Article additionnel après l'article 33
Dossier législatif : projet de loi relatif à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire
Article 36

Article 35

I. - L'article 3 de la loi n° 83-581 du 5 juillet 1983 sur la sauvegarde de la vie humaine en mer, l'habitabilité à bord des navires et la prévention de la pollution est complété par les deux alinéas suivants :

« - les inspecteurs de la sûreté nucléaire.

« En outre, les inspecteurs de la sûreté nucléaire ont libre accès à bord de tout navire pour exercer la surveillance du transport par voie maritime des matières radioactives au regard des règles de la sûreté nucléaire. »

II. - Il est ajouté, après le 5° de l'article 3 de la loi n° 75-1335 du 31 décembre 1975 relative à la constatation et à la répression des infractions en matière de transports publics et privés, un 6° ainsi rédigé :

« 6° Les inspecteurs de la sûreté nucléaire remplissant les conditions prévues à l'article 22 de la loi n° ... du ... relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire. »

III. - À l'article L. 150-13 du code de l'aviation civile, après les mots : « les ingénieurs des travaux publics de l'État (mines) », sont ajoutés les mots : «, les inspecteurs de la sûreté nucléaire. »  - (Adopté.)

Article 35
Dossier législatif : projet de loi relatif à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire
Article 37

Article 36

I. - Sont abrogées :

1° La loi n° 61-842 du 2 août 1961 relative à la lutte contre les pollutions atmosphériques et les odeurs et portant modification de la loi du 19 décembre 1917 ;

2° Dans le I de l'article 44 de la loi n° 96-1236 du 30 décembre 1996 sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie, les dispositions suivantes : « à l'exception de celles concernant les pollutions dues à des substances radioactives et les conditions de création, de fonctionnement et de surveillance des installations nucléaires de base, lesquelles ne sont pas soumises aux dispositions de la présente loi ».

II. - Les autorisations et prescriptions relatives à des installations nucléaires de base délivrées en application des textes réglementaires mentionnés au II du présent article valent autorisations et prescriptions au titre de la présente loi. Elles sont modifiées dans les conditions fixées par celle-ci et par les textes pris pour son application.

Les installations nucléaires de base fonctionnant au bénéfice des droits acquis en application de l'article 14 du décret n° 63-1228 du 11 décembre 1963 relatif aux installations nucléaires sont soumises aux dispositions de l'article 14 bis de la présente loi. La déclaration faite en application de ce décret vaut déclaration au titre de la présente loi.

M. le président. L'amendement n° 325, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Au II de l'article 36, remplacer les mots :

des textes réglementaires mentionnés au II du présent article

par les mots :

de la loi du 2 août 1961 précitée ou des textes réglementaires pris pour son application

La parole est à Mme la ministre.

Mme Nelly Olin, ministre. À la suite d'une erreur matérielle, il subsiste au II de l'article 36 une référence à un paragraphe II qui n'a pas de sens.

En fait, ce paragraphe vise à assurer la continuité entre l'ancien régime des INB, reposant sur la loi du 2 août 1961 et le décret du 11 décembre 1963, et le nouveau régime créé par cette loi.

Il précise que les mesures individuelles prises dans le cadre de l'ancien régime restent valables et relèvent désormais du nouveau régime.

L'amendement n° 325 tend à rectifier l'article 36 dans ce sens.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Henri Revol, rapporteur. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 325.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 36, modifié.

(L'article 36 est adopté.)

Article 36
Dossier législatif : projet de loi relatif à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire
Article 38

Article 37

Les dispositions des articles 2 bis, 2 ter, 2 quater, 31 et 32 ci-dessus entrent en application à la date de la première réunion du collège de la Haute autorité de sûreté nucléaire.  - (Adopté.)

Article 37
Dossier législatif : projet de loi relatif à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire
Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 38

Les fonctionnaires et agents affectés à la direction générale de la sûreté nucléaire et de la radioprotection ou dans les divisions de la sûreté nucléaire et de la radioprotection des directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement ou mis à leur disposition à la date mentionnée au premier alinéa de l'article 37 sont, à compter de cette date, affectés à la Haute autorité de sûreté nucléaire ou mis à sa disposition dans les mêmes conditions.

M. le président. L'amendement n° 254, présenté par MM. Piras,  Raoul,  Teston et les membres du groupe Socialiste, apparentés, est ainsi libellé :

Après le mot :

affectés

rédiger comme suit la fin de cet article :

avec leur accord, à l'Autorité de sûreté nucléaire ou mis à sa disposition dans les mêmes conditions. Pour les fonctionnaires ayant refusé leur affectation à l'Autorité de sûreté nucléaire, ces derniers pourront retourner dans leur administration d'origine à partir de la date mentionnée au premier alinéa de l'article 37.

Les agents contractuels actuellement  affectés à la direction générale de la sûreté nucléaire et de la radioprotection ou dans les divisions de la sûreté nucléaire et de la radioprotection des directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement doivent se voir proposer par le biais d'un concours spécifique l'accès aux corps de fonctionnaires correspondant aux missions qu'ils exercent.

La parole est à M. Daniel Raoul.

M. Daniel Raoul. Cet amendement s'inscrit dans la continuité de ce que nous avons dit concernant les agents mis à la disposition de l'Autorité de sûreté nucléaire.

Nous souhaitions que les agents de la Haute autorité de sûreté nucléaire soient membres de la fonction publique ou d'un établissement public. Nous demandons donc que les nouveaux agents contractuels aient la possibilité de bénéficier d'un concours spécifique pour l'accès au corps des fonctionnaires.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Henri Revol, rapporteur. Cet amendement suscite des interrogations à la fois sur un plan pratique et du point de vue des principes.

Sur le plan pratique, cet amendement pourrait aboutir à ne pas donner à la Haute autorité les moyens humains suffisants pour effectuer les contrôles de la sûreté nucléaire sur le terrain. Si l'on suivait cet amendement, le nombre d'inspecteurs de la sûreté pourrait effectivement diminuer sensiblement. C'est évidemment inenvisageable.

Du point de vue des principes, le projet de loi prévoit simplement que certains fonctionnaires et agents de l'actuelle Autorité de sûreté nucléaire soient affectés à la Haute autorité dans les conditions habituelles prévues par le statut de la fonction publique.

Je rappelle qu'il s'agirait pour eux du passage d'un service de l'État à un autre service de l'État, c'est-à-dire avec une totale continuité dans le déroulement de leur carrière. Il n'y a donc aucunement lieu de ne pas respecter les règles d'affectation prévues par le statut de la fonction publique.

C'est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Nelly Olin, ministre. M. le rapporteur a bien précisé les choses. Il est évident que nous voulons éviter à tout prix la précarisation de la situation des agents.

En conséquence, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 254.

M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.

M. Daniel Raoul. Je n'arrive pas très bien à comprendre certains raisonnements, qui sont très bizarres et qui contredisent d'ailleurs ceux qui ont été exposés hier soir.

On nous a dit que, pour bénéficier d'expertises, il fallait faire appel éventuellement à des agents contractuels. Et maintenant, on affirme qu'il faut uniquement recourir à des fonctionnaires ou des agents d'établissements publics.

Mme Nelly Olin, ministre, et M. Henri Revol, rapporteur. Non !

M. Daniel Raoul. Un peu de cohérence s'impose, parce que, je vous l'avoue, je ne comprends plus très bien vos explications.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 254.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 38.

(L'article 38 est adopté.)

Article 38
Dossier législatif : projet de loi relatif à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire
Explications de vote sur l'ensemble (fin)

Vote sur l'ensemble

M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Yves Coquelle, pour explication de vote.

M. Yves Coquelle. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaiterais tout d'abord saluer le travail pertinent effectué par la commission, laquelle a notablement amélioré le texte.

Le débat a également permis d'intégrer de nouvelles dispositions par l'adoption d'amendements des groupes minoritaires, y compris le groupe CRC. C'est un fait assez rare pour que nous le soulignions.

J'ajoute que nous aimerions que cet esprit constructif anime également les discussions d'autres projets de loi, ce qui n'est malheureusement pas toujours le cas.

Le projet de loi soumis à la Haute Assemblée comporte de véritables avancées en termes de transparence.

En effet, la création du Haut comité de transparence sur la sécurité nucléaire, ainsi que la reconnaissance légale des CLI ne peuvent que nous satisfaire.

Nous sommes, par ailleurs, particulièrement favorables à la création d'un régime spécifique pour les installations nucléaires de base.

Cependant, nous sommes toujours au regret de constater que ces points positifs du projet de loi s'accompagnent, parallèlement, de mesures qui sont de nature à compromettre la sécurité nucléaire.

En effet, la création de la Haute autorité de sûreté ne se justifie que dans le cadre de l'ouverture à la concurrence du nucléaire civil.

Comme M. le rapporteur de la commission des affaires économiques le reconnaissait lui-même ce matin en commission, la création de cette autorité administrative indépendante n'a de sens que dans le cadre d'un marché ouvert.

Vous l'avez compris, dans cette discussion, cette hypothèse ne nous convient pas.

En effet, nous estimons que les enjeux de la politique énergétique nécessitent une maîtrise publique. Les exemples européens et internationaux où la libéralisation a été la plus avancée nous incitent à la plus grande des prudences.

De plus, seule la maîtrise publique permet de garantir l'indépendance énergétique, la mise en oeuvre des investissements nécessaires, les efforts de recherche conséquents ainsi que la sécurité des approvisionnements, a fortiori lorsque l'État fait le choix, que nous partageons, du développement de l'énergie nucléaire.

Nous sommes en effet convaincus que, au regard des impératifs de réduction de l'émission des gaz à effet de serre et de l'explosion des besoins, l'énergie nucléaire est une réponse appropriée.

Cependant, les risques spécifiques liés à cette énergie doivent être pris en compte. Il s'agit notamment de la gestion des déchets - nous en parlerons dans quelques mois -, mais aussi de la sûreté des installations et des investissements pour le renouvellement du parc nucléaire parallèlement à la question du démantèlement des centrales.

Ces impératifs sollicitent une maîtrise publique des objectifs en matière nucléaire, mais aussi une maîtrise publique des exploitations nucléaires productrices d'électricité.

Nos amendements concernant la structure de l'entreprise EDF ne sont donc nullement des cavaliers ; ils ont trait directement à la question de la sécurité nucléaire.

En effet, l'entrée de capitaux privés dans les entreprises publiques change fondamentalement les règles de gestion de l'entreprise.

À la satisfaction des besoins collectifs se substitue la satisfaction d'intérêts privés. Le projet industriel de l'entreprise se résume alors à la rémunération du capital, à l'augmentation des marges des actionnaires et à la réduction des coûts. Celle-ci passe par la diminution des garanties sociales et des coûts de maintenance. Autrement dit, la rentabilité se fait au détriment de la sécurité.

Ainsi, nous continuons de penser que le statut d'EPIC de l'entreprise EDF garantissant la présence de capitaux publics est un des éléments de la sécurité nucléaire.

Dans un contexte national où la fusion de GDF et de Suez se dessine, où la rumeur de fusion entre EDF et Veolia se répand, nous ne pouvons accepter que le Gouvernement, par le biais de la haute autorité qu'il vient de créer, se dessaisisse du contrôle de la sûreté nucléaire et de la réglementation pratique des installations nucléaires de base.

Cette haute autorité est, dans ce sens, l'instrument d'un désengagement de l'État.

En effet, cette externalisation des missions confiée à la haute autorité correspond à une dilution de la responsabilité gouvernementale dans ce domaine si important qu'est la sécurité nucléaire.

Si ce texte est adopté, le Gouvernement ne sera plus considéré comme responsable, en son nom propre, de la sûreté nucléaire. Nous pensons alors que l'objectif ambitieux visé par ce projet de loi ne sera pas atteint.

Pour cette unique raison, et ce malgré les dispositions positives de ce texte, nous ne voterons pas ce projet de loi, qui prépare l'ouverture à la concurrence du nucléaire civil. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à Mme Dominique Voynet.

Mme Dominique Voynet. Comme vous l'aurez compris, je ne voterai pas non plus ce projet de loi relatif à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire.

J'ai eu l'occasion de m'exprimer longuement hier, un peu moins aujourd'hui, notamment contre la création de la Haute autorité de sûreté nucléaire.

Je voudrais citer ici quelques lignes de l'intervention de M. Prieur, un juriste qui a été auditionné à de nombreuses reprises par la commission nationale du débat public lors des débats sur l'EPR.

M. Prieur, analysant le projet de loi, affirme ceci :

« La Haute autorité de sûreté nucléaire apparaît comme un démembrement de l'administration donnant tous les moyens humains, financiers et techniques à un collège de cinq personnes désignées pour six ans et inamovibles. Elle dispose de plus d'énormes pouvoirs juridiques pour édicter des règlements et effectuer des contrôles. Elle se substitue en réalité aux services du ministère de l'industrie. Ne recevant aucune instruction d'un ministre, ni du Gouvernement, elle échappe donc à tout contrôle hiérarchique et aussi à tout contrôle politique, que ce soit du Parlement ou du Gouvernement.

« Ce type de structure n'a pas d'équivalent, car les autorités administratives indépendantes existantes n'ont pas un pouvoir aussi étendu consistant à la fois à disposer d'un pouvoir de police spéciale - c'est-à-dire du pouvoir d'édicter des règlements -, d'un pouvoir de contrôle et du pouvoir d'information. »

Le plus grave dans la réforme proposée est bien la perte totale de responsabilité réelle du politique sur un sujet qui le concerne directement : la sécurité des citoyens. C'était d'ailleurs l'argument central du Conseil d'État lors de son refus de la première tentative de 1999.

Le principal argument de principe invoqué dans l'exposé des motifs pour justifier cette réforme est la nécessité de l'indépendance vis-à-vis « des personnes en charge de la promotion, du développement ou de la mise en oeuvre des activités nucléaires ».

S'il s'agit de « personnes », on pourrait faire valoir que les personnes du corps des mines sont directement visées, puisqu'elles sont à la tête à la fois des entreprises du secteur nucléaire, de l'administration qui assure leur tutelle et de celles qui sont responsables de leur contrôle.

Plus sérieusement, l'exposé des motifs met en avant les objectifs contradictoires de la promotion industrielle du nucléaire et de son contrôle.

Il y a une façon simple de résoudre cette contradiction : c'est que la sûreté soit une administration qui dépende non pas du ministère de l'industrie, mais uniquement du ministère de l'écologie, comme la direction de la prévention des pollutions et des risques, la DPPR.

J'ai eu l'occasion d'expliquer que, au-delà de l'irresponsabilité politique, le fonctionnement du système serait à mon avis assez rapidement rendu impossible.

Pour un semblant de respect de l'autorité politique, il est précisé que la réglementation générale de sûreté restera de la compétence du Gouvernement, la Haute autorité n'étant que consultée. Il y aura également des arrêtés ministériels.

Mais qui élaborera ces textes : le Gouvernement va-t-il se doter d'une nouvelle administration chargée de la réglementation de la sûreté, après avoir transféré la quasi-totalité de ses moyens actuels à l'autorité ?

On imagine la lourdeur d'un tel dispositif, les conflits, la paralysie du système, ou bien la démission totale du Gouvernement qui se contenterait d'entériner les textes de l'autorité jusqu'au jour où il y aura un problème et où le Premier ministre se retrouvera en première ligne.

J'ai évoqué aussi les accidents. Selon l'exposé des motifs, « le 4° de l'article 2 bis définit les missions de la Haute autorité de sûreté nucléaire en cas de situation d'urgence radiologique ou d'accident sur une installation nucléaire ».

Soyons concrets : dans ce cas, la Haute autorité se défile et « repasse la balle » au Gouvernement et au Premier ministre. On imagine le désordre !

Quand un accident devient-il assez grave pour que ce « transfert de responsabilités » se produise ? Qui décide ? Sur quelles bases, puisque toute la connaissance sera du côté de l'autorité ? On imagine les coups de téléphone affolés à trois heures du matin - c'est l'heure des accidents en général - d'un cabinet de Matignon complètement pris de court !

On enregistre le même désordre dans le fonctionnement normal : on notera par exemple dans l'exposé des motifs, s'agissant de l'article 2 decies, le commentaire suivant, qui semble surréaliste : « Il est de même souhaitable que l'autorité puisse continuer à disposer, notamment dans ses antennes territoriales, de l'intervention à temps partiel de cadres dirigeants des services de l'État, notamment des directeurs régionaux de l'industrie, de la recherche et de l'environnement - DRIRE. Une possibilité de mise à disposition à temps partiel doit donc être ouverte ». Pauvres DRIRE ! C'est tout simplement ridicule : le système deviendra rapidement inopérant.

J'ai eu également l'occasion de souligner le caractère extravagant des pouvoirs concentrés dans les mains du seul président de la Haute autorité, qui exerce en propre les pouvoirs en ce qui concerne le personnel et la gestion financière, l'ordonnancement et la liquidation de la taxe sur les installations nucléaires de base, le budget de l'IRSN, dont l'indépendance devrait pourtant être garantie.

Je terminerai, madame la ministre, en disant que tout n'est pas noir dans ce projet de loi, notamment en ce qui concerne l'information.

Je salue le fait que le contrôle des informations reste du domaine de la CADA. Je salue la mise en place d'un régime stable pour les CLI, même si je déplore que les exploitants et la Haute autorité en soient membres de droit, tout comme ils le sont du Haut comité de transparence sur la sécurité nucléaire, dont je préfère ne rien dire de plus, parce qu'il n'y a décidément rien de neuf par rapport au Conseil supérieur de la sûreté et de l'information nucléaires : le « machin » restera le « machin ».

Pour conclure, je pense que l'ensemble du projet de loi relatif à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire devrait être inséré dans le code de l'environnement et renuméroté à cet effet.

En effet, le texte traite de matières qui relèvent déjà dudit code : les risques majeurs, le droit à l'information, les déchets radioactifs, et l'article 29 du projet de loi prévoit la modification d'un article du code de l'environnement. Le refus d'une telle codification pourrait être considéré comme contraire à la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur la lisibilité et l'accès au droit, et permettre un recours devant le Conseil sur l'initiative des parlementaires, ce que, j'imagine, vous ne souhaitez pas réellement.

Un tel recours me semble, par ailleurs, envisageable si le texte définitif transfère à la Haute autorité un pouvoir réglementaire, car il s'agit là d'une atteinte directe à la Constitution.

Vous avez considéré qu'il n'en était rien ; ce n'est pas ma façon de voir les choses. En tout cas, ce risque existe, et vous devriez en être conscients.

M. le président. La parole est à M. Bernard Fournier.

M. Bernard Fournier. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, le groupe UMP apportera son entier soutien au projet de loi relatif à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire, dont nous achevons la discussion et qui a été très substantiellement enrichi par les amendements présentés par les deux excellents rapporteurs de la commission des affaires économiques, MM. Revol et Sido.

En effet, il s'agit d'un texte nécessaire et attendu depuis longtemps ; par son adoption, nous allons doter notre pays d'un corpus législatif général et complet en matière d'activités nucléaires et de contrôle.

Depuis plusieurs années, les gouvernements successifs ont souhaité que le Parlement discute d'un projet de loi sur la transparence et la sécurité en matière nucléaire.

Nous y sommes enfin arrivés, et l'actualité du secteur de l'énergie vient renforcer l'importance de ce texte.

Ainsi, dans le contexte général de très forte augmentation des prix du pétrole conjuguée à la raréfaction, à terme, des ressources facilement accessibles en hydrocarbures, le nucléaire civil est l'objet d'une attention renouvelée.

Nous avons largement abordé cette question lors de nos débats sur la loi de programme fixant les orientations de la politique énergétique, que nous avons votée l'année dernière. Énergie qui peut être considérée comme « propre » en matière d'émissions de gaz à effet de serre, garante d'une relative indépendance et traduisant la maîtrise d'une technologie de pointe, le nucléaire assure déjà près de 80 % de nos besoins nationaux en électricité.

Parallèlement, le secteur industriel concerné évolue avec une plus grande place aux entreprises privées, ouvertes au monde, les technologies se renouvèlent, le parc nucléaire vieillit.

Dans ce contexte, nos concitoyens exigent une plus grande information, et une démocratie moderne ne peut que s'enorgueillir de l'indépendance des contrôles dans les domaines où la santé et la sécurité sont en jeu.

De fait, la sûreté des installations nucléaires est un enjeu majeur, de même que la divulgation des informations afférentes.

C'est à ces préoccupations que répond le présent projet de loi.

Nous ne sommes pas partis de rien, même si les fondements législatifs étaient ténus. En effet, de nombreuses dispositions d'ordre réglementaire et des règles de bonnes pratiques prises tant par l'administration que par les opérateurs existaient déjà.

Nous avons mis ces dispositifs en cohérence, nous les avons consolidés et nous avons introduit, à l'instigation du Président de la République, une nouveauté majeure : la création de la Haute autorité de sûreté nucléaire.

Ainsi, mes chers collègues, nous allons adopter un texte fondamental.

Il pose les grands principes applicables aux installations nucléaires : principe de précaution, de prévention, principe pollueur-payeur, principe de la responsabilité première de l'exploitant.

Il donne une définition des différents actes qui concernent les activités nucléaires.

Il met à la disposition du public une information complète en lui donnant un droit d'accès à l'information détenue par l'exploitant.

Il renforce les lieux de débats que sont les commissions locales d'information ou le Haut comité de transparence.

Il institue une Haute Autorité indépendante, garante du contrôle des activités nucléaires.

Tout cela est fait sans départir l'État de son rôle et de ses responsabilités, puisqu'il conserve son pouvoir réglementaire, qu'il prend les décisions majeures d'autorisation ou de démantèlement, qu'il peut suspendre l'activité d'une installation présentant des dangers et qu'il assure la protection des populations.

Dans ces conditions, je le répète, le groupe UMP votera ce texte. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. François Fortassin.

M. François Fortassin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, sur la forme, je tiens à saluer l'esprit constructif dans lequel les débats ont été menés. Nos rapporteurs ont effectué un travail approfondi, et je tiens à vous rendre hommage, madame la ministre, à la fois pour la présentation de ce texte et pour le climat qui a pu s'instaurer grâce à vous.

Le texte a été enrichi, même s'il ne l'a pas été autant que nous le souhaitions ; mais les avancées sont très positives.

Certains points ont fait l'objet d'un large accord, qu'il s'agisse de la nécessité de l'indépendance en matière énergétique ou du rôle que doit jouer notre pays en matière nucléaire.

Alors que nous sommes menacés par l'effet de serre, par le réchauffement de la planète, on constate que l'énergie nucléaire, en dépit de ses inconvénients, est sans doute moins dérangeante et moins contraignante que les autres sources d'énergie.

Toutefois, elle suscite encore des sentiments irrationnels : si l'immense majorité de nos concitoyens adhère aux arguments que nous avons développés, peu d'entre eux seraient d'accord pour l'installation d'une centrale nucléaire à cinq kilomètres de chez eux !

Il est bien évident que la culture du secret qui entoure le nucléaire et que nous avons pu connaître au moment de la catastrophe de Tchernobyl n'a rien arrangé.

La question que je me pose est la suivante : ce projet de loi, malgré la volonté de transparence qui le sous-tend, aura-t-il une portée pédagogique suffisante pour rassurer pleinement nos concitoyens ?

À mes yeux, la Haute autorité présente cependant quelques inconvénients. Si son indépendance était certes souhaitable, on peut se demander jusqu'où elle ira. La Haute autorité sera dotée de pouvoirs considérables. Ne risque-t-elle pas, dès lors, d'être tentée de conserver jalousement certaines informations et de ne les livrer au public qu'au compte-gouttes ?

Telles sont les réflexions que je tenais à présenter. Il s'agit des réflexions d'un simple citoyen, car les parlementaires ne doivent pas oublier qu'ils sont des citoyens.

Dans sa majorité, le groupe du Rassemblement démocratique et social européen soutiendra le projet de loi. Certains de ses membres s'abstiendront, mais vous pouvez considérer, madame la ministre, qu'il s'agira d'une abstention positive.

M. le président. La parole est à M. Christian Gaudin.

M. Christian Gaudin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens tout d'abord à insister sur la qualité de la discussion.

Je veux également saluer l'excellent travail de nos rapporteurs, MM. Henri Revol et Bruno Sido, qui a contribué à rendre ce débat constructif et serein. Cela dit, je regrette la déclaration d'urgence et les délais très courts qui nous ont été imposés pour l'examen de ce texte.

Je me réjouis de l'adoption des amendements que nous avions présentés. Ces derniers visaient à clarifier certains aspects du texte, en renforçant le caractère collégial de la Haute autorité, en simplifiant l'autorisation exigée pour les nouvelles INB, en précisant les types de décrets applicables aux autorisations définissant certaines catégories d'INB. Ils vont donc dans le sens d'une plus grande cohérence du projet de loi.

D'une manière générale, ce texte constitue une avancée certaine en direction de la transparence en matière nucléaire et de l'information du public.

Les travaux de la commission des affaires économiques ont permis de rééquilibrer les prérogatives des différents acteurs et de rendre plus performants le contrôle des exploitants nucléaires, ce qui doit contribuer à renforcer la confiance des populations.

Comme je l'ai indiqué dans la discussion générale, jamais la relation entre science et société n'avait atteint une aussi haute importance. La performance technique du nucléaire appelle aujourd'hui l'adhésion rassurée du public au défi de notre indépendance énergétique. Ce texte contribue à cette adhésion.

Telles sont les raisons pour lesquelles le groupe Union centriste-UDF votera ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Piras.

M. Bernard Piras. Je tiens à mon tour à vous faire part de notre satisfaction quant à la manière dont les débats se sont déroulés. Je remercie les deux rapporteurs, MM. Bruno Sido et Henri Revol, ainsi que Mme la ministre, qui a présenté des explications parfois insuffisantes et un peu brèves à mon goût, mais toujours avec une grande courtoisie.

Mes remerciements vont également aux deux présidents de séance qui sont su conduire les débats avec bienveillance.

Une dernière satisfaction - je m'en excuse, madame la ministre, mais il faut bien que je m'exprime avec franchise et sincérité - tient au fait que le Sénat ait enfin été saisi d'un projet de loi sur l'énergie nucléaire.

Si l'objectif du présent projet de loi était de redonner confiance aux Français, de les réconcilier avec le nucléaire, je crois cependant que cet objectif ne sera pas atteint, car ce texte ne va pas assez loin. Je ne prétends pas que la transparence et la sécurité ne seront pas assurées, mais je pense qu'elles ne le seront pas de façon satisfaisante.

Tout avait d'ailleurs mal commencé. Le projet de loi a été déposé au Sénat le 18 juin 2002 ; une lettre rectificative arrivée au dernier moment a rendu nos travaux plus difficiles, l'urgence ayant de plus été déclarée la veille de la discussion ! Ces méthodes de travail ne sont pas propices à la transparence. Il aurait sans doute été possible de procéder autrement. En tout état de cause, la navette aurait permis d'améliorer la qualité de nos travaux.

Quels reproches peut-on faire à ce texte ?

Tout d'abord, en matière de sécurité, j'ai le sentiment que, sur le fond, le transfert au domaine législatif de compétences naguère dévolues au règlement n'a pas changé grand-chose. Ce transfert n'aura de conséquences qu'à la marge. Des interrogations subsistent s'agissant notamment du pouvoir exorbitant que vous donnez à la Haute autorité et du rôle du Gouvernement. En aucun cas le Parlement n'est associé. Or, je souhaiterais qu'il le soit. Certaines choses doivent donc être clarifiées. L'avenir nous dira, lors de la nomination des membres de la Haute autorité par le Président de la République, le président du Sénat et le président de l'Assemblée nationale, si ce transfert n'a pas été qu'un calcul. Toutefois, je ne pense pas qu'il y ait de grandes avancées à cet égard.

Ensuite, s'agissant de la transparence, le rôle de la CADA et les ANCLI est reconnu. En revanche, je regrette que, même si certains amendements ont été adoptés, vous ayez repoussé des amendements qui visaient à étendre le champ de certaines catégories d'INB.

À moins que l'Assemblée nationale aille plus que loin que le Sénat, je crains que les Français ne mettent un certain temps avant de comprendre que nous avons travaillé dans le sens de l'accroissement de la transparence et de la sécurité. Nous voterons donc contre ce projet de loi.

M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, rapporteur.

M. Bruno Sido, rapporteur. Je m'exprimerai également au nom de M. Henri Revol, afin de ne pas prolonger le débat.

L'examen de ce projet de loi ne fut pas aisé, bien qu'il ait été déposé sur le bureau du Sénat dès 2002. Nous avons en effet dû tenir compte de l'intervention de M. le Président de la République, souhaitant que le texte soit enrichi par la création d'une Haute autorité indépendante.

Je tiens à remercier Mme la ministre, dont l'action a été déterminante, mais également le président de la commission des affaires économiques, M. Jean-Paul Emorine. En effet, nous étions dans l'impossibilité de travailler correctement dans les délais qui nous étaient impartis. Et vous avez obtenu, madame la ministre, le report de presque un mois de l'examen de ce texte. Nous avons ainsi pu effectuer un travail de bonne qualité. En amont, les échanges fructueux entre les services du Sénat, que je remercie, et ceux du ministère nous ont permis de trouver un accord sur la plupart des amendements que la commission avait élaborés pour améliorer encore la qualité de ce texte déjà très constructif.

Quant à la discussion elle-même, je remercie mes collègues pour la qualité de leurs interventions. La minorité a joué un rôle très positif. Elle a contribué à enrichir le projet de loi par ses amendements - même si l'on peut toujours espérer qu'ils soient adoptés en plus grand nombre !

Sur le fond, les débats auraient pu se dérouler dans de moins bonnes conditions. Mais nous avions tous décidé, au-delà de nos divergences d'appréciation, d'aller au fond des choses.

Ce texte constitue une avancée. D'abord, il permet de créer un corpus législatif qui offre à l'activité nucléaire la possibilité de s'adosser à quelque chose de solide, ce qui n'était pas le cas. C'est là son premier intérêt.

Ce texte est bien entendu perfectible. Ne doutons pas qu'au cours des années qui viennent, au vu de l'expérience, il conviendra de l'améliorer, de l'enrichir et de corriger ce qui doit l'être.

Enfin, et j'en terminerai, ce texte - à moins qu'il ne soit complètement modifié par l'Assemblée nationale, mais nous reviendrions à la charge  en commission mixte paritaire-permettra sans aucun doute d'apporter la confiance.

En effet, la grande question est là : la sûreté nucléaire est bien entendu primordiale - c'est tellement évident qu'il est inutile d'y revenir -, mais la confiance de la population est également déterminante. Or la population ne peut avoir confiance que si elle a le sentiment que la transparence est garantie - ainsi que la sûreté, évidemment.

De mon point de vue, ce texte permettra aux Français d'avoir confiance dans le nucléaire. Je ne le redirai jamais assez - mais vous l'avez également indiqué, mes chers collègues -, cette confiance est bien nécessaire, parce que le nucléaire lui-même, qu'on l'aime ou non, qu'on le craigne ou non, est indispensable (Mme Voynet proteste), eu égard au manque d'hydrocarbures, à l'augmentation de la consommation d'énergie et au réchauffement de la planète. Toutes ces raisons militent, dans un premier temps, en faveur du développement du nucléaire et, ensuite, en faveur de la recherche d'autres solutions, ce que les chercheurs ne manqueront pas de faire.

Je ne peux donc que me réjouir du vote qui va maintenant intervenir - je ne doute pas de son résultat - et vous réitérer, madame la ministre, mes remerciements pour la qualité de nos relations et des discussions qui ont pu se dérouler ici. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Nelly Olin, ministre. Je tiens tout d'abord à remercier les rapporteurs, Bruno Sido et Henri Revol, ainsi que l'ensemble de la commission des affaires économiques : ils ont accompli un travail remarquable, qui a permis des avancées tout à fait significatives.

Le dialogue qui s'est instauré a permis d'enrichir le texte. Grâce aux qualités et à l'écoute des rapporteurs, nous avons eu un vrai débat.

Avec ce projet de loi, le Gouvernement vous a proposé de rénover en profondeur le cadre législatif applicable aux activités nucléaires et à leur contrôle. Quelles que soient nos sensibilités respectives, ce texte marque des avancées importantes concernant la transparence en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection, mais aussi d'information du public. La création de la Haute autorité de sûreté nucléaire, chargée du contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection, ne signifie en rien, ainsi que je me suis efforcée de le préciser tout au long du débat, un quelconque désengagement de l'État. Le rôle de ce dernier et de la Haute autorité a été clairement défini. L'État conserve tous ses pouvoirs régaliens.

Il s'agit donc d'un texte majeur, dont on a dit sur ces travées qu'il avait été trop de fois annoncé, trop de fois reporté, au point même qu'il serait devenu urgent. Voilà ce que je retiens de ces deux jours de débats.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je ne voudrais pas terminer sans vous remercier, les uns et les autres, de votre coopération et de vos apports au texte, mais également d'avoir contribué, par vos interventions, dans une discussion tout à fait sereine et de haute tenue, à donner l'image de femmes et d'hommes politiques attachés à la qualité du débat démocratique.

Monsieur le président, je souhaite vous remercier personnellement pour avoir mené ce débat avec le sens humain, l'intelligence et la finesse que nous vous connaissons. Je vous demande de transmettre également mes remerciements à ceux qui vous ont précédé à votre fauteuil.

M. le président. Je n'y manquerai pas, madame la ministre.

Mme Nelly Olin, ministre. Je ne veux pas non plus oublier les collaborateurs de la commission, ainsi que l'ensemble des services du Sénat.

Je suis fière d'avoir porté ce texte et de le voir adopter par le Sénat dans quelques instants, car il est important pour l'avenir. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires économiques.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 152 :

Nombre de votants 328
Nombre de suffrages exprimés 320
Majorité absolue des suffrages exprimés 161
Pour l'adoption 200
Contre 120

Le Sénat a adopté.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire