compte rendu intégral

PRÉSIDENCE DE M. Guy Fischer

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à seize heures.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

M. Claude Domeizel. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel.

M. Claude Domeizel. Monsieur le président, mon intervention a trait au compte rendu de la séance du 20 décembre 2004.

Selon le compte rendu intégral de cette séance, l'amendement n° 75, présenté par M. Leclerc, qui concernait les pensions à jouissance immédiate pour les fonctionnaires ayant élevé trois enfants et totalisant quinze ans d'ancienneté, a été adopté à l'unanimité ; c'est ce qui apparaît à la page 10 142 du Journal officiel. Or, pour le même vote, le compte rendu analytique ne fait mention que d'une simple adoption.

Je tiens à faire une mise au point, car cet amendement n'a pas pu être voté par le groupe socialiste : celui-ci le jugeait injuste et avait d'ailleurs déposé, lors de la discussion de la loi sur les retraites, en juillet 2003, un amendement se situant exactement à l'opposé.

Je reviendrai dans d'autres circonstances sur le fond et sur la méthode employée. Aujourd'hui, je me contenterai de demander, monsieur le président, que soit apportée au compte rendu intégral la rectification nécessaire.

M. le président. Je prends acte, monsieur Domeizel, de votre demande de rectification.

2

DÉSIGNATION D'UN SÉNATEUR EN MISSION

M. le président. M. le président a reçu de M. le Premier ministre une lettre en date du 20 janvier 2005 par laquelle il a fait part au Sénat de sa décision de placer en mission temporaire auprès de M. le ministre des affaires étrangères et de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, M. Aymeri de Montesquiou, sénateur du Gers.

Acte est donné de cette communication.

3

DÉCISION DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

M. le président. M. le président a reçu de M. le président du Conseil constitutionnel le texte de la décision rendue par le Conseil constitutionnel le 20 janvier 2005 sur la loi relative aux compétences du tribunal d'instance, de la juridiction de proximité et du tribunal de grande instance.

Acte est donné de cette communication

Cette décision du Conseil constitutionnel sera publiée au Journal officiel, édition des lois et décrets.

4

CANDIDATURE À UN ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE

M. le président. Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation d'un sénateur appelé à siéger au sein du conseil d'administration de l'établissement public du musée du quai Branly.

La commission des affaires culturelles a fait connaître qu'elle propose la candidature de M. Jacques Valade pour siéger au sein de cet organisme extraparlementaire.

Cette candidature a été affichée et sera ratifiée, conformément à l'article 9 du règlement, s'il n'y a pas d'opposition à l'expiration du délai d'une heure.

5

COMMUNICATION RELATIVE À UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE

M. le président. J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à l'égalité des droits et des chances, à la participation et à la citoyenneté des personnes handicapées est parvenue à l'adoption d'un texte commun.

6

Art. additionnels après l'art. 36 bis (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi relatif au développement des territoires ruraux
Art. additionnels avant l'art. 37 EAA

Développement des territoires ruraux

Suite de la discussion d'un projet de loi en deuxième lecture

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi (n° 27, 2004-2005), adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relatif au développement des territoires ruraux.

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus au titre III.

TITRE III

DISPOSITIONS RELATIVES À L'ACCÈS AUX SERVICES

chapitre Ier

Dispositions relatives aux services au public

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi relatif au développement des territoires ruraux
Art. 37 EAA

Articles additionnels avant l'article 37EAA

M. le président. L'amendement n° 94 rectifié, présenté par Mme Gourault, MM. Jarlier,  Hérisson,  J.L. Dupont,  Détraigne et  Arnaud, est ainsi libellé :

Avant l'article 37 EAA, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 421-2-6 du code de l'urbanisme est ainsi rédigé :

« Art. L. 421-2-6 - Le maire d'une commune de moins de 10 000 habitants et le président d'un établissement public de coopération intercommunale compétent de moins de 50 000 habitants peuvent disposer gratuitement, et en tant que de besoin, des services déconcentrés de l'Etat pour effectuer l'étude technique de celles des demandes de permis de construire sur lesquelles il a compétence pour l'instruction et la décision et qui lui paraissent justifier l'assistance technique de ces services. Pendant la durée de cette mise à disposition, les services et les personnels agissent en concertation permanente avec le maire ou le président de l'établissement public qui leur adresse toutes instructions nécessaires pour l'exécution des tâches qu'il leur confie. Lorsque les demandes de permis de construire sont instruites par une commune ou par un établissement public, les services déconcentrés de l'Etat peuvent leur apporter gratuitement une assistance juridique et technique ponctuelle. »

La parole est à Mme Jacqueline Gourault.

Mme Jacqueline Gourault. Cet amendement porte sur l'assistance gratuite des services déconcentrés de l'Etat quant à la délivrance des permis de construire.

La loi relative aux libertés et responsabilités locales a limité les effets de l'article L. 421-2-6 du code de l'urbanisme en réservant l'assistance de la direction départementale de l'équipement pour l'instruction des permis de construire aux communes et aux EPCI de moins de 10 000 habitants.

Après réflexion, un certain nombre d'élus considèrent que, si le seuil de 10 000 habitants est tout a fait adéquat pour les communes, il est trop bas pour les EPCI et qu'il conviendrait de le porter à 50 000 habitants. C'est ce que nous proposons dans cet amendement.

M. le président. Le sous-amendement n° 438, présenté par M. Nogrix, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du texte proposé par l'amendement n° 94 rectifié pour l'article L. 421-2-6 du code de l'urbanisme, remplacer les mots :

moins de 50 000 habitants

par les mots :

moins de 20 000 habitants

La parole est à M. Philippe Nogrix.

M. Philippe Nogrix. Il m'est apparu que le seuil de 50 000 habitants n'était pas vraiment adapté à la réalité des territoires ruraux. Je propose donc de le fixer à 20 000 habitants.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques et du Plan, rapporteur. Il est aisé de comprendre les préoccupations qui animent les auteurs de l'amendement n° 94 rectifié. En effet, l'application des règles d'urbanisme, souvent complexes, nécessite des moyens dont les petites communes sont fréquemment dépourvues. C'est d'ailleurs pour venir en aide aux communes le plus en difficulté que l'article 67de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a limité le bénéfice de l'aide gratuite des services de l'Etat pour l'instruction des permis de construire aux communes de moins de 10 000 habitants.

Est-il souhaitable de revenir sur un dispositif quelques mois seulement après qu'il a été voté, au risque d'en détruire l'équilibre ?

La commission a émis un avis défavorable et demande le retrait de l'amendement n° 92 rectifié.

S'agissant du sous-amendement n° 438, dans la mesure où la commission n'a pas eu le temps de l'examiner, je souhaite entendre l'avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Frédéric de Saint-Sernin, secrétaire d'Etat à l'aménagement du territoire. L'aide des services déconcentrés de l'Etat est destinée prioritairement à des collectivités petites et moyennes qui n'ont généralement pas de service d'urbanisme ; d'où la mise à disposition gratuite de services déconcentrés de l'Etat auprès des collectivités de moins de 10 000 habitants.

L'Etat reste cependant présent, je tiens à le rappeler, aux côtés de l'ensemble des collectivités puisque la loi prévoit qu'une assistance juridique et une assistance technique ponctuelles sont apportées gratuitement par les services déconcentrés de l'Etat, quelle soit la taille des communes ou des EPCI.

Je crains en outre qu'une mesure telle que celle qui est proposée n'aille à l'encontre de la création de structures intercommunales puisque serait beaucoup plus élevée la taille critique à partir de laquelle il deviendrait intéressant pour les communes de constituer un EPCI susceptible de mettre en place ses propres services et de bénéficier d'une dotation globale de fonctionnement, au demeurant bonifiée.

Enfin, les dispositions qu'il est proposé de modifier ayant été très récemment discutées dans le cadre de l'examen du projet de loi relatif aux libertés et responsabilités locales, il serait préférable d'en attendre un retour d'expérience, quitte à les faire évoluer si le besoin s'en faisait sentir.

Le sous-amendement réduit sensiblement le seuil par rapport à l'amendement. Le ministère de l'intérieur va procéder à une évaluation de la loi du 13 août 2004. Lorsque ses effets seront connus, cette question pourra être réétudiée dans le cadre d'un prochain texte.

Pour toutes ces raisons, je demande le retrait de l'amendement et du sous-amendement.

M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 438 ?

M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. Je fais mienne l'argumentation de M. le secrétaire d'Etat : puisque la loi relative aux libertés et responsabilités locales vient d'entrer en vigueur, attendons les résultats de sa mise en application avant d'envisager une évolution.

Je demande donc également le retrait du sous-amendement n° 438

M. le président. Monsieur Nogrix, le sous-amendement n° 438 est-il maintenu ?

M. Philippe Nogrix. Oui, monsieur le président, car ma proposition est le fruit d'une analyse que j'ai pu faire avec quelques-uns de mes collègues. Adopter une position d'attente ne peut que mettre en difficulté ceux qui souhaitaient qu'on avance.

Il me paraîtrait plus sain que le ministère de l'intérieur profite de notre sous-amendement pour observer ce qui se passerait au-dessous du seuil de 20 000 habitants afin de savoir s'il est pertinent ou non.

Franchement, la démarche consistant à dire qu'on ne peut pas revenir sur une disposition sous prétexte qu'elle figure dans un texte adopté il y a quelques mois ne me paraît pas très moderne !

A l'heure où les élus locaux se voient chargés d'un nombre toujours plus grand de responsabilités, au fur et à mesure des transferts de compétences vers les collectivités territoriales, il est nécessaire de les aider à assumer ces nouvelles responsabilités ; sinon seules les grosses structures s'en sortiront ! Les petites structures, elles, avant de songer à engager des personnels compétents, doivent se préoccuper d'équilibrer leur budget, et la tâche est de moins en moins facile du fait du gonflement de leurs dépenses. Pourquoi leur en imposer encore de nouvelles ?

Honnêtement, monsieur le secrétaire d'Etat, je ne pense pas que ce sous-amendement soit susceptible de déséquilibrer le texte que nous avons voté en août dernier. Au contraire, il vous permettra de répondre à une attente, voire à une inquiétude. Il ne faut pas trop charger la barque si l'on veut qu'elle aille à bon port !

M. le président. Madame Gourault, l'amendement n° 94 rectifié est-il maintenu ?

Mme Jacqueline Gourault. J'adopte la même position que mon collègue Philippe Nogrix. En effet, je pense comme lui que, si le seuil ne nous paraît pas bon, il est inutile d'attendre plus longtemps pour le modifier.

Je crois aussi, à la différence de M. le secrétaire d'Etat, que le fait de remonter le seuil en ce qui concerne les EPCI favoriserait l'intercommunalité : les petites communes qui constituent une intercommunalité et trouvent ainsi le moyen de se doter d'un service de l'instruction des permis de construire - non pas de leur délivrance, je le précise - ont besoin, au départ, des services de l'Etat pour mettre en place un tel service.

En vérité, la proposition de mon collègue de faire passer le seuil à 20 000 habitants me paraît tout à fait judicieuse et, dans l'espoir que mes collègues la voteront, je maintiens mon amendement, car, si je le retire, le sous-amendement n° 438 n'aura plus d'objet ! (Sourires.)

M. Gérard Delfau. Très bien !

M. Bruno Sido. C'est de la collusion ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Piras, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 438.

M. Bernard Piras. En tant que rapporteur pour avis, au nom de la commission des affaires économiques, du budget de l'urbanisme, j'ai dénoncé à plusieurs reprises le transfert de l'instruction des permis de construire aux villes de plus de 10 000 habitants, qui correspond à un désengagement de l'Etat et à des charges supplémentaires pour les collectivités territoriales.

M. le secrétaire d'Etat a évoqué l'aide que, en la matière, les DDE apportent d'une manière générale aux collectivités et à leurs établissements, mais il admettra que cela ne coûte pas trop cher à l'Etat. En fait, ce à quoi nous assistons, c'est à un amenuisement progressif des missions des DDE.

C'est pourquoi nous voterons ce sous-amendement.

M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam.

M. Gérard Le Cam. Le groupe communiste républicain et citoyen votera également ce sous-amendement.

Nous avons pu constater, ces derniers mois, que les petites collectivités locales devaient financer, notamment, la réalisation des plans locaux d'urbanisme par des bureaux d'études privés. Demain, elles auront à assumer l'instruction des permis de construire.

Tout cela procède du désengagement de l'Etat : on voit ce que cela donne concrètement, sur le terrain, pour les maires des petites collectivités locales disposant de peu de moyens !

M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau.

M. Gérard Delfau. Nous avons toujours été très attentifs, au sein du groupe du Rassemblement démocratique et social européen, mais aussi, me semble-t-il, et depuis très longtemps, au sein du Sénat dans son ensemble, à ce que les petites communes puissent bénéficier de tous les moyens nécessaires - qu'il s'agisse de moyens matériels ou de l'expertise des professionnels - pour administrer leur territoire et servir leurs habitants.

Ce service d'instruction des permis de construire étant assuré traditionnellement par l'Etat, nous voterons le sous-amendement, en espérant que M. le secrétaire d'Etat nous entendra et apportera la caution du Gouvernement.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 438.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 94 rectifié, modifié.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 77 :

Nombre de votants 318
Nombre de suffrages exprimés 318
Majorité absolue des suffrages exprimés 160
Pour l'adoption 167
Contre 151

Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. - M. Gérard Delfau applaudit également.)

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 37 EAA.

M. le président. L'amendement n° 241, présenté par MM. Le Cam,  Billout et  Coquelle, Mmes Demessine,  Didier et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Avant l'article 37 EAA, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« Après l'article L. 35-1 du code des postes et des communications électroniques, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. L... - 1. - Afin de permettre sur l'ensemble du territoire l'accès à Internet haut débit, en provenance ou à destination des points d'abonnement, le câblage en fibre optique sur l'ensemble du territoire est réalisé d'ici à 2010.

« 2. - A cette fin, le ministre chargé des télécommunications désigne les opérateurs chargés d'assurer la réalisation des investissements nécessaires au changement de support du réseau afin d'assurer la couverture de l'ensemble du territoire en fibre optique.

« 3. - L'ensemble des opérateurs de téléphonie fixe et mobile contribuent au financement du plan de câblage en fibre optique, sous la forme d'une redevance annuelle. Cette redevance est calculée au prorata du chiffre d'affaires de chaque opérateur. Elle est indexée sur le coût estimé des investissements dont la programmation s'étend jusqu'à 2010.

« 4. - Cette redevance est versée au fonds de service universel des télécommunications institué par la loi du 31 décembre 2003 relative aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom au paragraphe III de l'article L. 35-3 du présent code. »

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. L'accès au haut débit pour tous et sur tout le territoire d'ici à 2007 : tel est l'objectif que M. Jean-Pierre Raffarin a réaffirmé devant les membres du comité interministériel pour l'aménagement du territoire qui s'est tenu le 14 septembre 2004.

Mais ce n'est pas le seul guide, aussi utile soit-il, rédigé par la délégation aux usages de l'internet et envoyé à l'ensemble des collectivités locales, leur expliquant les possibilités offertes par le haut débit, qui favorisera cet accès.

Ce dont les communes ont besoin, ce n'est pas tant un mode d'emploi que de moyens. Donner des outils sans les accompagner des moyens de s'en servir me paraît choquant.

Si le Gouvernement ne consent pas à aider financièrement les collectivités locales, l'accès au haut débit pour tous relèvera plus d'une belle utopie que d'un objectif réalisable. C'est, en tout cas, le sentiment que les élus de mon département m'ont communiqué et, au-delà de leurs clivages politiques, tous les élus locaux sur l'ensemble de notre territoire se retrouvent sur ce point, me semble-t-il.

Plus que jamais, les communes rurales veulent bénéficier de cette technologie, au même titre que les autres communes et, surtout, dans les mêmes conditions.

L'accès aux technologies de l'information est un enjeu majeur pour les collectivités locales désirant assurer le dynamisme local et l'intégration des jeunes générations. Cet accès est, pour chaque citoyen, synonyme d'ouverture sur le monde. C'est l'occasion de multiplier les échanges, de partager l'information et d'acquérir de nombreuses connaissances.

C'est aussi un enjeu de développement économique. Comme je l'ai dit dans mon intervention lors de la discussion générale, le haut débit est devenu pour les entreprises un outil de travail indispensable. Sans cet outil, les entreprises implantées dans les zones rurales ne sont plus concurrentielles par rapport à celles qui sont installées dans les villes.

Si l'on souhaite maintenir une population hétérogène sur nos territoires, il faut bien évidemment préserver et développer les services publics, mais aussi permettre l'accès au haut débit. Plus qu'une demande, c'est devenu un besoin.

Actuellement, la fibre optique constitue le support à privilégier, car elle s'inscrit dans une logique d'absorption des débits à long terme. Un tel support a aussi l'avantage d'être disponible au plus près de l'abonné, mais les fins techniciens que vous êtes, mes chers collègues, le savaient sans doute déjà...

Par ailleurs, les coûts de maintenance des multiples réseaux actuels, qui font d'ailleurs souvent doublons, sont très certainement supérieurs à l'investissement qui est nécessaire pour mettre en oeuvre, de bout en bout, jusqu'à l'abonné, un réseau de télécommunication à haut débit unique en fibre optique.

Au-delà de l'efficience de ce réseau, ce choix de technologie est aussi un choix politique : il vise à éviter les gâchis financiers et à permettre l'égal accès de tous aux nouvelles technologies de la communication et de l'information.

Cependant, le réseau devenant obsolète, nous proposons que, dans un souci environnemental, de fiabilité et de sécurité, des investissements visant à modifier le support du réseau soient réalisés d'ici à 2010. Nous souhaitons que l'ensemble des opérateurs participe, dans le cadre de la programmation de ces investissements sur plusieurs années, au financement de ces travaux.

Les technologies alternatives ne sont pas à négliger, mais elles doivent s'inscrire dans le cadre d'une cohérence des réseaux autour du service public. Je pense notamment au Wi-Fi, au courant porteur ou encore au satellite, qui peuvent être utilisés en complémentarité.

Cet amendement vise donc tout simplement à permettre au Gouvernement de tenir ses promesses en rendant le haut débit accessible sur l'ensemble du territoire.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. Le présent projet de loi n'est sans doute pas le cadre le plus approprié pour débattre de cet amendement, qui concerne un plan de câblage en fibre optique.

L'accès au haut débit mérite assurément l'attention du législateur, mais le nouvel avatar du plan câble que proposent Mme David et ses collègues n'est sûrement pas le bon moyen pour résorber la fracture numérique. Le législateur a préféré s'y attaquer en offrant de nouvelles libertés locales plutôt qu'en renouant avec un dirigisme dépassé, qui a fait la preuve de son inefficacité.

C'est ainsi que, dans la loi pour la confiance dans l'économie numérique, qui a été adoptée en juin 2004, a été créé, dans le code général des collectivités locales, un nouvel article, l'article L. 1425-1, qui permet désormais aux collectivités territoriales de devenir opérateur de télécommunication.

M. Raymond Courrière. On a autorisé le département à payer !

M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. Celles-ci sont donc désormais entièrement libres de créer leur propre réseau de communication électronique.

Enfin, je rappelle que France Télécom promet de rendre le haut débit accessible à 96 % de la population dès la fin de cette année.

M. Raymond Courrière. Aux frais des contribuables locaux !

M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. C'est la raison pour laquelle la commission demande à Mme David de bien vouloir retirer son amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Frédéric de Saint-Sernin, secrétaire d'Etat. Tout d'abord, madame la sénatrice, le Gouvernement est très sensible au développement des nouvelles technologies dans les territoires.

M. Raymond Courrière. A nos frais !

M. Frédéric de Saint-Sernin, secrétaire d'Etat. L'évolution se fait sur l'ensemble des territoires.

Je rappelle qu'un important dispositif financier a été mis en place sur le plan. Vous le savez, le Gouvernement a mobilisé, dans le cadre des crédits européens, une enveloppe d'un montant de 100 millions d'euros pour abonder le fonds de soutien au développement du haut débit, qui a été créé lors du CIADT de décembre 2003. Ces crédits sont loin d'être consommés. Le CIADT du 14 septembre dernier prévoit de poursuivre cette action notamment dans les zones non couvertes grâce aux initiatives des opérateurs privés, en privilégiant les mairies, les PME et les services publics.

Par ailleurs, nous apportons également notre soutien au développement des technologies alternatives, qui sont plus adaptées aux zones rurales, notamment aux zones peu denses.

En outre, je rappelle que la Caisse des dépôts et consignations a retenu une enveloppe de 225 millions d'euros dans le cadre d'un mandat du CIADT quant au soutien à apporter aux initiatives locales.

Ces mesures, ainsi que l'ouverture à la concurrence et l'efficacité de la régulation, ont permis à la France de se hisser en deux ans - en deux ans seulement, je tiens à le souligner - dans le peloton de tête européen, voire mondial, du haut débit. En effet, nous sommes passés de 500 000 personnes connectées au début de l'année 2002 à plus de 6 millions à la fin de l'année 2004. Aujourd'hui, nous considérons que 90 % de la population a un accès Internet haut débit.

Il me semble donc inutile de câbler l'ensemble des foyers en fibre optique. Les nouvelles générations d'ADSL permettront d'accroître encore le périmètre géographique que nous voulons couvrir.

De plus, l'accès à Internet haut débit ne fait pas partie du service universel au sens des directives européennes « paquet télécoms », qui ont été négociées en 2001 et en 2002 par le précédent gouvernement.

M. Paul Raoult. C'est faux !

M. Frédéric de Saint-Sernin, secrétaire d'Etat. Il n'est donc pas possible d'intégrer le financement du haut débit au fonds de service universel des télécommunications.

Enfin, je voudrais rappeler l'échec cuisant - personne ne me démentira - du plan câble des années 1982 et 1983, qui a absorbé en pure perte des masses considérables d'argent public. La comparaison avec le succès du plan RESO 2007, élaboré par l'actuel gouvernement, devrait amener les auteurs de l'amendement à réfléchir.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Carrère, pour explication de vote.

M. Jean-Louis Carrère. Monsieur le secrétaire d'Etat, je suis quelque peu marri d'entendre un membre du Gouvernement de la République tenir de tels propos.

Vous dites que la précédente présidence de la République se serait fourvoyée et dilapidé les deniers publics en lançant un vaste plan câble et que le gouvernement actuel accomplirait des merveilles avec le plan RESO 2007.

En tant que premier vice-président du conseil régional d'Aquitaine et ayant quelques amis parmi les présidents de conseils généraux d'Aquitaine, que vous connaissez d'ailleurs un peu, monsieur le secrétaire d'Etat, même si c'est moins bien que moi, je me permets de vous rappeler que, sans les collectivités locales, le plan du Gouvernement ne serait certainement pas un succès ! Ce serait un absolu fiasco !

Il faut faire attention, surtout lorsque l'on est membre d'un gouvernement, lorsque l'on se lance dans des déclarations publiques sur le territoire d'une région, où l'on réside parfois. En effet, vous avez fait des annonces quelque peu dangereuses, monsieur le secrétaire d'Etat.

Mais là n'est pas le débat aujourd'hui ; nous en reparlerons en Aquitaine.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Frédéric de Saint-Sernin, secrétaire d'Etat. Monsieur Carrère, je confirme que le plan câble des années quatre-vingt a été un fiasco complet.

M. Jean-Louis Carrère. Vous avez le droit de le dire !

M. Frédéric de Saint-Sernin, secrétaire d'Etat. Je ne mets en cause personne, mais l'on ne peut pas discuter ce point !

M. Pierre Hérisson. C'est clair !

M. Frédéric de Saint-Sernin, secrétaire d'Etat. Par ailleurs, nous avons tous envie de proposer ces nouveaux services aux usagers.

M. Gérard César. Tout à fait !

M. Frédéric de Saint-Sernin, secrétaire d'Etat. Il me semble que chacun doit être concerné par cet engagement. J'ai bien expliqué que, au titre de la réserve de performance des fonds européens, le Gouvernement avait engagé 100 millions d'euros. A cet égard, je serais très étonné que certaines collectivités ne se sentent pas du tout concernées par la mise en oeuvre du haut débit pour tous.

Par ailleurs, en tant que premier vice-président du conseil régional d'Aquitaine, monsieur Carrère, vous m'avez mis en cause sur la question très concrète de la téléphonie mobile.

Dans le département de la Dordogne, que vous avez semblé évoquer, s'agissant de la couverture des zones blanches en téléphonie mobile, notre cher conseil général - et je tiens à saluer ici l'un de ses membres éminents, M. Mortemousque - a indiqué au mois d'août dernier, en accord avec le préfet, qu'il faudrait 1,5 million d'euros pour mettre en place le plan prévu. Le Gouvernement, par l'intermédiaire du préfet, a fait savoir qu'il tiendrait ses engagements, qui portent sur 30 % de l'investissement.

Veuillez m'excuser, mesdames, messieurs les sénateurs, d'apporter toutes ces précisions, car, je le sais, ce n'est pas ici le lieu pour en discuter, mais je suis obligé de répondre à M. Carrère.

Le premier vice-président du conseil général, qui est chargé des nouvelles technologies de l'information et de la communication, a ensuite annoncé dans la presse, au mois de novembre, qu'il faudrait 6 millions d'euros pour couvrir le territoire concerné, et il s'est demandé quel serait l'engagement de l'Etat. Le président du conseil général, qui a été à la fois un peu moins prolixe et un peu plus précis, a indiqué que le plan visant à couvrir toutes les zones blanches de la Dordogne représenterait de 4 millions ou 4,5 millions d'euros.

Pour ma part, samedi dernier, j'ai confirmé que l'Etat maintenait son engagement portant sur les 30 %. Pourtant, 30 % de 1,5 million d'euros, montant négocié au mois d'août, ce n'est pas la même chose que 30 % de 4,5 millions d'euros ! Néanmoins, je le répète, en Dordogne, l'Etat respectera son engagement. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à M. François Fortassin, pour explication de vote.

M. François Fortassin. J'aimerais dépasser les frontières de l'Aquitaine pour aller dans la région Midi-Pyrénées, voire dans d'autres régions.

M. le président. Nous n'allons tout de même pas faire le Tour de France ! (Sourires.)

M. François Fortassin. En effet, monsieur le président, d'autant que ne sommes pas dans la saison adéquate : les cols étant fermés, nous ne pourrions faire que des étapes de plaine ! (Nouveaux sourires.)

M. Raymond Courrière. C'est M. le secrétaire d'Etat qui a commencé !

M. Frédéric de Saint-Sernin, secrétaire d'Etat. Absolument pas !

M. Raymond Courrière. M. Carrère, lui, n'a pas parlé de la Dordogne !

M. François Fortassin. On nous annonce que 95 % de la population bénéficiera de l'ADSL. Je suis d'un des départements dits « innovants » qui ont signé le plan avec France Télécom. Mais ce que je reproche au Gouvernement, c'est de ne pas avoir été suffisamment offensif dans ce domaine. Aujourd'hui, on le sait, 20 % de la population vit sur environ 80 % du territoire. Cela signifie qu'on laisse d'immenses zones blanches !

Au-delà de cet aspect, se pose un problème de solidarité. On ne demande rien aux zones et aux départements à forte concentration de population et qui ont donc des moyens financiers plus substantiels.

M. Gérard Delfau. Et voilà !

M. François Fortassin. Les collectivités n'auront pas à intervenir dans ces zones, qui seront de toute façon couvertes.

A contrario, dans les départements à faible population ou les zones les plus les plus pauvres, si les collectivités veulent l'ADSL, elles devront payer !

MM. Michel Moreigne et Thierry Repentin. C'est vrai !

M. François Fortassin. On ne peut pas accepter cette situation ! C'est une solidarité à l'envers, du plus pauvre vers le plus riche ! Telle n'est pas, vous le comprendrez, notre conception des choses.

S'agissant de la téléphonie mobile, domaine auquel M. le secrétaire d'Etat a fait allusion, c'est encore pire ! Les opérateurs se livrent à une véritable supercherie lorsqu'ils affirment qu'ils ont fait leur travail dès lors qu'un point d'une commune est desservi. Ce n'est rien d'autre qu'un énorme mensonge ! Dans un certain nombre de communes, c'est vrai, vous pouvez téléphoner, mais à condition d'être sur le parvis de l'église.

M. Bruno Sido. De la mairie !

M. François Fortassin. Faut-il donc être obligé d'aller à l'église pour téléphoner ? (Sourires.)

M. Jean-Louis Carrère. Chez nous, il n'y a pas d'église partout ! (Nouveaux sourires.)

M. François Fortassin. On comprend fort bien qu'il puisse y avoir un décalage dans le temps, mais ne laissons pas croire à la population que 95 % du territoire sera desservi. Ce n'est pas vrai et il faut rétablir la vérité ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. Bruno Sido.

M. Bruno Sido. Madame David, votre amendement est séduisant. En effet, la question se pose, et singulièrement dans nos territoires ruraux.

Toutefois, je ne peux pas être d'accord avec ce discours quelque peu misérabiliste des uns et des autres.

D'une part, nous avons ferraillé, moi et quelques autres, pour faire adopter l'article L. 1425-1 du code général des collectivités locales. Si j'ai bien compris, à l'époque, tout le monde a voulu donner des responsabilités aux collectivités. Celles-ci les ont prises ou non. Les conseils généraux sont, me semble-t-il, idoines en la matière pour s'occuper de tels dossiers ; certains l'ont fait.

Le département de la Haute-Marne, dont la population n'est pas très nombreuse, a, quant à lui, saisi le problème à bras-le-corps. Nous avons effectivement dû mettre la main à la poche - au demeurant, la somme était relativement modeste -mais, monsieur Fortassin, lorsqu'on veut mener une politique volontariste, n'est-ce pas nécessaire pour avancer ? Ainsi, à la fin de l'année, 97 % de la population de la Haute-Marne aura accès à l'ADSL.

M. Raymond Courrière. Sur tout le territoire du département ?

M. Bruno Sido. Peut-on appeler cela « haut débit » ? C'est une autre discussion. Je crois qu'il y a effectivement là un véritable problème.

Par ailleurs, je crois qu'il convient d'éviter les erreurs du plan câble, comme l'a dit M. le secrétaire d'Etat, car il a été un échec cuisant,...

M. Raymond Courrière. Celui des technocrates !

M. Bruno Sido. ... singulièrement, d'ailleurs, pour le contribuable.

Il existe aujourd'hui des technologies alternatives qui fonctionnent : le satellite, le Wi-Fi et bientôt le Wimax, ou encore bien d'autres possibilités. Et la « paire de cuivre » n'a d'ailleurs pas dit son dernier mot !

M. Jean-Louis Carrère. Dans dix ans, il y aura encore autre chose !

M. Bruno Sido. Enfin, il ne faut surtout pas se tromper de problème ni inverser les facteurs. Ce qui permettra de développer l'ADSL ou plutôt le haut débit partout, c'est tout d'abord la concurrence, et le Gouvernement y travaille ; il faut d'ailleurs l'en remercier, car c'est véritablement elle qui incitera les opérateurs à aller le plus loin sur tout le territoire. Mais c'est aussi et surtout l'usage que les gens feront de cette technologie qui favorisera son développement.

A l'occasion des réunions cantonales que nous organisons en Haute-Marne, je constate qu'il ne suffit pas que le haut débit soit accessible partout ; encore faut-il que les gens s'en servent.

Madame David, si vous aviez présenté un amendement tendant à développer les usages, à inciter les jeunes et peut-être surtout les moins jeunes à se servir du haut débit, bref, à accroître le nombre d'usagers, ç'aurait été beaucoup plus judicieux. Car, s'il y a des usagers, les opérateurs ne manqueront pas de couvrir d'eux-mêmes, sans aucune subvention, les territoires concernés. Voilà, me semble-t-il, ce pour quoi nous devrions nous mobiliser ensemble. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 241.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 271, présenté par MM. Le Cam,  Billout et  Coquelle, Mmes Didier,  Demessine et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Avant l'article 37 EAA, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Afin de permettre sur l'ensemble du territoire l'accès aux nouvelles technologies de communication et d'information (internet haut débit, téléphonie mobile), il est institué un fonds national de péréquation territoriale des télécommunications. Ce fonds a pour but de répondre aux exigences de financement du maillage territorial en nouvelles technologies de la communication et de l'information, dans les zones rurales principalement.

Ces ressources financières proviennent du fond de service universel des télécommunications institué par la loi du 31 décembre 2003 relative aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom.

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Cet amendement tend également à la création d'un maillage technologique permettant l'accès de tous et sur tout le territoire aux nouvelles technologies de communication et d'information : Internet, bien sûr, mais aussi la téléphonie mobile, dont il vient d'être question.

Cette fois-ci, il s'agit de créer un fonds national de péréquation afin d'apporter une aide financière aux collectivités territoriales des zones rurales qui souhaitent s'équiper de ces nouvelles technologies. En quelque sorte, je vous propose, monsieur le secrétaire d'Etat, de donner aux collectivités locales les moyens d'utiliser les outils de votre texte.

Au-delà de l'enjeu économique que constitue l'accès à ces technologies pour les communes rurales et sur lequel le débat a porté il y a un instant, je veux également me faire l'écho de l'enjeu démocratique.

La communication et l'information ne sont pas des marchandises : elles sont constitutives de notre démocratie. Une telle exigence sociale suppose donc que ces infrastructures demeurent la propriété de la collectivité et que les services afférents soient assurés par la solidarité nationale.

Le fonds de service universel des télécommunications institué par la loi du 31 décembre 2003 constitue le support idéal pour instaurer un véritable service public des télécommunications.

Par ailleurs, les travaux menés sur la diffusion du haut débit, notamment par le Conseil économique et social - rapport de juin 2001 - ou par l'Observatoire des télécommunications dans la ville - rapport du groupe rural présidé par le président de la fédération nationale des maires ruraux, publié en mars 2002 -, établissent le même constat : laissé à la seule dynamique du marché, l'essor du haut débit conduirait, d'ici à quelques années, à une polarisation accrue, laissant une part importante de la population et des territoires dépourvue d'accès au haut débit, ce qui va à l'inverse de ce qui vient d'être dit par M. Sido.

L'Etat, plus que jamais, doit jouer son rôle et pallier la carence de l'initiative privée, comme le préconise le rapport du Conseil économique et social, selon lequel « seule une action volontariste de l'Etat permettra à notre pays d'entrer résolument, et de façon équitable pour tous, dans la société de l'information ».

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. Un tel fonds relève, à l'évidence, du débat sur les relations financières entre l'Etat et les collectivités locales dans le cadre d'un projet de loi de finances. C'est pourquoi la commission émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Frédéric de Saint-Sernin, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement émet le même avis pour les mêmes raisons.

M. le président. La parole est à M. Pierre Hérisson, pour explication de vote.

M. Pierre Hérisson. Je tiens à rassurer Mme David : il existe un fonds de péréquation postale, que j'ai l'honneur de présider et qui travaille actuellement à l'élaboration d'une nouvelle convention pour les agences postales communales et aux conditions d'une meilleure rémunération des « points postes ».

Au demeurant, ce débat a eu lieu à l'Assemblée nationale la semaine dernière...

M. Raymond Courrière. Cela n'a rien à voir !

M. Pierre Hérisson. ... et vous aurez tout loisir, ma chère collègue, d'évoquer le sujet dès le 8 mars puisque, à cette date, nous allons débattre, en deuxième lecture, de la transposition de la directive postale.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 271.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 250, présenté par MM. Le Cam,  Billout et  Coquelle, Mmes Demessine,  Didier et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Avant l'article 37 EAA, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I - Après l'article L. 1511-5 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. L. ... - I. - Afin de favoriser le maintien ou l'implantation d'un commerce de proximité dans les communes de moins de mille habitants, il est institué un revenu minimum de maintien d'activité.

« Ce revenu varie en fonction du bénéfice dégagé par l'activité commerciale. Le revenu minimum de maintien d'activité vient compléter le bénéfice réalisé par le commerce, il est revu à la baisse à due concurrence lorsque, additionné au bénéfice commercial, il porte le revenu mensuel net du commerce au-delà de 1 016 euros.

« Le montant maximal de ce revenu est fixé au niveau actuel du Revenu Minimum d'Insertion.

« II - Les personnes susceptibles de bénéficier du revenu minimum de maintien d'activité adressent leur demande à la commission départementale d'équipement commercial, chargée de statuer.

II- La perte de recettes résultant des dispositions ci-dessus est compensée à due concurrence par le produit d'une taxe additionnelle à la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat.

La parole est à M. Gérard Le Cam.

M. Gérard Le Cam. Cet amendement est issu de la proposition de loi tendant à préserver les services de proximité en zone rurale que j'avais déposée et qui a été examinée en séance publique en 2003.

Le dispositif proposé visait à accorder un complément de revenus pérenne aux petits commerçants qui souhaitaient maintenir, reprendre ou implanter un commerce de proximité dans les petites communes de moins de mille habitants, et ce en fonction des résultats dégagés par l'activité. Il avait plusieurs avantages.

A la différence des autres mesures, le soutien s'inscrivait dans la durée sans pour autant être permanent si une dynamique s'enclenchait.

Par ailleurs, dans cette période d'orthodoxie budgétaire, il permettait de ne pas grever les finances publiques puisqu'il sollicitait les excédents de la taxe d'aide aux commerces et à l'artisanat, la TACA.

Il s'agissait, dans un souci de solidarité interprofessionnelle, de faire contribuer la grande distribution au soutien du petit commerce. Il s'agissait également de réorienter l'utilisation du montant de la TACA, désormais budgétisée, vers sa vraie destination, à savoir l'aide aux petits commerces.

Constatant que les lois Galland et Raffarin n'ont stoppé ni la saignée du petit commerce ni la course à l'agrandissement des grandes et moyennes surfaces, je continue de penser qu'un tel dispositif constitue la condition sine qua non de la viabilité du petit commerce : il tient compte de la difficulté à maintenir un commerce ou de se lancer dans une nouvelle activité commerciale dans les zones rurales en voie de désertification, et tout particulièrement dans les collectivités de moins de 400 habitants.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. Cet amendement tend à instaurer un revenu minimum. Comme en première lecture, la commission a émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Frédéric de Saint-Sernin, secrétaire d'Etat. Monsieur Le Cam, un certain nombre de dispositifs existent déjà afin de favoriser le maintien ou même la création de commerces de proximité.

La loi relative aux libertés et aux responsabilités locales permet à une commune d'accorder des aides pour assurer le maintien des services nécessaires à la satisfaction des besoins de la population en milieu rural lorsque l'initiative privée est absente, voire simplement défaillante.

L'Etat apporte également un soutien à travers le FISAC, le fonds d'intervention pour la sauvegarde, la transmission et la restructuration des activités commerciales et artisanales. Ce fonds permet de promouvoir certaines actions individuelles ou collectives. Ainsi une commune peut bénéficier d'un financement pour l'achat de locaux d'activité. De même, un particulier pourra fournir une aide notamment à la modernisation d'une activité ou à la sécurisation de cette activité.

Par ailleurs, un soutien financier pourra également être apporté aux communes à ce titre dans le cadre de la dotation globale d'équipement ou de la dotation de développement rural.

Il me paraît donc inutile de créer un dispositif particulier et le Gouvernement émet un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel, pour explication de vote.

M. Pierre-Yvon Trémel. Je suis très heureux que Gérard Le Cam fasse preuve de persévérance et revienne sur l'une de ses propositions qui nous avait fourni l'occasion d'un bon débat sur le commerce en milieu rural.

Votre réponse, monsieur le secrétaire d'Etat, ne peut nous satisfaire.

Observons la situation de beaucoup de nos communes. Nous sommes ici nombreux à connaître le cas de villages de moins de 500 habitants où l'on se bat pour maintenir le dernier commerce en milieu rural ou pour en réimplanter un.

Certes, il existe des aides à l'investissement. Acquérir un immeuble, le rénover, le mettre aux normes, etc., tout cela peut être réalisé grâce à un partenariat avec l'Etat, les collectivités, régionale ou départementale, voire, désormais, les intercommunalités. Cependant, faire vivre un commerce reste très difficile.

En l'occurrence, les problèmes auxquels on a à faire face ne sont pas uniquement d'ordre financier. Dans ces communes, ce n'est pas seulement l'offre de biens ou de services qui est en cause : il faut également tenir compte d'un aspect social très important.

La proposition de loi qui avait été déposée par Gérard Le Cam ouvrait la possibilité de maintenir un commerce, avec un examen très transparent des comptes, et présentait l'avantage de ne pas avoir d'incidences financières très lourdes.

C'était une bonne idée, et je suis sûr que l'on y reviendra un jour. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 250.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 266, présenté par MM. Le Cam,  Billout et  Coquelle, Mmes Didier,  Demessine et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Avant l'article 37 EAA, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

A compter de la publication de la présente loi et jusqu'au 31 décembre 2007, est suspendue, dans les communes de moins de 2 500 habitants, toute suppression ou réorganisation des services publics dépendant ou sous la tutelle de l'Etat.

La parole est à M. Gérard Le Cam.

M. Gérard Le Cam. Cet amendement devrait faire l'unanimité, certains de mes collègues ayant déposé une proposition de loi comportant précisément une telle disposition.

La remise en cause de nos services publics, notamment dans les petites communes, n'est pas acceptable. Elle contribue à la désertification de notre territoire.

Cet amendement tend à instaurer un moratoire, jusqu'à la fin de l'année 2007, des fermetures de services publics dans les communes de moins de 2 500 habitants.

Un tel moratoire devrait nous permettre de poser les vraies questions et de demander la renégociation des directives européennes libérales, comme la directive postale dont la transposition était en discussion la semaine dernière à l'Assemblée nationale.

Les inquiétudes du monde rural sont extrêmement vives face à la fermeture des bureaux de poste et, plus globalement, face à la disparition des services publics. La libéralisation et la déréglementation imposées par Bruxelles se traduisent par la privatisation de nos grandes entreprises de services publics, EDF-GDF, France Télécom et bientôt La Poste, avec, à la clé, des milliers de suppressions d'emplois.

Le service universel, conception bruxelloise de nos services publics, ne peut répondre aux besoins essentiels des populations. Les missions de service public sont réduites a minima tandis que les opérateurs privés s'accaparent des niches de rentabilité.

Les mouvements sociaux se multiplient aujourd'hui pour que l'on cesse cette casse de nos services publics ! Il faut les entendre. Il devient urgent de stopper le mouvement de privatisation de nos services publics décidé par la commission européenne et dans le cadre de l'accord général sur le commerce des services.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. L'article 37 F, que nous allons bientôt aborder, répond au moins en partie à la préoccupation de notre collègue Gérard Le Cam. C'est pourquoi la commission a émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Frédéric de Saint-Sernin, secrétaire d'Etat. Même avis.

Monsieur Le Cam, nous avons comme vous le souci de maintenir durablement des services publics de qualité, efficaces et modernes. Nous devons tenir compte du contexte global dans lequel ils s'inscrivent, qu'il s'agisse des évolutions démographiques, des projets techniques ou encore des attentes nouvelles des usagers.

Ainsi, le mariage territorial des services publics doit être analysé en tenant compte des apports permis par l'utilisation des moyens modernes de communication.

Je tiens à souligner une nouvelle fois l'effort que nous avons engagé en faveur du monde rural, qu'il s'agisse de la couverture en téléphonie mobile ou de la desserte Internet à haut débit.

Je veux également mettre l'accent sur le plan d'administration électronique, qui permet d'effectuer un nombre croissant de démarches en ligne et qui, je crois, satisfait les usagers.

L'évolution démographique sur le territoire est également un paramètre essentiel. Le développement très rapide de petites communes dans les zones périurbaines peut faire apparaître un déséquilibre entre la répartition de l'offre et la demande de services.

Enfin, on le sait bien, l'ouverture progressive à la concurrence de certains services publics doit être préparée pour que les opérateurs français puissent affirmer leur capacité à répondre aux attentes nouvelles qui leur sont adressées.

Dans ce contexte en pleine évolution - on peut le regretter mais c'est la réalité -, je suis convaincu qu'un moratoire ne ferait que geler des situations locales et en reporter le traitement dans le futur, c'est-à-dire après 2007. Cela contribuerait probablement, à terme, à déstabiliser encore plus les communes rurales.

A mon avis, en ce qui concerne les services publics, l'immobilisme ne fait qu'affaiblir davantage les territoires. Nous avons plutôt intérêt à préparer ces évolutions et à renforcer le principe même de la concertation. Nous en reparlerons lors de l'examen de l'article 37 F, ainsi que l'a dit le président de la commission des affaires économiques.

Il me semble que, en première lecture, le débat nous avait permis d'aboutir à une solution qui recueillait un large assentiment.

Quoi qu'il en soit, vouloir freiner ce mouvement aujourd'hui ne peut, à terme, qu'accélérer les déséquilibres en termes de présence des services publics en milieu rural.

M. le président. La parole est à M. Pierre Hérisson, pour explication de vote.

M. Pierre Hérisson. Nous partageons tous l'inquiétude qu'a formulée notre collègue Gérard Le Cam. Toutefois, les propositions qui ont été avancées et les propos qu'a tenus le président de la commission des affaires économiques sont de nature à démontrer qu'il faut sans doute s'assurer de la mise en place d'un dialogue qui permette de faire évoluer les services publics.

Mais de grâce, ne revenons pas à la formule du moratoire. Les services publics  ont failli mourir des moratoires successifs de 1981, 1988 et 1995 ! Nous sommes un certain nombre à en être convaincus et nous devons le dire haut et fort ! Vous avez raison, monsieur le secrétaire d'Etat : le gel serait le plus mauvais service que l'on pourrait rendre à nos concitoyens.

Il est urgent d'écouter nos concitoyens, qui sont les usagers du service public et les clients des services publics à caractère économique, afin de savoir précisément ce qu'ils souhaitent pour l'avenir. Ce sont eux, selon moi, les oubliés du système !

M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam.

M. Gérard Le Cam. Je ne peux pas laisser dire que ce sont les moratoires qui ont tué les services publics. Nous savons tous très bien ici que c'est l'ouverture à la concurrence à l'échelle européenne qui les a tués !

Certes, le moratoire pourrait être plus court, mais il faudrait vraiment que, pendant qu'on fait mine de discuter, d'organiser la concertation avec les préfets, les associations des maires, etc., nous n'assistions pas à des fermetures de classes, de bureaux de poste, de maternités. Il est en effet inadmissible de voir la casse du service public se poursuivre et se pérenniser !

M. Gérard Delfau. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle.

M. Alain Vasselle. Les propos de Gérard Le Cam et de Pierre Hérisson me rappellent la réunion que j'ai organisée hier soir avec une quarantaine de maires de communes rurales et le secrétaire général de la préfecture de mon département, au cours de laquelle a été évoqué le maintien des services publics.

A cette occasion, le secrétaire général de la préfecture a déclaré que, en ce qui concerne La Poste et les services publics en général, il allait instaurer une concertation très étroite avec les élus avant que soit prise toute décision d'évolution du service, quelle que soit la nature de ce dernier. J'en ai alors conclu qu'il acceptait la mise en place d'une sorte de moratoire. Le secrétaire général s'est récrié : « Ne parlons pas de moratoire ! Il n'est pas question de moratoire ! » Je lui ai répondu que peu importait comment il appelait cela, car, pour les élus, seul le résultat comptait !

Le plus important, et je voudrais que le Gouvernement et mes collègues de la Haute Assemblée en prennent acte, est que soit pris solennellement l'engagement de ne pas adopter de mesures relatives à l'évolution de ces services publics, qu'il s'agisse d'adaptations ou de fermetures, sans qu'ait été menée au préalable une concertation avec les élus des communes ou des intercommunalités sur le territoire desquelles se trouvent ces services publics.

M. Alain Vasselle. En effet, nous ne pouvons plus accepter le comportement de directeurs départementaux de La Poste comme celui de l'Oise, pour qui la concertation se limite à une simple information. Ils se contentent de rencontrer le maire et de lui annoncer qu'il a été décidé de transformer le bureau de poste de sa commune en agence postale ou en « point poste ». Deux maires de mon département ont fait état d'un tel comportement.

Si l'évolution du service public n'est pas précédée d'une concertation avec les élus, qu'on ne parle pas de concertation ! Car les élus sont mis devant le fait accompli !

La semaine dernière, j'ai organisé, en tant que président de l'association départementale des maires, une réunion des maires de mon département avec le directeur départemental de La Poste. Environ cent cinquante maires étaient présents. J'aurais aimé que M. Devedjian ou un autre ministre y assiste pour écouter leurs témoignages. Ils étaient assez révélateurs du comportement de l'administration et de l'Etat à l'échelon territorial ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

MM. Jean-Louis Carrère et Raymond Courrière. Très bien !

M. Alain Vasselle. Je vous ai fait part de l'échange qui a eu lieu hier soir et des échos qui étaient venus jusqu'à moi, pour témoigner des problèmes auxquels nous sommes confrontés sur le terrain.

Pour autant, que l'on ne me fasse pas dire que l'évolution du service public n'est pas nécessaire. Elle l'est absolument !

M. Raymond Courrière. Elle est nécessaire dans la concertation !

M. Alain Vasselle. Il faut vivre avec son temps et prendre en compte l'ensemble des nouvelles technologies qui permettent de faire fonctionner autrement les services publics.

M. le président. La parole est à M. Dominique Mortemousque.

M. Dominique Mortemousque. Cette discussion me surprend.

Gérard Le Cam a raison sur un point : il est important de se préoccuper des territoires. Mais le Sénat, faisant ainsi une nouvelle fois la preuve de sa sagesse, a investi le préfet d'une mission précise en le chargeant d'entendre les élus avant tout changement concernant les services publics.

M. Raymond Courrière. Il n'a pas de moyens !

M. Jean-Louis Carrère. Il n'a pas un sou !

M. Dominique Mortemousque. Il y a tout de même là un élément nouveau qu'on ne peut ignorer.

Nous avons commencé aujourd'hui nos travaux par l'examen d'un amendement présenté par Mme Gourault et dont M. le secrétaire d'Etat a demandé le retrait dans la mesure où il lui paraissait utile d'attendre quelques mois avant de trancher le problème en cause, à la lumière de l'expérience acquise entre-temps. Le Sénat a néanmoins souhaité qu'il soit tranché sur-le-champ. Et pourtant, la Haute Assemblée incarne la sagesse, elle sait qu'il vaut toujours mieux prendre des décisions en toute connaissance de cause, etc. (M. Raymond Courrière s'exclame.)

Et voilà maintenant qu'il faudrait décréter un moratoire jusqu'en 2007 ! J'avoue être choqué.

Des discussions ont lieu actuellement - c'est le cas dans mon département - avec les maires, le préfet ou le secrétaire général des services afin que, avant tout réaménagement, les préoccupations locales soient prises en considération. Cela me paraît répondre aux souhaits des élus de ce pays. (Applaudissements sur certaines travées de l'UMP.)

M. Jean-Louis Carrère. Ce n'est pas vrai !

M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau.

M. Gérard Delfau. Notre collègue Gérard Le Cam, avec son opiniâtreté que je salue, relance un débat qui a eu lieu au Sénat à plusieurs reprises. Mais force est de constater que la Haute Assemblée s'est trouvée largement impuissante, sous des gouvernements successifs,...

M. Hubert Falco. Très bien !

M. Gérard Delfau. ...à organiser une réévaluation, une modernisation et en même temps un renforcement de la présence de tous les services publics. (M. Pierre Hérisson applaudit.) Ne vous réjouissez pas trop vite, mon cher collègue !

En effet, il faudrait que ces débats aient lieu non seulement ici au Sénat, mais aussi à l'échelle des associations d'élus, du Gouvernement et des représentants des entreprises publiques ou des administrations, afin que les modalités d'évolution, et parfois de financement, soient discutées en commun.

Cela étant, et c'est pour cela que je demandais à l'un de nos collègues de la majorité de ne pas manifester trop promptement sa satisfaction, ce qui se passe aujourd'hui est sans commune mesure avec ce qui se passait voilà quelques années.

M. Alain Fouché. Si, c'est exactement pareil !

M. Gérard Delfau. Aujourd'hui, des fermetures ont lieu dans tous les secteurs. Elles s'accompagnent en outre d'un comportement méprisant de certains représentants de l'administration qui est une insulte - je pèse mes mots - pour les élus locaux et le Parlement.

M. Gérard Delfau. On a cité La Poste ; j'évoquerai pour ma part les services déconcentrés des finances. Dans mon département, c'est une perception sur trois qui aura été fermée en deux ans ! Bien sûr, chaque annonce de fermeture est systématiquement assortie de la promesse, fallacieuse, d'une amélioration des services.

En tant que maire, et comme tous mes collègues, je constate que ce regroupement se fait avec trop peu de moyens humains. D'ailleurs, le responsable local, en l'occurrence le receveur, avoue à mi-voix qu'il ne peut assumer la charge de travail qui lui a été confiée.

M. Gérard Delfau. Telle est la situation actuelle, nous le savons tous. Alors, nous pouvons nous amuser à dire : « Aujourd'hui, c'est ce gouvernement ; hier, c'était l'autre ». Si nous continuons ainsi, le débat aura bientôt cessé parce que les services publics auront disparu ! Il n'y en aura plus ni en milieu rural ni dans les quartiers urbains excentrés ou sensibles : ceux qui resteront seront concentrés dans les villes, les centres urbains et, parce que c'est commode, dans les zones de chalandise.

Je m'en tiendrai là pour l'instant, mais je dirai tout à l'heure ce que je pense du fameux fonds de péréquation qui nous est annoncé pour La Poste et avec lequel l'on essaie de nous endormir. Sachez, cher collègue Hérisson, que nous ne sommes pas dupes !

M. le président. La parole est à M. François Fortassin.

M. François Fortassin. Je ne ferai que quelques très brèves remarques pour ne pas répéter ce qu'ont dit mes collègues, sur toutes les travées, d'ailleurs.

Premièrement, si l'on considère qu'un service public doit être rentable, cela signifie qu'il faut en faire disparaître 80 %.

Deuxièmement, cessons de dire que l'administration fait de la concertation avec les élus.

M. Raymond Courrière. Oui, c'est faux !

M. François Fortassin. C'est une farce monumentale ! Car voici comment les choses se passent. Un haut fonctionnaire se rend dans un chef-lieu de canton pour y exposer le plan aux élus locaux et ceux-ci, par courtoisie, l'écoutent. A l'issue de cette présentation, il leur explique que rien n'est fait et qu'ils seront consultés de nouveau. De retour au chef-lieu du département, il déclare alors : « C'est fait, la concertation avec les élus a eu lieu. Personne n'a manifesté d'opposition. Par conséquent, tout le monde est d'accord sur ce qui a été proposé. »

C'est là une curieuse conception de la concertation !

Enfin, monsieur le secrétaire d'Etat, lorsque la représentation nationale s'exprime de façon, sinon unanime, du moins largement consensuelle, si vous ne voulez pas vous retrouver « sur le bord de la route », essayez de l'écouter, plutôt que d'écouter les technocrates. J'ai pour ces derniers la plus grande admiration, mais je sais aussi qu'eux n'ont pas la légitimité que donne le suffrage universel !

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.

M. Pierre-Yvon Trémel. Voilà quelques mois, s'est déroulé dans cette Haute Assemblée un débat très intéressant dont Gérard Larcher avait pris l'initiative et qui portait sur l'avenir des services publics. Tous les groupes se sont exprimés et un certain nombre de pistes ont été tracées. Où en sommes-nous aujourd'hui ?

Je partage l'opinion qui a été émise tout à l'heure : les départements ruraux n'ont jamais connu auparavant la situation qui est aujourd'hui la leur ; tout le spectre des services publics est concerné.

Il est vrai qu'il existe plusieurs dictionnaires de référence, mais je ne suis pas sûr que ce soit la raison pour laquelle le mot concertation n'a pas le même sens pour tout le monde ! (Sourires.)

Certaines questions préalables, pourtant fort simples, n'ont pas été réglées : aujourd'hui, quel rôle souhaitons-nous voir jouer à l'Etat ? Quel cahier des charges voulons-nous imposer pour que les services publics soient réellement présents sur tout le territoire et que l'ensemble de nos concitoyens y ait un égal accès ?

Le présent amendement vise à l'instauration d'un moratoire. Je comprends bien les intentions de ses auteurs, mais, malheureusement, je ne puis qu'approuver l'objection qui a été soulevée tout à l'heure : de moratoire en moratoire, le traitement des questions de fond est sans cesse repoussé.

Des expériences sont, paraît-il, menées dans quelques départements. Quels résultats ces tests donnent-ils ? Comment l'usager s'y retrouve-t-il ?

Il est temps de répondre à ces diverses questions, car il n'est plus possible de reporter à plus tard les solutions de fond.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Frédéric de Saint-Sernin, secrétaire d'Etat. Je me permets de rappeler à M. Vasselle et à M. Fortassin qu'en première lecture fut adopté ici même un amendement visant à ce que, désormais, le préfet puisse engager la concertation : quel que soit le débat sémantique auquel il peut prêter, le mot figure donc bel et bien dans la loi.

Certes, dans le passé, certaines paroles ont peut-être été mal venues. Il se peut que, sur le terrain, dans certains départements, il n'y ait pas eu de réelle concertation. Je suis néanmoins persuadé que, grâce à votre initiative, mesdames, messieurs les sénateurs, les choses vont avancer.

C'est pourquoi je ne puis laisser M. Fortassin dire que je me trouve « tout seul au bord de la route » : finalement, je partage l'opinion qu'a exprimée la Haute Assemblée lors de la première lecture.

Nous disposons, d'ores et déjà, grâce à ce qu'a décidé le Sénat en première lecture, d'un garde-fou. J'estime que les mots ont un sens et que nous serons mieux armés qu'auparavant pour faire face aux difficultés qui se pourraient se poser au plan local.

Je partage l'avis selon lequel instaurer un moratoire ne ferait que repousser à une échéance ultérieure la recherche d'une solution à un problème auquel nous devons nous attaquer sans plus tarder afin de permettre, dans la concertation, l'adaptation de nos services publics. (MM. Dominique Mortemousque et Pierre Hérisson applaudissent.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 266.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Art. additionnels avant l'art. 37 EAA
Dossier législatif : projet de loi relatif au développement des territoires ruraux
Art. 37 EA

Article 37 EAA

L'article L. 1 du code des postes et des communications électroniques est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Hormis les envois de correspondance en nombre, les services postaux constituant le secteur réservé sont proposés au même tarif de base sur l'ensemble du territoire national. »

M. le président. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou, sur l'article.

M. Aymeri de Montesquiou. Il faut toute la force de la loi pour garantir le principe d'unicité du tarif de base exigé par tous les élus ruraux et par tous les citoyens de ces territoires. Sur un tel sujet, le niveau réglementaire n'est pas suffisant.

Sauvegarder ce principe, c'est s'inscrire dans la continuité républicaine d'une disposition sur le tarif postal unique adoptée le 24 août 1848 sur la proposition d'Etienne Arago.

La disposition proposée aujourd'hui a toute sa place dans un texte visant au développement des territoires ruraux, et ce pour trois raisons.

Tout d'abord, en dépit des nouveaux moyens de communication - téléphones portables, Internet, SMS - rien ne saurait se substituer aux services postaux, qui sont d'indispensables outils de communication, en particulier sur le plan humain. Le maintien de l'unicité tarifaire est la meilleure garantie de leur pérennité.

Ensuite, tous ceux qui parmi nous sont des élus des zones rurales connaissent la difficulté, le temps et la compétence que demande l'acheminement du courrier jusque dans tel hameau, telle maison reculée : nous exigeons le maintien de ce lien pour tous nos administrés et dans des conditions identiques.

Nous savons donc combien est précieux l'existence de l'unicité des tarifs pour nos zones rurales.

Enfin, il est essentiel d'affermir ce principe face à la libéralisation du secteur postal enclenchée sous le gouvernement Jospin. Je rappelle que la directive du 15 décembre 1997 « concernant des règles communes pour le développement du marché intérieur des services postaux de la Communauté et l'amélioration de la qualité du service » a fixé un seuil de prix et de poids à partir duquel la concurrence s'exerce.

Ce seuil a été régulièrement abaissé depuis. C'est ainsi que la directive du 10 juin 2002, qui fut donc largement préparée par le gouvernement précédent, a ramené le seuil du service réservé à 100 grammes et trois fois le tarif de base à partir du 1er janvier 2003 et à 50 grammes et deux fois et demie le tarif de base à partir du 1er janvier 2006.

Ce service réservé rétrécit comme une peau de chagrin, et, à partir de 2009, la concurrence s'exercera probablement sur l'ensemble du courrier. Il est à craindre que les objectifs de rentabilité n'excluent une partie du territoire, en particulier les zones rurales.

Autant je soutiens la réforme de l'organisation de la présence postale lorsqu'elle permet d'offrir un meilleur service au public, autant je m'inquiète de la libéralisation totale et de la disparition annoncée du secteur réservé pour les courriers de base. Je crains que les habitants des zones les plus fragiles, en premier lieu ceux des zones rurales, ne soient affectés directement et contraints, dans un proche avenir, de payer bien plus que certains de leurs compatriotes pour le même service.

J'approuve donc pleinement cet article, mais je souhaite que le Gouvernement travaille dès à présent au maintien d'un secteur réservé sur les services de base. Il est vital pour les zones rurales qu'il garantisse que, demain, la notion de service public sera maintenue sur l'ensemble du territoire.

M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle.

M. Alain Vasselle. Le chapitre dont nous discutons traite des dispositions relatives à l'accès aux services publics.

Le problème qui se pose, sur un plan général, est celui du maintien de ces services, mais ceux-ci ne se résument pas à La Poste et au Trésor.

M. Pierre Hérisson. Exactement !

M. Alain Vasselle. L'accès aux services publics est l'une des principales préoccupations de nos concitoyens. Toute fermeture de service hospitalier, de perception, de commerce de proximité, d'agence postale, etc. est ressentie comme un abandon, comme le signe d'une mort lente des territoires concernés. En effet, comment maintenir l'attractivité d'un territoire aux yeux de nos concitoyens s'il n'y a plus ni commerce, ni poste, ni école, bref, s'il n'y a plus de vie ?

M. Alain Vasselle. Les arguments de rationalité financière avancés pour justifier la fermeture des services publics dans nos campagne peuvent, certes, être entendus, mais il demeure nécessaire de tenir compte au mieux des réalités humaines et d'assurer aux Français le respect de ce principe républicain fondamental qui est celui de l'égal accès de tous au service public en tous points du territoire.

Comment adapter le service public à la population et aux territoires ruraux ? Telle est la vraie question.

Il s'agit non évidemment pas de figer le service public, mais bien de l'adapter à notre temps.

Il est nécessaire de faire preuve de responsabilité en faisant évoluer le service public. Ce qui est important, ce n'est pas tant que chaque village ait son bureau de poste ou son école, mais bien plutôt que ces services, tout comme l'ensemble des services de proximité, soient assurés de la façon la plus efficace possible et dans des délais d'accès qui soient raisonnables.

Je regrette d'ailleurs que, lors de l'examen de la loi Voynet sur l'aménagement du territoire, ait été supprimée une disposition qui avait été introduite dans la loi Pasqua et qui visait à ce que soient pris en compte les délais d'accès aux services. Ce qui compte, pour nos concitoyens, c'est plus le temps d'accès aux services que la distance les séparant du lieu où ils sont offerts. Cette notion, pourtant essentielle en matière d'aménagement du territoire, a hélas complètement disparu.

Le défi est donc de maintenir des services de qualité pour tous, même si cela implique un changement de notre mode d'organisation.

Les services publics doivent tenir compte des contraintes et des besoins propres à chaque citoyen et à chaque territoire.

Partant de là, une véritable concertation impliquant les élus locaux et l'ensemble des acteurs concernés me paraît nécessaire avant toute prise de décision.

Je dirai à présent un mot sur la permanence des soins dans les territoires.

Dans le domaine plus particulier de la santé, que je connais un peu, le renforcement de l'offre de soins est primordial.

De nombreuses mesures ont été prises ou sont envisagées. Tel est le cas dans le texte relatif à la réforme de l'assurance maladie, dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005, dans ce présent texte ou encore dans la convention entre l'Union nationale des caisses d'assurance maladie et les syndicats médicaux en date du 23 décembre dernier.

Toutes ces mesures sont exclusivement d'ordre financier : il y est fait référence à des incitations fiscales, à des aides à l'implantation, à des bourses.

Or l'une des motivations premières des médecins exerçant en zone défavorisée ne tient pas tant à l'aspect financier qu'à la qualité de la vie. Cette qualité de vie se décline elle-même en plusieurs points : le temps de travail, l'emploi du conjoint et l'école pour les enfants. L'image traditionnelle du médecin de campagne aidé au cabinet par son épouse est bel et bien obsolète !

Ces mesures financières suffiront-elles pour résoudre ce problème ? C'est la question que nous devons nous poser.

La convention évoquée plus haut fixe à 2006 le premier bilan des mesures prises. Attendons de voir les résultats. Toutefois, si ceux-ci ne sont pas satisfaisants, peut-être nous faudra-t-il étudier avec les professionnels concernés les moyens de dépasser ces dispositifs et d'aller plus loin.

Plus qu'à un problème démographique, c'est à un problème de répartition que nous sommes confrontés.

S'agissant de l'hôpital et du tissu hospitalier, le problème est celui du ratio entre l'efficacité technique et l'efficacité territoriale. Il s'agit là d'une double contrainte au coût financier non négligeable.

De plus, se pose la question de la coordination entre la médecine de ville et l'hôpital, notamment celle du rôle des missions régionales de santé, chargées en particulier de déterminer les orientations relatives à l'évolution de la répartition territoriale des professionnels de santé libéraux, et celle de l'expérimentation en matière d'agences régionales de santé, tout cela afin de garantir l'efficacité des soins sur l'ensemble du territoire.

Enfin, je tiens à alerter le Gouvernement sur une situation récurrente que vivent de plus en plus mal les élus locaux.

Les administrations d'Etat que sont les DDA, les DDE, les DDASS, le Trésor public et, parfois, la gendarmerie voient fondre le nombre de leurs fonctionnaires mis à la disposition des collectivités territoriales, lesquelles n'ont pas les moyens de créer leurs propres services techniques.

M. Pierre-Yvon Trémel. C'est exact !

M. Alain Vasselle. Lorsque Martine Aubry créa les emplois-jeunes, le gouvernement Jospin en profita de l'occasion pour demander aux communautés de communes de prendre en charge le traitement des dossiers d'assainissement individuel.

Il nous avait alors été assuré, à nous, élus, qu'embaucher des emplois-jeunes ne nous coûterait rien, ceux-ci devant être financés à 90 %, et que nous serions tranquilles pendant les cinq ans séparant la décision de transfert de cette responsabilité et le moment où nous devrions l'assumer complètement.

Or, cette responsabilité, nous avons dû l'assumer entièrement dès le départ. Les cinq ans se sont écoulés et nous supportons aujourd'hui la totalité de ce que coûtent les agents qui instruisent des dossiers, sans avoir eu aucune compensation de la part de l'Etat...

M. Raymond Courrière. Vous avez supprimé les emplois-jeunes !

M. Alain Vasselle. ...car il s'est bien agi, à l'époque, d'un transfert de compétences sans transfert des ressources correspondantes au profit des collectivités !

Telle était la conception de la décentralisation qu'avaient Martine Aubry et Lionel Jospin lorsqu'ils étaient au pouvoir ! Telle n'est pas celle de M. Raffarin ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Raymond Courrière. Ce n'est pas M. Jospin qui a supprimé les emplois-jeunes !

M. Alain Vasselle. En effet, grâce à la loi constitutionnelle qui a été votée sur l'initiative de l'actuel gouvernement, nous devrions avoir les garanties financières que nous n'avions pas obtenues auparavant.

Mes chers collègues, je souhaite qu'à l'avenir le Premier ministre veille à ce que nous n'ayons pas à revivre ce que nous avons vécu sous le gouvernement précédent.

Cela étant, cette situation ne date pas du temps de Martine Aubry : elle est très nettement antérieure et a perduré sous différents gouvernements.

Aujourd'hui, dans les DDA et dans les DDE, les personnels, peu nombreux, ne parvenant pas à faire face aux besoins de l'ensemble des collectivités, c'est nous qui devons assumer ces derniers, sans en avoir les moyens financiers.

J'aimerais bien qu'un jour, tous ensemble, Gouvernement et représentants des différentes collectivités territoriales, nous fassions les comptes de manière à rétablir la contribution effective des uns et des autres en fonction des compétences et des charges qui existaient antérieurement.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je vous prie d'excuser la longueur de mon propos, mais je tenais à exposer dès à présent les problèmes auxquels je suis confronté quotidiennement dans mon département en ce qui concerne les services publics. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. L'amendement n° 251, présenté par MM. Le Cam,  Billout et  Coquelle, Mmes Demessine,  Didier et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Dans le texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 1 du code des postes et des communications électroniques, après les mots :

services postaux

supprimer les mots :

constituant le secteur réservé

La parole est à M. Gérard Le Cam.

M. Gérard Le Cam. En proposant de supprimer les termes « constituant le secteur réservé », nous souhaitons faire en sorte que, exception faite des envois de correspondance en nombre, les services postaux soient proposés au même tarif de base sur l'ensemble du territoire. Cela me paraît aller dans le sens de ce que souhaite M. de Montesquiou.

Le maintien d'un tarif unique sur l'ensemble de notre territoire est en effet une mission essentielle de service public que nous devons préserver, et ce malgré les velléités contraires de la Commission européenne.

Rien ne nous garantit aujourd'hui que La Poste conservera un secteur réservé. Nous savons, en revanche, que ce domaine réservé se réduit comme peau de chagrin et qu'il risque, à terme - plus précisément, me semble-t-il, en 2009 -, de disparaître complètement.

Ainsi, la rédaction de l'article 37 EAA ne préserve en rien la péréquation tarifaire et donc l'unicité d'un tarif de base du timbre sur l'ensemble du territoire.

Que se passera-t-il demain, lorsque La Poste sera privatisée ? Il est tout à fait légitime de se poser la question au regard de ce qui s'est passé dans les autres secteurs, avec la privatisation de fait de France Télécom ou celle, qui est en cours,de nos grandes entreprises publiques - je pense à EDF et à GDF.

Lorsque La Poste sera devenue un opérateur comme les autres, dans un marché postal totalement ouvert à la concurrence, ses dernières missions de service public seront sacrifiées aux exigences de rentabilité.

Nous avons de bonnes raisons de penser que, si l'unicité du prix du timbre n'est pas préservée, ce sont précisément les régions les plus pauvres, notamment les zones rurales en voie de désertification, qui seront pénalisées ! Ce n'est pas acceptable !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. L'amendement n° 251 vise à supprimer la dérogation au principe d'unicité du tarif en ce qui concerne un certain nombre d'envois que l'article 37 EAA du projet de loi prend légitimement en compte.

La commission a donc émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Frédéric de Saint-Sernin, secrétaire d'Etat. En m'exprimant sur l'amendement qu'a présenté M. Le Cam, je répondrai en même temps à M. de Montesquiou.

Le projet de loi relatif au développement des territoires ruraux comprend d'ores et déjà une disposition visant à inscrire dans le code des postes et des communications électroniques l'obligation d'un prix unique pour les tarifs postaux du service réservé, à l'exception des envois en nombre.

L'existence d'un secteur réservé a précisément vocation à permettre de financer la charge induite par la fourniture du service universel.

Si le marché européen des services postaux devait être complètement ouvert à l'ensemble de la concurrence, la disparition du secteur réservé ne remettrait pas en cause les missions de service public exercées par La Poste dans le cadre du service universel.

L'article L. 1 du code des postes et des communications électroniques précise en effet que « le service universel postal concourt à la cohésion sociale et au développement équilibré du territoire ».

Le secteur réservé étant défini par la loi, sa suppression devrait faire l'objet d'une mesure législative. Dès lors, le Parlement pourrait décider que certaines composantes du service universel bénéficient d'un tarif identique sur l'ensemble du territoire.

A mes yeux, la question soulevée par cet amendement n'est donc pas d'actualité. Elle pourra, en revanche, être examinée à l'occasion d'une éventuelle modification du périmètre du secteur réservé.

Enfin, les questions relatives aux tarifs postaux devront être logiquement abordées et trouver toute leur place, me semble-t-il, lors de la deuxième lecture du projet de loi sur la régulation des activités postales, qui aura lieu au Sénat, comme M. Hérisson vient de le rappeler, le 8 mars prochain.

M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau, pour explication de vote.

M. Gérard Delfau. Je souhaite attirer l'attention du Sénat sur le fait que, en adoptant ce texte, nous votons la fin du prix unique du timbre sur l'ensemble du territoire.

En effet, la notion de service réservé postal a toujours été formulée par rapport au monopole du courrier, lequel permet de financer l'égalité d'accès aux services postaux sur tout le territoire et l'unicité du prix du timbre.

C'est d'ailleurs ce monopole qui permet, ou permettait, d'assurer une implantation très large, déficitaire pour une part, des services de La Poste et donc l'accès aux services financiers de base de tous les citoyens, quels que soient leur lieu d'habitation et leurs revenus.

Pour résumer, c'est le monopole du courrier qui a permis jusqu'ici de financer ces trois composantes du service public.

Or la directive postale dont le Parlement examine actuellement la transposition prévoit la disparition progressive du service réservé. Ainsi, en 2009, sauf décision contraire des vingt-cinq nations de l'Union européenne - ce que personne n'envisage -, il n'y aura plus de service réservé.

Par conséquent, si nous votons cet article 37 EAA, selon lequel « hormis les envois de correspondance en nombre, les services postaux constituant le secteur réservé sont proposés au même tarif de base sur l'ensemble du territoire national », nous disons le contraire de ce que prévoit le projet de loi sur la régulation des activités postales que la majorité de l'Assemblée nationale a adopté et que la majorité du Sénat s'apprête à voter. De fait, nous entérinons l'idée selon laquelle, au terme du processus engagé à l'échelon européen et approuvé par la France, il n'y aura plus d'unicité du prix du timbre, de même qu'il n'y aura plus les moyens de financer un large réseau postal et l'accès aux services financiers de base pour l'ensemble des citoyens.

Voilà ce qui est dit implicitement dans cet article et voilà pourquoi il me semble nécessaire que le Sénat refuse de l'adopter pour renvoyer la discussion sur ce point fondamental à l'examen de la loi sur la régulation des activités postales.

Si tel n'était pas le cas, il ne faudrait alors plus parler de fonds de péréquation ni de présence postale, et il faudrait reconnaître que nous avons collectivement admis - mais je récuse toute responsabilité dans cette décision - que le service public postal est d'ores et déjà condamné à disparaître, pour partie maintenant et en totalité en 2009. Une telle décision nous ferait au moins gagner du temps, car nous n'aurions plus à discuter de la nécessaire concertation entre le préfet et les élus locaux ! Il n'y aurait, en effet, rien à dire puisqu'il n'y aurait plus de service public !

M. Henri de Raincourt. Quel tableau !

M. le président. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou.

M. Aymeri de Montesquiou. Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez renvoyé le débat à l'examen du projet de loi sur la régulation des activités postales, ce qui est tout à fait cohérent.

Je me permettrai toutefois de vous poser cette question toute simple : vous engagez-vous à défendre l'unicité tarifaire du timbre ?

M. le président. La parole est à M. Pierre Hérisson.

M. Pierre Hérisson. Sommes-nous bien le 25 janvier 2005 ? On peut se le demander !

J'ai dit et répété - mais chacun a connaissance du calendrier de nos travaux - que cette question dont nous discutons aujourd'hui trouverait toute sa place dans notre prochain débat sur le projet de loi sur la régulation des activités postales, lequel vient d'être adopté par l'Assemblée nationale.

J'ai le sentiment depuis plus d'une heure que, dès lors que nous parlons de service public, nous pensons automatiquement à La Poste, alors même qu'une partie de ses missions seulement consiste à assurer un service public.

Au demeurant, je retrouve ici les réflexions menées sans prétention, mais avec détermination, par le groupe de travail sur le fonds national postal de péréquation territoriale, qui essaie notamment, même si ce n'est pas du goût de certains, de trouver des pistes pour améliorer la relation entre les collectivités locales, plus particulièrement les communes, et cette grande entreprise publique qu'est La Poste.

J'ai donc l'impression que, nous étant trompés de semaine, nous perdons notre temps ! Mais peut-être nous faudra-t-il évoquer le développement des territoires ruraux lorsque nous examinerons le projet de loi sur la régulation des activités postales !

M. le président. Peut-être cette situation témoigne-t-elle de l'inquiétude de nos collègues.

La parole est à M. Philippe Arnaud.

M. Philippe Arnaud. Comme pratiquement tous nos collègues, je suis favorable à ce qu'un service postal unique soit garanti sur l'ensemble du territoire.

Cela dit, on s'inquiète peut-être à tort, comme vient de le dire M. Hérisson. (M. Raymond Courrière s'exclame.)

A la veille du grand débat de fond sur le référendum relatif au traité constitutionnel européen, je souhaite rappeler que, pour la première fois dans un traité européen, la notion de service d'intérêt général est clairement énoncée. Au surplus, il appartiendra à chaque Etat membre d'en définir les contours et les modalités d'application.

En conséquence, mes chers collègues, si vous considérez unanimement, comme je le crois, que le service postal est un service d'intérêt général, un service universel, un service public et que, à ce titre, il doit bénéficier d'un tarif unique, je vous invite tous à voter oui au traité constitutionnel européen. (M. Paul Raoult s'exclame.)

M. le président. C'est un autre débat !

La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Frédéric de Saint-Sernin, secrétaire d'Etat. Pour répondre à votre question, monsieur de Montesquiou, je vous rappelle que l'Assemblée nationale a réaffirmé très clairement sa volonté en adoptant en deuxième lecture un amendement visant à garantir l'unicité du prix du timbre sur l'ensemble du territoire.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 251.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 37 EAA.

(L'article 37 EAA est adopté.)

Art. 37 EAA
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Art. 37 F

Article 37 EA

Après l'article 30 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, il est inséré un article 30-1 ainsi rédigé :

« Art. 30-1. - La convention visée à l'article 30 précise les obligations réciproques des parties contractantes dans l'organisation et la mise en oeuvre du service, sa durée, qui ne peut être inférieure à trois ans, les moyens humains, matériels et financiers mis à disposition par les différentes parties ainsi que, en zone de revitalisation rurale et en zone de redynamisation urbaine, le montant des remboursements de l'État prévus par le IV de l'article 30 de la loi n° 99-533 du 25 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire et portant modification de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire. Toute autre collectivité publique ou tout autre personne de droit privé peut, à sa demande, être associée à cette convention, auquel cas les obligations de cette collectivité ou de cette personne sont précisées dans la convention qui comporte un dispositif d'évaluation.

« Aucune contribution autre que celles figurant dans la convention ne peut être imposée aux collectivités territoriales et à leurs groupements. »  - (Adopté.)

Art. 37 EA
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Art. additionnel après l'art. 37 F

Article 37 F

L'article 29 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire est ainsi rédigé :

« Art. 29. - I. - L'État établit, pour assurer l'égal accès de tous aux services publics, les objectifs d'aménagement du territoire et de services rendus aux usagers que doit prendre en compte tout établissement, organisme ou entreprise chargé d'un service public dès lors qu'ils ne sont pas déjà pris en compte au titre de ses obligations de service universel. Dans tous les cas où ces objectifs n'ont pas été précisés à la date de promulgation de la loi n° ... du .... relative au développement des territoires ruraux, ils sont fixés par le Gouvernement au plus tard le 30 décembre 2005 par voie contractuelle, réglementaire ou par l'acte autorisant l'exercice de missions ou de prestations de service public, après consultation des associations représentatives des différentes catégories de collectivités territoriales par le ministre chargé de l'aménagement du territoire, en liaison avec le ou les ministres de tutelle. L'État précise les conditions dans lesquelles il compense aux organismes les charges qui résultent du présent I.

« II. - Sans préjudice de l'autonomie de gestion propre à chaque établissement, organisme ou entreprise chargé d'un service public, le représentant de l'État dans le département, en concertation avec l'ensemble des acteurs concernés, propose et, sous réserve de leur accord, initie toute action visant à garantir que l'offre d'accès aux services publics est adaptée aux caractéristiques des territoires, concourt à leur attractivité et au maintien de leurs équilibres.

« A ce titre, le représentant de l'État dans le département est informé des perspectives d'évolution de l'organisation des services publics et de tout projet de réorganisation susceptibles d'affecter de manière significative les conditions d'accès à ces services. Cette information est transmise par le représentant de l'État dans le département au président du conseil général, au président du conseil régional et au président de l'association des maires du département. A son initiative, ou à la demande du président du conseil général, le représentant de l'État dans le département peut mener une concertation locale sur tout projet de réorganisation. Cette concertation, dont la durée ne peut excéder trois mois, se déroule soit dans les conditions prévues à l'article 1er duodecies de la loi n° ... du .... relative au développement des territoires ruraux pour toute révision de la carte des formations du second degré, soit en liaison avec la commission départementale de la présence postale territoriale pour les projets qui concernent les services postaux, soit au sein de la commission départementale d'organisation et de modernisation des services publics dans les autres cas. Cette concertation associe également les élus locaux intéressés et les représentants du service public concerné. Pendant le déroulement de la concertation, la mise en oeuvre du projet de réorganisation est suspendue. A l'issue de cette concertation, le représentant de l'État dans le département présente un rapport rendant compte du déroulement de celle-ci et évaluant les conséquences de la réorganisation envisagée sur l'accès au service.

« Si le projet de réorganisation, en ce qui concerne les établissements, organismes ou entreprises visés par le I, s'avère incompatible avec les objectifs de qualité de service et d'aménagement du territoire fixés par l'État au niveau national, ou en l'absence d'objectifs fixés par l'État, le représentant de l'État dans le département peut saisir le ministre de tutelle de l'établissement, de l'organisme ou de l'entreprise concerné et le ministre chargé de l'aménagement du territoire. Dans un délai de deux mois, les ministres s'assurent que les objectifs d'aménagement du territoire fixés par l'État pour l'exercice de la mission de service public ont été intégrés de façon satisfaisante par l'organisme en charge de cette mission dans les évolutions envisagées et dans la concertation conduite. Dans le cas contraire, ils demandent à celui-ci de mettre en oeuvre les mesures appropriées pour respecter ces objectifs préalablement à l'exécution du projet de réorganisation. La saisine suspend la mise en oeuvre du projet en cause. »

M. le président. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou, sur l'article.

M. Aymeri de Montesquiou. Cet article, qui prévoit un nouveau dispositif général des services publics de proximité, est au coeur des préoccupations des élus et des habitants des zones rurales, qui doivent en effet réfléchir aux mécanismes de concertation à mettre en oeuvre localement lors de la réorganisation d'un service public.

Sur le fond, nous savons que la réforme de l'administration est nécessaire et qu'elle se justifie en partie par l'existence de nouveaux moyens de communication.

Sur les modalités, si l'Etat doit trancher, il est évident que cette réforme ne peut ni de doit être conduite sans les élus ou, a fortiori, comme c'est hélas parfois le cas, contre les élus : ce serait alors un échec assuré.

Deux secteurs sont traités séparément.

Pour ce qui est de la réorganisation de la présence postale, une instance ad hoc existe déjà. Par leur connaissance du contexte social et démographique, leur assiduité et leur ténacité, les élus désignés pour représenter leurs collègues sont à même de peser sur les décisions au sein de la commission départementale de la présence postale territoriale.

Pour ce qui concerne la carte des formations du second degré, la concertation se déroulera au sein du conseil académique de l'éducation nationale ou du conseil départemental de l'éducation nationale. Ces conseils pourraient être un peu mieux équilibrés : ainsi, dans mon département, le Gers, sur trente membres avec voix délibérative, nous n'avons que quatre représentants des communes titulaires et quatre suppléants.

Elus locaux, par conséquent à la fois soucieux de défendre la vitalité de nos territoires et présents pour recevoir les doléances de nos concitoyens, nous voulons qu'un mécanisme plus systématique soit mis en place.

Suspensive du projet de réorganisation, la concertation doit se dérouler dans un délai de trois mois : il n'y a là rien à redire.

Cependant, à ce jour, la logique du texte laisse au représentant de l'Etat dans le département le pouvoir d'arbitrage sur la nécessité d'ouvrir une concertation sur tout sujet de réorganisation d'un service public. Il en va selon le bon plaisir du préfet. Cela implique que celui-ci soit un homme de dialogue ; si ce n'est pas le cas - vous me concéderez qu'on ne peut pas rejeter totalement cette hypothèse -, le conflit est assuré, et donc l'échec de la réforme garanti.

Dès lors, il convient de rendre obligatoire l'ouverture de la concertation chaque fois qu'il y a un projet de réorganisation d'un service public. Il y va de la crédibilité et de l'efficacité du dispositif, ainsi que de l'égalité entre les territoires.

Par ailleurs, à ce stade de l'examen du texte, seul le président du conseil général peut alerter le préfet sur la nécessité de mener une concertation. Dans la mesure où le texte prévoit déjà que le président du conseil général comme le président de l'association des maires reçoivent les informations relatives aux projets de réorganisation, il est logique que les deux puissent demander au préfet de lancer une concertation. Au demeurant, cette disposition nouvelle permettrait d'aligner la loi sur la réalité, car les présidents d'association départementale des maires sont des porte-parole naturels de leurs mandants, et leurs propos sont donc pris en considération par le préfet.

Enfin, il convient de renforcer le mode de concertation. Si la commission départementale d'organisation et de modernisation des services publics est une instance appropriée, il n'en demeure pas moins que tous les élus locaux intéressés doivent être consultés, et cela de manière systématique. Monsieur le secrétaire d'Etat, pouvez-vous nous rassurer sur ce point ?

Obligation de concertation, capacité du président de l'association départementale des maires de demander une concertation au préfet : je soutiendrai donc l'amendement de ma collègue Jacqueline Gourault, qui, en tant que présidente de l'association des maires de son département, est parfaitement, consciente, comme ses homologues, de la nécessité d'associer tous les élus à ces décisions vitales pour l'avenir de nos territoires ruraux.

M. le président. L'amendement n° 95 rectifié, présenté par Mme Gourault, MM. Jarlier,  Hérisson,  J.L. Dupont et  de Montesquiou, est ainsi libellé :

Après les mots : « du conseil général », rédiger ainsi la fin de la troisième phrase du deuxième alinéa du II du texte proposé par cet article pour l'article 29 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 :

ou du président de l'association des maires du département, le représentant de l'Etat dans le département mène une concertation locale sur tout projet de réorganisation.

La parole est à Mme Jacqueline Gourault.

Mme Jacqueline Gourault. Je remercie mon collègue M. de Montesquiou d'avoir déjà indiqué quel était l'esprit de cet amendement. Je précise donc simplement de nouveau qu'il s'agit de permettre également au président de l'association des maires du département de solliciter le représentant de l'Etat.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. Dans le texte adopté par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, qui a complété et explicité la rédaction votée par le Sénat en première lecture, seul le président du conseil général dispose de la faculté de saisir le préfet. La logique du texte que nous avons souhaité consiste à organiser une concertation locale approfondie sous la houlette du préfet du département entre les représentants du service public concerné et les élus, notamment au sein de la commission départementale d'organisation et de modernisation des services publics.

La proposition présentée par notre collègue Jacqueline Gourault et tendant à permettre au président de l'association des maires du département de saisir le préfet paraît la bienvenue.

M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. Toutefois, Mme Gourault pourrait peut-être modifier son amendement afin de rétablir le principe de l'arbitrage préfectoral. En effet, dans sa rédaction actuelle, cet amendement fait obligation au préfet d'ouvrir le processus de concertation si le président du conseil général ou le président de l'association des maires du département décide de le saisir. La logique du texte qui a été adopté par le Sénat sur l'initiative de notre commission pourrait s'en trouver dénaturée. Ce que nous avons voulu, c'est une implication de l'Etat par l'intermédiaire de son représentant dans le département chaque fois qu'un problème de fermeture d'un bureau de poste ou de tout autre service public se pose. Il ne s'agissait pas, pour nous, de mettre en place une forme de moratoire systématique et, en définitive, inefficace, ce à quoi l'amendement en son état actuel pourrait aboutir.

Aussi serait-il souhaitable, ma chère collègue, que vous rectifiiez votre amendement en remplaçant le mot « mène » par les mots « peut mener ». (M. Alain Vasselle s'étonne.)

Sous réserve de cette modification, la commission émet un avis favorable sur votre amendement.

M. le président. Madame Gourault, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens souhaité par M. le rapporteur ?

Mme Jacqueline Gourault. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 95 rectifié bis, présenté par Mme Gourault, MM. Jarlier,  Hérisson,  J.L. Dupont et  de Montesquiou, et ainsi libellé :

Après les mots : « du conseil général », rédiger ainsi la fin de la troisième phrase du deuxième alinéa du II du texte proposé par cet article pour l'article 29 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 :

ou du président de l'association des maires du département, le représentant de l'Etat dans le département peut mener une concertation locale sur tout projet de réorganisation.

M. Roland du Luart. Il s'agit d'une grande avancée !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Frédéric de Saint-Sernin, secrétaire d'Etat. Là encore, je répondrai en même temps aux interrogations de M. de Montesquiou.

Mener cette réorganisation dans le cadre de la concertation étroite avec les élus, élément essentiel d'une évolution maîtrisée, réussie et surtout pleinement comprise par nos concitoyens, me paraît être une obligation.

Le dispositif qui a été voté en première lecture par la Haute Assemblée sur l'initiative de la commission des affaires économiques, et qui a été très largement conservé en deuxième lecture à l'Assemblée nationale, permet de renforcer la qualité de cette concertation. Il me semble, pour avoir entendu l'ensemble des débats, que nous le souhaitons tous.

Ce nouveau dispositif rénove les modalités de la concertation pour rendre celle-ci plus praticable. Le préfet, qui est au centre du dispositif, est ainsi responsabilisé pour mener une concertation qui, loin d'être purement formelle, doit permettre l'enrichissement d'un projet initial, son adaptation à un contexte particulier qui pourrait ne pas être détecté à la seule échelle départementale.

Je voudrais vous rassurer : cette consultation sera très large. La commission départementale d'organisation et de modernisation des services publics constitue un point de passage obligé. Elle ne saurait en aucun cas exonérer le préfet d'une consultation des élus concernés, laquelle est prévue par le texte actuel.

Vous avez également évoqué l'existence de plusieurs instances de concertation en dehors de la commission départementale d'organisation et de modernisation des services publics, et plus particulièrement la CDPPT, ainsi que le conseil académique de l'éducation nationale. Nous n'avons pas souhaité remettre en question ces différents lieux de concertation. L'important est que la concertation puisse se dérouler. Lorsque les instances fonctionnent, il est toujours risqué de les remettre en cause, même s'il s'agit de simplifier à terme le dispositif ; je ne suis pas sûr que ce serait bien compris sur le terrain.

Bien évidemment, cela ne préjuge pas des évolutions ultérieures que nous pourrions être amenés à examiner et qui pourraient s'avérer nécessaires.

Enfin, en ce qui concerne plus précisément l'amendement de Mme Gourault, il me semble évident que, dans l'esprit de concertation que nous souhaitons tous développer, la saisine du préfet ne doit pas être le monopole du président du conseil général.

M. Jean-Louis Carrère. Surtout dans le Gers !

M. Frédéric de Saint-Sernin, secrétaire d'Etat. Nous avions engagé ce débat lors de la deuxième lecture à l'Assemblée nationale. Je m'étais alors montré très ouvert au principe de la saisine par le président du conseil général. Mais le président de l'association départementale des maires me paraît, lui aussi, avoir légitimité à attirer l'attention du préfet sur d'éventuelles difficultés.

Nous sommes bien conscients que c'est au niveau de la concertation préalable que des manquements ont pu être observés pendant une certaine période : ce caractère préalable n'a effectivement pas toujours été respecté. L'article 37 F a précisément pour objet d'empêcher que de telles situations se reproduisent. Dès lors, il est évident que le préfet doit être pleinement mobilisé.

Cependant, pour qu'il puisse conduire sa mission, pour garantir l'efficacité de la procédure, il faut lui laisser une marge de manoeuvre. Si la commission départementale d'organisation et de modernisation des services publics est trop systématiquement saisie, y compris à propos d'ajustements qu'on pourrait qualifier de minimes, nous pourrions aboutir à un blocage dans le déroulement même des discussions pendant ces trois mois.

C'est aussi la raison pour laquelle le rôle du préfet, tel qu'il était prévu dans l'amendement adopté en première lecture, me paraissait suffisamment éminent.

Dans ces conditions, le Gouvernement émettra un avis de sagesse favorable.

M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.

M. Alain Vasselle. Je serais presque tenté de reprendre l'amendement de Mme Gourault dans sa rédaction initiale.

M. Michel Moreigne. Cédez à la tentation, monsieur Vasselle !

M. Alain Vasselle. Mais je ne veux pas compliquer la tâche du Gouvernement et de la commission ! Cela étant, je crois tout de même utile de faire quelques rappels.

Si je me réfère au texte adopté par le Sénat en première lecture, tel qu'il figure dans le rapport de MM. Emorine et Poniatowski, je lis ceci : « Le représentant de l'Etat dans le département dispose d'un délai de trois mois pour mener la concertation locale sur tout projet dont il est informé, en collaboration étroite avec les élus... » Autrement dit, le préfet a trois mois pour mener la concertation, un point c'est tout. Cela signifie bien qu'il doit mener la concertation.

Cette obligation est devenue une simple faculté : il appartient au préfet d'apprécier s'il doit mener ou non la concertation. Pour ma part, je considère que c'est un recul. Je préférais la rédaction initiale de l'amendement de Mme Gourault, plutôt que celle qu'elle a acceptée de concéder à M. le rapporteur. Mme Gourault préfère sans doute ne pas prendre de risque et être assurée que son amendement sera adopté ; ainsi, elle pourra en garder le bénéfice. (Mme Jacqueline Gourault s'esclaffe.)

Je constate au passage qu'aujourd'hui, pour avoir une chance de faire adopter un amendement, il vaut mieux être centriste que membre de l'UMP. (Rires.)

Selon M. le rapporteur, l'amendement de Mme Gourault aurait pour conséquence de mettre en place une sorte de moratoire sur les services. Or, dans le texte adopté par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, la dernière phrase du deuxième alinéa du II précise : « Pendant le déroulement de la concertation, la mise en oeuvre du projet de réorganisation est suspendue. »

A partir du moment où l'on suspend, c'est une sorte de moratoire ; on décide, en ce qui concerne ces services, de ne rien faire tant que la concertation n'a pas été menée à son terme. Certes, on peut jouer sur les mots, mais le résultat est bien celui-là, et c'est ce que nous souhaitons. Cela a d'ailleurs été confirmé hier soir par le secrétaire général de la préfecture de l'Oise au cours de la réunion avec les maires que j'ai déjà évoquée. Il a dit que c'était ainsi que ça se passerait, et je m'en réjouis.

On ne peut pas avoir une concertation de façade et n'en faire qu'à sa tête. Donc, je me réjouis de cette disposition, qui, selon moi, n'est pas du tout en contradiction avec l'amendement de Mme Gourault. Je ne vois pas en quoi le mot « mène » plutôt que « peut mener » aurait pour conséquence la mise en place d'un moratoire. De toute façon, c'est comme cela que les choses se passeront.

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Gourault.

Mme Jacqueline Gourault. Je voudrais simplement dire à M. Vasselle que je suis d'accord avec lui. C'est pourquoi je n'ai pas cru utile de me battre sur le vocabulaire.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Je m'abstiendrai sur cet amendement.

Nous sommes tout de même dans une situation surréaliste. Alors que le texte que nous examinons doit permettre de revitaliser les territoires ruraux, nous assistons à la fin des services publics. Car c'est bien à cela que mène la mise en concurrence ! En effet, celle-ci ne va sûrement pas s'instaurer dans les zones les plus isolées.

S'agissant des services informatiques, il a été dit tout à l'heure que la concurrence allait permettre l'installation des services dans les points les plus reculés en zone de montagne. Non, c'est le service public qui permet d'installer un service dans une zone qui n'est pas rentable. Où y a-t-il concurrence ? A Paris, où s'affrontent plusieurs opérateurs de réseau câblé. En zone de montagne, il n'y a pas de concurrence !

Sur les travées de l'UMP, M. Vasselle nous dit qu'il n'est pas d'accord, qu'il a rencontré les maires de son département et que ceux-ci partagent son point de vue. Soit ! Mais il va tout de même voter la disposition.

Nous assistons à un débat très passionné sur l'amendement des membres de l'UDF, repris par les radicaux. Ils souhaitent qu'il y ait concertation. En réalité, ils seront informés régulièrement de la mort lente des services publics dans les territoires ruraux.

Ce qui importe, ce n'est pas la concertation, car l'on sait très bien que la technocratie va élaborer des paramètres pour savoir ce qui est rentable. Dès lors, ce sera la fin inexorable des services publics.

C'est une volonté politique qui est à l'origine du service public. Or, aujourd'hui, ladite volonté fait défaut dans cet hémicycle. On gémit devant la disparition de certains services publics et l'on demande une concertation : on veut savoir comment aura lieu, progressivement, la désertification des territoires ruraux. Cela me semble regrettable ! C'est un amendement voyeur !

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Emorine, rapporteur.

M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. Puisque M. Vasselle s'est référé au tableau comparatif, je lui dirai qu'en première lecture le Sénat avait adopté la formulation suivante : « le représentant de l'Etat dans le département peut saisir... ». Notre collègue Jean Desessard a estimé qu'il s'agissait là d'une très bonne réponse.

Celles et ceux qui, dans les départements ruraux, ont mené une campagne sur la défense des services publics ont, dans la plupart des cas, gagné les élections sénatoriales. (Rires sur les travées du groupe socialiste.) La campagne pour la présidence de l'Association des maires de France a été du même type. Je ne vous rappellerai pas qui a été élu président de l'AMF. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 95 rectifié bis.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 37 F, modifié.

(L'article 37 F est adopté.)

Art. 37 F
Dossier législatif : projet de loi relatif au développement des territoires ruraux
Art. additionnel avant l'art. 37

Article additionnel après l'article 37 F

M. le président. L'amendement n° 197 rectifié, présenté par MM. Baylet, Collin, Delfau, Fortassin et les membres du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, est ainsi libellé :

Après l'article 37 F, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Un fonds postal national de péréquation est créé. Il assure le financement de la mission de service public d'aménagement et de développement du territoire confiées par la loi à la Poste. Il garantit la pérennité d'un maillage du réseau postal correspondant aux besoins des usagers et des communes. Les évolutions des formes de la présence postale sur le territoire seront conduites selon les modalités prévues par la loi dans le souci d'une amélioration de la qualité du service rendu et du principe d'égalité des droits des citoyens. La loi de finances la plus proche fixera le montant et les modalités de financement de ce fonds.

La parole est à M. Gérard Delfau.

M. Gérard Delfau. Voilà un an, lors de la discussion, en première lecture, du projet de loi relatif à la régulation des activités postales et portant transposition de la directive postale, le Gouvernement avait pris un certain nombre d'engagements concernant La Poste. Il avait notamment promis - et j'avais eu la naïveté de le croire - que l'établissement financier postal serait mis en place au cours du premier semestre de l'année 2005. Or nous avons déjà pris six mois de retard !

Etant convaincu que cet établissement est nécessaire pour le développement de l'entreprise publique dans un secteur de plus en plus concurrentiel, j'avais voté l'article en question

Ledit projet de loi vient d'être examiné par l'Assemblée nationale. Il sera de nouveau soumis au Sénat, nous dit-on, au mois de mars. Bref, sous la pression d'un certain nombre d'organismes bancaires, La Poste voit reculer le moment où elle pourra bénéficier de cette possibilité.

Parallèlement, lors de l'examen en première lecture du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux, nous avions été nombreux à insister sur la nécessité d'assurer une compensation financière des missions de service public car, progressivement, le secteur réservé du courrier, qui est soumis à concurrence, disparaît. La Poste perd ainsi une source de revenus très précieuse pour financer ses missions de service public. Le débat qui vient de se dérouler à l'Assemblée nationale montre qu'aucune avancée n'a eu lieu dans ce domaine.

Deux idées avaient été émises : un fonds de péréquation et un fonds de compensation.

S'agissant du fonds de péréquation, j'ai appris par la presse, avec beaucoup d'intérêt, qu'un groupe de travail avait été mis en place par notre éminent collègue M. Hérisson, sans doute dans le cadre de la Commission supérieure du service public des postes et télécommunications - tout en étant membre de cette commission, je n'en ai pas été informé -, et que ce groupe de travail remettrait des conclusions très positives le 8 mars.

Nous discutons aujourd'hui du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux et, sur l'ensemble des travées de cette assemblée, on ne cesse de s'interroger : compte tenu de l'ouverture à la concurrence, comment seront financées à l'avenir les missions de La Poste ? Ces missions sont les suivantes : d'abord, la présence territoriale ; ensuite, l'unicité du prix du timbre ; enfin, l'accès de tous les citoyens, quels que soient le lieu de leur domicile et leurs revenus, aux services financiers de base que les banques refusent, de fait, à ceux qui n'ont pas les ressources suffisantes.

C'est la raison pour laquelle, avec mes collègues MM. Baylet, Collin et Fortassin, j'ai déposé cet amendement tendant à insérer un article additionnel afin que soit réaffirmé dans ce projet de loi le principe du fonds postal national de péréquation.

La création de ce fonds nous semble légitime ; elle entre tout à fait dans le cadre du texte que nous examinons. En outre, un signal doit être donné à l'entreprise publique, aux postiers, aux élus locaux et aux usagers que le Sénat est conscient de ce problème. La concertation sur des restrictions d'amplitude ou des suppressions de bureaux de plein exercice ne répond évidemment pas à la demande de la population. D'ailleurs, personne, dans cet hémicycle, ne le prétend.

Telle est la raison du dépôt de notre amendement. Nous ne voulons pas attendre début mars pour évoquer cette question : nous voulons que le principe d'un fonds postal national de péréquation soit acquis dès maintenant. Dans le texte de loi spécifique à La Poste, nous essaierons de lui donner un contenu. Nous proposerons également la création d'un fonds de compensation, mais il s'agit là d'une autre démarche, qui est complémentaire de celle qui vise à créer un fonds de péréquation.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. Le débat sur la création d'un fonds postal national de péréquation aura lieu lors la discussion du projet de loi relatif à la régulation des activités postales et la commission des finances émettra un avis à cet égard.

Pour les raisons évoquées à plusieurs reprises, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Frédéric de Saint-Sernin, secrétaire d'Etat. Lors de l'examen en première lecture du projet de loi relatif à la régulation des activités postales, le Sénat a introduit un article qui pose le principe d'un fonds postal national de péréquation.

Lors de l'examen de ce texte à l'Assemblée nationale, la semaine dernière, la création de ce fonds a été confirmée et l'origine de ses ressources précisée. Les dispositions adoptées par l'Assemblée nationale prévoient notamment que les communes situées dans les zones de revitalisation rurale pourront bénéficier d'une majoration significative des ressources qui seront perçues au titre de la péréquation postale.

Cet amendement me semble donc sans objet et j'en sollicite le retrait.

M. le président. La parole est à M. Pierre Hérisson, pour explication de vote.

M. Pierre Hérisson. En dépit des commentaires que j'ai faits tout à l'heure sur l'arrivée très prochaine du texte concernant la directive postale, je n'ai pas été entendu. Puisque ce « tour de chauffe » préparatoire à la transposition de la directive postale paraît indispensable à certains, je veux bien m'y soumettre. Je répondrai à cette occasion à notre collègue Gérard Delfau, qui a fait référence à la fois au groupe de travail sur la péréquation postale et à la Commission supérieure du service public des postes et télécommunications, dont il est membre.

Ici même, notre collègue Gérard Larcher, aujourd'hui membre du Gouvernement, a attiré l'attention des gouvernements successifs - pas uniquement ceux de la majorité actuelle - avec des rapports d'information aux titres significatifs : - « Sauver La Poste », « La Poste : le temps de la dernière chance » - sur l'urgence de moderniser La Poste. Car il s'agit, au sein des services publics, d'une grande entreprise.

La décision de transposer la directive postale a été acceptée par la majorité et par l'opposition puisqu'elle a été prise à un moment où M. Jacques Chirac était Président de la République et M. Lionel Jospin Premier ministre. Le problème n'est donc pas de savoir si les uns ou les autres ont pris la bonne décision puisque celle-ci a été prise d'un commun accord.

Il est vrai que le Gouvernement avait promis la création de la « banque postale » au cours du premier semestre de l'année 2005 ; l'Assemblée nationale vient de la reporter au 1er janvier 2006. Mais comment reprocher quelques mois de retard après cinq ans d'immobilisme total, qui sont pires que le statu quo dans la mesure où le ministre de l'époque lui-même promettait un service public de La Poste à la française au sein de l'Union européenne ?

Nous n'en sommes plus là aujourd'hui ! Chacun assume ses responsabilités. Pour ma part, en tant que président du groupe de travail, organe à la fois pluraliste - les diverses sensibilités politiques y sont représentées - et paritaire - les représentants de la direction de La Poste en sont membres -, j'essaye, avec modestie mais détermination, de faire évoluer les choses dans le sens souhaité par l'Association des maires de France.

Cette dernière examinera d'ailleurs dans les jours à venir un projet de nouvelles conventions d'agences postales. Les contributions financières destinées à permettre la présence postale en milieu rural vont doubler. Je crois ne pas trahir un secret en disant que, dès demain, une commune qui assurera la présence postale sur le territoire communal sera dotée, a minima, de 10 000 euros par an, alors qu'elle doit se satisfaire aujourd'hui de moins de la moitié.

M. Bernard Cazeau. Qui paiera ?

M. Pierre Hérisson. Un certain nombre d'évolutions apparaissent donc au travers de ce texte. Elles ne peuvent être considérées comme des reculs par rapport à ce que nous avons connu pendant trop longtemps : l'immobilisme a failli tuer La Poste française.

Il en est d'ailleurs de même pour l'ensemble des services publics : nous devons les réformer et prendre en compte l'avis des usagers, qui, dans la plupart des cas, sont devenus des clients du service public. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. En fait, cet amendement pourrait être cosigné par les 6 200 conseils municipaux qui ont délibéré, sur l'initiative de l'Association des maires de France, afin que soit créé par la loi un fonds postal national de péréquation. Nombreuses sont donc les communes rurales qui suivent nos débats

Ce fonds de péréquation, a simplement pour objet de financer les missions de service public de La Poste, qui diffèrent de ses missions de service universel, assurées par le fonds de compensation, ainsi que de ses activités de type commercial.

Par conséquent, il y a là une contradiction et je rends volontiers justice à notre ami Pierre Hérisson de rappeler que, jusqu'à présent, ce problème n'avait pas vraiment été évoqué.

Il faut financer les missions de service public de La Poste, afin que celles-ci soient assurées de façon suffisante sur l'ensemble du territoire. Quant à savoir quel doit être le montant d'une telle opération, les esprits les plus modérés - c'est ce qui ressort de la plupart des rapports sur le sujet - avancent une fourchette qui se situe entre 500 millions et 750 millions d'euros.

A l'heure actuelle, notamment au sein du groupe de travail auquel j'ai eu le plaisir de participer, il semble que nous pourrions nous contenter des 150 millions d'euros que La Poste apporterait sur les fonts baptismaux. Voilà qui est étrange, car, jusqu'à présent, La Poste nous disait qu'elle n'avait pas d'argent et qu'elle ne pouvait donc pas assurer une présence postale satisfaisante sur l'ensemble du territoire. Or voilà qu'elle trouve tout de même 150 millions d'euros, somme qui, en fait, sert à justifier l'exonération fiscale dont elle bénéficie en matière de taxe professionnelle de la part de Bruxelles.

Dès lors, de deux choses l'une : ou bien l'on veut véritablement que La Poste assure des missions de service public, notamment une présence postale suffisante, et il faudra bien en assurer le financement, ou bien ce ne sont là que des histoires, et le fait que celles-ci soient anciennes ou plus récentes ne change rien à l'affaire : il faudra bien, enfin, cesser de « tourner autour du pot » et financer les missions de service public si l'on souhaite confier celles-ci à La Poste ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.

M. Pierre-Yvon Trémel. Dans quelques semaines, nous entamerons un nouveau débat sur La Poste, plus précisément sur la présence postale sur le territoire, ainsi que sur le fonds postal national de péréquation.

Sur le principe, tout le monde semble souhaiter la mise en place de ce fonds postal national de péréquation. Là où des divergences apparaissent, c'est sur deux aspects qui sont tout de même extrêmement importants : d'une part, comment ce fonds devra-t-il intervenir pour assurer une présence postale sur tout le territoire, et, d'autre part, quel est le montant qu'il conviendra d'affecter à ce fonds postal national de péréquation et qui paiera ?

Au sein du groupe de travail que préside notre collègue Pierre Hérisson, nous avons pu mesurer très objectivement la difficulté de la tâche et, à cet égard, l'amendement n° 197 rectifié, que nous a présenté Gérard Delfau, contient deux éléments auxquels nous tenons beaucoup.

Il s'agit, d'abord, des règles d'accessibilité. En effet, cet amendement précise : « Les évolutions des formes de la présence postale sur le territoire seront conduites selon les modalités prévues par la loi dans le souci d'une amélioration de la qualité du service rendu et du principe d'égalité des droits des citoyens. » Cela est tout à fait cohérent avec la position que nous avions défendue lors de la discussion, en première lecture, du projet de loi relatif à la régulation des activités postales.

Par ailleurs, cet amendement prévoit les mesures suivantes : « La loi de finances la plus proche fixera le montant et les modalités de financement de ce fonds. » Il convient, en effet, de ne pas adopter une position figée consistant à dire que sera prélevée une somme de 150 millions d'euros sur les fonds de La Poste : il faut définir auparavant les règles d'accessibilité d'où découlera le montant de ce fonds.

Telle est la raison pour laquelle je soutiens cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau.

M. Gérard Delfau. D'aucuns se demandaient si le temps était venu de discuter du fonds postal national de péréquation. La qualité du débat qui vient d'intervenir a montré que tel était bien le cas et qu'il s'agissait d'une préoccupation commune.

Par ailleurs, monsieur le secrétaire d'Etat, l'Assemblée nationale, c'est l'Assemblée nationale ; nous sommes ici au Sénat et il est normal que nous nous saisissions de sujets qui nous paraissent importants, même si nous restons vigilants quant aux décisions prises par nos collègues députés.

Enfin, puisque Pierre Hérisson a cité fort opportunément Gérard Larcher, alors que ce dernier était président de la commission des affaires économiques du Sénat, je vous rappellerai, mes chers collègues, que Gérard Larcher, précisément, avait estimé à 3 milliards de francs le surcoût des missions de service public de La Poste, somme qu'il faudrait non seulement convertir en euros, mais également actualiser, puisque son rapport date, si mes souvenirs sont exacts, de cinq ou six ans.

Je reprendrai donc ce que vient de dire Pierre-Yvon Trémel : nous demandons la mise en place d'un fonds de péréquation ; nous ne nous contenterons pas d'une aumône, nous ne tendons pas la sébile ! En tant qu'élus locaux, nous voulons un vrai financement des missions de service public, que l'on continuera, à juste titre, à confier à La Poste une fois que cette entreprise sera complètement dans le champ concurrentiel.

C'est pour donner ce signal fort que je demande à l'ensemble de nos collègues de voter le présent amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. Pierre Hérisson. Pourquoi ne pas rajouter un article sur les fruits et légumes, monsieur Delfau ?

M. Gérard Delfau. Je souhaite que ces propos figurent au Journal officiel, car ils me paraissent tout à fait déplacés !

M. Pierre Hérisson. Je suis prêt à le dire publiquement !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 197 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Art. additionnel après l'art. 37 F
Dossier législatif : projet de loi relatif au développement des territoires ruraux
Art. additionnels avant l'art. 38

Article additionnel avant l'article 37

M. le président. L'amendement n° 320, présenté par MM. Pastor, Piras, Raoult, Courteau, Dussaut et Lejeune, Mmes Herviaux et Y. Boyer, MM. Besson, Caffet et Desessard, Mmes Hurel et Khiari, MM. Krattinger, Raoul, Reiner, Repentin, Saunier, Teston, Trémel et Lise, Mme M. André, MM. Bel, Dauge, Domeizel, Marc, Picheral, Signé, Vidal et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 37, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I - A partir de la date de la publication de la loi, il est institué une aide à la distribution des journaux et publications agricoles de périodicité au maximum bimensuelle, remplissant les conditions prévues à l'article D. 18 du code des postes et des communications électroniques et qui, par leur contenu concourent de façon permanente à l'information et à la formation des agriculteurs.

Cette aide est proportionnelle au nombre d'exemplaires diffusés par La Poste.

Les modalités d'application de cette aide sont fixées par décret.

II. - L'augmentation éventuelle des charges de l'Etat résultant du I est compensée à due concurrence par le relèvement de la taxe prévue à l'article 150 V bis du code général des impôts.

La parole est à M. Paul Raoult.

M. Paul Raoult. Cet amendement concerne la diffusion des journaux agricoles dans le monde rural.

Avec une diffusion annuelle de 41 millions d'exemplaires, la presse agricole et rurale touche près de 90 % des agriculteurs et constitue de fait le principal relais de communication vers le monde rural. Elle remplit une mission d'information essentielle auprès de ses lecteurs non seulement par sa couverture de l'actualité politique, économique et culturelle du pays, mais aussi et surtout par sa contribution sur le plan de la formation professionnelle.

Par ailleurs, la presse agricole est la seule forme de presse destinée à être distribuée principalement dans les villages. Diffusée à 97 % par La Poste, elle représente une part importante du trafic postal en zone rurale et participe au désenclavement des zones faiblement peuplées.

Or les différentes mesures adoptées dans le cadre des accords entre l'Etat, la presse et La Poste, souscrits en 1996 et 1997, ont conduit à des hausses d'affranchissement difficilement supportables par les publications agricoles.

Ainsi, entre 1996 et 2001, les hausses de tarif supportées par les hebdomadaires ont été en moyenne de 130 %, tandis que certains titres particulièrement légers ont vu leur coût d'affranchissement multiplié par quatre. De surcroît, une nouvelle série d'augmentations des tarifs postaux de presse devrait intervenir en 2005.

Afin de contribuer au maintien d'une population agricole la plus dense possible sur l'ensemble du territoire et de favoriser la diffusion d'une information professionnelle de qualité auprès du monde agricole, il est proposé d'attribuer une aide financière aux journaux professionnels agricoles qui, de par leur périodicité et leur contenu, concourent à l'information et à la formation du citoyen.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. Un amendement similaire n'avait pas été retenu en première lecture au motif qu'il ne concernait pas directement le développement des territoires ruraux. La commission est donc toujours défavorable à une telle mesure.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Frédéric de Saint-Sernin, secrétaire d'Etat. Un protocole d'accord sur les tarifs de presse a été signé l'an dernier entre l'Etat, La Poste et les éditeurs de presse, protocole qui prévoit d'ailleurs une aide d'Etat à l'exemplaire distribué dans les zones peu denses pour permettre justement l'égal accès des citoyens à l'ensemble des publications de presse. C'est la raison pour laquelle il ne me paraît pas opportun de créer un dispositif spécifique pour la presse agricole.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 320.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Chapitre II

Dispositions relatives à l'installation des professionnels de santé et à l'action sanitaire et sociale

Art. additionnel avant l'art. 37
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Art. 38

Articles additionnels avant l'article 38

M. le président. L'amendement n° 338 rectifié, présenté par MM. Pastor, Piras, Raoul, Raoult, Dussaut et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Avant l'article 38, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le II de l'article 25 de la loi n°98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999 est complété par cinq alinéas ainsi rédigés :

« Au regard des objectifs définis par la carte sanitaire et le schéma d'organisation sanitaire et en fonction des recommandations du conseil régional de la santé, notamment en ce qui concerne la nature et l'importance des installations nécessaires pour répondre aux besoins de la population et afin de faciliter l'installation de médecins dans les zones médicalement dépeuplées, l'Etat avec la collectivité publique ou les établissements publics de coopération intercommunale compétents mettent en oeuvre une politique d'installation fondée sur un contrat d'objectif avec les médecins ou les étudiants en troisième cycle de médecine ayant opté pour le résidanat ».

« Ce contrat d'objectif mentionne :

« - la durée d'installation dans ladite zone pour une durée de cinq années ;

« - la revalorisation du rôle du médecin généraliste comme médecin coordonnateur ».

« Un médecin ne peut prétendre au renouvellement d'un contrat d'objectif sur la même zone ou sur toute autre zone médicalement dépeuplée ».

La parole est à M. Paul Raoult.

M. Paul Raoult. Reprenant le contenu des propositions figurant dans un rapport remis au ministre de la santé par Charles Descours, cet amendement prévoit la mise en place d'un contrat d'objectif entre l'Etat et les médecins ou futurs médecins. Ce contrat repose à la fois sur les outils incitatifs à l'installation, tels qu'ils sont définis par la loi, sur des dégrèvements fiscaux, ainsi que sur un engagement de la part du médecin d'exercer dans ladite zone durant cinq années.

De même, ce contrat d'objectif offre la possibilité de travailler dans un lieu adapté aux besoins, ainsi qu'une revalorisation du rôle du médecin généraliste en médecin « référent » ou coordonnateur. Fondé sur le volontariat, ce contrat d'objectif ne remet pas en cause le principe de libre installation.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. La politique de santé de l'Etat constitue un débat spécifique qui ne saurait se dispenser des avis et recommandations de la commission des affaires sociales du Sénat, experte en la matière.

La commission des affaires économiques est donc défavorable à cet amendement.

M. Daniel Raoul. C'est un peu léger comme argument !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat à l'assurance maladie. Avant de donner l'avis du Gouvernement sur cet amendement, monsieur le président, je souhaite dire le plaisir que j'éprouve à me retrouver ce soir devant la Haute Assemblée. A l'instar des débats qui ont eu lieu dans cet hémicycle lors de l'examen du projet de loi relatif à l'assurance maladie, ainsi que du projet de loi de financement de la sécurité sociale, j'espère que le dialogue sera tout aussi approfondi.

Cela étant dit, je risque de décevoir les auteurs de l'amendement n° 338 rectifié, sur lequel le Gouvernement a émis un avis défavorable.

Comme vient de l'expliquer M. le rapporteur, il est important de ne pas perdre de vue la cohérence des dispositifs. Or la création d'un outil supplémentaire, et surtout d'une procédure supplémentaire, telle qu'elle est prévue dans cet amendement, me paraît inopportune. En effet, grâce aux dispositions de l'article 38, que nous allons examiner dans un instant, et à celles de la loi sur l'assurance maladie du 13 août dernier, nous disposons déjà des instruments juridiques nécessaires à une politique d'aide.

Je pense que nous reviendrons sur ce point ultérieurement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 338 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 339 rectifié, présenté par MM. Pastor, Piras, Raoul,  Raoult,  Dussaut et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 38, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le premier alinéa de l'article 17 de la loi n°95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Il favorise la création de maisons de la santé ou de services privés d'utilité publique pour la transmission ou la création de cabinets médicaux dans les zones médicalement dépeuplées dans le cadre de la politique de contractualisation ».

La parole est à M. Paul Raoult.

M. Paul Raoult. Reprenant la proposition de loi n° 124 et le contenu des propositions figurant dans le rapport au ministre de la santé de M. Charles Descours, cet amendement a pour but d'inscrire dans la loi des objectifs clairs en matière d'aménagement du territoire.

L'inscription dans la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, la LOADT, d'une obligation faite à l'Etat de créer des « maisons de la santé » ou des services privés d'utilité publique va lui permettre de confirmer son rôle en matière d'aménagement du territoire, et ainsi de signifier concrètement sa volonté de favoriser l'installation de médecins dans ces zones et d'élaborer dans le même temps une politique de mise en réseaux des soins.

Cette obligation rendra par ailleurs exécutoires les principes inscrits dans le schéma de services collectifs sanitaires visant à corriger des inégalités intra et infrarégionales en matière d'offre de soins et à promouvoir la continuité et la qualité des prises en charges. L'objectif qui consiste à définir une politique garantissant un égal accès aux soins, notamment dans certaines zones présentant des risques en termes de desserte sanitaire, s'en trouvera renforcé.

Enfin, la mise en place dans les zones médicalement dépeuplées de « maisons de la santé » ou de services privés d'utilité publique soulagera financièrement les communes rurales et créera les conditions idoines de futures installations de médecins.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. Cet amendement ayant le même objet que l'amendement précédent, nos observations sont les mêmes.

La commission est donc défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Les mêmes observations conduisant souvent aux mêmes conclusions, l'avis du Gouvernement est également défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 339 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 340 rectifié, présenté par MM. Pastor,  Piras,  Raoul,  Raoult,  Dussaut et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 38, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 2° de l'article L. 1417-1 du code de la santé publique est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« A ce titre, elle développe une politique d'installation dans les zones médicalement dépeuplées en favorisant la mise en place de services privés d'utilité publique par la création de cabinets médicaux ou leur transmission ainsi que la création de maisons de la santé.

« La création et le développement des maisons de la santé doit offrir la possibilité d'une réponse à un exercice plus organisé et plus collectif de la médecine, notamment par le développement des réseaux de soins et des réseaux de santé dans lesquels le médecin généraliste se voit confier leur coordination ».

La parole est à M. Paul Raoult.

M. Paul Raoult. L'argumentation est la même ; je n'ai donc rien à ajouter, monsieur le président.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Avis défavorable également.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 340 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Art. additionnels avant l'art. 38
Dossier législatif : projet de loi relatif au développement des territoires ruraux
Art. 38 bis

Article 38

I. - Après l'article L. 1511-7 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 1511-8 ainsi rédigé :

« Art. L. 1511-8. - I. - Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent attribuer des aides destinées à favoriser l'installation ou le maintien de professionnels de santé dans les zones définies à l'article L. 162-47 du code de la sécurité sociale, dans lesquelles est constaté un déficit en matière d'offre de soins. A cette fin, des conventions sont passées entre les collectivités et groupements qui attribuent l'aide, les organismes d'assurance maladie et les professionnels de santé intéressés. Les centres de santé visés à l'article L. 6323-1 du code de la santé publique peuvent également être attributaires de ces aides dans les mêmes conditions. Ces aides ne sont pas exclusives des aides déjà attribuées par les collectivités territoriales aux centres de santé implantés sur l'ensemble du territoire.

« La nature et les conditions d'attribution de ces aides, qui peut notamment être subordonnée à des modes d'exercice de groupe ou d'exercice pluriprofessionnel destinés à améliorer la continuité et la qualité des soins, sont fixées par décret en Conseil d'État.

« Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent aussi attribuer des aides visant à financer des structures participant à la permanence des soins, notamment des maisons médicales.

« Les investissements immobiliers réalisés par les communes et/ou leurs groupements, destinés à l'installation des professionnels de santé et/ou à l'action sanitaire et sociale, sont éligibles au Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée.

« Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent également accorder des indemnités de logement et de déplacement aux étudiants de troisième cycle de médecine générale lorsqu'ils effectuent leurs stages dans les zones définies par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 précitée, dans lesquelles est constaté un déficit en matière d'offre de soins.

« Un décret détermine le montant maximal et les modalités d'attribution de ces indemnités.

« II. - Une indemnité d'étude et de projet professionnel peut être attribuée par les collectivités territoriales et leurs groupements à tout étudiant en médecine, à partir de la première année du troisième cycle, s'il s'engage à exercer comme médecin généraliste au moins cinq années dans l'une des zones déficitaires mentionnées au premier alinéa du I. Pour bénéficier de cette aide, l'étudiant signe un contrat avec la collectivité qui attribue l'aide.

« Les conditions générales d'attribution de l'indemnité, son montant maximal ainsi que, le cas échéant, les modalités de son remboursement total ou partiel et de sa réévaluation sont déterminés par décret. »

II. - La perte de recettes pour l'État résultant du quatrième alinéa du I de l'article L. 1511-8 du code général des collectivités territoriales est compensée par une majoration à due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. le président. L'amendement n° 341 rectifié, présenté par MM. Pastor,  Piras,  Raoul,  Raoult,  Dussaut et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I. Dans la première phrase du premier alinéa du I du texte proposé par cet article pour insérer un article L. 1511-8 du code général des collectivités territoriales, remplacer les mots :

et leurs groupements

par les mots :

, leurs groupements et l'Etat, par le biais des contrats d'objectifs définis à l'article .. de la loi n° ... . du ... . relative au développement des territoires ruraux (Cf. amendement n° 338)

II. Dans le troisième alinéa du I  du même texte, remplacer les mots :

et leurs groupements

par les mots :

leurs groupements et l'Etat

III. Dans la première phrase du premier alinéa du II du même texte, remplacer les mots :

et leurs groupements

par les mots :

leurs groupements et l'Etat

IV. A la fin de la seconde phrase du même alinéa, remplacer les mots :

avec la collectivité qui attribue l'aide

par les mots :

un contrat d'objectifs tel que définis à l'article .. de la loi n° ... . du ... . relative au développement des territoires ruraux (Cf. amendement n° 338)

V. Compléter le même texte par un paragraphe ainsi rédigé :

« ... L'aide financière de l'Etat aux médecins s'installant sur la base d'un contrat d'objectif se traduit par le versement d'une prime à l'installation dans les conditions définies par la loi n°98-1194 du 23 décembre 1998 de financements de la sécurité sociale pour 1999 précitée et de remises partielles ou totales d'impôts ou de taxes.

VI. Après le I de cet article, insérer trois paragraphes ainsi rédigés :

... - L'article 1464 D du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« ...  le médecin s'installant sur la base d'un contrat d'objectif dans une zone médicalement dépeuplée bénéficie d'un dégrèvement total de la taxe professionnelle durant cinq années ».

... - Le 4 de l'article 39 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« ... Le prix d'acquisition, taxes comprises, des véhicules de tourisme neufs ou d'occasions est amortissable jusqu'à un plafond de 34.000 Euros pour les médecins s'installant sur la base d'un contrat d'objectif dans une zone médicalement dépeuplée ».

... - Tout médecin s'installant sur la base d'un contrat d'objectif dans une zone médicalement dépeuplée bénéficie d'un dégrèvement fiscal sur les bénéfices non commerciaux de :

- 15.240 euros durant les deux premières années ;

- 7.620 euros la troisième année ;

- 3.810 euros la quatrième année ;

- 1.524 euros la cinquième année.

VII. Pour compenser la perte de recettes résultant des dispositions du VI, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

A. La perte de recettes pour les collectivités territoriales résultant du dégrèvement de taxe professionnelle en faveur des médecins est compensée par une majoration à due concurrence de la dotation globale de fonctionnement.

B. La perte de recettes pour l'Etat résultant du A ci-dessus est compensée par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Paul Raoult.

M. Paul Raoult. Cet amendement s'inspire également du rapport de M. Charles Descours.

Les modifications apportées à l'article L. 1511-8 sont nécessaires. En effet, on ne peut laisser aux seules collectivités ou à leurs groupements l'ensemble des charges financières pour répondre à une problématique qui relève de la responsabilité de l'Etat. En tant que « premier aménageur » du territoire et garant de la sécurité publique quant à l'accès aux soins, il est du devoir de l'Etat de s'impliquer dans la résolution de cette difficulté.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de conséquence. La commission émet donc également un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 341 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 224 rectifié bis, présenté par MM. Vial,  Faure,  Hérisson,  Émin,  Belot,  Fournier et  Doligé, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 1511-8 du code général des collectivités territoriales, après les mots :

article L.162-47 du code de la sécurité sociale,

insérer les mots :

dans les zones de revitalisation rurale, dans les zones de territoires ruraux de développement prioritaire et dans les zones de montagne telles que définies par l'article 3 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 155, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Supprimer le quatrième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 1511-8 du code général des collectivités territoriales.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Cet amendement vise à supprimer la mesure d'élargissement du champ d'intervention du FCTVA, mesure prévue à l'article 38 et introduite par l'Assemblée nationale en deuxième lecture.

Le Gouvernement souhaite supprimer cette disposition pour deux raisons.

D'abord, l'article 38 déroge aux règles d'éligibilité au FCTVA, qui ne peut concerner que des dépenses entrant dans le champ de compétences des collectivités, sur des biens intégrés dans leur patrimoine et pour leur usage propre.

Ensuite - et surtout, suis-je tenté de dire -, en matière d'aide à l'installation, le Gouvernement souhaite privilégier la clarté et éviter l'empilement de dispositifs.

En l'occurrence, les autres dispositifs d'aide prévus à l'article 38 viendront compléter les aides financières conventionnelles visées par la loi qui seront mises en oeuvres.

Il existe d'ores et déjà des aides fiscales, en matière de taxe professionnelle notamment. Il n'est donc pas opportun, pour la lisibilité de l'ensemble, d'aller au-delà en prévoyant, de surcroît, une disposition particulière relative aux investissements immobiliers réalisés par les communes pour l'installation des professionnels de santé.

Il est important de concentrer nos efforts afin de mettre en place des outils simples d'incitation. S'ils sont simples, ils seront lisibles et, s'ils sont lisibles, ils seront utilisables par les professionnels concernés.

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement vous propose de supprimer cette disposition en adoptant cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. Le présent amendement reprend les critiques faites à cette disposition adoptée par l'Assemblée nationale en deuxième lecture.

Le Gouvernement relève que le dispositif n'introduit aucune limitation géographique. Pourtant, chacun sait que c'est dans les territoires dépourvus d'une véritable couverture sanitaire que les communes réalisent le type d'investissement qui bénéficierait de l'éligibilité au FCTVA.

En conséquence - je suis désolé, monsieur le secrétaire d'Etat -, la commission, dont je dois être le fidèle rapporteur, a jugé favorablement un dispositif qui va dans le sens de l'amélioration de la couverture sanitaire des territoires les plus fragiles.

Elle a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Paul Blanc, pour explication de vote.

M. Paul Blanc. Je comprends très bien les arguments du Gouvernement, mais je suis plutôt de l'avis de la commission, car cet amendement porte sur un problème que je rencontre en ce moment dans ma commune !

Nous avons été obligés de réaliser un cabinet médical pour le mettre à la disposition d'un médecin qui a bien voulu s'installer. Je trouverais anormal que cet investissement ne soit plus éligible au FCTVA, alors que nous avons participé à la mission de service public et à la couverture médicale de l'ensemble du territoire !

Qui plus est, nous sommes en zone de revitalisation rurale et en zone de montagne ! J'avoue ne pas très bien comprendre l'argumentaire de M. le secrétaire d'Etat. Je crois qu'il a été inspiré par Bercy.

M. Jean-Louis Carrère. Eh oui, c'est cela le libéralisme !

M. Paul Blanc. Lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale, je vous ai apporté un soutien fidèle, monsieur le secrétaire d'Etat, parce que ce texte me paraissait aller dans le bon sens. Mais, cette fois, je ne vous suivrai pas et je ne voterai pas votre amendement.

M. le président. La parole est à M. Jacques Blanc.

M. Bernard Piras. Un Blanc peut en cacher un autre ! (Sourires.)

Un sénateur socialiste. C'est le lobby des médecins !

M. Jacques Blanc. Je crois aussi, comme le président de la commission et comme mon confrère et ami Paul Blanc, qu'il y a une certaine contradiction, puisque - c'est d'ailleurs acté - les collectivités ont la possibilité d'investir dans des zones de montagne ou dans des zones de revitalisation rurale !

Dans un département comme la Lozère, si un syndicat intercommunal ne construit pas une clinique, il n'y a pas de clinique ! Nous mesurons donc bien l'indispensable intervention des collectivités pour maintenir le service qui est le plus nécessaire dans les zones de montagne, les zones de revitalisation rurale ou les zones défavorisées.

Monsieur le secrétaire d'Etat, peut-être pourriez-vous déposer un sous-amendement pour que, au moins dans les zones de montagne ou les zones de revitalisation rurale, les investissements demeurent éligibles au FCTVA ! (Marques d'approbation sur les travées de l'UMP.)

M. Jean-Louis Carrère. Finalement, vous n'êtes libéraux que lorsque cela vous arrange !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 155.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. Thierry Repentin. Quel succès !

M. Jean-Louis Carrère. C'est un moment historique !

M. le président. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou, pour explication de vote sur l'article 38.

M. Aymeri de Montesquiou. Je voudrais, à mon tour, souligner l'inquiétude des élus de certains départements ruraux.

Ainsi, dans l'Orne, département représenté brillamment par mon collègue Daniel Goulet, les chiffres de la désertification médicale sont alarmants.

Le maintien de l'offre de soins étant un enjeu capital, les aides doivent être concertées et rapidement attribuées.

L'Orne dispose de 51 médecins pour 100 000 habitants, alors que la moyenne nationale est de 91 ! Ce même département compte un dentiste pour 2 500 habitants, alors que la moyenne nationale est d'un dentiste pour 1 580 habitants !

Trois généralistes sur dix ont plus de cinquante ans et les trois-quarts des jeunes médecins décident d'exercer en milieu urbain. Il est donc particulièrement important de motiver l'implantation en zones rurales !

C'est pourquoi l'installation de maisons de la santé a été proposée depuis longtemps, dans l'Orne. Des projets sont en cours de réalisation grâce à la volonté des élus. Daniel Goulet souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur les carences, qui sont catastrophiques, en matière de pédiatres et de médecins scolaires : 6 médecins pour 42 000 élèves ! Les articles votés aujourd'hui sont capitaux pour les générations futures.

M. le président. Je mets aux voix l'article 38.

(L'article 38 est adopté.)

Art. 38
Dossier législatif : projet de loi relatif au développement des territoires ruraux
Art. additionnel après l'art. 39

Article 38 bis

I. - Les honoraires perçus par les médecins, ou leurs remplaçants, dont la zone de garde comporte majoritairement des communes de moins de 3 500 habitants, sont exonérés de l'impôt sur le revenu, lorsque sont effectuées des visites de nuit, des gardes le dimanche ou des périodes d'astreinte, à concurrence de soixante jours d'exercice par an.

Un décret précise les conditions de mise en oeuvre du présent article.

II. - Les pertes de recettes éventuelles pour l'État sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux tarifs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 156 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit cet article :

La rémunération perçue au titre de la permanence des soins exercée en application de l'article L. 6315-1 du code de la santé publique par les médecins ou leurs remplaçants installés dans une zone définie en application de l'article L. 162-47 du code de la sécurité sociale, est exonérée de l'impôt sur le revenu à hauteur de 60 jours de permanence par an.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Parfois, les amendements gouvernementaux se suivent, mais les votes ne se ressemblent pas ! Si tel était le cas, le Gouvernement serait particulièrement satisfait, car il s'agit là d'un amendement important pour un problème qui ne l'est pas moins.

Aujourd'hui, de vraies questions se posent : la démographie médicale et la répartition des professionnels de santé sur le territoire. Un certain nombre de réponses ont déjà été apportées, notamment dans le cadre de la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie. Des dispositions nouvelles, relatives notamment à des incitations, sont contenues dans le texte qui vous est aujourd'hui soumis en deuxième lecture. En outre, un dispositif très important sera discuté par les partenaires conventionnels - assurance maladie et professionnels de santé - avant le 15 mars 2005. Cela veut dire que, sur ce point essentiel qu'est la permanence des soins, nous y verrons clair avant la fin du premier trimestre.

Ce sujet pourrait se résumer à une question : comment le patient est-il pris en charge, quel que soit l'endroit où il habite sur le territoire français et quelle que soit l'heure à laquelle il rencontre un problème de santé ?

Il s'agit d'un problème - il mobilise toute l'attention de Philippe Douste-Blazy et de moi-même - que recouvre l'article 38 bis. Nous proposons, avec cet amendement, une nouvelle rédaction du dispositif qui a été adopté à l'Assemblée nationale, sur l'initiative du député M. Christian Ménard.

Nous avons pris la mesure des attentes des élus, mais il nous paraît important de proposer un système plus lisible, plus incitatif et plus directement lié à la permanence des soins.

Je vous l'ai dit, mesdames, messieurs les sénateurs, de nouvelles dispositions conventionnelles interviendront avant le 15 mars 2005.

Les députés ont souhaité introduire un article tendant à créer une mesure fiscale en faveur des médecins installés dans les zones déficitaires définies par les missions régionales de santé.

Le présent amendement vise à étendre cette exonération fiscale aux professionnels de santé qui entrent dans la logique de la permanence des soins, en lui donnant un contenu que les élus locaux et les sénateurs appellent de leurs voeux depuis longtemps.

Le Gouvernement estime que cette mesure serait cohérente avec le dispositif qui sera mis en place par les missions régionales de santé, et c'est un élément important. Par ailleurs, elle donnerait plus de clarté et de simplicité à l'ensemble du système.

Cette disposition fiscale contribuerait à renforcer la permanence des soins, ce qui serait de nature à satisfaire les souhaits des parlementaires. J'ai d'ailleurs eu l'occasion de m'en entretenir avec M. Ménard. Elle permettrait en outre de maintenir la notion de soixante jours de permanence par an, l'exonération fiscale étant applicable à la rémunération perçue au titre de la permanence des soins.

Cela permettrait de donner un contenu très précis à la notion d'égalité d'accès aux soins, que nous appelons tous de nos voeux.

M. le président. L'amendement n° 182 rectifié, présenté par MM. Fouché,  Carle,  Barraux,  de Richemont,  Hérisson,  Bertaud et  Murat, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit cet article :

I - Les honoraires perçus par les médecins ou infirmiers libéraux qui créent ou reprennent un cabinet dans une commune de moins de 3 500 habitants sont exonérés de l'impôt sur le revenu à concurrence de 50 % de leur montant les deux premières années, de 30 % de leur montant les trois années suivantes et de 20 % les cinq années qui suivent.

Un décret précise les conditions de mise en oeuvre du présent article.

II - Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux tarifs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Alain Fouché.

M. Alain Fouché. Plusieurs d'entre nous estiment qu'il est urgent de prendre des mesures pour faciliter l'installation des médecins et des infirmiers dans les communes de moins de 3 500 habitants. En effet, certains médecins qui cessent leur activité sont difficilement remplacés. Il en résulte des difficultés pour les habitants, qui n'ont pas tous les moyens de se déplacer.

Or la disparition des professions de santé n'est pas sans conséquences fâcheuses sur la qualité de vie des habitants d'une commune, ni sur son attractivité.

C'est la raison pour laquelle nous proposons que les honoraires perçus par les médecins et les infirmiers libéraux qui créent ou reprennent un cabinet dans une commune de moins de 3 500 habitants soient exonérés de l'impôt sur le revenu à concurrence de 50 % de leur montant les deux premières années, de 30 % les deux années suivantes et de 20 % pour les cinq années ultérieures.

Un décret précisera les conditions de mise en oeuvre de cet article.

M. le président. Le sous-amendement n° 443 rectifié, présenté par M. J. Blanc, est ainsi libellé :

Après les mots :

commune de moins de

rédiger comme suit la fin du premier alinéa du I du texte proposé par l'amendement n° 182 rectifié :

2 000 habitants en zones de revitalisation rurale bénéficient des mêmes exonérations que celles prévues pour les bénéfices générés par les entreprises artisanales ou commerciales à l'articler 1er. Il en est de même pour la taxe professionnelle.

La parole est à M. Jacques Blanc.

M. Jacques Blanc. Ma démarche s'inscrit dans le cadre de l'objectif politique du Gouvernement en faveur des zones rurales qui rencontrent des difficultés.

Le présent amendement tend à étendre les exonérations accordées au titre de l'impôt sur le revenu ou de la taxe professionnelle aux installations ou aux reprises de cabinets dans les communes de moins de 2 000 habitants situées en zones de revitalisation rurale.

Vous connaissez les difficultés considérables que rencontrent les infirmières et les médecins qui souhaitent exercer leur activité dans ces communes.

Par ailleurs, le coût de cette disposition sera pratiquement nul pour le budget de l'Etat puisque le nombre de professionnels concernés est très réduit.

Enfin, en encourageant les médecins et les infirmières à reprendre des cabinets existants, nous apportons une solution aux praticiens qui tentent de céder leur cabinet.

Il s'agit d'un sous-amendement de repli, qui devrait recevoir l'avis favorable du Gouvernement. Son adoption irait dans le sens d'une plus grande cohérence et elle permettrait de placer les activités libérales au même niveau que les activités artisanales ou commerciales.

Je me suis référé à l'amendement que le Gouvernement a présenté à l'article 1er et dont l'adoption a rendu sans objet l'amendement que j'ai déposé. Dès lors, je n'ai pu défendre ma position. Monsieur le secrétaire d'Etat, je suis persuadé que, sur le fond, vous ne pouvez qu'être d'accord avec moi.

Pour m'en être entretenu avec de nombreux responsables, je puis vous assurer du bien-fondé d'une telle disposition qui, en outre, n'est pas d'un coût élevé pour l'Etat. Ainsi, nous reconnaîtrions l'importance des professions libérales de santé.

M. le président. Le sous-amendement n° 444, présenté par MM. Repentin,  Pastor,  Raoult et les membres du groupe Socialiste, est ainsi libellé :

Dans le premier alinéa du I du texte proposé par l'amendement n° 182 rectifié, après les mots :

de moins de 3 500 habitants,

insérer les mots :

définie par l'article 1465 A du code général des impôts dans sa rédaction proposée par le II de l'article 1er du projet de loi.

La parole est à M. Thierry Repentin.

M. Thierry Repentin. Comme l'a indiqué Michel Charasse à l'occasion de la discussion d'un article précédent, il convient d'être très précis en matière fiscale.

Il nous est proposé que les honoraires perçus par les médecins ou les infirmiers libéraux soient exonérés de l'impôt sur le revenu à hauteur de 60 jours de permanence par an dès lors que 50  % du temps de garde s'effectue dans des communes de moins 3 500 habitants.

Le sous-amendement n° 444 vise à préciser qu'il doit s'agir d'une commune de moins de 3 500 habitants « définie par l'article 1465 A du code général des impôts dans sa rédaction proposée par le II de l'article du projet de loi. »

Dans l'esprit du législateur - c'est du moins ainsi que je l'ai perçu, et je ne crois pas me tromper - il s'agit de permettre l'installation et le maintien de professionnels de santé dans les zones de revitalisation rurale.

Si nous adoptions l'amendement de M. Fouché, la disposition proposée s'appliquerait sur l'ensemble du territoire, y compris en milieu urbain, alors que les problèmes liés à la démographie médicale ne s'y posent pas dans les mêmes termes. De nombreux chefs-lieux de départements sont des grandes villes proches de communes de moins de 3 500 habitants. Or la loi ne vise pas ces cas de figure. Cette disposition aurait donc un effet inverse à celui que vous souhaitez.

Monsieur le secrétaire d'Etat, je soumets à la sagacité de votre analyse les conséquences de l'application de l'amendement présenté par M. Fouché. Je souhaite simplement rester fidèle à l'esprit de ce projet de loi relatif au développement des territoires ruraux.

M. le président. L'amendement n° 369, présenté par M. Desessard, Mmes Voynet,  Blandin et  Boumediene-Thiery, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le I de cet article :

I. - Dans la dotation globale de fonctionnement, une aide est affectée par l'Etat aux régions, chargées du développement économique afin de verser une subvention aux médecins et aux remplaçants dont la zone de garde comporte majoritairement des communes, situées en zone de revitalisation rurale, lorsque sont effectuées des visites de nuit, des gardes le dimanche ou des périodes d'astreinte, à concurrence de soixante jours d'exercice par an.

Un décret précise les conditions de mise en oeuvre du présent article.

La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. J'aurais pu être d'accord avec le Gouvernement (Ah ! sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.), et j'aurais été le seul, mais il a changé son fusil d'épaule.

M. Bernard Piras. Cela lui arrive souvent !

M. Jean Desessard. Il avait en effet considéré que l'article 38 bis, dans sa rédaction actuelle, était dérogatoire aux principes généraux de l'impôt sur le revenu. J'aurais pu reprendre cet argument, mais les sénateurs Verts sont hostiles aux exonérations d'impôt sur le revenu : il s'agit d'un impôt citoyen, juste, progressif et il ne faut pas multiplier les exonérations. C'est un principe !

Si une incitation est nécessaire, nous préférons que l'on attribue un forfait aux médecins pour les gardes et pour les astreintes. De ce point de vue, l'argumentation du Gouvernement était bonne. Mais il a changé d'avis ! Il estime maintenant que l'on peut accorder des exonérations d'impôt sur le revenu.

Le Gouvernement avait également déclaré que la fiscalité ne constituait pas le meilleur moyen de remédier à la pénurie de médecins. Or l'exonération initialement envisagée était importante puisqu'elle portait sur l'ensemble des revenus des médecins. Dans l'amendement n° 156 rectifié, il s'agit d'exonérer de l'impôt sur le revenu les rémunérations perçues par le médecin lorsqu'il est de garde ou d'astreinte, ce qui ne représente pas grand-chose.

Monsieur le secrétaire d'Etat, vous ne nous rassurez pas lorsque vous modifiez votre argumentaire et que vous changez votre fusil d'épaule.

Les sénateurs Verts sont opposés à l'exonération de l'impôt sur le revenu. Si une aide est nécessaire, nous souhaitons qu'elle prenne la forme d'un forfait accordé aux médecins de garde dans les communes situées en zone de revitalisation rurale.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. La commission n'a pas examiné l'amendement n° 156 dans sa version rectifiée. Il me semble toutefois répondre aux objectifs des inspirateurs de l'article 38 bis : la défiscalisation doit être limitée aux zones sous-médicalisées et ne concerner que les permanences de soins. D'ailleurs, l'exonération de l'impôt sur le revenu est prévue à hauteur de soixante jours de permanence par an.

J'émets donc un avis favorable sur cet amendement.

S'agissant de l'amendement n° 182 rectifié présenté par M. Fouché, de nombreuses dispositions sont prévues dans ce projet de loi en faveur des médecins qui exercent en zone de revitalisation rurale. La commission n'a pas estimé utile d'aggraver à l'excès le coût de la charge financière que l'ensemble de ces mesures va représenter pour l'Etat. Il sera sans doute préférable d'évaluer, à échéance régulière, les effets des dispositions adoptées avant d'en décider le renouvellement ou l'amplification.

J'invite donc notre collègue à retirer son amendement, auquel la commission est défavorable, d'autant que l'amendement du Gouvernement répond déjà en partie à ses préoccupations.

Pour ce qui est du sous-amendement n° 443 rectifié, le Gouvernement a proposé des avancées dans la direction que vous souhaitez, monsieur Jacques Blanc. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre sous-amendement. A défaut, la commission émettra un avis défavorable.

En ce qui concerne l'amendement n° 369, les préoccupations de ses auteurs rejoignent celles qui ont été exprimées par le Gouvernement. Mais comme j'ai émis un avis favorable sur l'amendement n° 156 rectifié du Gouvernement, je demande le retrait de l'amendement n° 369. Sinon, la commission émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement souhaite le retrait de l'amendement n° 182 rectifié, faute de quoi il serait amené à en demander le rejet.

Nous sommes en train de mettre en place un dispositif complet concernant non seulement l'installation, mais aussi le maintien des activités médicales en milieu rural, dispositif pour lequel nous avons fait le choix de l'incitation. Car nous pensons que l'incitation est la seule solution : nous ne croyons ni à la coercition ni à l'obligation, qui sont contraires aux principes du système libéral de médecine à la française.

Ajouter à ce dispositif des mesures qui prendraient en compte, notamment, la population des communes n'est pas forcément une bonne idée. Au-delà des fonctions ministérielles qui sont les miennes, j'exerce aussi celles d'élu local : elles me permettent par exemple d'observer, à côté d'une ville importante de 60 000 habitants, des communes de moins de 3 500 habitants qui, en tant que telles, pourraient bénéficier de tels dispositifs, mais qui ne présentent aucune carence en matière sanitaire et sociale. Cela montre que nous avons besoin d'avoir la vision la plus claire et la plus juste possible.

C'est pourquoi, je vous propose, mesdames, messieurs les sénateurs, de laisser aux missions régionales de santé, issues de la réforme de l'assurance maladie, le temps de se mettre en place. Elles associeront à la fois l'assurance maladie, les agences régionales de l'hospitalisation et les professionnels de santé, sans oublier les élus, tant nationaux que locaux. Ce sont elles qui définiront clairement les zones nécessitant des efforts particuliers.

Le dispositif que propose le Gouvernement permettra de rendre lisibles les aides fiscales concernant les astreintes liées à la permanence des soins et de les cibler sur les zones considérées comme prioritaires. Je crains que toute autre mesure ne vienne, en quelque sorte, s'y superposer et lui faire perdre sa lisibilité, donc l'efficacité que vous recherchez tous.

Telles sont les raisons pour lesquelles je souhaite le retrait de l'amendement n° 182 rectifié.

Quant à l'amendement n° 369, pour les mêmes raisons que celles qu'a exposées M. le rapporteur, le Gouvernement émettra un avis défavorable.

M. le président. Monsieur Jacques Blanc, le sous-amendement n° 443 rectifié est-il maintenu ?

M. Jacques Blanc. M. le secrétaire d'Etat ne s'est pas prononcé sur mon sous-amendement,...

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. J'ai demandé le retrait de l'amendement sur lequel il porte !

M. Jacques Blanc. ... qui répond pourtant à ses observations. En effet, limiter les avantages fiscaux à des communes de moins de 2 000 habitants situées en zone de revitalisation rurale pour les bénéfices générés par les entreprises artisanales ou commerciales, ce n'est pas créer une situation particulière : c'est assurer la cohérence de la politique d'aménagement rural dans une approche territoriale.

Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous demande d'analyser objectivement la situation des zones de revitalisation rurale. Si vous connaissez beaucoup de communes de 2 000 habitants dans lesquelles la reprise des cabinets médicaux s'effectue sans aucune difficulté, vous me les indiquerez, car je puis vous assurer que, pour notre part, nous rencontrons tous les jours le cas contraire ! Certes, ce n'est pas votre faute : c'est le résultat d'une centralisation qui a débouché dans le domaine de la santé sur une pénurie vraiment épouvantable. Nous manquons de médecins, d'infirmières, de kinésithérapeutes, de personnels ; les jeunes ont été éliminés. Aujourd'hui, il faut apporter un stimulant pour lutter contre cette pénurie, afin que le choix des professionnels concernés se porte vers les zones en difficulté, qui sont au coeur de ce projet de loi.

Je souhaite, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous preniez le temps de réfléchir et que, dans une nouvelle lecture de cet article, ou en accord avec les membres de la future commission mixte paritaire, vous proposiez une solution qui permette, dans la ligne de l'amendement que le Gouvernement a défendu à l'article 1er, d'étendre les exonérations aux professions libérales. Alors, le système serait cohérent.

J'ai bien conscience que, si votre amendement n° 156 rectifié est adopté, celui de notre collègue M. Fouché deviendra sans objet, et mon sous-amendement également. Je préfère donc le retirer (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.), mais je demande au Gouvernement de procéder à l'étude précise que j'évoquais à l'instant. Il s'agit de renvoyer la question non pas aux calendes grecques, mais, au pire, à la commission mixte paritaire. Je fais totalement confiance à l'éminent président de la commission des affaires économiques, qui est également rapporteur du projet de loi, pour défendre ce point de vue devant la commission mixte paritaire.

M. le président. Le sous-amendement n° 443 rectifié est retiré.

Monsieur Fouché, l'amendement n° 182 rectifié est-il maintenu ?

M. Alain Fouché. Les exonérations fiscales ne sont pas rares en France et, parfois, elles valent mieux que des subventions.

Je souhaite que la commission des affaires économiques, comme son président l'a envisagé, prenne l'engagement que soit réalisée une étude très précise sur la situation des médecins et des infirmiers en milieu rural et qu'une mission soit mise en place pour étudier ce dossier, dans lequel nous manquons d'éléments d'appréciation.

Je retire mon amendement, mais je tiens à souligner que le sous-amendement déposé par Jacques Blanc était intéressant, parce qu'il permettait d'ouvrir le débat.

M. le président. L'amendement n° 182 rectifié est retiré.

En conséquence, le sous-amendement n° 444 n'a plus d'objet.

La parole est à M. Emorine, rapporteur.

M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. Monsieur Fouché, le projet de loi prévoit la tenue d'une conférence annuelle sur la ruralité. Nous serons alors très attentifs à tous les aspects que nous venons d'évoquer, afin d'être en mesure de procéder à l'analyse de la situation des professionnels de santé.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Je vous remercie, monsieur Jacques Blanc, monsieur Fouché, d'avoir bien voulu retirer le sous-amendement et l'amendement. Philippe Douste-Blazy et moi-même avons l'intention de faire de 2005 l'année d'un grand rendez-vous avec l'ensemble des élus sur cette question de la démographie médicale et de la répartition des professionnels de santé.

Avant la fin du premier semestre, nous vous proposerons un plan d'ensemble qui reprendra certaines dispositions ayant précisément trait à l'incitation. Celles-ci devront bien sûr être évaluées au plus tard dans les deux ou trois années qui suivront, pour vérifier si les résultats sont bien là.

Cependant, l'exercice dans des zones sous-médicalisées me semble comporter également une autre dimension : l'aspect financier n'est pas forcément le seul que les professionnels de santé aient en tête ! La question de la pratique médicale est elle aussi très importante, et nous serons probablement amenés à développer un certain nombre d'outils de travail, que ce soient les cabinets d'exercice secondaire ou encore les maisons médicales de santé, qu'il nous faudra encourager.

Déjà, dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, un grand nombre d'entre vous ont adopté de nouvelles dispositions dotant le fonds d'aide à la qualité des soins de ville, le FAQSV, de 60 millions d'euros supplémentaires.

Nous devrons également développer des liens nouveaux entre les professions médicales, mais aussi les professions paramédicales, afin que nos concitoyens puissent bénéficier de l'offre la plus large possible.

Je ne peux pas évoquer ces sujets sans citer la télémédecine, qui nous permettra de résoudre certaines difficultés.

Vous savez enfin ce qu'a indiqué Philippe Douste-Blazy à propos des hôpitaux locaux, auxquels nous tenons. Les questions relatives à leur fermeture sont derrière nous ; nous avons maintenant besoin de densifier l'équipement de tout un territoire.

Tels sont les sujets sur lesquels il est nécessaire de proposer à l'ensemble des parlementaires, mais aussi à toutes les associations d'élus, ce grand rendez-vous de l'année 2005.

Tout comme vous, mesdames, messieurs les sénateurs, si j'ai décidé de m'engager dans l'action publique, c'est que je refuse la fatalité. On nous dit que dans vingt ans, en 2025, le nombre de médecins aura diminué de 40 % : ce sera vrai si nous ne faisons rien. Mais je pense que nous sommes bien décidés, les uns et les autres, à travailler pour éviter cette raréfaction de la présence médicale sur notre territoire.

Ce que nous demandent nos concitoyens, c'est d'agir. C'est pourquoi nous vous proposerons le plan que je viens d'évoquer, et les dispositifs que vous avez suggérés, monsieur Jacques Blanc, monsieur Fouché, seront bien intégrés à notre réflexion.

L'important, c'est d'y voir clair : pour cela, rien ne vaut un plan d'ensemble. Mais, pour réussir, il faut aussi faire preuve de volontarisme politique. C'est ce que nous vous proposons par l'amendement n° 156 rectifié. Car nous vous avons non seulement écoutés, mais aussi entendus !

C'est également dans cet esprit que nous sollicitons la confiance du Sénat.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Carrère, pour explication de vote sur l'amendement n° 156 rectifié.

M. Jean-Louis Carrère. Il est une chose dont je suis sûr, car le constat est unanime : il faut absolument trouver, pour les zones en difficulté, des modalités satisfaisantes s'agissant de l'installation des professionnels de santé. Nous sommes tous confrontés à une demande des territoires en la matière, demande qui a été très justement relayée sur l'ensemble des travées.

Quelquefois, nous prenons plaisir à voir des libéraux renoncer tout à coup au libéralisme dans l'intérêt des territoires. C'est bien l'illustration que le libéralisme n'est pas ce qu'il y a de mieux pour revitaliser des zones en difficulté ! Mais laissons cela, et entrons dans le débat.

Si nous sommes très bons pour ce qui est des intentions, nous ne le sommes pas quand il s'agit des modalités. Je ne suis pas souvent d'accord avec M. Jacques Blanc, mais je souscris à la sagesse qui l'a poussé à demander à M. le secrétaire d'Etat un délai supplémentaire pour formuler une proposition plus précise.

Quelles sont exactement les sources de financement dont nous disposons, monsieur le secrétaire d'Etat ? N'allons pas vers une exonération fiscale : ainsi que cela a été montré par tel ou tel collègue, ce n'est pas la bonne méthode ! Pourtant, le besoin d'une incitation se fait nettement sentir. Il faut peut-être aider les collectivités locales et chercher des modalités de financement. Un délai supplémentaire permettrait à chacun d'entre nous de réfléchir à ces modalités. Ensuite, on pourrait déterminer clairement qui fait quoi.

Vous nous avez rassurés, monsieur le secrétaire d'Etat, en indiquant que les structures régionales de santé allaient être consultées et qu'elles allaient prendre l'attache des collectivités locales. Je suis tout à fait sensible à vos arguments, que je trouve intéressants. Mais il me paraîtrait plus judicieux d'aboutir à un texte clair sur un sujet qui présente l'intérêt de faire l'unanimité pour ce qui est des objectifs, mais pas pour ce qui est de la réponse.

M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul.

M. Daniel Raoul. Permettez-moi d'abord d'exprimer ma surprise devant cet amendement rectifié, qui est radicalement différent du texte sur lequel la commission s'est prononcée. Je serai donc amené à demander les explications que nous aurions pu obtenir en commission si cette nouvelle rédaction nous était parvenue plus tôt.

Je ne suis pas certain que les mesures envisagées dans cet amendement correspondent exactement à l'objectif visé : comme le soulignait à l'instant notre collègue Jean-Louis Carrère, nous ne sommes sans doute pas très bons dans le choix des mesures à mettre en oeuvre ! A ce propos, M. le secrétaire d'Etat pourrait-il nous confirmer que la « zone définie en application de l'article L. 162-47 du code de la sécurité sociale » - code que, je l'avoue, je n'ai pas toujours sur moi - correspond bien à une ZRR ?

Il est un autre point que je voudrais soulever. Le sous-amendement n° 443 rectifié de notre collègue Jacques Blanc tendait à étendre les exonérations fiscales à toutes les professions libérales. Je vous mets en garde, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, contre une telle extension, qui créerait des effets d'aubaine : le siège d'une profession libérale peut très bien ne pas correspondre sur le terrain à une activité réelle et adaptée aux besoins de la population !

M. le président. La parole est à M. Paul Blanc.

M. Paul Blanc. Monsieur le secrétaire d'Etat, l'idée d'ouvrir un grand débat non seulement au sein du Parlement, mais aussi à l'échelon local, me paraît excellente. Toutefois, je regrette que nous n'ayons pas suivi la proposition de notre collègue Jacques Blanc relative à l'exonération de la taxe professionnelle, en ZRR, pour les professions de santé.

Aujourd'hui, je le constate dans mon département, il existe une distorsion énorme entre les territoires de montagne et les territoires de plaine.

Autour de Perpignan, nous avons peut-être trop de médecins par rapport au nombre d'habitants, mais à soixante kilomètres, en zone de montagne, il est impossible de trouver un médecin prêt à reprendre un cabinet ; je pense, en particulier, au plateau Cerdan. Une exonération de la taxe professionnelle serait de nature à favoriser la reprise de cabinets médicaux ou l'installation de nouveaux médecins. Mais une telle mesure n'a peut-être pas sa place dans un texte de loi.

Je suis d'accord avec ce que vous avez dit sur l'impôt sur le revenu, monsieur le secrétaire d'Etat. Mais la taxe professionnelle n'est pas un impôt sur le revenu : c'est un impôt local qui est perçu par les communes et par les départements. Tout le monde a intérêt à ce que l'aménagement du territoire soit harmonieux et équilibré. La mesure proposée me paraît donc tout à fait favorable et je souhaite qu'elle soit reprise.

Comme le faisait remarquer Francis Giraud, il faut faire très attention : ce n'est pas l'installation d'un médecin qui fera revenir les habitants des territoires qui sont en cours de désertification. En revanche, dans les endroits où l'équilibre est instable, il suffit de la disparition d'un médecin pour faire basculer l'ensemble du territoire vers la désertification. Il faut être pragmatique : chaque fois que l'installation d'un médecin permet le maintien d'une population, il faut la favoriser.

Le modeste élu rural que je suis, qui est encore un peu médecin et qui connaît les conditions d'exercice de la médecine en milieu rural, souhaiterait être entendu.

M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle.

M. Alain Vasselle. Je me permettrai d'intervenir dans ce débat en tant que rapporteur de la loi relative à l'assurance maladie.

Tout d'abord, j'exprimerai un regret. J'aurais compris que des dispositions de cette nature apparaissent dans le présent projet de loi si nous n'avions pas adopté la loi relative à l'assurance maladie. Mais disperser les mesures qui concernent l'assurance maladie dans plusieurs textes ne constitue pas une bonne méthode de travail. Si ces dispositions avaient figuré dans le texte relatif à l'assurance maladie, nous aurions pu en mesurer les avantages et les inconvénients.

Ensuite, je partage votre sentiment, monsieur le secrétaire d'Etat, lorsque vous évoquez l'effet d'aubaine que pourrait représenter l'exonération de l'impôt sur le revenu pour des médecins qui s'installeraient en milieu rural, notamment en zone périurbaine.

Cela étant, il n'y a pas que les zones de revitalisation rurales qui sont confrontées au problème de la permanence des soins : dans certains secteurs ruraux de Picardie, la permanence des soins n'est pas assurée, ce qui contribue à l'engorgement des services d'urgence dans les hôpitaux, provoquant ainsi des difficultés de fonctionnement.

Par conséquent, il serait préférable de mener une réflexion approfondie sur le sujet, plutôt que d'intervenir par touches pour se rendre compte ensuite que la mesure qui a été adoptée est insuffisante et qu'il faudra de toute façon y revenir. D'ailleurs, vous l'avez reconnu vous-même, monsieur le secrétaire d'Etat, puisque vous avez annoncé qu'une réflexion sera menée au sein de Parlement à cet égard.

Enfin, ne croyez pas, mes chers collègues, que les mesures financières vont tout régler ! Les médecins veulent aussi une meilleure qualité de vie. Les 35 heures ont provoqué dans le pays une révolution culturelle !

La mesure proposée devrait profiter davantage aux remplaçants qu'aux médecins en exercice. Le médecin qui a travaillé toute la semaine jusqu'à vingt-deux heures ou minuit, voire le week-end, a envie d'avoir un peu de temps pour s'occuper de famille.

La mesure d'incitation financière règlera peut-être une partie des problèmes, mais certainement pas la totalité. Il faudra donc travailler encore pour trouver une solution aussi équilibrée que possible.

M. le président. La parole est à M. Philippe Arnaud.

M. Philippe Arnaud. Je regrette également le retrait du sous-amendement de Jacques Blanc, mais j'ai bien entendu les raisons qui l'ont motivé.

Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez indiqué que le problème n'était pas uniquement financier - nous sommes d'accord ! - et que vous alliez apporter des réponses après une réflexion plus approfondie. Il est urgent de mettre en oeuvre des moyens sur ces territoires très fragiles ; certains d'entre eux connaissent déjà, aujourd'hui, une réelle désertification médicale. Toutefois, imposer aux communes rurales pauvres la création d'un cabinet médical, c'est, encore une fois, leur faire financer leur survie.

De tels aménagements ne peuvent se concevoir que dans le cadre d'une réelle péréquation nationale. Sinon, les communes pauvres vont encore s'appauvrir. C'est la raison pour laquelle je préfère un dégrèvement ou une exonération à une contribution de la collectivité.

Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez évoqué la télémédecine. Développons d'abord les moyens de communication élémentaires et la téléphonie mobile ! Lorsque des médecins s'associent pour répondre aux urgences et que le réseau de téléphonie mobile ne permet pas de recevoir les appels, vous comprendrez qu'ils ne restent pas dans la commune, même si vous leur accordez une exonération fiscale.

Il est urgent que les territoires soient couverts par un réseau de téléphonie mobile satisfaisant, afin que les médecins puissent remplir leur mission.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Le fonctionnement de notre Haute Assemblée me déçoit. J'ai l'impression que chaque question posée trouvera une réponse plus tard ; il s'agit d'une sorte de feuilleton. La semaine dernière, s'agissant des entreprises paysagistes, on nous a dit que le règlement du problème était reporté à une prochaine loi. Les réponses à plusieurs autres questions ont également été renvoyées à de futurs textes.

M. Alain Vasselle. C'était pareil avec Mme Voynet !

M. Jean Desessard. Pourtant, le chapitre II est intitulé : « Dispositions relatives à l'installation des professionnels de santé et à l'action sanitaire et sociale ». J'avais le sentiment que nous étions dans le vif du sujet ! Alors, pourquoi ce feuilleton ?

Monsieur le secrétaire d'Etat, quel talent publicitaire ! Vous nous avez dit que la prochaine loi ne comporterait pas uniquement des mesures financières : elle comprendrait également des dispositifs très intéressants apportant des réponses. Mais plus tard...

En quinze jours, on est passé de l'amendement n° 156, qui tendait à supprimer l'article 38 bis prévoyant une exonération de l'impôt sur le revenu, à l'amendement n° 156 rectifié, qui prévoit le contraire.

M. le président. La parole est à M. François Fortassin.

M. François Fortassin. Quand on reste un peu tard, on apprend des choses et, parfois, des consensus se dégagent, en l'occurrence sur la téléphonie mobile.

A l'évidence, ce sujet épineux embarrasse le Gouvernement : il formule un certain nombre de propositions, tout en nous indiquant que la réflexion n'est pas arrivée à son terme et que nous pouvons aller plus loin.

Je ne crois pas aux exonérations fiscales, d'autant qu'elles pèseront sur les plus pauvres. En effet, à Blagnac, à Menton ou à Cannes, les médecins n'ont pas besoin d'exonération fiscale pour s'installer.

Pour aider les zones rurales, il convient d'abord de se fonder sur le principe de solidarité, qui consiste à apporter un peu plus à ceux qui ont moins ; cela s'appelle la péréquation. (M. Jean Desessard applaudit.) Mais cela signifie aussi enlever un peu à ceux qui ont plus. Tout le monde est d'accord pour pratiquer la solidarité sociale, mais lorsqu'on parle de solidarité territoriale, il n'y a plus personne.

Vous ne réglerez pas le problème de la démographie médicale par des exonérations fiscales ! Pour former un médecin, il faut huit à dix ans.

Je ferai donc une proposition qui paraîtra sans doute iconoclaste, mais qui a déjà été expérimentée dans d'autres professions.

Après dix ans d'exercice, les infirmiers et les infirmières sont de bons professionnels. Vous prenez les meilleurs, vous leur faites suivre une formation de deux ou trois ans et vous leur délivrez l'équivalent d'un diplôme de médecin, à condition - ce sera un contrat - qu'ils exercent dans des zones rurales. (Protestations sur les travées de l'UMP - Hilarité sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jean Bizet. Il y aura des morts !

M. Josselin de Rohan. Allez chercher des sorciers !

M. Jean-Louis Carrère. Il y a des conservateurs !

M. François Fortassin. Bien sûr, les médecins considèrent que, si l'on n'est pas passé par une faculté de médecine, on ne peut pas soigner.

Dans notre pays, la moitié des ingénieurs ne sont jamais passés par une école d'ingénieurs. Sont-ils pour autant médiocres ? Certainement pas !

Les médecins défendent leur pré carré. Ils ne sont pas forcément exemplaires !

M. Jacques Blanc. Si vous aviez un malaise, vous vous réjouiriez de leur présence !

M. François Fortassin. Je ne prendrai pas le risque de faire une crise cardiaque, car je crains trop de passer entre les mains de certains de mes collègues ici présents ! (Rires et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.- Exclamations sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Mortemousque.

M. Dominique Mortemousque. Nous parlons ici de péréquation à propos des médecins. Mais, globalement, la péréquation concerne tous les métiers.

En l'espèce, si la péréquation n'est pas une mauvaise idée, le mandat qui nous a été confié est de dépenser moins d'argent ou de le dépenser mieux.

Tout à l'heure, Alain Vasselle a évoqué la situation des médecins qui effectuaient de nombreuses heures de travail. Les professionnels ne rechignent pas à la tâche ! Simplement, lorsqu'ils constatent que d'autres travaillent pratiquement moitié moins d'heures dans la semaine, un jour, ils se découragent !

M. Paul Blanc. Eh oui !

M. Dominique Mortemousque. Dans mon canton, un médecin a rejoint la Mutualité sociale agricole en tant que médecin-conseil : il gagne moins d'argent, mais il finit sa journée à dix-neuf heures, sans travailler ni les nuits ni les week-ends. Voilà où réside le vrai problème ! (Marques d'approbation sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

Je suis non pas pour la rentabilité des services publics, mais pour leur efficience.

Les paysans, les commerçants, les médecins ou les infirmières qui quittent nos cantons ou nos communes rurales nous disent leur ras-le-bol des prélèvements trop importants, alors que d'autres bénéficient de situations beaucoup plus confortables. Notre rôle, dans cet hémicycle, est de rééquilibrer les choses ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à M. Francis Giraud.

M. Francis Giraud. Ce débat est très intéressant, mais il porte sur la désertification, et non pas sur les médecins. Il s'agit donc d'un problème d'organisation du territoire : quelles sont les activités qui peuvent se développer à tel endroit ? Certes, la médecine joue un rôle privilégié en la matière, car les populations se sentent en sécurité lorsqu'il existe un système médical de qualité, mais le problème est plus général.

Voilà longtemps que l'on a envisagé de remplacer les médecins. Pour bien connaître cette profession, la proposition de M. Fortassin est sympathique, mais très dangereuse. (Marques d'approbation sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

En effet, si nous pouvons nous passer des mandarins, que je représente, nous ne pouvons absolument pas nous passer d'une formation longue et difficile, qui s'appuie sur la transmission d'une expérience, sans mettre en danger les populations.

En revanche, il faut effectivement organiser le territoire autrement, afin que chacun puisse profiter de tous les services, y compris du système de santé. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Je souhaite répondre à un certain nombre d'interrogations qui ont vu le jour lors de cette discussion fertile, au cours de laquelle nous avons entendu des propositions iconoclastes et d'autres plus consensuelles.

La première question portait sur la détermination des zones ciblées qui pourront bénéficier des dispositifs.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Grâce aux missions régionales de santé, nous allons pouvoir faire du sur mesure sur le territoire. La définition des zones sera établie, non pas à Paris, par le ministère, mais à partir des conclusions relevées sur le territoire.

Le périmètre retenu comprendra les ZRR, mais il sera parfois plus large : il pourra tenir compte, en bordure du territoire administratif défini par la ZRR, d'une commune dans laquelle exerce un professionnel de santé, afin de pouvoir juger de l'offre de soins disponible pour le public.

La deuxième question portait sur le fait de déposer cet amendement dans le présent projet de loi. En fait, la convention entre l'assurance maladie et les professionnels de santé a été signée. Par conséquent, avant le 15 mars prochain, des moyens seront mis en place pour financer la permanence des soins, à hauteur, au moins, de 60 millions d'euros. La permanence des soins est une nécessité !

Le Gouvernement, répondant à la volonté des parlementaires, vous propose aujourd'hui d'aller dans cette direction en adoptant le présent amendement.

En outre, nous vous ferons avant l'été des propositions. Il y aura ensuite une concertation, et vous aurez enfin à votre disposition un plan d'action précis. Voilà dix mois, certains affirmaient que la réforme de l'assurance maladie était impossible à mettre en oeuvre !

M. Jacques Blanc. Et vous l'avez fait !

M. André Lejeune. Pour quels résultats ?

M. Bernard Piras. On en reparlera !

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Ce n'est pas le courage qui nous manque, car nous avons à coeur d'assurer l'égalité d'accès aux soins sur le territoire. C'est notre priorité ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 156 rectifié.

M. Bernard Piras. Le groupe socialiste s'abstient.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 38 bis est ainsi rédigé, et l'amendement n° 369 n'a plus d'objet.

Art. 38 bis
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Art. 39 bis

Article additionnel après l'article 39

M. le président. L'amendement n° 267, présenté par MM. Le Cam, Billout et Coquelle, Mmes Didier et Demessine, est ainsi libellé :

Après l'article 39, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I- Le cinquième alinéa de l'article L. 5125-11 du code de la santé publique est ainsi rédigé :

« Aucune création n'est possible dans les communes comportant une population inférieure à 1500 habitants lorsqu'elles disposent déjà au moins d'une officine. »

II- Au huitième alinéa du même article, les mots : « et dont la population n'a pas été ou n'est plus prise en compte pour une création d'officine dans une autre commune » sont supprimés.

III- L'article L. 5125-12 du même code est abrogé.

IV- Dans les articles L. 5125-11 à L. 5125-15 du même code, le chiffre : « 2 500 » est remplacé par le chiffre : « 1 500 ».

La parole est à M. Gérard Le Cam.

M. Gérard Le Cam. Bien que les pharmacies fassent partie des services publics de proximité indispensables aux familles, leur création est aujourd'hui strictement encadrée par la loi. La liberté d'installation et d'entreprendre, à laquelle aime pourtant se référer le Gouvernement, perd en effet toute valeur juridique sitôt que l'on parle de pharmacies.

Dans certaines compagnes, l'absence d'officines de pharmacies, liée à la carence de transports publics et à l'isolement d'un territoire, pose de réels problèmes d'approvisionnement en médicaments, notamment pour les personnes âgées, ce qui, en outre, ne peut qu'affecter l'attractivité et le dynamisme économique de ces territoires.

Cet amendement, qui a pour objet de réduire les contraintes pesant aujourd'hui sur la création de pharmacies, présente également l'avantage de n'entraîner aucun coût financier.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. Comme en première lecture, la commission a jugé que les officines de pharmacies méritaient un débat spécifique.

Elle émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement émet le même avis que la commission ; nous avons eu un débat identique lors de la première lecture.

Monsieur le sénateur, l'adoption d'un tel dispositif irait certainement à l'encontre de l'objectif que vous cherchez à atteindre aujourd'hui, puisque cela fragiliserait économiquement un certain nombre d'officines sur le territoire.

En la matière, l'expérience des propharmacies menée sur certains territoires constitue une piste de réflexion intéressante, car elle permet à certains professionnels de santé de délivrer des médicaments.

Par conséquent, monsieur le sénateur, je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement, faute de quoi je serais contraint d'en demander le rejet.

M. le président. L'amendement n° 267 est-il maintenu, monsieur Le Cam ?

M. Gérard Le Cam. Oui, monsieur le président, je le maintiens.

En effet, il s'agit là de la même logique que pour le petit commerce : cette mesure entraînerait la disparition des commerces dans les bourgs-centres. Je n'accepte pas du tout une telle logique, car elle est fausse.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 267.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Art. additionnel après l'art. 39
Dossier législatif : projet de loi relatif au développement des territoires ruraux
Art. additionnel après l'art. 39 bis (début)

Article 39 bis

En zones de montagne, pour assurer le maintien de services, les collectivités territoriales ou leurs groupements ont la possibilité de construire ou de subventionner la réalisation d'équipements sanitaires dans le respect des décisions de la commission exécutive de l'agence régionale de l'hospitalisation. Ces investissements peuvent bénéficier du soutien financier de l'État, au même titre que les investissements des communes.

M. le président. L'amendement n° 370, présenté par M. Desessard, Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Il s'agit d'un amendement de précaution. En effet, la rédaction de l'article 39 bis ne précise pas le type d'établissements concernés : s'agit-il d'équipements sanitaires nécessaires dans le cadre de la lutte contre la désertification, ou bien s'agit-il d'une attaque déguisée contre la loi montagne, c'est-à-dire de l'autorisation de construire des équipements dits « sanitaires », qui s'avéreront être des équipements de luxe à vocation touristique destinés au repos des résidants ?

Selon la réponse du Gouvernement, je maintiendrai ou non l'amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. L'article 39 bis prévoit une disposition qu'avaient vivement souhaitée de nombreux élus de la montagne.

La commission, qui souhaite le maintien de cet article, émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Même avis.

M. Thierry Repentin. Service minimum !

M. le président. Monsieur Desessard, l'amendement est-il maintenu ?

M. Jean Desessard. On peut tout imaginer, avec de telles réponses ! Je maintiens donc l'amendement, faute de réponse précise.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 370.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 39 bis.

(L'article 39 bis est adopté.)

Art. 39 bis
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Art. additionnel après l'art. 39 bis (interruption de la discussion)

Article additionnel après l'article 39 bis

M. le président. L'amendement n° 171 rectifié, présenté par MM. Doublet, Bailly, Bécot, Belot, Bizet, Branger, Cazalet, César, Dulait, Gerbaud, Girod, Guené, Natali, Retailleau, Texier, Vasselle, Vinçon et Murat, est ainsi libellé :

Après l'article 39 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I - Dans l'article L. 2123-33 du code général des collectivités territoriales, après les mots : « réunions de commissions » sont insérés les mots : « et des conseils d'administration des centres communaux d'action sociale ».

II - La perte de recettes résultant du I est compensée par l'augmentation, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle au droit de consommation prévu à l'article 575 du code général des impôts et par l'affectation du produit supplémentaire ainsi dégagé à la branche accidents du travail et maladies professionnelles du régime général de sécurité sociale.

La parole est à M. Michel Doublet.

M. Michel Doublet. Cet amendement a pour objet de clarifier la situation avec les URSSAF, qui assujettissent de plus en plus fréquemment les communes rurales, au titre de leurs centres communaux d'action sociale, les CCAS, à la cotisation « accidents du travail ».

Outre le caractère aléatoire de ces décisions d'assujettissement en fonction des départements, celles-ci se traduisent par des contraintes financières difficilement supportables pour le budget des communes rurales, notamment les plus petites d'entre elles, le rappel de cotisations exigées par les URSSAF dépassant parfois, dans certains cas, le montant total du budget annuel du CCAS concerné.

Par ailleurs, et selon les termes mêmes du 6° de l'article L. 412-8 du code de la sécurité sociale, cette cotisation a un caractère subsidiaire. Elle ne doit donc pas être prélevée par les URSSAF dès lors que les membres des conseils d'administration des CCAS disposent déjà, au titre de cette fonction, d'une garantie contre le risque « accidents.

Or, se fondant sur une interprétation restrictive et discutable de l'article L. 2123-33 du code général des collectivités territoriales, qui garantit déjà les conseillers municipaux contre les accidents dont ils peuvent être victimes dans l'exercice des diverses fonctions liées à leur mandat, les URSSAF refusent d'admettre que les conseillers municipaux siégeant au conseil d'administration d'un CCAS peuvent bien bénéficier de cette garantie et les assujettissent donc à la cotisation prévue par le code de la sécurité sociale. En d'autres termes, les communes doivent ainsi payer deux fois pour leurs conseillers municipaux membres du conseil d'administration de leur CCAS.

Afin de mettre fin à cette situation préjudiciable tant au budget des communes qu'à l'action des CCAS en milieu rural, le présent amendement vise donc à préciser la rédaction de l'article L. 2123-33 du code général des collectivités territoriales.

Les conseillers municipaux membres du conseil d'administration du CCAS demeureront ainsi protégés contre les accidents dont ils pourraient être victimes au titre de cette fonction. En revanche, les communes n'auront plus alors à payer, pour les conseillers municipaux concernés, la cotisation « accidents du travail » visée au 6° de l'article L. 412-8 du code de la sécurité sociale, qui n'a qu'un caractère subsidiaire.

Enfin, par le jeu des dispositions de l'article L. 5211-15 du code général des collectivités territoriales, la mesure proposée bénéficiera également aux élus membres de centres intercommunaux d'action sociale.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. La commission s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée. Elle souhaite toutefois connaître l'avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement (Ah ! sur les travées de l'UMP), car il tend à apporter une clarification et à rendre plus explicite la responsabilité des communes en cas d'accident du travail. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Paul Girod, pour explication de vote.

M. Paul Girod. Je souhaite remercier le secrétaire d'Etat et féliciter la commission.

Actuellement, un certain nombre de toutes petites communes se trouvent dans des situations ubuesques : elles sont obligées de créer un CCAS et de s'adjoindre les services de personnalités extérieures, pour lesquelles certaines URSSAF leur réclament le paiement de cotisations « accidents du travail » parfois très importantes, en plus de celles dont elles doivent s'acquitter pour les conseillers municipaux.

Or, dans les communes de moins de cent habitants, le CCAS n'a qu'une existence formelle. Quand il se réunit, une fois par an, c'est pour distribuer des colis de Noël aux personnes âgées, guère plus !

M. Bernard Piras. C'est important !

M. Paul Girod. Par conséquent, je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, d'apporter une clarification en la matière.

Le Gouvernement et l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l'ACOSS, doivent intervenir auprès des directions des URSAFF afin de mettre fin à ces situations ridicules. Il est inutile de grever le budget des petites communes.

Il y a même des cas plus graves, monsieur le secrétaire d'Etat. Dans mon département, un SIVOM gère directement un service d'aides ménagères. Alors que ses membres sont conseillers d'administration de ce service - ils sont spécifiquement désignés à cet effet et ils sont couvents par le SIVOM au titre des accidents du travail - l'URSSAF poursuit ledit SIVOM et lui réclame des cotisations « accidents du travail ».

Des instructions doivent être données afin d'éclaircir la situation. Cessons ces querelles dignes de Clochemerle et occupons-nous de sujets plus sérieux !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, je lève le gage sur cet amendement.

M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 171 rectifié bis.

Je le mets aux voix.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 39 bis.

Art. additionnel après l'art. 39 bis (début)
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