Hospitalisation d'office dans le projet de loi prévention de la délinquance

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.

M. Jean-Pierre Godefroy. Ma question s'adresse à M. le ministre de la santé et des solidarités.

Lors de l'examen en première lecture au Sénat du projet de loi relatif à la prévention de la délinquance, les membres du groupe socialiste - et pas seulement eux - ont demandé avec insistance le retrait des articles 18 à 24, qui modifient partiellement les règles de l'hospitalisation sans consentement et créent un fichier national des hospitalisations d'office.

M. Nicolas About. Cela va être fait !

M. Jean-Pierre Godefroy. Vous vous y êtes opposé avec obstination, monsieur le ministre.

M. Jean-Pierre Godefroy. En effet, nous considérons que ces dispositions n'ont pas leur place dans ce texte tant elles assimilent les personnes souffrant de troubles mentaux à des délinquants et menacent le secret médical, un avis que partage notamment le Conseil national de l'ordre des médecins.

Par ailleurs, toute réforme de la loi du 27 juin 1990 relative à l'hospitalisation sans consentement doit préserver l'équilibre entre les trois objectifs de santé, de liberté et de sécurité. Le projet de loi relatif à la prévention de la délinquance rompt cet équilibre et ne vise que le seul objectif sécuritaire.

La semaine prochaine, monsieur le ministre, ce sont les députés qui examineront le texte. Il semble que, sur l'initiative du président de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale,...

M. Nicolas About. Il a plus de poids que moi !

M. Jean-Pierre Godefroy. ...les articles 18 à 24 seraient retirés du texte par un artifice assez particulier que nous avons du mal à comprendre.

La mobilisation des médecins psychiatres, des familles de malades et de nombreux élus locaux porte ses fruits et je suis sûr que les maires qui, au même moment, seront réunis en congrès, apprécieront l'imbroglio proposé.

Nous pourrions nous réjouir de cette perspective, monsieur le ministre, à condition toutefois que le retrait de ces articles ne se fasse pas au profit d'une disposition habilitant le Gouvernement à modifier par ordonnance la loi du 27 juin 1990,...

M. Jean-Pierre Godefroy. ...ce qui serait encore plus inacceptable.

M. Guy Fischer. Voilà le tour de passe-passe !

M. Jean-Pierre Godefroy. Monsieur le ministre, c'est au Parlement qu'il convient d'examiner une question aussi complexe et de trouver un équilibre entre les questions de santé, de justice et d'ordre public.

D'ailleurs, lors de l'examen au Sénat, vous avez admis que cette réforme était prête - vous l'avez d'ailleurs présentée aux professionnels - dans la mesure où la plupart des orientations nouvelles font l'objet d'un consensus.

Vous pouvez donc présenter sans délai un projet de loi devant le Parlement, lequel, étant donné l'importance du sujet, saura adapter son ordre du jour - je n'en doute pas - pour l'examiner en détail avant la fin de la session parlementaire, ce qui est, je le pense, un souhait quasi-unanime.

Monsieur le ministre, mes questions sont simples.

M. Nicolas About. Est-ce vrai ?

M. Jean-Pierre Godefroy. Premièrement, le Gouvernement s'apprête-t-il à organiser le retrait des articles 18 à 24 du projet de loi relatif à la prévention de la délinquance ?

M. Jean-Pierre Godefroy. Si oui, deuxièmement, peut-il s'engager aujourd'hui à ne pas recourir aux ordonnances,...

M. Jean-Pierre Godefroy. ...ce qui reviendrait à « court-circuiter » le Parlement en plein débat, puisque, l'urgence n'étant pas déclarée, le texte doit revenir au Sénat ?

Troisièmement, est-il prêt à présenter rapidement au Parlement un projet de loi spécifique de réforme de la loi du 27 juin 1990 relative aux hospitalisations sans consentement ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Nicolas About. Cela fait trois questions !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités. Monsieur le sénateur, trois questions, c'est trois fois moins que les contradictions qu'il y avait dans votre propos. Vous êtes bien embarrassé.

M. Xavier Bertrand, ministre. Vous l'étiez un peu moins lors du débat parlementaire.

Que souhaitiez-vous, comme les professionnels d'ailleurs ? Qu'il n'y ait pas d'amalgame. Or, c'est précisément à un amalgame dangereux entre la santé mentale et la prévention de la délinquance que vous procédez depuis le début. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

C'est ce que vous avez fait en permanence lors du débat parlementaire, et ce n'est pas une attitude responsable sur un sujet qui demande davantage de sérénité et moins de polémique. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)

Je vous laisse la polémique, nous préférons la sérénité sur un sujet qui en a bien besoin.

Il faut aussi savoir faire des propositions.

La commission des lois et la commission des affaires sociales du Sénat, je le rappelle, se sont exprimées ici très clairement sur ce sujet. Nous avons, quant à nous, considéré que les articles 18 à 24 - vous ne l'avez pas dit, je vais le rappeler - ne posent aucun problème sur le fond, cela a été admis par les professionnels.

Vous acquiescez, monsieur Godefroy, je vous en remercie.

M. Xavier Bertrand, ministre. Cela montre bien que les dispositions de ce texte constituent une avancée pour les malades, les professionnels de santé et la famille, sans oublier la société dans son ensemble.

M. Xavier Bertrand, ministre. Voilà la vérité qui a été rappelée en commission et dans cet hémicycle.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Ce n'est pas vrai !

M. Xavier Bertrand, ministre. Nous avons décidé de disjoindre ces articles pour pouvoir profiter, dans le calendrier parlementaire, d'une habilitation par ordonnance. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Permettez-moi de vous dire, à vous qui avez usé et abusé à maintes reprises de ce procédé (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)...

M. Jean-Pierre Godefroy. Jamais sous le gouvernement Jospin !

M. Xavier Bertrand, ministre. ...que, depuis 2003, la réforme de l'hôpital s'est faite par ordonnances après la concertation nécessaire pour trouver les bonnes solutions.

M. François Autain. Elles sont mauvaises !

M. Xavier Bertrand, ministre. Ce sera exactement la même chose qui se passera pour la réforme de la loi de 1990, attendue depuis bien longtemps par les professionnels. Avec les garanties contenues dans les articles 18 à 24 et les garanties complémentaires qui font aujourd'hui l'objet d'une concertation entre le ministère de la santé et les professionnels, une solution est à portée de la main.

Telles sont les intentions du Gouvernement, mais, pour qu'il puisse les mettre à exécution, il faudra bien que la commission mixte paritaire accepte de lui donner l'habilitation.

Au demeurant, vous savez bien, mesdames, mesdames les sénateurs que, même si nous procédons par ordonnances, nous faisons une grande part à la concertation et nous associons les uns et les autres à notre réflexion.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Quel est l'intérêt ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Maintenant, monsieur le sénateur, sur un sujet qui devrait dépasser les clivages politiques et qui nécessite de la sérénité, la balle est dans votre camp ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste. - Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées de l'UC-UDF.)

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Trois mensonges !

Travail des personnes handicapées

M. le président. La parole est à M. Yannick Texier.

M. Yannick Texier. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

Monsieur le ministre, à l'occasion de la tenue depuis lundi dernier de la Xe semaine pour l'emploi des personnes handicapées, un bilan s'impose.

M. le Président de la République a fait de la non-discrimination des handicapés l'un des trois chantiers prioritaires de son quinquennat.

M. René-Pierre Signé. Trois c'est peu !

M. Yannick Texier. La loi sur le handicap du 11 février 2005 fut la traduction législative de ce grand chantier présidentiel.

Nous nous félicitons tous de la création d'une véritable prestation compensatoire, du développement d'ici à 2010 de l'accessibilité des infrastructures et des transports collectifs, de la simplification des procédures administratives, du recrutement de 5 000 auxiliaires supplémentaires pour faciliter l'insertion des enfants handicapés en milieu scolaire et de l'amélioration de l'accueil des étudiants handicapés.

Néanmoins, il demeure un point difficile à mettre en oeuvre.

La loi sur le handicap a imposé aux entreprises de plus de vingt salariés l'obligation d'embaucher au minimum 6 % de travailleurs handicapés. Or, un an et demi après le vote de cette loi, nous n'en sommes qu'à 4 %. Cela demeure insuffisant, le chômage touchant deux fois plus les personnes handicapées que les personnes valides.

Ma question, monsieur le ministre, est donc simple : au-delà de toutes les mesures que vous avez déjà engagées, et dont je salue l'initiative et les effets déjà positifs, quelles dispositions supplémentaires comptez-vous prendre pour développer encore davantage l'accès au marché du travail des personnes certes handicapées, mais souvent très compétentes et se révélant parfois encore plus motivées et acharnées au travail que leurs collègues pourtant valides ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le sénateur, l'égalité des chances en faveur des personnes handicapées progresse rapidement depuis que M. le Président de la République en a fait l'une des priorités de son quinquennat et depuis que, à la suite de cet engagement personnel du chef de l'État, vous avez adopté cette grande loi de la République qu'est la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.

Au coeur de l'égalité des chances, il y a l'insertion professionnelle et, s'il est vrai que, sur ce point, la France a progressé, il reste encore beaucoup de chemin à faire.

En 1987 déjà, le Premier ministre de l'époque, M. Jacques Chirac, avait fait adopter une loi aux termes de laquelle les entreprises sont tenues d'employer 6 % de handicapés. Il n'y en avait alors que 2 % ; aujourd'hui nous en sommes à 4 %, c'est un progrès.

Depuis la loi de 2005, nous avons encore progressé, puisque le taux d'insertion professionnelle des personnes handicapées a augmenté l'année dernière de 4,6 %. Mais il est vrai aussi que, malgré la grande satisfaction des employeurs - 95 % d'entre eux se disent satisfaits des personnes handicapées qu'ils emploient - des progrès restent à faire.

Dans ces conditions, Gérard Larcher et moi-même avons annoncé hier deux décisions importantes.

Comment faire en sorte que les droits des personnes handicapées, qui sont reconnus, soient respectés dans la réalité ?

Pour cela, un maître mot : l'accompagnement. Ainsi, dans les six mois suivant la demande à la maison départementale des personnes handicapées, un parcours d'insertion professionnelle doit être offert à tout demandeur d'emploi handicapé.

Par ailleurs, les personnes handicapées qui travaillent déjà ne doivent pas être marginalisées dans leur emploi. Ce risque existe parce que, dans l'entreprise, dans l'administration, les méthodes de travail évoluent. Souvent, on n'a pas pensé à l'adaptation du travail de la personne handicapée qui peut se trouver marginalisée dans son emploi, voire en situation de précarité.

Avec Gérard Larcher, nous allons rencontrer l'ensemble des partenaires sociaux et leur demander, dans le cadre du dialogue social, d'engager un travail en commun pour aboutir à une véritable gestion prévisionnelle de l'emploi des personnes handicapées dans les administrations et dans les entreprises de telle sorte que l'accompagnement de la personne handicapée ne soit pas terminé une fois que celle-ci a franchi le seuil de l'emploi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Défibrillateur cardiaque

M. le président. La parole est à M. Alex Türk.

M. Alex Türk. Ma question s'adresse à M. le ministre de la santé et des solidarités.

Elle concerne un douloureux problème de santé publique, « la mort subite de l'adulte », qui entraîne chaque année en France le décès d'environ 60 000 personnes.

Actuellement, dans notre pays, on sauve entre 2 % et 3 % des personnes qui sont foudroyées par cette maladie, alors qu'aux États-Unis, on en sauve douze fois plus, soit un quart environ des personnes atteintes.

Cette situation est due au fait que les Américains ont mis en place depuis quelque temps un réseau de défibrillateurs entièrement automatiques ; il en existe désormais en France. On peut comparer le défibrillateur entièrement automatique à un extincteur. Il est ainsi demandé au citoyen de réagir comme il peut face à une situation de détresse. Ces appareils permettent donc de substituer un réflexe citoyen à un geste médical.

On dispose de quatre minutes pour intervenir. Hier, lors du Forum de l'urgence qui se déroulait à Lille et auquel j'ai assisté, le professeur Carli, qui dirige le SAMU, nous a expliqué qu'au-delà de quatre minutes le pronostic vital est réservé.

Or, il est impossible que nos services d'urgence interviennent en quatre minutes dans n'importe quel point du territoire, d'où l'idée d'amener des appareils sur place.

J'ai pris l'initiative avec Sylvie Desmarescaux d'engager la mise en place de cent quarante appareils dans quatre-vingt-neuf communes de notre département, installation qui doit s'étaler sur quatre ans. L'objectif est de faire en sorte que toutes les communes de notre département soient équipées d'un appareil pour mille habitants.

Je n'ai pas le temps d'évoquer les problèmes d'implantation, je voudrais simplement poser à M. le ministre les questions suivantes.

Il existe un vide juridique puisque, actuellement, notre législation ne vise que les défibrillateurs semi-automatiques, qui exigent une intervention humaine. Vous serez donc amené à prévoir une réglementation, monsieur le ministre.

Par ailleurs, je souhaiterais que vous nous rassuriez sur un point fondamental : aurons-nous la certitude que les éléments nécessaires à la maintenance seront mis en place ? Je pense qu'il ne devrait pas y avoir de problème.

Reste un problème majeur.

Il sera bien sûr nécessaire de favoriser une formation par l'incitation, mais il n'est pas question d'imposer une formation préalable obligatoire. En effet, si une formation était obligatoire, cela impliquerait que ceux qui n'en auraient pas profité n'auraient pas le droit de se servir de l'appareil et ne pourraient intervenir même en présence d'une personne en train de mourir. Ce serait comme si quelqu'un refusait de se servir d'un extincteur pour éteindre un incendie au motif qu'il n'aurait pas eu de formation. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités. Monsieur le sénateur, je voudrais saluer votre engagement sur ce dossier et la façon exemplaire dont Mme Desmarescaux et vous-même avez décidé d'intervenir dans votre département.

Je sais que de nombreuses collectivités sont d'ores et déjà tentées de s'orienter dans la même direction que vous et se sont équipées. Il faut non seulement encourager les mises à disposition de défibrillateurs, mais aussi développer l'information et la formation, dans le cadre que vous avez précisé.

Bien évidemment, il faut inciter à la formation sachant qu'aujourd'hui, dans notre pays, selon la Croix-Rouge, à peu près 6 % des citoyens sont formés aux gestes de premiers secours. Or, en augmentant leur nombre, on pourra tout simplement sauver des vies.

Cela dit, il n'est pas question de soumettre l'utilisation des défibrillateurs à une formation préalable, mais d'assurer une formation supplémentaire afin que les personnels soient encore plus efficaces.

Monsieur le sénateur, vous avez cité des chiffres que chacun doit avoir en mémoire. Ainsi, huit minutes après un arrêt cardiorespiratoire, le cerveau est définitivement lésé. Si aucune intervention n'est effectuée pendant cinq minutes, le patient aura forcément des séquelles.

Certes, nous pouvons sauver des vies, mais cela impose de prendre de nouvelles initiatives en matière de défibrillateurs entièrement automatiques.

Le cadre juridique doit évoluer. Je prendrai de nouvelles dispositions réglementaires au début de l'année prochaine. Vous m'avez déjà saisi de ce sujet, monsieur le sénateur, et j'ai décidé de mener une politique nationale en la matière, aux côtés des collectivités locales qui s'engagent et des professionnels de l'urgence. En effet, contrairement à ce qui a pu être dit ou pensé à une certaine époque, ces derniers n'y sont pas opposés. En fait, ils sont totalement partants, de façon qu'en liaison avec le Centre 15, bien sûr, nous puissions étendre les mises à disposition de ce type d'appareils.

Il faut que chacun intègre bien que, même si un défibrillateur entièrement automatique - qui n'est donc pas accessible aux seuls professionnels, comme cela fut le cas pendant longtemps -, est disponible à proximité, il sera toujours nécessaire d'appeler le Centre 15, de façon à faire intervenir le plus vite possible les équipes d'urgence. Le délai d'intervention de ces dernières, nous le savons aujourd'hui, est de l'ordre de huit à quinze minutes. Or si ce délai est bon dans de nombreux cas, il est quelquefois trop long dans d'autres.

Telle est donc la façon dont je compte travailler : je souhaite favoriser une plus grande mise à disposition de défibrillateurs, une meilleure information et une formation complémentaire. Ainsi, la France pourra rattraper le retard qu'elle connaît par rapport aux États-Unis ou au Canada. Elle pourra alors se situer à la pointe en la matière, et de nombreuses vies seront sauvées. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.

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souhaits de bienvenue à une délégation du Sénat d'Afghanistan

M. le président. Mes chers collègues, j'ai l'honneur et le plaisir de saluer la présence dans notre tribune officielle d'une délégation du Sénat d'Afghanistan, conduite par son président, M. Sebghatullah Modjadeddi.

C'est avec une émotion particulière que nous l'accueillons, d'abord, parce que cette visite témoigne des liens étroits et amicaux que la France entretient avec l'Afghanistan depuis fort longtemps, ensuite, parce que le Sénat - notre Sénat - a pris une part très active dans le rétablissement du Parlement afghan, le Parlement français s'étant vu confier par la communauté internationale un rôle pilote dans la restauration des institutions parlementaires en Afghanistan.

Je forme des voeux, au nom du Sénat tout entier, pour que cette visite contribue à renforcer les liens entre nos deux institutions et nos deux pays, et j'adresse au peuple afghan, par votre intermédiaire, monsieur le président du Sénat afghan, notre sympathie et nos souhaits de succès sur le chemin difficile que vous poursuivez actuellement, dans le sens de la démocratie. (Mme et MM les ministres, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent.)

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures vingt-cinq, sous la présidence de M. Adrien Gouteyron.)

PRÉSIDENCE DE M. Adrien Gouteyron

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

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candidature à un ORGANISME extraPARLEMENTAIRE

M. le président. Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation du sénateur appelé à siéger au sein du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche.

La commission des affaires culturelles a fait connaître qu'elle propose la candidature de M. Jean-Léonce Dupont pour siéger au sein de cet organisme extraparlementaire.

Cette candidature a été affichée et sera ratifiée, conformément à l'article 9 du règlement, s'il n'y a pas d'opposition à l'expiration du délai d'une heure.

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Articles additionnels avant l'article 37 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2007
Quatrième partie

Financement de la sécurité sociale pour 2007

Suite de la discussion d'un projet de loi

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2007
Articles additionnels avant l'article 39 (priorité)

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, adopté par l'Assemblée nationale.

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus aux amendements tendant à insérer des articles additionnels avant l'article 39, appelés en priorité.

Quatrième partie
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2007
Article 41 (priorité)

Articles additionnels avant l'article 39 (priorité)

M. le président. L'amendement n° 294, présenté par MM. Fischer, Muzeau et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Avant l'article 39, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La mise en place de la tarification à l'activité est suspendue à compter de la promulgation de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 (n° ... du ... 2006).

La parole est à M. Guy Fischer.

M. Guy Fischer. Dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, le Gouvernement poursuit le développement de la tarification à l'activité, la T2A, qui est liée à l'objectif de convergence tarifaire entre les secteurs publics et privés, lequel devra être atteint à 50 % en 2008.

Outre le fait que sa mise en place est techniquement très difficile, comme le reconnaît le rapporteur M. Alain Vasselle dans son rapport dédié à la réforme du financement des établissements de santé, la T2A entraîne la sélection des malades et l'explosion des tarifs. Il serait d'ailleurs intéressant de disposer d'un bilan sur les deux dernières années, car les conséquences du dispositif sont déjà importantes.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avons le sentiment que le privé se spécialise, encore plus qu'avant, sur les activités rentables et très techniques, alors que le public est cantonné à l'urgence et à la prise en charge des populations les plus défavorisées. Je l'admets, ce constat est quelque peu caricatural, mais je souhaite ainsi vous faire prendre conscience de la gravité de ce sujet et de la nécessité d'en débattre.

De plus, comparer le public et le privé n'a pas de sens. Ainsi, les examens de laboratoire et de radiologie sont effectués à l'intérieur même de chaque hôpital public, alors que les établissements privés dirigent fréquemment leurs patients vers des laboratoires extérieurs, dont les propriétaires sont aussi, bien souvent, actionnaires de ces cliniques.

Par ailleurs, les tarifs des hôpitaux publics intègrent les salaires des médecins, tandis que les praticiens exerçant dans les cliniques présentent à leurs patients des honoraires, qui s'ajoutent au service facturé par l'établissement.

Surtout, et c'est un point essentiel, les deux types d'établissements soignent des pathologies totalement différentes : si l'hôpital public soigne près de 70 % des tumeurs de la gorge et du larynx, le privé prodigue à 80 % les soins d'ophtalmologie. Autre exemple : de plus en plus, les établissements privés ferment leur secteur obstétrique, qui ne rapporte plus assez à leur goût, mais assurent plus de 60 % des opérations chirurgicales. Quant aux urgences, elles sont assumées dans la quasi-totalité des cas par l'hôpital public.

Le plus grave, c'est que nous quittons une médecine de la relation avec le malade pour nous diriger vers une médecine industrielle et productiviste. On ne peut manquer de le constater en observant le fonctionnement des cliniques de la Compagnie générale de santé.

La tarification à l'activité, en écartant tout critère de qualité des soins et en privilégiant la rentabilité, est l'instrument de cette évolution. C'est une véritable catastrophe. Et cette réforme a lieu alors même que les hôpitaux publics doivent assumer des déficits insupportables ! Cette année encore, il leur manquera 780 millions d'euros pour boucler leur budget, dont 240 millions pour les seuls CHU. La Fédération hospitalière de France prévoit pour l'année prochaine un déficit compris entre 800 millions et 900 millions d'euros ! Pendant combien de temps va-t-on continuer à mener cette politique irresponsable ?

Pour toutes ces raisons, nous vous demandons, mes chers collègues, d'adopter cet amendement visant à suspendre l'application de la T2A afin de « mettre à plat » la situation de l'hôpital public et d'envisager avec réalisme et humanisme son avenir, dans l'intérêt des patients et des personnels.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. M. Fischer ne peut nourrir l'illusion que nous allons remettre en cause la T2A. Nous perdons un peu notre temps !

La commission a bien sûr émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités. Plus personne ne s'oppose à la T2A. Votre amendement est donc quelque peu anachronique, monsieur Fischer.

Le Gouvernement émet un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 294.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 130 rectifié bis, présenté par Mme Rozier, M. Doligé et Mme Henneron, est ainsi libellé :

Avant l'article 39, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L.1142-2 du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° La seconde phrase du troisième alinéa est ainsi rédigée :

« Le montant de la garantie pour les professionnels de santé exerçant à titre libéral ne peut être inférieur à 1,5 million d'euros par sinistre et à 10 millions d'euros par année d'assurance. »

2° Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« En cas de dépassement des plafonds de garantie prévus dans les contrats d'assurance, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales visé à l'article L. 1142-22 prend en charge, dans des conditions fixées par décret, l'indemnisation due au-delà des plafonds.»

La parole est à Mme Janine Rozier.

Mme Janine Rozier. La loi du 4 mars 2002, modifiée le 30 décembre de la même année, a prévu que « les professionnels de santé exerçant à titre libéral et les établissements de santé sont tenus de souscrire une assurance destinée à les garantir pour leur responsabilité civile ou administrative susceptible d'être engagée en raison de dommages subis par des tiers et résultant d'atteintes à la personne, survenant dans le cadre de l'ensemble de cette activité ». Le fait que « les contrats d'assurance souscrits peuvent prévoir des plafonds de garantie » est également mentionné dans le même article.

Cet amendement concerne la responsabilité civile médicale et tend à mettre en place un écrêtement des primes d'assurance acquittées par les médecins. Ce marché serait ainsi moins dissuasif, voire plus attractif, pour les assureurs, qui bénéficieraient d'une meilleure lisibilité de leurs risques.

Il s'agit de réduire le plafond des garanties de 3 millions d'euros à 1,5 million d'euros par sinistre, et à 10 millions d'euros par année d'assurance, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, l'ONIAM, prenant en charge la différence au-delà de ces montants. En effet, on ne peut pas laisser les primes d'assurance augmenter sans cesse, car cette inflation décourage un grand nombre de médecins : ceux-ci sont d'ailleurs de moins en moins nombreux.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Alain Vasselle, rapporteur. La commission demande à Mme Rozier de bien vouloir retirer son amendement, qui n'est pas sans intérêt, au profit de l'amendement n° 392 rectifié que présentera dans un instant M. About.

Mme Janine Rozier. Ce n'est pas très chevaleresque. Vous auriez pu faire le contraire !

M. Alain Vasselle, rapporteur. C'est un problème de rédaction, madame Rozier ! Depuis le début de cette séance, nous tentons de favoriser l'accord conventionnel, ce que ne permet pas de faire votre amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Madame Rozier, en répondant à la question de fond que vous posez, j'évoquerai la proposition faite par M. About, dans l'amendement n° 392 rectifié, sur lequel le Gouvernement a déposé un sous-amendement.

Tout comme nous, vous cherchez des solutions au problème de la responsabilité civile médicale. On ne peut pas continuer à assister sans réagir à l'explosion des tarifs des primes d'assurance.

Certains me reprochent d'intervenir dans ce dossier qui touche à la sphère libérale. Mais si nous laissions ces primes augmenter de façon continue, certains professionnels de santé ne pourraient même plus exercer.

Il faut cesser d'être hypocrites ! Dans un tel système, la question du paiement des primes d'assurance se réglerait dans le cabinet médical en fonction du tarif de la consultation, notamment pour les professionnels du secteur II. Je refuse cela et je pense que la collectivité, la solidarité nationale doivent intervenir pour réguler ces tarifs d'assurance.

Certains me demanderont s'il est normal que la sécurité sociale intervienne pour payer les primes des assureurs.

MM. François Autain et Guy Fischer. C'est vrai !

M. Xavier Bertrand, ministre. Si nous voulons éviter que ce reproche d'une manière ou d'une autre soit fondé, nous devons nous poser la question qui sous-tend cet amendement.

Depuis la loi Kouchner, il est obligatoire d'indemniser correctement les victimes d'accidents médicaux. Le problème qui se pose alors est celui de la répartition entre l'assurance privée, qui doit assumer les conséquences financières de la responsabilité civile du professionnel de santé, et l'APA, l'allocation personnalisée d'autonomie, qui relève de l'ONIAM.

Aujourd'hui, les conditions ne sont pas réunies pour que l'amendement en discussion soit adopté.

Pour ma part, j'ai décidé cet été d'augmenter la part de l'assurance maladie dans la responsabilité civile des professionnels qui s'engagent dans une démarche qualité. En effet, il n'est pas question de financer un contrat de responsabilité civile si nous n'avons pas la garantie que le professionnel s'engage dans une telle démarche, ce qui soulève le problème de l'accréditation.

À cet égard, et pour répondre au concert de critiques que j'ai pu entendre, je rappelle que je n'ai pas inventé la démarche qualité cet été. Ce système existe depuis bien longtemps : je veux parler des contrats de bonne pratique. Quant au système de l'accréditation, il a été mis en place par la réforme du 13 août 2004.

J'ai décidé de faire cet effort financier afin d'éviter que les professionnels de santé ne se retrouvent en première ligne face aux assureurs auxquels, il leur eût été bien compliqué de faire entendre raison. Ce faisant, nous avons fait le choix d'entrer de plain-pied dans ce débat.

Avant de mettre en place ce dispositif, nous devrons mener des études techniques afin de connaître le chiffre exact des sinistres qui sont concernés chaque année, et ce sur plusieurs années, par l'écrêtement que vous proposez.

Pour les patients victimes d'accidents médicaux, il est clair qu'il n'y aura aucun changement et que le niveau d'indemnisation sera exactement le même qu'auparavant, en l'occurrence celui qui est fixé actuellement par les tribunaux.

Nous devons trouver une solution amiable avec les professionnels et les assureurs. M. About, qui connaît très bien l'ONIAM pour avoir travaillé sur ce dossier depuis plusieurs années, propose, dans l'amendement n° 392 rectifié, que le Gouvernement propose de sous-amender, une méthode de travail compatible avec les habitudes des professionnels. Cet amendement, madame Rozier, répond à votre préoccupation et apporte une solution au problème de fond que vous avez posé.

Je vous demande donc de bien vouloir retirer l'amendement n° 130 rectifié bis.

M. le président. Madame Rozier, l'amendement n° 130 rectifié bis est-il maintenu ?

Mme Janine Rozier. Non, monsieur le président, je le retire. Et je pense que les médecins seront attentifs aux explications de M. le ministre.

M. le président. L'amendement n° 130 rectifié bis est retiré.

L'amendement n° 392 rectifié, présenté par MM. About,  Mercier,  Vanlerenberghe et les membres du groupe Union centriste-UDF, est ainsi libellé :

Avant l'article 39, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les ministres chargés de l'économie, de la santé et de la sécurité sociale, les syndicats représentatifs des médecins soumis à l'obligation d'assurance mentionnée à l'article L. 1142-2 du code de la santé publique, les fédérations d'organismes assureurs offrant à ces médecins des couvertures en responsabilité civile et l'Union nationale des caisses d'assurance maladie concluent un accord cadre pour maîtriser les charges pesant sur les professionnels de santé concernés relatives à la souscription d'une assurance.

À défaut d'un tel accord dans les deux mois suivant la publication de la présente loi, ou de dénonciation de cet accord, le Gouvernement présente au Parlement un projet de loi destiné à limiter les conséquences de la mise en jeu de la responsabilité civile médicale et à définir les conditions dans lesquelles les indemnisations les plus lourdes ayant pour origine des faits fautifs d'un médecin pourront être prises en charge par des contributions ou des financements adaptés à cet effet.

La parole est à M. Nicolas About.

M. Nicolas About. Je tiens tout d'abord à remercier Mme Rozier d'avoir retirer son amendement au profit du mien.

Il est proposé dans l'amendement n° 392 rectifié de prendre rapidement des mesures destinées à limiter le montant des primes d'assurance en responsabilité civile médicale que doivent supporter certains médecins spécialistes. La primauté serait naturellement réservée à la négociation entre les professionnels de santé, la sécurité sociale et les assureurs, pour trouver des solutions financières à ce problème.

Au cas où ces négociations n'aboutiraient pas à l'issue d'un délai de deux mois, le Gouvernement pourrait présenter au Parlement un projet de loi destiné à limiter les conséquences de la mise en jeu de la responsabilité civile médicale et à définir les conditions dans lesquelles les indemnisations les plus lourdes, ayant pour origine les faits fautifs d'un médecin, seront prises en charge par des contributions ou des financements adaptés à cet effet.

Cette question est cruciale pour un nombre croissant de médecins spécialistes, comme les gynécologues obstétriciens ou les chirurgiens, qui, depuis plusieurs années, doivent supporter l'inflation du montant de leur prime d'assurance en responsabilité civile médicale.

Pour y faire face, plusieurs réponses ont d'ores et déjà été apportées par les pouvoirs publics et par le Parlement. Il convient ainsi de mentionner la prise en charge par la solidarité nationale de l'aléa thérapeutique, qui faisait l'objet d'une de mes propositions de loi, puis par l'ONIAM des infections nosocomiales graves.

L'ONIAM prend également en charge l'indemnisation en cas de refus d'offre de la part d'un assureur ou lorsque le montant des indemnisations est supérieur au plafond de garantie de 3 millions d'euros.

Ces mécanismes garantissent l'indemnisation de la victime dans toutes les hypothèses.

Des dispositions ont également été prises pour aider les médecins à payer leur prime d'assurance, en contrepartie de leur engagement dans une procédure d'accréditation de leur pratique médicale : elles ont fait l'objet d'un décret publié cet été. Toutefois, afin d'apporter une réponse définitive et pérenne au malaise de la profession, ces mesures doivent être complétées afin que soient définies les conditions d'une évolution maîtrisée des coûts d'assurance.

M. le président. Le sous-amendement n° 430, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le dernier alinéa de l'amendement n°392 rectifié :

Le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance, avant le 30 avril 2007, dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, afin de limiter les conséquences de la mise en jeu de la responsabilité civile médicale et de maîtriser les charges en résultant pour les médecins concernés, toutes mesures pour définir les conditions dans lesquelles les indemnisations les plus lourdes ayant pour origine des faits fautifs d'un médecin pourront être prises en charge par des contributions ou des financements adaptés à cet effet.

La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre. Je ne reviendrai pas sur le fond de cet amendement. En effet, avec M. About, nous partageons la même vision des choses.

Comme je l'ai dit lors de la séance de questions d'actualité, il est clair que, dans les conditions actuelles d'encombrement législatif, nous ne serions pas en mesure de garantir l'adoption d'un projet de loi avant la fin de la présente session. C'est la raison pour laquelle nous proposons qu'au terme d'une négociation de deux mois entre les assureurs et les médecins et en cas d'échec de cette négociation, le Gouvernement soit autorisé à prendre par ordonnances les mesures nécessaires à la stabilisation de ce marché.

Je sais que les parlementaires sont toujours réticents lorsqu'il s'agit d'autoriser le Gouvernement à légiférer par ordonnances. Ainsi, toute intrusion de l'article 38 de la Constitution dans des domaines qui relèvent soit du pouvoir législatif, soit du pouvoir règlementaire, ne manque pas de poser problème. Mais si je vous fais cette proposition, c'est dans un souci d'efficacité, car la résolution de cette question ne doit pas être renvoyée aux calendes grecques.

Même si un certain nombre de contrats ont déjà tenu compte de ces dispositions, nous ne pouvons pas laisser perdurer cette situation. Une part importante du travail a été faite cet été. Mais il nous faut aller jusqu'au bout.

On me dit aujourd'hui que certains assureurs sont réticents à l'égard de cet écrêtement, ce qui, à première vue, est surprenant. La vérité, c'est qu'ils craignent que cette participation ne leur soit demandée sous forme d'actions. Or là n'est pas l'enjeu, là n'est pas le sujet.

Je voudrais bien qu'on ne commence pas à s'opposer à une disposition souhaitée par certains acteurs du marché sous prétexte qu'elle pourrait coûter à quelques-uns. Il faut déjà connaître le nombre exact des sinistres qui seraient concernés et savoir ce qu'ils représenteraient pour la collectivité.

Aujourd'hui, la question se pose, non en termes de financement, mais en termes de principe, principe au nom duquel certains voudraient bloquer ce dispositif.

D'autres nous disent que l'État n'a pas besoin d'intervenir, puisque tout se passe bien et que tout va très bien continuer à se passer. C'est le discours d'un certain opérateur qui considère que le ministre n'a qu'à se mêler de ce qui le regarde et qu'on n'a pas à nationaliser le système d'assurance responsabilité civile. Cet opérateur, déjà très présent sur le marché, entend y rester. Pour ma part, j'ai la faiblesse de croire que la multiplicité des opérateurs sera une garantie en ouvrant une possibilité de choix aux professionnels de santé.

Il ne s'agit pas d'imiter certains pays qui ont nationalisé tout leur système de la responsabilité civile médicale : c'est un métier qui ne s'invente pas, qui ne s'improvise pas. Je ne crois pas que la collectivité ait vocation à le faire, mais je pense qu'en présence d'une telle explosion des primes sur le marché on ne peut pas rester sans rien faire.

Sachez aussi que j'ai été interpellé la semaine dernière par un syndicat qui me reproche de ne pas tenir mes engagements quant à la publication du décret d'accréditation. Nous sommes à la mi-novembre et le décret n'est pas publié. La belle affaire, puisqu'il est destiné à s'appliquer au 1er janvier 2007 !

Je comprends que certains professionnels de santé, notamment ce syndicat, manifestent leur impatience mais, parfois, cela commence à bien faire !

Nous savons que nous avons une échéance au 1er janvier, plus une intervention au titre de l'exercice 2006. Au 15 novembre, il ne me semble pas que le Gouvernement soit en retard s'agissant de ce décret, qui devrait être publié dès la semaine prochaine.

Voilà ce que je peux dire, à la fois sur la forme et sur le fond, sur le sous-amendement du Gouvernement pour répondre aux préoccupations que vous exprimez, madame Rozier et monsieur About. Le Gouvernement est heureux de voir que vos préoccupations rejoignent les siennes, qui sont également celles des professionnels de santé concernés, mais aussi et surtout celles des patients.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Alain Vasselle, rapporteur. La commission est favorable à l'amendement et au sous-amendement.

Certes, demander au Gouvernement d'agir par ordonnances, ne correspond pas à ce que souhaite en général le Parlement, et M. le président About dénonce souvent cette pratique. Mais, en la circonstance, elle est nécessaire.

En outre, je note avec satisfaction la référence aux accords conventionnels qui doivent être préalables à l'action du Gouvernement par ordonnances.

Enfin, je remercie Mme Rozier d'avoir accepté de retirer l'amendement n° 130 rectifié bis au profit de l'amendement de M. About.

M. le président. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 430.

M. François Autain. Qu'il y ait un véritable problème, on ne peut pas le nier. De là à en imputer la responsabilité à la loi du 4 mars 2002, comme je l'ai lu dans l'objet de l'un des amendements, cela me paraît excessif !

La dérive constatée est, à mon sens, dans l'ordre des choses puisqu'elle est le résultat de l'évolution de la technologie médicale et d'un changement de comportement des patients vis-à-vis des conséquences de certains actes chirurgicaux.

Il y a donc là un véritable problème qui se trouve posé. Pour autant, la solution que vous préconisez, subventionner des assurances privées, même s'il s'agit de responsabilité civile médicale, ne nous semble pas totalement satisfaisante.

Je suis très heureux que vous ayez évoqué l'hypothèse d'une nationalisation du système de responsabilité civile médicale. Elle ne doit pas être écartée puisque, si j'en crois mes informations, ce système est en vigueur dans certains pays européens, notamment en Suède.

C'est une raison supplémentaire pour voir dans la solution que vous envisagez uniquement un recours, qui ne peut être considéré que comme provisoire en attendant des solutions peut-être plus satisfaisantes.

Il est un autre point qui soulève de notre part un certain nombre de réserves : vous allez agir par ordonnances, procédure vis-à-vis de laquelle, vous le savez, le Parlement est, par principe, très réservé. C'est la raison pour laquelle nous ne pourrons pas voter ni l'amendement ni le sous-amendement. Mais comme nous ne pouvons pas non plus voter contre, nous nous abstiendrons.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.

Mme Catherine Procaccia. Dans les propos de M. le ministre, j'ai relevé une proposition très sage, celle de calculer la fréquence et le nombre des sinistres.

En effet, en matière d'assurances, avant de décider quoi que soit et de déterminer le montant de l'indemnisation, il faut bien connaître le nombre des sinistres et leur coût.

J'espère que le délai que vous avez prévu, monsieur le ministre, sera suffisant pour aboutir à une solution satisfaisante.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 430.

M. Guy Fischer. Le groupe CRC s'abstient.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Le groupe socialiste également.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 392 rectifié, modifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 39.

L'amendement n° 295 rectifié, présenté par MM. Fischer,  Muzeau et  Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Avant l'article 39, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans les six mois suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement transmettra au Parlement un rapport sur la responsabilité civile médicale. Ce rapport présentera un état des lieux des contentieux juridiques impliquant des professionnels de santé dans le cadre de leur exercice, le montant des sommes engagées en réparation et le coût pour les finances publiques de la prise en charge par l'assurance maladie des primes d'assurance des professionnels de santé à ce titre.

La parole est à M. Guy Fischer.

M. Guy Fischer. Notre amendement est relatif à l'augmentation de la part des primes d'assurances de certains praticiens, les obstétriciens, par exemple, prise en charge par l'assurance maladie.

En effet, M. le ministre l'a confirmé, le Gouvernement a décidé cet été d'élever la part de la participation de l'assurance maladie à 70 % du montant total de l'assurance en responsabilité du praticien.

Notre amendement vise à ce que le Gouvernement transmette un rapport sur le thème de la responsabilité civile médicale.

Notre objectif, limpide, consiste à y voir plus clair sur l'augmentation des contentieux dans ce domaine pour apprécier si l'augmentation des primes se justifie. Cela rejoint la remarque formulée tout à l'heure par Mme Procaccia : il faut savoir ce que l'on assure.

Quand on voit que certaines cotisations ont été multipliées par dix, ou presque, en quelques années, il nous est permis d'en douter. Il serait ainsi intéressant de voir si les recours juridiques ont effectivement augmenté dans la même proportion.

Ce rapport serait, selon nous, un préalable indispensable à toute nouvelle demande de contribution pour les assurés sociaux.

Au cours des débats à l'Assemblée nationale, M. le ministre a justifié cette augmentation de prise en charge par l'assurance maladie au nom de l'urgence à maintenir l'accès aux soins. On peut le comprendre, mais nous pensons néanmoins que notre question est légitime.

M. le ministre craignait, me semble-t-il, la désertion de certaines professions, en raison du montant exorbitant des primes d'assurance.

Je remarque au passage qu'il condamne lui-même cette inflation des tarifs pratiquée par les assureurs médicaux. Il regrette, à ce propos, comme nous, que ce secteur ne soit régi que par les systèmes d'assurance privée.

En tout cas, je ne crois pas que la désertion de certaines professions aurait eu lieu au cours de l'été. Il aurait donc été possible d'entamer une discussion plus approfondie sur ce thème avant de décider de façon arbitraire d'alourdir la charge des assurés sociaux ; c'est nous qui allons payer !

D'autres solutions sont actuellement à l'étude, et certains de nos voisins européens, la Suède, par exemple, étudient d'autres pistes, comme la nationalisation complète du secteur de l'assurance responsabilité civile ou encore l'écrêtement des indemnités versées par les assureurs, ce qui aurait au moins le mérite de rendre le système plus lisible.

Dans ces conditions, n'est-il pas possible d'engager une réflexion plus poussée sur le sujet, comme le permettrait la mise à disposition d'éléments chiffrés sur le sujet, plutôt que de poursuivre cette fuite en avant, qui équivaut à transférer la charge des abus des assurances sur les assurés sociaux ?

Avec notre amendement, qui prévoit la publication d'un rapport sur ce thème, un premier pas serait franchi dans cette réflexion. C'est pourquoi nous souhaitons vivement son adoption.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Alain Vasselle, rapporteur. Monsieur Fischer, votre remarque nous paraît tout à fait intéressante. C'est la raison pour laquelle la commission souhaite recueillir l'avis du Gouvernement. À notre sens, il serait souhaitable que l'observatoire rende un rapport annuel sur ce sujet.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Monsieur Fischer, l'amendement n° 406 rectifié du Gouvernement qui va venir en discussion répond également à votre préoccupation.

Cela dit, le Gouvernement émet un avis favorable sur votre amendement parce qu'il pense qu'on a besoin d'un maximum de transparence sur cette question. J'ai demandé à l'IGAS, l'inspection générale des affaires sociale, un rapport qui sera communiqué au Parlement.

Sur ce sujet, on a besoin de disposer de tous les éléments pour que chacun soit en mesure de prendre ses responsabilités, volonté visiblement partagée. On ne va pas se priver de cette unanimité si elle est à notre portée !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 295 rectifié.

(L'amendement est adopté à l'unanimité.)

M. Alain Vasselle, rapporteur. On vous a donné un coup de main, monsieur Fischer ! Il faudra nous aider à votre tour ! (Sourires.)

M. le président. Un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 39.

L'amendement n° 406 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

 

Avant l'article 39, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I - Les dispositions du code de la santé publique sont modifiées comme suit :

A - Après l'article L. 4135-1, il est inséré un article L. 4135-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 4135-2. - Les entreprises d'assurance couvrant en France les risques de responsabilité civile mentionnés à l'article L. 1142-2, transmettent à l'Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles instituée à l'article L. 310-12 du code des assurances des données de nature comptable, prudentielle ou statistique sur ces risques.

« Lorsque cette obligation de transmission n'est pas respectée, l'autorité de contrôle peut prononcer des sanctions dans les conditions prévues par l'article L. 310-18 du code des assurances, à l'exception des sanctions prévues aux 3°, 4°, 4°bis, 5° et 6° du même article.

« L'Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles procède à l'analyse de ces données, les transmet sous forme agrégée et en fait rapport aux ministres chargés de l'économie et de la sécurité sociale. Une copie du rapport est adressée à l'observatoire des risques médicaux.

« Un arrêté des ministres chargés de l'économie et de la sécurité sociale précise les modalités d'application du présent article, et notamment les délais applicables ainsi que la nature, la périodicité et le contenu des informations que les entreprises d'assurance sont tenues de communiquer à l'Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles. »

B - L'article L. 1142-29 est ainsi rédigé :

« Art L. 1142-29. - Il est créé un observatoire des risques médicaux rattaché à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales dont l'objet est d'analyser les données relatives aux accidents médicaux, affections iatrogènes et infections nosocomiales, à leur indemnisation et à l'ensemble des conséquences notamment financières qui en découlent.

« Ces données sont notamment communiquées par les assureurs des professionnels et organismes de santé mentionnés à l'article L. 1142-2, par les établissements chargés de leur propre assurance, par les commissions régionales prévues à l'articles L. 1142-5, par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux et par l'Autorité de contrôle des assurances en application des dispositions de l'article L. 4135-2.

« Les modalités d'application du présent article, notamment celles relatives à la transmission de ces données et aux obligations de l'observatoire en termes de recueil et d'analyse, sont fixées par décret. »

II - Après l'article L. 251-2 du code des assurances, il est inséré un article L. 251-3 ainsi rédigé :

« Art L. 251-3. - Pour les contrats souscrits par une personne assujettie à l'obligation d'assurance en vertu du présent titre, et sans préjudice des possibilités de résiliation mentionnées aux articles L. 113-3, L. 113-4, L. 113-6 et L. 113-9, en cas de résiliation ou de dénonciation de la tacite reconduction à l'initiative de l'assureur, dans les conditions prévues par la police, le délai de prise d'effet à  compter de la notification à l'assuré ne peut pas être inférieur à trois mois. 

« L'assuré est tenu au paiement de la partie de prime correspondant à la période pendant laquelle le risque a couru, période calculée jusqu'à la date d'effet de la résiliation. Le cas échéant, l'assureur doit rembourser à l'assuré, dans un délai de trente jours à compter de la date d'effet de la résiliation, la partie de prime correspondant à la période pendant laquelle le risque n'a pas couru, période calculée à compter de ladite date d'effet. À défaut de remboursement dans ces conditions, les sommes dues sont productives d'intérêts au taux légal. »

III - Les dispositions du I sont applicables aux données relatives à la responsabilité civile médicale issues de l'exercice comptable de l'année 2006.

La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre. Un observatoire des risques médicaux a été mis en place par la loi portant réforme de l'assurance maladie. Bien souvent, on nous dit qu'il faut interpréter de façon restrictive les missions des assureurs et intégrer le fait que cette instance - je traduis les propos qui nous sont tenus - puisse se contenter d'une analyse des sinistres clos, à l'exclusion des primes.

En d'autres termes, je le dis très clairement, cet observatoire que j'ai moi-même installé ne nous apporte rien de concret.

M. François Autain. Comme beaucoup d'observatoires !

M. Xavier Bertrand, ministre. Si l'on constate que les observatoires ne servent pas à grand-chose, soit on les supprime, soit on fait évoluer leurs méthodes de travail, ce que je cherche à faire !

Comme cet observatoire semble malgré tout l'instance adéquate pour permettre l'analyse partagée de ce marché, soucieux de transparence, nous avons déposé un amendement qui va permettre de renforcer les échanges d'informations dont, les uns et les autres, nous avons besoin.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Alain Vasselle, rapporteur. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 406 rectifié.

(L'amendement est adopté à l'unanimité.)

M. le président. Un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 39.

La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre. Pour que le Sénat soit complètement éclairé, je souhaite apporter une précision et insister sur un autre sujet, qui est une garantie pour les assurés.

Nous pensons qu'il est tout à fait légitime d'imposer aux assureurs qui modifient l'économie des contrats dont ils proposent le renouvellement, de maintenir la couverture aux conditions antérieures pendant un délai de trois mois, ce qui laissera aux médecins le temps de pouvoir changer d'assureur.

Comme je l'ai dit tout à l'heure, les acteurs sur le marché étant peu nombreux, il est bon de disposer de trois mois pour pouvoir prendre d'autres dispositions.