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spectacle vivant

Débat sur une déclaration du Gouvernement

M. le président. L'ordre du jour appelle la déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, sur le spectacle vivant.

La parole est à M. le ministre. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, j'ai ardemment souhaité le débat qui va se dérouler maintenant devant la Haute Assemblée. C'est le symbole du fait que la culture a droit de cité, qu'elle n'est pas cantonnée, qu'elle est le coeur même de notre rayonnement, de notre activité, de notre développement, de notre avenir.

Il ne s'agit pas seulement pour moi de prolonger ici la déclaration que j'ai faite, au nom du Gouvernement, devant l'Assemblée nationale, le 9 décembre dernier.

Je n'oublie pas que ma première intervention au Parlement sur la politique culturelle du Gouvernement eut lieu le 23 juin dernier, à l'invitation de votre commission des affaires culturelles. Je tiens d'ailleurs à rendre hommage au président Jacques Valade et aux sénateurs qui ont eu à coeur de rédiger une Contribution au débat sur la création culturelle en France, rapport paru alors que le succès des quelque mille festivals de l'été dernier illustrait non seulement la force des liens entre les artistes et leurs publics sur l'ensemble de notre territoire, mais aussi l'immense soutien de nos concitoyens à ces aventures collectives, faites avant tout de partage, que Louis Jouvet décrivait en ces termes : « tumulte ordonné » ou encore « communion ».

Dans chacun de ces lieux, l'utopie est sortie de terre, le rêve s'est construit, les artistes et le public ont, au fil du temps et de leurs rencontres, transformé leurs songes et leurs désirs en succès.

Je me souviens encore de ce matin si clair de juillet où, sous les platanes du cloître Saint-Louis inondé de lumière, dans cette atmosphère de fête, d'air vif, de pierre et d'eau, les artistes et les techniciens d'Avignon, avant de rejoindre les plateaux du in et les scènes et les rues du off, étaient réunis pour débattre, en toute liberté, avec le public et avec tous ceux, entrepreneurs de spectacles, représentants des partenaires sociaux, élus locaux, responsables politiques, militants associatifs, journalistes, qui, au fond, partagent un même goût, une même passion pour la création, le patrimoine, le rayonnement et la diversité de l'art dans notre société.

Ce matin-là, en Avignon, le président Valade et plusieurs d'entre vous - notamment Jack Ralite -, ainsi que plusieurs députés, participaient à nos échanges. Je tiens à les en remercier et à leur dire combien les artistes et les techniciens ont apprécié leur présence à leurs côtés.

La nécessité de voir cette discussion en plein air se prolonger dans les enceintes du Parlement est apparue comme une évidence, une évidence que chacun de mes nombreux déplacements à travers la France n'a fait que rendre encore plus claire à mes yeux.

Je pense, par exemple, à ce jour de la fin de l'été où je me trouvais, en compagnie du président Poncelet, au festival de Bussang : les meilleurs amateurs exprimaient, de concert avec des artistes et des techniciens professionnels, la force de leur passion du théâtre, avec la forêt vosgienne pour seul fond de scène.

Je pense aussi à ce moment où, au cours de l'automne, à Grenoble, renaissait, entièrement rénovée, la promesse de Malraux, dans cette maison de la culture de la deuxième génération ; y résonnait encore la voix de mon illustre prédécesseur évoquant la petite princesse thébaine aux pieds de l'Acropole : « Je ne suis pas venue sur terre pour partager la haine, mais pour partager l'amour ».

A l'époque où naissaient les maisons de la culture, il y avait Paris d'un côté et le « désert culturel » français de l'autre. Le temps n'est plus où il fallait que « ce qui se passe d'essentiel à Paris » se passe « en même temps » en province, ce « mot hideux », selon Malraux.

II s'agit bien, aujourd'hui, de faire en sorte que ce qui se passe d'abord dans une ville, un département, une région de France, en termes de création et de diffusion culturelles, puisse ensuite, et au plus vite, se passer également dans une autre ville, un autre département, une autre région, voire aussi en Europe et dans le monde.

C'est bien pourquoi j'attache tant d'importance à ce débat devant la Haute Assemblée, qui est une « première ». La culture doit avoir droit de cité au sein de l'hémicycle - lieu commun, depuis l'Antiquité, à la représentation théâtrale et à la représentation politique -, et pas seulement lorsqu'il est question du budget de la culture. Un budget est l'expression d'une politique, et les crédits que vous avez votés pour 2005 expriment clairement une priorité pour le spectacle vivant.

Mais un budget ne fait pas une politique à lui seul. Je suis donc venu vous parler d'autre chose.

Je suis venu vous parler des fins autant que des moyens. Dans ce monde de violence, de rupture et, parfois, de négation de l'identité, du patrimoine culturel et spirituel, la culture est le coeur de notre rayonnement, de notre fierté, de notre influence, de notre attractivité. Elle est aussi à la source de nombre de nos emplois. Elle ne se réduit pas au loisir intelligent, au supplément d'âme. Elle est l'essence même de l'avenir et de la force de notre parole, de nos convictions, de notre message humaniste.

Je suis venu vous parler de la place de l'artiste dans notre société et de celle de la culture dans la cité aujourd'hui. Je suis venu vous parler du spectacle vivant, de l'emploi culturel et du rôle des collectivités territoriales, que la Constitution de la République, mesdames, messieurs les sénateurs, vous donne mandat de représenter.

Je me garderai de pousser trop loin les analogies entre le spectacle vivant et la politique. Il reste que, à Athènes même, les magistrats chargés de veiller à l'application des lois votées par la boulê, après leur discussion par l'assemblée des citoyens, pouvaient être chorèges, c'est-à-dire, en quelque sorte, producteurs de spectacles.

C'est quand le verbe se transforme en action, dans le temps et dans l'espace, qu'il prend sa charge humaine et manifeste toute son énergie. Les artistes sont avant tout créateurs de liens entre les hommes, de liens de proximité, et les élus que vous êtes le savent sans doute mieux que quiconque. Il ne se passe pas un jour sans que des maires, des conseillers généraux, des conseillers régionaux, des présidents de communauté urbaine ou d'agglomération, prennent l'initiative de créer ou de rénover une salle de spectacle, des studios de danse, des locaux de répétition et demandent au ministère de la culture et de la communication de soutenir leurs initiatives.

Les élus sont sans cesse en mouvement, au service de leurs concitoyens. Les artistes aussi. Etre artiste, c'est d'abord croire, vivre, et faire partager cette conviction que le monde en dehors de nous, comme celui que nous contenons, est loin d'avoir épuisé toute possibilité de surprise. Oui, être artiste, c'est toujours provoquer, provoquer une rencontre, un échange, une discussion, une découverte.

L'art, et singulièrement l'art vivant, est ce qui relie, au coeur de la culture. C'est pourquoi les artistes et techniciens du spectacle vivant, du cinéma et de l'audiovisuel représentent un atout fondamental et un enjeu considérable pour notre société. Le spectacle, sous toutes ses formes, est aujourd'hui le moteur de la vitalité, du rayonnement et de l'attractivité de notre pays et de ses territoires.

C'est pourquoi je souhaite que notre société, où les risques de fractures, la perte des repères, le sentiment d'un effritement de l'identité affectent nos concitoyens, fasse résolument le pari de la culture : pour replacer l'artiste au coeur de la cité, abolir la distance entre l'oeuvre d'art et son public, pour que l'art investisse de nouveaux territoires, institue un rapport au temps différent et touche le plus grand nombre de nos concitoyens. J'ai l'ambition de convaincre les Français qui n'ont jamais franchi le seuil d'un théâtre, d'un musée, d'un chapiteau, d'une salle de cinéma. A cet égard, je tiens à ce que, dans mes attributions, le lien entre la culture et la communication soit un lien fécond.

Tel est le projet que je vous propose et qui est au coeur de la politique culturelle du Gouvernement, laquelle se décline dans chaque région. Telle est la feuille de route que j'ai donnée cette année à chaque directeur régional des affaires culturelles, autour de quelques axes forts pour le spectacle vivant. Quels sont ces axes ?

Premièrement, priorité doit être donnée à la diffusion, avec l'aide à la constitution, dans les théâtres, de « pôles de diffusion », composés d'un personnel formé, doté d'outils techniques de recensement et de connaissance des réseaux. Expérimentale en 2005, cette aide sera progressivement étendue à partir de 2006 et devra prendre en considération la création d'un fonds spécifique d'aide à la diffusion en milieu rural.

Deuxièmement, les compagnies et les ensembles indépendants doivent bénéficier d'aides à la reprise des spectacles, pour toucher un plus large public et inscrire la création dans une économie plus stable.

Troisièmement, il convient de rendre aux auteurs et aux compositeurs, qui sont les forces vives de la création, la place éminente qui leur revient, en améliorant leur rémunération et en renforçant leur présence dans les établissements subventionnés.

Quatrièmement, il faut redéfinir et relégitimer une politique de développement de la pratique amateur, qui n'est ni une étape vers la professionnalisation ni un substitut à la pratique professionnelle. Ciment du lien social, remarquable outil d'intégration et de dialogue entre les cultures et les générations, elle doit être encouragée par la formation, le rapport direct à la création, les rencontres entre artistes amateurs et professionnels.

Cinquièmement, enfin, la circulation de l'art vivant en Europe et dans le monde doit être encouragée. C'est ainsi que nous construirons concrètement, dans chaque région, l'Europe de la culture.

Je convierai à Paris, les 2 et 3 mai prochain - vous serez tous, bien sûr, les bienvenus -, des intellectuels et des artistes de l'Union européenne pour donner forme et substance à cette « idée neuve », au moment où les citoyens de cet ensemble sont appelés à sceller un nouveau pacte constitutionnel.

Je ne doute pas que le Sénat, où sont représentés les Français établis hors de France, sera particulièrement sensible à la contribution du spectacle vivant au rayonnement international de notre pays.

Comme beaucoup d'entre vous le savent, à commencer par le président de votre commission des affaires culturelles, qui revient de Chine, le lancement de l'année de la France dans ce pays en a fourni une illustration particulièrement brillante : du concert de Jean-Michel Jarre sur la place de la Paix céleste, suivi en direct par près d'un milliard de téléspectateurs dans le monde entier, à la démonstration éblouissante de la maîtrise de l'art pyrotechnique par le groupe F, originaire de la cité phocéenne, qui a marqué les mémoires de 350 millions de téléspectateurs chinois. Le très grand dignitaire chinois à côté de qui j'ai assisté à ce magnifique spectacle m'a confié : « Il n'y a que les Français pour inventer cela ! ».

Je n'ai pas besoin de vous dire combien m'a réjoui ce commentaire, cette maxime que je vous dédie, particulièrement dans cette période où nos concitoyens doutent de leur capacité à imaginer et à façonner l'avenir, à utiliser le capital qu'ils ont entre les mains, qu'il s'agisse du patrimoine, de l'intelligence ou de la puissance créatrice. Mais n'est-ce pas là qu'intervient le rôle de la politique culturelle ? Celle-ci, qui n'est pas la gestion intelligente de la marginalité, doit être audacieuse, car c'est la clef même de notre avenir, de manière à faire pleinement s'épanouir les possibilités de rayonnement international de notre pays.

J'ai à la fois le souci et la responsabilité de faire en sorte que cette politique ambitieuse pour le spectacle vivant s'accompagne d'une politique de l'emploi.

Je mesure, depuis ma prise de fonctions, à quel point le rôle du ministère de la culture et de la communication est essentiel pour impulser et porter une politique de l'emploi culturel.

Et peu m'importe que certains responsables de musée ou de lieu public patrimonial s'énervent quand je leur donne un coup de téléphone très directif pour qu'un tournage puisse se dérouler sur place ! Peu m'importe qu'ils disent : « Le ministre se prend pour un ponte d'Hollywood » ! Ma préoccupation est simplement de donner à nos artistes et techniciens matière à exercer leurs talents, de voir notre capital mis à la disposition des créateurs, qu'il s'agisse d'ailleurs de metteurs en scène français ou de metteurs en scène étrangers.

Nous devons ouvrir nos portes parce que c'est important pour l'emploi culturel dans notre pays. Je m'efforcerai, en tout cas, de ne jamais me laisser enfermer dans une contradiction entre cet objectif d'emploi et un certain nombre de règles, qu'il faudra d'ailleurs peut-être savoir faire évoluer.

Le rapport de Jean-Paul Guillot sur l'emploi dans le spectacle vivant, le cinéma et l'audiovisuel montre le dynamisme de ce secteur et son importance pour notre économie. II souligne la nécessité d'une politique de l'emploi adaptée à ses caractéristiques, qui permette d'enrayer la précarité qui s'est développée ces quinze dernières années pour les artistes et les techniciens.

Les chiffres que contient ce rapport ont eu le mérite de remettre les choses à leur juste place et de chasser de nos débats certains fantasmes ou certaines illusions. Ainsi, 80 % des intermittents ont un revenu annuel de leur travail inférieur à 1,1 SMIC et 54 % d'entre eux déclarent moins de 600 heures travaillées par an. Dans un secteur en croissance annuelle de 5 % en moyenne, leur salaire annuel a baissé de 12 %entre 1989 et 2002, tandis qu'il augmentait de 5 % pour l'ensemble des salariés au cours de la même période, et leur revenu annuel n'a pu se maintenir que grâce aux indemnités de chômage.

Nous ne pouvons pas nous satisfaire d'une telle situation, qui développe la précarité et qui, manifestement, fait jouer à l'assurance chômage un rôle de compensation des baisses de la rémunération du travail, rôle qui n'est évidemment pas le sien et qui est d'autant moins justifié qu'il s'agit d'une activité en croissance nettement plus forte que le reste de l'économie.

La politique de l'emploi que je veux mettre en place a précisément pour objectifs de relever la part des emplois permanents et des structures pérennes ainsi que d'accroître la durée moyenne de travail annuel rémunéré et des contrats des artistes et techniciens.

Mais, à cet égard, qu'on ne tombe pas dans la caricature ! Mon objectif n'est pas de supprimer le système de l'intermittence en France parce que je sais qu'il est consubstantiel à la diversité des créations culturelles et artistiques. Cela dit, chacun a droit à des conditions de vie décentes et à un système d'emploi ou d'activité qui soit en cohérence avec le métier qu'il exerce.

Je suis déterminé à conduire, dans ce domaine, avec le concours de mes collègues Jean-Louis Borloo, Gérard Larcher et Laurent Hénart, toutes les actions qui relèvent de l'Etat et, plus particulièrement, de la responsabilité du ministère de la culture et de la communication. J'en ai présenté le détail devant le Conseil national des professions du spectacle, le CNPS, du 17 décembre dernier, pour tout ce qui relève du niveau national, et ce programme de travail exigeant a commencé d'être mis en oeuvre depuis le début du mois de janvier.

Je voudrais vous en rappeler les grands axes.

Premier axe : accélérer et systématiser la conclusion de conventions collectives. D'ici à la fin du mois de mars, les partenaires sociaux du secteur nous proposeront une couverture exhaustive, sans empiètements ni incohérences entre les différentes conventions collectives. Avec les services de Jean-Louis Borloo et de Gérard Larcher, nous leur apporterons tout le soutien qu'ils peuvent souhaiter pour les accompagner dans cette démarche, en vue de parvenir à la conclusion des conventions collectives nécessaires avant la fin de l'année 2005.

Ces conventions collectives devront également délimiter le périmètre des entreprises qui peuvent recourir légitimement à l'intermittence. Sur cette question, les conclusions du rapport de Jacques Charpillon, chef du service de l'inspection générale de l'administration des affaires culturelles, apportent, en tout ou partie, de précieux éclairages aux partenaires sociaux. Ne pas traiter cette question serait tout simplement, vis-à-vis de l'ensemble de nos concitoyens, rendre vulnérable la spécificité du système que nous devons protéger. En outre, si nous voulons avoir les armes pour le défendre, il ne faut pas que l'on puisse nous objecter qu'existe telle ou telle situation aberrante ou non justifiée. C'est la raison pour laquelle j'en appelle, sur ce sujet, non seulement à l'équilibre et à la mesure, mais également à la volonté.

Deuxième axe : orienter les financements publics vers l'emploi. Il s'agit de s'assurer que les subventions publiques dans le domaine culturel prennent bien en compte les conditions d'emploi dans les différentes structures, notamment en termes de permanence de l'emploi ou d'allongement de la durée des contrats. D'ici à la fin du mois de mars prochain, Alain Auclaire, chargé d'une mission d'inspection générale de l'administration des affaires culturelles, proposera les outils, les indicateurs et les démarches qui permettront d'atteindre cet objectif et d'en mesurer les progrès. Il faudra, je le sais, procéder par étapes dans cette direction. 

Ce week-end s'est ouverte la 27e édition du festival du court-métrage de Clermont-Ferrand. Là encore, ne sombrons pas dans la caricature : mon objectif n'est pas de nier la complexité de la production, notamment dans le domaine du court-métrage ; il n'est pas plus de diligenter l'inspection du travail sur les entreprises les plus faibles de notre pays, lesquelles ne sont pas la cible prioritaire des contrôles. Chaque structure ou chaque forme d'expression doit trouver ses capacités de rayonnement, je l'ai indiqué publiquement au cours de ce week-end.

Troisième axe : améliorer notre connaissance collective de l'emploi dans le secteur et renforcer l'efficacité des contrôles. Les deux décrets permettant le croisement des fichiers entre les différents organismes sociaux - véritables serpents de mer qui n'arrivaient jamais -, qui étaient attendus depuis 1992, sont enfin parus, respectivement en juillet et en décembre dernier ! Ils permettront à la commission « emploi » du CNPS de publier, chaque année, un rapport sur la situation de l'emploi dans le secteur du spectacle vivant, du cinéma et de l'audiovisuel, à l'échelon tant national que régional. Ce rapport devra être débattu, non seulement au sein du Conseil national des professions du spectacle, mais également dans chacune des commissions régionales de l'emploi et des professions du spectacle, les COREPS, dont j'ai accéléré la mise en place, et qui réunissent, dans chaque région, sous la présidence du préfet ou du directeur régional des affaires culturelles, les représentants des artistes et des techniciens, mais aussi, et c'est essentiel, les élus des collectivités territoriales.

Le croisement des fichiers permettra de renforcer les contrôles en donnant de nouveaux outils aux inspecteurs du travail comme aux services de la délégation interministérielle de lutte contre le travail illégal. Les textes législatifs et réglementaires sont en cours de révision, afin que des sanctions administratives immédiates, notamment en matière de financements publics, puissent être prononcées à la suite des irrégularités qui auront été constatées par procès-verbal.

Quatrième axe : accompagner les efforts de mutualisation et de structuration des employeurs, particulièrement nécessaires dans un secteur où les structures sont petites, fragiles et très dispersées. Il faut par exemple favoriser les initiatives de regroupement des métiers de l'administration du spectacle au service de plusieurs compagnies indépendantes. Ainsi, un certain nombre de tracasseries administratives, nécessaires s'agissant de gestion, seront-elles évitées à celles et ceux dont la vocation prioritaire est la création.

Dernier axe, enfin : mieux maîtriser l'offre de formation professionnelle initiale et continue dans le secteur. Cette offre s'inscrit dans les plans régionaux pour l'emploi dans le spectacle vivant, que j'ai demandé à chaque directeur régional des affaires culturelles d'élaborer et qui porteront leurs effets sur plusieurs années. C'est en effet à l'échelon de chaque région, en concertation étroite avec les collectivités territoriales, que la mise en oeuvre d'une politique de l'emploi et de la formation peut être effective. Elle ne peut d'ailleurs s'inscrire que dans la durée.

D'importantes mesures nouvelles, sur les 753 millions d'euros consacrés au spectacle vivant, ont été déléguées aux directions régionales des affaires culturelles, pour ces plans. Elles visent à accroître le nombre d'emplois artistiques permanents dans les structures les plus importantes, à mieux rémunérer et à déclarer la totalité du travail effectué, notamment les répétitions ou les temps de préparation, à créer des emplois administratifs mutualisés, à relancer, comme nous nous y sommes engagés, François Fillon et moi-même, l'éducation artistique et culturelle, qui passe notamment par l'intervention des artistes dans les écoles, collèges et lycées ou dans les universités.

J'ai bien entendu, cela m'a été dit à plusieurs reprises et sous diverses formes, que les collectivités territoriales ne souhaitaient pas s'impliquer dans le financement de l'indemnisation du chômage des artistes et des techniciens. Elles considèrent, et je peux les comprendre, que ce n'est pas leur rôle. C'est la raison pour laquelle j'ai demandé aux directeurs régionaux des affaires culturelles de concevoir leurs plans régionaux pour l'emploi en étroite coopération avec les collectivités territoriales et les représentants des professionnels de leur région, et ce dans le respect des compétences de chacun.

En matière d'emploi dans le spectacle vivant, le cinéma et l'audiovisuel, comme le rapport de Jean-Paul Guillot l'a souligné, en effet seuls les efforts conjugués et coordonnés de l'Etat, des partenaires sociaux du secteur et des collectivités territoriales permettront aux artistes et aux techniciens de trouver des conditions d'expression de leurs talents et d'exercice de leurs métiers qui reconnaissent pleinement leurs spécificités, sans avoir à se défausser sur l'assurance chômage, dont ce n'est pas la vocation, pour que leur soit assurée une juste rémunération de leur travail.

Il ne s'agit évidemment pas de se renvoyer les uns aux autres les responsabilités de financement ; il s'agit encore moins pour l'Etat de se désengager, alors que les mesures nouvelles inscrites au budget de mon ministère pour 2005 -grâce à vous, mesdames, messieurs les sénateurs de la majorité présidentielle qui votez les budgets -,...

M. Charles Revet. Merci de le souligner !

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. ...atteignent, en faveur de l'emploi dans le spectacle vivant, un niveau que l'on peut qualifier, sans excès, d'historique, même si tout est toujours perfectible.

Pour autant, que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ou le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, s'ils écoutent depuis leur bureau notre débat, n'en concluent pas qu'ils peuvent dormir sur leurs deux oreilles pour la préparation du budget 2006 : je serai aussi offensif que pour celui de 2005 !

M. Charles Revet. A bon entendeur, salut !

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Par un mouvement irréversible et continu, depuis la création du ministère des affaires culturelles en 1959, le paysage culturel de notre pays s'est profondément transformé. Les temps de la méfiance mutuelle, en matière culturelle, entre l'Etat et les collectivités territoriales sont révolus. La condescendance d'un Etat parisien arrogant, porteur d'une vision élitiste de la « vraie culture » et de la création, à l'égard d'élus locaux assimilés à des organisateurs de manifestations folkloriques ou, au mieux, à des représentants d'un « amateurisme » culturel, a définitivement disparu devant l'extraordinaire vitalité de la création et des activités culturelles dans les régions.

Les formidables outils de diffusion, portés par l'explosion des industries culturelles et l'omniprésence de la télévision sur l'ensemble du territoire ont très largement homogénéisé les pratiques culturelles de nos concitoyens. Le maillage serré de tout le territoire national en équipements culturels structurants et en équipements de proximité - même s'il reste évidemment encore d'importantes lacunes, qu'il faudra progressivement combler avec les rectifications et les rééquilibrages nécessaires -, la multiplication des festivals, le développement de compagnies de théâtre, de cirque, de spectacle de rue, de danse, de musiques actuelles, de musique classique témoignent que, au-delà des engouements et des effets de mode, la culture est devenue notre passion nationale, unanimement partagée, le ciment d'une unité populaire et politique.

Cela explique sans doute que notre pays se soit retrouvé, derrière le Président de la République, sans aucune dissonance, pour défendre l'exception et la diversité culturelles, en France, en Europe et dans le monde. De tels moments d'unanimité sont rares. J'ai à coeur de protéger ce climat consensuel dans les relations entre l'Etat et les collectivités territoriales. Dès que je constate un climat d'affrontement inutile, j'essaie de faire prévaloir la négociation, en organisant une table ronde.

C'est la raison pour laquelle je me suis rendu, voilà quelques jours, à Nîmes, pour demander un « cessez-le-feu culturel » ; et je me rendrai partout où la culture, notre passion commune, est menacée de devenir l'otage de nos divisions politiques. Parce qu'elle est essentielle au rayonnement de notre pays, dans la diversité de ses territoires, je crois en une exception culturelle dans notre débat démocratique et républicain : l'exception culturelle ne vaut pas que pour l'Organisation mondiale du commerce ou à l'extérieur de nos frontières. C'est cette exception qui explique le choix de Lens pour une nouvelle antenne du Louvre ; c'est un choix dont je suis fier et qui honore le gouvernement auquel j'appartiens.

Aujourd'hui, j'ai la conviction que, sur les enjeux de l'emploi culturel, chacun prenant les responsabilités qui lui incombent, nous sommes capables de nous rassembler.

Aux partenaires sociaux du secteur, la charge de conclure des conventions collectives qui reconnaissent durablement les spécificités des métiers des artistes et des techniciens et leur assurent la juste rémunération de leur travail !

A l'Etat et aux collectivités territoriales, ensemble et chacun pour ce qui relève de sa responsabilité propre, la charge d'exercer les fonctions de régulation et de contrôle que l'on attend des pouvoirs publics, d'assurer leurs missions d'employeur, de donneur d'ordre et de financeur des activités culturelles, qui concourent à la fois à l'attractivité des territoires et au renforcement des liens sociaux, tout en ayant comme premier souci le respect de l'indépendance artistique !

Aux confédérations interprofessionnelles, enfin, la charge d'assurer, dans les négociations qui auront lieu cette année, par des dispositions adaptées, un régime d'assurance chômage qui corresponde à son rôle légitime, au sein de la solidarité interprofessionnelle, tout en prenant en compte les spécificités des métiers des artistes et des techniciens !

J'ai la volonté, je l'ai dit, de maintenir, et non de supprimer, le régime de l'intermittence, qui est indispensable à l'activité de création et de diffusion artistiques et culturelles, à la condition de ne pas faire porter sur la solidarité interprofessionnelle des charges qui relèvent d'une politique salariale normale ou d'un financement public de la politique culturelle. (M. Gérard Longuet approuve.)

Pour ce qui concerne le spectacle vivant, on ne sait pas assez que les financements publics, alors même qu'ils se sont continûment accrus, sont assurés aux deux tiers par les collectivités territoriales, le dernier tiers étant à la charge de l'Etat. Cette équation financière donne la mesure du poids qu'a désormais pris, en matière culturelle, l'intervention des collectivités territoriales.

Ce nouvel équilibre a été atteint de manière progressive, presque subrepticement, sur une longue période. Il ne résulte pas d'un choix délibéré ou d'une répartition claire des compétences et des financements qui aurait été décidé à un moment donné. Il traduit tout simplement, et nous devons nous en féliciter, la place que la culture a prise dans notre vie collective, locale et nationale, et la conscience aiguë qu'en ont les pouvoirs publics. Il nous donne aussi la mesure de la transformation des modes d'intervention et d'organisation qu'il me faut conduire et qui doivent être désormais ceux du ministère de la culture et de la communication, dans un contexte à la fois de décentralisation et de très forte déconcentration.

Sans nous payer de mots, je crois qu'il s'agit, pour paraphraser le titre du livre que Philippe Urfalino a consacré à la création du ministère des affaires culturelles, d'une nécessaire « ré-invention de la politique culturelle ». Je ne la réinventerai pas seul. Il s'agit d'une mission exaltante.

Mesdames, messieurs les sénateurs, parlementaires et représentants des collectivités territoriales, j'ai besoin de vous entendre me confirmer ce que je sais déjà par votre action et par votre présence depuis que j'ai pris mes fonctions, que vous aussi, vous souhaitez que cette réinvention de la politique culturelle soit une oeuvre et une aventure communes et que vous êtes prêts à y apporter votre concours. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce débat sur le spectacle vivant s'inscrit dans la démarche d'analyse et de dialogue que nous avons menée au Sénat, au sein de la commission des affaires culturelles, depuis deux ans. Je tiens à remercier le Gouvernement et tout particulièrement vous, monsieur le ministre, d'avoir pris l'initiative de l'organiser.

L'expression même de « spectacle vivant » est peu explicite : les interprétations en sont diverses et les limites mal définies et mal comprises. Le grand public n'est mobilisé ou choqué que par les événements sortant de l'ordinaire ; ce sont les seuls qu'il retient. Il est évident que la crise déclenchée par le problème de la couverture sociale du chômage des professionnels du spectacle, dite « crise des intermittents du spectacle », par son importance et sa gravité, et par les actions que les professionnels de ce secteur ont menées, a attiré l'attention des publics et des pouvoirs publics.

Nous pouvons mesurer le chemin parcouru depuis le 26 juin 2003, date à laquelle un accord non unanime, portant sur la révision des modalités d'indemnisation du chômage des professionnels du secteur, a déclenché un conflit qui s'est généralisé et s'est manifesté de façon toute particulière durant l'été 2003.

Au-delà du constat désormais partagé, au-delà du règlement des situations les plus difficiles et de la tentative de réduction des abus constatés, le temps est venu de définir de nouvelles bases et de proposer un système plus équitable et socialement acceptable. Nous nous sommes efforcés, tous ensemble, notamment sur votre initiative, monsieur le ministre, de remplacer la gestion des conflits par une culture de la concertation permanente, organisée et loyale.

Aujourd'hui, nous pouvons tous considérer que le monde de la culture sort d'une crise et nous accorder à reconnaître l'importance des questions qu'elle a soulevées, mais cette crise doit être aussi créatrice, nul ne peut le nier.

Sera-t-elle salvatrice ? Seul l'engagement loyal de tous les acteurs du secteur, à commencer par le vôtre, monsieur le ministre, pourra permettre de répondre positivement à cette question.

En effet, de quoi s'agit-il ? D'une évolution mal maîtrisée, d'une sorte de « crise de la quarantaine », de crise de maturité de la politique culturelle initiée par André Malraux. Ce secteur, incroyablement foisonnant, a vu sa dynamique de croissance induire d'incontestables effets pervers, voire s'en alimenter, parmi lesquels la hausse subreptice et structurelle du financement d'une partie de notre politique culturelle par le système d'assurance chômage. Cette situation paradoxale ne pouvait déboucher que sur l'échec.

Elle a suscité, chez l'ensemble de nos concitoyens, y compris chez les élus, un désir de mieux comprendre le fonctionnement du secteur et les contraintes de ses nombreux acteurs. Elle permet aux Français de mieux percevoir les difficultés des artistes et du monde de la culture. Elle a favorisé leur prise de conscience de la place majeure de la culture dans notre société et du fait que cette « exception culturelle », dont ils sont fiers, a aussi un coût et mérite un financement particulier. Enfin, elle a aussi permis des prises de conscience au sein du monde de la culture lui-même.

Ainsi, comme toute crise, personnelle ou collective, celle-ci porte en son sein des ferments de réflexion, d'évolution créative, voire de reconstruction.

Si l'on a pu frôler le divorce, une réflexion commune approfondie et une analyse partagée doivent aujourd'hui permettre à notre pays de renouveler le « pacte culturel » engagé par Malraux et, à chacun des acteurs, de clarifier ses engagements et d'en assumer pleinement les responsabilités.

Pour certains, ce processus peut apparaître long, trop long, mais il fallait bien tout ce temps pour vous permettre, monsieur le ministre, de renouer les fils du dialogue. De l'avis général, vous l'avez fait avec beaucoup de courage, de talent, de passion et de compétence, et je tiens à vous en féliciter.

Ce temps était également nécessaire pour que s'accomplisse l'immense travail d'investigation, de réflexion et de propositions des différentes instances de concertation et des experts mandatés à cet effet.

Je tiens ici à saluer tout particulièrement l'engagement de MM. Bernard Latarjet, Jacques Charpillon, Michel Lagrave et Jean-Paul Guillot. Leurs travaux ont permis de renforcer considérablement la connaissance, jusqu'ici très parcellaire, du secteur du spectacle vivant et, par conséquent, d'éclairer chacun des acteurs.

Je ne suis pas de ceux qui, à l'instar du président du groupe socialiste de l'Assemblée nationale, dénoncent une « accumulation de rapports » ; je suis, au contraire, persuadé que chacun d'entre eux, y compris, bien sûr, ceux de nos assemblées parlementaires, ont apporté une pierre à cet édifice, si délicat à consolider et à rénover.

Le rapport de M. Bernard Latarjet permet d'évaluer la vitalité artistique de notre pays : ce dernier compte 3 300 compagnies professionnelles de théâtre, de danse, de cirque et de théâtre de rue, 8 000 ensembles et groupes musicaux indépendants, et 5 000 spectacles différents y sont donnés chaque année. De même, le cinéma hexagonal est l'objet d'une légitime fierté ; les chiffres pour 2004 sont très encourageants, puisqu'ils font apparaître une hausse de 11,6 % des entrées en salle, avec près de 200 millions d'entrées, et une augmentation de la part de marché des films français.

Toutefois, comme je l'ai rappelé, cette politique s'est développée en comptant trop sur le régime d'assurance chômage spécifique pour assurer son financement. Ce système a des effets pervers. Son caractère fortement attractif ne joue-t-il pas à la manière d'un miroir aux alouettes sur de nombreux jeunes, dont le talent ne permet pas nécessairement de transformer une passion en choix professionnel ?

Cette situation a, comme vous l'avez dit, monsieur le ministre, contribué à la paupérisation des artistes, décrite et chiffrée par M. Jean-Paul Guillot.

L'effet des « vases communicants » leur a cependant permis de limiter la baisse de leurs revenus, les indemnisations versées par l'UNEDIC ayant elles-mêmes fortement augmenté.

Il faut donc avoir conscience de ces évolutions et des difficultés qu'elles entraînent pour l'ensemble des professionnels. Il faut aussi mieux mesurer l'importance croissante de ces activités pour notre pays en matière économique, social et d'aménagement du territoire.

M. Jean-Paul Guillot nous a fait récemment découvrir ce poids économique : 20 milliards d'euros pour les secteurs du spectacle vivant, de l'audiovisuel et du cinéma. Sait-on que leur valeur ajoutée s'est élevée à plus de 11 milliards d'euros en 2003, soit autant que celle des secteurs de la construction aéronautique, navale et ferroviaire réunis, et que 17 % de ce montant sont imputables au spectacle vivant ?

Les données sociales dont nous disposons désormais ne sont pas moins intéressantes : spectacle vivant, audiovisuel et cinéma emploient environ 300 000 personnes, soit autant que l'industrie automobile.

Ces rapports sont donc de toute première importance, d'autant que le manque cruel d'informations et de statistiques fiables a beaucoup nui, dans le passé, à la sérénité des débats, à la prise et à l'efficacité des décisions. La passion et la virulence de certains doivent céder le pas au constat rationnel et accepté par tous.

Cependant, cet approfondissement de l'analyse et de la réflexion n'a pas empêché l'action que j'évoquais au début de mon propos, bien au contraire.

Ainsi, monsieur le ministre, vous avez d'ores et déjà obtenu des améliorations notables du protocole de juin 2003. Vous avez créé un fonds spécifique provisoire, abondé par l'Etat, afin de prendre en charge les exclus du nouveau système, et vous avez prorogé ce fonds pour 2005. Vous avez mis en oeuvre une politique résolue de lutte contre le recours abusif des employeurs du spectacle vivant, du cinéma et de l'audiovisuel au régime de l'intermittence. Enfin, vous avez engagé une politique ambitieuse en faveur de l'emploi culturel, comme vous venez de le rappeler ; je citerai à ce propos l'extension du crédit d'impôt cinéma au secteur audiovisuel, la création de fonds régionaux d'aide à ces secteurs et le plan en faveur du spectacle vivant.

Forts de cette meilleure et indispensable connaissance des chiffres, des faits, des pratiques et, par conséquent, de la réalité de la situation, mais aussi de la volonté de réaffirmer les objectifs qui fondent notre politique culturelle, nous devons désormais préciser les moyens de cette ambition pour notre pays. Cette ambition, nous la partageons tous, ici, me semble-t-il, quel que soit le banc sur lequel nous siégeons. Il nous faut donc poursuivre tous ensemble cette dynamique d'action.

Sur la base de données désormais fiables, les propositions avancées par les experts et les commissions parlementaires, ainsi que les préconisations opérationnelles élaborées par votre ministère fournissent de formidables supports à cette action. Vous avez, monsieur le ministre, présenté les axes de la « bataille pour l'emploi culturel » que nous devons tous mener ; je souscris pleinement à cette démarche ainsi qu'au calendrier pour 2005 et au-delà.

En effet, comme l'a écrit Albert Camus, « c'est en fonction de l'avenir qu'il faut poser les problèmes sans remâcher interminablement les fautes du passé. »

A ce point de mon propos, je rappellerai les efforts accomplis par notre commission, dans un esprit de consensus et de solidarité. De ce fait, j'exprimerai quelques convictions et formulerai des recommandations s'agissant de la place et de la responsabilité de chacun des acteurs dans la refondation du secteur du spectacle vivant, dont la réussite me semble s'imposer à la fois pour les professionnels du secteur et, au-delà, pour l'ensemble de nos concitoyens.

La place de l'Etat reste et restera, bien entendu, essentielle.

Les missions de ce dernier sont multiples : il s'agit, avec les collectivités territoriales, donneurs d'ordres de plus en plus importants, de garantir et d'organiser un « service public culturel » qui ait à coeur de soutenir la création et de développer la diffusion des oeuvres, et ce dans le respect de la liberté du créateur.

Le soutien à la création se mesure aussi à l'aune de la place accordée aux auteurs et à leurs oeuvres dans les structures publiques et leur programmation. Comptez-vous renforcer cette place, monsieur le ministre ?

Le développement de l'emploi culturel passe, quant à lui, par l'impératif d'une meilleure diffusion des oeuvres, vous l'avez dit. Quand l'on pense à la quantité de travail nécessaire à la production d'une pièce de théâtre, par exemple, ou d'un ballet, comment se satisfaire d'une aussi faible représentation devant le public, qui constitue pourtant l'objectif final de ce travail ? La diffusion des oeuvres et la recherche du public ont été trop délaissées. Ainsi, selon M. Bernard Latarjet, si le nombre moyen de représentations par compagnie est de trente-quatre et demi, il se réduit à sept par spectacle pour les théâtres dramatiques et à trois à peine pour les scènes nationales.

Dans son rapport intitulé Contribution au débat sur la création culturelle en France unanimement apprécié, semble-t-il, notre commission des affaires culturelles a exprimé le souhait que les créations soient mieux valorisées. Par le mode de fonctionnement et de financement des lieux de spectacles, par l'encouragement au développement de réseaux, par les retransmissions télévisées, les pouvoirs publics doivent favoriser l'allongement de la diffusion des oeuvres et la diversité des lieux de cette diffusion. Cela exigera une évolution des mentalités et une responsabilisation des parties concernées et passera par la formation des publics de demain, donc par un renforcement de l'enseignement artistique, comme vous l'avez annoncé, monsieur le ministre, puisque vous travaillez en bonne harmonie avec M. François Fillon.

Il faut aussi réfléchir à l'entrée des jeunes artistes dans les carrières et remettre à plat les formations. L'orientation et l'information des jeunes sur les débouchés artistiques doivent être considérablement améliorées.

L'Etat doit, par ailleurs, poursuivre résolument la politique de lutte contre les abus. Les contrôles réalisés ces derniers mois montrent un taux d'infractions extrêmement élevé, de 40 % à 80 % selon les secteurs, mais nous sommes satisfaits de constater que ces taux ont quasiment diminué de moitié à l'occasion des contrôles les plus récents. Cela démontre tout à la fois leur utilité, leur caractère dissuasif et la nécessité de maintenir la pression.

Je me réjouis, à cet égard, de l'excellente coopération entre le ministère de la culture et celui du travail, de l'emploi et de la cohésion sociale.

Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous apporter des précisions sur les moyens humains permettant de poursuivre cet axe de votre politique et sur la formation de ces personnels aux spécificités du secteur de la culture ?

L'Etat doit aussi persévérer dans la mise en place d'un système d'information fiable et exhaustif, au plan national comme au plan régional. Vous en avez dit un mot, mais nous souhaiterions que vous accélériez la concrétisation des mesures annoncées, dans ce domaine comme dans d'autres, d'ailleurs.

Il doit, en outre, poursuivre le dialogue et la concertation avec l'ensemble des acteurs.

Au plan régional, ceux-ci pourront se développer au sein des COREPS. Créées par une circulaire d'août 2003, ces instances théoriquement pérennes sont en train de se mettre en place lentement, et je ne vous cache pas que je m'étonne un peu de cette lenteur, malgré le « coup d'accélérateur » qui a toutefois été donné.

Au plan national, la concertation se poursuivra au sein du CNPS, dont la composition gagnerait, semble-t-il, à être élargie. Ainsi, par exemple, les quelques parlementaires à y avoir siégé n'avaient qu'un statut d'invités : peut-être leur présence pourrait-elle être pérennisée et officialisée ?

Par ailleurs, monsieur le président, je propose que vous réunissiez au Sénat chaque année, comme vous avez coutume de le faire dans d'autres domaines, les différents acteurs publics, Etat et collectivités territoriales, afin qu'ils y échangent leurs opinions sur les politiques territoriales de la culture, et ce, bien entendu, en votre présence, monsieur le ministre. (M. le ministre fait un signe d'acquiescement.)

En effet, il est incontestable que les collectivités territoriales assument une part majeure des initiatives et des financements culturels -  les deux tiers de ces derniers - pour l'essentiel au bénéfice du spectacle vivant. Leur responsabilité, en ce qui concerne l'emploi culturel, est par conséquent majeure.

Il ne faut pas que la création et l'emploi culturels soient les victimes du « jeu politique » qui se développe aujourd'hui dans les régions à la suite de la nouvelle étape de décentralisation et de ses supposées conséquences budgétaires.

Le Sénat vient de créer l'Observatoire sénatorial de la décentralisation, chargé de veiller à ce que les transferts de compétences aux collectivités territoriales soient accompagnés des transferts de recettes correspondants. Il est normal que les élus que nous sommes soient vigilants : au-delà, la culture serait prise en otage pour de mauvaises raisons. Ce serait faire fi de l'intérêt général et ne pas respecter nos concitoyens.

Les collectivités territoriales ont, tout comme l'Etat, des responsabilités particulières à assumer en tant que financeurs, donneurs d'ordre et employeurs de personnels culturels. C'est à ces différents titres que les uns et les autres doivent désormais s'attacher à lier davantage les aides, commandes ou subventions, au respect, par les employeurs, des règles du droit du travail. Il s'agit de renforcer l'emploi artistique dans le sens de sa pérennisation, ainsi que vous l'avez évoqué tout à l'heure, monsieur le ministre.

L'augmentation de la durée des contrats et la diversification des missions des artistes permettraient de limiter les effets de la flexibilité et de l'intermittence. Les schémas de services collectifs culturels, prévus dans la loi du 25 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire, vont dans ce sens. Les propositions qu'ils contiennent ont pour objectif de répondre au problème du sous-emploi artistique : participation à l'éducation artistique et culturelle à l'école, formation des enseignants dans les disciplines artistiques, soutien aux pratiques amateurs, mise en place de scènes mobiles. Quelles suites comptez-vous donner à ces propositions, monsieur le ministre ?

Par ailleurs, je tiens à rappeler que la « boîte à outils » des collectivités est loin d'être vide. En effet, la loi du 4 janvier 2002, d'origine sénatoriale, prévoit la création d'établissements publics de coopération culturelle, ou EPCC. Ce nouveau cadre juridique est précieux. Ses modalités de fonctionnement juridique méritent cependant d'être précisées et améliorées. C'est pourquoi la commission des affaires culturelles a confié à notre collègue et ami Ivan Renar une mission de suivi de l'application de cette loi, qui pourra déboucher sur des propositions de modification.

J'en viens aux partenaires sociaux du secteur, employeurs et personnels, artistes et techniciens.

En premier lieu, il me semble que l'adoption des propositions de M. Jean-Paul Guillot en faveur d'une meilleure organisation, structuration et mutualisation des structures est indispensable, tant l'émiettement de celles-ci constitue un frein à leur propre activité et épanouissement. Il s'agit, là aussi, de favoriser la professionnalisation.

En second lieu, à partir d'un diagnostic partagé, les partenaires sociaux doivent rapidement et doublement négocier.

Tout d'abord, les partenaires sociaux doivent négocier les moyens de conforter et de pérenniser l'emploi culturel. Il s'agit en particulier de redéfinir le périmètre des métiers concernés par les annexes VIII et X du protocole de l'UNEDIC, afin de recentrer le régime sur les seules professions relevant de la véritable intermittence. Certaines des propositions de M. Jacques Charpillon permettraient d'avancer en ce sens. Il s'agit aussi de définir les modalités de rémunération des heures dites « invisibles », par exemple celles qui sont consacrées aux répétitions. Il appartient aux partenaires sociaux du secteur de la culture de réinventer partiellement les modalités d'organisation de leurs activités dans le cadre naturel des conventions collectives.

Ensuite, il importe que les partenaires sociaux redéfinissent les modalités d'indemnisation chômage des annexes VIII et X du protocole.

Ce constat confirme la position de la commission des affaires culturelles sur ce point : ce système original, qui se justifie par les spécificités du secteur et repose sur la solidarité interprofessionnelle, doit être maintenu dans son principe, mais réformé dans son périmètre et dans ses modalités.

Le fonds transitoire pour 2005 trace des voies dans cette direction. Je rappelle que les travaux menés par M. Jean-Paul Guillot montrent que le protocole du printemps 2003 n'a ni entraîné les effets redoutés ni remédié à tous les problèmes. Il appartient désormais aux partenaires sociaux de prendre leurs responsabilités.

Enfin, il importe que la responsabilité propre de l'UNEDIC et des ASSEDIC soit pleinement assumée. Cela suppose que leurs services s'attachent bien sûr à respecter la lettre et l'esprit des textes, tout en délivrant des informations et un accueil de qualité. Il serait en effet regrettable que les mesures positives, certes évolutives et donc, il faut le reconnaître, complexes à mettre en oeuvre, voient leur effet contrarié au stade de leur application.

Faisons d'un mal un bien afin que cette sortie de crise soit bénéfique pour tous : pour la création culturelle, tout particulièrement pour le spectacle vivant ; pour tous les protagonistes de la création, dont le professionnalisme doit être soutenu ; pour le public - tous les publics, quelles que soient les générations concernées et leur condition sociale ; pour la place de la France sur la « planète culture », avec sans doute son originalité, son exception, à laquelle nous tenons. Il n'est qu'à voir l'accueil fait à la France à l'occasion des grandes célébrations culturelles, notamment en Chine, comme vous venez de le rappeler, monsieur le ministre.

André Malraux le rappelait dans la Tentation de l'Occident : « Une culture ne meurt que de sa propre faiblesse. »

Monsieur le ministre, vous pouvez, dans cet esprit, être assuré de notre vigilance et de notre soutien. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Jean Puech.

M. Jean Puech. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans une société qui a souvent du mal à répondre de façon concrète aux interrogations et aux défis auxquels elle est confrontée, il est réconfortant de voir un gouvernement qui fait son travail. Dans ce gouvernement, le ministre de la culture est lui aussi, bien évidemment, au travail.

Monsieur le ministre, vous faites du bon travail !

M. Jean Puech. Dès votre arrivée, vous avez su apporter des solutions aux problèmes les plus aigus du moment, tout particulièrement à la situation des intermittents du spectacle.

Mais un ministre n'est pas seulement à son poste pour éteindre les incendies. Son rôle ne se réduit pas à celui de pompier de service ! Il lui revient d'avoir une vision globale de la politique du secteur dont il a la responsabilité. C'est cette dimension que vous avez su donner rapidement à votre action au ministère de la culture et de la communication, monsieur le ministre, et ce dans un remarquable esprit de dialogue. Le débat d'aujourd'hui en est d'ailleurs un témoignage supplémentaire.

Le Sénat, grand conseil des collectivités locales, tiendra toute sa place dans ce débat. Il tient d'ailleurs déjà une place importante dans le domaine culturel en tant qu'institution. Il a en effet pris de nombreuses initiatives ces dernières années. On lui doit de nombreuses manifestations et expositions, de nombreux concerts assez remarquables. Je tiens d'ailleurs, si vous me le permettez, mes chers collègues, à adresser nos chaleureuses félicitations et à exprimer toute notre reconnaissance à M. le président du Sénat, puisque c'est lui qui en a eu l'initiative. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Les collectivités locales sont les premiers financeurs de la culture en France. Elles construisent des équipements, elles aident la création, elles aident l'organisation de spectacles, elles accompagnent la mise en valeur des monuments. Elles ont donc, tout naturellement, de par leur pratique quotidienne, des réflexions à vous soumettre, monsieur le ministre.

La culture, c'est ce sentiment d'identité auquel nous sommes tous si attachés parce qu'il est un pilier de notre société.

La culture, c'est l'expression d'une identité à la fois une et multiple, forte de ses différences, forte de sa capacité à débattre, forte aussi de ses contradictions parfois.

Personne n'a le droit de s'approprier la culture. Cette tentation est encore assez courante. C'est la raison pour laquelle il ne faut jamais cesser de rappeler des vérités qui peuvent déranger quelques cénacles de spécialistes.

La culture, c'est l'affaire de tous ! Il n'existe ni petits ni grands dans cet espace de liberté, comme il n'y a ni grand ni petit patrimoine dans cette France où se juxtaposent, avec un bonheur que nous envie la planète entière, le château de Versailles et une chapelle romane blottie dans un repli de nos campagnes, le Mont-Saint-Michel et les terrasses qui grimpent à l'assaut de nos collines du sud.

La culture est riche de femmes et d'hommes qui s'y engagent comme professionnels du spectacle, comme simples amateurs, le temps d'un été, ou comme formateurs ou autre.

La culture, c'est toute cette animation, cette création. C'est notre richesse commune, composée de tous ces talents dans les domaines les plus divers : le théâtre, le cinéma, l'audiovisuel.

L'occasion m'en étant donnée aujourd'hui, je rappellerai, monsieur le ministre, ce qu'entreprennent les territoires de nos provinces, des départements que je pense bien connaître. Je citerai un exemple, qui, je le crois, illustre le rôle essentiel des initiatives des collectivités locales dans l'émergence de la création culturelle vivante.

Dans le département dont je suis l'élu, une école nationale de musique a été créée voila bientôt dix-sept ans, sur l'initiative du conseil général, dans le cadre d'une charte culturelle signée avec l'Etat. Le ministre de la culture de l'époque, vous le connaissez bien, était François Léotard.

Cette école, organisée de façon décentralisée, est présente à travers quinze antennes éclatées sur l'ensemble des territoires aveyronnais. Aujourd'hui, avec plus de 1 500 élèves et 80 professeurs, refusant tout élitisme, elle est devenue une référence en matière de musique de qualité, dans toutes ses composantes. Cette école nationale de musique est également partie prenante de la vie locale. Elle produit dans tout le département des concerts qui connaissent un grand succès populaire.

Cette école a constitué un orchestre symphonique, un choeur. Elle mène une expérience de musique à l'école qui permet d'initier des enfants à partir du cours préparatoire. De plus en plus de musiciens issus de ses rangs poursuivent une carrière remarquée.

La culture, c'est un tout : c'est du spectacle, mais aussi un patrimoine. C'est tout simplement, et de plus en plus, un atout de développement économique, au service de l'équilibre de nos territoires. Je puis en témoigner.

La culture est au coeur de ce dispositif riche en activités de tous ordres générées par les spectateurs de nos festivals, les visiteurs de nos monuments et les touristes. La restauration de nos monuments offre aux professionnels du bâtiment des chantiers à la hauteur de leurs compétences. Leur talent est reconnu. C'est le talent des artisans, celui des Compagnons qui bâtissent, qui re-bâtissent le patrimoine architectural français en permettant, par la même occasion, la valorisation de leur savoir-faire et la formation des jeunes générations. L'artisanat en sort gagnant tandis que renaît notre patrimoine.

Ce patrimoine est pensé, et toute cette activité, toute cette animation, tout cet engagement, s'inscrit comme une action culturelle majeure. Ce mouvement, c'est de l'emploi et de l'animation.

La culture, ainsi pensée dans sa globalité, joue un rôle essentiel pour l'attractivité de nos communes et de nos départements ruraux. Elle participe plus sûrement à l'aménagement du territoire, j'insiste sur ce point, que certaines grandes idées qui nous sont régulièrement assénées.

Le rapport Guillot a permis de mieux prendre conscience du poids économique du spectacle vivant. C'est une bonne chose.

Les réponses que vous apporterez, monsieur le ministre, aux questions qui sont posées dans ce rapport et aux propositions qui y sont faites devront permettre de franchir une nouvelle étape. Mais veillons à ne pas saucissonner la culture : d'un côté le spectacle vivant, de l'autre, le patrimoine ! Veillons à ne pas cantonner le patrimoine à de belles pierres !

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Tout à fait.

M. Jean Puech. Le patrimoine est lui aussi dynamique. Il est lui aussi vivant, et bien vivant ! La France a besoin de tout le monde sur ce vaste chantier de la culture.

Pour terminer, monsieur le ministre, permettez-moi d'évoquer un chantier qui me tient à coeur : l'inscription, par l'UNESCO, des Causses et des Cévennes sur la liste du patrimoine mondial de l'humanité.

Ce projet concerne un remarquable ensemble et un vaste territoire, étendu sur cinq départements du sud de la France : l'Aveyron, la Lozère, le Gard, l'Hérault et l'Ardèche. En effet, les Causses et les Cévennes, que vous connaissez, monsieur le ministre, si bien que je ne vous les décrirai pas, sont candidats à l'inscription au patrimoine mondial de l'humanité au titre des paysages culturels.

L'ensemble des acteurs locaux s'est rassemblé depuis plusieurs années sur ce projet porteur de développement culturel et économique. Les réunions de travail de ces derniers mois en sont une illustration. Je me fais aujourd'hui encore le porte-parole de cette mobilisation.

Monsieur le ministre, vous avez décidé de nous accompagner puisque vous avez proposé, au nom de la France, de déposer ce dossier à l'UNESCO. Soyez-en très chaleureusement remercié. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. Mes chers collègues, je viens d'avoir communication des résultats du vote qui est intervenu à l'Assemblée nationale sur le projet de loi constitutionnelle. Je souhaite vous en faire part en cet instant : parmi les 548 votants, 450 se sont prononcés pour et 34 contre. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

(M. Roland du Luart remplace M. Christian Poncelet au fauteuil de la présidence.)