compte rendu intégral

PRÉSIDENCE DE M. Adrien Gouteyron

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

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PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

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Délégués départementaux de l'éducation nationale

Adoption définitive d'une proposition de loi

 
Dossier législatif : proposition de loi relative aux délégués départementaux de l'éducation nationale
Article 2

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale, relative aux délégués départementaux de l'éducation nationale (nos 299, 339).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.

M. Gilles de Robien, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais commencer par remercier la commission des affaires culturelles du Sénat, qui a examiné avec beaucoup d'attention la proposition de loi modifiée par l'Assemblée nationale. Je remercie tout particulièrement le rapporteur Jean-Claude Carle de son travail.

Je ne reviendrai pas sur les dispositions techniques de détail des deux articles qui vous sont soumis. Je m'attacherai plutôt à mettre en valeur l'articulation de ces articles et les principes qui ont présidé à leur élaboration.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous connaissez bien l'article 1er de la proposition de loi que nous examinons, puisqu'il est précisément issu d'une initiative du Sénat. En outre, il a fait l'objet d'un très large consensus.

Il importait de ne pas fragiliser la continuité de la mission des délégués départementaux de l'éducation nationale, les DDEN, parce qu'ils jouent un rôle apprécié. Ils exercent un contrôle sur la qualité du service rendu aux élèves et entretiennent un dialogue constructif avec les directeurs, les autorités académiques et, bien sûr, les maires.

La loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école interdit aux délégués départementaux d'exercer dans leur commune ou arrondissement de résidence. Or, la contrainte instituée par ce texte est apparue beaucoup trop lourde.

La proposition de loi que vous avez adoptée le 27 octobre 2005 prévoit que seuls ceux qui possèdent un mandat d'élu municipal ne pourront exercer leurs tâches de DDEN sur le territoire de leur commune. Ce nouveau texte a permis de trouver, je crois, un bon compromis, qui préserve la mission de proximité des DDEN et garantit leur neutralité.

Le 5 avril dernier, j'ai proposé à l'Assemblée nationale que ce texte soit complété par un second article, relatif au recrutement des emplois vie scolaire destinés à exercer dans les écoles.

Je voudrais souligner que ces deux articles répondent à un même impératif, améliorer le fonctionnement des écoles, ce qui est bien notre but à tous.

Il y a deux moyens pour atteindre cet objectif. D'une part, il faut assurer le maintien de la mission des DDEN, qui apportent une contribution utile à la qualité des écoles : c'est ce que permet l'article 1er. D'autre part, il faut renforcer la présence d'adultes dans les écoles : c'est ce que permet l'article 2, en facilitant la mise à disposition des écoles d'emplois vie scolaire.

Ces deux articles participent donc d'un même objectif et sont deux mesures de bon sens, simples, utiles et réclamées pour nos écoles communales. Elles traduisent l'attention que leur portent le Gouvernement comme le Parlement. Cette attention commune constitue le lien entre les deux articles.

S'agissant plus précisément de l'article 2, je crois que ses effets seront profitables à tous.

D'abord, ce texte sera bénéfique aux élèves, dont l'encadrement sera renforcé.

Ensuite, il sera utile aux bénéficiaires des emplois vie scolaire, qui peuvent trouver dans ces fonctions un tremplin vers l'emploi. Ces bénéficiaires sont principalement des personnes disposant de revenus sociaux minimaux, à qui l'éducation nationale donne l'occasion de retrouver, par ce travail, une forme de dignité sociale et une opportunité de véritable insertion professionnelle.

Enfin, cet article sera profitable aux directeurs et aux équipes éducatives, qui pourront être ainsi soulagés d'une partie des tâches d'accueil, matérielles et administratives.

Cette volonté d'aider nos écoles a permis l'élaboration du protocole de mesures en faveur des directeurs d'école, que j'ai signé le 10 mai avec l'union nationale des syndicats autonomes, l'UNSA. Je rappelle que cette organisation était à l'origine de la grève administrative des directeurs. Grâce à cette aide fournie par les emplois vie scolaire, ce protocole, dont je me réjouis, met fin à une grève qui durait depuis sept ans.

Cet accord témoigne que la concertation reste permanente et productive. Il manifeste aussi notre volonté d'aider les directeurs d'école à mieux accomplir leur mission, en les déchargeant d'une partie de leur service. Ils seront ainsi plus disponibles pour le travail pédagogique, ainsi que pour la gestion et le dialogue avec les parents et les maires.

Je souligne que le dispositif de décharge sera réalisé sans augmentation de la dépense publique, grâce à une présence accrue des professeurs des écoles stagiaires dans les classes. Comme vous le constatez, là encore, nous travaillons, dans la concertation, à améliorer à la fois le fonctionnement de l'école et la formation pratique des maîtres. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur de la commission des affaires culturelles. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui en deuxième lecture est issue d'une initiative sénatoriale, puisque j'avais eu l'honneur de vous la présenter avec notre président Jacques Valade. Par ailleurs, notre collègue Annie David et le groupe CRC avaient déposé une proposition de loi ayant le même objet.

La Haute Assemblée a adopté ce texte à l'unanimité lors de son examen en première lecture, le 27 octobre dernier. Son article unique initial tend à modifier une disposition introduite par la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école du 23 avril 2005, interdisant aux délégués départementaux de l'éducation nationale, chargés de l'inspection des écoles primaires, d'exercer leur mission dans leur commune ou arrondissement de résidence.

Cette mesure, bien que guidée par un souci d'impartialité, s'est avérée poser des difficultés d'application pour ces personnes exerçant à titre bénévole, très attachées à la dimension de proximité de leur mission.

Afin de répondre aux fortes inquiétudes dont nous ont fait part les délégués, tout en apportant les nécessaires garanties de neutralité à leurs fonctions, l'article 1er de la présente proposition de loi limite aux seuls DDEN ayant un mandat municipal l'interdiction d'exercer sur le territoire de la commune dans laquelle ils sont élus, ou dans les écoles au fonctionnement desquelles cette commune participe.

Lors de l'examen de ce texte en séance publique à l'Assemblée nationale le 5 avril dernier, les députés ont salué l'opportunité et la pertinence d'une telle modification et l'ont, eux aussi, approuvée à l'unanimité. Toutefois, sur l'initiative du Gouvernement, ils ont complété la proposition de loi par un nouvel article 2, qui, sans être directement lié au premier, tend, de même, à améliorer le fonctionnement quotidien des écoles et à y renforcer la présence des adultes.

Cette disposition technique tend à sécuriser, au plan juridique, le recrutement des emplois vie scolaire destinés à exercer dans les écoles. En effet, comme ces dernières n'ont pas de personnalité juridique propre, elles ne peuvent procéder directement à ces recrutements et doivent passer par l'intermédiaire d'un collège ou lycée du secteur.

C'est pourquoi l'article 2 prévoit, sur le modèle de la disposition déjà en vigueur pour les assistants d'éducation, que les personnes recrutées sur la base de contrats aidés peuvent exercer leurs fonctions soit dans l'établissement qui les a recrutées, soit dans un ou plusieurs autres établissements, soit dans une ou plusieurs écoles. Dans ce dernier cas, les directeurs d'école concernés peuvent participer à la procédure de recrutement, afin de répondre au mieux à leurs besoins.

Je rappelle que les emplois vie scolaire ont fait leur entrée dans les établissements scolaires en septembre dernier, dans le cadre de la relance des contrats aidés prévue par le plan de cohésion sociale.

Ils sont recrutés par les établissements publics locaux d'enseignement sur la base de contrats d'accompagnement dans l'emploi ou de contrats d'avenir, pour un service de 20 à 26 heures hebdomadaires. Leur rémunération est financée à 90 % par le ministère de l'emploi et à 10 % par le ministère de l'éducation.

Les emplois vie scolaire, au nombre de 45 000, sont présents dans les établissements scolaires depuis septembre dernier : 20 000 nouveaux contrats se sont ajoutés aux 25 000 contrats emploi solidarité et contrats emploi consolidé existant déjà, qui ont été renouvelés. Ils contribuent notamment à apporter un appui technique et à renforcer l'encadrement des élèves.

Seuls près de 8 000 titulaires d'emplois vie scolaire exercent aujourd'hui dans les écoles, où ils apportent néanmoins une aide précieuse aux directeurs et aux équipes éducatives, pour les assister dans les tâches administratives, matérielles et d'accueil pour l'accompagnement des élèves handicapés, pour l'aide à l'utilisation des nouvelles technologies ou pour le fonctionnement des bibliothèques.

L'adoption de l'article 2 de la présente proposition de loi est aujourd'hui nécessaire pour accompagner la montée en charge de ce dispositif en apportant toute la garantie juridique nécessaire aux chefs d'établissement et à leurs agents comptables procédant aux recrutements.

En effet, afin de renforcer leurs effectifs dans les écoles, vous avez annoncé, monsieur le ministre, au mois d'avril dernier, le recrutement de 50 000 emplois vie scolaire supplémentaires, soit environ un par école.

Cette mesure ambitieuse, qui vise à améliorer le fonctionnement des écoles, s'inscrit dans le cadre d'un protocole d'accord qui devrait permettre de mettre un terme à plus de sept ans de grève administrative des directeurs d'école.

Beaucoup d'entre nous avaient d'ailleurs souligné, au moment de l'examen de la loi d'orientation pour l'avenir de l'école, l'urgence de parvenir à des avancées sur la situation des directeurs d'école, dont les conditions de travail se sont considérablement alourdies ces quinze dernières années. Je crois que nous pouvons donc nous réjouir des fruits de la concertation que vous avez engagée, monsieur le ministre.

Je vous demanderai, par ailleurs, de nous présenter, par exemple au moment du débat budgétaire, un bilan sur le recrutement des emplois vie scolaire dans les écoles, sur les fonctions qui leur sont confiées, mais aussi sur l'avenir de ces personnes au terme de leur contrat.

L'objectif est en effet de parvenir à un dispositif « gagnant-gagnant » entre les écoles et ces personnels en répondant, d'une part, à des besoins au service de l'amélioration de la qualité de vie de nos enfants et, d'autre part, en faisant de ces contrats un véritable tremplin vers l'emploi durable.

Certains d'entre nous auraient certes préféré en rester au texte de la proposition de loi initiale, qui avait été approuvé à l'unanimité par les deux assemblées. Toutefois, je vous propose, mes chers collègues, de nous rallier à la disposition introduite sur l'initiative du Gouvernement, qui permet de renforcer et de sécuriser la présence d'adultes dans les établissements scolaires. Telle est la finalité sur laquelle nous nous rejoignons.

Pour cette raison, la commission des affaires culturelles a adopté l'article 2 sans modification. Elle vous demande de sceller ainsi l'adoption définitive de cette proposition de loi, afin de ne pas retarder, d'une part, l'application des dispositions relatives aux délégués départementaux de l'éducation nationale et de permettre, d'autre part, de procéder au plus tôt aux recrutements des emplois vie scolaire dans les écoles, sur une base juridique ainsi clarifiée. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :

Groupe socialiste, 14 minutes ;

Groupe Union centriste-UDF, 8 minutes ;

Groupe communiste républicain et citoyen, 7 minutes ;

Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 6 minutes.

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Yannick Bodin.

M. Yannick Bodin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, errare humanum est ! Le bon sens l'aura enfin emporté ; il était temps ! Car il était urgent de rassurer les DDEN et, surtout, de revenir sur une décision législative qui condamnait, à terme, leur existence et qui faisait porter la suspicion sur 40 000 bénévoles, dévoués corps et âme à leur mission, la défense de l'école et l'épanouissement des jeunes élèves.

Le DDEN n'a pas pour seule mission, vous le savez, de visiter l'école. Membre de droit du conseil d'école, il participe à tous les aspects de la vie scolaire, restauration, commission de sécurité, soutien scolaire, etc.

L'application de l'article 40 de la loi Fillon aurait eu pour effet de provoquer la démission d'un grand nombre de délégués, qui se seraient trouvés dans l'impossibilité d'effectuer leur mission ou d'intervenir sur des territoires qui ne leur auraient pas été familiers. Or la dimension de proximité est une condition indispensable à la qualité de l'exercice de leur fonction.

L'une des forces des DDEN réside principalement dans la défense des enfants - ils assurent en particulier leur sécurité dans et aux abords des écoles et des locaux périscolaires - dans la médiation, si nécessaire, entre les membres des équipes éducatives, ainsi que dans leur bonne connaissance du terrain et des partenaires, en particulier des familles, avec lesquelles ils ont tissé des liens de proximité.

Grâce à la modification de l'article 40, les délégués départementaux de l'éducation nationale pourront poursuivre leur mission de service public dans les écoles et dans tous les domaines de leurs compétences. L'accompagnement laïque et vigilant des DDEN tout au long du difficile et rigoureux apprentissage des enfants est acquis par les bénévoles qui se sont engagés pour la formation des futurs citoyens.

Les DDEN jouent d'autant plus leur rôle de médiation qu'ils connaissent bien les situations et sont bien connus des partenaires éducatifs concernés.

Depuis 1850, les DDEN ont notamment pour mission de surveiller le respect par les instituteurs, aujourd'hui professeurs des écoles, du principe de laïcité inhérent à leur fonction. Actuellement, le code de l'éducation leur confie l'exercice de « l'inspection des établissements d'enseignement du premier degré publics ou privés ».

Ils sont investis d'une mission de surveillance des écoles maternelles et élémentaires publiques et privées. Cette surveillance s'exerce dans les domaines de la salubrité et de la sécurité, y compris pour les logements des maîtres, en particulier pour le chauffage, l'éclairage, le mobilier scolaire, la bibliothèque.

Le DDEN est également compétent sur toute la question relative à l'utilisation des locaux scolaires en dehors des heures de classe. À cette fin, le DDEN bénéficie d'un droit de visite de l'ensemble des locaux scolaires. Il participe comme membre de droit aux conseils d'école, à l'animation du centre de loisirs, de la cantine, de la bibliothèque. Il sert d'interface entre l'école et la municipalité.

La fédération des DDEN regroupe 40 000 bénévoles par le biais des 95 unions départementales, auxquels notre devoir est, ici, de rendre hommage.

J'ajoute que les DDEN portent une attention particulière aux violences et aux maltraitances en milieu scolaire. Ils préconisent en priorité l'enseignement ou le rappel permanent des valeurs républicaines et citoyennes - le respect d'autrui, des règles de vie en société, des institutions démocratiques -, une formation plus complète des équipes éducatives, un dialogue permanent entre l'école et les familles, ainsi que la mise en place de réelles voies de réussite pour chaque enfant.

Ce rôle est irremplaçable et n'a d'efficacité que dans un rapport de proximité avec l'école et avec les familles. En d'autres termes, le meilleur DDEN est celui qui réside le plus près de l'établissement scolaire qu'il visite.

La proposition de loi que nous examinons en deuxième lecture ne fait donc que lever une incompréhension et traduit tout simplement la victoire du bon sens. C'est la raison pour laquelle je me réjouis de la modification de l'article 40 et je suis satisfait par la rédaction de l'article 1er. Le fait que les DDEN, lorsqu'ils exercent un mandat communal, ne puissent intervenir dans les écoles situées sur le territoire de la commune dans laquelle ils sont élus, ni dans les écoles au fonctionnement desquelles cette commune participe a fait l'objet d'un consensus, y compris de la part des intéressés.

En revanche, monsieur le ministre, je ne partage pas votre sentiment en ce qui concerne l'article 2. Sans entrer dans un débat sur le fond dans l'immédiat, cet article n'a selon moi rien à voir avec les DDEN ; j'y reviendrai. Certes, monsieur le ministre, tout amendement en rapport avec la vie scolaire peut intéresser les DDEN, mais c'est également le cas de tout article portant sur l'éducation nationale ! Bref, il s'agit d'un « cavalier » bien vivant, pour quelques instants encore seulement, du moins je l'espère ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. Georges Mouly.

M. Georges Mouly. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons comporte deux volets, les DDEN et les conditions de travail des directeurs d'école.

La fonction des DDEN est étroitement liée à l'histoire de l'école. Missions de parrainage, de surveillance ; magistrats aux moeurs, puis charge réservée aux ecclésiastiques, puis encore, au fil du temps, comité de charité, devenu comité de surveillance. En 1833, apparaît le terme de délégué ; en 1850, ce sont les délégations cantonales, auxiliaires de l'administration et des pouvoirs civils et religieux. En 1886, le délégué cantonal va contribuer à l'enracinement de l'école publique dans le pays, véritable ancêtre des DDEN. Le délégué départemental de l'éducation nationale est finalement institué en 1969.

Ainsi, me semble-t-il, le souci du bon fonctionnement de l'école est porté de longue date, même si bien des étapes évoquées dans ce bref rappel historique sont fort éloignées de la laïcité à laquelle nous tenons tant aujourd'hui.

La mission actuelle des DDEN est des plus nobles ; elle connaîtra, grâce à ce texte, une heureuse et nécessaire stabilité, par-delà les éventuelles réformes.

En résumé, l'école de la République et les générations qui y reçoivent instruction et éducation sont des bénéficiaires satisfaits de l'attention vigilante que portent les DDEN au bon fonctionnement de la maison éducation : surveillance des locaux scolaires, sécurité, chauffage, éclairage, mobilier scolaire, matériel d'enseignement, hygiène, fréquentation scolaire, centre de loisirs, transport, restaurant, caisse des écoles, bibliothèque, mission d'incitation, de coordination, amélioration des relations entre l'école et la municipalité. Veuillez me pardonner cette énumération, mais elle reflète une heureuse réalité.

Les DDEN se sont d'ailleurs manifestés récemment dans mon département, porteurs du souci de l'intégration du jeune handicapé en milieu scolaire.

Nous sommes là précisément au coeur du sujet : le travail de proximité, concret, demandé aux DDEN, la connaissance du terrain facilitant leur mission. C'est pourquoi la limitation du champ d'intervention des délégués exerçant un mandat municipal, en excluant les écoles situées sur le territoire de la commune dans laquelle ils sont élus, est bienvenue.

L'article 2 de la proposition de loi tend à améliorer le fonctionnement des écoles en permettant à leur directeur et aux enseignants de recourir plus facilement à des personnes recrutées par des contrats aidés ; vous aviez annoncé leur nombre, monsieur le ministre, voilà quelque temps.

Cette mesure renforcera la présence d'adultes dans les écoles pour encadrer les élèves, chacun peut s'en féliciter. Ces personnels apportent une aide précieuse au directeur d'école et aux équipes éducatives en leur permettant de passer plus de temps à leur mission essentielle, l'enseignement. Cela me semble une évidence. Ils sont chargés de l'accueil des élèves, de l'accompagnement des élèves handicapés, de l'aide aux tâches administratives, de la surveillance, de l'encadrement des sorties scolaires, de l'aide à la documentation, à l'animation des activités culturelles, artistiques, sportives.

Je crois comme vous, monsieur le ministre, que cette proposition de loi est bénéfique pour les élèves, pour l'insertion des emplois vie scolaire, ainsi que pour les directeurs d'école et les enseignants.

J'ai noté dans un hebdomadaire les propos suivants : « Les directeurs d'école, loin d'avoir une fonction enviable, ne croient pas aux recettes miracles. La proposition ministérielle ne répond pas du tout, au contraire, aux revendications des directeurs d'école [...]. »

Contrairement à cette citation, je veux croire fermement que les directeurs, mais aussi les enseignants, sauront voir dans cette mesure la reconnaissance de leur travail, l'aide dont ils pourront bénéficier en la circonstance leur permettant de consacrer plus de temps à leurs missions.

La proposition de loi en deux volets qui nous est soumise aujourd'hui est donc d'un intérêt certain. Elle n'a d'autre objet que l'amélioration du fonctionnement des écoles. C'est pourquoi le groupe du RDSE lui apportera son soutien. (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'UC-UDF et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c'est avec satisfaction, vous n'en serez pas étonnés, que je constate l'unanimité sur l'article 1er de cette proposition de loi, qui corrige, comme nous l'avions indiqué en première lecture, une incohérence mettant en péril la fonction précieuse et nécessaire pour l'école de la République des DDEN, les délégués départementaux de l'éducation nationale.

Je tiens d'ailleurs à saluer ici la grande réactivité de ce corps de la communauté éducative, qui, dès le lendemain de l'adoption de l'article 40 de la loi Fillon, m'a interpellée à ce sujet, comme bon nombre de mes collègues parlementaires. Notre groupe avait d'ailleurs déposé une proposition de loi sur ce thème dès le mois de juillet 2005.

Chacun s'accorde à reconnaître l'apport indispensable des DDEN, historiquement liés à l'école publique et laïque ; ils assurent une fonction essentielle, tant par la diversité de leurs missions que par leur engagement citoyen.

Ces délégués portent attention à tout ce qui contribue, sur le plan matériel, à la qualité de la vie scolaire. En outre, leur rôle d'animateur et de personne ressource dans et autour de l'école n'est plus à démontrer, dans l'intérêt de l'école publique et laïque, afin de la rendre plus accueillante et efficace, pour le mieux-être des enfants.

Leur apport est d'autant plus indispensable que ce sont des acteurs de proximité, mieux à même d'appréhender l'environnement socio-économique dans lequel se situe l'école. Dissocier le lieu d'exercice de la fonction du lieu de résidence revenait à nier la dimension intrinsèque de proximité attachée à leurs missions.

Toutefois, si je me félicite de l'unanimité sur l'article 1er, je tiens à manifester mon profond mécontentement, ma colère même, quant à l'article 2, inséré par voie d'amendement par le Gouvernement. Celui-ci est l'illustration parfaite du « cavalier gouvernemental », même si le ministre, puis le rapporteur ont tenté avec habileté, dans la discussion générale, de trouver un lien avec le texte.

Adopté à la sauvette à l'Assemblée nationale, cet article permet au Gouvernement d'asseoir juridiquement le recrutement avec des contrats aidés en l'élargissant aux écoles.

Si les collèges et les lycées, en tant qu'établissements publics locaux d'enseignement, ont la personnalité juridique ainsi que l'autonomie administrative et financière leur permettant de procéder directement à ces recrutements, cela n'est pas le cas des écoles, dépourvues de personnalité juridique propre.

Monsieur le ministre, à vouloir réformer à tout prix, vous confondez vitesse et précipitation. Aussi vos mesures restent inappliquées et vous devez les corriger par ce type de subterfuge !

Cette proposition de loi avait d'ailleurs initialement avec son article unique le même objet, qui était de corriger un article voté dans la précipitation et sans aucune concertation avec les principaux intéressés, comme je l'ai dit précédemment !

Cette pratique, qui tend à devenir coutumière, non seulement traduit un mépris total du travail parlementaire, et donc des représentants du peuple français, mais également illustre pour cette occasion le peu d'égard du Gouvernement envers les DDEN.

De plus, elle nous paraît dangereuse pour la démocratie !

Lorsqu'il s'agit de mettre en oeuvre sa politique, le gouvernement auquel vous appartenez s'arroge le droit d'utiliser tous les artifices procéduriers. Mais, lorsqu'il s'agit d'obtenir des avancées sociales majeures, il fait preuve d'une soudaine et rigide déontologie !

J'en veux pour preuve le débat sur le projet de loi pour l'égalité des chances où nombre de nos amendements ont été rejetés, tant par la commission des affaires sociales du Sénat que par le Gouvernement, sous le prétexte fallacieux qu'ils étaient des cavaliers législatifs.

Ainsi, notre amendement tendant à accorder le droit de vote aux étrangers pour les élections locales a été déclaré irrecevable. Pourtant, cette mesure allait vers plus d' « égalité des chances », pour reprendre votre expression, et avait donc un lien direct avec le texte !

Pour mon groupe, cet article que vous nous proposez, monsieur le ministre, est condamnable non seulement sur la forme, mais également sur le fond.

Le présent « cavalier » est un cheval de Troie à peine camouflé, un coup de bélier supplémentaire contre le code du travail !

Ces contrats que vous nous proposez pour l'embauche des personnels en emploi vie scolaire sont soit des contrats d'avenir, soit des contrats d'accompagnement dans l'emploi, les CAE, qui, dans le domaine de la précarité, font office de figure de proue !

Je vous rappelle à ce sujet notre opposition totale à ces dispositifs.

Lors de la discussion du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale instituant ces contrats, nous avions proposé la création d'un contrat unique suffisamment souple pour s'adapter aux situations individuelles, mais aussi très exigeant en termes d'accompagnement, de formation, d'insertion dans l'emploi stable ou de droits sociaux, afin de répondre aux besoins des personnes, et pas seulement, comme le conçoit le Gouvernement, « en fonction de la situation du marché du travail local » !

En ce qui concerne le présent texte, ces contrats répondent pour partie aux besoins des écoles en permettant aux directrices et aux directeurs d'envisager ces embauches de manière pérenne pour leur équipe éducative et aux personnes embauchées de bénéficier d'un emploi stable et formateur afin d'appréhender leur avenir plus sereinement.

Bien évidemment, ces emplois ne peuvent pas, à eux seuls, subvenir aux emplois qualifiés demandés par les chefs d'établissements.

Finalement, l'objectif non avoué de cet article 2 n'est-il pas pour le Gouvernement, et particulièrement pour M. Borloo, de sortir de l'échec de ces contrats d'avenir en « mettant le paquet », si vous me permettez l'expression, sur les établissements scolaires ?

En effet, je rappelle que seuls 13 500 contrats d'avenir ont été signés à la fin de l'année 2005, alors que la loi de programmation pour la cohésion sociale avait fixé un objectif de 185 000 contrats d'avenir !

Pour ces raisons, le groupe CRC conditionnera son vote au sort qui sera réservé à notre amendement tendant à supprimer l'article 2. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. Jean Boyer.

M. Jean Boyer. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, attendue par toute la communauté éducative, la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école a malheureusement abouti à certaines incohérences, dont l'une pouvait, à terme, conduire à la disparition des délégués départementaux de l'éducation nationale.

L'amendement portant sur les délégués départementaux de l'éducation nationale s'inscrivait dans une logique louable, mais tendait à répondre à une situation purement locale. On le sait, ces personnes, bénévoles et volontaires, contribuent pour beaucoup à la bonne marche des établissements scolaires.

Apparus au début des années quatre-vingt comme les derniers hussards de la IIIe République, les délégués départementaux de l'éducation nationale ont repris toute leur importance avec leur entrée dans les conseils d'école.

En effet, non contents de s'assurer de l'état des locaux et de la bonne marche de l'établissement, ils jouent désormais un véritable rôle de modération et de médiation.

Souvent retraités, les délégués ont une expérience et une sagesse qui leur permet d'aplanir les difficultés pouvant surgir entre les enseignants et les parents d'élèves, entre les parents d'élèves et la municipalité, entre la municipalité et les enseignants.

Nous pouvons en particulier compter sur eux pour être très attentifs au respect de la loi du 15 mars 2004 encadrant, en application du principe de laïcité, le port de signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les écoles, collèges et lycées publics.

Leur capacité de médiation et de soutien peut ainsi être requise par les enseignants, les municipalités ou les parents d'élèves. Ils ont donc su s'adapter aux enjeux actuels, en maintenant l'esprit et les traditions laïques qu'ils représentent.

C'est pourquoi je me félicite que la proposition faite par le rapporteur, M. Jean-Claude Carle, de circonscrire les lieux d'intervention des délégués départementaux de l'éducation nationale exerçant un mandat électif municipal ait été adoptée à l'unanimité, et dans les mêmes termes que le Sénat, par nos collègues députés.

Il est souhaitable que le délégué ne soit pas partie prenante dans les affaires de la commune dont il inspecte les écoles, car il ne serait pas sain que d'autres intérêts que ceux de l'école et de l'ensemble de la communauté éducative puissent entrer en jeu.

Ainsi, l'interdiction faite aux élus municipaux d'occuper un poste de délégué départemental dans les communes ou dans les établissements publics de coopération intercommunale qu'ils représentent apporte une plus grande garantie de neutralité, au service de l'intérêt de l'école, compte tenu de l'exigence qui pèse sur eux dans l'exercice de leur mission.

J'en viens maintenant au nouvel article 2, adopté par l'Assemblée nationale sur l'initiative du Gouvernement.

Cette disposition technique tend à faciliter le recours à des personnes recrutées sur la base de contrats aidés dans les écoles.

Les écoles n'ont pas le statut d'établissement public et, à ce titre, n'ont pas de personnalité juridique propre. Elles ne peuvent donc procéder directement à des recrutements, qui sont effectués par les chefs d'établissement des collèges et des lycées du secteur.

Ainsi, sur les 45 000 personnes recrutées en emploi vie scolaire depuis la rentrée dernière, seules 8 000 personnes environ exercent leurs fonctions dans des écoles. Il est donc nécessaire d'apporter une base juridique claire à l'affectation des emplois vie scolaire dans les écoles.

Le groupe UC-UDF, au nom duquel je m'exprime, monsieur le ministre, est favorable à ce dispositif, comme il l'était à celui qui est applicable au recrutement des assistants d'éducation.

En outre, je me félicite que la généralisation de ce dispositif - vous avez annoncé, monsieur le ministre, la création de 50 000 nouveaux contrats emploi vie scolaire, soit un emploi par école - puisse aider à trouver un accord sur la direction d'école et mettre ainsi fin à près de dix ans de conflits et à sept ans de grève administrative.

C'est pourquoi le groupe UC-UDF votera ce texte. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...

La discussion générale est close.

La parole est à M. le ministre.

M. Gilles de Robien, ministre. Monsieur le rapporteur, je vous remercie d'avoir montré l'utilité de l'article 2, qui contribuera au bon fonctionnement de l'école, comme le font les DDEN.

Vous m'avez suggéré de présenter à la commission un bilan sur le recrutement des emplois vie scolaire. Je m'y engage, car le Gouvernement est à la disposition du Parlement.

Il m'apparaît tout à fait souhaitable que la Haute Assemblée connaisse les résultats de ces recrutements, qu'il s'agisse de la ventilation des EVS et de leur utilité pour le bon fonctionnement de l'école.

Monsieur Bodin, vous avez parlé de bon sens, et vous avez raison. C'est le bon sens qui justifie l'aménagement législatif proposé pour l'exercice des missions des DDEN. C'est également lui qui justifie que l'on conforte le fondement juridique apporté par cette proposition de loi pour le recrutement des bénéficiaires des contrats aidés au profit des écoles.

Ce texte, vous le savez, vient enfin combler une lacune qui existe, mesdames, messieurs les sénateurs, depuis 1997. Je me permets de vous rappeler, par exemple, que les recrutements des emplois-jeunes faits depuis cette date n'offraient pas les garanties juridiques nécessaires. Cette faiblesse disparaîtra grâce à l'article 2. Je réponds ainsi également aux remarques de Mme David.

Si cette proposition de loi est adoptée, des garanties seront apportées aux directeurs d'école, mais aussi aux personnes recrutées pour ces emplois, dont le caractère précaire est parfois dénoncé. À défaut des fondements juridiques institués par l'article 2, ces emplois seraient encore plus précaires.

Monsieur Mouly, je vous remercie de la présentation que vous avez faite du rôle des DDEN. Je partage évidemment cette défense et je m'y associe volontiers.

En ce qui concerne l'article 2, vous avez eu raison de le souligner, le recrutement des EVS sera apprécié des directeurs d'école, qui me l'ont d'ailleurs déjà fait savoir. Ce point a été essentiel pour l'obtention de leur signature au bas d'un document que j'ai paraphé avec eux la semaine dernière afin de faire cesser une grève qui durait depuis sept ans.

Mme Nicole Bricq. Oh, de plus de sept ans !

M. Gilles de Robien, ministre. Certes, le conflit date de dix ans, mais la grève a formellement commencé il y a sept ans ! Bien des ministres se sont succédé sans réussir, malgré toute leur bonne volonté et leur talent, à y mettre un terme.

Un des arguments forts a été de dire que l'on apportait une aide aux directeurs, car le cumul des fonctions administratives et d'enseignement devenait parfois insupportable. Ces recrutements viendront les soulager et leur permettront d'être plus à l'aise dans leurs fonctions administratives.

Madame David, j'espère avoir levé vos doutes et répondu, du moins en partie, à votre question. J'ai l'impression, à voir votre sourire, que vous allez maintenant voter en faveur de l'article 2 ! (Sourires.)

Je rappelle que cet article 2 ne mérite pas votre colère passagère à cette tribune.

Mme Annie David. Elle n'est pas passagère !

M. Gilles de Robien, ministre. Cet article est destiné à apporter - c'est son objectif premier - une aide aux directeurs d'école.

De plus, il est destiné à apporter une garantie supplémentaire à des personnes qui, aujourd'hui, disposent de minima sociaux. Demain, ces personnes auront un salaire et une vraie justification sociale.

Mme Annie David. Alors, embauchez des personnels de l'éducation nationale !

M. Gilles de Robien, ministre. Madame David, écoutez ma réponse ! De la sorte, vous serez encore plus convaincue dans un instant !

Par ailleurs, vous dénoncez la rapidité du vote intervenu à l'Assemblée nationale. Or l'amendement du Gouvernement que j'ai présenté et visant à introduire cet article 2 a été discuté longuement devant les députés. Je me tiens aujourd'hui à la disposition du Sénat pour en faire autant.

Quoi qu'il en soit, madame la sénatrice, si vous en voyez l'utilité et si vous pensez qu'il s'agit d'un cavalier législatif, n'hésitez pas, le cas échéant, à faire un recours devant les instances prévues à cet effet !

Mme Annie David. Je n'y manquerai pas !

M. Gilles de Robien, ministre. De la sorte, vous mesurerez l'effet d'une telle démarche sur les directeurs d'école !

De plus, vous montrerez très clairement urbi et orbi que vous ne partagez pas notre souci d'aider les directeurs d'école. Mais je doute, madame la sénatrice, qu'il n'y ait pas sur ce sujet un consensus entre nous !

Monsieur Boyer, je vous sais gré d'avoir largement approuvé les deux mesures contenues dans cette proposition de loi. Comme vous l'avez souligné, le rôle de médiation et de soutien est utile à l'école. Cette proposition de loi permet justement de le conforter.

Je me réjouis également de votre soutien à l'amélioration du fonctionnement des écoles, rendue possible grâce au recrutement des emplois vie scolaire.

Ces recrutements menés à la fin de l'année 2005 se sont révélés tout à fait pertinents et utiles. Les directeurs d'école, je vous l'assure, éprouvent un immense soulagement à l'idée de pouvoir en bénéficier.

De plus, ces jeunes, aujourd'hui dans l'incertitude, voire dans l'assistance, auront demain une vraie utilité sociale dans le plus beau des milieux, le milieu scolaire !

M. le président. Nous passons à la discussion des articles.

Je rappelle que, aux termes de l'article 42, alinéa 10, du règlement, à partir de la deuxième lecture au Sénat des propositions de loi, la discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux chambres du Parlement n'ont pas encore adopté un texte identique.

Discussion générale
Dossier législatif : proposition de loi relative aux délégués départementaux de l'éducation nationale
Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 2

L'article L. 421-10 du code de l'éducation est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les personnes recrutées par les établissements publics locaux d'enseignement dans le cadre d'un des contrats prévus à la section 1 du chapitre II du titre II du livre III du code du travail peuvent exercer leurs fonctions dans l'établissement qui les a recrutées, dans un ou plusieurs autres établissements ainsi que, compte tenu des besoins, dans une ou plusieurs écoles. Dans ce dernier cas, les directeurs d'école peuvent participer à la procédure de recrutement. »

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 1 est présenté par Mme David, MM. Ralite,  Renar,  Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

L'amendement n° 2 est présenté par MM. Lagauche,  Bodin et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 1.

Mme Annie David. Le présent amendement vise à supprimer le « cavalier » qui a été introduit par le Gouvernement, et ce tant par égard pour les DDEN que pour le fonctionnement démocratique de notre Haute Assemblée. Au-delà de la procédure utilisée, cet article est condamnable sur le fond - j'y insiste, monsieur le ministre, car vous ne m'avez pas convaincue -,....

M. Gilles de Robien, ministre. Pas encore !

Mme Annie David. ... dans la mesure où il institue la précarité dans les établissements scolaires par le recours aux contrats d'avenir et aux contrats d'accompagnement dans l'emploi.

Comme je viens de le dénoncer il y a un instant, ce fameux CA est un contrat à durée déterminée de deux ans avec un temps partiel de vingt-six heures hebdomadaire. Payé au SMIC, il est destiné aux personnes disposant depuis au moins six mois de minima sociaux.

Quant au CAE, il s'agit également d'un contrat à durée déterminée et à temps partiel, mais sa durée minimale est de six mois, renouvelable deux fois dans la limite de vingt-quatre mois. Il est destiné aux personnes sans emploi rencontrant des difficultés particulières en matière d'accès à l'emploi.

Les syndicats de l'éducation nationale, notamment celui des instituteurs et des professeurs des écoles, ont d'ailleurs fortement condamné et dénoncé ces contrats Borloo.

En dépit de vos assertions, monsieur le ministre, ces emplois précaires ne répondent ni aux besoins des jeunes ni aux attentes de la communauté éducative en matière de créations d'emplois statutaires et permanents. En ce qui concerne les jeunes, c'est tout simplement leur droit à l'avenir que vous supprimez.

Après les révoltes des banlieues et l'extraordinaire mobilisation des jeunes et des moins jeunes contre le CPE, vous vous entêtez à cultiver « les raisins de leur colère » en créant de nouvelles formes de précarité.

Les jeunes aspirent à mener une vie digne, à se projeter dans l'avenir, ce qui nécessite la stabilité de l'emploi, grâce à un statut garantissant leurs droits contre tout abus, et un salaire correct. Vous leur proposez tout le contraire !

Vous avez évoqué le protocole d'accord qui est intervenu à la suite de la grève administrative des directeurs et des directrices d'école. Je vous rappelle qu'un seul syndicat a accepté de le signer. Si de nombreux partenaires de la communauté éducative présents autour de la table ont refusé d'apposer leur signature, c'est en raison notamment de la nature juridique des EVS.

Alors que la communauté éducative s'est mobilisée contre le CPE, les syndicats ne peuvent accepter cette autre forme de précarité. Non seulement ces emplois sont intrinsèquement précaires, mais également ils ne requièrent aucune qualification à l'embauche. Or pour assurer des tâches administratives, pour s'occuper d'enfants, pour encadrer des animations, il est nécessaire d'avoir recours à du personnel qualifié. Là où il faudrait des emplois stables avec des personnels formés et qualifiés, vous instaurez un dispositif des plus précaires !

Par ailleurs, l'importante rotation de personnels qu'implique le recours à ces contrats conduira inéluctablement à la rupture de la continuité éducative, qui est pourtant essentielle. Par exemple, comment mettre en place un projet d'école qui s'étale sur plusieurs années ?

Outre les risques relatifs à la stabilité de l'équipe éducative, le recours direct à ce type de contrats par les chefs d'établissement alourdira leurs tâches administratives. De quelles aides pourront-ils disposer s'il leur faut recruter et former du personnel tous les six mois ? Sans compter que nous ne pouvons ignorer la pression locale, dont vous ne nous avez pas parlé, monsieur le ministre !

Vous « transformez » les chefs d'établissement scolaire en directeurs des ressources humaines, alors qu'ils n'aspirent qu'à gérer leur établissement dans un souci pédagogique. Ce prétendu cadeau que vous leur offrez est bel et bien empoisonné. Bien évidemment, toutes ces désastreuses incidences valent aussi pour les collèges et pour les lycées.

La création de ces « emplois vie scolaire » s'inscrit dans un contexte marqué par la suppression massive de postes d'enseignants, de personnels administratifs, de MI-SE, qui n'ont pas été remplacés poste pour poste par les assistants d'éducation.

Ces emplois ne renforceront pas l'équipe éducative, contrairement à ce que vous prétendez. Leur rôle consistera à accomplir des tâches relevant normalement d'agents statutaires, qui sont de moins en moins nombreux.

Cet article, outre le fait qu'il illustre la procédure du « cavalier » telle qu'elle est utilisée par le Gouvernement, ne répond donc ni aux besoins des jeunes ni aux attentes des équipes et des personnels de l'éducation nationale.

En conséquence, mes chers collègues, je vous demande de bien vouloir adopter notre amendement de suppression. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. Yannick Bodin, pour présenter l'amendement n° 2.

M. Yannick Bodin. Lors de l'examen de la proposition de loi à l'Assemblée nationale, le Gouvernement a introduit un article sans aucun objet avec celui du texte en débat. Le procédé n'est pas nouveau, puisque le terme de « cavalier » est malheureusement assez couramment employé. Il est vrai que cela permet d'éviter de passer sous les fourches caudines du Conseil d'État. Quoi qu'il en soit, cet article vient surtout polluer le débat sur les DDEN, qui était par ailleurs consensuel.

L'article que nous souhaitons supprimer tend à entériner la pratique du recours à des contrats, sans cesse plus précaires, pour les fonctions annexes à celles d'enseignement dans les établissements publics locaux d'enseignement, fonctions dites de « vie scolaire » et dévolues aux assistants d'éducation.

Permettez-moi de vous rappeler, monsieur le ministre, comme nous l'avions déjà dit à votre prédécesseur, que nous comprenons vraiment de moins en moins la raison qui a poussé le Gouvernement à se précipiter dès sa nomination à supprimer les emplois-jeunes dans les établissements scolaires, d'autant qu'il est aujourd'hui obligé de faire petit à petit marche arrière afin d'essayer de regagner le terrain perdu.

Pour prévenir votre argument habituel,...

M. Yannick Bodin. ... je vous signale que les emplois-jeunes ne pouvaient pas être qualifiés de « précaires », puisque, vous le savez bien, 80 % des jeunes qui ont été employés dans ce cadre ont trouvé un emploi stable et qualifié et souvent dans un délai inférieur à cinq ans.

M. Yannick Bodin. Aujourd'hui, sous couvert d'octroyer un fondement juridique aux embauches effectuées par les directeurs des écoles - qui n'ont pas le statut d'établissement public, et donc pas de personnalité juridique - afin de pourvoir les 7 400 emplois nécessaires, on procède à une révision à la baisse des conditions de travail des titulaires de 25 000 des 45 000 emplois officiellement affectés à la « vie scolaire » en 2006.

Les anciens 25 000 contrats emploi-solidarité - les CES - et contrats emplois consolidés - les CEC -, qui servaient à recruter des assistants d'éducation, ont été transformés en contrats d'accompagnement dans l'emploi et en contrats d'avenir. Le temps de travail hebdomadaire des titulaires de ces contrats est ainsi passé de trente heures pour les CEC à vingt heures pour les CAE, puis à vingt-six heures pour les CA. En conséquence, la rémunération a été revue à la baisse : 857 euros par mois précédemment, contre 561,70 euros pour vingt heures en CAE, ce qui constitue un réel retour sur des droits acquis.

Voilà encore des CDD précaires qui s'inscrivent dans la politique globale de précarisation de l'emploi menée par le Gouvernement !

Il y a aussi beaucoup à dire sur la destination et sur l'utilisation de ces contrats par les établissements.

D'abord, aucun contour précis des emplois n'est arrêté. Les EVS sont recrutés pour les fonctions suivantes : aide aux élèves handicapés, assistance administrative, aide à l'accueil, à la surveillance et à l'encadrement des élèves, participation à l'encadrement des sorties scolaires, aide à la documentation, à l'animation des activités culturelles, artistiques ou sportives ou à l'utilisation des nouvelles technologies, etc. Attention, je ne fais que citer les tâches énumérées par le rapport ! Autant dire que les fonctions exercées sont multiples et qu'elles demandent une formation ad hoc. Par exemple, l'aide aux élèves handicapés réclame à l'évidence une formation pointue.

Ensuite, je suis très préoccupé par le fait que l'article que l'on nous demande d'adopter permette aux chefs d'établissement de « mutualiser » leurs moyens humains en se partageant les personnes recrutées sur de tels contrats « compte tenu des besoins [...], dans une ou plusieurs écoles ».

Quelles sont les conditions de travail qui attendent les titulaires des contrats affectés : une heure dans tel établissement pour de la maintenance informatique, une heure dans tel autre pour surveiller la récréation, une heure ailleurs pour ranger les ouvrages du centre de documentation ? Dès lors, comment se sentir intégré dans un établissement, partie prenante à un projet d'école, à une communauté ? Comment concevoir un projet professionnel à plus long terme quand le quotidien est constitué d'activités aussi disparates ?

Enfin, je réitère les craintes que mes collègues avaient exprimées il y a trois ans, lors des débats sur la loi du 30 avril 2003, qui a créé les assistants d'éducation, quant à la possibilité offerte aux chefs d'établissements de participer à la procédure de recrutement.

Les syndicats sont nombreux à s'inquiéter de ces nouveaux recrutements décentralisés. C'est aller un peu vite en besogne, monsieur le ministre, de dire qu'il y aura un consensus et que toutes les organisations syndicales représentatives de ces personnels seront totalement d'accord sur les modalités que vous leur proposez, même s'il est évident que leur demande est forte et qu'ils souhaitent obtenir une réponse du Gouvernement. Mais encore faut-il savoir laquelle ! Ainsi, les directeurs d'établissement, par la voix du SPEN, réuni en congrès la semaine dernière à Dijon, ont-ils fait savoir qu'ils déploraient l'annonce des 45 000 « emplois vie scolaire ». Je les cite : « Nous n'avons pas été consultés alors que nous devons mener tous ces recrutements. »

Pour conclure, je dirais qu'il s'agit essentiellement d'assister les directeurs d'école. Il ne s'agit pas d'occuper je ne sais quelle autre fonction d'animation dans ces établissements, qui pourrait être remplie par d'autres. Assister un directeur ou un chef d'établissement, c'est quand même de la responsabilité du ministère de l'éducation nationale. C'est pourquoi nous ne comprenons pas non plus le mode de financement de ces contrats.

Pourquoi le ministère de l'éducation nationale ne prend-il pas totalement ses responsabilités ? Il est facile de faire payer 90 % par le ministère des affaires sociales et de n'avoir que 10 % à régler. En fin de compte, cela signifie que, une fois de plus, sur cette question, comme malheureusement sur d'autres, il y a un désengagement du ministère de l'éducation nationale en matière d'éducation. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. J'entends bien que certains d'entre nous auraient préféré que nous nous en tenions au texte initial, qui, je le répète, a été adopté à l'unanimité tant par l'Assemblée nationale que par le Sénat. Je regrette d'ailleurs que cet article 2 provoque la colère, toute passagère comme l'a dit M. le ministre, d'Annie David. Je souhaite qu'elle retrouve rapidement son sourire habituel.

Néanmoins, la disposition technique et juridique prévue par l'article 2 est nécessaire. Elle a également un caractère d'urgence afin de clarifier et de sécuriser le recrutement des emplois vie scolaire destinés à exercer dans les écoles.

Ces dernières, dépourvues de personnalité juridique propre, ne peuvent procéder directement à ces recrutements et doivent passer par un EPLE, à savoir un collège ou un lycée du secteur. Toutefois, les chefs d'établissement et leurs agents comptables ont besoin de cette base juridique, qui existe déjà dans le statut des assistants d'éducation, afin de se prémunir contre tout contrôle des chambres régionales des comptes notamment.

Il faut garder à l'esprit que la finalité de cette mesure - c'est en cela qu'elle rejoint celle des DDEN - est aussi de renforcer la présence d'adultes au sein des écoles, d'améliorer la qualité de vie des élèves et les conditions de travail des directeurs d'école et des équipes pédagogiques. C'est également un dispositif gagnant-gagnant, qui tend à offrir un tremplin vers l'emploi durable aux personnels recrutés.

Enfin, en adoptant ce texte dans les mêmes termes que l'Assemblée nationale, nous concilions légalité par la sécurisation des recrutements et efficacité en faisant en sorte que ces deux articles soient immédiatement applicables.

Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements de suppression de l'article 2.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Gilles de Robien, ministre. Les deux articles de cette proposition loi donnent tout son sens à l'expression « communauté éducative », composée d'un ensemble de personnels, qui va du directeur de l'école jusqu'aux enseignants en passant par les auxiliaires ou les emplois de vie scolaire, c'est-à-dire toutes celles et tous ceux qui, avec les assistants d'éducation, sont en charge d'un établissement et remplissent la mission d'éducation nationale.

N'opposons donc pas les catégories les unes aux autres. Il s'agit d'un tout, placé évidemment sous la responsabilité du directeur de l'établissement, qui a simplement besoin d'être un peu soulagé dans l'exercice de ses tâches. Les moyens que nous mettons aujourd'hui à sa disposition le permettent. C'est, me semble-t-il, une bonne chose.

Parmi les 45 000 emplois vie scolaire qui existent déjà au sein de l'éducation nationale, 7 300 sont affectés dans le premier degré. Ils aident, par exemple, à la scolarisation des élèves handicapés. C'est la loi de 2005 qui a rendu cela possible. (Murmures sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

Oui, mesdames, messieurs les sénateurs, les auxiliaires de vie scolaire, les AVS, et, à présent, les EVS bénéficient d'une formation particulière pour accueillir les élèves handicapés et aider aux travaux administratifs. Ils sont donc très utiles.

Nombre de parlementaires m'ont demandé que les directeurs des écoles soient davantage aidés, et ce n'est pas à vous, mesdames, messieurs les sénateurs, vous qui êtes pour la plupart également des élus locaux, que je vais expliquer à quel point la tâche qu'ils accomplissent, en relation directe avec les communes, est utile. Cette grève administrative était donc très handicapante tant pour la gestion des écoles que pour les liens entre ces écoles et les communes.

Il fallait donc aider les directeurs des écoles.

C'est la raison pour laquelle j'ai signé avec le syndicat des enseignants de l'Union nationale des syndicats autonomes, l'UNSA, un protocole mettant fin à plus de sept ans de grève.

Certes, comme vous le dites, les autres organisations syndicales n'ont pas signé cet accord. Mais j'ai signé avec le syndicat qui avait déclenché la grève. Excusez du peu ! C'est ainsi que l'on doit travailler. De surcroît, les autres syndicats n'ont ni rejeté cet accord ni appelé à ne pas le signer ; ils sont simplement restés - c'est vrai - sur une certaine réserve, notamment s'agissant des emplois vie scolaire.

Mais il n'empêche que la grève s'arrête. Nous pouvons, me semble-t-il, le saluer. Le mérite en revient non pas au ministre, mais à l'esprit de responsabilité qui a prévalu lors des négociations entre les différents acteurs.

La discussion tournait essentiellement autour de trois points.

D'abord, il fallait dégager du temps pour les directeurs d'école afin que le cumul des fonctions d'enseignement et de gestion administrative ne représente pas une charge de travail déraisonnable. Dans ces conditions, permettre à des professeurs stagiaires d'enseigner et d'effectuer un stage en même temps, dans la classe précisément du directeur de l'école, constitue véritablement une bonne mesure. Cela aidera tant le directeur de l'école que les élèves et le stagiaire.

Ensuite, il fallait assurer une juste rémunération. Or la prime des directeurs d'école est effectivement augmentée. Ce n'est que justice.

Enfin, il fallait soulager concrètement les directeurs d'école dans l'exécution de leurs tâches. Précisément, ces emplois vie scolaire le permettent. C'est une bonne chose également à ce titre.

Je m'arrête un instant pour souligner que M. Bodin, en présentant à l'instant son amendement, a reconnu lui-même que de tels emplois, qui sont des emplois contractuels et temporaires, débouchent souvent sur des emplois durables.

Qu'il s'agisse des contrats emploi solidarité, les CES, des contrats emploi consolidé, les CEC, des emplois-jeunes,...

Mme Nicole Bricq. Pourquoi les avez-vous donc supprimés ?

M. Gilles de Robien, ministre. ...ou, aujourd'hui, des emplois vie scolaire, ces emplois se pérennisent dans le temps. Je vous remercie de l'avoir souligné, monsieur le sénateur !

Vous ne pouvez donc pas dire qu'il s'agit d'emplois précaires. Je suis, comme vous, un élu local et je vous le dis très simplement, monsieur Bodin : qualifier un emploi de précaire, c'est accréditer dans l'esprit de celui qui l'occupe, qu'il soit jeune ou non, d'ailleurs, l'idée qu'il est lui-même précaire et donc l'affaiblir psychologiquement.

Au contraire, nous devons dire à ces personnels qu'ils sont des employés comme les autres, qu'ils sont utiles dans l'établissement, à la fois pour le directeur de l'école et pour les jeunes, et, surtout, qu'ils ont une chance d'accéder à l'emploi durable, comme vous l'avez dit. Sachons donc les encourager au lieu de les accabler.

Je ne peux pas non plus laisser dire sans réagir que l'éducation nationale réduirait ses moyens. Ainsi, rien que dans l'enseignement primaire, il y a 1 000 emplois de plus cette année !

Mme Annie David. Pour combien d'élèves en plus ?

M. Gilles de Robien, ministre. Comme je l'ai dit tout à l'heure, il y a déjà eu 45 000 emplois vie scolaire en plus et, désormais, nous allons affecter 50 000 emplois vie scolaire supplémentaires dans les écoles. Et je vous rappelle l'augmentation budgétaire de 3,5 %, soit deux fois l'inflation !

Il faut donc cesser d'alimenter cette rumeur - je dirais même cette légende - selon laquelle les moyens de l'éducation nationale diminueraient. Mesdames, messieurs les sénateurs, la part du PIB que notre pays consacre à l'éducation de ses jeunes est la plus importante au monde : 7,1 %. Trouvez mieux ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.

Mme Nicole Bricq. L'amendement de suppression de l'article 2 que nous avons déposé paraît peut-être sévère à nos collègues siégeant du côté droit de cet hémicycle ainsi qu'à M. le ministre. Mais cet article, introduit par l'Assemblée nationale par voie d'amendement gouvernemental, comporte, comme souvent - cela se vérifie quel que soit le gouvernement -, du bon, certes, mais aussi du moins bon.

Le nouveau dispositif apporte, il est vrai, une sécurité juridique pour les directeurs d'école, qui ne pouvaient auparavant recruter directement des contractuels et devaient passer pour ce faire par les directeurs des collèges et des lycées locaux. Un tel problème s'était déjà posé lors de la mise en place des emplois-jeunes.

Pour autant, vous devez, me semble-t-il, entendre l'argument qui a été développé à la fois par Mme David et par mon collègue de groupe Yannick Bodin sur la précarité.

Monsieur le ministre, il s'est tout de même passé des choses il y a peu. Vous le savez très bien, l'angoisse de nos compatriotes face à la montée de la précarité pèse très lourd dans le malaise actuel de notre pays.

Permettez-moi d'ajouter un autre argument, qui finira de justifier notre position sur cet article 2. Vous avez évoqué les 50 000 emplois vie scolaire supplémentaires, qui sont financés à la fois par le ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement et par le ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. Michel Mercier. Et par les collectivités locales !

Mme Nicole Bricq. Et par les collectivités locales, effectivement. Il est utile de le rappeler, puisque ce sont souvent elles qui sont mises à contribution.

Dans l'état calamiteux - il faut tout de même le dire - où vous avez conduit nos finances publiques depuis bientôt cinq ans (Protestations sur les travées de l'UMP), nous avons une certaine inquiétude quant au mode de financement de telles mesures.

En effet, celles-ci pourront être financées soit dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2006, soit par des redéploiements. Cela signifie donc que vous utiliserez des fonds qui étaient déjà affectés. Nous n'avons aucune lisibilité sur ce point.

Compte tenu de votre absence de marges de manoeuvre budgétaires, vous serez obligé de prendre les sommes nécessaires ailleurs. C'est une technique habituelle, que l'on connaît bien chez votre collègue M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement, mais peut-être un peu moins bien chez vous, monsieur le ministre. En l'occurrence, ces mesures seront financées en prélevant sur d'autres dépenses, qui seraient pourtant également très utiles.

Quant au sort subi par les collectivités locales après l'adoption des mesures les concernant, qu'il s'agisse de la loi de finances pour 2006 ou de la réforme fiscale que vous nous proposez pour 2007, vous excuserez la trivialité du propos, mais bonjour les dégâts !

Par conséquent, ce sont une nouvelle fois les collectivités locales qui seront mises à contribution. Et l'on aura beau jeu ensuite, lorsque nos comptes publics seront présentés à Bruxelles, d'accuser ces collectivités de trop dépenser et d'avoir une influence négative sur les grands équilibres !

Tout cela justifie que nous ne vous accordions pas notre confiance sur cet article. Monsieur le ministre, nous serons très vigilants quant au financement de ces mesures.

M. le président. La parole est à Mme Bernadette Dupont, pour explication de vote.

Mme Bernadette Dupont. Je ne voterai évidemment pas la suppression de l'article 2.

En revanche, je demande à M. le ministre de nous confirmer que les EVS bénéficieront d'une formation adaptée à l'accompagnement des enfants handicapés. En effet, ces derniers ne sont pas à traiter comme les autres enfants, car ils ont besoin d'un accompagnement extrêmement spécifique.

À l'heure actuelle, les EVS affectés auprès de ces enfants « tournent » beaucoup, précisément parce qu'il leur manque une telle formation, pourtant absolument essentielle.

M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, pour explication de vote.

M. Michel Mercier. Permettre à des personnes sans emploi d'accéder à des tâches d'utilité sociale via des contrats aidés me semble tout à fait positif.

Ce n'est d'ailleurs pas une nouveauté. Des dispositifs similaires ont déjà existé sous d'autres dénominations et sous d'autres gouvernements.

Quoi de plus normal, au demeurant, que d'offrir à des titulaires de minima sociaux l'occasion de se réinsérer dans des tâches appréciées de tous ? Il ne s'agit donc nullement d'emplois inutiles, voire d'emplois « bidons », qui seraient créés juste pour ces personnes-là.

De surcroît, travailler dans une école, aider des enfants et participer à la vie de la communauté éducative, tout cela constitue autant d'activités de haute valeur ajoutée.

Permettre à des personnes qui ont perdu leur emploi ou n'en ont jamais occupé d'accéder à de telles activités est donc d'abord un acte de réinsertion sociale. Je soutiens totalement ce type d'initiative. Nous avions mis en place un dispositif similaire avec les emplois-jeunes ; nous le faisons aujourd'hui avec les contrats d'avenir. L'esprit est le même.

Bien entendu, les personnes recrutées au titre de contrats d'avenir ou autres pourront bénéficier d'une ouverture sur des emplois définitifs. En effet, la fonction publique territoriale, tout comme d'ailleurs la fonction publique d'État, connaîtra de grands bouleversements dans les années à venir. Il y aura beaucoup de départs, nous le savons tous.

Par conséquent, il y aura là une sorte de vivier d'emplois à destination de personnes déjà proches de ces fonctions publiques. C'est pourquoi rapprocher des jeunes des fonctions publiques éducative et territoriale, via des contrats d'avenir, c'est leur ouvrir la voie vers un emploi durable, comme cela a été le cas pour les emplois-jeunes. Dans cinq ans, nous pourrons faire les mêmes constatations qu'à l'issue du dispositif des emplois-jeunes.

Opposer un type de contrats aidés à un autre me semble inutile. La démarche et la philosophie sont identiques.

J'ajoute que ces contrats d'avenir concernent essentiellement les bénéficiaires du RMI, et ce pour une raison toute simple. Les RMIstes constituent en effet l'essentiel des bénéficiaires de minima sociaux. Ainsi, mon département, mais il est loin d'être le seul dans ce cas, compte 34 000 bénéficiaires du RMI. Je suis donc très heureux de pouvoir offrir de nouveaux emplois, ou du moins de nouvelles possibilités d'accès à l'emploi, à ces personnes.

Certes, nous ne ferons pas de miracles, mais les exemples d'heureuses initiatives ne manquent pas. Dans notre département, nous avons par exemple essayé de mettre des accompagnateurs dans les transports scolaires, comme cela se fait dans d'autres départements. Les personnels concernés pourront ensuite continuer leur travail au sein de l'école. Il y a donc une continuité dans l'action, ce qui me paraît très positif. La mesure qui nous est proposée consolide cette démarche.

La seule critique que nous pourrions émettre à l'égard de ce dispositif porte - nous le savons tous - sur le mode de financement. Les collectivités locales seront particulièrement concernées. Certes, cela ne change rien s'agissant du financement, mais cela change tout s'agissant de l'avenir des bénéficiaires de minima sociaux.

Pour les raisons que j'ai dites, je ne pourrai pas voter les amendements de suppression déposés par nos collègues du groupe CRC et du groupe socialiste. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF.)

M. Raymond Courrière. Ce n'est pas une surprise !

M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Mme Annie David. Je souhaite expliquer mon vote et réagir aux propos de M. le ministre.

Effectivement - sur ce point, je partage son analyse -, les emplois vie scolaire doivent faire partie intégrante de l'équipe éducative. C'est seulement à cette condition qu'ils apporteront réellement l'aide souhaitée aux directeurs d'école et à l'ensemble des personnels.

Mais, monsieur le ministre, pourquoi ne faites-vous pas de ces EVS de véritables emplois stables, qui seraient occupés par des personnes pouvant conserver ce contrat tout au long de leur vie de salariés ? Pourquoi faire en sorte qu'il s'agisse en réalité de contrats précaires ? En effet - M. Mercier vient d'en parler -, ce sont des contrats d'insertion.

Je suis d'accord avec vous, les emplois vie scolaire font partie de l'équipe éducative. Alors, faisons en sorte que ce soient des emplois pérennes.

Monsieur le ministre, vous avez également évoqué l'augmentation des moyens budgétaires consacrés à l'éducation nationale, 3,5 %, et la création de 1 000 emplois supplémentaires pour l'école. Tout cela est exact. Mais pour combien d'élèves, monsieur le ministre ? Vous ne nous le dites pas.

Vous fournissez une partie des chiffres, mais pas la totalité. À combien d'élèves ces 1 000 emplois supplémentaires correspondent-ils ? Quel est in fine le rapport entre le nombre d'élèves et le nombre d'enseignants ?

Si ma mémoire est bonne, nous avons 1 000 enseignants de plus pour 45 000 élèves supplémentaires, soit un enseignant de plus pour quarante-cinq élèves de plus. Là encore, le résultat de votre opération ne me paraît pas bon.

Vous évoquez également les moyens budgétaires consacrés à l'éducation nationale, arguant que la France figure parmi les pays affectant une des parts les plus importantes de leur PIB à l'école. Mais quelle est la part de la politique gouvernementale dans ces chiffres ? Parmi les 7 % du PIB consacrés à l'éducation nationale, il y a également - vous oubliez de le dire - la part des collectivités locales et la part des familles.

Les 7 % ne représentent donc pas uniquement la part décidée par le Gouvernement, et vous ne pouvez pas faire comme si c'était vous, monsieur le ministre, qui décidiez de consacrer ce pourcentage à l'éducation !

Vous nous dites également que votre volonté est d'aider les directrices et les directeurs d'école ; cette volonté, nous la partageons. Il s'agit bien ici en effet d'apporter une aide à certains personnels de l'éducation nationale, en l'occurrence les directrices et les directeurs d'école, dont l'un des syndicats représentatifs a signé le protocole d'accord sur la direction des écoles primaires. Je rappelle toutefois que les autres syndicats ont maintenu leur appel à la grève administrative. Il faut tout de même le dire, monsieur le ministre !

Par ailleurs, je partage l'analyse de M. Mercier : oui, nous devons être solidaires des personnes en contrat aidé. Nous avions d'ailleurs déjà eu ce débat lors de l'examen du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale. Nous avions alors proposé un autre type de contrat aidé, qui aurait apporté une véritable sécurité à leurs bénéficiaires, grâce à une formation. C'est en effet là que le bât blesse : les bénéficiaires de ces contrats ont besoin de formation ; ils ne doivent pas seulement être utilisés comme de la main-d'oeuvre.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous voterons ces amendements identiques de suppression.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.

Mme Catherine Procaccia. Monsieur le ministre, en ce qui me concerne, je tiens à vous féliciter pour cette mesure. L'adoption de l'article 2 va enfin mettre fin à une grève insupportable tout à la fois pour l'éducation nationale et pour nos communes, qui étaient confrontées à de véritables problèmes en termes de prévision des effectifs.

En effet, en novembre ou en décembre, au moment où commençaient les négociations sur les ouvertures et les fermetures de classes, les inspecteurs ne disposaient pas des vrais chiffres, du fait de la grève administrative des directeurs d'école. La plupart du temps, nous n'étions en mesure de leur fournir que les nombres d'inscriptions en mairie ou à la cantine. Nous allons enfin pouvoir mieux fonctionner.

En outre, ayant été pendant dix ans conseillère municipale chargée de l'enseignement - je suis élue à Vincennes et conseillère générale du Val-de-Marne, également chargée de l'enseignement -, je peux vous dire que cette mesure correspond aux demandes des directeurs d'école. Ceux-ci souhaitent en effet se consacrer davantage à la pédagogie et moins aux tâches administratives, qui sont de plus en plus lourdes. L'article 2 le leur permettra.

Mme Annie David. Mais non !

Mme Catherine Procaccia. Par ailleurs, dire que ces emplois doivent être affectés à une seule école, c'est méconnaître la réalité. Certaines écoles comptent quatre ou cinq classes, y compris dans des communes aussi denses que celles du Val-de-Marne. Dans ce cas, les tâches administratives ne sont pas les mêmes que dans une école de seize ou dix-huit classes !

M. Gilles de Robien, ministre. Bien sûr !

Mme Catherine Procaccia. Je conçois donc très bien qu'une personne puisse travailler dans deux ou trois petites écoles puisque les tâches administratives y sont différentes.

Enfin - et je m'exprime en mon nom -, je suis étonnée et même outrée d'entendre certains sur les travées de la gauche remettre en cause les compétences des bénéficiaires des minima sociaux. Ce n'est pas parce que des personnes perçoivent ces minima qu'elles ne sont pas aptes à faire partie de l'équipe éducative, de s'occuper d'enfants ou d'assumer des tâches informatiques. De plus, elles bénéficieront d'une formation.

M. Gilles de Robien, ministre. Bien sûr !

Mme Catherine Procaccia. Naturellement, je m'opposerai à ces amendements. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Gilles de Robien, ministre. Je dois une réponse, même courte, aux différents orateurs, dont toutes les interventions étaient tout à fait intéressantes.

Tout d'abord, je vous remercie, madame Dupont, d'être très attentive au problème de l'accueil des enfants handicapés et je vous confirme que les EVS bénéficieront de la même formation que les AVS.

Une partie des 45 000 personnes qui ont été recrutées l'an dernier - environ 20 % d'entre elles, soit 9 000 personnes, dont 7 300 pour le premier degré - viendront conforter l'aide aux personnes handicapées.

Monsieur Mercier, votre intervention fut très intéressante, du début à la fin ! (Sourires.)

M. Michel Mercier. Je vous remercie !

M. Gilles de Robien, ministre. L'éducation nationale a pour rôle premier d'éduquer, de transmettre les savoirs -  le socle commun de connaissances et de compétences -, d'aider à l'émergence d'un comportement citoyen. Si, en plus, l'éducation nationale peut, grâce aux EVS, favoriser l'intégration de personnes vivant aujourd'hui de l'assistance, alors elle assumera ce rôle supplémentaire, pour lequel elle est d'ailleurs armée, et sa générosité est sans limite.

Mesdames, messieurs les sénateurs, si l'éducation nationale a bien une vertu caractéristique, c'est de ne jamais chercher à se soustraire à ses obligations, et sachez qu'elle ne refusera pas ces quelque 100 000 personnes qui, aujourd'hui, sont assistées et qui, demain, embauchées sous contrat, bénéficieront tout à la fois d'une formation et d'un début d'expérience professionnelle.

Alors, me direz-vous, madame David, pourquoi ne pas en faire des fonctionnaires ? Franchement, nous ne sommes pas, vous et moi, sur la même longueur d'onde !

D'abord, si tous les Français devaient être fonctionnarisés, nous n'aurions pas de quoi les payer !

Ensuite, si l'on peut peut-être transformer certains de ces emplois en postes stables, pour les personnes qui le souhaitent ou qui en ont la vocation, il me semble également très intéressant d'avoir des contrats limités dans le temps, comme les CES, les CEC et les emplois-jeunes, que vous avez soutenus, parce que cela permet un roulement. On donne ainsi leur chance à un plus grand nombre de personnes. Tel est le rôle de la République. Si l'école peut participer, je dis tant mieux. On ne peut que s'en féliciter.

Enfin, je remercie Mme Procaccia qui, avec beaucoup de bon sens, a souligné la pertinence de ces mesures. Je n'ai pas un mot à ajouter à sa très belle démonstration ! Vous auriez pu être à ma place, madame la sénatrice. Peut-être alors auriez-vous pu convaincre Mme David de voter la proposition de loi dans son intégralité ! (Sourires.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1 et 2.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 2.

(L'article 2 est adopté.)

M. le président. Les autres dispositions de la proposition de loi ne font pas l'objet de la deuxième lecture.

Vote sur l'ensemble

Article 2
Dossier législatif : proposition de loi relative aux délégués départementaux de l'éducation nationale
Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Bernard Fournier, pour explication de vote.

M. Bernard Fournier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la présente proposition de loi revient, dans son article 1er, sur une disposition qui, introduite dans la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école, répondait au souci d'assurer la neutralité des délégués départementaux de l'éducation nationale. Comme cela a été dit, cette disposition n'était pas appropriée à la réalité concrète de l'action de ces délégués départementaux.

D'une part, cette disposition ne prenait pas en compte la forte dimension de proximité attachée à l'action des délégués. Il est en effet important que ceux-ci aient une bonne connaissance du contexte local et des besoins de la population scolaire et qu'ils puissent ainsi jouer un rôle de liaison entre tous les membres de la communauté éducative.

D'autre part, soumettre les délégués à des contraintes, les obliger à des frais de déplacement, risquait inévitablement de conduire les personnes concernées à se détourner de cette fonction.

Je tiens donc à remercier M. le rapporteur des efforts qu'il a réalisés pour trouver une solution équitable. La neutralité est préservée puisque l'incompatibilité subsiste pour les délégués exerçant un mandat électif municipal. Ainsi, nous sommes parvenus à une solution équilibrée, qui respecte les voeux des délégués.

S'agissant du recrutement des emplois de vie scolaire - c'est l'article 2 de la proposition de loi -, il faut avant tout considérer l'objectif poursuivi. Cette disposition permettra aux directeurs d'école de se prononcer sur le recrutement de personnes titulaires de contrats aidés. Ces dernières, comme le rappelait M. le ministre voilà quelques instants, pourront ainsi acquérir une formation et une expérience professionnelle déterminantes pour leur avenir.

Cet article, adopté par l'Assemblée nationale, a donc, à mon sens, toute sa place dans la présente proposition de loi. Il s'agit dans les deux cas - délégués départementaux de l'éducation nationale et emplois vie scolaire - de venir en aide à la communauté éducative, d'améliorer le fonctionnement des écoles, en y renforçant la présence d'adultes. Il serait dommage de différer la mise en oeuvre de l'aide que constituent les emplois de vie scolaire.

Comme l'a souligné M. le rapporteur, l'intégration des EVS dans les écoles n'est pas encore assez développée puisqu'un peu moins de 8 000 d'entre eux y sont aujourd'hui affectés. Le dispositif est appelé à monter en puissance, 45 000 postes étant prévus pour la rentrée prochaine. Par ailleurs, un protocole d'accord sur la direction des écoles primaires a été signé la semaine dernière, ce dont nous vous félicitons, monsieur le ministre. Les directeurs d'école ont effectivement besoin d'être soutenus.

Bien évidemment, le groupe UMP votera cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Je suis toujours en colère et véritablement désolée de ne pas avoir été entendue par vous, mes chers collègues, ni par vous, monsieur le ministre.

En insérant l'article 2 dans la proposition de loi relative aux délégués départementaux de l'éducation nationale, vous nous soumettez à une sorte de chantage, monsieur le ministre !

Nous sommes en effet tous parfaitement d'accord avec le contenu de l'article 1er de la proposition de loi, il ne peut y avoir aucune ambiguïté sur ce point. Afin de permettre aux délégués départementaux de l'éducation nationale d'exercer leur mandat dans les meilleures conditions, il était nécessaire de revoir l'article 40 de la loi Fillon, qui, je le rappelle, avait été voté dans la précipitation. Nous avions d'ailleurs nous-mêmes déposé une proposition de loi en ce sens. En première lecture, la position du groupe CRC avait donc été claire et sans ambiguïté.

Nous aurions donc aimé voter cette proposition de loi et vous apporter notre soutien sur l'article 1er, dont nous approuvons le contenu. Mais c'était compter sans l'article 2, qui, malgré ce que les uns et les autres en ont dit, n'a pas sa place dans une proposition de loi relative « aux délégués départementaux de l'éducation nationale », comme son titre l'indique.

Peut-être aurait-il fallu modifier l'intitulé de cette proposition de loi, mais cela aurait nécessité une nouvelle lecture à l'Assemblée nationale et cela aurait encore pris du temps, je le sais.

Vous auriez pu profiter de la discussion de la loi pour l'égalité des chances, par exemple, pour faire passer cet article 2, puisqu'il s'agit de mettre les écoles sur un pied d'égalité au regard de l'embauche de ces fameux emplois vie scolaire. Cet article y aurait probablement trouvé mieux sa place que dans un texte consacré aux délégués départementaux de l'éducation nationale.

Voilà pour la forme. Sur le fond, c'est-à-dire l'embauche des titulaires de ces nouveaux contrats d'emploi vie scolaire, nous ne pouvons être d'accord avec vous. Ces recrutements n'apporteront pas un véritable soutien aux directeurs d'école, notamment pour la part des contrats qui sont renouvelables tous les six mois. Les directeurs pourront-ils garder les personnes au-delà de six mois ou seront-ils obligés de se soumettre à la rotation que nécessitera l'embauche de personnels en emplois vie scolaire ?

Vraiment, une telle réponse ne nous semble pas appropriée à la demande de l'éducation nationale, qui réclame des personnels statutaires, afin que puissent être mises en place des équipes éducatives stables.

D'ailleurs, dans nos écoles, tant primaires que maternelles, les enfants eux-mêmes ont besoin de personnes stables pour les encadrer. Il ne faudra pas s'étonner si, à défaut d'une équipe éducative suffisamment stable pour leur permettre de trouver eux-mêmes un équilibre, certains élèves sont ensuite instables ou violents ...

Non, vraiment, je ne crois pas que cette mesure apportera une aide aux directeurs et aux directrices d'établissements scolaires.

Le groupe CRC, qui regrette sincèrement de ne pouvoir voter cette proposition de loi, mais qui ne veut pas s'opposer à l'article 1errelatif aux DDEN, a décidé de s'abstenir. Je considère cependant que la démarche manque d'élégance vis-à-vis des parlementaires et que l'article 2 mérite doublement d'être qualifié de cavalier !

M. le président. La parole est à M. Yannick Bodin.

M. Yannick Bodin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne ferai pas de commentaires sur l'article 2, ni sur la question de savoir si le verre est à moitié plein ou s'il est à moitié vide. Non, je me contenterai de dire que, pour notre part, nous voterons ce texte, et ce pour une simple et unique raison : nous voulons que l'article 1er soit adopté.

Nous voterons ce texte parce que nous voulons être compris par les délégués départementaux de l'éducation nationale Ils attendent notre vote, celui du Sénat, et nous ne voulons pas les décevoir. Il fallait leur rendre justice et ce texte, qui permet de le faire, est également l'occasion de leur rendre hommage. Je m'en réjouis.

Monsieur le ministre, nous ne saurions vous priver de notre aide ; veuillez me pardonner cette petite note d'humour, mais, par les temps qui courent, nul doute que vous apprécierez le réconfort que nous vous apportons ! (Sourires.) Car de quoi s'agit-il, sinon de vous aider à réparer une maladresse commise par un membre de votre majorité ? En effet, nous ne serions pas réunis ce matin s'il n'avait fallu réparer cette erreur commise à l'occasion du vote d'un amendement qui plus est accepté par votre prédécesseur. Sans doute l'amendement en question avait-il été déposé à cette époque pour des raisons strictement locales...

Mais, avec cet article 1er, le bon sens est revenu à l'ordre du jour. Tant mieux ! Pour notre part, nous nous limiterons à cela ce matin, en ne pensant qu'à la satisfaction que ne manqueront pas d'éprouver les délégués départementaux de l'éducation nationale. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. Gilles de Robien, ministre. Très bien ! Quelle sagesse !

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.

Mme Annie David. Le groupe CRC s'abstient.

(La proposition de loi est adoptée définitivement.)

M. le président. Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Christian Poncelet.)