prise en charge des personnes âgées dépendantes

M. le président. La parole est à M. Claude Biwer, auteur de la question n° 872, adressée à M. le ministre de la santé et des solidarités.

M. Claude Biwer. Rassurez-vous, monsieur le président, nous vous louerons une bicyclette ! (Nouveaux sourires.)

Monsieur le ministre, le vieillissement de la population française et l'accroissement de la situation de dépendance qui en découle constituent des phénomènes lourds de conséquences pour les finances publiques, dont on ne prend sans doute pas suffisamment la mesure.

La Cour des comptes, dans son rapport public particulier consacré aux personnes âgées dépendantes et publié en novembre 2005, tire pourtant la sonnette d'alarme dans le chapitre consacré au financement de la dépendance : hausse exponentielle du coût de l'allocation personnalisée d'autonomie, l'APA - les conseils généraux sont, hélas ! bien placés pour la mesurer - ; insuffisance des crédits destinés à la médicalisation des établissements d'hébergement ; manque de maîtrise de la dépense globale de l'assurance maladie pour les personnes âgées dépendantes. D'après le rapport, « l'assurance maladie ne sait ni chiffrer ni maîtriser le montant des soins de ville rattachable à des établissements d'hébergement. »

Ainsi, la Cour des comptes estime que le coût de l'APA pourrait atteindre 6 milliards d'euros en 2020, soit une hausse de 64 % par rapport à 2004.

Elle met également en exergue l'absence de projections en matière de dépenses d'assurance maladie : « Les administrations concernées et les caisses ne se sont pas dotées des outils nécessaires pour évaluer les conséquences du vieillissement et de la progression des situations de dépendance sur les finances de la sécurité sociale. »

Il semblerait par ailleurs que la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, quoique récemment créée, ne se soit pas elle non plus dotée d'outils prospectifs, alors que son rôle dans la prise en charge financière de la dépendance devrait pourtant prendre de plus en plus d'importance.

N'est-il pas à craindre, dans ces conditions, que les collectivités locales ne soient considérées tôt ou tard comme des services déconcentrés de l'État s'agissant de ces dépenses ?

La Cour des comptes a procédé à des projections concernant la prise en charge à domicile et en institution. Elle aboutit à l'inquiétante conclusion que les enjeux financiers pour l'assurance maladie et les personnes concernées sont supérieurs à ceux de l'APA : entre 3 et 4,7 milliards d'euros supplémentaires pour l'assurance maladie et entre 1,6 et 2,7 milliards d'euros supplémentaires pour les résidents en établissement à l'horizon 2020.

Monsieur le ministre, ces chiffres donnent le vertige et nécessiteraient sans doute que le Parlement puisse en débattre afin de tracer des perspectives et, pendant qu'il en est encore temps, dégager progressivement les moyens nécessaires au financement de la dépendance. Il conviendrait notamment d'éviter que ces coûts supplémentaires ne soient finalement mis à la charge des collectivités territoriales et, particulièrement, des départements, qui ne pourront pas les supporter.

Pourriez-vous nous rassurer, monsieur le ministre, ou, pour le moins, nous éclairer sur ce problème bien délicat, dont nos concitoyens ne mesurent pas l'incidence sur l'avenir ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le sénateur, vous avez entièrement raison, le développement de la prise en charge des personnes âgées dépendantes appelle la mobilisation de moyens croissants.

Voilà seulement quinze ans, les personnes âgées dépendantes qui rentraient en établissement d'hébergement avaient en moyenne 75 ans. À l'heure actuelle, on se rapproche de 85 ans.

Si les personnes âgées de plus de 80 ans sont aujourd'hui un peu plus d'un million en France, elles seront environ deux millions dans dix ans.

Bien sûr, la longévité, ce n'est pas forcément la dépendance et la plupart d'entre nous y échapperont. Pour autant, les besoins ne font que croître compte tenu non pas de l'aggravation des situations de dépendance, mais tout simplement de l'allongement de l'espérance de vie.

Vous avez cité la Cour des comptes. Je partage très largement ses conclusions, qui ont été élaborées en liaison étroite avec mes propres services à partir d'une analyse qui porte, pour l'essentiel, sur la situation dont nous avons hérité.

Jamais autant de moyens n'auront été mobilisés pour faire face à la grande dépendance des personnes âgées. Je le dis sans fanfaronner, car les besoins augmentent tellement vite qu'il est tout à fait légitime de les mobiliser maintenant plus que durant la dernière décennie.

Pour l'heure, je citerai quelques chiffres. En 2003, après la canicule, nous avons lancé le plan « Vieillissement et solidarité » en prévoyant de créer, entre 2004 et 2007, 10 000 places supplémentaires en établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes. Or ces places ont été financées non pas en quatre ans mais en deux ans ! J'ai donc annoncé, dès le 28 août dernier, la décision du Gouvernement de doubler les créations de places en établissements dans le cadre du plan « Vieillesse et solidarité ». Ce sont donc 20 000 places qui auront été créées en quatre ans, au lieu des 10 000 qui avaient été initialement inscrites dans ce plan.

À cela s'ajouteront, pour la même période, 17 000 places de services de soins infirmiers à domicile, ainsi que 1 125 places d'hébergement temporaire par an pour les familles qui s'occupent d'une personne âgée très dépendante et qui ont parfois besoin d'un peu de répit. Il est également prévu de créer 2 125 places d'accueil de jour par an.

Cet effort, qui devra être poursuivi pendant les années à venir, ne peut être accompli sans les financements correspondants.

S'agissant tout d'abord de l'assurance maladie, les efforts consentis par les Français pour réduire le déficit en la matière nous permettent d'ores et déjà de redéployer vers la prise en charge des personnes âgées lourdement dépendantes une partie des crédits qui étaient utilisés pour d'autres prestations de soins.

À chaque fois qu'un médecin renoncera à prescrire des arrêts de travail qui ne sont pas indispensables, à chaque fois qu'il s'abstiendra de prescrire des psychotropes ou des antibiotiques, qui ne sont pas toujours utiles - la France est championne d'Europe pour la consommation de ces médicaments -, les économies ainsi dégagées pourront être recyclées dans la prise en charge des personnes âgées dépendantes.

C'est la raison pour laquelle, en 2006, dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale, nous avons réussi pour la première fois, grâce à votre soutien, à mobiliser une augmentation de crédits de 9 % au titre de la seule assurance maladie pour les services médicosociaux en faveur des personnes âgées dépendantes.

Dans le même temps a été instaurée la journée de solidarité, qui a demandé un effort à nos compatriotes. À l'origine, celle-ci avait été fixée au lundi de Pentecôte - tout le monde était placé sous la même toise -, mais, depuis, le dispositif a été assoupli. Compte tenu de la durée de la semaine de travail dans notre pays et du nombre de jours de RTT, chacun pouvait bien accepter de consacrer une journée de travail à la solidarité en faveur des personnes âgées ou handicapées. Les moyens qui en résultent sont très importants, et j'en remercie tous les Français.

Par conséquent, aux 9 % d'augmentation des crédits au titre de l'assurance maladie en 2006 s'ajoutent les crédits provenant de la journée de solidarité, ce qui porte à 13,5 % l'accroissement de l'ensemble des crédits médicosociaux

Le Gouvernement s'engage à poursuivre pendant un certain nombre d'années l'effort qui a été accompli pour la première fois en 2006, afin d'être en mesure de répondre aux besoins très importants concernant la prise en charge des personnes âgées dépendantes. J'ai demandé au Commissariat général du plan, devenu le centre d'analyse stratégique, de formuler des propositions.

Il ne faut pas se contenter de construire des maisons de retraite - c'est déjà très important - et d'augmenter le personnel médical au chevet des personnes âgées dépendantes. Il importe également d'offrir davantage de services à domicile et de prestations intermédiaires comme l'hébergement temporaire ou l'accueil de jour, afin de pouvoir faire face à tous les types de situation et de répondre à la demande principale des personnes âgées, qui est de pouvoir continuer à vivre à domicile sans être en danger et sans souffrir de l'isolement.

Telle est, monsieur le sénateur, la politique qui est conduite par le Gouvernement en faveur des personnes âgées dépendantes. À cet égard, je remercie tous les Français, sans la solidarité desquels ces actions ne seraient pas possibles.

M. le président. La parole est à M. Claude Biwer.

M. Claude Biwer. Monsieur le ministre, à défaut de me rassurer totalement, votre réponse m'a éclairé sur les efforts importants réalisés par le Gouvernement et les Français pour améliorer la situation. Cependant, beaucoup reste à faire. Je regrette que nous n'ayons pas toujours la bonne manière pour rendre accessibles au grand public les actions qui vont dans le bon sens. Il faut notamment démontrer que cette journée de solidarité a des résultats très positifs.

Enfin, qu'en est-il des décrets sur les haltes-soins, qui ne sont toujours pas publiés ? Je n'ai pas réussi à obtenir des informations à ce sujet, mais je pense que cela ne saurait tarder.

Monsieur le ministre, je vous remercie de poursuivre les efforts dans ce domaine. Nous en aurons peut-être malheureusement tous besoin demain.

Fermeture du centre de documentation de Marmottan

M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet, auteur de la question n° 994, adressée à M. le ministre de la santé et des solidarités.

Mme Anne-Marie Payet. Ma question concerne la fermeture du centre de documentation sur les drogues de l'hôpital Marmottan, dans le 17e arrondissement de Paris.

Le 27 octobre 2005, le président de la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les toxicomanies, la MILDT, a en effet cessé de financer le poste de documentaliste du pôle Toxibase-Marmottan. Cette décision marque la fin d'une approche originale de la documentation et de l'information en matière de toxicomanie, qui avait été inaugurée il y a près de vingt ans avec la création du réseau national Toxibase.

Cette association nationale coordonnait des centres documentaires adossés à des lieux d'accueil, de soins, de clinique et de prévention. Le centre de Marmottan est considéré comme le pôle principal de ce dispositif.

Fondé en 1971, le centre de Marmottan est la plus ancienne et la principale structure de soins pour toxicomanes en France. Avec plus de 1 455 publications à son actif, ce centre reste une école de pensée et de clinique de renommée internationale.

Le centre médical de Marmottan s'inscrit dans la demande de soins nécessaire à notre pays : pour la seule année 2005, 3 200 personnes y ont été reçues, 1 855 toxicomanes ont été régulièrement suivis et 68 000 consultations ont été effectuées.

Le centre de documentation joue un rôle primordial : des chercheurs, cliniciens et universitaires de tous pays le fréquentent régulièrement non seulement pour consulter des documents, mais aussi pour participer à un véritable forum d'échanges et de réflexion entre professionnels.

Il semble que la MILDT souhaite remplacer progressivement ce dispositif par le réseau des centres d'information régionaux sur les drogues et les dépendances, ce qui entraînerait la disparition des trente-cinq centres d'information départementaux déjà en place.

Pour l'instant, le service de documentation de Marmottan continue de fonctionner grâce au soutien de l'administration de son hôpital de rattachement, à savoir le groupe de santé de Perray-Vaucluse.

Il est primordial, monsieur le ministre, de préserver toute la richesse de ce centre de documentation et de maintenir le poste de documentaliste qui lui est rattaché. Je crois savoir que vous avez récemment engagé le dialogue et formulé quelques propositions aux responsables de ce centre de documentation. Pouvez-vous nous les exposer ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Madame la sénatrice, le plan gouvernemental de lutte contre les drogues illicites, le tabac et l'alcool pour la période 2004-2008 prévoit de réorganiser les centres d'information et de ressources sur les drogues et les dépendances.

Pour l'Île-de-France, c'est le centre régional d'information et de prévention du Sida qui a été labellisé en tant que centre d'information et de ressources en décembre 2004. Une convention signée en juillet 2005 entérine cette décision et permet son application.

Le centre de documentation de Marmottan est important et il rend des services appréciables. Mais il n'a pas vocation à recevoir le même label - sa direction elle-même en convient - notamment parce qu'il ne reçoit pas le grand public ; il est principalement orienté vers la recherche et les soins.

Afin de sauvegarder le poste de documentaliste, qui était pris en charge par la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie, cette mission a prolongé de neuf mois sa subvention, tout en demandant à la direction de Marmottan de présenter un projet de cofinancement de ce poste avec d'autres institutions. Malheureusement, le projet présenté au mois d'octobre de l'année dernière n'a pas répondu à ce souhait.

Pour sortir de cette impasse, j'ai proposé que la documentaliste travaillant actuellement au centre de Marmottan soit dorénavant rattachée au centre d'information d'Île-de-France et salariée par cet organisme sur un financement de la mission interministérielle. Dans le cadre d'une convention de partenariat entre les deux organismes, tous deux membres du réseau Toxibase, elle partagera son activité à raison de trois jours par semaine à Marmottan et deux jours par semaine au centre d'information et de ressources sur les drogues et les dépendances.

Cette solution, qui rencontre l'assentiment des trois parties, permettra un échange fructueux dont les deux structures pourront heureusement bénéficier.

M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet.

Mme Anne-Marie Payet. Monsieur le ministre, je sais qu'il faut parfois réorganiser les structures qui existent déjà. Vous avez essayé de sauver l'essentiel en conservant ce poste de documentaliste à mi-temps. Je me félicite qu'une solution, même partielle, ait été apportée à ce problème qui inquiétait les professionnels. C'est grâce à eux que nous pouvons parfois rétablir la vérité et tordre le cou à certaines fausses informations qui circulent actuellement. Par exemple, il a récemment été publié que le cannabis serait moins nocif que le tabac.

rationalisation de la gestion des aides par la CPAM des Alpes-de-Haute-Provence

M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel, auteur de la question n° 951, adressée à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

M. Claude Domeizel. Je souhaite attirer l'attention de M. le ministre délégué sur la gestion des aides par la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-de-Haute-Provence.

Le fonds de compensation fonctionnelle du handicap a été confié à la CPAM de ce département par convention signée en juin 2003. Or le démarrage réel du dispositif n'a été effectif qu'en décembre 2003, après la mise en place de la commission chargée de l'examen des dossiers et de la dotation en moyens administratifs. Depuis l'année 2004, la dotation attribuée sur ce fonds est basée sur les aides allouées en 2003, c'est-à-dire pendant un seul trimestre.

Pour répondre aux besoins réels, les crédits nécessaires à ce fonds sont prélevés sur une autre dotation, normalement destinée à des aides individuelles pour favoriser l'accès aux soins à des familles en difficulté.

La gestion de cette dernière dotation, dite paramétrique, ainsi amputée par ce transfert de charges, est par ailleurs imprévisible et aléatoire dans la mesure où le total des attributions est notifié trop tardivement, c'est-à-dire au cours du quatrième trimestre.

Je souhaite savoir si cette pratique comptable de « vases communicants », complexe et illisible, est généralisée ou bien spécifique au département des Alpes-de-Haute-Provence.

Par ailleurs, je voudrais connaître les raisons qui s'opposent à ce que les dotations annuelles soient notifiées au cours du premier trimestre, plutôt qu'en cours d'année, pour assurer une gestion rationnelle des fonds d'aides attribués aux CPAM.

Enfin, plus généralement, dans le cadre de la convention d'objectifs et de gestion et de la responsabilisation de l'échelon local, peut-il être envisagé une attribution sur une base pluriannuelle qui permettrait de tenir compte du résultat positif ou négatif de l'année précédente ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le sénateur, de grands changements sont intervenus avec la loi du 11 février 2005 et la création des maisons départementales des personnes handicapées, ainsi qu'avec la mise en place de la nouvelle prestation de compensation du handicap. Ces changements ont affecté les modalités d'utilisation des crédits que les caisses primaires d'assurance maladie consacraient à l'aide aux personnes handicapées.

En effet, jusqu'alors, l'allocation compensatrice pour tierce personne versée par le département aux personnes handicapées ne couvrait que les aides humaines : la toilette et les soins quotidiens indispensables.

Parallèlement à cette aide, pour obtenir une subvention afin d'aménager un logement ou acheter un fauteuil roulant, l'intéressé faisait appel à l'assurance maladie, qui avait un tarif de base et ne prenait d'ailleurs pas en charge toutes les aides techniques, mais aussi à un dispositif intitulé « sites pour la vie autonome ».

À travers leur fonds d'action sociale, les caisses d'assurance maladie pouvaient alors intervenir, sur une base variable selon les départements. Et les sites pour la vie autonome, qui recevaient des fonds de l'État, des conseils généraux et des caisses de sécurité sociale, pouvaient apporter, en fonction de leurs propres règles d'attribution des subventions, une aide aux personnes handicapées dépendantes.

Avec le nouveau système, la prestation de compensation du handicap ne se limite pas au financement des aides humaines. Elle permet également à la personne dépendante, en fonction de son projet de vie et de son environnement, de recevoir une aide pour aménager son logement ou son véhicule, apporter des modifications dans l'immeuble, acquérir un fauteuil roulant, sans avoir à frapper à cinq, six ou sept portes.

Les caisses de sécurité sociale sont présentes au sein des maisons départementales du handicap, car il s'agit de groupements d'intérêt public. Elles apporteront donc à celles-ci les moyens qu'elles consacraient auparavant aux sites pour la vie autonome.

Cet effort vient abonder les crédits déjà importants dont bénéficient les maisons départementales du handicap : 580 millions d'euros étaient consacrés par les départements à l'allocation compensatrice pour tierce personne, auxquels s'ajoutent, grâce à la journée de solidarité, 500 millions d'euros par an, qui sont répartis par la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.

Monsieur le sénateur, je veille à ce que l'assurance maladie ne se désengage pas de l'aide aux personnes âgées dépendantes à la faveur de ces transformations.

À la suite de l'entretien que j'ai eu à cet égard avec le président et le directeur général de la caisse nationale d'assurance maladie, des instructions ont été données aux différentes caisses primaires pour que les moyens financiers et en personnels qui étaient accordés aux sites pour la vie autonome soient maintenant affectés aux maisons départementales du handicap.

Par ailleurs, le Gouvernement est en train de négocier la convention d'objectifs et de gestion qui déterminera les crédits destinés à l'action sociale pour les quatre années à venir. Mais, d'ores et déjà, toutes les aides relatives aux personnes handicapées ont été, en quelque sorte, sanctuarisées pour qu'il n'y ait pas de désengagement.

M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel.

M. Claude Domeizel. Monsieur le ministre, vous n'avez pas totalement répondu à ma question ; vous avez surtout fait allusion à l'aide aux personnes handicapées. Il n'empêche que les caisses primaires d'assurance maladie doivent prélever des fonds sur les sommes qui sont affectées à l'accès aux soins des personnes nécessitant une aide spécifique.

Je voulais surtout vous alerter - et vous avez partiellement répondu sur ce point - sur les modalités de perception des fonds par les caisses primaires d'assurance maladie eu égard à la convention d'objectifs et de gestion. La dotation pourrait-elle être pluriannuelle, afin d'aller dans le sens d'une gestion plus locale ? Cela permettrait d'accroître l'autonomie des caisses primaires d'assurance maladie.

entreprises adaptées et chômage des personnes handicapées

M. le président. La parole est à Mme Gisèle Printz, auteur de la question n° 998, adressée à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

Mme Gisèle Printz. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les entreprises adaptées ont acquis une place incontournable dans le dispositif de l'emploi des personnes handicapées. La loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, les avait confortées dans leur mission.

Cependant, à l'occasion du premier anniversaire de cette loi, elles sont inquiètes quant à leur avenir et à celui de leurs salariés. Ces derniers dénoncent, notamment, les incohérences du nouveau dispositif, qui ne répond pas à leur attente. Ainsi, le retard pris dans l'élaboration du volet réglementaire de ladite loi et, surtout, dans l'octroi des moyens financiers requis conduit nombre d'entreprises adaptées dans une impasse économique.

Dans mon département, l'entreprise adaptée Lorraine Ateliers constate tout d'abord que l'État est absent de la mise en oeuvre de la loi. Celle-ci impose la rémunération minimum au SMIC pour les salariés handicapés en entreprise adaptée à compter du 1er janvier 2006. Or les dispositions réglementaires fixant les engagements financiers et les modalités d'application de la loi n'ont toujours pas été prises.

De plus, l'aide de l'État a été revue à la baisse. Une année de concertation devait permettre d'élaborer des décrets conformes aux besoins des entreprises adaptées, mais celles-ci n'ont obtenu qu'une aide aux postes de travail inférieure de 10 % par rapport aux besoins réels.

Enfin, à la suite d'un contingentement du nombre de places, près de 300 000 personnes handicapées sont au chômage en France et se trouvent sur la touche du fait de la suppression de la liberté de recrutement.

Malheureusement, peu d'efforts sont réalisés dans notre société pour faciliter l'emploi des handicapés. Parmi ceux qui ont obtenu la reconnaissance administrative de leur handicap dans le cadre de la loi de 1987 en faveur de l'emploi des travailleurs handicapés, seulement 37 % ont un emploi. Le taux de chômage chez les personnes handicapées est de 12 %, les entreprises préférant payer une amende si elles emploient moins de 6 % de personnes handicapées.

Le Président de la République a élevé l'intégration des personnes handicapées au rang de grande cause nationale en 2005. Mais, un an après, la déception est grande au regard des résultats.

Il est grand temps que le Gouvernement prenne conscience de la gravité de la situation et apporte les moyens nécessaires à la pérennité des entreprises adaptées, véritables sources d'emplois pour les personnes handicapées.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Madame la sénatrice, je suis très surpris par votre question, car les choses ne se présentent pas du tout telles que vous les avez décrites.

Tout d'abord, il n'y a aucun retard au sujet des entreprises adaptées. La loi du 11 février 2005 a fait l'objet de deux décrets d'application pour les entreprises adaptées, qui ont été pris le 13 février dernier ; ils ont été suivis de deux arrêtés pour leur mise en oeuvre.

Il est vrai que nous avons pu constater, au fil des années, et ce depuis longtemps, que le taux de chômage des personnes handicapées était nettement supérieur à la moyenne nationale. Si nous avons saisi la représentation nationale, à la demande du Président de la République et à la suite d'attentes exprimées par toutes les associations de personnes handicapées, de cette loi du 11 février 2005 - elle n'a d'ailleurs pas été votée par votre groupe -, qui figure au nombre des grandes lois de la République, c'est bien parce que nous avions conscience de la nécessité d'attaquer le mal à la racine. Cela suppose de se préoccuper de la scolarité et de l'accessibilité, deux éléments sans lesquels l'emploi des personnes handicapées est impossible, mais aussi de s'occuper spécifiquement de l'emploi.

S'agissant plus particulièrement des entreprises adaptées, je rappelle que la loi du 11 février 2005 a apporté des changements importants pour les vingt mille travailleurs handicapés de France qui y sont employés. Elle a transformé les ateliers protégés en entreprises adaptées, auxquelles est applicable l'ensemble du code du travail.

Par exemple, la rémunération que ces entreprises versent à leurs salariés ne saurait être inférieure au SMIC ou au minimum conventionnel. Autrement dit, la rétribution des travailleurs handicapés est passée à 100 % au moins du SMIC, contre 80 % en moyenne auparavant.

Pour cela, il a fallu mettre en place une réforme visant à améliorer le financement des aides aux entreprises adaptées. L'augmentation de plus de 28 % de la dotation prévue dans le budget de l'État pour 2006, par rapport à 2005, permet de prendre en charge le supplément d'efforts qu'elles accomplissent et de leur assurer les ressources nécessaires pour rémunérer le travail de leurs salariés.

Parfaitement conscient de la nécessité d'aider ces entreprises, qui emploient une main-d'oeuvre faiblement qualifiée, à faire face à la mondialisation qu'elles subissent de plein fouet, car ce sont ces métiers qui pâtissent de la concurrence la plus vive, j'ai décidé, à l'occasion du premier anniversaire de ladite loi, de mettre en oeuvre un plan d'aide au développement des entreprises adaptées : il bénéficiera d'une dotation supplémentaire de 10 millions d'euros par rapport aux années précédentes.

Par ailleurs, conjointement avec Gérard Larcher, plus spécifiquement chargé de l'emploi et du travail, j'ai demandé à tous les directeurs départementaux de l'emploi et de la formation professionnelle de France de proposer aux entreprises adaptées des contrats d'objectifs de trois ans pour leur permettre de se reconvertir lorsque c'est nécessaire et, en tout cas, de rechercher des marchés mieux protégés, à l'échelon local.

De même, Christian Jacob et moi-même avons demandé à toutes les collectivités territoriales de s'acquitter de leur obligation d'emploi prévue par la loi en faisant appel aux entreprises adaptées et aux centres d'aide par le travail pour des opérations de sous-traitance, de sorte que le milieu du travail protégé, indispensable pour accueillir les personnes handicapées qui auraient le plus de difficultés à s'insérer dans une entreprise ordinaire, puisse continuer à vivre, même si nous voulons développer aussi l'emploi dans les entreprises du milieu ordinaire.

Comme vous le constatez, madame la sénatrice, un effort appréciable est accompli dans le cadre de l'application de la loi. Nous ne sommes en retard ni sur les textes ni sur la mobilisation de moyens financiers, très importants, s'agissant tant de la loi de finances initiale pour 2006 que des 10 millions d'euros supplémentaires pour le plan d'aide au développement des entreprises adaptées.

M. le président. La parole est à Mme Gisèle Printz.

Mme Gisèle Printz. Je ne mets pas en doute la sincérité de vos propos, monsieur le ministre, mais permettez-moi de souligner qu'ils ne sont pas toujours en adéquation avec les résultats sur le terrain.

J'ai pris bonne note du plan d'aide au développement des entreprises adaptées que vous allez mettre en place et j'en ferai part aux associations concernées. Mais un certain nombre de problèmes demeurent, qu'il faudra prendre en compte.

M. le président. Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures trente, est reprise à seize heures cinq, sous la présidence de M. Guy Fischer.)