d'autres modes juridiques d'exploitation, dans les secteurs de l'alimentation, du bâtiment, de l'équipement de la personne et de la maison, de l'hygiène et de la santé, dans l'hôtellerie et la restauration, dans l'automobile, ainsi que dans divers services.

A titre d'exemple, au 31 décembre 2002, la France comptait 719 franchiseurs et plus de 33 260 franchisés. Le chiffre d'affaires de la franchise française est évalué à 33 milliards d'euros pour l'année 2003. La franchise française occupe d'ailleurs la première place en Europe.

Le franchisé est logiquement tenu de respecter et de mettre en oeuvre les éléments de réussite commerciale de la marque, et le franchiseur est tenu d'en assurer leur efficacité commerciale tout au long du contrat. On ne peut en déduire pour autant la création d'un lien de subordination.

Compte tenu des conséquences économiques importantes qu'une requalification peut avoir au sein d'un réseau, l'intervention du législateur, destinée à réaffirmer la différence fondamentale de nature entre la notion de subordination juridique et l'appartenance à un réseau de distribution et de services, permettra de favoriser le développement de ce type de réseaux.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Annick Bocandé, rapporteur. Sans ignorer l'existence du travail dissimulé, la commission est défavorable aux amendements n°s 127 rectifié et 229, car il convient d'éviter que les juges ne requalifient systématiquement les contrats d'entreprise en contrats de travail et d'assurer un minimum de stabilité dans le droit du travail.

En traitant de manière identique personnes physiques et personnes morales, l'amendement n° 187 rectifié remet en cause le compromis satisfaisant que traduit la rédaction actuelle de l'article 12 bis.

C'est pourquoi la commission demande le retrait de cet amendement.

S'agissant de l'amendement n° 179 rectifié, la commission estime qu'il n'est pas souhaitable de rassembler en une seule disposition les règles applicables aux entrepreneurs individuels et aux dirigeants de société. Cette construction rendrait la législation plus complexe et accroîtrait les risques de confusion quant au régime applicable selon le statut de l'entreprise visée.

Plus fondamentalement, le travail dissimulé reste un délit grave dont il convient de se prémunir.

La commission spéciale souhaite donc le retrait de cet amendement.

Il semble que l'amendement n° 180 rectifié soit de nature rédactionnelle. Toutefois, afin de s'assurer qu'il n'est pas susceptible d'entraîner des conséquences imprévues, la commission souhaiterait entendre l'avis du Gouvernement.

En ce qui concerne l'amendement n° 184 rectifié, il me semble que l'article 12 du nouveau code de procédure civile dispose que le juge doit qualifier exactement les « faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée ». Je souhaite cependant connaître, là aussi, l'avis du Gouvernement.

Il en va de même pour l'amendement n° 181 rectifié, car le régime de la franchise fait l'objet d'études très précises de la part des ministères concernés.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat. Je dirai d'abord que le texte proposé réduit l'insécurité juridique pour les entreprises qui sont parfois confrontées à une requalification de contrat sur la base d'un faisceau d'indices dont le périmètre n'est pas toujours bien défini, mais que, par ailleurs, il maintient la possibilité de lutter contre la dissimulation de travail salarié lorsque le lien de subordination juridique permanent est avéré.

Le Gouvernement est donc défavorable aux amendements de suppression n°s 127 rectifié et 229.

L'amendement n° 187 rectifié a pour objet principal d'homogénéiser, dans la forme et dans le fond, les dispositions applicables aux personnes physiques et aux personnes morales. En outre, il améliore la rédaction de l'article 12 bis, en précisant les cas où serait établie la dissimulation d'emploi salarié et en supprimant un article redondant.

Le Gouvernement est donc favorable à l'adoption de cet amendement. Il souhaite toutefois que deux modifications y soient apportées.

Il conviendrait, tout d'abord, de supprimer le mot « régulièrement » s'agissant de l'immatriculation des personnes morales au registre du commerce et des sociétés. Pourquoi, en effet, exiger l'immatriculation régulière pour les personnes morales et non pour les personnes physiques ? Ce qui fonde la présomption, c'est l'immatriculation et non le fait que cette dernière soit régulière ou non.

Le Gouvernement souhaiterait également que soit remplacé le mot : « sociétés » par les mots : « personnes morales ». En effet, le terme « sociétés » paraît trop limitatif.

M. Jean-Jacques Hyest. Exact !

M. le président. Monsieur Hérisson, acceptez-vous de procéder aux modifications suggérées par M. le secrétaire d'Etat ?

M. Pierre Hérisson. Bien sûr, monsieur le président.

M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 187 rectifié bis, présenté par MM. Hérisson, Carle, Barraux, Vial, Mouly, Trucy, Courtois, Murat et Sido, et ainsi libellé :

« Rédiger comme suit cet article :

« L'article L. 120-3 du code du travail est ainsi rédigé :

« Art. L. 120-3. - Les personnes physiques immatriculées au registre du commerce et des sociétés, au répertoire des métiers, au registre des agents commerciaux ou auprès des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales pour le recouvrement des cotisations d'allocations familiales, ainsi que les dirigeants des personnes morales immatriculées au registre du commerce et des sociétés, et leurs salariés, sont présumés ne pas être liés avec le donneur d'ouvrage par un contrat de travail dans l'exécution de l'activité donnant lieu à cette immatriculation.

« Toutefois, l'existence d'un contrat de travail peut être établie lorsque les personnes citées au premier alinéa fournissent directement ou par une personne interposée des prestations à un donneur d'ouvrage dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l'égard de celui-ci. Dans un tel cas, il n'y a dissimulation d'emploi salarié que s'il est établi que le donneur d'ouvrage s'est soustrait intentionnellement à l'accomplissement de l'une des formalités prévues aux articles L. 143-3 et L. 320. »

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Annick Bocandé, rapporteur. La commission est favorable à l'amendement ainsi rectifié.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 127 rectifié et 229.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 187 rectifié bis.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 12 bis est ainsi rédigé et les amendements n°s 179 rectifié, 180 rectifié, 184 rectifié et 181 rectifié n'ont plus d'objet.

Art. 12 bis
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Art. 13 A

Article additionnel après l'article 12 bis

M. le président. L'amendement n° 35, présenté par Mme Bocandé, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Après l'article 12 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« Le sixième alinéa de l'article L. 132-23 du code des assurances est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Au regard de cette règle, sont réputés de même nature les contrats regroupant des salariés et les contrats regroupant des non-salariés. »

La parole est à Mme Annick Bocandé, rapporteur.

Mme Annick Bocandé, rapporteur. L'article L. 132-23 du code des assurances dispose que les contrats d'assurance de groupe en cas de vie dont les prestations sont liées à la cessation d'activité professionnelle ne comportent pas de possibilité de rachat.

Il prévoit toutefois une dérogation dans certains cas limitativement énumérés pour lesquels un tel transfert est possible. Cette dérogation permet aux contractants d'une assurance vie de groupe de transférer, donc de racheter, l'épargne ainsi accumulée lorsque se produisent certains événements tels que : l'expiration des droits de l'assuré aux allocations d'assurance chômage prévues par le code du travail en cas de licenciement ; la cessation d'activité non salariée de l'assuré à la suite d'un jugement de liquidation judiciaire en application des dispositions de la loi du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises ; l'invalidité de l'assuré correspondant au classement dans la deuxième catégorie - invalides capables d'exercer une activité rémunérée - ou la troisième catégorie - invalides qui, étant absolument incapables d'exercer une profession, sont en outre dans l'obligation d'avoir recours à l'assistance d'une tierce personne pour effectuer les actes ordinaires - prévues à l'article L. 341-4 du code de la sécurité sociale.

Le code des assurances prévoit cependant que les contrats d'assurance de groupe en cas de vie dont les prestations sont liées à la cessation d'activité professionnelle doivent comporter une clause de transférabilité. Ainsi, les contractants d'un contrat d'assurance vie cessant leur activité professionnelle peuvent transférer à d'autres fins l'épargne qu'ils ont accumulée.

L'article additionnel que propose la commission spéciale tend, afin de lever un obstacle supplémentaire à l'éventuelle décision, pour un salarié, de se lancer dans l'aventure entrepreneuriale et de changer de statut, à reconnaître que la nature des contrats de groupe de salariés et des contrats de groupe de non-salariés est identique au regard de l'applicabilité de la clause de transférabilité.

Ainsi, le passage du statut de salarié à celui de non-salarié - comme le passage inverse, au demeurant - sera neutre en matière de gestion de l'épargne d'assurance vie accumulée dans le cadre d'un contrat de groupe.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat. Cet amendement a pour objet de préciser dans le code des assurances que les contrats d'assurance pour la retraite des salariés, les fameux contrats dits « article 83 » doivent comporter une clause permettant le transfert de l'épargne accumulée vers des contrats de même nature couvrant les travailleurs non salariés.

Cette précision est, en réalité, inutile. L'article L. 132-23 du code des assurances, que cet amendement vise à compléter, est en effet de portée très générale. Il prévoit que tout contrat d'assurance de groupe pour la retraite doit comporter une clause permettant le transfert de l'épargne accumulée vers un autre contrat de retraite. Cette règle s'applique donc d'ores et déjà aux contrats d'assurance retraite couvrant les salariés - les contrats dits « article 83 » - ainsi que les travailleurs non salariés, qu'il s'agisse des contrats de retraite mis en place par la loi Madelin de 1994 pour les travailleurs indépendants ou des contrats dits « ex-COREVA » pour les exploitants agricoles.

Aussi, loin d'apporter une réelle précision à cette disposition du code des assurances, cet amendement paraît en rendre la compréhension moins aisée en jetant un doute sur sa pleine application à d'autres contrats d'assurance retraite pouvant être souscrits pour couvrir des adhérents qui ne sont pas spécifiquement des salariés ou des travailleurs non salariés, distinction par ailleurs tout à fait étrangère au code des assurances.

Sous le bénéfice de ces explications, madame le rapporteur, le Gouvernement vous demande de bien vouloir retirer cet amendement.

M. le président. Madame le rapporteur, l'amendement n° 35 est-il maintenu ?

Mme Annick Bocandé, rapporteur. Voilà un point bien technique à une heure si tardive !

Pouvez-vous m'assurer, monsieur le secrétaire d'Etat, que le passage de cette épargne de l'un à l'autre des statuts ne soulève aucune difficulté ?

M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat. Absolument ! L'article du code prévoit ce passage.

Mme Annick Bocandé, rapporteur. Alors, nous retirons l'amendement.

M. le président. L'amendement n° 35 est retiré.