Art. 57 ter
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2006
Art. 58

Articles additionnels avant l'article 58

M. le président. L'amendement n° II-286, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Avant l'article 58, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 5 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi rédigé :

« Art. 5 - à compter du 1er janvier 2006, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est autorisé à procéder, pour le compte de la caisse d'amortissement de la dette sociale, dans des conditions fixées par décret, à des emprunts à long, moyen et court termes libellés en euros ou en autres devises, à des conversions facultatives, à des opérations de prises en pension sur titres d'État, à des opérations de dépôts de liquidités sur le marché interbancaire de la zone euro, à des rachats, à des échanges d'emprunts, à des échanges de devises ou de taux d'intérêt, à l'achat ou à la vente d'options, de contrats à terme ou d'autres instruments financiers à terme, conformément aux obligations et à la mission de l'établissement. »

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est un petit amendement technique (Sourires) - j'y insiste - qui tire les conséquences de l'excellent rapport que notre collègue Paul Girod a commis sur la gestion de la dette. Nous souhaitons que soit confiée à l'Agence France Trésor la gestion de la dette sociale pour le compte de la Caisse d'amortissement de la dette sociale, la CADES, dans le respect des missions et des obligations de celle-ci.

Qu'on ne s'y méprenne pas : cet amendement n'a aucunement pour conséquence de porter atteinte au statut de la CADES, à son existence juridique, à ses responsabilités. Simplement, les opérations de gestion technique de la dette ont vocation à être regroupées auprès d'un seul organisme, lequel ne peut être que l'Agence France Trésor. Celle-ci sera alors l'opérateur de la CADES en termes d'endettement. Il en résultera probablement un gain financier. Combien ? Je l'ignore, monsieur le ministre. Vous le savez, nous sommes des gagne-petit : quand on essaie d'améliorer le budget de l'État, on l'améliore à la marge. Mais, en l'état actuel des choses, rien ne doit être négligé, quand bien même il ne s'agit que de quelques dizaines de millions d'euros, et c'est l'ordre de grandeur. Pour peu qu'ils soient utilisés à bon escient, ces quelques dizaines de millions d'euros peuvent atténuer de nombreuses difficultés et rendre bien des services, monsieur le ministre.

Par conséquent, il importe que ce soit l'Agence France Trésor qui assure le contrôle des risques et veille tant à la transparence qu'à la cohérence de la gestion de la dette et de la quasi-dette de l'État.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Cet amendement, monsieur le rapporteur général, est très intéressant. L'idée qui consiste à autoriser le ministre de l'économie et des finances à gérer les opérations techniques de gestion de la dette conduites par la CADES permettrait, en particulier, d'économiser l'écart de taux entre la dette souveraine de l'État et la dette sociale. Cela va évidemment dans le sens de la réflexion que nous menons pour rationaliser davantage la gestion de la dette ainsi que son efficacité.

Je mettrai néanmoins deux bémols.

Premièrement, il ne faut pas se tromper dans l'identification des sources de la dette. Le débat récent que nous avons eu l'atteste. On ne peut pas tout mettre sur le même plan, tout mutualiser et tout confondre. À cet égard, la réforme Juppé avait ceci de positif qu'elle permettait de distinguer ce qui relevait de la dette sociale de ce qui relevait de la dette de l'État.

Deuxièmement, mon collègue chargé des affaires sociales, en particulier, et moi-même ne nous sommes pas concertés. Pour cette raison, je ne puis qu'être réservé à l'égard de cet amendement, quand bien même j'en approuve d'autant plus le principe qu'il ne prévoit qu'une faculté - et c'est un aspect majeur.

Comme je déteste m'en remettre à la sagesse du Sénat- cette posture donne à penser qu'on se défile, ce que je n'aime pas -, le Gouvernement émettra un avis de principe favorable sur cet amendement, sous la seule réserve dont je viens de faire état.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Au nom de la commission, je vous remercie vivement de cette approche favorable, qui est pour nous une satisfaction.

Cela étant dit, il ne faut pas confondre bilan et trésorerie. Dans une entreprise, un seul directeur financier assure de manière centralisée, au sein d'une unique trésorerie, la gestion technique de la dette et de la trésorerie. S'agissant de l'État, le même principe doit prévaloir. À défaut de s'y astreindre, la gestion de la dette ne s'en trouve pas optimisée, ce qui représente un coût.

Vous dites devoir vous concerter avec votre collègue en charge des affaires sociales, nous le comprenons bien volontiers, mais le ministre chargé des affaires sociales n'a rien à voir avec la gestion de la trésorerie de l'État. Cela ne relève aucunement de ses attributions. Peut-être deviendra-t-il un jour ministre des finances et, par conséquent, compétent en la matière.

M. Michel Charasse. Bonjour les dégâts ! (Sourires.)

M. Philippe Marini, rapporteur général. Mais, ès qualités, il n'a strictement aucun jugement à émettre sur un sujet qui, je le répète, est purement technique.

Monsieur le ministre, même si je comprends fort bien le propos que vous nous avez tenu, propos très respectueux, comme il se doit, de la solidarité gouvernementale et de vos collègues, il est du devoir de la commission des finances du Sénat de passer outre à ce scrupule qui vous honore et de souhaiter l'adoption de son amendement.

M. le président. Avant de donner la parole à M. Yves Fréville pour explication de vote, je me permets de faire remarquer que nous avons peu progressé depuis la récente exhortation de M. le président de la commission des finances. Pour autant, je ne conteste pas que le sujet soit très important et porte sur des domaines essentiels.

Vous avez la parole, mon cher collègue.

M. Yves Fréville. Je souscris entièrement à l'amendement de la commission des finances dans la mesure où il ne vise à offrir qu'une faculté à l'Agence France Trésor de gérer la dette de la CADES.

Néanmoins, je me pose une question. Est-il opportun d'inclure dans cette faculté la gestion des emprunts à court terme de la sécurité sociale, lesquels sont gérés par l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l'ACOSS, l'Agence France Trésor gérant pour sa part les emprunts à court terme de l'État ? Aussi, je serais partisan d'exclure la faculté pour le ministre de gérer les emprunts à court terme de la sécurité sociale.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-286.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, avant l'article 58.

L'amendement n° II-328, présenté par M. Lambert, est ainsi libellé :

Avant l'article 58, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.- L'article 885 V bis du code général des impôts est ainsi rédigé :

« Art. 885 V bis - L'impôt de solidarité sur la fortune du redevable ayant son domicile fiscal en France est réduit de la différence entre, d'une part, le total de cet impôt et des impôts dus en France et à l'étranger au titre des revenus et produits de l'année précédente, calculés avant imputation des crédits d'impôt et des retenues non libératoires, et, d'autre part, 70 % du total des revenus nets de frais professionnels soumis en France et à l'étranger à l'impôt sur le revenu au titre de l'année précédente et des produits soumis à un prélèvement libératoire de cet impôt. »

II.- La perte de recettes résultant pour l'État du I. est compensée par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Alain Lambert.

M. Alain Lambert. Il s'agit en quelque sorte d'un amendement de « mise en bouche », puisqu'il vient juste avant l'examen de l'article 58 visant à instaurer la règle selon laquelle les impôts directs payés par un contribuable ne peuvent excéder un certain pourcentage de ses revenus. C'est un amendement de consensus, et même, au fond, d'humilité

Je suggère en effet d'en revenir à la législation qui avait été élaborée sinon nos par collègues socialistes, à tout le moins par le gouvernement qu'ils soutenaient. Je crois même que, au sein de ce gouvernement, le ministre chargé du budget était Michel Charasse. (M. Michel Charasse le confirme.)

Il y a dix ans, dans la loi de finances pour 1996, notre majorité avait malencontreusement modifié cette disposition. Chacun aura compris qu'il s'agit du plafonnement du plafonnement. Cela invite à rester humble.

Dès lors, il conviendrait peut-être, après ces années, de réparer cette erreur. Je rappelle que l'impôt dû par certains contribuables est supérieur à leur revenu annuel, ce qui est assez peu favorable à la compétitivité et à l'attractivité de notre territoire, dont on se gargarise par ailleurs avec force discours sur toutes les estrades. Il existe même des organismes dont la spécialité est de démontrer l'attractivité de notre territoire. Voyez avec quels arguments ils peuvent convaincre des étrangers de venir en France pour y entreprendre !

Cet amendement me semble pouvoir faire l'objet d'un certain consensus dans la mesure où, au fond, il revient à la rédaction de 1989. Aussi nos collègues socialistes devraient-ils pouvoir nous soutenir. Mes collègues de la majorité pourraient avoir à coeur de revenir sur une décision malencontreuse, avec la même humilité que celle dont je fais preuve.

Monsieur le ministre, il ne me semble pas que l'article 58 couvre tous les cas de figure que nous rencontrons en la matière. Aussi, cet amendement n'est en rien contradictoire avec ledit article, mais, en le complétant au contraire très utilement, il permettra de résoudre définitivement le problème.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. Sans vouloir minimiser cette initiative, je me permettrai de dire qu'il s'agit là d'un amendement tirant la conséquence de positions qu'a souvent prises, affirmées et adoptées la commission des finances du Sénat qui, dès lors, ne peut qu'y être favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jean-François Copé, ministre délégué. C'est une excellente entrée en matière sur le débat qui nous attend.

Je remercie M. Lambert d'avoir déposé cet amendement. Outre que c'est une manière pour moi de rendre hommage tant à la constance de ses convictions sur ce sujet qu'au travail et aux débats majeurs qu'il a suscités sur ces questions en tant que ministre du budget, je veux lui dire que je suis très heureux que nous ayons ce débat en sa présence, débat qu'il pourra alimenter de ses réflexions et de son expérience. C'est aussi pour moi l'occasion de lui témoigner ma reconnaissance.

Le sujet que nous allons aborder dans un instant répond assez largement à vos préoccupations, monsieur Lambert.

M. Alain Lambert. Pas totalement !

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Certes ! Je le reconnais.

Mais l'introduction d'un plafonnement de l'impôt à 60 % des revenus est évidemment une innovation majeure- oserai-je parler de rupture ? - dans la tradition fiscale française.

Pour la première fois, nous allons assumer, premièrement, que l'impôt ne peut pas être confiscatoire ; deuxièmement, qu'il s'adresse à tous les Français, y compris les plus modestes.

En d'autres termes, je reconnais, face à une assemblée qui comprend une opposition et une majorité, que l'on doit à la gauche l'invention d'un premier plafonnement. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) Ne vous inquiétez pas, je ne vous oublie pas, et nous allons y revenir !

À ce stade de notre débat, je souhaiterais, monsieur Lambert, que vous acceptiez de retirer votre amendement. Nous aborderons très largement cette question dans un instant, même si j'ai bien conscience que tout ne sera pas forcément résolu avec le bouclier fiscal. Mais disons que c'est une brèche majeure !

M. le président. La parole est à M. Alain Lambert, pour explication de vote.

M. Alain Lambert. Je voudrais faire remarquer à M. le ministre délégué que, si je manque peut-être de la force d'expertise qu'il a la chance d'avoir à ses côtés, les dispositions dont nous parlerons tout à l'heure sont loin de traiter le sujet comme le fait mon amendement.

En conséquence, je voudrais avoir la certitude que la quasi-totalité des problèmes seront réglés, monsieur le président, comme M. le ministre délégué le prétend.

M. Jean-François Copé, ministre délégué. La quasi-totalité, oui !

M. Alain Lambert. J'ai le sentiment, compte tenu de la modeste expertise dont je dispose sur le sujet, que de nombreux cas ne seront pas réglés. Mes chers collègues, je ne voudrais pas que l'on accrédite l'idée inverse : tous les problèmes ne sont pas réglés et il faudra bien y remédier.

Pour ma part, je suis persuadé depuis dix ans que nous avons commis une erreur. Je n'aurai pas la conscience en paix tant que je n'aurai pas participé à la résolution de ce problème.

C'est pourquoi, à ce stade, je ne vois pas comment je pourrais retirer mon amendement, sauf à renier ce qui me semble le plus équitable dans la fiscalité de notre pays.

M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.

M. Michel Charasse. Je ne reviendrai pas sur le fond de la mesure, que je connais bien puisque, comme Alain Lambert l'a rappelé, elle avait été inventée avant lui. Je ne lui demande d'ailleurs aucun droit d'auteur ! (Sourires.)

En fait, c'est un hommage que rend Alain Lambert au gouvernement et à la majorité de 1988. Mais, comme Jean-François Copé conserve toujours une certaine méfiance à l'égard de toutes les mesures socialistes de l'époque, l'unanimité absolue n'existe pas dans la majorité pour cette disposition.

J'ai moi-même un souvenir ému de cette mesure, que je serais plutôt tenté de voter puisque je l'avais écrite. Mais il se trouve que mes amis ne portent plus aujourd'hui la même appréciation que le jour où ils l'ont votée.

Mme Nicole Bricq. Nous n'avons rien dit ! (Sourires.)

M. Michel Charasse. Par conséquent, je voterai contre cet amendement, mais c'est un autre problème ! (Rires sur les travées de l'UMP.)

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Vous êtes un apparatchik !

M. Michel Charasse. Ce serait bien la première fois, monsieur le ministre délégué !

Je pose simplement une question, et je ne sais pas si l'on pourra me répondre : cette disposition n'aboutit-elle pas à réduire le taux qui est prévu par le bouclier fiscal instauré à l'article 58, et donc la participation éventuelle des collectivités locales au financement de cette mesure ?

Que l'on plafonne l'ISF dans le cadre du bouclier fiscal ou en vertu de cette disposition, autrement dit, que le cadeau vienne de M. Copé ou de M. Lambert, peu importe, la mesure est intéressante si elle permet d'épargner les collectivités locales !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Pour répondre à l'interrogation que vient d'exprimer Michel Charasse, je dirai que le dispositif Lambert n'intègre pas les impôts locaux. À l'inverse, il intègre la CSG et la CRDS. Donc, les collectivités locales ne sont en rien concernées par ces mesures.

M. le président. La parole est à M. Michel Charasse.

M. Michel Charasse. À partir du moment où le dispositif Lambert réduit le montant de l'ISF, donc l'addition du bouclier fiscal, j'en déduis qu'il peut y avoir des cas où cela coûtera moins cher aux collectivités locales. C'est de la mathématique !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-François Copé, ministre délégué. J'insiste pour que M. Lambert accepte de retirer cet amendement. En effet, je ne voudrais pas que le débat que nous allons avoir sur le bouclier fiscal suscite des interprétations erronées. Le petit échange qui a eu lieu entre les uns et les autres montre que le risque de confusion est réel.

Je le répète, cet amendement ne couvre pas la totalité du champ, raison pour laquelle, monsieur Lambert, je vous demande de le retirer.

M. Charles Pasqua. Monsieur Lambert, faites un effort !

M. le président. Monsieur Lambert, l'amendement est-il maintenu ?

M. Alain Lambert. Monsieur le ministre délégué, je ne suis pas là pour vous empêcher d'accomplir votre tâche. Tout au contraire, si je peux vous aider à l'accomplir dans les meilleures conditions, je ferai le maximum.

Je vais donc retirer cet amendement, comme vous me le demandez, monsieur le ministre délégué, mais avec regret, car je crois assez bien connaître cette assemblée et, sans être infaillible, je parie que cet amendement aurait été adopté. Il l'a d'ailleurs déjà été par le passé, mais la commission mixte paritaire ne l'a pas retenu. Il n'a donc pas eu le destin qu'il méritait. M. de Raincourt en sait long sur le sujet, lui qui connaît par le menu l'histoire de cette mesure.

Monsieur le ministre délégué, si je comprends bien, vous considérez que le maintien de cet amendement serait un handicap pour le débat qui va suivre. Puisque vous prenez les choses de cette manière, je ne peux pas résister. Vous me demandez beaucoup, et c'est également avec beaucoup de regret que je retire cet amendement.

M. le président. L'amendement n° II-328 est retiré.

TITRE II

DISPOSITIONS PERMANENTES

I. - MESURES FISCALES ET BUDGÉTAIRES NON RATTACHÉES

Art. additionnels avant l'art. 58
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2006
Art. additionnel après l'art. 58

Article 58

I. - L'article 1er du code général des impôts devient l'article 1er A du même code.

II. - Avant la première partie du livre Ier du code général des impôts, il est inséré un article 1er ainsi rédigé :

« Art. 1er. - Les impôts directs payés par un contribuable ne peuvent être supérieurs à 60 % de ses revenus.

« Les conditions d'application de ce droit sont définies à l'article 1649-0 A. »

III. - Au début du titre Ier de la troisième partie du code général des impôts, il est créé un chapitre 01 intitulé : « Plafonnement des impôts » ainsi rédigé :

« CHAPITRE 01

« Plafonnement des impôts

« Art. 1649-0 A. - 1. Le droit à restitution de la fraction des impositions qui excède le seuil mentionné à l'article 1er est acquis par le contribuable au 1er janvier suivant l'année du paiement des impositions dont il est redevable.

« Le contribuable s'entend du foyer fiscal défini à l'article 6, fiscalement domicilié en France au sens de l'article 4 B.

« 2. Sous réserve qu'elles ne soient pas déductibles d'un revenu catégoriel de l'impôt sur le revenu et qu'elles aient été payées en France et, s'agissant des impositions mentionnées aux a et b, qu'elles aient été régulièrement déclarées, les impositions à prendre en compte pour la détermination du droit à restitution sont :

« a) L'impôt sur le revenu ;

« b) L'impôt de solidarité sur la fortune ;

« c) La taxe foncière sur les propriétés bâties et la taxe foncière sur les propriétés non bâties afférentes à l'habitation principale du contribuable et perçues au profit des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale ainsi que les taxes additionnelles à ces taxes perçues au profit de la région d'Ile-de-France et d'autres établissements et organismes habilités à percevoir ces taxes additionnelles à l'exception de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères ;

« d) La taxe d'habitation perçue au profit des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale, afférente à l'habitation principale du contribuable ainsi que les taxes additionnelles à cette taxe perçues au profit d'autres établissements et organismes habilités à percevoir ces taxes.

« 3. Les impositions mentionnées au 2 sont diminuées des restitutions de l'impôt sur le revenu perçues ou des dégrèvements obtenus au cours de l'année du paiement de ces impositions.

« Lorsque les impositions mentionnées au c du 2 sont établies au nom des sociétés et groupements non soumis à l'impôt sur les sociétés dont le contribuable est membre, il est tenu compte de la fraction de ces impositions à proportion des droits du contribuable dans les bénéfices comptables de ces sociétés et groupements. En cas d'indivision, il est tenu compte de la fraction de ces impositions à proportion des droits du contribuable dans l'indivision.

« Lorsque les impositions sont établies au nom de plusieurs contribuables, le montant des impositions à retenir pour la détermination du droit à restitution est égal, pour les impositions mentionnées au d du 2, au montant de ces impositions divisé par le nombre de contribuables redevables et, pour les impositions mentionnées aux a et b du 2, au montant des impositions correspondant à la fraction de la base d'imposition du contribuable qui demande la restitution.

« 4. Le revenu à prendre en compte pour la détermination du droit à restitution s'entend de celui réalisé par le contribuable au titre de l'année qui précède celle du paiement des impositions. Il est constitué :

« a) Des revenus soumis à l'impôt sur le revenu nets de frais professionnels ;

« b) Des produits soumis à un prélèvement libératoire ;

« c) Des revenus exonérés d'impôt sur le revenu réalisés au cours de la même année en France ou hors de France, à l'exception des plus-values mentionnées aux II et III de l'article 150 U et des prestations mentionnées aux 2° et 2° bis de l'article 81.

« 5. Le revenu mentionné au 4 est diminué :

« a) Des déficits catégoriels dont l'imputation est autorisée par le I de l'article 156 ;

« b) Du montant des pensions alimentaires déduit en application du 2° du II de l'article 156 ;

« c) Des cotisations ou primes déduites en application de l'article 163 quatervicies.

« 6. Les revenus des comptes d'épargne-logement mentionnés aux articles L. 315-1 à L. 315-6 du code de la construction et de l'habitation, des plans d'épargne populaire mentionnés au 22° de l'article 157 ainsi que des bons ou contrats de capitalisation et des placements de même nature, autres que ceux en unités de compte, sont réalisés, pour l'application du 4, à la date de leur inscription en compte.

« 7. Les demandes de restitution doivent être déposées avant le 31 décembre de l'année suivant celle du paiement des impositions mentionnées au 2. Les dispositions de l'article 1965 L sont applicables.

« Le reversement des sommes indûment restituées est demandé selon les mêmes règles de procédure et sous les mêmes sanctions qu'en matière d'impôt sur le revenu même lorsque les revenus rectifiés ayant servi de base à ces impositions sont issus d'une période prescrite. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles de procédure applicables en matière d'impôt sur le revenu. »

IV. - 1. La restitution prévue à l'article 1649-0 A du code général des impôts est prise en charge par l'Etat, les collectivités territoriales, les établissements et organismes à concurrence de la part correspondant au montant total des impositions mentionnées au 2 du même article perçues à leur profit.

Le montant total des restitutions, diminuées le cas échéant des reversements des sommes indûment restituées en application du second alinéa du 7, afférentes aux impositions mentionnées aux c et d du 2 de l'article 1649-0 A du code précité perçues au profit des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale attributaires de la dotation globale de fonctionnement s'impute, chaque année, sur le montant de la dotation globale de fonctionnement prévue à l'article L. 1613-l du code général des collectivités territoriales.

La restitution, diminuée le cas échéant du reversement des sommes indûment restituées en application du second alinéa du 7, afférentes aux impositions mentionnées aux c et d du 2 de l'article 1649-0 A du code général des impôts est répartie entre les différents établissements ou organismes non attributaires de la dotation globale de fonctionnement au prorata des impositions émises au profit de chacun d'eux.

2. Pour l'application du 1, il n'est pas tenu compte :

a) De la part de la restitution de chaque collectivité, établissement et organisme afférente aux impositions mentionnées aux c et d du 2 de l'article 1649-0 A du code général des impôts, lorsque cette part n'excède pas, pour chaque contribuable, 25 € ;

b) De la part de la restitution afférente aux impositions mentionnées aux c et d du 2 de l'article 1649-0 A du code général des impôts dues par chaque contribuable dont la somme des impositions mentionnées aux a et b du 2 de l'article précité excède le seuil prévu à l'article 1er du même code.

3. L'article L. 1613-4 du code général des collectivités territoriales est complété par les mots : « hormis celle prévue au IV de l'article 58 de la loi n°           du                    de finances pour 2006 ».

V. - Un décret fixe les conditions d'application du présent article. Il précise notamment les obligations déclaratives du contribuable et les modalités d'instruction de la demande de restitution.

VI. - Les dispositions des I à IV sont applicables aux impositions payées à compter du 1er janvier 2006.

M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, sur l'article.

Mme Marie-France Beaufils. Avec cet article 58, vous entendez, monsieur le ministre délégué, poursuivre ce que nous estimons être le démantèlement de l'impôt de solidarité sur la fortune.

Vous voulez vider l'ISF de son contenu. Il a déjà été fortement réduit après le vote, par votre majorité, d'exonérations démesurées en faveur du capital financier et d'abattements en matière de donations.

Vous vous êtes d'ailleurs partagé le travail : l'initiative des parlementaires de la majorité complète parfaitement celles du Gouvernement. Entre vous, seul le style change ! Les mesures d'initiatives gouvernementales ont en effet une particularité : la réforme de l'ISF n'y dit jamais son nom.

Monsieur le ministre délégué, vous présentez, sous certaines formes qui sont très habiles à première vue, une réforme importante.

En même temps, vous refusez de dire la vérité en face quand vous présentez cet article 58. Ainsi, vous dissimulez votre choix d'une réduction de l'ISF derrière l'expression de « bouclier fiscal ». Vous nous dites qu'il faut s'intéresser au sort de ceux que le Fisc accablerait ; l'impôt serait, pour certains, à tel point confiscatoire, qu'une réforme les protégeant serait nécessaire.

Vous nous laissez supposer que le Gouvernement serait protecteur, voué au citoyen contribuable, qui paye l'ISF. Nous ne partageons pas ce point de vue, loin s'en faut !

Nous vous invitons plutôt à regarder la situation de ceux qui sont effectivement accablés, celle de ceux que la collectivité doit aider et protéger.

Regardons la situation des ménages surendettés. C'est très significatif : des salariés dont les revenus se situent entre 1 500 et 3 000 euros sont maintenant concernés. Plus de 188 000 dossiers de surendettement ont été déposés en 2004, quand le « bouclier fiscal » ne s'adresse qu'à 93 000 contribuables, et ne profite surtout qu'à 13 000 d'entre eux.

Les dossiers de surendettement en disent long sur ce qui accable les ménages modestes et moyens. Ce n'est pas le « trop d'impôts » dont vous parlez qui en est cause.

Il peut, certes, y avoir des difficultés, notamment avec la taxe foncière. D'où notre proposition de réforme, prévoyant des abattements pour les ménages modestes, comme cela se fait pour la taxe d'habitation. Mais vous les refusez pour le moment.

Pourtant, le surendettement de ces ménages n'est pas lié à l'ISF. Pour quelques-uns, il peut avoir un lien avec l'impôt sur le revenu, mais généralement, une issue est trouvée dans le cadre de recours formés auprès des services des impôts.

Le vrai problème, pour les ménages populaires, est celui des dettes de la vie courante, qui les accablent : le loyer, l'eau, le gaz, l'électricité, le transport ou la restauration scolaire.

Le bouclier, c'est à ce niveau qu'il faudrait le déployer : contre la spéculation immobilière, pour une baisse du prix de l'essence, en refusant également l'augmentation du prix du gaz, pour des services publics permettant de répondre à leurs besoins.

Ces ménages auraient également besoin d'un bouclier pour empêcher les expulsions, les coupures d'eau, d'électricité ou de gaz. Ils auraient surtout besoin qu'on les protège contre les bas salaires, la précarité, le chômage non indemnisé.

Or vous proposez le contraire ! Vous donnez l'argent à ceux qui en ont le moins besoin, les spéculateurs, les grandes fortunes, qui laissent proliférer la misère.

Alors que des salariés vivent dans la rue, vous vous acharnez à supprimer l'ISF, qui représente, pour une résidence principale de 950 000 euros, 154 euros !

Il n'est pas possible de résoudre les problèmes de cette façon. Vous avez, comme nous, été témoins des événements récents. Vous savez donc que la population est très sensible à cette situation et que les personnes les plus fragiles rencontrant de graves difficultés souhaitent être entendues.

Or la suppression progressive de l'ISF est l'illustration de votre déni de cette réalité. Elle marque également votre refus d'une imposition sur le patrimoine. Or, je vous le rappelle, 10 % des Français les plus riches possèdent 46 % du patrimoine total, et 59 % du patrimoine financier.

Pour vous, posséder et accumuler ces richesses ne doit pas justifier une contribution supplémentaire aux dépenses publiques. Autrement dit, ceux qui ont les moyens ne doivent pas payer !

Nous ne voulons pas de ce bouclier fiscal qui, en fait, est le refus d'une société qui serait solidaire non plus seulement en paroles, mais également dans les actes ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. Je suis saisi de dix-huit amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° II-160 est présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

L'amendement n° II-379 est présenté par MM. Massion,  Masseret,  Angels et  Auban, Mme Bricq, MM. Charasse,  Demerliat,  Frécon,  Haut,  Marc,  Miquel,  Moreigne,  Sergent et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Bernard Vera, pour présenter l'amendement n° II-160.

M. Bernard Vera. L'article 58 que nous examinons organise le bouclier fiscal, qui s'apparente plus à une armure fiscale dans la mesure où il protège intégralement les plus riches.

Selon les calculs réalisés par les organisations syndicales du ministère des finances, ce cadeau ne sera offert qu'à quelques milliers de contribuables. Il sera particulièrement luxueux, puisque ce plafonnement des impôts en fonction du revenu prévu dans le projet de budget pour 2006 profitera, pour l'essentiel, aux contribuables assujettis à l'ISF, c'est-à-dire, comme le disent les syndicalistes, « ceux qui sont déjà concernés par le plafonnement de l'impôt de solidarité sur la fortune, soit environ 5 000 personnes parmi lesquelles les deux tiers ont un patrimoine net supérieur à 6,9 millions d'euros, ou qui s'en approchent, soit environ 8 000 personnes ».

Sur un coût global de 400 millions d'euros, la mesure se traduira par le versement de plus de 250 millions d'euros « à une poignée de contribuables - entre 12 000 et 15 000 ».

Il est vrai que vous donnerez la même somme aux plus modestes, sauf qu'elle sera partagée entre 8,8 millions de foyers fiscaux, ce qui démontre le caractère profondément inégalitaire de la mesure et illustre votre conception de la justice fiscale.

Au moment même où, sur l'initiative de la commission des finances et de son rapporteur général, vous avez décidé de taxer de 200 millions d'euros les plans d'épargne logement, ouverts le plus souvent par les ménages issus des couches moyennes ou modestes, le parallèle est éloquent !

Dans ces conditions, comment accepter de voir ce projet de loi de finances privilégier de façon aussi claire une partie de la population très fortunée, alors que des millions de nos concitoyens vous rappellent chaque jour les difficultés qu'ils rencontrent ? C'est terriblement injuste.

Mais l'incidence ne sera pas supportée seulement par les foyers modestes, qui se verront privés d'une partie de financements publics pouvant servir à soulager des familles. Cette mesure aura également des conséquences désastreuses sur nos collectivités locales.

Le récent congrès des maires vous l'a rappelé dans sa résolution finale.

Il demande que l'autonomie financière des communes, qui constitue désormais un principe de valeur constitutionnelle, soit scrupuleusement respectée et que l'impôt local ne soit pas considéré comme la variable d'ajustement de la politique budgétaire et fiscale de l'État.

Il exprime son désaccord avec l'inclusion de l'impôt local dans le bouclier fiscal : ce n'est pas la mutualisation de la prise en charge, par les collectivités locales, de la part qui leur revient dans le financement du plafonnement, c'est-à-dire l'imputation sur la dotation globale de fonctionnement, qui modifiera fondamentalement la mesure.

Dans ces conditions, mes chers collègues, pour faire respecter la justice sociale pour les ménages et les collectivités locales, nous demandons la suppression de l'article 58.

M. le président. La parole est à M. Michel Sergent, pour présenter l'amendement n° II-379.

M. Michel Sergent. Notre amendement vise également à supprimer l'article 58, dont l'objectif réel est de remettre en cause une nouvelle fois l'impôt de solidarité sur la fortune.

Alors que les prélèvements obligatoires augmentent pour le plus grand nombre, que 90 % des foyers paient plus de prélèvements sociaux que d'impôts sur le revenu, le Gouvernement décide de baisser l'impôt sur le revenu et l'ISF, tout en augmentant les prélèvements sociaux.

Quant aux foyers les plus riches, ils ne bénéficieront pas seulement de la baisse de l'impôt sur le revenu, mais également du plafonnement du total des impôts dûs en fonction des revenus.

C'est un fait avéré, les plus hauts revenus sont les gros gagnants de la réforme qui est projetée. Les réductions de quelques euros, qui concerneront certains ménages modestes, sont peu de chose par rapport aux milliers, voire aux dizaines de milliers d'euros supplémentaires que pourront percevoir en plus les contribuables relevant des tranches supérieures de l'impôt sur le revenu et de l'impôt de solidarité sur la fortune.

Le Gouvernement voudrait faire croire aux Français qu'ils seront nombreux à profiter du plafonnement appelé « bouclier fiscal ». Mais, contrairement à ce qu'il prétend, ce bouclier ne protégera pas les classes moyennes.

Selon les meilleures estimations, cette mesure profitera seulement à 93 000 contribuables et, en réalité, à une bonne dizaine de milliers d'entre eux. En outre, elle ne pourra s'appliquer à d'autres contribuables que par accident, c'est-à-dire s'ils subissent une perte brutale de revenus.

Par conséquent, en dehors de cas exceptionnels, seuls quelques milliers de contribuables fortunés, assujettis à l'ISF, sont concernés, en fait, les propriétaires d'une fortune supérieure à 5 millions d'euros.

Ce « bouclier fiscal » n'est qu'un moyen détourné de toucher à l'ISF. Telle est la raison pour laquelle l'amendement que nous proposons vise à supprimer cette mesure profondément injuste.

Mme Nicole Bricq. Et inefficace !

M. le président. L'amendement n° II-287 rectifié, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

 I.- Dans le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article 1er du code général des impôts, remplacer le pourcentage :

60 %

par le pourcentage :

70 %

II.- Compléter le 2. du texte proposé par le III de cet article pour l'article 1649-0 A du même code par un alinéa ainsi rédigé :

« e) La contribution sociale généralisée, la contribution pour le remboursement de la dette sociale, ainsi que le prélèvement social sur les revenus du patrimoine et les produits de placement défini à l'article 1600-0 F bis et la contribution additionnelle mentionnée au 2 de l'article 11 de la loi n° 2004-626 du 30 juin 2004 ; »

III.- Dans le premier alinéa (1) du IV de cet article, remplacer les mots :

les collectivités territoriales, les établissements et organismes

par les mots :

les organismes et établissements divers concourant au financement de la protection sociale et au remboursement de la dette sociale, les collectivités territoriales ainsi que les établissements et organismes locaux

IV.- Compléter le 1 du IV de cet article par un alinéa ainsi rédigé :

La restitution, diminuée le cas échéant du reversement des sommes indûment restituées en application du second alinéa du 7, afférentes aux impositions mentionnées au e du 2 de l'article 1649-0 A du code général des impôts est répartie entre les organismes et établissements divers concourant au financement de la protection sociale et au remboursement de la dette sociale au prorata des impositions émises au profit de chacun d'eux.

V.- Dans les deuxième (a) et troisième (b) alinéas du 2 du IV de cet article, remplacer (deux fois) les références :

c et d

par les références :

c, d et e

VI.- Pour compenser la perte de recettes résultant des dispositions ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

  ...- La perte de recettes résultant pour l'Etat de la prise en compte de la contribution sociale généralisée et des prélèvements sociaux au numérateur du nouveau "bouclier fiscal" est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. 

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Je ne surprendrai personne en disant que la commission ne partage en rien les positions qui ont été exprimées par les deux orateurs précédents.

Nous estimons, monsieur le ministre délégué, que cette réforme est une bonne réforme et qu'il s'agit d'une mesure, à la fois, de justice fiscale et de compétitivité économique.

Mme Hélène Luc. Bien sûr, bien sûr !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous estimons, mes chers collègues, que notre pays doit d'abord rester compétitif et que notre territoire doit être de ceux où l'on investit, où celles et ceux qui sont en mesure d'investir se sentent dans des conditions favorables pour développer leurs projets au bénéfice de la croissance économique et de l'emploi.

De ce point de vue, la fixation d'une limite à la pression fiscale sur le revenu nous paraît être un principe offrant une utile garantie pour tous les contribuables.

Au demeurant, comme M. le ministre délégué l'a déjà montré en d'autres lieux - je pense qu'il reprendra cette démonstration tout à l'heure -, la mesure que nous commentons n'est pas destinée uniquement à des personnes de condition sociale favorisée, voire très favorisée. Elle peut et doit aussi s'appliquer à des personnes beaucoup moins favorisées.

C'est d'ailleurs, mes chers collègues, l'une des raisons qui militent pour que le dispositif du bouclier fiscal englobe bien les impôts locaux afférents à la résidence principale.

Je tiens à le rappeler car, souvent dans cette assemblée, l'accent a été mis, en particulier par les membres du groupe communiste républicain et citoyen, sur la situation de personnes modestes qui sont propriétaires de leur logement. D'ailleurs, chers collègues, vous avez déposé, à plusieurs reprises, des amendements visant à solliciter des exonérations de taxe foncière. Or, avec le dispositif tel qui nous est soumis, en l'état, vous aurez satisfaction.

En ce qui concerne le présent amendement, il vise à conférer toute son étendue au principe que vous nous soumettez, monsieur le ministre délégué, car, nous situant du point de vue du contribuable et nous plaçant à ses côtés, nous devons apprécier le total des prélèvements obligatoires pesant sur son revenu.

À ce titre, nous estimons qu'il est utile et opportun, voire indispensable pour une bonne compréhension des choses, que les contributions sociales, c'est-à-dire la contribution sociale généralisée, ou CSG, et la contribution pour le remboursement de la dette sociale, ou CRDS, qui sont assises sur le même revenu que l'impôt sur le revenu, à peu de choses près, soient bien incluses dans le numérateur de la fraction qui permettra d'aboutir au taux de prélèvement maximum.

Bien entendu, si l'on procède ainsi, mécaniquement et arithmétiquement, le taux sera relevé, monsieur le ministre délégué.

Tous les calculs montrent qu'il y a indifférence et égalité entre la première formule, où ne figurent au numérateur que l'impôt sur le revenu, les impôts locaux de la résidence principale, l'impôt sur le patrimoine, qui aboutit à un taux de 60 %, et la seconde formule, où l'addition de l'impôt sur le revenu, de l'impôt sur le patrimoine, des impôts locaux de la résidence principale, ainsi que de la CSG et de la CRDS, donne un résultat de 70 %.

C'est la réalité de ce qui est payé, le résultat de l'existant, c'est-à-dire 60 % si les contributions sociales sont exclues et 70 % si elles sont incluses. À droit constant, c'est une seule et même situation, mes chers collègues.

J'ajoute un argument plus technique à l'appui de la proposition de la commission.

Monsieur le ministre délégué, s'agissant des dispositions relatives au barème de l'impôt sur le revenu et, en particulier, de celles qui tendent à la compensation de la suppression de l'abattement de 20 % pour toute une série de revenus, vous nous expliquez, à juste titre, que la neutralité doit être « fiscalo-sociale », c'est-à-dire qu'elle doit englober la réalité de la pression fiscale et sociale actuelle, CSG et CRDS comprises.

Nous observons bien, dans les dispositions relatives au barème de l'impôt sur le revenu, que, dans les cas où une déduction de 20 % existait, il faut compenser la suppression de cette dernière en tenant compte de la pression non seulement fiscale, mais aussi sociale.

Par conséquent, la commission estime que la prise en compte de la CSG et de la CRDS serait tout simplement le constat de la réalité.

À partir de là, mes chers collègues, à l'évidence, nous pouvons, les uns et les autres, voire les uns ou les autres, développer nos conceptions sur le devenir de l'impôt sur le revenu ou, plus exactement, du prélèvement sur le revenu.

Pour ma part, je persiste à penser - mais je sais que ce sentiment n'est pas partagé par tous, notamment sur les travées de la majorité - qu'il y a un seul et même impôt sur le revenu, avec une part proportionnelle, le prélèvement social, et une part progressive, l'impôt sur le revenu.

La commission pense donc être cohérente avec ses propres analyses, monsieur le ministre délégué, en proposant la prise en compte de la CSG et de la CRDS au numérateur du bouclier fiscal.

M. le président. L'amendement n° II-167, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer le troisième alinéa (b) du 2 du texte proposé par le III de cet article pour l'article 1649-0 A du code général des impôts.

La parole est à M. Bernard Vera.

M. Bernard Vera. Cet amendement du groupe communiste républicain et citoyen, portant sur les composantes du « bouclier fiscal », tend à exclure de l'application de ce dispositif les droits constatés et payés au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune.

Trois éléments principaux sont pris en compte pour les impôts directs susceptibles d'être concernés par les effets du bouclier fiscal : ce sont bien entendu l'impôt sur le revenu, les impôts locaux et l'impôt de solidarité sur la fortune.

L'impôt sur le revenu est censé rapporter, en 2006, 57 482 millions d'euros. Les impôts locaux dus par les ménages représentent, pour leur part, un ensemble brut d'environ 40 à 42 milliards d'euros, tandis que l'impôt de solidarité sur la fortune est censé dégager un produit fiscal de 3,3 milliards d'euros.

En clair, les recettes fiscales concernées représentent un volume d'environ 100 milliards d'euros.

Au regard des objectifs du bouclier fiscal, estimés à hauteur de 400 millions d'euros, le Gouvernement entend donc mettre en place un dispositif complexe pour une somme qui représente 0,4 % du montant des impositions concernées.

En fait, c'est bien l'ISF qui est visé directement par le bouclier fiscal.

Prenons le cas du XVIe arrondissement de Paris : il compte 15 343 redevables de l'impôt de la solidarité sur la fortune, disposant d'un patrimoine moyen de 2 534 852 euros et devant s'acquitter d'un impôt moyen de 16 394 euros.

Or, avec un peu plus de 15 300 contribuables assujettis à l'ISF, nous sommes fort près des 13 400 contribuables les plus fortunés au titre de l'impôt sur le revenu que compte ce même arrondissement.

En fait, ce sont sans doute un peu les mêmes qui sont concernés et tout laisse clairement penser que c'est bel et bien l'ISF qui est directement visé avec le bouclier fiscal.

C'est l'ISF, parce que le taux marginal d'imposition au titre de l'impôt sur le revenu reste éloigné des 60 % et qu'il est susceptible de se réduire encore, du fait de l'abaissement du taux de prélèvement des tranches.

Le bouclier fiscal est en définitive le petit cadeau à ceux qui n'auront pas su optimiser leurs revenus et leurs placements et dont le patrimoine ne produit pas encore tout à fait assez de revenus pour leur permettre de vivre encore plus aisément. Est-ce bien légitime et respectueux de l'égalité devant l'impôt ?

Mes chers collègues, c'est pour toutes ces raisons que nous vous invitons à adopter cet amendement.

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.

L'amendement n° II-261 est présenté par M. Mercier, Mme Gourault, M. Détraigne et les membres du groupe Union centriste-UDF.

L'amendement n° II-314 rectifié bis est présenté par MM. Adnot, Türk et Pointereau, Mme Desmarescaux et M. P. Dominati.

L'amendement n° II-380 est présenté par MM. Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

I. - Supprimer les quatrième et cinquième alinéas (c et d) du 2 du texte proposé par le III de cet article pour insérer un article 1649-0 A dans le code général des impôts.

II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Les pertes de recettes pour l'État résultant de l'exclusion des impôts locaux du calcul du seuil de 60 % à partir duquel pourra être restituée la fraction des impositions excédant ce seuil, sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Denis Badré, pour présenter l'amendement n° II-261.

M. Denis Badré. De débat budgétaire en débat budgétaire, je plaide depuis quelques années, avec une belle constance, pour le plafonnement de l'ISF.

Je préfère en effet un contributeur qui paye un peu moins d'ISF à un contributeur qui, pour ne pas en payer un peu plus, n'en paiera plus du tout parce qu'il sera parti et, de ce fait, ne paiera pas non plus tous les autres impôts auxquels il aurait été sinon assujetti. De même, ne seront pas acquittés ceux qui auraient été liés à son activité dans son pays d'origine, la France : TVA, impôt sur les sociétés, consommation proprement dite... La boule de neige fiscale est énorme !

Je suis donc tout à fait favorable au plafonnement de l'ISF et très heureux qu'enfin le Gouvernement nous propose une solution allant dans ce sens.

Dans un souci de clarté, j'aurais cependant préféré que le plafonnement concerne explicitement l'ISF. Or, monsieur le ministre, vous nous proposez un bouclier fiscal à l'abri duquel vont se trouver réunis l'impôt sur le revenu, l'ISF et les impôts locaux. J'ai fait un peu de mathématiques, et je sais que lorsqu'on additionne des éléments qui ne sont pas exactement de même nature, on ne sait pas très bien dans quelle unité mesurer le résultat de l'opération. C'est déjà vrai pour l'impôt sur le revenu et l'ISF, et c'est encore plus vrai si l'on y ajoute les impôts locaux, qui sont de nature complètement différente. À la limite, je préférerais que l'on adjoigne la CSG à l'impôt sur le revenu et à l'ISF plutôt que les impôts locaux.

Monsieur le ministre, il a beaucoup été question, depuis hier, des impôts locaux, et nous avons eu l'occasion de dire et de répéter notre grand attachement au principe de l'autonomie fiscale des collectivités territoriales. Or votre proposition, en l'état actuel, reviendrait à traiter une difficulté bien identifiée en créant un problème immense dont nous ne saurons nous débrouiller. C'est pourquoi nous souhaitons que les impôts locaux ne soient pas pris en compte dans le bouclier fiscal.

Au-delà de l'autonomie fiscale, j'ajouterai un argument un peu plus politique : lorsque l'impôt dû par une personne sera plafonné, y compris les impôts locaux, le mécanisme de participation de la collectivité locale aboutira à une réduction de ses ressources, alors qu'elle aura toujours les mêmes dépenses à couvrir et ne pourra s'en sortir qu'en augmentant les impôts non plafonnés.

Je sais bien que nombre de ceux qui verront leur impôt plafonné comptent parmi les gros contributeurs, mais, nous l'avons également fortement souligné, certains ne sont que de petits contributeurs. Ce que l'on sait avec certitude, en revanche, c'est que ceux dont l'impôt ne sera pas plafonné ne figurent pas a priori parmi les gros contributeurs. Ce sont donc les petits qui, indirectement, assumeront la charge qui ne pèsera plus sur les gros. Notre groupe ne saurait s'en satisfaire.

Tant parce que nous sommes très attachés à l'argument de l'autonomie financière des collectivités territoriales que dans ce souci d'équité et, surtout, de lisibilité de la mesure, dont nous souhaitons limiter les effets pervers, nous demandons que les impôts locaux ne soient pas pris en compte dans le bouclier fiscal.

Si vous le permettez, monsieur le président, je présenterai également, très brièvement, l'amendement n° II-262, qui a un lien direct avec l'amendement n° II-261 : si, par malheur, les impôts locaux devaient être maintenus dans le bouclier fiscal, qu'au moins les participations des communes ne soient pas prises en compte.

M. le président. L'amendement n° II-314 rectifié bis n'est pas soutenu.

La parole est à M. Gérard Miquel, pour présenter l'amendement n° II-380.

M. Gérard Miquel. Cet amendement vise à exclure les impôts locaux du calcul du seuil de 60 % des revenus à partir duquel le contribuable pourra demander restitution, charge que les collectivités locales devront assumer, à due concurrence du montant total des impositions.

La réforme proposée à l'article 58 du projet de loi de finances paraît en effet en contradiction avec le principe d'autonomie financière des collectivités locales ; la faculté de voter les taux est l'un des éléments essentiels de cette autonomie.

L'équilibre financier des collectivités locales est donc fragile, alors même qu'elles font face au transfert de nouvelles charges. C'est particulièrement vrai depuis la loi du 13 août 2004 et depuis certaines lois spécifiques telles que le texte transférant le financement du RMI aux départements.

La compensation financière versée à ces collectivités locales ne permet pas d'infléchir la tendance à une croissance plus soutenue des dépenses que des recettes que connaît depuis deux décennies la section de fonctionnement.

De plus, l'enjeu financier, estimé à 43 millions d'euros, que représente la somme que devraient reverser les collectivités locales et qui sera pompée sur la dotation globale de fonctionnement est relativement faible par rapport aux coûts découlant de l'instauration de cette mesure : coûts des différentes tâches de contrôle et de calcul, ainsi que ceux qu'induira le jeu des circuits financiers qui en résulteront.

Pour toutes ces raisons, nous pensons qu'il faut supprimer la mise à contribution des collectivités locales au mécanisme du bouclier fiscal parce qu'il importe de préserver les marges de manoeuvres fiscales et financières desdites collectivités et de leur permettre de faire face aux responsabilités qui ne cessent de leur être transférées au travers de la décentralisation. Celle-ci a bon dos, puisqu'elle permet surtout d'utiliser les finances locales comme variable d'ajustement des finances de l'État.

Monsieur le ministre, le Sénat joue un rôle particulier à l'égard des collectivités locales. Mes chers collègues, je crois que les élus de notre pays, toutes sensibilités confondues, apprécieraient que vous votiez unanimement cet amendement.

M. le président. L'amendement n° II-404, présenté par MM. de Broissia, de Raincourt, Amoudry, Bailly, Belot, Bordier, Cléach, Doligé, Dubois, Fouché, Fournier, Grillot, Hyest, Le Grand, Leroy, du Luart, Puech, Richert, Sido et Trillard, est ainsi libellé :

I. - Aux quatrième alinéa (c) et cinquième alinéa (d) du 2 du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 1649-0 A du code général des impôts, après les mots :

établissements publics de coopération intercommunale

insérer les mots :

à l'exception de celles perçues au profit des conseils généraux

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, compléter in fine cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Les pertes de recettes résultant pour l'État de l'exclusion des impositions perçues au profit des départements des impositions à prendre en compte pour la détermination du droit à restitution est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Henri de Raincourt.

M. Henri de Raincourt. Cet amendement a un champ d'application beaucoup plus restreint que les amendements précédents. En effet, ses auteurs approuvent le principe de la réforme et sont favorables à l'inclusion dans le bouclier fiscal de la fiscalité locale. Pourquoi, dans ces conditions, proposer d'en exclure seulement les impôts départementaux ?

Il n'aura échappé à personne que cet amendement est cosigné, entre autres, par douze présidents de conseils généraux. Nous voulons, à l'occasion de la discussion de cet amendement, souligner une fois de plus que les impôts départementaux, dorénavant, dépendent quasi-directement de l'évolution de dépenses qui sont non pas décidées par les conseils généraux, mais découlent de la mise en oeuvre d'un certain nombre de politiques dans le domaine social et au titre, bien légitime d'ailleurs, de la solidarité nationale.

Les dépenses sont donc évolutives, tandis que les recettes restent beaucoup plus figées. Le département devient petit à petit un prestataire de services, c'est clair, mais aussi percepteur au titre de la solidarité nationale. Le montant des impôts dépendant de moins en moins souvent de décisions volontaristes prises par les conseils généraux, on voit mal comment il serait possible de conserver les impôts départementaux dans le bouclier fiscal.

M. le président. L'amendement n° II-168, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Dans le dernier alinéa du 3 du texte proposé par le III de cet article pour l'article 1649-0 A du code général des impôts, remplacer les mots :

pour les impositions mentionnées aux a et b du 2

par les mots :

pour l'imposition mentionnée au a du 2

La parole est à Mme Hélène Luc.

Mme Hélène Luc. Cet amendement est de pure cohérence.

Comme nous l'avons indiqué en défendant l'amendement n° II-167, nous sommes opposés à l'intégration de l'impôt de solidarité sur la fortune dans le champ des impôts concernés par le bouclier fiscal. C'est donc naturellement que nous proposons à l'État de faire l'économie de la charge que représente la restitution des droits excédant les 60 % du revenu fiscal de référence des contribuables concernés.

Tel est le sens de cet amendement, qui offre en outre l'avantage de permettre au solde budgétaire global de ne pas être davantage entamé, à l'avenir, par l'application - dont nous doutons sur le strict plan constitutionnel, je le rappelle - du principe du bouclier fiscal.

M. le président. L'amendement n° II-289, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

I. - Compléter la première phrase du premier alinéa du 4 du texte proposé par le III de cet article pour l'article 1649-0 A du code général des impôts par les mots :

à l'exception des revenus en nature non soumis à l'impôt sur le revenu en application du II de l'article 15.

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant des dispositions du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'État de l'absence de prise en compte des revenus en nature au titre de la résidence principale au dénominateur du nouveau « bouclier fiscal » est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement vise à prévoir explicitement que les revenus en nature tirés de la jouissance de la résidence principale ne sont pas pris en compte au dénominateur du bouclier fiscal. Je pense que la doctrine administrative admet déjà cette solution, mais il serait bon que cette interprétation soit confirmée et solennisée, en particulier pour qu'elle s'impose sans contestation possible aux tribunaux.

M. le président. L'amendement n° II-290, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

I. - Compléter le a du 4 du texte proposé par le III de cet article pour l'article 1649-0 A du code général des impôts par les mots :

minorés des abattements mentionnés aux I et II de l'article 150 VC

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant des dispositions du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'État de la déduction des abattements réalisés à l'article 150 VC du dénominateur du nouveau « bouclier fiscal » est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement de précision vise à ce que soit prise en compte, en matière immobilière, la plus-value nette, après abattement, et non la plus-value brute, avant abattement.

M. le président. L'amendement n° II-288, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

I. - Dans le c du 4 du texte proposé par le III de cet article pour l'article 1649-0 A du code général des impôts, remplacer la référence :

et 2° bis

par les références :

, 2° bis et 9°

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant des dispositions du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'État de l'absence de prise en compte du revenu minimum d'insertion au titre des revenus portés au dénominateur du nouveau « bouclier fiscal » est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement vise à rectifier une erreur technique afin que ne soit pas pris en compte le revenu minimum d'insertion au sein des revenus portés au dénominateur du bouclier fiscal.

M. le président. L'amendement n° II-291, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

I. - Rédiger ainsi le 6 du texte proposé par le III de cet article pour l'article 1649-0 A du code général des impôts :

« 6. Les revenus des comptes d'épargne-logement mentionnés aux articles L. 315-1 à L. 315-6 du code de la construction et de l'habitation et des plans d'épargne populaire mentionnés au 22° de l'article 157 sont réalisés, pour l'application du 4, à la date de leur inscription en compte. »

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant des dispositions du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'État de la prise en compte des intérêts des bons ou contrats de capitalisation au titre des revenus portés au dénominateur du nouveau « bouclier fiscal » au moment du dénouement des contrats est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement tend à ce qu'il soit tenu compte des revenus issus des contrats de capitalisation non pas au moment de l'inscription en compte des intérêts, mais au moment du dénouement du contrat.

Au moment de l'inscription en compte des intérêts, en effet, il ne me semble pas que l'on soit en présence d'un revenu disponible susceptible d'être porté au dénominateur du nouveau « bouclier fiscal ».

La doctrine administrative et la jurisprudence confortent apparemment ce point de vue. J'ai eu connaissance d'une réponse ministérielle de l'année 1998, signée donc de Dominique Strauss-Kahn, qui indiquait à notre collègue député Léonce Deprez, à propos de la jurisprudence de la Cour de cassation au sujet des contrats de capitalisation : « Elle estime que pendant la durée d'exécution du contrat le souscripteur ne détient pas d'autre droit que celui prévu à l'article L. 132-9 du code des assurances, qui lui appartient en propre, de faire racheter le contrat et d'en désigner ou modifier le bénéficiaire. La Cour de cassation considère donc que le souscripteur lui-même ne possède pas de créance de somme d'argent sur la compagnie. »

Dès lors, en conformité avec cette interprétation juridique consacrée par la Cour de cassation, il nous a paru qu'il ne fallait prendre en compte lesdits intérêts qu'au dénouement du contrat.

M. le président. L'amendement n° II-292, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

I. - Après le 6 du texte proposé par le III de cet article pour l'article 1649-0 A du code général des impôts, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« 6 bis. Les gains retirés des cessions à titre onéreux de valeurs mobilières, droits sociaux et titres assimilés qui n'excèdent pas le seuil fixé par le 1 du I de l'article 150-0 A ne sont pas pris en compte pour la détermination du droit à restitution.

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant des dispositions du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'État de la non-prise en compte au titre des revenus portés au dénominateur du nouveau « bouclier fiscal » des gains retirés des cessions de valeurs mobilières qui n'excèdent pas 15 000 euros est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement de précision vise à ce que ne soient pas pris en compte les gains tirés des cessions de valeurs mobilières en deçà de 15 000 euros, conformément à la doctrine administrative existante. En effet, ces gains ne sont pas exonérés : ils ne sont pas soumis à l'impôt, ce qui est tout à fait différent.

M. le président. L'amendement n° II-169, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après le III de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - Après l'article 1649-0 A du code général des impôts, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. ... . - L'application du droit à restitution défini à l'article 1649-0 A ne peut conduire à rendre la cotisation d'impôt de solidarité sur la fortune calculée en application de l'article 885 U du code général des impôts inférieure à :

« - 1 230 euros pour les redevables dont le patrimoine est supérieur à 745 170 euros et inférieur ou égal à 1 201 240 euros ;

« - 4 346 euros pour les redevables dont le patrimoine est supérieur à 1 201 240 euros et inférieur ou égal à 2 381 100 euros ;

« - 6 610 euros pour les redevables dont le patrimoine est supérieur à 2 381 100 euros et inférieur ou égal à 3 726 900 euros ;

« - 21 814 euros pour les redevables dont le patrimoine est supérieur à 3 726 900 euros et inférieur ou égal à 7 143 300 euros ;

« - 67 963 euros pour les redevables dont le patrimoine est supérieur à 7 143 300 euros et inférieur ou égal à 15 529 600 euros ;

« - 100 000 euros pour les redevables dont le patrimoine est supérieur à 15 529 600 euros. »

La parole est à Mme Marie-France Beaufils.

Mme Marie-France Beaufils. Cet amendement de repli a pour objet de modifier les conditions d'application du dispositif de bouclier fiscal : il vise, en quelque sorte, à plafonner le plafonnement dès lors que c'est précisément l'impôt de solidarité sur la fortune qui constitue l'élément fiscal déterminant pris en compte dans le calcul.

La logique de l'impôt de solidarité sur la fortune est en effet légèrement différente de celle qui préside à l'impôt sur le revenu. Qu'on le veuille ou non, l'impôt sur le revenu est, pour la grande majorité des contribuables du pays, le produit de leur activité professionnelle, presque exclusivement salariale.

C'est en effet seulement à partir d'un très haut niveau de patrimoine que l'on trouve des contribuables dont le revenu n'est pas essentiellement composé de la rémunération d'un travail salarié ou d'une activité non-salariée. Dans tous nos départements, ce sont précisément les foyers dont le revenu fiscal de référence dépasse 78 000 euros qui échappent à cette catégorie.

La logique de l'ISF est de contribuer à la satisfaction de l'urgence sociale. À l'origine, cet impôt a été créé, je le rappelle, afin de financer le RMI. Il n'est acquitté que par des redevables dont le patrimoine est suffisamment important pour faire face aux aléas de la vie et qui en tirent parfois des revenus non négligeables, notamment du point de vue foncier ou de la rentabilité des placements mobiliers.

L'ISF prend en compte la réelle faculté contributive des assujettis ; il n'a donc pas tous les défauts que certains lui prêtent. Il est donc légitime et moral que le plafonnement éventuel au titre du « bouclier fiscal » ne le fasse pas totalement disparaître.

Par conséquent, cet amendement vise à instaurer, dans les cas où trouverait à s'appliquer le droit à restitution, une forme de contribution minimale de l'ISF pour chacune des tranches d'imposition au tarif de ce droit.

M. le président. L'amendement n° II-381, présenté par MM. Massion,  Masseret,  Angels et  Auban, Mme Bricq, MM. Charasse,  Demerliat,  Frécon,  Haut,  Marc,  Miquel,  Moreigne,  Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I - Supprimer le IV de cet article.

II - Pour compenser les pertes de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... Les pertes de recettes pour l'État résultant pour l'État de la suppression de la contribution des collectivités locales à la restitution en fonction du revenu est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq. Il s'agit d'un amendement de repli, dans l'hypothèse où notre amendement n° II-379, qui tend à supprimer l'article 58, et notre amendement n° II-380, par lequel nous proposons, comme nos collègues du groupe de l'UC-UDF, de sortir les impôts locaux du « bouclier fiscal », ne seraient pas adoptés.

Cet amendement vise à supprimer les dispositions obligeant les collectivités locales à reverser une part de leur produit des impôts locaux au titre du droit à restitution.

Nous estimons en effet, ainsi que d'autres collègues l'ont exprimé, que le « bouclier fiscal » est contraire au principe d'autonomie financière des collectivités locales. Par ailleurs, l'équilibre financier de ces dernières est fragile.

Nous proposons donc que l'État prenne entièrement en charge la restitution dont les collectivités locales pourraient être redevables.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° II-170 rectifié est présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

L'amendement n° II-262 est présenté par M. Mercier, Mme Gourault, M. Détraigne et les membres du groupe Union centriste - UDF.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

A - Rédiger comme suit le IV de cet article :

IV. - La restitution prévue à l'article 1649-0 A du code général des impôts est prise en charge par l'État.

B - Pour compenser la perte de recette résultant du I ci-dessus, remplacer cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Les pertes de recettes pour l'État résultant de la prise en charge par l'État de la restitution prévue à l'article 1649-0A du code général des impôts sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du même code. .

L'amendement n° II-262 a déjà été défendu.

La parole est à M. Jean-François Voguet, pour présenter l'amendement n° II-170 rectifié.

M. Jean-François Voguet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi d'insister sur l'importance de cet amendement.

L'article 58 dispose qu'il y aura une prise en charge éventuelle des dépassements de seuil du « bouclier fiscal » par les collectivités locales. Une telle mesure revient à rendre ces dernières coresponsables des débordements fiscaux qui seraient à la base de la volonté de plafonnement.

Nous avons débattu, voilà deux ans, du projet de loi constitutionnelle relatif à l'organisation décentralisée de la République, qui a affirmé dans la loi fondamentale le principe de la libre administration des collectivités territoriales, ainsi que celui de la stabilité de leurs ressources fiscales.

Il est donc curieux que l'on nous présente aujourd'hui des mesures tendant à remettre en cause la liberté de gestion des collectivités territoriales, principe pourtant désormais consacré dans le texte constitutionnel, et le droit des assemblées délibérantes locales à fixer l'impôt.

Faire supporter aux collectivités territoriales le poids du « bouclier fiscal » revient à répartir, à la marge, la charge du déficit supplémentaire en découlant.

Il est sans doute plus facile d'être libéral avec l'argent des autres que de respecter des principes constitutionnels...

Cela dit, je souhaite poser une autre question.

Il est en effet probable que, dans les strates les moins élevées de revenus, quelques milliers de bénéficiaires du « bouclier fiscal » soient identifiés. Pour ces contribuables, c'est sans aucun doute le poids des impôts locaux - je pense notamment à la taxe d'habitation et aux taxes foncières - qui serait pris en compte pour l'application du bouclier fiscal.

En fait, le « bouclier fiscal », pesant sur les impôts locaux et acquitté par les collectivités territoriales n'est ni plus ni moins que la prise en charge du « gracieux » de ces impôts par les budgets locaux eux-mêmes. Une telle construction laisserait penser que c'est du fait de la taxe d'habitation et de la taxe foncière que l'on dépasserait le fameux seuil des 60 % et que l'essentiel du dépassement serait donc imputable aux collectivités locales.

Pour le contribuable concerné, en lui rendant le montant de ses impôts locaux et celui d'une partie de son ISF, on procéderait donc à une affaire à double détente : baisse de l'ISF sans toucher au barème, d'une part, et baisse du coût des exonérations et allégements de taxes locales par imputation sur les recettes fiscales des collectivités locales, d'autre part.

En tout état de cause, nous sommes bien éloignés de la justice fiscale et plus près du « bricolage » destiné à faire supporter à d'autres les conséquences des choix fiscaux du Gouvernement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'espère que vous ne m'en voudrez pas de formuler des réponses brèves aux amendements reflétant une différence fondamentale d'approche politique.

Mme Hélène Luc. Nous sommes d'accord, à condition que vous souteniez nos amendements. (Sourires.)

M. Henri de Raincourt. Cela ne risque pas !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Je ne voudrais en effet pas trop développer les raisons de fond des désaccords lorsqu'il s'agit de pures questions d'analyse politique ou idéologique. Chaque doctrine est respectable, mais il est des terrains sur lesquels nous ne pouvons manifestement pas nous rejoindre.

M. Jean-François Voguet. Cela, c'est sûr !

Mme Hélène Luc. Notre amendement est effectivement très politique !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Vous le reconnaissez, n'est-ce pas ?

Mme Hélène Luc. Et nous l'assumons !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Par conséquent, la commission émet un avis très défavorable sur les amendements nos II-160, II-379 et II-167.

J'en viens aux amendements n° II-261 et II-380. Je souhaite m'arrêter un instant sur la place des impôts dans le numérateur du « bouclier fiscal ».

Les préoccupations exprimées sont certes parfaitement compréhensibles. Il est clair que le jeu du « bouclier fiscal », avec les impôts locaux, est inévitablement complexe. Mais il faut, à mon sens, retenir une autre approche. Nous devons nous placer du côté - et aux côtés - du contribuable ; c'est une garantie que nous lui apportons, ainsi qu'un nouveau principe du droit fiscal de portée générale.

Dès lors, l'alternative devant laquelle nous sommes placés est simple. Soit nous approuvons la réforme proposée, soit nous ne l'approuvons pas. Soit nous la considérons comme bonne, estimant opportune la nouvelle garantie de portée générale, soit nous n'y souscrivons pas.

Si nous y souscrivons, si nous pensons que la garantie est bonne et utile, il faut, mes chers collègues, intégrer au moins les impôts locaux afférents à la résidence principale. Il convient de souligner que, sur le plan social, l'intégration dans le plafonnement des impôts directs locaux a pour effet d'englober dans la mesure non des contribuables aisés, mais, au contraire, des redevables locaux moins favorisés.

Ainsi, grâce à l'inclusion des impôts locaux, 77 000 personnes pourraient entrer dans le dispositif, sur les 93 000 concernées par le « bouclier fiscal ».

Par conséquent, les impôts locaux représentent, si j'ose dire, les grosses cohortes de contribuables qui pourront se prévaloir du « bouclier fiscal ». C'est cela que j'appelle le « volet social ».

Il convient de souligner que nos collègues de l'Assemblée nationale ont réalisé, grâce à vous, monsieur le ministre, des avancées sérieuses, s'agissant de la prise en charge du droit de restitution par les collectivités territoriales.

Vous nous avez en effet assuré, monsieur le ministre, que l'État prendrait en charge l'intégralité de la restitution lorsque le montant des impositions au titre de l'impôt sur le revenu et de l'ISF excédera, à lui seul, le seuil de 60 % du revenu. Si l'on ajoutait la contribution sociale généralisée, la CSG, et la contribution au remboursement de la dette sociale, la CRDS - c'est le souhait de la commission -, ce seuil s'élèverait à 70 %.

Voilà qui permet de réduire la part des collectivités territoriales dans la prise en charge du nouveau « bouclier fiscal » de 43 millions d'euros à 20 millions d'euros. Telle est, du moins, la lecture que j'ai faite des engagements que vous avez pris devant l'Assemblée nationale, monsieur le ministre.

La prise en charge sera imputée chaque année sur le montant global de la dotation globale de fonctionnement, la DGF. Ainsi, la participation des collectivités territoriales fera l'objet d'une mutualisation. Cela évitera en particulier que des collectivités accueillant des contribuables plafonnés ne se trouvent pénalisées par la situation fiscale de ces personnes, alors que, par définition, les collectivités territoriales ne peuvent rien à la situation fiscale de leurs habitants.

Cela évitera par ailleurs que la charge liée à la restitution d'imposition payée par un contribuable plafonné ne soit répartie sur les autres habitants de la commune où ils résident, la charge étant d'autant plus lourde que le nombre d'habitants est réduit et le droit à restitution du redevable élevé.

On conçoit le cas aberrant qui pourrait se produire en l'absence de cette mutualisation. Imaginez un petit village de cinquante habitants avec un gros contribuable plafonné et des personnes de condition modeste - agriculteurs, artisans ou retraités -, qui devraient acquitter des impôts locaux prohibitifs du fait de la présence d'un château ou d'une grosse maison habitée par ce contribuable !

Pour éviter de tels effets pervers, le principe de mutualisation au niveau national s'impose. C'est assurément une bonne solution.

Compte tenu des modalités de fonctionnement du droit à restitution, la prise en charge par les collectivités territoriales de celui-ci aurait lieu sur la DGF de la troisième année suivant celle du paiement des impôts.

Dès lors que l'on considère que la prise en compte des impositions directes locales dans le « bouclier fiscal » est légitime, on peut comprendre que les collectivités territoriales prennent en charge une part du droit à restitution, même si, bien entendu, il faut également raisonner en fonction des intérêts budgétaires de l'État.

La solution adoptée par l'Assemblée nationale, grâce à vous, monsieur le ministre, me paraît de nature à lever l'essentiel des craintes qui se sont exprimées.

Mes chers collègues du groupe de l'UC-UDF, le débat sur ce point est important. J'espère que M. le ministre confirmera les avancées réalisées à l'Assemblée nationale et qu'il pourra vous apporter, autant que possible, les apaisements nécessaires, afin que cela vous conduise au retrait de votre amendement.

S'agissant de l'amendement n° II-404, le commentaire est identique, à la réserve près que l'objet de la sollicitude de notre collègue Henri de Raincourt était limité aux budgets départementaux.

La commission émet un avis très défavorable sur les amendements nos II-168 et II-169.

L'amendement n° II-381, qui vise à supprimer la prise en charge par les collectivités territoriales du droit à restitution, appelle des remarques identiques à celles que j'ai faites à propos de l'amendement présenté par M. Badré. En fonction du débat qui se déroulera et des réponses que M. le ministre nous apportera, je forme le souhait que, là aussi, il soit possible de retirer l'amendement.

Une telle demande s'adresse au groupe socialiste, au groupe CRC, bien que les voeux de retrait soient moins souvent exaucés de ce côté-là,...

M. Philippe Marini, rapporteur général. ... et aux membres du groupe de l'UC-UDF, qui ont formulé la même initiative.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jean-François Copé, ministre délégué. L'article 58 vient de donner lieu à un long débat. Vous avez, les uns et les autres, dans votre diversité, exprimé de nombreuses préoccupations, auxquelles je souhaite maintenant apporter des réponses. Celles-ci rejoindront largement les observations de M. le rapporteur général.

Le plafonnement des impôts est une grande innovation. C'est en effet la première fois en France, en tout cas depuis fort longtemps, que la totalité des impôts à la personne sont plafonnés par rapport aux revenus. Lorsque le montant cumulé de l'ISF, de l'impôt sur le revenu et des impôts locaux - je reviendrai dans un instant sur la CSG - dépasseront 60 % des revenus d'un contribuable, le trop-perçu lui sera alors rétrocédé.

Cette mesure est un bon concentré de la philosophie qui sous-tend notre réforme fiscale. Celle-ci est juste et préserve l'attractivité de notre territoire.

En effet, sur les 93 000 personnes qui bénéficieront de ce plafonnement, près de 90 % sont dans le premier décile de revenu. Cela s'explique par le fait que les impôts locaux ont été intégrés au bouclier fiscal. C'est un point très important, auquel je tiens beaucoup. Cela signifie qu'il s'agit d'une mesure de justice.

Ce dispositif concernera les artisans ayant connu une année difficile, les agriculteurs ayant subi une mauvaise récolte, des créateurs d'entreprise, bref, un certain nombre de nos compatriotes qui sont, aujourd'hui, dans une situation modeste. Je tiens d'ailleurs les simulations à votre disposition, mesdames, messieurs les sénateurs.

Je regrette néanmoins que cette réforme ait suscité ici ou là des polémiques. J'ai lu par exemple que cette réforme était destinée aux riches. Or je considère qu'il n'y a pas, d'un côté, les méchants riches et, de l'autre, les gentils pauvres. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Il y a simplement des Français qui ont, tous, une valeur, chacun pour ce qu'il est.

Notre rôle est de veiller à ce que chacun soit reconnu : les personnes modestes doivent pouvoir bénéficier de la solidarité et les gens aisés doivent être encouragés. Nombre d'entre eux, en effet, sont des gens qui s'engagent, qui prennent des risques, qui entreprennent et sont de très bons contribuables. Or, à force d'être fustigés, certains ont quitté notre territoire et ne paient plus d'impôts en France, à la plus grande satisfaction, sans doute, des idéologues. Je rappellerai tout de même que le fait que ces personnes aient été obligées de s'expatrier au motif que l'impôt est confiscatoire en France est un échec pour notre nation.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Cela fait plaisir au groupe CRC !

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Oui, cela fait plaisir aux communistes, peut-être même à certains socialistes.

Mme Marie-France Beaufils. N'importe quoi !

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Notre système, me semble-t-il, sort du sens commun. La France est un grand pays qui a besoin de tous ses enfants.

J'ajoute que nous ne sommes pas les premiers en Europe à avoir choisi d'instaurer un plafonnement. C'est également le cas en Suède, en Espagne et en Allemagne, dont les systèmes de plafonnement sont d'ailleurs assez proches de celui que nous avons retenu.

Notre objectif est naturellement de corriger les situations de surtaxation, sans toutefois remettre en cause - c'est évidemment un point fondamental - la progressivité de l'impôt. À cet égard, je rappelle que notre réforme fiscale - nous en reparlerons lorsque nous évoquerons le barème - accroît la progressivité de l'impôt. En effet, en 2007, les 2 % de foyers dont les revenus sont les plus élevés contribueront à hauteur de 42,1 % au produit global de l'impôt, contre 40,6 % aujourd'hui. Cet élément est, me semble-t-il, important.

Par ailleurs, j'ai souhaité connaître l'opinion des Français sur cette réforme. J'ai donc fait réaliser un sondage. On nous met toujours les sondages sous le nez lorsqu'ils sont mauvais, alors pourquoi ne pas en faire état quand ils sont bons ? C'est un élément d'information parmi d'autres !

Selon ce sondage, qui a été réalisé par l'institut CSA, 71 % des Français interrogés sont favorables au plafonnement. J'ai d'ailleurs demandé qu'il vous soit transmis, ce qui, je pense, a été fait. Il serait utile que chacun l'ait en tête, y compris, d'ailleurs, les socialistes. En effet, 65 % des sympathisants du parti socialiste approuvent ce dispositif...

M. Henri de Raincourt. Ce sont les bobos !

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Il y a des bobos, c'est vrai, mais peut-être pas 65 %. Il ne faut tout de même pas exagérer !

Mme Nicole Bricq. Quand il s'agit de baisse d'impôt, tout le monde répond « oui ». Vous devriez donc obtenir près de 100 % de réponses favorables !

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Les Français ne sont pas fous, vous savez ! Ils ont bien compris qu'ils n'étaient pas tous concernés par cette réforme. Si 71 % d'entre eux y sont favorables, c'est qu'ils pensent qu'ils pourraient être concernés un jour et que cette réforme en vaut peut-être la peine.

Il y a donc, d'un côté, des approches idéologiques, de l'autre, la réalité du terrain. Les gens font leurs comptes et se disent qu'il n'y a pas de raison d'être surfiscalisés en permanence.

Vous l'avez compris, mesdames, messieurs les sénateurs, ce plafonnement est un élément majeur de modernisation de notre système fiscal. Nous y sommes très attachés.

J'en arrive maintenant aux amendements qui viennent de nous être présentés. Pour aller plus vite, je les répartirai en six catégories et donnerai mon avis sur chacune d'entre elles.

La première catégorie comprend les amendements tendant à supprimer l'article 58. Il s'agit des amendements nos II-160 et II-379. Monsieur Marini, vous avez dit y être très défavorable, j'y suis, pour ma part, très, très défavorable. Si nous nous donnons autant de mal à mettre en oeuvre une réforme, ce n'est pas pour que vous la supprimiez ! J'espère donc que ceux pour qui ce plafonnement est une bonne idée repousseront avec force ces amendements.

La deuxième catégorie comprend l'amendement n° II-287 rectifié de M. le rapporteur général, qui vise à ce que la CSG soit prise en compte dans le plafonnement. Il est très intéressant.

Nous avons eu un long débat sur la question de savoir si la CSG devait ou non être incluse dans le bouclier fiscal. Ce débat n'est d'ailleurs pas clos. Il mériterait sans doute d'être prolongé dans l'avenir. Plusieurs problèmes se posent en effet.

La CSG et la CRDS ne peuvent pas être prises en compte dans le calcul du plafonnement, car ce sont des cotisations, non des impôts, même si cela s'est déjà fait en d'autres temps. Je rappelle en effet, comme M. Charasse, dont la mémoire est très précise, que ce sont les socialistes qui sont les inventeurs du plafonnement, dans lequel ils avaient inclus la CSG.

Nous avons choisi de ne pas inclure ces cotisations cette fois-ci, et ce pour deux raisons.

Tout d'abord, nous avons lancé une importante réforme de notre système de protection sociale. Intégrer la CSG dans le plafonnement pourrait être mal interprété par tous ceux qui concourent aujourd'hui à cette réforme. Je ne tiens pas à brouiller les choses. Il serait préférable, me semble-t-il, de finaliser la réforme en cours avant de débattre de nouveau de cette question.

Ensuite, peut-on situer au même niveau une cotisation forfaitaire, proportionnelle et des impôts progressifs ? Il s'agit là d'une vraie question, intéressante. Intégrer la CSG dans le calcul du plafonnement nous conduirait à réfléchir à une autre question à laquelle vous êtes très attaché, monsieur le président de la commission des finances : doit-on fusionner l'impôt sur le revenu et la CSG ?

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Si passionnante cette question soit-elle, elle ne peut pas, me semble-t-il, être tranchée en quelques instants. Une longue réflexion est nécessaire. Ce débat majeur ne peut avoir lieu au détour d'une réforme sur le plafonnement.

Monsieur le rapporteur général, pour toutes ces raisons, je ne suis pas favorable à votre amendement. J'apprécierais donc que vous acceptiez de le retirer.

La troisième catégorie d'amendements porte sur l'exclusion des impôts locaux du bouclier fiscal. Il s'agit des amendements nos II-261, II-380 et II-404.

Sur ces amendements également, j'émets un avis défavorable. En effet, exclure les impôts locaux serait remettre en cause l'objectif de justice auquel je suis très attaché.

C'est volontairement, en effet, que nous avons élargi l'assiette du calcul du plafonnement afin que 90 % des personnes faisant partie du premier décile de l'impôt sur le revenu puissent bénéficier de cette mesure. Les exclure du bénéfice de ce dispositif serait contraire à l'esprit de la réforme.

Par ailleurs, nous sommes attachés au partage de la responsabilité s'agissant du poids de l'impôt. Nous avons longuement évoqué cette question hier concernant la taxe professionnelle. Le plafonnement des impôts à la personne entre également dans ce cadre.

La quatrième catégorie d'amendements porte sur le problème de la refacturation. Elle comprend les amendements nos II-381, II-170 rectifié et II-262. Il est vrai que, sur cette question, une modification majeure a été apportée par l'Assemblée nationale. Vous avez eu l'amabilité de saluer le travail gouvernemental sur ce sujet. Or, pour être tout à fait honnête, c'est surtout l'amendement de M. Hervé Mariton, votre collègue député, qu'il convient de saluer. En effet, celui-ci satisfait, me semble-t-il, ceux d'entre vous qui ont déposé des amendements concernant la refacturation.

Le dispositif de M. Mariton prévoit en effet que, lorsque l'imposition d'un contribuable dépassera le seuil de 60 % de ses revenus du seul fait des impôts d'État, c'est ce dernier qui prendra en charge le remboursement du trop-perçu. Il prévoit par ailleurs une mutualisation de l'effort des collectivités locales dans le cadre de la DGF lorsque le dépassement de ce seuil sera imputable à ces dernières.

Cette réponse, mesdames, messieurs les sénateurs, devrait largement apaiser les inquiétudes que vous avez exprimées.

La cinquième catégorie comprend des amendements qui dénaturent le dispositif ; j'y suis donc défavorable. Il s'agit des amendements nos II-167 et II-169, présentés par le groupe CRC.

Enfin, la sixième catégorie comprend quatre amendements susceptibles d'améliorer très significativement le dispositif. J'y suis donc favorable. Il s'agit des amendements nos II-289, II-290, II-288 et le II-292, que vous avez présentés, monsieur le rapporteur général.

En revanche, j'émets un avis défavorable, et vous voudrez bien m'en excuser, sur l'amendement n° II-291 portant sur l'assurance-vie. Celui-ci présente en effet une difficulté.

Même si je comprends dans quel esprit vous l'avez déposé, monsieur le rapporteur général, il ne me paraît pas cohérent avec ce que nous souhaitons faire. Il risquerait en effet de favoriser des optimisations et des évasions fiscales en incitant certains détenteurs de placements d'assurance-vie à obtenir des facilités de caisse de la part des établissements financiers, celles-ci étant couvertes par les produits de ces contrats. Même si le revenu n'est pas juridiquement disponible, il peut être considéré comme tel en pratique. Une telle optimisation serait donc contraire à l'esprit du plafonnement.

Pour ces raisons, j'apprécierais, monsieur le rapporteur général, que vous retiriez votre amendement, car nous avons, vous et moi, me semble-t-il, les mêmes objectifs.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° II-291 est retiré.

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Merci, monsieur le rapporteur général.

M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.

Mme Marie-France Beaufils. J'ai attentivement écouté les remarques qui nous ont été faites sur l'article 58 et sur nos amendements.

Plus de la moitié des 400 millions d'euros que coûtera le bouclier fiscal bénéficieront à 13 000 contribuables assujettis à l'ISF. Les 6 000 Français les plus riches bénéficieront ainsi d'une nouvelle baisse d'impôt et d'une restitution moyenne de 58 000 euros, soit l'équivalent de cinq années de travail pour un salarié au SMIC !

Cette réforme est une erreur économique. Les fortunes se portent bien dans notre pays, comme l'ont d'ailleurs démontré certaines déclarations récentes. Par ailleurs, contrairement à ce qui a été dit tout à l'heure, rien ne permet d'affirmer que ceux qui quittent la France - ils sont peu nombreux - le font en raison de l'ISF.

Les exemples que vous évoquez, monsieur le ministre, sont souvent des cas très particuliers.

Vous évoquez ainsi les agriculteurs et les artisans qui connaissent une année difficile. Dans de tels cas, vous le savez, des recours existent. Vos services examinent régulièrement ces situations et trouvent des solutions. Il faut peut-être améliorer le traitement de ces cas particuliers, mais une mesure générale ne s'impose certainement pas.

Par ailleurs, vous prétendez résoudre les difficultés des contribuables modestes acquittant la taxe foncière. Vous proposez une restitution de 40 millions d'euros. Or, en 2004, 82 138 personnes ont bénéficié de remises gracieuses au titre de la taxe foncière, soit une moyenne de 486 euros par personne, contre 58 000 euros pour les 6 000 contribuables les plus riches !

Surtout, sur ces plus de 80 000 contribuables en difficulté à cause de la taxe foncière, combien sont concernés par le bouclier fiscal ? Vous n'en dites rien ! C'est pourquoi, en ce qui concerne la taxe foncière, il faut prévoir un système d'abattements en fonction du revenu, à l'instar de celui qui est en place pour la taxe d'habitation.

Dans l'attaque que vous menez contre la fiscalité locale, vous voulez, me semble-t-il, ouvrir une nouvelle brèche en renforçant encore le contrôle de l'État.

Le faible montant de la ponction sur la DGF n'est pas le véritable débat.

Monsieur le rapporteur général, vous nous avez expliqué tout à l'heure que cette mesure visait à éviter que, dans un petit village, l'abattement dont aurait bénéficié un contribuable ne pèse sur les foyers modestes. Ce n'est pas le fond du débat. C'est le principe même de la ponction sur la DGF qui pose problème puisque, une fois de plus, une ponction fiscale nationale réduit les capacités des collectivités territoriales. D'ailleurs, nos collègues ont tout à l'heure déposé un amendement visant à empêcher toute incidence en ce sens.

Avec cette mesure, qui s'ajoute à la réforme de la taxe professionnelle, vous envoyez aux élus locaux un message qu'ils n'ont pas envie d'entendre : c'est vous qui contrôlez leurs capacités budgétaires. Or ce n'est pas ce que la loi prévoit dans le domaine des collectivités territoriales.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.

Mme Nicole Bricq. Après le débat très intéressant que nous avons eu, la semaine dernière, sur la dette et, partant, sur le déficit de nos finances publiques, nous nous demandons si les 400 millions d'euros de réduction d'impôts que vous accordez au titre du bouclier fiscal seront bénéfiques.

Deux arguments ont été invoqués par le ministre et la majorité pour justifier ce bouclier fiscal.

Le premier tient à la justice fiscale. Ainsi que l'ont démontré mes collègues du groupe CRC et du groupe socialiste, cette disposition est aux antipodes de la justice fiscale, je n'y reviens pas.

Je souhaite, en revanche, m'attarder sur le second argument, qui a trait à l'attractivité et à la compétitivité de notre pays.

À cet égard, Mme Clara Gaymard, présidente de l'Agence pour les investissements internationaux, s'est, voilà peu, félicitée de la bonne attractivité de notre territoire par rapport aux investissements étrangers.

Ce bouclier fiscal a-t-il donc pour objet, comme cela a été dit dans la dernière partie du débat, de retenir ceux qui cherchent des défiscalisations à l'étranger ou de faire revenir ceux qui sont partis pour des raisons de surcharge fiscale ?

Monsieur le ministre, je vous donne rendez-vous l'année prochaine. Vous pourrez nous faire part des effets du bouclier fiscal sur ceux qui ne seraient pas partis et sur ceux qui seraient revenus. Comme je l'ai déjà dit la semaine dernière, je n'ai encore jamais entendu un « défiscalisé » dire que ce bouclier fiscal le ferait revenir sur notre territoire. J'insiste donc pour que vous nous présentiez, l'année prochaine, le bilan de la mesure du bouclier fiscal par rapport aux objectifs que vous visez.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Sachant combien ce sujet vous tient à coeur, madame Bricq, je vais vous répondre immédiatement.

Parmi les objectifs visés par cette réforme, figurent en effet la justice fiscale - nous aurons l'occasion d'en parler tout à l'heure à propos de l'impôt sur le revenu - et le renforcement de l'attractivité.

À cet égard, l'ensemble des propositions que nous faisons ont pour objet de mettre notre fiscalité au niveau des standards internationaux. Il est grand temps de regarder ce qui se passe ailleurs et de se rendre compte que, si nous voulons que notre pays soit compétitif, nous devons mettre en place un système fiscal qui le soit également.

Par ailleurs, vous me mettez au défi, avec ce bouclier, de faire revenir ceux qui sont partis. Je vais tout vous dire.

Mme Nicole Bricq. Vous nous présenterez un bilan !

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Bien entendu.

La réforme que nous proposons à propos de l'ISF vise à dissuader un certain nombre de familles de se délocaliser lorsqu'elles vendent leurs entreprises, ce qu'elles font uniquement parce que, tout d'un coup, elles sont surfiscalisées. Nous ferons le bilan de cette réforme l'année prochaine, mais ce sera un peu tôt pour tout appréhender.

L'année prochaine, nous pourrons déjà, je l'espère, procéder à une estimation des personnes qui, ayant eu des raisons de partir, ne l'auraient pas fait, tout en demeurant dans l'expectative. Quant à ceux qui ne seraient pas revenus à la fin de l'année prochaine, savez-vous pourquoi ils pourraient encore hésiter ? Parce qu'ils veulent s'assurer que la gauche ne reviendra pas en 2007 ! (Rires et exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est vrai !

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Quand on lit le programme prévisionnel des réjouissances, dans l'hypothèse où le parti socialiste reviendrait au pouvoir - et ce n'est pas encore le programme commun avec le parti communiste,...

Mme Nicole Bricq. Les chars russes sur la place de la Concorde !

M. Jean-François Copé, ministre délégué. ...là, ce sera encore plus chaud, pour ne pas dire « chaud bouillant » ! -,...

Mme Nicole Bricq. Ringard !

M. Jean-François Copé, ministre délégué. ... avec la renationalisation d'EDF, l'abolition complète de toutes les réformes fiscales que nous aurons proposées, dans une ambiance de nuit du 4 Août, on peut effectivement comprendre qu'un certain nombre de ceux qui sont aujourd'hui à l'étranger attendent de savoir ce qui va se passer avant de prendre une décision. C'est une raison supplémentaire pour nous d'être très motivés et de convaincre les Français que le programme ambitieux de réformes que nous avons engagé pourra être poursuivi au-delà de 2007. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à M. Denis Badré, pour explication de vote.

M. Denis Badré. Je précise - mais personne ici n'en doutait - que le groupe UC-UDF votera résolument contre l'amendement de suppression n° II-160.

Nous avons, voilà quelques jours, souligné les effets pervers de l'ISF. Au-delà du syndrome de l'Île de Ré ou de celui du moniteur de ski de Chamonix déjà évoqués - bien d'autres exemples pourraient être cités - nous sommes tout à fait opposés à la suppression de l'article 58 pour des raisons de compétitivité.

Dans le cadre de la mission sénatoriale sur l'expatriation des capitaux, des compétences et des entreprises françaises, que j'ai eu l'honneur de présider et à laquelle participaient des membres de tous les groupes, nous avons rencontré un certain nombre de Français qui se demandaient s'ils allaient ou non quitter la France et d'autres qui, à l'étranger, se demandaient s'ils pouvaient ou non revenir.

Dans un cas comme dans l'autre, nous avons constaté que les Français ne partaient jamais de gaieté de coeur.

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Évidemment !

M. Denis Badré. Ils ne partent que s'il n'y a vraiment pas d'autre solution et il suffit de leur adresser un petit message pour qu'ils restent.

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Très bien !

M. Denis Badré. Je citerai un autre exemple, dont on parle trop peu, concernant les personnes qui ont fait carrière à l'étranger. Nous avons ainsi rencontré aux États-unis des chefs d'entreprise qui ont parfaitement réussi et qui, parvenus à l'âge de la retraite, décident de rester aux États-unis, alors qu'il suffirait d'un rien pour qu'ils rentrent en France et qu'ils y investissent leurs capitaux. C'est bien dommage pour notre pays ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Cette réforme, nécessaire et réaliste, doit être conduite.

Pendant très longtemps, nous avons vécu dans un monde relativement étanche. Je me souviens qu'entre 1981 et 1982 le taux marginal d'imposition avait été élevé à 75 %. Cela procédait d'une vision dogmatique, due au fait que l'on croyait la France à l'abri de tous les autres pays. Or, aujourd'hui, la concurrence fiscale est une évidence. L'optimisation fiscale est devenue un marché qu'exploitent très bien les grands cabinets internationaux d'avocats conseils en fiscalité. Nous devons avoir cette réalité présente à l'esprit.

Manifestement, la France n'attire pas ceux qui perçoivent des revenus élevés et qui détiennent des capitaux importants. En revanche, elle attire largement des hommes, des femmes, des familles touchés par la misère et qui viennent chercher en France une solidarité assez généreuse. Nous ne pouvons pas continuer ainsi.

Cette réforme est une nécessité. En fixant le bouclier à 60 %, nous ne traduisons qu'imparfaitement la réalité. C'est pourquoi l'amendement déposé par Philippe Marini, au nom de la commission des finances, prévoit que le bouclier sera à 70 %.

J'ai bien entendu vos réserves sur l'introduction de la CSG, monsieur le ministre. Vous nous dites qu'il s'agit d'une cotisation sociale. C'est une convention de langage visant à apaiser les craintes des partenaires sociaux. J'ai la conviction qu'aujourd'hui l'impôt sur le revenu est à la fois une contribution proportionnelle, qui s'applique à l'ensemble des revenus, et une contribution progressive. Ceux qui forment le projet de mettre en place un impôt sur le revenu avec une partie proportionnelle et une partie progressive, à mon avis, visent juste.

Bien sûr, les gestionnaires de la protection sociale s'en inquiètent un peu, au motif que les salaires ne sont plus l'assiette fondamentale. Mais que faisons-nous, d'année en année, sinon transférer des impôts vers le financement de la protection sociale ? Qui peut dire que nous ne sommes pas dans une démarche de fiscalisation croissante des recettes sociales ?

M. Michel Charasse. C'est juste !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Débarrassons-nous de cette illusion. La CSG est manifestement un impôt.

MM. Jean-Jacques Jégou et Michel Charasse. Oui !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C'est la raison pour laquelle il faut considérer que le bouclier fiscal n'est pas à 60 % mais bien à 70 %. Je le dis à ceux de nos collègues qui considèrent que 60 %, ce n'est pas assez.

Monsieur le ministre, le temps est venu de s'interroger sur le financement de la protection sociale, de la santé et de la politique familiale. Nous vous ferons des propositions visant à aller plus loin dans la fiscalisation. Je pense que vous n'en êtes encore qu'au stade de la réflexion et que votre conviction n'est pas encore arrêtée. Vous pouvez compter sur la commission des finances pour vous y aider. À maintenir des cotisations sur les salaires, on organise, en quelque sorte, la délocalisation d'un nombre croissant d'activités et d'emplois.

M. le président. La parole est à M. Gérard Miquel, pour explication de vote.

M. Gérard Miquel. Nous sommes là sur un sujet éminemment important.

Le plafonnement de la taxe professionnelle immarcescible et le bouclier fiscal vont immanquablement amener les départements et les régions à augmenter les seuls impôts sur lesquels ils pourront encore agir, la taxe d'habitation et la taxe foncière. Compte tenu des charges qui leur sont transférées, les collectivités n'auront que cette solution. Elles compenseront la perte de recettes induite par ce plafonnement et ce bouclier par un transfert sur la taxe d'habitation et la taxe foncière sur les propriétés bâties, qui sont très inégalement réparties sur nos territoires.

Dans mon département, mes concitoyens ne déménagent pas pour s'installer à l'étranger. Ils ne sont pas assez riches. Quand bien même le seraient-ils, ils sont bien en France. Mais ils quittent les villes du département où les bases de taxe foncière et de taxe d'habitation sont très élevées. Il nous est donc impossible d'augmenter ces impôts parce qu'ils sont très inégalement répartis.

Monsieur le ministre, vous nous avez parlé de justice fiscale. Sachez qu'au niveau de la fiscalité locale, nous sommes face à une injustice totalement insupportable.

La réforme que vous nous proposez aurait peut-être été possible si nous avions, au préalable, réformé les bases de la fiscalité locale.

M. Michel Charasse. Personne ne veut en entendre parler !

M. Gérard Miquel. Mais, aujourd'hui, compte tenu de la façon dont elle intervient, la meilleure solution, si nous ne voulons pas accentuer les disparités qui sont devenues insupportables pour un grand nombre de nos concitoyens, est de soustraire l'impôt local du bouclier fiscal.

Mme Nicole Bricq. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Monsieur Miquel, vos propos sont, certes, intéressants, mais en décalage par rapport à la réalité du droit, car les dispositions qui ont été votées à l'Assemblée nationale avec l'amendement Mariton répondent à toutes vos préoccupations. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)

Je ne compte pas vous convaincre, je ne l'espère plus à cette heure (sourires), mais je me permets d'ajouter un argument très important que j'avais évoqué à l'Assemblée nationale.

Si je n'ai pas opté pour l'intégration de la CSG, c'est que son taux est différent selon qu'elle s'applique aux revenus financiers ou aux revenus des salariés, le taux applicable aux revenus des salariés étant de 8 %, alors qu'il est de 11 % pour les revenus financiers. Si nous avions fixé un plafonnement à 70 %, certaines personnes n'en auraient pas bénéficié.

Au surplus, à titre presque anecdotique, j'ajoute que cette réforme a également pour objet d'envoyer des signes aux investisseurs étrangers, et mon sentiment était que 70 %, c'était mieux, même si c'est moins transparent que 60 %, je le reconnais.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Le premier argument était meilleur !

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Voyez comme je suis sincère, je vous dis tout !

Enfin, monsieur le président, je lève le gage sur les amendements nos II-289, II-290, II-288 et II-292.

M. le président. Il s'agit donc des amendements nos II-289 rectifié, II-290 rectifié, II-288 rectifié et II-292 rectifié.

Je mets aux voix les amendements identiques nos II-160 et II-379.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 52 :

Nombre de votants 329
Nombre de suffrages exprimés 329
Majorité absolue des suffrages exprimés 165
Pour l'adoption 120
Contre 209

Le Sénat n'a pas adopté.

L'amendement n° II-287 rectifié est-il maintenu, monsieur le rapporteur général ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. Permettez-moi quelques brèves considérations sur cet amendement avant de prendre une décision à son sujet.

Concernant le financement de la protection sociale et la nature de cotisation de la CSG, vous nous avez proposé, monsieur le ministre délégué, des arguments juridiquement corrects, et même incontestables, mais je veux élever le débat au niveau qui doit être le sien, c'est-à-dire politique, au sens le plus noble du terme.

Il nous faut trouver une expression qui soit la plus simple et la plus convaincante possible.

Je persiste donc à penser qu'à l'avenir il faudra se situer du point de vue du contribuable, du point de vue du payeur, et lui délivrer un message simple, clair, parfaitement assimilable : tous les prélèvements sur les revenus doivent se situer à l'intérieur du bouclier fiscal.

Ensuite, monsieur le ministre délégué, vous nous rappelez très justement que le taux de la CSG est différencié. Nous avons en effet commis une erreur, et nous aurions dû proposer un taux de 68 %.

Si je rectifie mon amendement et si je passe d'un taux de 70 % à un taux de 68 %, cela vous convient-il ? C'est peut-être prématuré tout de même.

M. Jean-François Copé, ministre délégué. C'est effectivement prématuré.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous aurions dû, en toute rigueur, prévoir un taux de 68 % plutôt que de 70 %, je le reconnais, je bats ma coulpe.

Et peu importe l'affichage, c'est la réalité qui compte : nos interlocuteurs sont assez lucides pour comprendre qu'il s'agit de 70 %, ou 68 %, et non pas de 60 %. Voilà ce qu'ils retiendront !

Reste que la question primordiale dans ce débat est bien celle du devenir du financement de la protection sociale.

Comme vous le savez, les membres de la commission des finances estiment que le financement de la protection sociale va devoir évoluer très substantiellement dans sa structure.

C'est le sens de nos propositions en ce qui concerne la TVA sociale, c'est le sens de l'interprétation que nous donnons à la double nature de l'impôt sur le revenu, entre la part proportionnelle et la part progressive.

En d'autres termes, nous pensons que la sécurité sociale partenariale peut très bien demeurer en l'état avec un financement fiscalisé.

Avant de retirer cet amendement, je voudrais rappeler que, depuis longtemps déjà, le taux marginal de l'impôt sur le revenu n'a cessé de décroître, et c'est tant mieux.

Je vous rappelle les baisses successives du barème : en 2001, 5 %, en 2002,1 %, en 2003, 3 %. Pour le taux marginal, l'évolution à la baisse est la suivante : 54 % en 1999, 53,25 % en 2000, 52,75 % en 2001, 49,58 % en 2002, 48,09 % en 2003.

Chacun a fait sa part du chemin, y compris Dominique Strauss-Kahn, Laurent Fabius, il faut bien que vous le reconnaissiez aujourd'hui, chers collègues socialistes, ...

M. Michel Charasse. Nous n'étions donc pas si mauvais que cela !

M. Philippe Marini, rapporteur général. ...même si vous êtes en pleine préparation des programmes.

La réalité, c'est ce qui a été fait, ce sont les responsabilités que l'on a assumées : le taux marginal de l'impôt sur le revenu a baissé sur toute cette période.

À l'inverse, qu'est-il arrivé à la CSG ?

Cette contribution a été créée par Michel Rocard en 1990 au taux de 1,3 %.

En 1993, Édouard Balladur porte le taux à 2,4 %.

M. Michel Charasse. Après avoir voté contre !

M. Philippe Marini, rapporteur général. En 1996, Alain Juppé le fait passer à 3,4 % avec un supplément déductible. En 1997, Lionel Jospin fait passer le taux de la CSG à 7,5 %.

Qui peut dire, mes chers collègues, que les besoins de la protection sociale ne nécessiteront pas de nouvelles augmentations dans les années à venir ? Qui est prêt à soutenir qu'il ne faudra pas prélever des ressources supplémentaires pour les régimes sociaux ?

M. Alain Lambert. Cela me paraît inscrit dans les astres !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Qui est prêt à mettre sa main au feu ?

Si nous nous situons du côté du contribuable, du payeur, celui sur qui l'on prélève le total - et toujours sur un même revenu -, il est nécessaire d'envisager que les prélèvements progressent d'un côté mais diminuent de l'autre, la pression totale devant diminuer autant que possible.

C'est pour cette raison fondamentale que le bouclier fiscal aura vocation, sinon aujourd'hui, du moins à court terme, à englober la totalité de ces prélèvements.

Monsieur le ministre délégué, si le temps n'est pas encore venu, il nous faut retirer cet amendement. Cependant, les tendances de fond de l'évolution dans laquelle nous nous inscrivons nous conduiront à faire demain ce que nous ne pouvons faire aujourd'hui. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. L'amendement n° II-287 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° II-167.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° II-261 est-il maintenu, monsieur Badré ?

M. Charles Pasqua. Retirez-le, monsieur Badré !

M. Denis Badré. Je le dis régulièrement depuis des années, il ne faut pas avoir le plafonnement de l'ISF honteux ! Il me semble qu'une telle disposition aurait le mérite de la clarté et de la franchise à l'égard de ceux que nous souhaitons garder sur notre territoire, comme de ceux que nous souhaitons faire revenir. Ce n'est pas ce qui a été retenu, mais l'ISF a été inclus avec l'impôt sur le revenu dans le bouclier fiscal. C'est moins porteur de signification, mais je l'accepte.

Il aurait été judicieux d'y faire figurer également la CSG, et, de ce point de vue, l'amendement de la commission me convenait, car il nous permettait une réelle percée sur un dossier où il nous faut vraiment avancer.

En revanche, les membres de mon groupe trouvent tout à fait fâcheux que les impôts locaux soient compris dans le bouclier fiscal, car cela remet en cause un principe. Ils m'ont donc demandé, presque à l'unanimité, de maintenir cet amendement, pour des raisons de principe, donc.

J'ai vu quel chemin vous avez parcouru à l'Assemblée nationale, ce qui montre qu'il y avait bien un chemin à parcourir ! Nous aurions voulu, j'y reviens, que vous alliez au bout de ce chemin, pour redonner à cette réforme toute sa portée, toute sa clarté.

Par conséquent, nous maintenons cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-François Copé, ministre délégué. J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt, monsieur Badré, votre vibrant plaidoyer pour un plafonnement spécifique de l'ISF.

Ne prenez surtout pas en mauvaise part ce que je vais vous dire, mais je voudrais appeler très courtoisement votre attention sur le fait que, à l'Assemblée nationale, j'ai essuyé un vote négatif du groupe Union pour la démocratie française, au motif que notre réforme fiscale lui semblait présenter, si j'ai bien compris, un caractère quelque peu antisocial.

M. Jean-François Copé, ministre délégué. J'ai subi sur ce point, de la part des députés de ce groupe, nombre de propos réprobateurs, pour ne pas dire sévères ou blessants, mais je ne les pas vraiment entendus demander des modifications majeures du dispositif concernant l'ISF !

Par conséquent, je ne comprends plus la logique de tout cela, monsieur Badré. Franchement, je cherche en vain, en gémissant, comme aurait dit Blaise Pascal, une cohérence entre les propos que tiennent ici les membres du groupe de l'Union centriste-UDF et ceux des députés de l'UDF.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Cela prouve que le Sénat n'est pas l'Assemblée nationale !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Cela prouve aussi que les sénateurs centristes sont plus sérieux que leurs homologues députés ! (Sourires.)

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Cela étant, cette situation n'est pas forcément pour me déplaire, monsieur Badré. Cela prouve que nous progressons, mais reconnaissez tout de même avec moi qu'il y a de quoi être perplexe !

M. le président. La parole est à M. Denis Badré.

M. Denis Badré. Acceptez, monsieur le ministre, que les députés et les sénateurs centristes puissent avoir des points de vue complémentaires !

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Bien sûr !

M. Gérard Longuet. Ratissez large !

M. Denis Badré. Laissez-moi vous rassurer : nous ne nous opposerons pas à l'adoption de l'article 58.

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Ah !

M. Denis Badré. Comme je le disais à l'instant, nous souhaitons simplement marquer le fait que, pour des questions de principe, nous sommes très attachés à l'autonomie des collectivités territoriales. Nous aurions donc souhaité, dans un souci de clarté, que vous alliez au bout de votre démarche, sans confondre deux problèmes qui sont bien distincts.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je vais quelque peu sortir de ma fonction de président de la commission des finances pour indiquer que je me réjouis que M. le ministre ait pu constater que le Sénat n'est pas l'Assemblée nationale.

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Cela en est la démonstration définitive ! (Rires.)

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Si le Sénat était le clone de l'Assemblée nationale, la démonstration de son inutilité institutionnelle serait vite faite !

M. Charles Pasqua. Absolument !

M. le président. La parole est à M. Yves Fréville, pour explication de vote.

M. Yves Fréville. Puisque les principes ont été invoqués, je voudrais répondre sur ce plan à ceux de mes collègues qui préconisent de ne pas intégrer les impôts locaux dans le calcul des impôts directs pris en compte au titre du « bouclier fiscal ».

Comme l'ont dit très clairement M. le ministre et M. le rapporteur général, nous posons un nouveau principe pour notre système fiscal, celui de son caractère non confiscatoire s'agissant des impôts sur la personne. Cela étant, les impôts locaux entrent-ils dans cette catégorie ?

Je ferai d'abord observer que la fiscalité forme un bloc. À cet égard, j'aurais très certainement voté, s'il avait été maintenu, l'amendement n° II-287 rectifié de la commission des finances, concernant notamment la prise en compte de la CSG au titre du dispositif du « bouclier fiscal ». Comme cela a été souligné, c'est le Parlement qui est compétent en matière de fiscalité, quelle que soit la forme de celle-ci, et qui autorise l'ensemble des impositions, quelle que soit leur nature. C'est donc lui qui doit vérifier que le système fiscal dans sa globalité est conforme, de façon cohérente, au principe du caractère non confiscatoire de la fiscalité. Telle est la première idée que je voulais énoncer.

Je voudrais maintenant formuler une seconde observation.

Les impôts locaux font-ils partie des impôts pesant sur la personne ? Sur ce point, je suis très étonné de l'attitude de nombre de mes collègues, en particulier des membres du groupe socialiste, qui nous expliquent que la taxe d'habitation doit être un impôt personnalisé, de même que la taxe foncière. En outre, ils ont essayé de créer une taxe départementale sur le revenu.

En tout état de cause, ils ont obtenu - que cela soit ou non une bonne chose est un autre problème - que le montant de la taxe d'habitation dépende du revenu, mais ils ne veulent pas, pour autant, que ces impôts personnalisés soient pris en considération au titre du « bouclier fiscal » !

Pour ma part, je suis partisan de l'instauration du « bouclier fiscal » et, puisque la fiscalité doit être cohérente, je souhaite que les impôts locaux, du moins ceux qui sont supportés par les personnes, c'est-à-dire la taxe foncière sur la résidence principale et la taxe d'habitation, relèvent de ce dispositif.

M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.

M. Michel Charasse. Si les amendements identiques du groupe de l'Union centriste-UDF et du groupe socialiste étaient adoptés, certains impôts ne seraient plus pris en compte dans le calcul des impôts directs payés par le contribuable. Il faudrait alors, en conséquence, légèrement modifier, en commission mixte paritaire, le seuil de 60 % à partir duquel le contribuable pourra demander restitution.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-261 et II-380.

Je suis saisi de deux demandes de scrutin public, émanant l'une du groupe socialiste, l'autre du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 53 :

Nombre de votants 329
Nombre de suffrages exprimés 324
Majorité absolue des suffrages exprimés 163
Pour l'adoption 155
Contre 169

Le Sénat n'a pas adopté.

Monsieur de Raincourt, l'amendement n° II-404 est-il maintenu ?

M. Henri de Raincourt. Lorsque j'ai présenté cet amendement, j'ai bien pris soin de dire que ses auteurs étaient favorables au principe de la réforme : pour des raisons tout à fait évidentes, il faut se placer au niveau du contribuable.

Cela étant, ce que nous avons voulu faire encore une fois, c'est attirer l'attention du Gouvernement sur le fait que, aujourd'hui, la fiscalité départementale n'est plus de même nature que la fiscalité communale ou la fiscalité régionale. Nous comptons beaucoup sur la conférence des finances publiques pour que ce problème inquiétant et très important soit envisagé dans sa globalité. Dans cette attente, comme je fais confiance au ministre délégué au budget, je retire mon amendement.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !

M. le président. L'amendement n° II-404 est retiré.

L'amendement n° II-168 n'a plus d'objet, l'amendement n° II-167 n'ayant pas été adopté.

Je mets aux voix l'amendement n° II-289 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-290 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-288 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-292 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-169.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-381.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Les amendements nos II-170 rectifié et II-262 n'ont plus d'objet.

Je mets aux voix l'article 58, modifié.

M. Jean-Pierre Masseret. Le groupe socialiste vote contre.

Mme Marie-France Beaufils. Le groupe CRC également.

(L'article 58 est adopté.)