sommaire

présidence de M. Adrien Gouteyron

1. Procès-verbal

2. Loi de finances pour 2007. - Suite de la discussion d'un projet de loi

Politique des territoires

MM. Roger Besse, rapporteur spécial de la commission des finances ; Dominique Mortemousque, en remplacement de M. Jean-Paul Alduy, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; Christian Gaudin, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; Dominique Mortemousque, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.

Mmes Évelyne Didier, Yolande Boyer, MM. Aymeri de Montesquiou, Bernard Fournier, Mmes Jacqueline Gourault, Bariza Khiari, MM. Michel Bécot, Thierry Repentin, Ambroise Dupont, Michel Teston.

MM. Christian Estrosi, ministre délégué à l'aménagement du territoire ; Léon Bertrand, ministre délégué au tourisme.

Article 34 et état B

Amendement no II-43 rectifié bis de la commission. - MM. le rapporteur spécial, le ministre délégué, Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Adoption.

Adoption des crédits modifiés de la mission « Politique des territoires ».

Article additionnel après l'article 50 bis

Amendement no II-225 rectifié de M. Thierry Repentin. - MM. Thierry Repentin, le rapporteur spécial, le ministre délégué. - Retrait.

Administration générale et territoriale de l'État

MM. Henri de Raincourt, rapporteur spécial de la commission des finances ; José Balarello, rapporteur pour avis de la commission des lois.

Suspension et reprise de la séance

présidence de M. Guy Fischer

Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. Jean-Pierre Sueur, Bernard Saugey, François Fortassin.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales.

Adoption des crédits de la mission «  Administration générale et territoriale de l'État ».

Relations avec les collectivités territoriales

Compte de concours financiers : Avances aux collectivités territoriales

MM Michel Mercier, rapporteur spécial de la commission des finances ; Bernard Saugey, rapporteur pour avis de la commission des lois.

M. Jean-Pierre Sueur, Jean-Pierre Fourcade, François Fortassin, Mme Josiane Mathon-Poinat, M. Pierre-Yves Collombat.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales.

Article 34 et état B

Amendement no II-262 du Gouvernement. - MM. le ministre délégué, le rapporteur spécial. - Adoption.

Mme Josiane Mathon-Poinat.

Adoption des crédits modifiés de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».

Adoption des crédits de la mission « Compte de concours financiers : Avances aux collectivités territoriales ».

Article additionnel avant l'article 51 bis ou après l'article 51 bis

Amendements nos II-201 rectifié de Mme Josiane Mathon-Poinat et II-223 rectifié de M. Jacques Blanc. - Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. Jacques Blanc, le rapporteur spécial, le ministre délégué, Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Retrait de l'amendement no II-223 rectifié ; rejet, par scrutin public, de l'amendement no II-201 rectifié.

Articles additionnels avant l'article 51 bis

Amendement no  II-239 de M. Jean-Pierre Sueur. - MM. Jean-Pierre Sueur, le rapporteur spécial, le ministre délégué. - Rejet.

Amendements identiques nos II-219 rectifié de M. Jacques Blanc et II-238 de M. Jean-Pierre Sueur ; amendement no II-222 rectifié de M. Jacques Blanc. - MM. Jacques Blanc, Jean-Pierre Sueur, le rapporteur spécial, le ministre délégué, le président de la commission. - Retrait des trois amendements.

Amendement no II-79 rectifié de M. Jean Louis Masson. - MM. Claude Belot, le rapporteur spécial, le ministre délégué. - Retrait.

Article 51 bis

Amendements identiques nos II-196 de Mme Josiane Mathon-Poinat et II-220 rectifié de M. Jacques Blanc ; amendements nos II-230 rectifié et II-221 rectifié bis de M. Jacques Blanc. - Mme Hélène Luc, MM. Jacques Blanc, le rapporteur spécial, le ministre délégué, Jean-Pierre Sueur, Yves Fréville. - Retrait des amendements nos II-220 rectifié, II-230 rectifié et II-221 rectifié bis ; rejet de l'amendement no II-196.

Adoption de l'article.

Article 51 ter. - Adoption

Articles additionnels après l'article 51 ter

Amendements identiques nos II-198 de Mme Josiane Mathon-Poinat, II-214 rectifié bis de M. Jacques Blanc et II-236 de M. Jean-Pierre Sueur. - Mme Hélène Luc, MM. Jacques Blanc, Jean-Pierre Sueur, le président de la commission, le rapporteur spécial, le ministre délégué. - Retrait de l'amendement no II-214 rectifié bis ; rejet des amendements nos II-198 et II-236.

Amendements identiques nos II-199 de Mme Josiane Mathon-Poinat et II-215 rectifié bis de M. Jacques Blanc ; amendement no II-237 de M. Jean-Pierre Sueur. - Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. Jacques Blanc, Jean-Pierre Sueur, le rapporteur spécial, le ministre délégué. - Retrait des amendements nos II-215 rectifié bis  et II-237 ; rejet de l'amendement no II-199.

Article 51 quater

Amendements nos II-216 rectifié à II-218 rectifié de M. Jacques Blanc, II-240 de M. Jean-Pierre Sueur et II-200 rectifié de Mme Josiane Mathon-Poinat. - MM. Jacques Blanc, Jean-Pierre Sueur, Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. le rapporteur spécial, le ministre délégué. - Retrait des amendements nos II-216 rectifié à II-218 rectifié et II-240 ; rejet de l'amendement no II-200 rectifié.

Adoption de l'article.

Article 51 quinquies. - Adoption

Article 51 sexies

Amendement no II-197 de Mme Josiane Mathon-Poinat. - Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. le rapporteur spécial, le ministre délégué. - Retrait.

Adoption de l'article.

Modification de l'ordre du jour

MM. Jean Arthuis, président de la commission des finances ; Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales.

Suspension et reprise de la séance

Action extérieure de l'État

MM. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial de la commission des finances ; Jean-Guy Branger, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères ; Mme Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères ; MM. Louis Duvernois, en remplacement de M. David Assouline, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles.

M. Yves Pozzo di Borgo.

Suspension et reprise de la séance

MM. Jean-Pierre Cantegrit, Aymeri de Montesquiou, Robert Hue, Jean-Pierre Plancade, Robert Del Picchia, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, M. Louis Duvernois, Mme Catherine Tasca, MM. André Ferrand, André Rouvière, Jacques Legendre, Richard Yung.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères.

Article 34 et état B

Amendement no II-3 de la commission. - MM. le rapporteur spécial, le ministre, Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Retrait.

Amendement no II-255 du Gouvernement. - MM. le ministre, le rapporteur spécial. - Adoption

Amendement no II-2 rectifié de la commission. - MM. le rapporteur spécial, le ministre, André Ferrand, le président de la commission, Mme Monique Cerisier-ben Guiga. - Rejet.

Amendements identiques nos II-4 rectifié de la commission et II-80 rectifié de M. David Assouline, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur spécial, Louis Duvernois, rapporteur pour avis ; le ministre. - Adoption des deux amendements identiques.

Amendement no II-5 rectifié de la commission. - MM. le rapporteur spécial, le ministre, le président de la commission, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, M. André Ferrand. - Adoption.

Amendement no II-6 de la commission. - MM. le rapporteur spécial, le ministre. - Retrait.

M. Serge Vinçon, président de la commission des affaires étrangères.

Adoption des crédits modifiés de la mission « Action extérieure de l'État ».

3. Textes soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution

4. Ordre du jour

compte rendu intégral

PRÉSIDENCE DE M. Adrien Gouteyron

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique sommaire de la précédente séance a été affiché.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

Article 51 septies (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Deuxième partie

Loi de finances pour 2007

Suite de la discussion d'un projet de loi

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Politique des territoires

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2007, adopté par l'Assemblée nationale (nos 77 et 78).

Politique des territoires

Deuxième partie
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Article 34 et état B

M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Politique des territoires ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Roger Besse, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, pour 2007, la mission « Politique des territoires » représente, au total, et compte tenu des modifications adoptées par l'Assemblée nationale, 641 millions d'euros en autorisations d'engagement et 711 millions d'euros en crédits de paiement.

Elle correspond à 728 emplois en équivalents temps plein, qui induisent des dépenses de personnel à hauteur de 49 millions d'euros. Ces chiffres font de la mission un « petit » budget, en termes de volume de crédits. Mais cette mission interministérielle retrace notamment trois grandes politiques publiques : l'urbanisme, l'aménagement du territoire, coeur de cette politique, et le tourisme.

Des connexions évidentes relient ces politiques. Pourtant, la mission apparaît moins comme un « tout » cohérent que comme la simple juxtaposition des cinq programmes qui la composent.

Compte tenu de ce sentiment de flou largement partagé, qu'il me soit permis de souhaiter une réorganisation du « bleu budgétaire » avec, en corollaire, messieurs les ministres, dans la mesure du possible, une collaboration plus étroite de vos services respectifs. Cette nouvelle approche permettrait, à mon sens, de mieux articuler les programmes entre eux et de mettre en exergue la stratégie d'ensemble, qui, à l'évidence, doit prévaloir.

En vue d'aller ici à l'essentiel, et renvoyant à mon rapport écrit pour le reste, je ne m'étendrai pas longuement sur le premier programme de la mission, qui concerne l'aménagement, l'urbanisme et l'ingénierie publique.

Les crédits, en la matière, s'élèvent à 84 millions d'euros. Dans cette enveloppe, notamment, l'État devrait accroître son soutien aux villes nouvelles, celles d'Évry, de Marne-la-Vallée et de Sénart, comme aux établissements publics d'aménagement chargés de la réalisation de grandes opérations d'urbanisme d'intérêt national, en l'occurrence, les projets « Euroméditerranée », « Plaine de France » et « Saint-Étienne », ainsi que trois nouveaux projets franciliens.

De même, je me bornerai à mentionner la subvention de 75 millions d'euros au bénéfice de l'Institut géographique national, l'IGN, à laquelle se résume, pour le principal, le deuxième programme de la mission, intitulé « Information géographique et cartographique ».

Au passage, je suis heureux de signaler que les ressources propres de l'IGN devraient excéder l'an prochain la moitié de son budget grâce au développement important de son chiffre d'affaires, lié à la hausse des ventes de licences d'accès aux bases de données géographiques tenues par cet opérateur, et qui connaissent un franc succès via Geoportail.

Je m'attarderai davantage sur le programme « Tourisme ». Ce programme se signale par la hausse globale de ses crédits : pour 2007, 86,2 millions d'euros sont demandés en autorisations d'engagement, soit une augmentation de près de 8 % par rapport à 2006, et 86,4 millions d'euros, compte tenu des modifications adoptées par l'Assemblée nationale, en crédits de paiement, soit une augmentation de plus de 6 %.

Il convient de saluer la priorité ainsi accordée par le projet de loi de finances à un secteur qui évolue dans un contexte concurrentiel international que nous savons tous difficile, le développement touristique de notre pays se révélant plus faible que celui des autres pays comparables.

Cependant, il est de mon devoir d'attirer l'attention de la Haute Assemblée sur le niveau des dettes aujourd'hui exigibles qui résultent des exercices antérieurs : d'une part, la mise en oeuvre, dans le domaine touristique, des contrats de plan État-région de la période 2000-2006 laisse 21,9 millions d'euros de dettes. Pour l'apurement de ces dettes, seuls 8 millions d'euros sont inscrits dans le projet de loi de finances. D'autre part, le programme de consolidation des équipements de tourisme social, lui aussi mis en place pour la même période, enregistre au moins 4,9 millions d'euros d'impayés.

Un fonds de concours a été mis en place, mais à hauteur de 2 millions d'euros seulement. L'Assemblée nationale, sur la proposition du Gouvernement, d'ailleurs quelque peu incité par nos collègues députés, a adopté, eu égard à la nécessité de solder ces dettes importantes, un amendement abondant de 2,8 millions d'euros les crédits de paiement initialement prévus.

On ne peut qu'applaudir à cette initiative, mais cela ne suffira pas à solder l'ensemble des dettes constatées. Monsieur le ministre délégué au tourisme, la commission des finances vous serait reconnaissante de bien vouloir exposer devant le Sénat de quelle manière cette situation préoccupante pourra être réglée dans les prochains mois.

J'en viens, à présent, au quatrième programme de la mission, relatif à l'aménagement du territoire. Je le signale d'emblée, ce programme, qui concentre environ la moitié des crédits de la mission, ne représente toutefois que le dixième de l'effort budgétaire, 2,7 milliards d'euros, qui doit être consacré, en 2007, à l'aménagement du territoire au sens large du terme, à travers d'autres programmes et d'autres missions.

Le programme « Aménagement du territoire », quant à lui, représente, après le vote de l'Assemblée nationale, 317 millions d'euros en autorisations d'engagement et 400 millions d'euros en crédits de paiement.

Ces crédits sont caractérisés par la diminution importante des autorisations d'engagement, par rapport à 2006 : moins 20 %. Cela correspond à une volonté d'assainissement de la part du Gouvernement. En effet, le décalage important entre le niveau des autorisations d'engagement et celui, plus faible jusque-là, des crédits de paiement ouverts chaque année, a conduit, dans le cadre du Fonds national d'aménagement et de développement du territoire, le FNADT, à une accumulation d'engagements « gagés » sur les exercices futurs. Le rattrapage était devenu nécessaire, voire indispensable.

On l'a bien vu cette année : la réserve de précaution constituée sur les crédits du programme, au mois de mai dernier, a dû être dégelée, libérant presque 14 millions d'euros ; et le décret d'avance du 1er août 2006 a dû abonder à hauteur de 24 millions d'euros les crédits de paiement inscrits dans la loi de finances initiale.

C'est dans ce contexte que l'Assemblée nationale a adopté un amendement, présenté par le Gouvernement, visant à majorer de 100 millions d'euros les crédits de paiement destinés à honorer les engagements pris au titre du FNADT.

La commission des finances approuve cette nouvelle orientation, qui est de nature à rompre opportunément avec les tensions existant en matière de financement et les retards de paiement dus aux pratiques antérieures.

C'est dans le même état d'esprit que je salue la double impulsion donnée, en 2006, par le développement des 66 pôles de compétitivité et par la mise en place de 176 pôles d'excellence rurale, dont le nombre doit être porté à 200 aujourd'hui même, me semble-t-il, monsieur le ministre délégué à l'aménagement du territoire.

M. Christian Estrosi, ministre délégué à l'aménagement du territoire. Il sera supérieur encore !

M. Roger Besse, rapporteur spécial. Ma satisfaction est à la mesure des espoirs placés dans ces dispositifs et des moyens mis en oeuvre. Je rappelle que des crédits à hauteur de 1,5 milliard d'euros doivent être versés, au total, sur trois ans, aux pôles de compétitivité et que le financement des pôles d'excellence rurale a été prévu à hauteur de 180 millions d'euros en trois ans.

Cependant, il est bon de répéter l'inquiétude que j'ai déjà formulée l'année dernière, ici même. Un effet de décalage aggravé pourrait résulter de ces politiques, créant une faille entre les territoires « labellisés » et les autres.

Il faut donc veiller, monsieur le ministre délégué à l'aménagement du territoire, à ce que ces pôles de compétitivité comme ceux d'excellence rurale ne conduisent pas à une marginalisation des territoires les plus démunis.

Compte tenu des changements importants qui vont intervenir en 2007 pour l'aménagement du territoire - nouvelles règles relatives à la prime d'aménagement du territoire, nouvelle génération de contrats Etat-régions dits « contrats de projets » -, ces territoires doivent faire l'objet d'une sollicitude toute particulière et d'un traitement qui leur permettent de ne pas avoir le sentiment d'être sacrifiés ou oubliés.

Je terminerai mon propos en évoquant le programme « Interventions territoriales de l'État ».

Ce programme est assez original dans la mesure où il est constitué par l'addition d'actions régionales ou interrégionales, de nature interministérielle, à enjeu réputé de portée nationale. Les ressources budgétaires qui y sont consacrées se trouvent retranchées des programmes où elles auraient eu vocation à apparaître, à l'exception des dépenses en personnel ; et ces ressources sont fongibles dans le périmètre de chaque action exclusivement.

Les huit actions retenues, dans ce cadre, en 2006, se trouvent reconduites pour 2007. Elles sont très diverses et concernent le développement de la bande rhénane ou de la vallée de la Loire, la « reconquête » de la qualité de l'eau en Bretagne, la restauration en zone humide du marais poitevin, ou encore le programme d'investissement en Corse.

Les crédits relatifs à ces différents titres s'élèvent, au total, à 78,5 millions d'euros au titre des autorisations d'engagement et à 64,8 millions d'euros au titre des crédits de paiement, après les modifications intervenues à l'Assemblée nationale.

La physionomie de ce programme, au regard de la LOLF, fait largement figure d'anomalie, mais j'aurai l'occasion d'y revenir tout à l'heure en défendant l'amendement que la commission des finances a décidé de présenter sur ce point.

Dès lors, il importe de limiter au strict nécessaire les dérogations que le programme autorise aux principes généraux de l'organisation budgétaire, d'autant que la mesure de sa performance reste, à mes yeux, assez médiocre.

Sous réserve de l'adoption de l'amendement qu'elle vous présentera, la commission des finances vous recommande, mes chers collègues, d'adopter les crédits de la mission « Politique des territoires » pour 2007. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Mortemousque, rapporteur pour avis.

M. Dominique Mortemousque, en remplacement de M. Jean-Paul Alduy, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, mon intervention vise à porter une appréciation globale sur la mission « Politique des territoires ».

J'évoquerai, tout d'abord, le périmètre de cette mission, en exprimant un motif de satisfaction : le rattachement du programme « Stratégie en matière d'équipement », qui finançait diverses dépenses de personnel et de fonctionnement sans rapport avec la présente mission, à un programme de la mission « Transports » rassemblant des crédits de nature très proche. Il s'agit là d'une mesure de simplification bienvenue, que nous avions d'ailleurs appelée de nos voeux l'an passé.

Pour autant, des problèmes de périmètre subsistent. Cette année encore, le programme « Aménagement, urbanisme et ingénierie publique », AUIP, ne reflète qu'imparfaitement les moyens alloués à la politique de l'urbanisme, les crédits de rémunération des personnels en poste dans les services déconcentrés du ministère de l'équipement étant, quant à eux, toujours inscrits dans la mission « Transports ».

Ces crédits « extériorisés » représentent une enveloppe considérable de 1,2 milliard d'euros, soit près du double du montant des crédits inscrits dans la présente mission. En conséquence, nous ne nous prononçons que sur 7 % des crédits bénéficiant au programme AUIP, ce qui est, vous en conviendrez, messieurs les ministres, peu conforme à l'esprit de la LOLF.

S'agissant de l'évolution des crédits, je relève deux tendances contradictoires.

D'une part, on constate une volonté incontestable de bonne gestion et de sincérité budgétaire, dont témoigne notamment le rapprochement du montant des autorisations d'engagement et des crédits de paiement dans le programme « Aménagement du territoire », afin d'éviter, à l'avenir, tout engagement au titre des dépenses qui ne peuvent être couvertes, faute de crédits de paiement suffisants.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !

M. Dominique Mortemousque, rapporteur pour avis. Cette préoccupation de bonne gestion se manifeste aussi dans le souci d'apurer les dettes de l'État résultant d'engagements passés, que ce soit dans le cadre des contrats de plan Etat-régions, CPER, ou au titre du FNADT, même si, comme vient de le relever notre collègue Roger Besse, s'agissant du volet « tourisme » des CPER 2000-2006, cet effort doit être poursuivi.

D'autre part, on constate une montée en puissance des financements extrabudgétaires, qui est particulièrement visible pour le programme «Interventions territoriales de l'État », dit PITE.

Ainsi, la diminution de plus de 40 % des crédits du PITE en autorisations d'engagement s'explique à la fois par la prise en charge directe de certaines dépenses de l'action n° 4 « Programme exceptionnel d'investissements en faveur de la Corse » par des agences comme l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, l'ANRU, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, l'ADEME, ou encore l'Agence de l'eau, et par la création d'un important fonds de concours de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France, l'AFITF, pour un montant de 71 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 19,3 millions d'euros en crédits de paiement.

Outre le fait que cette évolution atténue la fongibilité caractéristique des crédits du PITE, elle va à l'encontre de l'objectif de rassemblement dans une même mission de l'ensemble des crédits concourant à une politique.

Je ne m'étendrai pas sur les évolutions budgétaires des différents programmes, déjà largement commentées par le rapporteur spécial, sauf pour m'étonner de la diminution de près de 7 % des crédits destinés aux agences d'urbanisme, à un moment où le Gouvernement souhaite relancer la planification territoriale.

Avant de conclure, je souhaiterais revenir sur le contexte dans lequel est élaboré ce projet de budget pour 2007.

L'année 2007 sera une année charnière pour la politique des territoires, avec notamment le démarrage d'une nouvelle programmation de fonds structurels représentant, pour la France, un apport de 13,4 milliards d'euros pour la période 2007-2013.

La commission des affaires économiques se félicite, à cet égard, du maintien de l'objectif 2, dont la suppression avait été, un temps, évoquée. Certes, il nous faut maintenant intégrer les nouvelles règles du jeu, notamment la suppression du zonage des aides et l'obligation de prendre en compte les priorités dites de Lisbonne relatives à l'innovation, à l'emploi et au développement durable.

À ce sujet, pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre délégué à l'aménagement du territoire, si les programmes opérationnels qui remplaceront les actuels documents uniques de programmation, les DOCUP, seront prêts pour entrer en vigueur au 1er janvier 2007 ?

L'année 2007 sera aussi celle de l'entrée en vigueur d'une nouvelle génération de contrats de projets État- collectivités territoriales, dotés également de moyens considérables.

À cet égard, je renouvellerai une suggestion que j'ai déjà formulée l'an passé. Il serait utile de mettre en évidence dans le « bleu budgétaire » les crédits contractualisés au sein de chaque programme concerné et d'en fournir une donnée consolidée à l'échelle de la mission.

Par ailleurs, on le sait, compte tenu de leur recentrage sur certaines thématiques, les nouveaux contrats de projets n'intégreront plus certains pans de l'action publique dont les implications, en termes d'aménagement du territoire, sont pourtant incontestables. C'est notamment le cas des investissements dans le domaine routier.

Afin d'établir des objectifs partagés, qui devraient être pris en compte dans d'autres missions que celle-ci, ne serait-il pas opportun d'établir un document de politique transversale consacré à l'aménagement du territoire ? C'est une proposition que je formule pour l'année prochaine et qui, à mon sens, se justifie, d'autant que, comme vous l'avez vous-même souligné, monsieur le ministre délégué à l'aménagement du territoire, lors de votre audition devant la commission des affaires économiques, la politique d'aménagement du territoire s'est récemment ouverte à de nouveaux domaines, tels que le développement économique, les technologies de l'information et de la communication ou encore la politique de la ville, et qu'elle tend à devenir de plus en plus transversale.

En conclusion, la commission des affaires économiques s'est déclarée favorable à l'adoption des crédits de la mission « Politique des territoires ». (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à M. Christian Gaudin, rapporteur pour avis.

M. Christian Gaudin, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, mon propos portera sur la politique des pôles, qui constitue l'un des volets les plus novateurs de l'action publique dans le domaine de l'aménagement du territoire.

Le dispositif des pôles de compétitivité est désormais opérationnel. Les 66 pôles labellisés au cours de l'été 2005 sont en place et fonctionnent, une dizaine de nouveaux dossiers de candidature étant, par ailleurs, en cours d'examen. Rassemblant en moyenne soixante-dix-sept entreprises et une quinzaine de centres de recherche, chaque pôle implique généralement six ou sept collectivités publiques.

Si le fonctionnement des structures de gouvernance est partiellement subventionné, l'essentiel du soutien public en faveur des pôles de compétitivité porte, comme vous le savez, sur les projets collaboratifs de recherche et développement.

Ainsi, 165 dossiers, représentant un investissement en recherche et développement de près de 1,8 milliard d'euros et mobilisant 4 000 chercheurs, ont d'ores et déjà été retenus dans le cadre de deux appels à projets. Quelque 540 millions d'euros ont été engagés par l'État, auxquels s'ajouteront plus de 100 millions d'euros en provenance des collectivités territoriales.

Cette sélection laisse pourtant de côté un certain nombre de dossiers, non sans susciter quelques interrogations.

Les acteurs des pôles ne comprennent pas toujours les critères de sélection retenus. Prenons garde de ne pas décevoir les attentes qu'a suscitées la mise en place des pôles de compétitivité après une mobilisation particulièrement forte dans les territoires ! Pour que perdure la dynamique enclenchée, il importe que les critères de sélection soient suffisamment transparents et que les soutiens annoncés parviennent rapidement à leurs bénéficiaires.

On ne peut, à cet égard, que se féliciter des initiatives prises par le Gouvernement en cours d'année pour simplifier les circuits financiers et en réduire les délais : regroupement des crédits d'intervention des six ministères concernés ainsi que d'une partie des crédits des agences dans un fonds unique géré par le ministère des finances ; remplacement du dispositif d'exonérations de charges sociales dont la gestion s'avérait complexe par un abondement complémentaire des soutiens au profit des PME ; mise en place, enfin, d'un dossier-type de demande de subvention et d'un guichet unique afin d'alléger l'instruction des dossiers.

Confiants dans l'efficacité du dispositif public d'accompagnement, nous espérons que le troisième appel à projets, qui devrait s'achever dans le courant du mois de décembre, permettra de retenir un maximum de dossiers.

J'en viens maintenant aux pôles d'excellence rurale, les PER, qui sont, pour les zones rurales, l'équivalent des pôles de compétitivité pour nos métropoles.

De fait, on retrouve dans ce dispositif plusieurs caractéristiques inspirées des pôles de compétitivité : exigence d'un caractère structurant pour le territoire rural concerné, nécessité d'un partenariat entre le public et le privé, attention portée à l'innovation, sous toutes ses formes. Les modalités de l'accompagnement public diffèrent cependant, puisque la labellisation en PER est directement assortie d'un engagement de financement de l'État, qui ne porte que sur des investissements matériels, à l'exclusion de toute dépense de fonctionnement.

L'ancrage rural est garanti par l'obligation, pour les pôles, d'être situés soit en zone de revitalisation rurale, soit dans une aire urbaine de moins de 30 000 habitants, chaque pôle devant, en outre, s'appuyer en priorité sur un « territoire de projets ».

Organisé en deux temps, l'appel à candidatures a rencontré un très vif succès. Dans un premier temps, 353 dossiers ont été déposés, puis 418 l'ont été, dans un second temps. Pour tenir compte de ce succès, le nombre de pôles sélectionnés a été fort opportunément revu à la hausse : 176 projets ont ainsi été labellisés en juin dernier et, comme vous l'avez annoncé, monsieur le ministre délégué à l'aménagement du territoire, 200 devraient l'être dans le courant de ce mois, ce qui portera le total à 376, au lieu des 300 initialement envisagés.

Vous avez indiqué que l'enveloppe destinée aux pôles d'excellence rurale serait réévaluée en conséquence à 210 millions d'euros.

Cette réévaluation sera-t-elle suffisante dès lors que, sur cette enveloppe, 120 millions d'euros sont destinés aux 176 pôles de la première vague ? Les 200 pôles de la deuxième vague ne risquent-t-ils pas d'être moins bien traités ? C'est une question que je pose aujourd'hui. Là encore, il importe de ne pas décevoir les espoirs qu'on a fait naître.

Au-delà de la question financière, l'un des enjeux pour l'avenir est la capacité des pôles à échanger entre eux et à établir des synergies. Des collaborations existent déjà, non seulement entre pôles de compétitivité, mais aussi entre certains pôles de compétitivité et certains pôles d'excellence rurale, comme c'est le cas dans ma région entre le pôle végétal spécialisé, pôle labellisé à vocation internationale, et un pôle d'excellence rurale portant sur la valorisation des plantes médicinales.

Ces contacts méritent d'être complétés par une mise en réseau efficace et tenant compte des précautions requises par l'impératif de sécurité économique. Ils permettent également d'apporter une cohérence d'aménagement et de développement des territoires.

En conclusion, la commission des affaires économiques a confirmé son soutien à la politique des pôles conduite par le Gouvernement. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Mortemousque, rapporteur pour avis.

M. Dominique Mortemousque, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, mon intervention portant sur la politique du tourisme, je rappellerai, en premier lieu, la place et l'importance de ce secteur dans notre économie.

Rassemblant environ 200 000 entreprises, le tourisme a représenté 6,4 % du produit intérieur brut en 2005 et occupé 2 millions d'emplois directs et indirects, dont près de 900 000 salariés.

Avec 76 millions de touristes accueillis l'an passé, la France reste la première destination touristique mondiale. Le poste « tourisme » de la balance des paiements a dégagé en 2005 un solde positif de près de 9 milliards d'euros, redevenant ainsi le premier poste excédentaire de cette balance, devant l'automobile et l'agroalimentaire.

Pour autant, ces bons résultats ne doivent pas occulter certains signes de faiblesse. Ainsi, la France ne semble pas tirer autant profit du dynamisme du tourisme mondial que d'autres pays. Certes, les arrivées de touristes étrangers progressent, mais moins vite que la moyenne mondiale ou européenne, ce qui signifie que nous perdons des parts de marché. En outre, les recettes tirées du tourisme international ne sont pas à la hauteur de notre situation de premier pays visité.

Un tel contexte plaide évidemment pour une politique du tourisme forte et offensive, afin de conforter l'atout que représente ce secteur pour notre économie et nos territoires.

Le programme « Tourisme » qui nous est soumis va dans ce sens. Les crédits qui lui sont destinés augmentent de 7,8 % en autorisations d'engagement et de 10,1 % en crédits de paiement.

Ce renforcement des moyens bénéficie, d'abord, à la promotion de l'image touristique de la France, ce dont il faut se féliciter.

Les crédits destinés à l'action « Économie du tourisme » sont également en progression en autorisations d'engagement, notamment dans l'objectif de doubler les moyens consacrés au plan Qualité tourisme.

En revanche, tel n'est pas le cas des crédits consacrés à l'action « Accès aux vacances ».

Certes, leur diminution est d'abord liée aux économies permises par la fusion de l'organisme Bourse Solidarité Vacances avec l'Agence nationale pour les chèques-vacances.

Si des crédits sont bien prévus en faveur de l'accès aux vacances de publics particuliers, force est de constater que l'aide à la pierre en faveur du tourisme social et associatif ne figure pas en bonne place dans ce budget.

M. Thierry Repentin. C'est vrai !

M. Dominique Mortemousque, rapporteur pour avis. Ainsi, le programme de consolidation des équipements de tourisme social n'était initialement pas doté, le Gouvernement renvoyant son financement, pour la deuxième année consécutive, à un fonds de concours de l'Agence nationale pour les chèques-vacances qui, pour des raisons de procédure, n'a encore jamais été versé. Or, l'État accuse un important retard de paiement au titre de ses engagements passés à l'égard des associations de tourisme.

C'est pourquoi l'Assemblée nationale, et nous nous en félicitons, a inscrit au programme « Tourisme » 2,8 millions d'euros supplémentaires prélevés sur le programme « Interventions territoriales de l'État ». Si cette enveloppe, ajoutée au fonds de concours dont on espère qu'il sera bientôt débloqué, permettra sans doute de régler la dette de l'État correspondant à des travaux déjà réalisés, soit 4,9 millions d'euros, elle ne suffira pas à couvrir la totalité de ses engagements au titre du programme de consolidation.

Messieurs les ministres, nous voudrions savoir comment vous comptez faire face à cette situation difficile. Des moyens supplémentaires pourront-ils être alloués à cette politique en cours d'année ?

M. Thierry Repentin. Très bien !

M. Dominique Mortemousque, rapporteur pour avis. Il me paraît important de rappeler que, au-delà de sa fonction d'accueil de tous les publics, notamment des plus modestes, le tourisme associatif joue un rôle significatif en termes d'aménagement du territoire, en particulier dans les zones rurales où sont implantés 40 % de ses équipements.

Dans certains territoires, compte tenu du coût des travaux de rénovation, le parc du secteur associatif ne pourra perdurer sans soutien public. Si la gestion de ces structures a pu parfois laisser à désirer, il serait dommage de supprimer cette aide à la pierre,...

Mme Bariza Khiari et M. Thierry Repentin. Très bien !

M. Dominique Mortemousque, rapporteur pour avis. ...d'autant que les montants concernés restent raisonnables par rapport aux sommes mobilisées en faveur de certaines politiques d'aménagement du territoire.

Je voudrais, par ailleurs, insister sur un autre sujet de préoccupation, à savoir le financement de la contractualisation État-collectivités territoriales en matière de tourisme.

Le rapporteur spécial a évoqué le problème de la dette de l'État au titre du volet « tourisme » des contrats de plan État-régions 2000-2006. Concernant la période 2007-2013, nous savons que le tourisme, après avoir été exclu dans un premier temps du champ des nouveaux contrats, devrait finalement pouvoir y figurer, au moins de manière sélective. Pourtant, cette décision ne semble pas avoir de traduction dans le présent budget, le programme « Tourisme » comportant seulement des crédits destinés à des « contractualisations locales spécifiques hors contrats de projets ».

Pouvez-vous nous rassurer, monsieur le ministre délégué au tourisme, sur les intentions du Gouvernement en la matière ? La commission des affaires économiques est, en effet, très attachée à la présence d'un volet « tourisme » dans les contrats de plan État-régions.

Dans le passé, les crédits contractualisés ont permis le financement de projets touristiques, certes pas toujours suffisamment structurants, mais qui ont incontestablement contribué à la vitalité et à l'attractivité des territoires, notamment en milieu rural.

Je profite d'ailleurs de cette occasion pour mettre l'accent sur la nécessité de favoriser une meilleure structuration et une meilleure commercialisation de l'offre touristique dans les zones rurales et d'inciter dans ces territoires - je pense notamment à un département comme le mien, la Dordogne - à l'étalement de l'activité touristique sur toute l'année. Aussi, j'aimerais savoir, monsieur le ministre, si vous entendez prendre certaines mesures en ce sens.

Sous ces réserves, la commission des affaires économiques s'est déclarée favorable à l'adoption des crédits de la mission « Politique des territoires ». (Applaudissements.)

M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :

Groupe Union pour un mouvement populaire, 29 minutes ;

Groupe socialiste, 22 minutes ;

Groupe Union centriste-UDF, 14 minutes ;

Groupe communiste républicain et citoyen, 13 minutes ;

Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 12 minutes.

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d'intervention générale et celui de l'explication de vote.

Je rappelle également qu'en application des décisions de la conférence des présidents aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de trente minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Évelyne Didier.

Mme Évelyne Didier. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous voici réunis pour débattre des crédits de la mission « Politique des territoires » au sein de la dernière loi de finances de cette législature.

Je ne reviendrai pas, même si je partage leur analyse, sur le manque de cohérence de cette mission évoquée par les rapporteurs, me contentant de rappeler que, depuis cinq années, elle a été rattachée à des ministères de tutelle différents ; par ailleurs, les programmes ne sont pas directement liés les uns aux autres et peinent à trouver une cohérence d'ensemble.

Ainsi, au regard du temps de parole limité de mon groupe, je concentrerai mon intervention sur les programmes de cette mission qui me semblent porter les plus lourds enjeux : « Aménagement du territoire » et « Tourisme ».

Tout d'abord, le programme « Aménagement du territoire » représente, à lui seul, près de la moitié des crédits de la mission.

Ces crédits sont, cette année, en baisse significative pour les autorisations d'engagement, alors que l'on note une faible augmentation en ce qui concerne les crédits de paiement.

Il n'est d'ailleurs pas sans intérêt de relever que l'action qui baisse le plus significativement en autorisations d'engagement est celle qui porte sur le développement territorial et la solidarité, dont les crédits diminuent de près de 100 millions d'euros, ce qui est particulièrement significatif de la conception de l'aménagement du territoire du Gouvernement.

Dans ce sens, je souhaiterais évoquer la transformation du Comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire en Comité interministériel de d'aménagement et de compétitivité des territoires, particulièrement emblématique de cette conception fondée sur la compétition entre les territoires.

Ce programme a, en outre, servi de cadre à la mise en oeuvre des fameux pôles de compétitivité par le biais de la première action « Attractivité et développement économique ». On dénombre aujourd'hui 66 de ces pôles.

La justification pour le Gouvernement de ce nouveau mécanisme réside dans la volonté de favoriser l'innovation économique et de créer des pôles d'excellence. Ces nouveaux pôles seraient à la fois en mesure de créer de l'emploi et de redynamiser l'économie et la recherche.

Pourtant, si nous ne remettons pas en cause vos objectifs, monsieur le ministre délégué à l'aménagement du territoire, nous pensons que ces nouveaux dispositifs portent en eux de véritables risques.

Premièrement, en subordonnant directement la recherche aux entreprises, vous courez un risque sérieux de voir la recherche fondamentale largement abandonnée au profit de la recherche appliquée, directement valorisable.

Deuxièmement, si l'État leur consacre des financements importants, soit 1,5 milliard d'euros sur trois années, notamment par la voie des primes à l'aménagement du territoire et par des exonérations fiscales, l'expérience des zones franches devrait nous inciter à plus de prudence à l'égard des mécanismes d'incitation en faveur des entreprises.

Les documents budgétaires estiment le coût des exonérations de charges fiscales et sociales pour les entreprises s'implantant dans des zones particulières à 879 millions d'euros pour 2007. Il s'agit là d'une somme très importante, sans compter que la totalité des exonérations de toutes sortes représentent sur l'ensemble de la loi de finances près de 80 milliards d'euros, ce qui n'est vraiment pas rien !

Nous souhaiterions connaître l'état de la réflexion du Gouvernement sur ces dispositifs qui n'ont pas permis d'enrayer le cycle infernal des fermetures et délocalisations d'entreprises.

Ainsi, les collectivités publiques auront beau investir dans la création d'infrastructures routières, créer des zones d'accueil pour les entreprises, aménager la fiscalité dans certaines zones défavorisées, consentir des aides, tous ces mécanismes seront voués à l'échec si, dans le même temps, on laisse la liberté totale aux entreprises de bénéficier de tous ces avantages sans jamais avoir à en rendre compte à la collectivité des citoyens contribuables.

Après la reconnaissance de la responsabilité pénale des entreprises depuis maintenant dix ans, il serait temps aujourd'hui de reconnaître leur responsabilité sociale et territoriale. Nous devons imposer l'idée que toute entreprise qui détruit des emplois sur un territoire, alors même qu'elle ne se trouve pas en difficulté, devrait être obligée, au-delà du simple remboursement de la prime d'aménagement du territoire perçue, de favoriser la création de nouveaux emplois tout en compensant financièrement les conséquences pour les collectivités locales.

Ces obligations seraient non pas des obligations de moyens, dont les entreprises feraient semblant de s'acquitter, mais bien des obligations de résultat, accompagnées de bilans d'étape.

Cette nouvelle responsabilité territoriale des entreprises que nous appelons de nos voeux nous permettrait d'empêcher, au moins partiellement, la désindustrialisation de nos territoires et d'amortir ses conséquences en matière budgétaire et d'emplois.

Troisièmement, nous estimons que ce dispositif entérine le passage d'une politique visant à structurer et à entretenir sur le long terme des systèmes productifs axés sur le développement territorial à une politique visant à soutenir de manière temporaire, sélective et hiérarchisée des potentiels polarisés.

Si les territoires défavorisés ne sont pas soutenus grâce à la péréquation, notamment au regard de la baisse des actions en faveur de la solidarité territoriale, vous confirmerez une France à deux vitesses, où seuls les territoires les plus riches pourront présenter leur candidature aux pôles de compétitivité ou d'excellence.

D'accord pour faire émerger l'excellence, mais pas sans développer en parallèle de nécessaires solidarités ! Or, sous couvert de nouveaux modes de péréquation territoriale, vous mettez en place un système qui accroît les inégalités.

De plus, en spécialisant les territoires, nous augmentons dangereusement leur dépendance aux mutations de l'économie mondiale.

Enfin, nous souhaiterions qu'au minimum soit institué un mécanisme d'évaluation qui permettrait de mesurer véritablement l'impact de ces pôles sur la solidarité nationale.

Dans le même esprit, l'État a engagé, en 2006, la création de pôles ruraux dits d'excellence, représentant un investissement global de plus de 607 millions d'euros ; 176 de ces pôles sont désormais labellisés dans 86 départements et 400 pôles d'excellence rurale devraient voir le jour d'ici à la fin de l'année.

Vous avez également indiqué en commission à l'Assemblée nationale, monsieur le ministre délégué à l'aménagement du territoire, que le nombre de projets retenus serait porté de 120 à 200 au cours de la deuxième vague de labellisation.

A ce titre, le rapporteur à l'Assemblée nationale remarquait, non sans ironie, qu'il faudra ensuite voir si les crédits de paiements correspondants seront inscrits dans le budget, à l'inverse de ce qui se passe pour le Fonds national d'aménagement et de développement du territoire, le FNADT, dont les crédits ne permettent pas d'honorer l'ensemble des engagements pris.

Concernant ce fonds, l'exécution des projets est pénalisée par un décalage entre autorisations d'engagement et crédits de paiement.

Certes, vous avez annoncé, monsieur le ministre, l'attribution d'une enveloppe de 100 millions d'euros supplémentaires, mais cela n'est pas suffisant. Il reste à prendre de nouvelles autorisations d'engagements afin d'assurer le renouvellement de projets.

J'en viens maintenant aux nouveaux contrats de projets pour la période 2007- 2013.

Selon le Gouvernement, ces contrats sont axés autour des mêmes priorités que les nouveaux pôles, à savoir la compétitivité et l'innovation. On se retrouve donc dans la même logique de rentabilité qui conditionne dorénavant toute intervention publique.

Nous estimons que votre conception de l'aménagement du territoire n'est pas pertinente.

S'il faut, certes, permettre le développement économique par des actions en direction des entreprises, il convient également de mener une action structurante en termes d'infrastructures et de services publics sur l'ensemble du territoire national.

Le projet du Gouvernement pour l'école est, à ce titre, particulièrement emblématique de sa conception de l'éducation : il s'agit d'adapter les formations aux bassins d'emploi, de modeler les élèves au marché du travail. Tout est alors axé autour de l'entreprise.

Pour les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen, l'aménagement du territoire est conditionné non seulement par la qualité des infrastructures et des services publics, mais également par la capacité des pouvoirs publics d'assurer la formation à tous les âges de la vie, de garantir la péréquation territoriale et la cohésion nationale grâce à des mécanismes solidaires.

Or, lorsque nous vous écoutons, monsieur le ministre, nous ne pouvons qu'être inquiets. Vous déclarez : « Le seul service public que chacun est sûr de trouver dans les 36 000 communes de France, c'est la mairie ». Force est de reconnaître que vous avez presque réussi si je m'en tiens aux attaques incessantes qu'a portées votre Gouvernement contre les services publics !

Vous prenez appui sur les chiffres en hausse de la démographie en milieu rural pour justifier le fait que ces territoires seraient attractifs. Pourtant, nous ne cessons de constater des fermetures d'écoles, d'hôpitaux, de bureaux de poste, etc.

Certes, une charte a été signée entre l'Association des maires de France, les services de l'État et quinze opérateurs de services publics, mais les problèmes fondamentaux ne sont pas posés.

Tant que des politiques de libéralisation continueront d'être menées et qu'il sera demandé aux opérateurs de service public de réduire leurs coûts pour augmenter la rentabilité de leur activité, les services publics ne pourront être maintenus en milieu rural.

Pour rester dans le domaine des télécommunications, dans les contrats de projets 2007- 2013, un volet est spécifiquement prévu pour permettre aux collectivités qui le souhaitent de bâtir leur propre réseau haut débit afin de favoriser la concurrence et ainsi d'assurer de meilleurs services au meilleur coût. Mais pourquoi permet-on l'intervention des collectivités territoriales si ce n'est pour pallier les carences du secteur privé ?

Alors que, de tous côtés, s'élèvent des voix pour demander l'intégration du haut débit dans le service universel, le Gouvernement français n'a pas soulevé cette question au sein des institutions européennes et ne donne pas de signe en ce sens.

La question de l'offre de transport public est également structurante pour l'aménagement du territoire.

Là encore, la régionalisation des transports a une nouvelle fois été l'occasion pour l'État de se défausser de ses responsabilités sur les collectivités locales. C'est ainsi que, s'agissant de l'exécution des contrats de plan, tout projet dont les études n'auront pas été lancées sera purement et simplement abandonné !

Tout cela laisse à penser que, demain, nous aurons des villes hypertrophiées et des secteurs ruraux plus ou moins abandonnés à leur sort. C'est une curieuse conception de la cohésion nationale !

J'en viens au programme « Tourisme ».

Une nouvelle fois, nous ne pouvons que regretter que les objectifs affichés en ce domaine concernent uniquement les opérations de promotion du tourisme français à l'étranger, dont la dotation progresse de près de 5 millions d'euros, représentant ainsi près de 50 % du programme.

Pour les autres actions, à savoir l'économie touristique et l'accès aux vacances, les subventions sont en baisse depuis plusieurs années. Dans les deux cas, le manque de moyens affecte des éléments essentiels de la politique touristique des territoires.

Il s'agit, d'une part, des actions de contractualisation avec les régions pour lesquelles les engagements dans le cadre des contrats de plan État-régions ne seront pas tenus, laissant une dette de plus de 35 millions d'euros. En outre, les futurs contrats de projets ne semblent pas non plus fort ambitieux en ce domaine, puisque, jusqu'à présent, seulement 1,4  million d'euros en crédits de paiement et 5,8 millions d'euros en autorisations d'engagement sont prévus.

Il s'agit, d'autre part, des aides apportées au tourisme social à travers le programme de consolidation de ses hébergements.

Ainsi, les acteurs du tourisme social, dont nous pouvons comprendre les inquiétudes, s'alarment, cette année encore, de l'absence de moyens mis à disposition du plan de consolidation du patrimoine du tourisme social qui place les associations et les collectivités locales et territoriales face à d'importants besoins de rénovation.

Pourtant, quatre Français sur dix, faut-il le rappeler, ne partent toujours pas en vacances ! Il serait donc urgent de permettre l'accès de tous aux loisirs.

En conclusion, je rappellerai que, pour les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen, la seule voie qui permettrait concrètement le développement du tourisme, c'est l'augmentation du pouvoir d'achat pour tous, ce qui passe, notamment, par une augmentation des salaires et une meilleure répartition de la richesse nationale.

Pour toutes les raisons que je viens d'évoquer, nous ne pourrons voter les crédits de la mission « Politique des territoires ».

M. Christian Estrosi, ministre délégué. J'avais fini par en douter !

M. le président. La parole est à Mme Yolande Boyer.

Mme Yolande Boyer. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, mon intervention à propos de la mission « Politique des territoires » portera uniquement sur le programme « Aménagement du territoire », le plus important, puisqu'il concentre à peu près la moitié des crédits de la mission.

J'émettrai d'abord des critiques et rappellerai certaines des questions posées au Sénat et à l'Assemblée nationale sur l'organisation de la politique d'aménagement du territoire.

Comment évaluer réellement le périmètre ministériel de cette politique ? Depuis cinq ans, elle est passée du ministère de la fonction publique à celui des transports et de l'équipement, pour dépendre, aujourd'hui, du ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire

En outre, comme cela vient d'être dit, la Délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale a été réorganisée en Délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires, en intégrant l'ancienne mission interministérielle sur les mutations économiques.

Avouez qu'on a du mal à s'y retrouver et que de tels mouvements ne sont guère propices à une réelle politique d'aménagement du territoire !

Est-ce une conséquence ? Cela vous conduit à organiser cette politique autour de la concentration et de la compétition.

Certes, la philosophie des pôles de compétitivité est intéressante : travailler en réseaux, chercher les complémentarités, mutualiser les expériences entre chercheurs, et entrepreneurs.

M. Christian Gaudin, rapporteur pour avis. Très bien !

Mme Yolande Boyer. Instaurer une compétition entre territoires n'est pas sain.

Votre politique, monsieur le ministre délégué à l'aménagement du territoire, consiste à attribuer des fonds publics à la concentration de capital humain ou financier : ce qui est gros est compétitif et ce qui est compétitif doit bénéficier de l'aide publique.

Vous risquez ainsi de créer des inégalités encore plus grandes, ce qui est contraire à l'objectif de l'aménagement du territoire et du rôle régulateur, péréquateur, de l'État.

En ce qui concerne ces pôles de compétitivité, des inquiétudes se font sentir notamment sur les critères utilisés pour le choix des projets. Dès lors, la transparence des critères de sélection doit être totale et l'attribution de soutiens annoncés rapide.

Les 66 pôles engagés dans des projets coopératifs innovants s'inscrivent dans un espace géographique limité d'entreprises, d'unités de recherche et de centres de formation. Cette concentration est-elle le signe d'un aménagement juste et équilibré du territoire ?

J'en viens aux pôles d'excellence rurale, qui sont le pendant des pôles de compétitivité pour les espaces ruraux.

Cela a été dit tout à l'heure, leur nombre a été augmenté, mais les élus sont inquiets quant au décalage qui pourrait en résulter entre les territoires qui bénéficient d'un label et ceux qui n'en ont pas.

Il faut veiller à ce que les territoires les plus démunis ne le deviennent encore plus. D'ailleurs, M. Roger Besse, rapporteur spécial, a émis cette crainte en commission des finances et l'a rappelée tout à l'heure, bien qu'il reconnaisse qu'il s'agit là d'instruments de revitalisation économique des territoires ruraux.

Des garanties sur les modalités de sélection des projets doivent donc être apportées afin de lever toute ambiguïté sur les choix opérés : qu'en est-il sur ce point, monsieur le ministre délégué à l'aménagement du territoire ?

Une politique d'aménagement du territoire doit prendre en compte les inégalités territoriales telles que l'enclavement géographique ou la faiblesse du potentiel fiscal.

Par ailleurs, la réévaluation à 210 millions d'euros suffira-t-elle, alors que les 176 pôles déjà reconnus absorberont 120 millions d'euros, comme M.  Christian Gaudin, rapporteur pour avis, vient de s'en faire l'écho ?

Enfin, pour ce qui est du financement global, j'avoue ne pas y voir très clair. D'où provient le financement des pôles en général ? Quelle somme est réellement nouvelle pour donner une impulsion à cette politique ?

Je voudrais maintenant aborder la question des contrats de projets.

Tout d'abord, je note que l'engagement financier de l'État pour 2007- 2013 est de 10,49 milliards d'euros contre 19,5 milliards d'euros pour les contrats plan 2000- 2006.

À thématiques retenues comparables, les régions constatent un déficit de 1,479 milliard d'euros entre les deux programmations.

Sans doute allez-vous me rétorquer que ce n'est pas la même chose, que ce n'est pas comparable. Or, pour ma part, je ne vois pas d'autre manière de procéder que de faire précisément cette comparaison entre un point de départ et un autre.

La référence du Gouvernement au taux d'engagement moyen estimé fin 2006 sert, me semble-t-il, à masquer la forte réduction des crédits.

Qu'en sera-t-il, notamment, des actions non réalisées ? Pourront-elles être reprises ? L'enveloppe consacrée à ces engagements antérieurs est-elle suffisante ? Des critères de choix ont-ils été définis ?

Parallèlement, la décentralisation telle que vous la concevez, monsieur le ministre délégué à l'aménagement du territoire, accentue les difficultés des territoires. À cet égard, le désengagement de l'État entraîne des conséquences qui se font sentir dans la présence des services publics.

Je pense, en particulier, à la réorganisation des directions départementales de l'équipement et à certains services de proximité dans les communes rurales qui ne sont plus rendus, comme l'instruction des permis et l'assistance technique.

Monsieur Alduy, dans son rapport, mentionne le démantèlement de l'administration et de l'ingénierie déconcentrée de l'équipement, ainsi que des carences de l'État en matière de gestion des ressources humaines !

C'est là où le bât blesse, car c'est un problème de fond pour nos communes. Je parle en connaissance de cause, puisque je suis à la fois maire d'une commune de 6000 habitants et vice-présidente de l'Association des petites villes de France, l'APVF.

Nous vous avons, d'ailleurs, rencontré, monsieur le ministre délégué à l'aménagement du territoire, afin de vous faire part de nos revendications.

Nous craignons, d'une part, une renationalisation des politiques territoriales, qui irait à l'encontre de l'esprit de la décentralisation et, d'autre part, un abandon progressif de la logique de solidarité territoriale.

En conclusion, je dirai que l'on assiste à un empilement de projets sans coordination entre eux et que l'État a abandonné toute volonté de péréquation et de redistribution entre les territoires.

Quid des pays, par exemple, qui sont l'échelon de mise en cohérence des projets ?

L'article 110 du code de l'urbanisme dispose : « Le territoire français est le patrimoine commun de la nation. » C'est donc la bonne transmission de ce patrimoine aux générations futures qui est en jeu.

En fonction de ces considérations et des éléments que vont développer mes collègues Bariza Khiari, Thierry Repentin et Michel Teston, le groupe socialiste votera contre les crédits de la mission « Politique des territoires ». (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou.

M. Aymeri de Montesquiou. « Le désert français est moins en province comme en 1947 qu'au coeur de nos villes », disiez-vous, monsieur le ministre délégué à l'aménagement du territoire, pour clôturer les premières rencontres de l'Aménagement du territoire, le 10  octobre dernier. Il ne faudrait pas oublier pour autant les régions françaises et l'espace rural.

Nous avons tous une ambition commune, à savoir un aménagement du territoire équilibré, qui permette aux villes de se désengorger et aux campagnes de s'équiper. Nous sommes tous attachés à l'égalité des chances.

Ce Gouvernement a su entendre les voix rurales, grâce, d'une part, à la loi relative au développement des territoires ruraux, qui a notamment permis d'étendre les zones de revitalisation rurale, et, d'autre part, à la loi d'orientation agricole.

Dotée de 0,18 % des autorisations d'engagement et de 0,03 % de l'ensemble des plafonds d'emplois inscrits dans ce projet de loi de finances, la mission « Politique des territoires » est, certes, une « petite », voire « très petite », mission au sens budgétaire, mais elle est fondamentale pour l'avenir du pays et sera complétée par d'autres missions.

Par exemple, le programme « Aménagement du territoire » qui s'y rattache ne représente que le dixième de l'effort budgétaire consacré en 2007 à l'aménagement du territoire, soit près de 2,8 milliards d'euros.

Comment le présent budget répond-il à cette exigence d'égalité des chances ? J'aborderai quatre points.

Dans le programme 113 « Aménagement, urbanisme et ingénierie publique », j'insisterai sur l'action n° 2 « Appui technique de proximité aux collectivités territoriales et tiers ».

Cette action me paraît déterminante, puisqu'elle retrace les prestations de conseil et de soutien technique, gratuites ou payantes, apportées par les services de l'équipement aux collectivités locales, notamment aux communes, dans le domaine de la voirie, de l'urbanisme et de l'habitat.

Elle comprend aussi la mise à disposition gratuite des services de l'État pour l'instruction des demandes d'occupation des sols et l'élaboration des documents d'urbanisme. En tant que président de l'association des maires du Gers, je tiens particulièrement à ce que service soit de qualité et qu'il soit rendu à toutes les communes, quelle que soit leur taille.

En ce qui concerne le programme 159, « Information géographique et cartographique », il est nécessaire de réfléchir aux conditions d'accès au référentiel à grande échelle de l'Institut géographique national pour les collectivités territoriales qui ne disposent que de faibles ressources, même si, nulle part en Europe, ce type d'information n'est diffusé gratuitement.

S'agissant du programme 223, « Tourisme », j'insisterai sur l'action n° 3, « Accès aux vacances », qui concerne les aides à la personne destinées à faciliter le départ en vacances de publics fragilisés, notamment des personnes handicapées, des jeunes en difficulté et des personnes démunies. Je me réjouis de la hausse de près de 50 % des crédits alloués à cette action, qui atteignent un montant de plus de 5,5 millions d'euros.

Dans le programme 112, « Aménagement du territoire », figurent les moyens mis à la disposition de la DIACT, la délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires.

L'action n° 1, « Attractivité et développement économique », comprend, notamment, les crédits relatifs à la PAT, la prime d'aménagement du territoire, qui est destinée aux entreprises créatrices d'emplois dans des zones reconnues prioritaires. Fixée cette année à 38 millions d'euros, cette prime a malheureusement perdu 10 millions d'euros en deux ans. Monsieur le ministre délégué à l'aménagement du territoire, comment expliquez-vous cette diminution ?

L'action n° 2, « Développement territorial et solidarité », retrace les crédits du Fonds national d'aménagement et de développement du territoire, le FNADT. Elle finance également les pôles d'excellence rurale, pour un montant de 180 millions d'euros sur trois ans.

M. le rapporteur spécial a exprimé au Gouvernement son inquiétude quant à l'effet de décalage aggravé qui risque de s'ensuivre entre les zones labellisées et les autres territoires, et il a souhaité que ces politiques n'emportent pas la marginalisation des territoires les plus démunis. Je suis persuadé que les zones non labellisées bénéficieront des retombés économiques des pôles d'excellence rurale.

S'agissant de la politique des territoires, mes chers collègues, nous pourrions aussi nous prononcer pour la résorption de la fracture numérique. François Loos vient d'installer le Forum du très haut débit et il a fixé comme objectif que, d'ici 2012, quatre millions de foyers en France soient connectés au très haut débit.

Dans le Gers, il faut défendre le droit de tous à l'accès au simple haut débit. Monsieur le ministre, pouvez-vous me confirmer que 95 % des habitants de ce département bénéficieront de cet accès à la fin de 2006, et 100 % d'ici à la fin de 2007 ?

L'accès à l'enseignement, primaire, secondaire ou supérieur, est également essentiel. S'agissant de la carte scolaire, je suis très heureux que le Gers soit département d'expérimentation du projet de carte triennale.

À l'IUT d'Auch, la création de trois postes d'enseignants-chercheurs et d'un poste IATOS est indispensable. C'est sous cette stricte condition que l'IUT pourra être, lui aussi, un centre de recherche, en partenariat avec la chambre de commerce et d'industrie d'Auch.

Mes chers collègues, nous allons entrer dans la période des voeux. Qu'il me soit donc permis de formuler celui-ci : que le Gouvernement continue à travailler à la résorption de la fracture territoriale entre les zones, pour que le terme d'égalité des chances ne soit plus une simple formule républicaine, mais devienne une réalité.

La majorité du groupe du RDSE adoptera les crédits relatifs à la mission « Politique des territoires ».

M. le président. La parole est à M. Bernard Fournier.

M. Bernard Fournier. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, mon intervention portera principalement sur les crédits du programme « Aménagement du territoire », qui représentent, de loin, la plus grande partie des dotations des programmes de la mission « Politique des territoires ».

Je ne reviendrai pas sur les chiffres de ce budget, qui ont été largement commentés par les différents rapporteurs, sauf pour constater avec satisfaction que l'Assemblée nationale a procédé à une majoration de 100 millions d'euros des crédits de paiement du programme « Aménagement du territoire », afin d'honorer les engagements du FNADT. Cette décision, devenue indispensable, était très attendue par nombre d'entre nous.

Alors qu'approche le terme de cette législature, je voudrais d'abord vous féliciter, messieurs les ministres, ainsi que vos prédécesseurs, des initiatives, de la créativité et du volontarisme dont vous avez fait preuve pour définir et conduire une politique qui soit celle de tous les territoires, pauvres ou riches, urbains ou ruraux, enclavés ou faciles d'accès.

Bien que le périmètre de cette mission ne soit pas toujours très stable, je veux insister sur la cohérence de la politique que vous menez, et qui commence à porter ses fruits.

D'un côté, les pôles de compétitivité réunissent tous les talents de nos régions, qu'ils soient universitaires, scientifiques ou industriels, et ils ont une vocation internationale. Face à une concurrence mondiale de plus en plus exacerbée, ils devraient permettre à nos entreprises d'innover ou de conserver une place éminente dans plusieurs secteurs de pointe. L'État a tenu ses engagements, en respectant le calendrier de lancement des appels à projets et en facilitant la procédure d'accès aux aides publiques, grâce à la création d'un fonds unique dirigé par Bercy et qui regroupe l'ensemble des financements alloués par les six ministères concernés.

D'un autre côté, les pôles d'excellence rurale doivent promouvoir le tourisme, valoriser notre patrimoine et la culture, développer la production artisanale et industrielle de nos territoires, de nos terroirs. Ils font déjà l'objet d'un véritable engouement puisque 176 pôles ont été labellisés au titre de la première vague, et vous vous êtes battu, monsieur le ministre délégué à l'aménagement du territoire, pour convaincre le Premier ministre de porter à 200 le nombre des pôles retenus pour la deuxième vague de l'appel à projets.

En tant que président de la communauté de communes du pays de Saint-Bonnet-le-Château, j'ai moi-même déposé un dossier tendant à créer un centre de ressources à dominante tertiaire.

M. Christian Estrosi, ministre délégué. C'est un très bon dossier !

M. Bernard Fournier. Merci, monsieur le ministre !

Ce projet répond à des objectifs clairs : améliorer les services à la population et aux entreprises, en favorisant l'usage des technologies de l'information et en offrant de nouveaux services ; favoriser le développement des entreprises existantes et faciliter leur ancrage sur le territoire ; diversifier le tissu économique ; enfin, optimiser la cohésion sociale, grâce au maillage entre les populations et au développement d'une offre de services adaptée aux besoins émergents sur le territoire.

En revanche, l'État devra veiller à respecter un certain équilibre : il est prévu de réserver le FNADT aux projets retenus au titre des pôles d'excellence rurale, pour lesquels une certaine ingénierie était nécessaire ; ainsi, nous constatons que les projets sont présentés par des territoires qui sont déjà bien structurés.

Dans la Loire, aujourd'hui, un seul pôle a été labellisé, lors de la première vague de l'appel à projets : il s'agit du pôle culturel et économique du site Fléchet, qui est porté par la communauté de communes de Forez en Lyonnais. Pour la seconde vague, cinq candidatures - les réponses devraient nous parvenir dans quelques jours - ont été déposées.

Ce fonds d'État permettait de financer des équipements et des aménagements structurants en milieu rural, autour de thèmes comme le tourisme, la culture ou l'économie, qui désormais ne trouveront plus forcément de « secours financiers » au sein du nouveau programme des fonds européens.

Mes chers collègues, j'évoquais tout à l'heure la cohérence de la politique du Gouvernement, mais j'aurais dû souligner également son souci d'établir une continuité avec la création des pôles d'excellence rurale, après le vote de la loi relative au développement des territoires ruraux de 2005. Par les différents dispositifs qu'elle met en place et les exonérations qu'elle accorde, cette loi contribue largement à la revitalisation humaine, économique mais aussi médicale de nos villages et de nos campagnes.

Avec la charte des services publics, dont vous m'aviez annoncé la signature lors de la séance des questions d'actualité au Gouvernement du 29 juin dernier, monsieur le ministre délégué à l'aménagement du territoire, vous avez montré une nouvelle fois que le Gouvernement voulait tout mettre en oeuvre pour aider au renforcement et à la modernisation des services publics en milieu rural.

Toutes ces actions contribuent, me semble-t-il, à apaiser les tensions. Oui, j'ai effectivement l'impression qu'elles sont moins fortes qu'il y a quelques années, grâce à toutes les garanties que ces mesures ont apportées.

L'exemple de La Poste est, à ce titre, significatif. Certes, de fortes tensions se manifestent encore ici ou là, mais, grâce à la négociation et aux efforts des préfets et des directeurs départementaux des postes, je commence à entendre des maires qui sont satisfaits de leur nouvelle agence postale communale ou de la création d'un relais poste. Tout cela concourt à un dialogue plus serein, qui aboutit à des projets voulus, constructifs, et non plus imposés d'en haut.

Enfin, je formulerai une dernière remarque sur le désenclavement numérique, un sujet que je connais bien, puisque, grâce à la volonté du conseil général de la Loire, le taux de couverture de l'Internet à haut débit est pratiquement de 100 %, malgré un relief difficile et une faible densité de population en milieu rural. (M. Christian Estrosi, ministre délégué, acquiesce.)

Nous ne pouvons que nous féliciter de l'effort considérable que l'État et les collectivités locales ont accompli afin de rattraper leur retard en quelques années, ainsi que de l'approbation par le Gouvernement, en juillet 2006, d'un « plan de couverture en haut débit » pour les zones rurales.

Toutefois, il apparaît que le dispositif « haut débit » du Gouvernement s'appuie sur la mobilisation de la dotation globale d'équipement, et fixe des critères d'éligibilité - ne sont concernés que les communes de moins de 5 000 habitants et les EPCI de moins de 20 000 habitants - qui rendent ce dispositif difficilement applicable, et cela pour plusieurs raisons.

Premièrement, la mobilisation de la DGE oblige les communes à arbitrer entre l'aménagement d'équipements publics, tels que gymnases, écoles, etc. et le haut débit.

Deuxièmement, les montants envisagés pour chaque opération - 10 000 euros - sont insuffisants pour constituer un véritable levier sur les projets.

Troisièmement, compte tenu de la complexité de l'intervention publique en la matière, ce sont la plupart du temps les EPCI, les syndicats d'électricité ou les départements qui ont pris le relais pour traiter ce sujet. Or les critères d'éligibilité les excluent, de fait, du dispositif.

Quatrièmement, enfin, les budgets alloués à la DGE permettent de traiter en moyenne environ 25 % des demandes communales annuelles, et ils sont souvent affectés à des opérations pluriannuelles. De ce fait, il sera difficile de répondre aux demandes.

Dans ces conditions, monsieur le ministre, serait-il possible d'assouplir ou d'élargir les critères d'éligibilité ?

Pour conclure, je rappellerai qu'il est indispensable pour mener à bien une politique des territoires harmonieuse, équilibrée et solidaire, de ne pas opposer les uns aux autres et surtout de faire preuve de pragmatisme. Messieurs les ministres, la dynamique que vous avez enclenchée ces dernières années, et qu'atteste l'attractivité même de ces projets auprès des collectivités, doit bien sûr être maintenue.

C'est pourquoi, messieurs les ministres, mes chers collègues, je voterai ce budget. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Gourault.

Mme Jacqueline Gourault. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je centrerai mon propos sur le programme 113, « Aménagement, urbanisme et ingénierie publique », et plus particulièrement sur l'action 1, « Urbanisme, planification et aménagement ».

Cette action finance les activités de l'État relatives à l'élaboration et à l'évaluation des textes législatifs et réglementaires en matière d'urbanisme, ainsi qu'à la réalisation des documents d'urbanisme. En outre, elle rend compte de l'activité exercée par les services déconcentrés de l'État, en particulier les directions régionales et départementales de l'équipement, au profit de l'aménagement du territoire.

Je rappellerai d'abord que, en matière d'ingénierie publique, depuis le 1er janvier 2006, les DDE n'apportent une assistance gratuite pour la délivrance des permis de construire qu'aux communes de moins de 10 000 habitants et aux EPCI de moins de 20 000 habitants. Cette dernière disposition est d'ailleurs issue d'un amendement que j'ai eu l'honneur de défendre dans cet hémicycle puisque le texte initialement soumis au Sénat prévoyait que cette assistance ne serait offerte qu'aux EPCI de moins de 10 000 habitants.

Il est évident que l'application des règles d'urbanisme, souvent complexes, exige des moyens dont certaines communes sont dépourvues. Du reste, au 1er janvier 2006, la moitié des communes de plus de 10 000 habitants confiaient encore leurs dossiers d'intervention aux services de l'État. En réalité, seules les villes de plus de 50 000 habitants peuvent se passer de l'assistance des services de l'État.

Dans ces conditions, certaines communes et certains EPCI qui ne bénéficient plus désormais de l'assistance de l'État connaissent des difficultés à instruire seuls leurs dossiers. En effet, soit ces communes et EPCI ne disposent pas dans leurs services des compétences nécessaires, soit, dans certaines zones, ils ne trouvent pas de prestataires capables de remplir les missions assumées auparavant par la DDE. La recherche des compétences requises ou la formation des agents se traduisent, pour les collectivités et intercommunalités concernées, par des dépenses supplémentaires.

Il faut également prendre en compte les mesures d'accompagnement dont il faudra faire bénéficier les collectivités territoriales, en particulier les plus petites, pour qu'elles puissent gérer ces nouveaux services. Si des actions de formation des services municipaux ont déjà été menées, un renforcement de ces mesures est néanmoins attendu.

Ma première question porte donc sur les mesures d'appui aux collectivités à mettre en place pendant cette phase de transition. Au demeurant, je ne pense pas que cela relève uniquement de votre département, monsieur le ministre délégué à l'aménagement du territoire. Peut-être faudrait-il inciter d'autres organismes à prodiguer cette aide technique aux collectivités territoriales.

Concernant la réforme du droit des sols qui a été engagée, la simplification entreprise pour limiter le nombre de contentieux va dans le bon sens. En effet, les délais d'instruction demeurent souvent beaucoup trop longs et la simplification administrative reste une attente forte des élus locaux. On peut cependant regretter que les principaux acteurs concernés par cette réforme, les maires et les présidents d'EPCI, n'aient pas été plus étroitement associés à cette démarche.

Un projet de décret d'application de l'ordonnance du 8 décembre 2005 relative au permis de construire et aux autorisations d'urbanisme a été récemment examiné par le Conseil d'État. Dans sa rédaction actuelle, il entraîne à mon sens deux difficultés d'application majeures pour les communes et EPCI concernés.

En premier lieu, ce projet de décret accroît fortement le nombre nécessaire de lettres recommandées avec accusé de réception. Cette considération peut paraître extrêmement terre à terre, mais ce sont des problèmes auxquels les collectivités et les élus sont confrontés tous les jours.

Outre que cette charge pèsera une nouvelle fois sur les finances communales et que les frais pour les administrés augmenteront également, je trouve cette réforme quelque peu inopportune eu égard aux modifications d'organisation intervenues à La Poste pour le traitement du courrier. En effet, dans de nombreux cas, si la présence postale reste assurée, fût-ce sous de nouvelles formes, les heures de levée ont été considérablement avancées, et il me semble fort difficile, compte tenu des nouveaux délais imposés, de se conformer à la loi. J'ajoute que, à l'heure de la dématérialisation de nombreuses procédures, il aurait peut-être été judicieux de chercher une solution dans cette voie.

En second lieu, les délais imposés pour le traitement des dossiers ont été réduits à huit jours, alors même que le projet de décret prévoit qu'il incombera désormais aux communes d'effectuer le travail d'analyse des dossiers, qui relevait autrefois des services de la DDE.

Si j'approuve le principe selon lequel c'est aux communes qu'il appartient de traiter ces sujets éminemment locaux, je m'interroge sur la faisabilité d'un tel système. Comment une commune dont les bureaux peuvent être ouverts seulement trois ou deux jours par semaine, voire un seul, trouvera-t-elle le temps d'effectuer cette tâche nouvelle, avec, qui plus est, les contraintes postales que je viens d'évoquer ?

Et force est de constater une fois de plus que les associations d'élus n'ont pas été associées au travail préparatoire de ce décret. N'aurait-il pas mieux valu organiser une concertation plutôt que de découvrir aujourd'hui la réalité des problèmes ?

Ce projet de décret, dont, je le répète, je ne remets pas en cause l'utilité, me paraît très difficile à mettre en oeuvre.

Permettez-moi d'apporter quelques éléments de réponse à la question que je soulève : la mutualisation en intercommunalité de ce qui s'apparente à un nouveau service, la formation des personnels concernés par ces mesures, la mise à disposition de moyens modernes de transmission, m'apparaissent comme autant de pistes qui pourraient être utilement explorées.

Monsieur le ministre, comment comptez-vous faire pour que, au-delà des objectifs, des avancées concrètes soient réalisées tant pour les pétitionnaires que pour les communes, puisqu'il faut bien tenir compte des réalités communales ?

En outre, pouvez-vous nous indiquer quelles mesures d'accompagnement peuvent être envisagées par les services de l'équipement et les vôtres en vue de faciliter cette transition en matière d'urbanisme et de permis de construire ? (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à Mme Bariza Khiari.

Mme Bariza Khiari. Monsieur le ministre, vos efforts sont notables.

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Enfin quelque chose d'agréable !

Mme Bariza Khiari. Ces propos ne vous sont pas destinés, monsieur Estrosi : ils s'adressent à M. Léon Bertrand ! (Sourires.)

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Quelle déception ! (Rires.)

Mme Bariza Khiari. Ces efforts concernent notamment la modernisation du ministère avec le regroupement des services, la poursuite du travail engagé par Michelle Demessine sur la codification du secteur, la création d'un pôle social du tourisme, les assises du tourisme, le plan Qualité France.

Toutefois, monsieur le ministre, la qualité de nos relations m'oblige à souligner que, en dépit de vos efforts et malgré une légère augmentation, le budget du tourisme est l'un des plus faiblement dotés. Bien des problèmes resteront donc sans solution.

Mon intervention portera sur deux points : la nécessaire promotion de nos territoires, d'une part, l'épineuse question de la dette à l'égard des associations du tourisme social, d'autre part.

Le tourisme est une formidable réserve de croissance. Il représente l'un des principaux avantages compétitifs de la France, et ce pour une raison simple : nos territoires ne sont pas délocalisables alors que les touristes, eux, sont mobiles. Dès lors, une grande partie de nos efforts doit se concentrer sur la promotion de la destination France, l'amélioration de la qualité de l'accueil, l'adaptation des équipements, afin de faire face à une demande de plus en plus exigeante.

Alors que la croissance a été nulle au troisième trimestre 2006 et qu'elle ne devrait pas dépasser 2 % sur l'année, il est urgent de mieux prendre la mesure des potentialités de ce secteur économique en lui donnant les moyens qu'il mérite.

Certes, dans le programme « Tourisme », les crédits de l'action « Promotion de l'image touristique de la France et de ses savoir-faire » sont en progression et atteignent 41 millions d'euros. Mais, eu égard à l'effort de promotion entrepris par des pays comme l'Espagne - 140 millions d'euros - ou la Turquie - 106 millions d'euros -, force est de constater l'inadéquation des moyens par rapport aux fins.

Par ailleurs, à la lecture des comptes du tourisme pour 2005, le tableau de la performance française est très mitigé : il apparaît que notre pays n'a pas pris toute sa part dans l'augmentation de 5,5 % des flux de touristes au niveau mondial. Certes, la France garde sa place de première destination touristique mondiale, mais cette place est menacée. M. Mortemousque a également fait part de son inquiétude à ce sujet.

Dans le même temps, l'augmentation des dépenses des Français à l'étranger est une tendance qui se confirme, ce qui pèse sur le solde de notre balance des paiements.

Nous possédons tous les atouts pour consolider notre première place et la faire fructifier. Quand on dispose d'une industrie par nature non « délocalisable », il est incompréhensible, en ces temps de compétition mondiale, de ne pas tirer parti de la situation.

Même s'il est en légère augmentation, ce budget reste insuffisant. Ce n'est pas nouveau : de sous-dotations successives en annulations répétées de crédits, la dette du ministère est aujourd'hui préoccupante, et elle a des répercussions catastrophiques sur les associations du tourisme social, ce qui ne peut que contribuer à accroître le nombre des « non partants ».

Pour le tourisme social, les dettes sont de deux ordres.

Il s'agit tout d'abord de la dette de l'Agence nationale pour les chèques-vacances, l'ANCV, à l'égard des associations du tourisme social.

Lors de la discussion sur le projet de loi portant diverses dispositions relatives au tourisme, le Sénat a modifié la composition du conseil d'administration de l'ANCV, et j'ai fait adopter, en qualité de rapporteur sur ce texte, la création d'une commission d'attribution, ce qui permet d'opérer une distinction nette entre les instances attribuant les aides de l'ANCV et les organismes bénéficiaires.

Entre 2001 et 2005, avant que n'intervienne la modification de la procédure, des opérations de rénovation ont été approuvées par la commission sociale de l'ANCV et validées par son conseil d'administration, dans lequel siègent deux commissaires du Gouvernement - l'un pour le budget, l'autre pour le tourisme -, aux côtés du contrôleur général du budget de l'ANCV.

Alors que plusieurs dizaines d'opérations sont achevées et que les factures sont acquittées, l'actuel contrôleur général du budget de l'ANCV refuse d'accorder son visa, considérant que, dans le cadre des procédures de l'époque, un risque de conflit d'intérêts existait. Les dossiers sont donc bloqués, alors que le service est fait. Ce refus est préjudiciable à de nombreuses associations du tourisme social, qui, ainsi lésées, ont saisi le ministre délégué au budget pour demander la mise en oeuvre de la procédure du « passer outre ». Elles n'ont jamais reçu de réponse.

Cette situation ne peut durer. C'est pourquoi je vous demande, monsieur le ministre, de bien vouloir trouver avec votre collègue délégué au budget un compromis qui permettrait, d'une part, de régler cette situation, d'autre part, de faciliter l'examen des dossiers qui entrent dans le cadre de la procédure de transition et dans celui de la procédure qui a été adoptée par la représentation nationale.

Cette situation est d'autant plus inadmissible que les sommes sont provisionnées dans les comptes de l'ANCV. Les associations concernées sont aujourd'hui menacées dans leur existence même, alors que l'INSEE estime à 8 millions le nombre de nos concitoyens qui, pour des raisons financières, ne partent pas en vacances.

La seconde dette concerne le programme de consolidation de l'équipement du tourisme social, nouveau programme d'aide à la pierre. Sur ce point, c'est l'État qui est défaillant. Lorsque la dette de l'État s'ajoute à celle de l'ANCV, pour les associations touchées, cela ressemble à une double peine !

Dans le cadre du programme de consolidation de l'équipement du tourisme social, le montant des factures qui n'ont pas été honorées s'élève à environ 5 millions d'euros. Là encore, il s'agit d'un « service fait ».

C'est la raison pour laquelle un amendement a été déposé à l'Assemblée nationale. Il n'a pu être satisfait qu'à hauteur de 2,8 millions d'euros, un complément devant être apporté par le fonds de concours que, monsieur le ministre, vous voulez mettre en place au sein de l'ANCV.

S'agissant de ce fonds de concours, l'absence de crédits d'État remettra en cause, à terme, les financements des collectivités. Par ailleurs, rien ne garantit que l'ANCV aura, à l'avenir, la capacité de dégager des excédents. Ce n'est donc pas une solution pérenne.

Dans l'immédiat, la création de ce fonds de concours pose problème, le conseil d'administration de l'ANCV s'étant récemment prononcé contre. Cela signifie que la dette de l'État ne sera pas apurée en totalité.

Il y va de la survie d'un grand nombre d'associations, comme de la crédibilité du seul pan de votre politique qui ait un réel impact sur la vie des personnes les plus défavorisés. La montée des précarités nous impose de dépasser tous ces blocages.

Pour ce qui est de la dette de l'ANCV, structure qui, je le rappelle, est sous double tutelle de l'État, un compromis devrait pouvoir être trouvé avec le ministre délégué au budget, car les associations ne sont pas responsables de l'imbroglio administratif.

En ce qui concerne la dette du ministère, monsieur le ministre, je vous demande de trouver d'autres ressources, car il semble que la création du fonds de concours soit sérieusement compromise.

Je ne doute pas que vous aurez à coeur de résoudre ces deux problèmes. Je sais qu'il vous faudra de la volonté et de l'imagination, mais vous ne manquez ni de l'une ni de l'autre.

Pour aider ce secteur en grande difficulté, mon collègue Thierry Repentin et moi-même avions souhaité déposer un amendement. Cependant, comme le transfert de crédits n'aurait pu se faire qu'au détriment de l'action « Accueil des demandeurs d'asile en Rhône-Alpes », nous y avons évidemment renoncé.

Monsieur le ministre, au terme de cette mandature, à l'instar de mes collègues membres du groupe socialiste de l'Assemblée nationale, je veux saluer votre grande courtoisie, votre disponibilité et votre respect pour la représentation nationale, notamment pour l'opposition. Et vous savez que, de ma part, cette remarque est loin d'être purement formelle. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Michel Bécot.

M. Michel Bécot. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, mon propos portera sur les crédits du programme « Tourisme ».

Ce secteur enregistre, dans notre balance des paiements, un solde positif de 8,9 milliards d'euros, ce qui n'est pas négligeable. Il faut néanmoins rappeler que ce solde était de 14 milliards d'euros en 2003. Félicitons-nous néanmoins que, pour ce qui est de cette rubrique, nos échanges restent excédentaires.

Il s'agit donc d'un secteur économique de toute première importance pour notre pays, non seulement par sa contribution à l'équilibre de sa balance des paiements, mais aussi au regard de ses potentialités considérables en termes de création d'emplois et d'aménagement du territoire

La France reste la première destination touristique du monde. Cependant, il faut se rendre compte qu'elle perd du terrain dans la compétition internationale, sous l'effet d'un tassement des recettes, au moment où tourisme mondial a renoué avec une croissance supérieure à 5 %. Notre pays est, en effet, confronté à une concurrence acharnée - le mot n'est pas trop fort -, notamment de la part des pays d'Europe centrale, et il aura de plus en plus de mal à demeurer la première destination touristique mondiale.

Il est à craindre que, derrière des phénomènes conjoncturels, ne se dissimulent des tendances qui semblent se confirmer depuis quelque temps, notamment une certaine désaffection des clientèles européennes, qui constituent plus de 80 % de notre clientèle étrangère, ainsi qu'un accroissement des voyages des Français à l'étranger.

En outre, en termes de recettes, la France stagne au troisième rang, derrière les États-Unis et l'Espagne. Les résultats sont donc en deçà des légitimes espérances de ce secteur économique.

Je sais, monsieur le ministre, que vous êtes tout à fait conscient de cette évolution. Vous l'avez d'ailleurs déclaré récemment lors des quatrièmes assises nationales du tourisme. Je partage tout à fait votre analyse : plus que le chiffre record de touristes, c'est l'accroissement des recettes par touriste qu'il faut viser. Notre principale faiblesse est notre difficulté à conserver suffisamment longtemps les touristes étrangers sur notre territoire.

Comme vous l'avez fait remarquer, c'est le positionnement géographique central de notre pays en Europe, au coeur des transhumances touristiques entre le nord et le sud, qui explique, pour une part, les 76 millions de visiteurs en France. Pour augmenter nos recettes, nous devons d'abord améliorer la qualité de l'accueil, des infrastructures et des prestations proposées. C'est pourquoi il apparaît plus que nécessaire de mettre en place une politique permettant d'améliorer les résultats, notamment en favorisant une meilleure adéquation entre l'offre et les attentes de clientèles désormais sollicitées de toutes parts.

Nous devons également renforcer nos moyens de promotion. Vous venez, à cet égard, de lancer une campagne de promotion de la marque « Qualité Tourisme », visant à rendre l'offre touristique française plus attractive, tant en France qu'à l'étranger. Cette campagne de promotion, qui s'adressera aux professionnels du secteur du tourisme ainsi qu'au grand public, est dotée d'un budget de 2 millions d'euros.

L'industrie touristique est aujourd'hui en pleine mutation. Elle doit réagir rapidement face aux crises économiques récurrentes, conjoncturelles, sanitaires, aux tensions internationales ou encore aux aléas climatiques. Elle doit saisir les opportunités liées à l'accroissement des flux touristiques et adapter son offre à l'évolution des attentes de la clientèle.

Le tourisme doit donc être soutenu au plus haut niveau de l'État.

Messieurs les ministres, depuis que je suis président d'ODIT France - observation, développement et ingénierie touristique -, je me bats tous les ans pour faire reconnaître l'action de cette structure et l'importance de sa mission. Le rôle d'ODIT France consiste à aider les acteurs touristiques à s'adapter aux évolutions de la société et des marchés. Ce groupement d'intérêt public apporte aux professionnels du tourisme une vision précise des nouveaux produits à créer, des améliorations qualitatives à apporter. ODIT France permet à l'entreprise touristique française de rester compétitive et de gagner de nouveaux marchés.

Encore faut-il que cette structure puisse avoir les moyens de sa politique. À ce jour, elle est trop souvent considérée comme un service public qui apporte quelques conseils aux collectivités et aux porteurs de projets. Utilisons mieux les experts d'ODIT France en leur permettant de créer de nouveaux produits et donc de nouvelles richesses. Les professionnels du tourisme sont demandeurs et ont besoin de cet outil de développement qui, sous la tutelle du ministère du tourisme, associe universitaires, collectivités et entreprises privées.

Nous savons, messieurs les ministres, quelle voie nous devons suivre pour développer le tourisme en France. ODIT France est un outil disponible, efficace, prêt à fonctionner.

Je souhaite également que nous sachions prendre le temps nécessaire pour évaluer les politiques touristiques que nous engageons. Or, aujourd'hui, aux termes du projet de budget, ODIT France n'est doté d'aucun moyen supplémentaire et subit même une diminution de crédits, qui entraînera inexorablement une baisse de la création de richesses imputable au tourisme.

Vous comprenez, messieurs les ministres, qu'avec un budget en diminution de 4 % cette année, ODIT France, parallèlement obligé, en application de la LOLF, de mettre 5 % de son budget en réserve de précaution, subit une baisse totale de ses crédits de 9 %. Son budget équivaut ainsi à celui d'un gros comité départemental du tourisme, situé plutôt, j'en conviens, dans le sud de la France, région où ces comités sont plus importants que dans l'ouest.

Malgré cela, messieurs les ministres, conscient des contraintes dans lesquelles vous avez élaboré ce budget, mes collègues du groupe UMP et moi-même voterons les crédits du programme « Tourisme » pour 2007. Mais j'insiste : nous devons poursuivre et intensifier la démarche dynamique que vous avez inaugurée en faveur de l'économie touristique de notre pays, et je profite de cette tribune pour rendre hommage à l'action que vous menez. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Thierry Repentin.

M. Thierry Repentin. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, en France, pays de 63 millions d'habitants sur environ 643 000 kilomètres carrés, la densité de population, 98 habitants au kilomètre carré, dissimule de fortes disparités.

Aujourd'hui, en France métropolitaine, les trois quarts des Français vivent dans des aires urbaines qui n'occupent que 18,4 % du territoire. Zones rurales, littoral, montagne sont autant de composantes de notre identité dont il est de notre devoir de préserver le patrimoine humain, naturel et culturel, afin de maintenir les populations qui y vivent par un développement économique raisonné.

Tel est l'objet de la mission « Politique des territoires », dont nous examinons les crédits. Pour 2007, je note que les autorisations d'engagement sont en diminution de 17,8 %. M. le ministre délégué à l'aménagement du territoire ne manquera pas de rappeler que les crédits de paiement ne reculent, pour leur part, « que » de 1,1 %. J'anticipe donc sa remarque et persiste à dire mon inquiétude.

S'il y avait, en effet, un net décrochage entre autorisations d'engagement et crédits de paiement, il eût été utile d'informer la représentation nationale sur les causes de cet écart. Je doute qu'il y ait eu de l'argent en trop : l'aménagement du territoire a tant besoin de moyens ! Avant de mettre en cause la sincérité budgétaire, les parlementaires que nous sommes auraient pu s'interroger sur certains dispositifs, trop complexes ou inadaptés, et redéployer les crédits budgétaires de l'État sur d'autres actions.

Au-delà du montant des crédits inscrits à cette mission, je suis préoccupé par la mutation de leurs modalités d'attribution, qui font de plus en plus l'objet d'appels à projets. Je crains que, d'une politique d'aménagement du territoire national, nous ne passions à une pratique de subventions à des territoires élus.

Le parlementaire de montagne que je suis connaît les risques qu'un tel glissement fait peser sur nombre de pays ruraux et montagnards. Les financements deviennent aléatoires et tendent à reposer, non plus sur les caractéristiques géographiques, économiques et sociales du territoire, mais sur le résultat d'une course d'obstacles dans laquelle les collectivités et leurs élus sont en concurrence.

Oui, il s'agit bien d'une course d'obstacles. Je m'appuierai pour vous en convaincre, mes chers collègues, sur l'exemple des pôles d'excellence rurale.

En quoi donnent-ils lieu à une course ? Le soutien financier de l'État aux pôles d'excellence rurale dits « de la première vague », c'est-à-dire les 176 premiers projets labellisés, est crédité de 120 millions d'euros sur trois ans. Le soutien aux pôles d'excellence rurale de la deuxième vague ne s'élèvera, quant à lui, qu'à 90 millions d'euros, alors que le ministre délégué à l'aménagement du territoire a annoncé, lors de son audition devant la commission des affaires économiques, que 200 pôles labellisés seraient concernés ! Chaque projet labellisé en deuxième vague ne bénéficiera donc, en moyenne, que de 66 % de l'aide perçue par les pôles d'excellence rurale de première vague. Quelle injustice ! Ainsi, en moyenne, un pôle d'excellence rurale labellisé en deuxième vague bénéficiera de 232 000 euros d'aide de l'État de moins qu'un projet similaire labellisé en première vague.

Voilà pour la course : premiers arrivés, premiers servis.

Monsieur le ministre, comment justifier une telle injustice ? Est-ce là votre conception de l'égalité territoriale ?

Mais ce n'est pas tout !

Les premiers arrivés sont, en général, ceux qui ont le moins d'obstacles à surmonter ou le plus de moyens pour les franchir. Les petites communes et les petites intercommunalités sont, à ce titre, pénalisées. Elles ne disposent souvent pas de l'ingénierie suffisante pour élaborer ce type de dossiers, surtout dans les délais extrêmement courts exigés par les services de l'État. Quant à faire appel à une expertise extérieure, leurs faibles ressources financières les en empêchent.

Voilà pour les obstacles sur la ligne de départ.

Car la ligne d'arrivée n'en est, hélas, pas exempte : le suivi et la mise en oeuvre des programmes contractualisés ne peuvent pas toujours être garantis dans les délais imposés et les petites collectivités ne bénéficient alors pas de la totalité de l'enveloppe qui leur était allouée.

Le changement de terminologie qui a vu la DATAR rebaptisée en DIACT est tout à fait éloquent : il témoigne de cette philosophie nouvelle qui guide désormais l'intervention de l'État, à savoir la mise en concurrence des territoires et de leurs élus. Cette attitude laisse sur le bord du chemin nombre de communes et d'intercommunalités, dont les besoins en aménagement et équipements de base ne trouvent plus de financement national, faute de s'inscrire dans un projet « structurant ».

Sans structurer une région, monsieur le ministre, ces équipements n'en structurent pourtant pas moins la vie quotidienne des habitants du territoire de proximité.

Une commune pourra-t-elle encore bénéficier du soutien de l'État si son « excellence » ou sa « compétitivité » n'est pas reconnue et estampillée par un énième label ?

Cette problématique se pose de façon particulièrement aiguë en montagne, où le climat et le relief imposent de réévaluer les distances en fonction du temps de parcours. En matière de services publics, par exemple, prendre en compte l'éloignement d'un bureau de poste ou d'une école à vol d'oiseau n'a guère de sens : parcourir 3 kilomètres peut demander 30 minutes de voiture et conduire à l'isolement de villages entiers.

C'est pourquoi les élus de montagne sont particulièrement attentifs aux crédits alloués dans le cadre des conventions interrégionales de massif. Or ces crédits font l'objet d'une réduction nette quant aux autorisations d'engagement.

Ainsi, les crédits socio-économiques, d'un montant de 191 millions d'euros pour la période 2000-2006, connaissent une baisse de 11 % dans les conventions 2007-2013. Cette réduction ne manquera pas de grever les projets d'autodéveloppement à venir.

Nous devons également nous interroger sur le taux d'exécution des conventions interrégionales de massif : de 56 % sur l'ensemble des conventions conclues dans la période 2000-2006, il est de 68 % sur les crédits socio-économiques, c'est-à-dire hors infrastructures routières et ferroviaires. Je crois y déceler, d'une part, la difficulté pour l'État de respecter ses engagements en matière d'infrastructures lourdes sur l'ensemble du territoire et, d'autre part, l'ampleur des besoins en matière de développement socio-économique pour faire vivre les massifs et y maintenir les populations à l'année.

Enfin, je ne peux conclure sans pointer un autre désinvestissement de l'État, corollaire de son désengagement financier ; je veux parler de son rôle d'assistant à maîtrise d'ouvrage pour les petites collectivités.

Aujourd'hui, l'assistance technique de l'État est un outil intéressant, qui permet aux petites communes d'être accompagnées par les services de la DDE pour des missions spécifiques d'aménagement. Malheureusement, dans les faits, ce dispositif est souvent inopérant, tout simplement faute de moyens humains. À l'heure où le développement durable est sur toutes les lèvres, à cinq mois d'une échéance électorale majeure dans la perspective de laquelle les candidats rivalisent de préoccupations climatiques et environnementales, la politique d'aménagement du territoire orchestrée et financée par l'État doit retrouver le chemin de tous les territoires, y compris les territoires ruraux, y compris les territoires montagnards, labellisés ou non.

Pour les parlementaires socialistes, l'aménagement durable du territoire consiste à permettre à tous nos concitoyens de se loger, de travailler, d'étudier, d'accéder aux soins, aux services bancaires et aux commerces de bouche élémentaires, où qu'ils vivent, et pas seulement dans les territoires que vous avez sélectionnés comme étant « compétitifs ».

Monsieur le ministre délégué à l'aménagement du territoire, votre leader fait de la rupture son slogan pour le futur. Nous observons et regrettons que la rupture territoriale fasse déjà partie de vos pratiques. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Ambroise Dupont.

M. Ambroise Dupont. Monsieur le ministre délégué à l'aménagement du territoire, vous vous en doutez, mon propos ne s'inscrira pas du tout dans la continuité du discours de M. Repentin. Je tiens, au contraire, à vous remercier et, à travers vous, l'ensemble du Gouvernement, de la politique conduite en direction des territoires ruraux. Et mes remerciements ne seraient pas complets si je ne mentionnais pas aussi celui qui a été l'initiateur de cette politique : notre collègue et ami Jean-Pierre Raffarin.

Je me réjouis vivement de l'action qui a été ainsi engagée : elle a permis aux territoires ruraux d'être enfin reconnus comme des acteurs économiques d'importance, notamment en matière d'aménagement du territoire.

L'instauration des pôles de compétitivité a eu pour effet de créer de nouvelles synergies entre acteurs publics et privés, grâce à la volonté forte d'associer les porteurs de projets et les administrations.

En privilégiant une dynamique collective, nous nous donnons les moyens d'affronter une concurrence mondiale toujours plus rude, mais il ne faudrait pas que cette marche en avant se trouve ralentie par des lourdeurs administratives excessives. Si la politique de simplification administrative entamée à l'occasion de la mise en place de ces pôles est évidemment prometteuse, elle ne se traduit pas toujours dans les faits. Ainsi, la création d'un fonds unique dédié au financement de ces dispositifs s'avère être une structure très bien adaptée aux projets d'envergure portés par les grandes entreprises, mais se révèle moins pertinente pour ceux qui sont portés par les PME.

Alors que les PME sont souvent les premières intéressées par les pôles de compétitivité, les provenances diverses des crédits obligent régulièrement les entrepreneurs à remplir plusieurs fois le même dossier selon le circuit de financement impliqué. À cela s'ajoutent des réponses souvent évasives, mal préparées, des institutions de l'État aux demandes de financement, que les collectivités locales s'efforcent alors de compenser comme elles le peuvent.

Dans ces conditions, le porteur de projet peut en venir à se demander s'il a bien fait de chercher à innover pour favoriser le développement de son entreprise. En bout de course, il risque de se décourager et de rendre le pôle de compétitivité responsable de son échec, ce qui est tout à fait dommageable.

Tels sont les écueils de ces « jeunes » dispositifs. J'espère que ces écueils seront contournés, car je suis très attaché à la réussite des pôles de compétitivité, qui répondent à notre souhait commun d'une politique forte de recherche et de développement au service de l'emploi dans notre pays.

Le pôle d'excellence rurale est la reproduction, à l'échelle territoriale, du pôle de compétitivité. Intimement lié à l'identité et aux savoir-faire des territoires, cet outil permet d'en tirer le meilleur parti. En faisant appel à leurs forces vives, vous leur avez signifié qu'eux aussi pouvaient activement participer à la richesse de la nation. Sur ce point, reconnaissez-le, ils ont vous répondu de belle manière !

Nous vivons une période charnière pour les territoires, avec la concordance du calendrier des contrats de plan 2007-2013 et des fonds structurels européens. J'invite donc l'État et les collectivités locales à travailler de concert, pour donner les moyens à toutes les instances contributrices de dépasser le simple engagement du « service voté » et pour mettre réellement les politiques récurrentes qu'elles conduisent au service de la recherche et du développement et, donc, de l'emploi. À mon sens, la pérennisation de ces excellents dispositifs dépendra de notre capacité à y inscrire de nouveaux investissements et à faire intervenir les fonds européens dans le cadre d'un cofinancement.

À propos de financement, nous rencontrons parfois des difficultés pour mobiliser les crédits du Fonds national pour l'aménagement et le développement du territoire dans les contrats de pays.

En outre, monsieur le ministre, je suggère que les projets non retenus dans le cadre des pôles soient intégrés dans le cadre des contrats de projet, ce qui assurerait une continuité par rapport aux objectifs initialement fixés.

La création des pôles de compétitivité et de leurs pendants territoriaux, les pôles d'excellence rurale, est l'une des initiatives les plus fortes de cette législature. Je tiens à en féliciter les ministres qui s'en sont chargés, à les remercier de leur attention et de leur disponibilité, qui ont toujours été entières. Je souhaite longue vie aux pôles, qui doivent pouvoir survivre aux turbulences ou aux évolutions de la vie politique.

Monsieur le ministre, à titre personnel, je vous exprime mes plus sincères remerciements pour votre déplacement dans le pays d'Auge à l'occasion de la signature du pôle d'excellence rurale. J'espère que vous en avez été aussi content que nous.

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Absolument ! Le cidre était excellent ! (Sourires.)

M. Ambroise Dupont. Pour finir, je reviendrai sur une interrogation que mon collègue Gérard Longuet avait bien voulu relayer devant M. Perben à l'occasion de l'examen de la mission « Transports ».

L'aménagement du territoire implique aussi de veiller au bon fonctionnement du territoire. Or le ministère a décidé de déclasser un certain nombre de routes à grande circulation, lesquelles sont notamment destinées aux convois exceptionnels, qui peuvent être conduits à traverser entièrement notre pays. C'est, par exemple, le cas du transport des éoliennes.

En procédant à un tel déclassement, c'est-à-dire en diminuant le nombre de kilomètres de routes classées à grande circulation, le ministère n'a pas pensé aux aménagements des entrées de ville, qui se trouvent ainsi exclus ipso facto du champ de l'article L. 111-1-4 du code de l'urbanisme. Cette omission s'avère préjudiciable au développement de ces zones suburbaines.

Monsieur le ministre, je le redis de façon très solennelle, en matière de développement durable, les élus que nous sommes doivent utiliser tous les moyens à leur disposition, en particulier l'urbanisme, qui organise le territoire, faute de quoi nous ne pourrons atteindre l'ensemble de nos objectifs. Un pays qui fonctionne bien, c'est un pays qui assure son développement à venir !

M. Christian Gaudin, rapporteur pour avis. Très bien !

M. Ambroise Dupont. Dans cette affaire, M. Perben a répondu à Gérard Longuet qu'il fallait peut-être envisager une action au niveau des collectivités, dans le cadre de la décentralisation. Soit ! Mais, ne l'oublions pas, en matière de d'urbanisme, les lois fondamentales reposent sur l'intérêt national : l'État ne doit donc pas se désengager ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP ainsi que sur le banc des commissions.)

M. le président. La parole est à M. Michel Teston.

M. Michel Teston. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, j'interviendrai sur l'action 2, « Développement territorial et solidarité », du programme 112, « Aménagement du territoire », et plus précisément sur l'accès aux technologies de l'information et de la communication.

En la matière, le Gouvernement fixe les trois objectifs suivants dans le bleu budgétaire : la résorption des zones blanches en téléphonie mobile ; l'accès à l'Internet à haut débit sur tout le territoire ; la réduction des délais d'accès de tous les foyers français à la TNT.

Face à ces ambitions affichées en faveur du désenclavement numérique, les crédits prévus sont-ils réellement à la hauteur ?

Ainsi, selon le programme de performances fixé à l'horizon 2007, la part de la population qui n'a pas accès à la téléphonie mobile doit être ramenée à 0 %. Il convient donc de poursuivre l'effort qui a permis aux collectivités territoriales, agissant en qualité de maître d'ouvrage pour la première phase du plan de résorption des zones blanches, de mettre d'ores et déjà à disposition 700 sites sur les 1250 prévus.

Or la délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires, la DIACT, ne prévoit pas de nouveaux soutiens financiers à ce sujet, son engagement ayant pris fin en 2005, avec un total de 30 millions d'euros quand il avait été prévu d'en accorder 44 millions. En dépit des annonces répétées du Gouvernement, le compte n'y est donc pas !

La question du respect par l'État de sa participation au financement demeure également entière. Alors que, globalement, le plan se déroule conformément au rythme prévu, l'État n'a versé à ce jour aux maîtres d'ouvrage que 15 % de ladite participation.

En ce qui concerne le haut débit, est également fixé un objectif de 0 % de la population non couverte à l'horizon de 2007. À cette fin, un nouveau plan de couverture en haut débit pour les zones rurales, doté de 10 millions d'euros, a été lancé. À l'évidence, cet effort budgétaire sera insuffisant pour pallier l'inéligibilité de certaines lignes, du fait soit de l'éloignement des répartiteurs, soit du multiplexage. Les solutions hertziennes de type Wifi ou Wimax nécessiteront donc de très lourds investissements de la part des collectivités territoriales, afin de compenser l'insuffisance du soutien financier de l'État.

Le 27 novembre dernier, le Gouvernement a annoncé un « plan d'action du très haut débit », avec l'ambition d'atteindre 4 millions d'abonnés en 2012 grâce à la mise en oeuvre d'une quinzaine de mesures. S'il vise à mener un grand nombre d'études et à encourager le dialogue entre les différents acteurs du très haut débit, ce plan ne s'accompagne d'aucun engagement financier de l'État, celui-ci souhaitant seulement utiliser des fonds structurels européens. D'ailleurs, monsieur le ministre, les observateurs ne s'y sont pas trompés : le 28 novembre dernier, Le Monde titrait : « L'État s'engage enfin dans le très haut débit... sans investir ».

J'aborde enfin un domaine dont nous avons débattu récemment : la télévision numérique terrestre. En effet, le 22 novembre dernier, le Sénat a adopté en première lecture le projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur.

Or, il faut le rappeler, le Gouvernement n'avait initialement prévu, pour la TNT, qu'une couverture maximale fixée à 85 % de la population. C'est le Sénat qui, par voie d'amendement, a permis de retenir l'objectif d'une couverture totale : 95 % en diffusion hertzienne, 5 % en diffusion satellitaire.

En matière de désenclavement numérique, ce projet de loi de finances pour 2007 fait donc apparaître un énorme décalage entre les ambitions affichées et les moyens consentis, qui sont très limités. Pourtant, il faut savoir être interventionniste si l'on veut réduire les inégalités territoriales et donner à tous un égal accès aux moyens modernes de communication et d'information.

Tel n'est pas le cas, monsieur le ministre. Ce budget manque de volontarisme : il ne permettra donc pas à l'État de remplir ses missions en matière de désenclavement numérique, qui est désormais l'un des aspects essentiels de l'aménagement du territoire. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Christian Estrosi, ministre délégué à l'aménagement du territoire. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis très heureux que ce débat budgétaire me donne la possibilité de vous présenter de façon détaillée l'action que nous avons menée et que j'entends poursuivre dans mon domaine de délégation, sous l'autorité de M. le ministre d'État, Nicolas Sarkozy.

Je souhaite tout d'abord remercier sincèrement M. Roger Besse, rapporteur spécial de la commission des finances, M. Jean-Paul Alduy, dont M. Dominique Mortemousque s'est fait un excellent porte-parole, M. Dominique Mortemousque lui-même et M. Christian Gaudin, rapporteurs pour avis de la commission des affaires économiques. J'ai beaucoup apprécié la précision de leurs analyses et la pertinence de leurs remarques, dont nous tirerons, je vous l'assure, le meilleur profit.

M. Christian Gaudin, rapporteur pour avis. Très bien !

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Les moyens budgétaires mis à la disposition du programme « Aménagement du territoire » sont importants : 317 millions d'euros d'autorisation d'engagement et 400,2 millions d'euros de crédits de paiement, à la suite de l'augmentation de 100 millions d'euros par rapport aux crédits de paiement du FNADT initialement inscrits.

Le montant des crédits de paiement va nous permettre d'apurer la dette et de repartir sur des bases saines. La politique d'aménagement du territoire que je veux conduire s'attache à mettre en valeur les atouts de chacun de nos territoires, conformément à notre volonté d'assurer la solidarité nationale.

Il s'agit d'abord d'encourager les acteurs les plus dynamiques à renforcer leurs stratégies de développement et de recherche afin d'ouvrir de nouvelles perspectives de croissance et d'emploi.

J'évoquerai naturellement la réussite de notre politique relative aux pôles de compétitivité.

La France doit se placer, dans les dix ans à venir, au premier rang mondial dans plusieurs domaines, tels que les biotechnologies, l'utilisation des nouvelles énergies, les nouvelles techniques environnementales ou la sécurité alimentaire.

Les 66 pôles de compétitivité ont vu, dès la première année de leur mise en route, 165 de leurs projets labellisés.

Au total, ce sont 540 millions d'euros de crédits publics qui sont venus soutenir les projets des pôles. Nous tenons donc bien le rythme de 1,5 milliard d'euros consacrés à ces pôles sur trois ans, conformément aux engagements du Gouvernement.

De nouveaux dossiers sont à l'étude. Nous veillerons à renforcer les synergies par une mise en réseau des pôles relevant d'une même thématique et à éviter que ne s'instaurent entre eux des situations de concurrence.

Monsieur Ambroise Dupont, j'entends également poursuivre la politique de simplification des procédures entamée avec la création du fonds unique. En 2007, le dispositif d'exonérations de charges sociales sera remplacé par un abondement complémentaire des subventions au bénéfice des PME, outil plus simple et plus rapide à mettre en oeuvre.

Pour répondre à votre demande, monsieur Christian Gaudin, j'ai demandé au groupe de travail interministériel chargé de sélectionner les dossiers de se rapprocher des instances de gouvernance des pôles dont les projets n'ont pas été retenus, afin de leur fournir les explications nécessaires.

J'évoquerai en second lieu le nouveau dispositif des aides à finalité régionale, les AFR, qui permettra à l'État, à travers la prime à l'aménagement du territoire, la PAT - dont, je le signale à M. de Montesquiou, le volume financier reste inchangé par rapport à 2006 -, ainsi qu'aux collectivités locales de continuer à soutenir des projets d'investissements significatifs créateurs d'emplois.

J'indique à cet égard que, dans la période précédente, la part de population nationale acceptée par Bruxelles pour les aides à finalité régionale était proche de 30 %. Ce seuil est désormais de 15,5 %. Or, compte tenu de l'entrée de dix nouveaux pays, ce n'était pas évident : en juin 2005, lorsque j'ai pris mes fonctions, on m'avait annoncé que ce serait zéro ! Chacun avait fini par se faire à cette idée, mais, pour moi, c'était inacceptable. J'ai donc plaidé pour que nous puissions continuer à bénéficier d'un pourcentage relativement important.

J'ai également obtenu que les seuils précédemment retenus pour définir un bassin d'emploi et de vie, à savoir 400 000, 500 000, voire 600 000 habitants, passent à 20 000 ou 40 000 habitants, afin de cerner au plus près les bassins d'activité. Le zonage des aides à finalité régionale ainsi mis en place nous permet d'aider davantage de territoires d'activité qu'auparavant.

En outre, j'ai voulu constituer une « réserve » nationale de 360 000 habitants sur le quota de l'Île-de-France - cette région ayant moins besoin, de par son attractivité, du soutien des aides à finalité régionale -, afin de pouvoir aider, au cours des sept années à venir, des territoires plus fragiles qui n'auraient pas été retenus dans le zonage PAT et qui se trouveraient confrontés à une crise du fait des mutations économiques. Telle est ma conception de la solidarité à l'égard des territoires les plus fragiles.

J'évoquerai enfin la mise en oeuvre de la nouvelle génération des fonds structurels pour 2007-2013.

Une rude négociation a permis de maintenir le niveau des aides. L'enveloppe sera de 14,3 milliards en euros courants au titre du FEDER et du FSE.

De plus, nous n'aurons plus de contrainte de zonage. Tous les territoires n'en bénéficiaient pas. Il n'y a plus de zonage pour la nouvelle génération 2007-2013.

Je souhaite rassurer MM. Fournier et Pointereau, dont je connais les préoccupations : les territoires défavorisés et les territoires ruraux ne seront pas oubliés. Ils bénéficieront même d'un soutien à l'ingénierie afin de leur permettre de présenter des projets structurants qui renforceront leur attractivité et leur compétitivité. Voilà bien une illustration de la différence de conception entre la majorité actuelle et la précédente ! Je rappelle que les fonds structurels pour 2000-2007 qui ont été négociés par le gouvernement de M. Jospin ne concernaient, en effet, que quelques territoires.

M. Thierry Repentin. C'était M. Barnier !

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Pour nous, ce sont tous les territoires ! Telle est notre conception de la solidarité : nous faisons prévaloir un esprit d'équité là où, précédemment, c'était un esprit très sectaire et très idéologique qui présidait à l'attribution des fonds structurels.

Les programmes opérationnels sont en cours de finalisation par les préfets de région, dans le cadre du partenariat régional. Ils seront notifiés à l'Union européenne - je réponds là à Jean-Paul Alduy - d'ici à la fin de l'année ou, pour ceux qui ne seraient pas tout à fait prêts, dans les toutes premières semaines de 2007. Je vous confirme, monsieur Ambroise Dupont, que ces fonds pourront soutenir les projets portés par les différents pôles.

Parallèlement à ce soutien apporté à la compétitivité des territoires, nous devons conduire une politique active de cohésion économique et sociale.

Cette politique doit profiter, tout d'abord, aux territoires ruraux.

Les pôles d'excellence rurale ont remporté un succès indéniable. J'ai ouvert, ce matin même, à neuf heures, avec Dominique Bussereau, les travaux du comité qui doit sélectionner la deuxième vague de ces pôles. Le 1er janvier dernier, qui aurait pu imaginer qu'en moins d'un an nous aurions apporté aux territoires ruraux une reconnaissance que personne ne leur avait accordée au cours des trente dernières années ?

M. Dominique Mortemousque, rapporteur pour avis. C'est vrai !

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Il est tout à l'honneur de ce gouvernement d'avoir reconnu le talent, le mérite, le bon sens et l'intelligence de ces 15 millions de nos concitoyens, qui ont toujours été méprisés par les gouvernements précédents. (Les sénateurs du groupe socialiste s'esclaffent.)

La deuxième vague de l'appel à projets permettra de labelliser 200 pôles d'excellence rurale supplémentaires. Nous avions retenu 176 pôles au mois de juin dernier et, en janvier dernier, nous avions pris la décision d'en labelliser 300.

Pour la deuxième vague, j'ai reçu 400 candidatures, mais nous ne devions retenir que 124 dossiers. Au vu de la qualité d'un grand nombre d'entre eux, parce que j'estimais que les territoires concernés ne devaient pas être laissés sur le bord du chemin, j'ai obtenu du Premier ministre que nous labellisions « pôle d'excellence rurale » 200 territoires de la France rurale, parmi lesquels les territoires les plus fragiles. C'est cette politique ambitieuse que nous avons décidé de conduire pour les territoires ruraux.

Je vous précise, monsieur Christian Gaudin, que l'enveloppe consacrée aux pôles d'excellence rurale, qui était de 150 millions d'euros au départ, est portée à 210 millions d'euros, ce qui nous permettra d'apporter une réponse précise aux besoins reflétés par ces nouveaux projets et de faire en sorte qu'aucun moyen ne leur fasse défaut.

Quant aux crédits du FNADT, soyez rassuré, monsieur Fournier, ils ne sont pas réservés exclusivement aux pôles d'excellence rurale et continueront de soutenir les projets structurants des territoires. Je veux également aider les territoires qui cumulent des handicaps structurels et ceux qui se trouvent confrontés à des situations de crise économique.

M. Repentin a dit que le passage de la Délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale à la Délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires, c'est-à-dire de la DATAR à la DIACT, était en quelque sorte le signe d'une mise en concurrence. C'est vraiment ignorer la réalité de notre volonté réformatrice des outils dédiés à l'aménagement du territoire !

La DATAR a été créée en 1962 par le général de Gaulle et Olivier Guichard. À l'époque, l'aménagement du territoire consistait à désenclaver les territoires et à permettre aux Français de se rendre d'un lieu à un autre grâce à des moyens de communication de meilleure qualité. La politique qui a été menée a permis d'atteindre ces objectifs ambitieux, et nous devons d'ailleurs continuer à l'assumer avec la même intensité et le même dynamisme.

En créant la DIACT, nous n'avons supprimé aucune des missions de la DATAR. Celles-ci sont restées inchangées. Nous avons simplement voulu renforcer la DATAR en la fusionnant avec la MIME, la mission interministérielle sur les mutations économiques, c'est-à-dire en faisant une addition et non une soustraction. Il s'agit de faire en sorte que la nouvelle structure soit capable d'anticiper un certain nombre de crises que, ces dernières années, faute d'avoir su les prévoir, nous n'avons gérées qu'en aval, sur la base de contrats de site. Nous nous réjouissons au demeurant que trente contrats de site soient en cours et que d'autres soient en préparation.

Mais je préfère dire à des salariés qui connaissent la détresse et l'angoisse parce qu'une crise liée aux mutations économiques et industrielles se dessine, que nous allons essayer, deux, trois ou quatre ans avant, de l'anticiper plutôt que de gérer les conséquences de la crise quand les dégâts sont déjà là. Car, alors, il faut donner une nouvelle qualification aux personnels licenciés et convaincre de nouvelles entreprises de se substituer à celles qui disparaissent. Non seulement on perd du temps, mais des familles sont laissées sur le bord de la route.

C'est ainsi que nous pratiquons aujourd'hui dans le domaine de l'automobile, et notamment pour les équipementiers, avec CIADT qui a été dédié à ce problème.

Je le répète : la DIACT est le résultat de l'addition de la DATAR et de la MIME. Il ne s'agit donc pas de soustraction ni de mise en concurrence.

Pour ma part, j'ai dû gérer la fermeture des usines de fabrication de chaussures Charles Jourdan et Stéphane Kélian, à Romans, de Matra, à Romorantin, et de Kodak à Chalon-sur-Saône. Mieux vaut anticiper ces drames deux ou trois ans avant qu'ils ne se produisent ! Voilà toute la différence entre nous, monsieur Repentin ! (Mme Bariza Khiari s'esclaffe.)

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Mais nous avons sans doute une autre conception de l'approche humaine dans les territoires. Pour vous, ce ne sont que des territoires. Pour moi, ce sont des hommes et des femmes auxquels nous devons être attentifs au quotidien.

Je veillerai par ailleurs à ce que l'action de l'Agence française pour les investissements internationaux, l'AFII, s'inscrive bien dans le cadre général de la politique d'aménagement du territoire, et notamment des mesures contribuant à la promotion, à l'attractivité des territoires et au soutien des mutations économiques des entreprises françaises.

Enfin, l'aménagement du territoire doit suivre une stratégie de développement de l'activité économique et de l'emploi dans les quartiers urbains sensibles.

C'est dans cette perspective que M. le ministre d'État m'a demandé de lancer, avec Jean-Louis Borloo, un appel à projets permettant l'utilisation des fonds européens pour le développement urbain. Je suis d'ailleurs très surpris que personne n'ait évoqué ce sujet ce matin, comme si, mesdames, messieurs de l'opposition, les quartiers urbains sensibles ne vous « sensibilisaient » pas.

M. Thierry Repentin. Personne, ni à droite ni à gauche !

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Pour moi, l'aménagement du territoire passe aussi par la solidarité à l'égard aussi bien des territoires fragiles de notre ruralité que de nos quartiers sensibles.

Ce projet s'adresse donc aux agglomérations ou aux villes bénéficiant d'un contrat urbain de cohésion sociale. La gestion de ces crédits pourra leur être déléguée sous forme d'une subvention globale.

Je mets au service de ces objectifs une vigoureuse politique d'aménagement numérique du territoire. Il faut offrir à tous les Français l'accès au téléphone mobile, à l'Internet à haut débit et à la télévision numérique terrestre.

La France est devenue le premier pays européen pour le haut débit : fin 2006, 98 % des foyers sont éligibles à l'ADSL, contre 50 % en 2002. Que tous ceux qui, ce matin, nous ont fait des remarques désobligeantes dans ce domaine se le disent !

Ce taux sera, monsieur de Montesquiou, de 94 % pour le Gers, contre 82 % il y a un an. Actuellement, 33 000 communes sont couvertes, contre 5 000 en 2002, et plus de 11 millions de Français, contre 1 million en 2002, sont abonnés au haut débit. Ces chiffres parlent d'eux-mêmes !

Toutes les entreprises bénéficieront d'une offre de 2 mégabits par seconde symétrique péréquée et le très haut débit sera disponible dans 2 000 zones d'activité.

Toutefois, c'est vrai, 3 000 communes restent hors d'atteinte de l'ADSL. C'est pourquoi les obligations de déploiement associées aux deux licences régionales Wimax attribuées en juillet 2006 concerneront environ la moitié des zones blanches vers le milieu de l'année 2008. Les premières couvertures commerciales devraient être réalisées dès 2007, à des tarifs analogues à ceux de l'ADSL - je tiens à rassurer M. Pointereau -, d'autant que les deux technologies seront concurrentes en dehors des zones blanches.

En outre, un plan doté de 10 millions d'euros a été mis en place. Il permettra notamment, dès le premier semestre de 2007, de subventionner les projets des communes et des EPCI via la dotation globale d'équipement.

Mesdames, messieurs les sénateurs de l'opposition, vous reprochez au Gouvernement de ne pas donner à certaines communes parmi les plus fragiles les moyens d'accéder à l'ADSL. Or ces 10 millions d'euros de subventions que nous avons fait le choix de débloquer permettront de financer à hauteur de 80 % les frais d'accès de ces communes à l'ADSL, souvent par voie satellitaire. Sachant que nous évaluons ces frais à environ 10 000 euros, cette subvention représentera en moyenne 8 000 euros par commune.

Je précise que ce fonds est suffisamment doté pour répondre aux besoins de l'ensemble des communes concernées.

Par ailleurs, l'État encourage pleinement les projets structurants des collectivités, notamment départementales et régionales. Ces projets peuvent s'inscrire dans le cadre du plan gouvernemental s'ils prennent en compte les modalités d'attribution de la DGE.

Dans les autres cas - et je réponds ainsi à M. Fournier -, l'État soutiendra les demandes de cofinancement par le FEDER, conformément aux priorités définies à Lisbonne.

Pour la téléphonie mobile, le plan mis en oeuvre avec les opérateurs pour assurer la couverture des 3 000 communes qui en étaient exclues est en bonne voie de réalisation. La moitié d'entre elles seront couvertes en fin d'année et toutes le seront à la fin de 2007.

À cet égard, je tiens à rendre hommage au volontarisme des conseils généraux et à leur assurer que la totalité des 44 millions d'euros de crédits d'État prévus sont maintenant disponibles auprès des préfets de région, sans compter les 20 millions d'euros d'exonération de TVA.

Tous les foyers auront accès aux dix-huit chaînes gratuites de la télévision numérique terrestre dès 2007 grâce à la diffusion d'un bouquet satellitaire sans abonnement.

M. Teston m'a fait remarquer que ce résultat avait été obtenu grâce à l'adoption par le Sénat d'un amendement au projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur. Je m'en réjouis, mais je n'avais pas attendu ce vote pour m'occuper de cette question.

Bien que la TNT relève d'une initiative privée, j'ai en effet considéré qu'il était injuste que certains Français aient gratuitement accès à dix-huit chaînes de télévision en qualité numérique, cependant que d'autres de nos concitoyens, qui habitent des territoires enclavés, ne reçoivent plus ou moins correctement que trois ou quatre chaînes de télévision analogique, tous acquittant par ailleurs la même redevance audiovisuelle.

C'est pourquoi j'ai engagé une discussion avec l'ensemble des opérateurs. Nous avons passé un accord aux termes duquel ils se sont engagés à ce que, indépendamment de toute contrainte législative, tous les foyers aient accès aux dix-huit chaînes gratuites de la TNT dès le premier semestre 2007, et non pas seulement 95 %.

Je crains, monsieur Teston, que vous ne méconnaissiez ce dossier.

Mme Bariza Khiari. Vous distribuez les bons et les mauvais points ?

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Moi, je le connais, voyez-vous ! Ainsi je sais que, pour arriver à couvrir 85 % des foyers en TNT, 116 émetteurs terrestres sont nécessaires et que, pour couvrir 95 % des foyers, il faut 3 000 émetteurs terrestres supplémentaires, ce qui suppose des travaux pendant trois à quatre ans.

Or, moi, je ne veux pas que ces foyers restent aussi longtemps privés de l'accès à une télévision de qualité ! Au nom de la justice et de l'équité, je veux que, dès 2007, 100 % des Françaises et des Français aient accès aux dix-huit chaînes gratuites en qualité numérique. C'est pourquoi un bouquet satellitaire sans abonnement sera disponible au cours du premier semestre de 2007, ce qui permettra d'attendre sereinement l'installation des 3 000 émetteurs terrestres supplémentaires.

Voilà encore une différence entre vous et nous quant à la conception que l'on peut avoir de la justice et de l'équité entre les Français, de la solidarité à l'égard des plus modestes et des territoires les plus fragiles.

J'évoquerai pour terminer le grand chantier des contrats de projets, pour lesquels les travaux ont débuté en partenariat avec les collectivités locales dès le mois de mars. Ils arrivent à un stade proche de la conclusion.

Le montant total des mandats initialement confiés aux préfets s'élevait à 10,56 milliards d'euros sur sept ans, soit 1,5 milliard par an. Cela représente 200 millions de plus qu'en 2000-2006, à champ constant.

Cette enveloppe n'était évidemment pas figée. D'ailleurs, en septembre dernier, le Premier ministre a ouvert plus largement le champ de la négociation.

L'adjonction de ces moyens à ceux apportés par les collectivités et l'Union européenne rendra possible la réalisation de ces contrats de projets.

Madame Boyer, nous avons choisi de ne pas faire de politique d'affichage. C'est ce qui fait toute la différence entre vous et nous. Avec les contrats de plan, d'ailleurs condamnés par la Cour des comptes, vous avez fait de la politique d'affichage. Pour notre part, nous nous sommes inscrits dans une culture de contrats de projets, c'est-à-dire une vraie stratégie au service des territoires, au service d'opérations parfaitement identifiées, estimées et financées, contrairement à ce qui avait prévalu dans l'exécution des contrats de plan 2000-2007, pour lesquels il a fallu réparer tous les oublis.

De surcroît, pour être totalement efficaces et vertueux, nous nous sommes inscrits dans la stratégie de Lisbonne. Or ce n'est pas nous qui l'avons signée, c'est M. Jospin, quand il était Premier ministre !

Mme Bariza Khiari. Et M. Chirac !

M. Christian Estrosi, ministre délégué. La stratégie de Lisbonne définit trois thématiques : développement durable, cohésion sociale et territoriale, compétitivité des territoires ; je me permets d'insister sur le terme « compétitivité ». C'est sur la base de ces trois critères que nous pourrons bénéficier, de 2007 à 2013, des fonds structurels européens.

J'ai estimé qu'il serait contraire à l'efficacité et à l'intérêt de nos territoires de ne pas décliner à l'identique notre nouvelle politique contractuelle et de ne pas l'inscrire dans le même calendrier. Pour cette raison, nous avons respecté la signature de M. Jospin en 2002 en nous inscrivant dans la stratégie de Lisbonne et en faisant bénéficier l'ensemble de nos territoires de cet effet de levier obtenu, par l'addition des fonds structurels et des contrats de projets. Ces contrats seront exécutés, car ils sont réalistes et centrés sur des priorités stratégiques.

Madame Gourault, j'ai bien pris note de vos questions, que je ne manquerai pas de les transmettre au ministre de l'équipement, qu'elles concernent avant tout.

Madame Didier, je suis surpris que vous qualifiiez de faible la hausse des crédits de paiement inscrits au programme « Aménagement du territoire ». Je vous rappelle qu'ils augmentent de plus d'un tiers, passant de 300 millions d'euros en 2006 à 400 millions d'euros en 2007.

Si tous les budgets progressaient aussi « faiblement », je crois que M. le président de la commission des finances trouverait à y redire !

Aussi, madame Didier, je vous propose de créer en Meurthe-et-Moselle un pôle d'excellence « arithmétique élémentaire », car il existe manifestement en l'espèce une marge de progression importante. (M. Bernard Fournier s'esclaffe. - Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Thierry Repentin. Ce que vous dites là est scandaleux !

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Madame Boyer, vous me parlez de concentration de capital humain et économique.

À cette même tribune, les orateurs de votre groupe nous expliquaient l'année dernière qu'il ne fallait pas créer 66 pôles de compétitivité, mais seulement une quinzaine. Cette année, vous dénoncez la trop forte concentration de ces pôles !

Les différences entre votre discours de l'année dernière et celui de cette année démontrent bien votre totale incohérence. Mais avez-vous été une seule fois cohérents en matière d'aménagement du territoire ? (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

D'ailleurs, tant les pôles de compétitivité que les contrats de projets s'inscrivent dans une vraie stratégie de développement durable, tandis que vos contrats de plan avaient complètement occulté cet aspect, comme ils avaient occulté la question de l'écologie, et cela alors même que Mme Voynet était ministre de l'environnement. (Plusieurs sénateurs de l'UMP s'esclaffent.) Depuis lors, nous avons quelque peu changé d'air. Notre vision est plus généreuse et prend en compte de manière plus durable l'ensemble de nos territoires.

M. le président. Monsieur le ministre, M. Teston souhaite vous interrompre. L'y autorisez-vous ?

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Avec le plus grand plaisir !

M. le président. La parole est à M. Michel Teston, avec l'autorisation de M. le ministre délégué.

M. Michel Teston. Monsieur le président, je dois le dire, nous n'apprécions pas du tout la manière dont M. le ministre répond à nos légitimes interrogations sur les crédits inscrits à la mission « Politique des territoires ».

En vérité, plutôt que de nous répondre, il préfère souvent s'attaquer à tel ou tel d'entre nous.

Pour ma part, j'ai reçu avec un grand intérêt sa « leçon » sur le déploiement des réseaux de télévision. Je trouve qu'il est particulièrement compétent en la matière, mais je lui rappellerai simplement que j'ai été pendant vingt-cinq ans administrateur de Télédiffusion de France, TDF, et que j'ai acquis dans ce domaine une certaine expérience. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur le ministre.

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Monsieur Teston, je ne doute pas un seul instant que les vingt-cinq années que vous avez passées à TDF en tant qu'administrateur vous aient permis d'acquérir une grande expérience. Mais il est dommage que vous n'ayez pas pris l'attache de son président. Les précisions qu'il vous aurait apportées vous auraient épargné une intervention qui ne correspondait pas à la réalité de la situation.

Il faut mieux éviter d'être pris en défaut, surtout quand on revendique le fait d'être un expert du sujet !

Monsieur Repentin, je vous rassure, la solidarité entre territoires reste forte à travers le volet territorial des CPER.

Je regrette de devoir rectifier vos chiffres sur les contrats de massif. Vous aussi, je vous prends en défaut ! Je n'y peux rien ! Vous nous dites que les contrats de massif représentent une somme de 130 millions d'euros. Or ils ont été mis en place entre 2000 et 2006. Les mandats remis aux préfets coordonnateurs en juillet prévoient 170 millions d'euros, soit 40 millions ou 30 % de plus !

Soit il s'agit de votre part d'une volonté de désinformation, soit, par mégarde, vous ne vous êtes pas penché sur les bons chiffres.

Mme Didier, Mme Boyer et M. Repentin n'ont cessé de nous reprocher d'organiser la compétition entre les territoires et leur mise en concurrence. M. Repentin disait que l'aménagement du territoire doit nous conduire à retrouver le chemin de tous les territoires. Mais il me semble que cela fait longtemps, monsieur Repentin, que vous avez perdu votre boussole !

M. Charles Josselin. C'est incroyable !

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Voyez-vous, j'ai vraiment le sentiment que, pendant des années, les différents gouvernements que vous avez soutenus ont eu un total mépris pour les territoires ruraux de France, pour cette montagne qui a le droit de tant espérer de la part de celles et de ceux qui gouvernent.

Jamais on n'a couvert autant de champs dans le soutien à la ruralité ! Tous les chiffres que j'ai cités le montrent de manière éloquente.

Nous avons voulu créer des solidarités à travers la Charte des services publics en milieu rural alors que vous n'avez cessé, pendant des années, de fermer nos trésoreries, nos bureaux de poste, nos subdivisions de DDE, les classes d'école, etc. Nous avons mis des règles du jeu là où il y avait la jungle, là où n'importe qui était placé à la tête de n'importe quelle administration,...

M. Charles Josselin. Il est toujours comme ça ?

M. Christian Estrosi, ministre délégué.... là où l'équilibre des territoires ruraux était mis à mal et la population méprisée.

M. Thierry Repentin. Caricature !

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Désormais, lorsqu'un inspecteur d'académie veut fermer une classe, il est obligé, deux ans avant, d'en avertir le maire et de lui demander d'essayer de relancer la démographie, d'implanter des activités qui permettront à un certain nombre de familles et d'instituteurs de ne pas quitter la commune.

Avec le numerus clausus que vous avez imposé dans les facultés de médecine au cours des dernières années, nous avons assisté au dépeuplement médical. Nous avons donc dressé la carte des territoires sous-médicalisés en vue d'y favoriser l'installation de jeunes médecins, après leur avoir accordé des bourses pour les aider à financer leurs études.

La semaine dernière encore, j'ai dû intervenir pour empêcher la suppression du train Corail Paris-Rodez par la SNCF.

J'exige en effet, désormais, de tous les opérateurs de service public le respect des règles du jeu que nous avons mises en place, là où, auparavant, chacun faisait comme il l'entendait !

C'est cela, notre esprit de solidarité à l'égard des territoires ruraux. Oui, tous les jours, des services publics rouvrent ! Oui, nous sauvons des trésoreries ! Je vous rappelle que c'est M. Sautter, alors ministre de l'économie, des finances, et de l'industrie, qui avait décidé de fermer l'ensemble des trésoreries rurales en France. Et M. Sautter a sauté ! (Rires sur les travées de l'UMP.)

De notre côté, nous avons mené le combat, y compris sur ces travées, pour préserver les services publics dans l'ensemble des communes rurales de France. Pour la première fois, un gouvernement de ce pays s'est soucié de ces 15 millions d'habitants des territoires ruraux et des zones de montagne qui ont été si souvent oubliés.

J'appelle chacune et chacun d'entre vous à voter un budget qui me paraît être, avec près de 30 % d'augmentation, l'un des plus performants que nous vous présentions à l'occasion de ce projet de loi de finances. Je ne doute pas un seul instant que, au moment du choix, les femmes et les hommes qui, dans cet hémicycle, soutiennent la ruralité de France ne s'y tromperont pas ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. François Fortassin. Il ne reste plus qu'à chanter : « Montagnes Pyrénées, vous êtes mes amours » ! (Rires sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Léon Bertrand, ministre délégué au tourisme. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens, en premier lieu, à remercier le rapporteur spécial de la commission des finances, M. Roger Besse, et les rapporteurs pour avis de la commission des affaires économiques, MM. Christian Gaudin, Jean-Paul Alduy et Dominique Mortemousque, pour la qualité et la pertinence de leurs travaux.

Comme l'ensemble des budgets ministériels cette année, et comme les rapporteurs ont bien voulu le souligner, les crédits du tourisme traduisent la volonté du Gouvernement de gagner la bataille pour l'emploi.

Avec un million d'emplois directs et autant d'emplois indirects, l'industrie touristique contribue très largement à cette dynamique que nous appelons tous de nos voeux.

Les créations d'emplois dans le secteur de l'hôtellerie-restauration ont augmenté de 1,76 % en 2005, et de plus de 6 % en cinq ans.

Notre budget est présenté pour la seconde fois en mode LOLF, et j'ai bien noté les commentaires de la commission des affaires économiques, notamment ceux qui sont relatifs aux indicateurs. J'y suis sensible et je ne peux que m'associer à la préoccupation qui a été exprimée en la matière.

Ce budget s'élève donc à 86,2 millions d'euros. Il est en très sensible augmentation par rapport à la loi de finances initiale : les autorisations d'engagement augmentent de 7,78 % et les crédits de paiement, de 6,54 %, avant qu'un amendement voté à l'Assemblée nationale, avec l'adjonction de 2,8 millions d'euros ne porte cette augmentation à 10,10 %.

Pour créer et conserver des emplois dans un contexte concurrentiel accru, nos entreprises touristiques doivent conquérir et fidéliser leurs clientèles. Nous entendons les y aider, le plus efficacement possible, selon trois axes principaux.

Le premier axe, c'est le renforcement de la promotion, sur les marchés étrangers, de la destination France. A cet effet, le GIE « Maison de la France » sera doté d'une enveloppe de 33,8 millions d'euros, soit une augmentation de 17,17 %, lui permettant de prendre en compte dans son budget les mesures nouvelles du contrat de croissance signé par le Gouvernement avec le secteur « hôtels, cafés, restaurants ».

Le sixième volet du contrat de croissance comporte, je le rappelle, deux actions : le renforcement des opérations de promotion à l'étranger de « Maison de la France » et l'accélération de la mise en oeuvre du plan qualité tourisme.

En outre, 2007 sera une année importante pour le GIE, car ce sera la première année pleine de la nouvelle version de son site < franceguide.com >, qui offre aux internautes l'ensemble des services qu'ils attendent : la promotion, l'information et les réservations.

Le deuxième axe prioritaire de notre action, c'est le développement de l'économie touristique. Nous y consacrerons 28,42 millions d'euros en 2007.

Parmi les mesures phares, je citerai le plan qualité France, qui, à l'issue des deux comités interministériels du tourisme, a pour objectif de promouvoir, au niveau national, la nécessaire amélioration de l'offre touristique. Il va ainsi entrer dans une nouvelle phase.

Pour ce qui concerne les contrats de plan et de projets État-région, les crédits inscrits en 2007, à savoir 7,93 millions d'euros en autorisations d'engagement et 9,93 millions d'euros en crédits de paiement, permettront le règlement des sommes dues par l'État et les premiers engagements dans le cadre des contrats de projets 2007-2013.

Le troisième axe prioritaire est la poursuite de l'effort réalisé pour permettre l'accès de tous aux vacances : les 5,68 millions d'euros qui y seront consacrés en 2007 portent sur de nouvelles contractualisations, le développement des aides à l'accessibilité, l'accueil des jeunes ou encore la réinsertion des personnes fragilisées.

L'année 2007 sera celle de la mise en place du pôle social décidé en comité interministériel du tourisme et qui a résulté, le 15 novembre dernier, de l'intégration de Bourse solidarité vacances dans l'Agence nationale pour les chèques-vacances.

Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les grandes orientations de ce budget du tourisme pour 2007.

Je vais maintenant répondre aux questions posées par les rapporteurs et les intervenants des groupes.

M. Roger Besse m'a interrogé sur les dettes de l'État : d'une part, celles qui sont liées aux contrats de plan État-région signés en 2006, et, d'autre part, les 4,9 millions d'euros concernant le tourisme social.

Nous avons prévu que 8 millions d'euros seraient réservés, sur notre budget pour 2007, à la résorption d'une partie de cette dette, qui s'élève au total à environ à 16,6 millions d'euros. Il nous faut en effet répondre à une double exigence : d'une part, aborder l'avenir en continuant à mener des actions pour développer le tourisme dans de bonnes conditions et, d'autre part, régler les dettes du passé.

C'est la raison pour laquelle nous avons tenté, année après année, de réduire l'écart existant entre des crédits d'engagement, qui étaient à l'époque affichés avec beaucoup de force, et des crédits de paiement qui n'existaient pas en réalité. Nous espérons que, au fil des années, nous aurons de bonnes surprises au moment où il faudra procéder à des reports de crédits. Qui sait, d'ici à 2008, nous arriverons peut-être à éponger la totalité de cette dette !

Je reviendrai tout à l'heure, en répondant à Bariza Khiari, sur les 4,9 millions d'euros de dette à l'égard du tourisme social.

Dominique Mortemousque a évoqué la place de la France comme première destination touristique mondiale. Il est vrai que nous sommes, malgré tout, confrontés à une concurrence qui est de plus en plus acharnée et que nous devons tout faire pour capter la plus grande ou la meilleure part possible des flux internationaux de tourisme.

Ce combat n'est pas facile, parce que nous devons lutter contre deux difficultés essentielles. D'une part, compte tenu d'un coût du travail relativement élevé, notre pays reste une destination chère. D'autre part, nous devons nous défendre contre l'émergence de nouvelles destinations, dont le niveau économique n'est pas le même et qui possèdent des équipements neufs.

C'est la raison pour laquelle nous avons développé le plan Qualité Tourisme, afin de tirer notre épingle du jeu. Même si nous restons la première destination mondiale, il faut bien admettre que, dans quelques années, d'autres pays prendront cette place. Je pense à l'Inde et à la Chine, qui sont des géants démographiques et qui finiront forcément - c'est mathématique ! - par nous dépasser à un moment donné.

Même si la France reste un lieu touristique cher, nous devons mettre en avant la qualité et privilégier ce que nous appelons la valeur ajoutée touristique, de manière à accroître le chiffre d'affaires touristique sans pour autant nécessairement accroître le nombre des visiteurs.

Et nous avons commencé à réussir ce pari. En effet, même si le nombre de touristes n'a pas augmenté de façon importante en 2005 et 2006, la recette a connu une hausse. C'est précisément ce que nous recherchons.

Enfin, vous vous êtes inquiétés de la place du tourisme dans les prochains contrats de projets. Nous avons effectivement dû lutter pour conserver cette place, et, dans le budget pour 2007, 10 millions d'euros y seront consacrés. Cette somme servira, dans un premier temps - je l'ai dit tout à l'heure -, à éponger une partie de la dette, et, dans un second temps, à financer des opérations futures.

Je rappelle que la place du tourisme dans les futurs contrats de projets repose sur trois mesures phares : l'observation statistique ; le tourisme durable, auquel l'État peut contribuer en mettant en place de grands sites structurants, comme les vélo-routes et les voies vertes ; le tourisme social.

Évelyne Didier, qui a quitté l'hémicycle, a évoqué deux difficultés. Elle regrette que nous ayons donné la priorité à la promotion aux dépens du tourisme social. La promotion vise justement à augmenter le nombre de touristes attendus en France. Or, plus ils sont nombreux, plus la recette est importante. Il me paraît tout à fait logique de créer d'abord la richesse pour pouvoir ensuite mieux soutenir le tourisme social.

Aymeri de Montesquiou a d'ailleurs fort pertinemment relevé que 5,68 millions d'euros étaient tout de même inscrits au budget pour l'accessibilité et l'accueil des jeunes et des personnes fragilisées, ce qui relève bien du tourisme social. Ces crédits sont en augmentation de plus de 26 % : on ne peut donc pas dire que le tourisme social est oublié dans les objectifs du Gouvernement !

Je voudrais remercier Bariza Khiari des paroles très aimables qu'elle a eues à mon égard ; elles me touchent d'autant plus que son expérience est reconnue dans ce domaine.

Elle a évoqué l'insuffisance des crédits de promotion, comparés à ceux que d'autres pays comme l'Espagne ou la Turquie consacrent à cette action. Nous avons néanmoins, avec le GIE « Maison de la France », une structure tout à fait particulière, que beaucoup e pays nous envient : je reçois de nombreux ministres du tourisme étrangers qui sont très intéressés par le fonctionnement de cet organisme.

Autrement dit, même si les crédits que nous affectons à la promotion peuvent certes paraître relativement modiques lorsqu'on les compare aux sommes qu'y consacrent les pays cités, la logistique dont nous disposons nous permet d'être efficaces. Bien entendu, s'il était possible de dégager des moyens supplémentaires pour cette action, ils seraient bienvenus !

Concernant le tourisme social, madame Khiari, nous rencontrons plusieurs problèmes. L'un d'entre eux ne relève pas d'un manque de crédits ; il s'agit plutôt de difficultés administratives qui risquent malheureusement de devenir judiciaires si nous ne parvenons pas à trouver les bonnes solutions.

Je ne souhaite pas réquisitionner un ordonnateur dans la mesure où, jusqu'à présent, rien ne se faisait réellement dans la légalité. Cela dit, je ne peux me contenter d'une telle réponse. Je vous indique donc que j'ai entamé une négociation avec mon collègue du budget afin de sortir au plus vite de cette situation complexe, qui met en difficulté beaucoup d'opérateurs sociaux tels que l'UNAT, l'Union nationale des associations de tourisme.

Le décret tendant à déterminer le mode de fonctionnement du pôle social que nous avons récemment créé a été examiné par la section des travaux publics du Conseil d'État, qui a rendu un avis très favorable. Si tout va bien, il devrait être publié au Journal officiel avant Noël ! Dotés de cet élément supplémentaire positif, nous pourrons aborder les négociations dans de bonnes conditions.

Madame Khiari, vous avez vous-même participé aux nouvelles procédures ; pour l'avenir, tout devrait bien fonctionner.

Vous avez également émis quelques inquiétudes au sujet du fonds de concours. En effet, il n'a pas reçu l'avis favorable du conseil d'administration. Toutefois, le décret précédemment évoqué devrait permettre à la double tutelle, c'est-à-dire au ministre du budget et au ministre du tourisme, de prendre une décision quel que soit l'avis du conseil d'administration du nouveau pôle social. En d'autres termes, nous n'aurons de difficultés ni à mettre en place le fonds de concours ni à l'abonder des 2 millions d'euros prévus pour acquitter les dettes sociales.

Enfin, monsieur Bécot, vous avez fait part de votre souci devant la baisse de 3,85 % de la subvention accordée à ODIT France, sachant qu'il faut aussi tenir compte de la nécessité, imposée par la LOLF, de constituer une réserve.

Nous sommes très sensibles à cette situation, d'autant qu'ODIT France fonctionne à merveille. Cet organisme m'est d'ailleurs de plus en plus utile, notamment lorsqu'il s'agit d'exporter le savoir-faire de la France à l'étranger. C'est en grande partie grâce à cela que nous réussissons à créer des opportunités de marché pour nos entreprises.

Comme vous le savez, cette année, notre budget a connu une augmentation tout à fait particulière en raison d'une situation tout aussi particulière. Il fallait augmenter sensiblement des crédits destinés à la promotion afin de lancer le plan Qualité Tourisme en direction du secteur des hôtels, cafés et restaurants.

Soyez rassuré, je ne sous-estime pas pour autant les moyens dont ODIT France a besoin pour renforcer encore son dynamisme. Je reste d'ailleurs ouvert à toute discussion sur ce sujet. En effet, plus nous parviendrons à mettre en place des leviers importants, plus nous créerons des opportunités de marché et plus nous augmenterons la recette.

D'une manière générale, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis tout à fait prêt à dialoguer avec les uns et les autres sur tous ces sujets pour voir comment nous pourrons aborder l'avenir dans les meilleures conditions. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur certaines travées du RDSE.)

Politique des territoires
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Article additionnel après l'article 50 bis

M. le président. Nous allons procéder à l'examen de l'amendement portant sur les crédits de la mission « Politique des territoires » figurant à l'état B.

État B

(En euros)

Mission

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Politique des territoires

641 766 723

711 256 344

Aménagement, urbanisme et ingénierie publique

84 682 937

84 682 937

dont titre 2

17 127 737

17 127 737

Information géographique et cartographique

75 067 713

75 067 713

Tourisme

86 208 282

86 426 605

dont titre 2

22 693 593

22 693 593

Aménagement du territoire

317 306 343

400 276 343

dont titre 2

9 317 843

9 317 843

Interventions territoriales de l'État

78 501 448

64 802 746

M. le président. L'amendement n° II-43 rectifié bis, présenté par M. Besse, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Aménagement, urbanisme et ingénierie publique

Dont Titre 2

Information géographique et cartographique

Tourisme

Dont Titre 2

Aménagement du territoire

Dont Titre 2

Interventions territoriales de l'État

30.328.037

29.073.037

TOTAL

30.328.037

29.073.037

SOLDE

- 30.328.037

- 29.073.037

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Roger Besse, rapporteur spécial. Cet amendement de cohérence « lolfienne » a pour objet d'inviter le Gouvernement à opérer une relocalisation budgétaire des crédits relatifs à l'action « Accueil des demandeurs d'asile en Rhône-Alpes », cette action figurant actuellement, de manière à nos yeux peu logique, dans le programme « Interventions territoriales de l'État », communément appelé le PITE.

En effet, comme je l'ai déjà dit dans mon propos introductif, au regard de la LOLF, la physionomie de ce programme fait largement figure d'anomalie. Il importe de limiter au strict minimum les dérogations qu'il offre aux principes généraux de l'organisation budgétaire.

Le rattachement de son action 8 « Accueil des demandeurs d'asile en Rhône-Alpes » avait déjà paru discutable à la commission des finances lors de l'examen du projet de loi de finances initiale pour 2006. En effet, il existe déjà un programme « Accueil des étrangers et intégration », qui figure au sein de la mission « Solidarité et intégration », dont le rapporteur spécial est notre collègue Auguste Cazalet.

Comme il est logique, ce programme « Accueil des étrangers et intégration » - notamment en son action « Prise en charge sociale des demandeurs d'asile » - vise des objectifs d'ordre national qui recoupent largement ceux de l'action « Accueil des demandeurs d'asile en Rhône-Alpes » conduite à l'échelon local. C'est en particulier le cas en ce qui concerne l'amélioration des conditions d'hébergement des demandeurs et la qualité de leur accompagnement social.

La présence de l'action dans le PITE n'était justifiée, pour 2006, que par l'importance des demandes d'asile enregistrées à l'époque dans la région Rhône-Alpes. En effet, d'après les statistiques de l'OFPRA, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, au 30 septembre 2005, on recensait, y compris les mineurs, 3 806 demandeurs d'asile sur tout le territoire, dont 414, soit près de 11 % du total, dans les huit départements de la région Rhône-Alpes.

Cependant, les demandes d'asile en Rhône-Alpes ont suffisamment baissé, à la fin de l'année 2005 et au premier semestre 2006, pour entraîner, dans le projet de loi de finances pour 2007, une diminution des crédits demandés, de l'ordre de 10 % par rapport à 2006. De fait, les décomptes de l'OFPRA font apparaître qu'au 30 septembre 2006, sur un total de 2 463 demandeurs d'asile, seuls 133 demandeurs correspondaient à la région Rhône-Alpes, soit 5,4 % du total national, c'est-à-dire une proportion deux fois moindre qu'en 2005.

Dans ces conditions, le maintien de cette action au sein du PITE - dont elle représente plus du tiers des crédits -, paraît encore moins justifié qu'auparavant. Selon la commission des finances, il n'y a pas lieu de prévoir, en termes de nomenclature budgétaire, un traitement pour l'accueil des demandeurs d'asile en Rhône-Alpes distinct de celui qui se trouve retenu pour le reste des demandeurs d'asile présents sur le territoire.

Au demeurant, si l'on tient à faire du nombre de ces demandeurs dans une circonscription territoriale donnée un critère d'organisation du budget, la commission des finances ne voit pas pourquoi ne pas commencer par instituer une action spécifique à la région Île-de-France, dont les 589 demandeurs d'asile recensés au 30 septembre 2006 représentent près de 24 % du total national, voire une action limitée à la ville de Paris, où les 351 demandeurs d'asile enregistrés à la même date représentent plus de 14 % du total national.

Ces considérations ont conduit la commission des finances à proposer, compte tenu des règles applicables au Parlement en matière de recevabilité financière, un amendement de suppression des crédits du programme « Interventions territoriales de l'État » à hauteur du montant demandé pour son action « Accueil des demandeurs d'asile en Rhône-Alpes », soit, compte tenu des modifications adoptées par l'Assemblée nationale, 30,3 millions d'euros en autorisations d'engagement et 29 millions d'euros en crédits de paiement.

Sans remettre en cause l'utilité de ces crédits, il s'agit d'inviter le Gouvernement à les inscrire dans leur programme de rattachement naturel, c'est-à-dire, a priori, le programme « Accueil des étrangers et intégration » de la mission « Solidarité et intégration ».

J'ajoute que cet amendement ne remet pas en cause les 2,8 millions d'euros accordés par l'amendement du Gouvernement au budget du tourisme dans le but d'apurer la dette contractée au titre du tourisme social. Je tenais à préciser ce point tout à fait essentiel.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Monsieur le rapporteur spécial, le PITE constitue un outil budgétaire très performant qui confère aux préfets, grâce à la fongibilité totale des crédits, une souplesse d'action et de réactivité indispensable à la conduite d'actions territorialisées et interministérielles de grande envergure. Le PITE ne nuit pas à la spécialisation des crédits. Par exemple, chaque programme contribuant au PEI Corse - programme exceptionnel d'investissement - verra chaque euro versé contribuer aux actions qui relèvent de sa compétence. Simplement, cette adéquation entre le programme d'origine et l'emploi des fonds s'établira sur la durée d'une convention pluriannuelle d'application et non sur un seul exercice budgétaire.

Les premiers résultats des PITE sont tout à fait intéressants et le Gouvernement est fermement attaché au maintien de ces actions et à la poursuite de ces programmes.

Toutefois, le Gouvernement reconnaît que l'action 8 « Accueil des demandeurs d'asile en Rhône-Alpes » est atypique. Il entend également les observations de la commission des finances de votre assemblée sur deux points.

D'une part, cette action, qui mobilise aujourd'hui trois programmes du ministère de l'emploi et de la cohésion sociale, n'est plus de nature interministérielle. D'autre part, l'expérimentation de la régionalisation de l'accueil des demandeurs d'asile, qui a fondé son inscription au PITE, est en cours de généralisation, en partie d'ailleurs du fait du succès rencontré en Rhône-Alpes.

Le Gouvernement aurait toutefois préféré qu'on laisse les actions du PITE aller au terme de l'expérimentation de trois ans pour lesquels elles ont été inscrites à compter du projet de loi de finances pour 2006. Le Gouvernement considère que cette durée constitue en effet le minimum incompressible pour pouvoir mesurer pleinement les effets d'une gestion des actions avec l'outil budgétaire qu'est le PITE et en tirer toutes les conséquences.

Au vu de ces différents arguments, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le ministre, je tiens à vous remercier de ces précisions et je note que vous vous en remettez à la sagesse du Sénat.

Dans l'esprit de la commission des finances, il n'est pas question de priver le Gouvernement des moyens nécessaires à l'accueil des demandeurs d'asile dans la région Rhône-Alpes. Toutefois, comme l'a exposé M. Roger Besse, nous pensons qu'il s'agit d'une action qui relève de la mission « Solidarité et intégration ».

En conséquence, la question que nous nous posons est la suivante : en mettant ces crédits à la disposition du préfet du département du Rhône, lui donnez-vous vraiment des moyens pour l'accueil des immigrés en situation difficile ou bien s'agit-il en fait d'arrondir sa dotation pour des actions diverses

Dans l'esprit qui préside à la LOLF, ces crédits devraient être replacés dans la mission « Solidarité et intégration ». Si le Parlement en avait la possibilité, il aurait déposé un amendement en ce sens. Mais nous n'avons pas cette faculté : nous ne pouvons procéder à des mouvements de crédit qu'entre des programmes, à l'intérieur d'une même mission.

Dans le cas particulier, il faudrait que le Gouvernement dépose un amendement pour que ces crédits puissent être déplacés de la mission « Politique des territoires » vers la mission « Solidarité et intégration ». Voilà qui serait intéressant !

Nous ne voulons pas priver le Gouvernement des crédits prévus pour ce type d'actions, et je suis sûr que le président du conseil général du Rhône y est attentif. (M. Michel Mercier opine.) Peut-on imaginer que le Gouvernement dépose un amendement pour reclasser ces crédits d'une mission vers l'autre ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Si nous nous en remettons à la sagesse de la Haute Assemblée, ce n'est pas pour laisser la région Rhône-Alpes seule face au traitement des demandeurs d'asile. Autrement dit, si le Sénat adopte cet amendement, le Gouvernement rétablira les crédits nécessaires à l'hébergement des demandeurs d'asile en Rhône-Alpes dans le cadre de la mission appropriée, à savoir la mission « Solidarité et intégration ».

M. Jean Arthuis, président de la commission. Très bien !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-43 rectifié bis.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits, modifiés, de la mission « Politique des territoires » figurant à l'état B.

Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.

Je mets aux voix les crédits de la mission, modifiés.

(Ces crédits sont adoptés.)

Article 34 et état B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Administration générale et territoriale de l'Etat

Article additionnel après l'article 50 bis

M. le président. L'amendement n° II-225 rectifié, présenté par M. Repentin et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Après l'article 50 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.- L'article 12 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne est rédigé comme suit :

« Art. 12 - Des groupements d'intérêt public dotés de la personnalité morale et de l'autonomie financière peuvent être constitués entre des personnes morales de droit public ou entre une ou plusieurs d'entre elles et une ou plusieurs personnes morales de droit privé, pendant une durée déterminée :

« a) pour exercer des activités de recherche, de valorisation de la recherche, d'expérimentation, de diffusion d'informations ou de formation dans le domaine de la formation et de la mise en valeur de la zone de montagne, en vue d'y promouvoir des filières de développement économique et social, ou pour créer et gérer des équipements ou des services d'intérêt commun nécessaires à ces activités ;

« b) pour étudier, concevoir, et coordonner des actions de toute nature favorisant le développement des activités économiques et touristiques en zone de montagne, ou pour créer et gérer des équipements ou des services d'intérêt commun nécessaires à la réalisation de ces actions.

« Lorsque l'État est membre du groupement, les dispositions du chapitre 1er du titre IV du livre III du code de la recherche sont applicables à ces groupements d'intérêt public.

« Dans les autres cas, la convention constitutive du groupement est approuvée par le ou les représentants de l'État dans le ou les départements concernés, qui en assurent la publicité. Le groupement ne comprend pas de commissaire au Gouvernement.

« La comptabilité du groupement est tenue et sa gestion effectuée selon les règles du droit privé, sauf dans le cas où des personnes morales de droit public constituent exclusivement le groupement, ou lorsque sa convention constitutive prévoit l'application des règles de la comptabilité publique.

« La transformation de toute autre personne morale en un groupement prévu par le présent article n'entraîne ni dissolution, ni création d'une personne morale nouvelle ».

II.- Les groupements d'intérêt public créés sur le fondement de l'article 12 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 dans sa rédaction applicable avant la date d'entrée en vigueur de la présente loi, modifient en conséquence, et dans un délai de six mois à compter de cette date, leur convention constitutive par décision simple de leur assemblée générale. Dans ce même délai, la convention constitutive ainsi modifiée doit également être transmise, pour approbation, au (x) représentant(s) de l'État dans le ou les départements concernés.

Cette modification est effectuée à titre gratuit et ne donne lieu au paiement d'aucune indemnité, droit, taxe, salaire ou honoraire.

La parole est à M. Thierry Repentin.

M. Thierry Repentin. Monsieur le président, avant de défendre cet amendement, je souhaite, au nom de mon groupe, vous faire part de notre sentiment sur ce débat.

Vous avez sans doute noté que notre collègue Évelyne Didier avait préféré quitter l'hémicycle après que M. Estrosi lui eut expliqué que la Moselle...

M. Christian Estrosi, ministre délégué. La Meurthe-et-Moselle !

M. Thierry Repentin.... aurait pu déposer une candidature pour un pôle d'excellence « arithmétique élémentaire », mettant en doute les capacités de notre collègue à analyser un budget.

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Ne connaissez-vous pas les départements de la Lorraine ?

M. Thierry Repentin. Visiblement, monsieur le ministre, le Var aurait eu quelque difficulté à soutenir une candidature pour un pôle d'excellence « modestie élémentaire » ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Les Alpes-Maritimes ! (Rires.) Apprenez votre carte de France !

M. Thierry Repentin. Allez-y, continuez, monsieur le ministre !

Vous êtes dans une assemblée où, en général, on se respecte. Même si votre prestation peut satisfaire certains de vos amis, beaucoup, y compris dans les rangs de la majorité, gardent un peu de retenue dans leur expression, car ils ne souhaitent pas illustrer cette maxime des viticulteurs selon laquelle les tonneaux vides sont ceux qui font le plus de bruit...

J'en viens maintenant à l'amendement n° II-225 rectifié.

Monsieur le ministre délégué au tourisme, vous savez que les stations de montagne devront faire face à des enjeux déterminants dans les années à venir : l'incertitude liée à l'évolution climatique et les conséquences de celle-ci sur l'enneigement ; la question de la fréquentation touristique de la montagne l'été ; des investissements très lourds, décidés dans une perspective de long terme, mettant en jeu des capitaux importants aussi bien lors de la création des équipements que lors de leur renouvellement ; les questions liées à la gestion des stations, qu'il s'agisse du rôle de la commune, de la cohérence des politiques, de la coordination des acteurs, des choix de développement, tout cela constituant un enjeu de gouvernance.

L'ensemble de ces données a conduit à imaginer un outil juridique et fonctionnel permettant d'atteindre les objectifs cités plus haut ; cette réflexion a abouti à envisager la création d'un GIP pour le territoire qui le désire, conformément aux dispositions de la loi « montagne » du 9 janvier 1985.

En effet, les pouvoirs publics ne peuvent assurer seuls la dynamique économique de la station, bien qu'ils disposent d'un fort pouvoir d'organisation et d'incitation. Il était donc nécessaire que, dans l'intérêt commun d'un meilleur développement durable de la station, soit constitué un nouvel outil englobant les différents protagonistes du milieu économique, et notamment la sphère privée, dont l'objectif commun est de parvenir à une meilleure qualité de gestion de la station et de mise en valeur de la montagne.

Bien entendu, ce groupement, bien qu'étant un outil de « démocratie participative » oeuvrant pour l'intérêt collectif de ses membres, ne devra constituer en aucune façon un instrument concurrent des prérogatives des pouvoirs publics.

Au contraire, le GIP aura pour objet d'apporter, par des actions très concrètes, un complément indispensable à l'action des pouvoirs publics, par une coopération accrue entre personnes de droit public et personnes de droit privé.

Tel est l'objet de ce GIP, monsieur le ministre délégué au tourisme ; tel qu'il est prévu, il ne crée aucune dépense nouvelle pour l'État et constitue un outil dont se saisiront, s'ils le souhaitent, les élus des territoires concernés.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Roger Besse, rapporteur spécial. Monsieur Repentin, j'apprécie particulièrement votre amendement et, étant moi-même un élu de la montagne, je serais enclin à le voter.

Mais, en tant que rapporteur spécial de la commission des finances, je considère que l'objet de cet amendement est étranger au domaine de la loi de finances tel que défini par la LOLF.

Dans ces conditions, cet amendement ressemble fort à un cavalier budgétaire, et je vous demande donc de bien vouloir le retirer.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Il est irrecevable !

M. le président. Retirez-vous l'amendement n° II-225 rectifié, monsieur Repentin ?

M. Thierry Repentin. Je souhaiterais connaître l'avis du Gouvernement.

M. le président. Monsieur Repentin, je vais demander au Gouvernement de faire connaître son avis, mais sachez que nous sommes à la limite de l'invocation de l'irrecevabilité et que, dès lors, je ne devrais pas avoir à le faire.

Quel est, donc, l'avis du Gouvernement ?

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Après M. le rapporteur spécial, qui est un élu de la montagne, c'est un ministre de la montagne qui vous répond, monsieur Repentin !

Comme je n'ai cessé de le répéter devant le congrès de l'Association nationale des élus de la montagne, en matière de solidarité montagnarde, il n'y a qu'un seul parti : la montagne !

Malheureusement, vous vous êtes exprimé différemment à cette tribune. Vous avez déconsidéré des territoires où vivent des femmes et des hommes qui sont souvent parmi les plus modestes, en estimant qu'ils n'avaient pas le talent et l'intelligence nécessaires pour s'engager dans une compétition, en doutant de leur capacité à mettre eux-mêmes en oeuvre des politiques de compétitivité qui leur permettent d'être, eux aussi, une chance pour la France, pour son avenir.

En réponse à vos propos très durs et sectaires, il m'appartient simplement de manifester toute ma conviction de montagnard.

Ayant dit cela, je redis, après M. le rapporteur spécial, que cet amendement ne concerne aucune matière budgétaire ou fiscale et, à l'évidence, ne relève pas d'une loi de finances. Il s'agit manifestement d'un cavalier que le Gouvernement ne pourra qu'inviter la Haute Assemblée à rejeter.

Sur la forme, j'essaie de comprendre pourquoi cet amendement arrive en discussion aujourd'hui. J'ai installé toutes les instances de concertation prévues par la loi montagne : le Conseil national de la montagne s'est tenu le 29 août 2006 à Sallanches ; sa commission permanente s'est réunie, sur mon initiative, le 11 octobre dernier ; elle a porté à sa présidence M. Michel Bouvard, un autre élu de la montagne, et a constitué ses groupes de travail. Je suis très surpris, connaissant les habitudes de travail des élus de la montagne, que cette question n'ait pas été abordée au sein de ces instances.

Sur le fond, la création d'un GIP est un processus lourd et long, tandis que, conformément à l'article 12 de la loi de 1985, il ne peut être constitué que pour une durée déterminée. Un GIP est-il réellement adapté à la gestion d'équipements dont la durée d'amortissement serait supérieure à sa propre existence ? Comment gérer la coexistence de plusieurs structures dont les fonctions sont connexes, SEM ou GIP, sur la même commune ? Si plusieurs communes décidaient de créer un GIP, celui-ci ne contournerait-il pas l'intérêt d'une intercommunalité ?

Pour toutes ces raisons, monsieur Repentin, je ne peux que vous inviter à retirer votre amendement.

M. le président. Monsieur Repentin, l'amendement n° II-225 rectifié est-il maintenu ?

M. Thierry Repentin. Suivant l'invitation de M. le rapporteur spécial, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° II-225 rectifié est retiré.

Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Politique des territoires ».

Administration générale et territoriale de l'État

Article additionnel après l'article 50 bis
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Relations avec les collectivités territoriales - Compte de concours financiers : avances aux collectivités territoriales

M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l'État ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Henri de Raincourt, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon propos sera volontairement bref et ramassé.

La mission « Administration générale et territoriale de l'État » bénéficie de 2,497 milliards d'euros de crédits de paiement, soit une hausse de 12,9 % par rapport aux crédits ouverts l'année dernière.

Alors que chacun de ses programmes enregistrait en 2006 une évolution à la baisse, la tendance est nettement inversée en 2007.

Le programme « Administration territoriale » connaît une modification substantielle de son périmètre avec la création de l'Agence nationale des titres sécurisée, qui se voit confier la responsabilité d'organiser la production des passeports électroniques. Cette agence sera dotée de 45 millions d'euros, prélevés sur les taxes de délivrance des passeports.

Si les crédits de paiement de ce programme sont en progression de 1,7 %, il faut souligner la bonne tenue des dépenses de fonctionnement au sein de cette enveloppe. Ces dépenses reculent de 5 %, notamment sous l'effet d'une gestion rigoureuse, comme j'ai eu l'occasion de le montrer lors de ma récente mission de contrôle budgétaire sur les dépenses de fonctionnement des préfectures. Cette mission a fait l'objet d'un rapport écrit présenté devant la commission des finances, ce qui me permet d'être plus synthétique aujourd'hui.

L'année dernière, la commission des finances du Sénat s'était souciée d'éventuels transferts de charges qui ne s'accompagneraient pas de transferts d'emplois équivalents, notamment dans le cas du transfert des procédures d'ordonnancement des préfectures vers les juridictions. Notre collègue et ami Roland du Luart s'en était également ému.

Il apparaît, cette année, que les emplois ainsi dégagés par les préfectures ont été redéployés pour assurer la gestion des crédits des services déconcentrés d'autres ministères. En outre, avec la LOLF, de nouvelles responsabilités reposent désormais sur les préfets et leurs collaborateurs, qui doivent par exemple donner un avis sur les budgets de chaque service déconcentré.

Ainsi, la LOLF n'est pas synonyme d'un allégement de la charge de travail des préfectures, mais plutôt d'une évolution des compétences et de l'expertise des personnels.

Le programme « Vie politique, cultuelle et associative » connaît une augmentation, une explosion devrais-je dire, de ses crédits de paiement, avec une hausse de 155,2 %. La raison tient à l'organisation des élections présidentielles et législatives en 2007.

Le chiffrage des crédits d'élections s'est opéré dans un contexte d'incertitude sur le nombre de candidats à chacune de ces élections et sur l'incidence de l'ouverture à la concurrence de l'envoi des courriers de plus de 50 grammes.

Aussi la démarche adoptée repose-t-elle sur le raisonnement dit de « fourchette ».

L'ouverture en autorisations d'engagement se situe, par mesure de prudence, en haut de la fourchette. Les calendriers étant serrés, il importe de disposer des autorisations d'engagement nécessaires à la notification des marchés le moment venu.

L'ouverture en crédits de paiement est calée sur le milieu de la fourchette, c'est-à-dire sur un scénario d'exécution jugé réaliste, à défaut d'être certain puisque nous ne connaissons pas encore le nombre de candidats.

L'estimation de ces crédits se fonde, pour les autorisations d'engagement, sur l'hypothèse de 20 candidats à l'élection présidentielle et de 8 400 candidats aux élections législatives ; pour les crédits de paiement, l'hypothèse retenue est de 15 candidats aux élections présidentielles et de 7 500 candidats aux élections législatives.

À cet égard, je regrette que le mode de financement public de l'activité politique contribue fortement, en dépit même de la nouvelle « règle du 1 % », à un gonflement artificiel du nombre de partis et de groupements politiques qui trouvent ainsi la possibilité d'obtenir des financements...

M. Joël Bourdin. C'est vrai ! (M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois, acquiesce.)

M. Henri de Raincourt, rapporteur spécial.... sans pour autant exercer la réalité du pouvoir.

Je pense que c'est un effet pervers et qu'il convient de le relever.

M. Jean-Pierre Sueur. Il faut réformer ce mode de financement !

M. Henri de Raincourt, rapporteur spécial. Oui, et je le proposerai l'année prochaine !

Une telle évolution ne constitue pas un facteur de clarification du « jeu politique » et peut induire un manque de lisibilité des élections à venir. Ce n'est certainement pas de nature à réconcilier nos compatriotes avec la vie politique !

Le programme « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur », enfin, enregistre une hausse de 5,8 % par rapport à 2006.

Cette évolution, tant en fonctionnement qu'en investissement, traduit les priorités du ministère. Je citerai notamment le regroupement à Levallois-Perret, sur un site unique, de l'ensemble des services concourant à l'activité de renseignement de la police nationale, mais aussi la conduite de projets lourds dans le domaine des « infrastructures réseaux et télécoms », en particulier le projet CRISTAL, qui vise à développer la téléphonie sur Internet.

J'ajoute qu'une attention particulière devra être accordée, en gestion 2007, à la consommation des frais de contentieux - nous les avons déjà évoqués -, qui sont dotés d'une enveloppe de 75,2 millions d'euros, mais que la multiplication des procédures a malheureusement conduit à sous-évaluer au cours des exercices précédents.

La commission des finances vous propose, mes chers collègues, d'adopter les crédits de cette mission et de chacun de ses programmes.

Je voudrais d'un dernier mot, monsieur le ministre, remercier devant vous l'ensemble de vos collaborateurs, avec qui nous travaillons en confiance et avec une certaine efficacité tout au long de l'année pour permettre aux préfectures de fonctionner le mieux possible et d'une manière exemplaire pour ce qui est de l'utilisation des crédits publics. (Applaudissements sur les travées de l'UMP ainsi que sur le banc des commissions.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. José Balarello, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour la deuxième année, la commission des lois est saisie pour avis des crédits de la mission intitulée « Administration générale et territoriale de l'État ».

Cette mission représente 0,93 % des crédits de paiement du budget prévisionnel et 35 113 emplois équivalents temps plein. Le budget de la mission connaît une progression d'une année sur l'autre de 12,9 %, due essentiellement aux crédits relatifs aux élections.

Les activités de la mission sont réparties en trois grands programmes. Le premier, « Administration territoriale », absorbe 65 % des crédits de paiement de la mission, le deuxième, « Vie politique cultuelle et associative », 15 %, et le troisième, « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur », 20 %.

Conformément aux règles instaurées par la LOLF, chacun de ces trois grands programmes comporte des actions, soit cinq pour l'« Administration territoriale », cinq également pour la « Vie politique, cultuelle et associative », et sept pour le programme « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur ». En outre, le projet de loi de finances pour 2007 comporte six objectifs, comme en 2006, auxquels sont associés treize indicateurs, contre douze en 2006.

Ces précisions données, nous examinerons, dans les trois programmes, les principales réformes et innovations.

Dans le premier, qui concerne l'activité des préfectures, nous constatons la mise en oeuvre de nombreuses réformes tendant à moderniser l'administration préfectorale. Citons la mise en place d'une mesure de plus en plus efficiente de la performance, de même qu'un budget permettant aux préfectures de jouer leur rôle pivot dans l'exercice des politiques nationales telles le logement et la lutte contre les exclusions. Il est vrai que, en matière de logement, les intercommunalités sont de plus en plus nombreuses, à l'heure actuelle, à demander la compétence de l'aide à la pierre. Nous passons en revue dans notre rapport le rôle du préfet, qui a été réaffirmé dans les lois du 28 mars 2003 et du 13 août 2004.

Mentionnons également le renforcement de l'échelon régional, le préfet de région étant compétent pour animer et coordonner l'action des préfets de département avec la création de huit pôles régionaux placés sous son autorité. Les préfets de département ont en outre la possibilité d'instaurer des délégations interservices, en vertu du décret du 29 avril 2004, afin de mutualiser les compétences et les moyens.

Pareillement, ont été retenues l'expérimentation dans huit départements de la fusion des directions départementales de l'équipement et des directions départementales de l'agriculture, la mise en place d'une bourse d'emplois interministérielle dans les régions Lorraine et Champagne-Ardenne, et un nouvel organigramme des services de l'État dans le Lot. Vous en trouverez le détail dans notre rapport.

Ont encore été examinés les PASE, les projets d'action stratégique de l'État, les DNO, ou directives nationales d'orientation, et les actions au sein du programme « Interventions territoriales de l'État », ou PITE, étant précisé que celui-ci permet de regrouper pour un projet d'envergure et présentant un intérêt national l'ensemble des crédits qui lui sont alloués et qui sont issus de différents programmes ministériels.

Nous examinons également dans le rapport qui vous est soumis l'activité des préfectures, toujours essentielle, dans la délivrance des titres. Cette dernière mission absorbe en effet 40 % du programme « Administration territoriale ».

En 2005, ce sont plus de 22 millions de titres qui ont été délivrés par l'administration territoriale, dont 5 millions de cartes nationales d'identité et 12,8 millions de cartes grises. Le ministère de l'intérieur contrôle les délais de traitement des titres, les préfectures étant divisées à cet effet en quatre strates selon le nombre d'habitants du département.

On peut affirmer, et je crois qu'il faut en féliciter le ministère, que les résultats sont bons alors que d'importantes réformes sont en cours : le projet INES, avec l'instauration des passeports électroniques ; le projet SIV, le système d'immatriculation à vie des véhicules ; la refonte de l'application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France, le projet GREGOIRE. Tous ces projets sont détaillés dans notre rapport. Je mentionnerai en outre la modernisation du contrôle de légalité, caractérisé notamment par la transmission des actes par voie électronique.

Notre rapport examine également l'introduction de la biométrie dans les documents d'identité et la mise en place des passeports électroniques, en application d'un règlement de la Communauté européenne du 13 décembre 2004. Leur déploiement national a été rapide puisqu'il s'est achevé en juin 2006. Il était devenu indispensable du fait de la décision des États-Unis d'imposer le passeport électronique à compter du 26 octobre 2006 à vingt-sept pays jusqu'alors exemptés de visas, dont la France.

À partir de 2007, c'est la future agence nationale des titres sécurisés, établissement public, qui devrait être chargée, dans le cadre du projet d'identité nationale électronique sécurisé, le projet INES, d'organiser la production de ces nouveaux documents d'identité, y compris de la nouvelle carte d'identité biométrique. La numérisation des empreintes digitales dans les passeports européens sera en outre obligatoire à compter du 28 juin 2009, en vertu du règlement européen du 13 décembre 2004.

Bien évidemment, il nous faudra trouver une nouvelle répartition des compétences en la matière entre les communes et les préfectures, car il sera difficile de maintenir la possibilité de déposer une demande de document d'identité dans chacune des 36 000 communes de France, comme c'est actuellement le cas.

Cependant, monsieur le ministre, je voudrais attirer votre attention sur un point qui nous paraît important. Un article récent paru dans la presse nationale fait état d'un rapport du réseau d'excellence FIDIS, ou Futur de l'identité dans la société de l'information, indiquant que le nouveau passeport sécurisé ne serait en réalité pas sûr du tout, et qu'il serait même « piratable ». Une mission d'information de la commission des lois s'est d'ailleurs inquiétée de ce problème et va dans le même sens. Qu'en est-il, monsieur le ministre, et quelles mesures envisagez-vous de prendre ?

Dans une deuxième partie, notre rapport traite du financement du programme « Vie politique, cultuelle et associative ».

Pour ce qui est de la vie politique, la répartition des crédits dépend essentiellement des échéances électorales de 2007. L'organisation des élections consommera 64 % du budget, les cultes 15 %, le financement des partis 19 %, la vie associative 1 % et la Commission nationale des comptes de campagne et de financements politiques 1 %. Le budget de l'organisation des élections progresse de 228,1 millions d'euros par rapport au montant des crédits votés dans la loi de finances pour 2006, atteignant 244,3 millions d'euros.

Nous examinons également le problème du financement des partis politiques, et tout d'abord la délicate définition du parti politique, étant précisé que, depuis 2002, 7 millions d'euros ne sont pas versés aux partis au titre des sanctions infligées pour non-respect de l'obligation de parité. Notre collègue Henri de Raincourt a insisté, fort justement à mon avis, sur cette définition du parti politique, qui mérite d'être modifiée.

Cette deuxième partie du rapport qui vous est soumis examine également les crédits de l'action « Cultes », dotée de 55,9 millions d'euros en crédits de paiement, essentiellement destinés à 1 409 équivalents temps plein travaillés et correspondant principalement aux émoluments des ministres des cultes d'Alsace et de Moselle. Je rappelle que ces modalités ont été fixées dans des textes datant de l'an IX et de l'an X, c'est-à-dire du Consulat.

Nous faisons aussi état de l'évolution des religions dans notre pays. Lors de son audition devant la commission des lois, M. Estrosi, ministre délégué à l'aménagement du territoire, évoquant la question du financement de la construction des lieux de culte, qu'il a jugée centrale, a considéré qu'il n'était pas juste que les fidèles des confessions les plus récemment installées sur le sol français rencontrent des difficultés pour pratiquer leur culte et doivent parfois recourir à des montages financiers hasardeux. Vous aurez peut-être, monsieur le ministre, quelques précisions à nous apporter sur ce point.

Nous examinons enfin la simplification, voulue par le ministre de l'intérieur, des conditions d'exercice de la vie associative avec le projet de web des associations librement déclarées, dit « projet WALDEC ».

Enfin, la troisième et dernière partie du rapport est consacrée au programme « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur ». Elle évoque la réduction du nombre d'objectifs, qui ont été ramenés de sept à cinq, et d'indicateurs, qui passent de dix-huit à neuf, et traite de la politique de gestion immobilière. Bien que cette dernière se veuille dynamique, j'ai quelque souci à son propos, car il me semble, monsieur le ministre, qu'il faudrait que vous interveniez afin que les choses aillent plus vite, notamment pour la cession de quelques actifs immobiliers.

J'indique, pour conclure, que la commission des lois a émis un avis favorable sur le projet de budget pour 2007 de la mission « Administration générale et territoriale de l'État ». (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Guy Fischer.)

PRÉSIDENCE DE M. Guy Fischer

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Nous poursuivons l'examen des dispositions du projet de loi de finances pour 2007 concernant les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l'État ».

J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :

Groupe Union pour un mouvement populaire, 10 minutes ;

Groupe socialiste, 15 minutes ;

Groupe communiste républicain et citoyen, 7 minutes ;

Groupe du rassemblement démocratique et social européen, 7 minutes.

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d'intervention générale et celui de l'explication de vote.

Je rappelle également qu'en application des décisions de la conférence des présidents aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Mme Josiane Mathon-Poinat. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'étude du projet de budget 2007 pour la mission « Administration générale et territoriale de l'État » m'appelle à poser une question d'ordre général.

Nous avons devant nous les documents relatifs au financement d'une année d'activité des services généraux et territoriaux de l'État. Les chiffres sont établis, expliqués, comparés.

Pourtant, chacun le sait, l'année électorale qui approche va venir bousculer ce projet de loi de finances. Nous devons nous interroger sur la sincérité de ce budget.

Est-il réellement sincère ? Je ne le pense pas.

Vous nous présentez une somme en hausse de 12,9 % par rapport à 2006, augmentation mécanique liée aux frais occasionnés par les élections présidentielle et législatives.

Sur le fond, votre projet de budget apparaît clairement marqué du sceau de votre politique.

La principale remarque que l'on peut formuler à l'égard de cette mission est, hélas ! que vous donnez des signes toujours plus inquiétants quant à vos objectifs.

Vous accentuez encore votre approche exclusivement sécuritaire et policière de la vie de nos concitoyennes et de nos concitoyens.

De quoi nous parle-t-on dans ce texte ? De « passeports sécurisés », de « renforcement » du traitement des dossiers des étrangers, de « productivité » et de « maîtrise des dépenses », un vocabulaire qui ne trompe pas sur la réalité qu'il recouvre.

Les moyens dont disposent les préfectures devraient au contraire être tournés vers la satisfaction des besoins et des attentes des administrés. L'accueil, l'écoute des usagers devraient y être considérablement développés.

Si l'expression « cohésion sociale » a un sens, elle devrait pouvoir s'identifier à la qualité de la relation entre le citoyen et l'administration, qui représente par essence l'État de droit, autrement dit l'État garant des droits du citoyen.

Toutefois, M. le ministre délégué à l'aménagement du territoire nous a confié sa vision à long terme : « moins de guichets » souhaite-t-il, en tablant sur le doublement du nombre de départs à la retraite entre 2010 et 2015.

Ce projet de budget 2007 tourne donc le dos aux exigences nées de la situation de profonde crise sociale et économique que connaît notre pays. Doit-on rappeler ici que voilà à peine un an nous étions sous le régime d'exception de l'état d'urgence ?

Alors que le taux de chômage ne baisse pas, que la précarité grimpe à tous les étages de notre société et que le nombre d'allocataires du RMI explose, vous avez prévu de supprimer des emplois !

En 2007, vous décidez, si jamais les électeurs vous laissaient faire - on peut espérer que cela puisse changer - de ne pas remplacer 401 départs à la retraite dont 315 dans les préfectures. L'équivalent de 156 temps pleins travaillés seraient donc ainsi supprimés !

Les taches assumées par le personnel préfectoral sont pourtant primordiales.

Avec la mise en oeuvre des procédures relatives à la LOLF, vous nous présentez, sous un jour qui se veut moderne, les « indicateurs » censés mesurer les résultats de la productivité de gestion indexée à des objectifs eux-mêmes destinés à la maîtrise les coûts...

Bref, vous avez une vision purement comptable du travail des agents et des services.

Comment estimer l'efficacité de leur action, notamment dans le domaine du conseil et de l'information aux collectivités locales, en ne prenant en compte que des éléments statistiques ?

Il est des choses qui ne peuvent se mesurer avec des chiffres, mais qui nécessitent du temps et de l'implication personnelle : établir des relations de confiance, partager des compétences. Cela ne compterait-il pas ?

Pour 2007, vous demandez à chaque agent de réduire de 10 % l'utilisation des moyens de téléphonie.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C'est normal puisqu'ils utilisent d'autres moyens !

Mme Josiane Mathon-Poinat. Ce n'est pas anecdotique. Cette mesure vise à culpabiliser les fonctionnaires, à leur faire croire qu'ils sont responsables, individuellement, du manque de moyens que vous organisez.

Vous pressurez les personnels, vous cherchez à obtenir par la contrainte leur adhésion à votre vision ultralibérale d'un État qui devrait maigrir, maigrir, et encore maigrir, au risque de devenir squelettique.

M. Henri de Raincourt, rapporteur spécial. Ou anorexique !

Mme Josiane Mathon-Poinat. En effet.

Vous voulez consacrer 12 millions d'euros à la modernisation de l'Application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France.

J'aurais aimé que cette mesure soit positive, mais c'est la chasse aux étrangers que vous organisez.

L'actualité de cet été l'a mis en évidence : vous ne demandez pas un examen sérieux et humain de chaque dossier de régularisation des « sans-papiers », quand bien même ce sont des enfants, des familles.

Vous fixez des chiffres, des quotas à atteindre avant même que les services aient instruit les dossiers, parce que vous voulez donner des gages à l'électorat d'extrême droite, sur le refrain trop bien connu de la stigmatisation et de la peur de l'autre.

Et lorsque la mobilisation des parents d'élèves, des démocrates, des enseignants vous impose de concéder une circulaire pour permettre aux enfants scolarisés de parents sans papiers d'obtenir un titre de séjour, les dispositifs d'accueil de ces demandeurs se révèlent pour le moins bien inadaptés.

Quel effarant spectacle, cet été, que ces files d'attente interminables devant un certain nombre de préfectures, notamment en Île-de-France !

Quel contraste entre la dignité des personnes venant faire régulariser leur situation et les conditions qui leur étaient réservées !

Parmi ces personnes, combien ont dû passer des heures entières dehors sous un soleil de plomb ? Combien se sont résolues à prendre leur place au milieu de la nuit pour s'assurer d'accéder aux guichets ?

Une autre approche est absolument vitale pour ce pays qui fut une terre d'accueil, et qui peut toujours l'être.

Vous consacrez une bonne part de ce projet de budget, soit 40 % des crédits prévus pour le programme « Administration territoriale », à la mise en place des passeports électroniques, de la carte nationale d'identité électronique sécurisée et de l'immatriculation à vie des véhicules.

Ces dispositions prises au nom de la sécurité ne se révéleront efficaces - je le crains - que pour augmenter le coût pour l'usager.

La sécurité est illusoire si elle ne se comprend qu'à travers la multiplication des barrières administratives et policières, sans jamais tarir les sources du danger.

La codification, le fichage de données de plus en plus précises fait, en revanche, courir un risque grandissant de pertes de libertés individuelles.

La fraude en est-elle pour autant combattue ? Chacun connaît bien la course poursuite entre l'attaque et la défense : dès qu'un nouveau système de sécurité est mis en place, son contournement est recherché. Avec l'introduction d'éléments biométriques dans les documents individuels, vous franchissez un palier supplémentaire dans cette escalade nécessitant toujours plus de moyens.

Vous avez pris du retard dans l'introduction du passeport électronique en raison du conflit que vous avez déclenché avec l'Imprimerie nationale en tentant de contourner ses prérogatives. Bel exemple de conjonction entre sécuritarisme et ultralibéralisme !

Au-delà, le renchérissement des procédures est au rendez-vous du citoyen.

Alors que, aujourd'hui, dans les 36 000 communes de notre pays, on peut aisément effectuer sa demande de carte d'identité, vous prévoyez, au mieux, que seulement 2 000 communes seront à même de délivrer ce nouveau sésame !

De nouvelles inégalités sont ainsi appelées à se développer.

Monsieur le ministre, pour l'ensemble de ces raisons, les membres du groupe CRC voteront contre les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l'État ».

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais tout d'abord saluer le travail accompli depuis un certain nombre d'années au ministère de l'intérieur, au sein des préfectures et des sous-préfectures, pour accroître la modernisation des services, les rendre le plus efficaces possible, plus rapides, pour répondre au souci d'une proximité avec nos concitoyens.

J'ai d'ailleurs lu avec plaisir dans un ouvrage paru récemment aux éditions Plon, intitulé Comment fait la France quand elle gagne ?, un chapitre de grand intérêt consacré à la sous-préfecture de Pithiviers...

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Ah !

M. Jean-Pierre Sueur. ...dont les efforts de modernisation ont été signalés à très juste titre.

Cela étant dit, monsieur le ministre, je ne vais pas pouvoir, en dépit des appels de M. le président de la commission des lois, poursuivre mon intervention sur cette même tonalité...

M. Bernard Saugey. C'est bien dommage !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C'était pourtant bien parti !

M. Jean-Pierre Sueur. ...et je me contenterai de vous poser cinq questions.

Première question, vous nous présentez un plan de requalification des personnels. Il est très positif de travailler pour renforcer la qualification des personnels, mais j'ai cru comprendre que la perspective dans laquelle vous vous situez, qui est d'ailleurs tout à fait illustrée par ce projet de loi de finances, se traduisait par la suppression de 1 500 emplois entre 2006 et 2010, avec en contrepartie la requalification de plusieurs milliers d'emplois, en particulier des personnels de catégorie C dans les préfectures et les sous-préfectures.

Monsieur le ministre, êtes-vous vraiment intimement persuadé que la requalification suffira à compenser les effets de ces suppressions d'emplois et ne pensez-vous pas qu'il faudrait revoir un certain nombre de ces suppressions d'emplois, voire l'ensemble, la suppression d'emplois finalement n'étant pas du tout la condition de la requalification ?

Ma deuxième question rejoint les propos de Mme Josiane Mathon-Poinat concernant les services qui, dans nos préfectures, sont chargés de la question des étrangers.

Il est vrai que l'on assiste à des situations très difficiles, des files d'attente, d'ailleurs, je ne jette pas la pierre aux personnels qui accueillent les personnes étrangères et qui travaillent dans des conditions souvent délicates et complexes. La circulaire de juin 2006 a été mise en oeuvre dans des conditions auxquelles nous ne saurions souscrire.

En effet, il a fallu aller très vite. Ce qui avait été présenté à cette tribune par M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, comme un examen au cas par cas est devenu la mise en application d'une sorte de quota. Les préfets ont en effet bien compris qu'ils devaient respecter une certaine proportion, ce qui a débouché sur un grand nombre de décisions arbitraires. Chaque semaine, je reçois des personnes qui n'ont pas été régularisées, alors que d'autres, qui se trouvaient dans des situations tout à fait analogues, l'ont été.

C'est la raison pour laquelle notre groupe a déposé, comme vous le savez, monsieur le ministre, une proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête sur le processus qui a été mis en oeuvre. Je ne doute pas que la commission des lois s'intéressera à cette proposition de notre groupe et que celle-ci sera bientôt inscrite à l'ordre du jour. Ce serait, me semble-t-il, une excellente idée, car le processus qui a été mis en oeuvre présente, je le répète, une part d'arbitraire que nous ne pouvons accepter.

Monsieur le ministre, que comptez-vous faire pour améliorer les conditions de travail des fonctionnaires, qui, dans les préfectures, traitent de la question particulière des personnes étrangères ? Pensez-vous vraiment que cette amélioration nécessaire soit compatible avec les perspectives inscrites dans le présent projet de loi en termes d'emploi ?

Ma troisième question porte sur l'identification nationale électronique sécurisée, pour laquelle il est prévu, dans le présent projet de loi de finances, d'affecter 2,5 millions d'euros en autorisations d'engagement et 1 million d'euros en crédits de paiement.

Tout d'abord, monsieur le ministre, pour cette tâche régalienne, qui concerne la délivrance de passeports et de cartes d'identité ainsi que les outils d'identification et de reconnaissance des signatures électroniques, pensez-vous qu'il soit justifié de faire appel à la procédure du partenariat public-privé ?

En effet, un tel travail ne peut être mené uniquement par le ministère de l'intérieur, puisqu'un certain nombre compétences techniques sont nécessaires. Mais pourquoi ne pas recourir à la procédure bien connue des marchés ? Est-il opportun, dans ce domaine particulièrement régalien, de faire appel à la procédure du partenariat public-privé, ce qui - j'en prends le pari - ne manquerait pas d'avoir des conséquences financières ? Car le principe même de la procédure du partenariat public-privé, c'est de ne pas payer au départ. C'est plus tard, années après années, que le règlement doit être effectué. Le risque est donc grand de payer beaucoup plus que ce que l'on eût payé à l'origine.

Vous prévoyez, monsieur le ministre, - il s'agit d'une question subsidiaire - de créer une agence nationale des titres sécurisés. En quoi les services de l'État ne peuvent-ils pas pourvoir, en l'état actuel des choses, à cette tâche, sans qu'il soit nécessaire de créer un nouvel organisme ?

Ma quatrième question concerne les sous-préfectures, sujet qui fait l'objet d'un débat depuis de nombreuses années. Je souhaite rappeler ici ce que chacun sait : les sous-préfectures assurent une mission importante, celle de la présence de l'État sur le terrain, à proximité de nos concitoyens. En outre, vous le savez, monsieur le ministre, les élus locaux sont très attachés à leur sous-préfecture.

Quelle est donc votre position concernant l'avenir des sous-préfectures ? Il convient de prendre en compte, me semble-t-il, la diversité des contextes et des arrondissements, notamment la diversité démographique et l'éloignement géographique avec la préfecture, qui fait que certaines sous-préfectures jouent un rôle de quasi-préfecture dans de gros arrondissements.

Parfois, au contraire, les effectifs des sous-préfectures sont tellement faibles qu'il leur est difficile d'assumer la tâche de mise en cohérence des missions de l'État, laquelle relève alors pleinement des préfectures.

Un certain nombre de préfets confient à des sous-préfets territoriaux - c'est d'ailleurs une excellente idée - des missions départementales et des missions transversales. Les sous-préfectures constituent donc un acquis, auquel les Français et leurs élus sont attachés. Mais des mutations sont sans doute nécessaires.

Ma dernière question, monsieur le ministre, a trait à la multiplication des outils et des concepts. En lisant de près les rapports de nos brillants rapporteurs, j'ai constaté que toutes vos bonnes intentions, qui sont très nombreuses - mais nul ne peut en être blâmé ! -, se traduisent par l'existence de nombreux outils d'orientation et de modernisation.

Il s'agit tout d'abord de la stratégie ministérielle de réforme, la SMR, qui a été, si j'ai bien compris, transformée en feuille de route ministérielle de modernisation.

À celle-ci s'ajoutent le plan stratégique de modernisation, les grands projets de modernisation et les audits de modernisation.

Mais nous ne sommes pas au bout de nos peines ! En effet, les dispositifs que je viens d'énumérer sont complétés par la directive nationale d'orientation des préfectures, la DNO. Mais cette dernière ne saurait suffire ! Vient donc s'y adjoindre les projets d'actions stratégiques de l'État en région, les PASER. Bien entendu, il serait anormal que ce dispositif n'existe pas pour les départements, si bien que nous avons aussi des projets d'actions stratégiques de l'État en département, les PASED.

Mais, monsieur le rapporteur spécial, nous ne sommes pas au bout de nos peines ! Votre rapport fait également état des projets annuels de performance, les bien nommés PAP. Existent également les budgets opérationnels de programme, les BOP.

Ne pensez-vous pas, monsieur le ministre, que cet éventail de schémas, d'outils, de plans et de programmes présente un peu de redondance ? N'y aurait-il pas intérêt à simplifier quelque peu les choses ?

Telles sont les cinq questions que je voulais vous poser, de manière à contribuer à ce débat sur ces services de l'État auxquels nous sommes tous profondément attachés.

M. le président. La parole est à M. Bernard Saugey.

M. Bernard Saugey. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je m'efforcerai d'être bref. Je ne m'attacherai donc pas à passer en revue l'ensemble des programmes. Notre excellent rapporteur spécial Henri de Raincourt l'a fait avec une précision et une exactitude que je ne saurais égaler.

Je ne développerai que trois aspects de cette mission, qui ont retenu mon attention et celle de mes collègues de l'UMP.

Tout d'abord, je souhaite évoquer l'enjeu particulier que représentent les nouvelles générations de titres d'identité. Le contexte international troublé que nous connaissons depuis cinq ans invite les pouvoirs publics à travailler sans relâche pour ne pas céder de terrain à ceux qui menacent notre territoire.

Ce mouvement ne touche pas seulement la France. La communauté internationale est concernée dans son ensemble et il convient donc d'envisager cette problématique de manière globale avec nos partenaires, notamment européens.

Le Gouvernement, et, en particulier, le ministre de l'intérieur, M. Nicolas Sarkozy, a appréhendé cette question dans une perspective transversale, intégrant les contextes de mondialisation, d'augmentation des flux migratoires et de menace terroriste.

Dans ce cadre, le développement de nouveaux papiers d'identité et, en particulier, de passeports biométriques représente un enjeu réel.

C'est pourquoi je me félicite de constater les efforts fournis par le Gouvernement et par les préfectures pour améliorer la fiabilité des documents identitaires.

Je pense aussi au système biométrique, qui, depuis son introduction, a fait la preuve de son utilité. Cette technique a largement contribué à lutter contre la fraude à l'identité.

Je pense également au futur passeport électronique comprenant les empreintes digitales, mis en oeuvre par l'Union européenne et attendu pour 2009. Il représentera, n'en doutons pas, un véritable outil de lutte contre le terrorisme international.

Ces nécessités conjoncturelles se concrétisent au niveau des préfectures, mais l' « agence nationale des titres sécurisés » que le Gouvernement a décidé de créer, dès la rentrée 2007, pour organiser la production des nouveaux documents d'identité, assumera un rôle primordial en la matière.

Monsieur le ministre, je souhaite connaître plus précisément les missions qui seront dévolues à cette agence et le rôle qu'elle jouera entre l'État et les préfectures en matière de politique de délivrance de titres.

Par ailleurs, mon groupe est satisfait du processus engagé par les préfectures en matière d'efficacité et de gestion des effectifs.

En conclusion, je souhaite évoquer la parution, à la fin du mois de septembre dernier, du rapport Machelon, intitulé Les relations des cultes avec les pouvoirs publics et dans lequel le professeur Machelon, missionné par le ministre de l'intérieur, qui est aussi ministre des cultes, examine les avancées pouvant être proposées en la matière.

Cette question sensible, qui ne peut souffrir aucune caricature, mérite un débat à la hauteur des enjeux. Nous le savons, en matière de laïcité et de respect des cultes, les lignes d'opposition sont souvent inhabituelles, puisqu'elles partagent de nombreux groupes. Il faut donc concilier des impératifs parfois contradictoires, en gardant à l'esprit notre objectif prioritaire, à savoir le respect de nos valeurs, de nos institutions, mais également des sensibilités de chaque Français.

Pour cette raison, monsieur le ministre, je souhaiterais connaître les suites que vous envisagez de donner à ce rapport.

Bien sûr, notre groupe votera en faveur des crédits qui nous sont soumis, en saluant la rigueur budgétaire qui les inspire. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Henri de Raincourt, rapporteur spécial. Quel talent !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Remarquable !

M. le président. La parole est à M. François Fortassin.

M. François Fortassin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je n'entrerai pas dans le détail des chiffres. D'autant que M. le ministre nous dira qu'ils sont excellents et que si, sur certaines travées, des sénateurs témoigneront de leur satisfaction, sur d'autres, la tonalité ne sera pas tout à fait la même.

Je n'évoquerai pas non plus les différents programmes.

En revanche, je voudrais réagir, en tant qu'élu local depuis presque trente ans et en tant que citoyen. Comment faire pour que nos concitoyens se réconcilient avec l'État ? Aujourd'hui, en effet, du fait d'une complexité voulue ou subie, nos concitoyens ne comprennent plus un certain nombre de décisions.

L'État donne l'impression qu'il ne sait pas ce qu'il dépense, il n'est pas en mesure de compter exactement le nombre de ses fonctionnaires. À travers une terminologie changeante, il utilise des termes très à la mode. C'est ainsi que le développement « durable » d'hier est devenu « soutenable » ; la gouvernance est « bonne », comme si, un jour, vous aviez entendu un élu, un ministre, dire que la gouvernance n'était pas bonne, surtout la sienne ! (Sourires.) Tout cela est fondamental.

Force est de le constater, nos concitoyens ont le sentiment profond que les personnes qui appartiennent aux différents corps de l'État, même si leurs compétences ne sauraient être mises en cause, se révèlent parfois inefficaces dans l'action.

Est-il normal que le maire d'une petite commune attende pendant des semaines, voire des mois, que la DDE veuille bien lui fournir un devis pour des travaux de quelques dizaines de milliers d'euros ? C'est pourtant une réalité !

Est-il normal que les préfets, qui ont un rôle à jouer, pratiquent assez souvent, avec leurs services, la fausse concertation ? En effet, ils organisent des réunions, très longues et parfois fort tardives, au terme desquelles il est très peu tenu compte de l'avis qui est donné par l'ensemble des personnes présentes, au motif que l'Europe nous obligerait à faire ceci ou cela.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Les préfets ne disent pas cela ! Seuls quelques élus peut-être.

M. François Fortassin. Ils ne le disent pas sur Natura 2000 ?

M. François Fortassin. Nous ne devons pas avoir affaire aux mêmes, monsieur Hyest ! L'Europe, elle a bon dos !

Dans ce domaine, il y a des choses à revoir !

Monsieur le ministre, je vous le dis d'autant plus clairement que cela concerne tout le monde, nous attendons, en France, un État fort au côté des collectivités territoriales. Mais un État fort ne signifie pas un État qui se limite à sanctionner !

Combien d'élus locaux ont parfois le sentiment que des fonctionnaires, dont la qualité ne saurait être mise en doute, ont l'art de couper les cheveux en quatre ou, comme le disait, Louis-Ferdinand Céline, de faire « de la sodomisation de diptères ». (Sourires.) Voilà, au-delà du problème des crédits, la réalité sur le terrain et elle est tout à fait insupportable !

Nos concitoyens acceptent parfaitement, comme nous, une forme de technocratie, à condition qu'elle ait un visage humain. Monsieur le ministre, nous attendons de vos représentants, à défaut de nous apporter les crédits nécessaires aux programmes que nous montons, qu'ils nous facilitent au moins la tâche et accélèrent les dossiers plutôt que, parfois, de les retarder !

M. Henri de Raincourt, rapporteur spécial. Très bien !

M. François Fortassin. Voilà, monsieur le ministre, ce que je souhaitais vous dire, sans aucune acrimonie de ma part. Ayant été fonctionnaire moi-même, loin de moi, en effet, l'intention de « taper » sur mes anciens collègues. Il n'en reste pas moins vrai que ces remarques concernent l'ensemble de la nation ! (MM. Jean-Pierre Sueur et André Boyer applaudissent.)

M. Henri de Raincourt, rapporteur spécial. Des remarques de bon sens, bravo !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je remercie l'ensemble des orateurs qui se sont exprimés - ce qui est bien normal -, à commencer par l'excellent rapporteur spécial, M. Henri de Raincourt, ainsi que le rapporteur pour avis, M. José Balarello - il va nous rejoindre -, pour leurs analyses complètes, précises, utiles, et pour la richesse de leurs propositions qui permettront de guider efficacement l'action du Gouvernement.

La mission « Administration générale et territoriale de l'État » se compose de trois programmes : l'administration territoriale, c'est-à-dire les préfectures et les sous-préfectures - j'y reviendrai pour répondre sur ce point aux orateurs -, la vie politique, cultuelle et associative, avec un accent sur les élections, et, enfin, la conduite et le pilotage des politiques de l'intérieur, c'est-à-dire les fonctions d'état-major exercées par le secrétariat général du ministère.

La mission disposera pour 2007 de 2,7 milliards d'euros d'autorisations d'engagement et de 2,5 milliards d'euros de crédits de paiement, soit, monsieur le rapporteur spécial, une progression de près de 13 % par rapport à 2006.

C'est un budget qui nous permet d'aller plus loin dans la modernisation, qu'il s'agisse de la simplification des procédures, de la maîtrise des dépenses ou de l'amélioration de nos résultats.

Cela passe d'abord par l'accélération de grands projets structurants.

La sécurisation des titres est enfin réalisée pour les passeports, qui contiennent sous forme électronique la photographie et l'état civil du titulaire. Je le dis très clairement, notamment à M. Sueur, c'est la première étape d'une modernisation d'ensemble des titres d'identité, qui non seulement répond aux normes internationales de circulation, mais vise à rendre ces titres plus sûrs et plus faciles à renouveler.

La deuxième étape aboutira en 2009, mais elle se prépare aujourd'hui. Il s'agit d'intégrer les empreintes digitales dans les futurs passeports et les nouvelles cartes d'identité qui seront lancées simultanément.

J'ajoute qu'une attention toute particulière est portée, en concertation avec l'Association des maires de France, à la définition d'un réseau de proximité pour le traitement des demandes et la remise des titres. Il devrait comprendre au minimum 2 000 mairies.

Monsieur Mercier, avec le ministre d'État, Nicolas Sarkozy, nous avons tenu à ce que le Parlement puisse rapidement débattre de ces réformes majeures. C'est l'objet d'un projet de loi actuellement soumis à la CNIL.

Quant à la question du partenariat public-privé, elle n'est pas encore arrêtée. Mais il n'y a pas forcément contradiction entre l'exercice des fonctions régaliennes, monsieur Sueur, et le recours à des procédures innovantes, comme nous l'avons d'ailleurs déjà fait pour la construction du pôle Renseignements à Levallois, avec location et option d'achat.

À M. Saugey, dans son intervention brève, mais précise, et à M. Sueur, dans son intervention également précise, mais moins brève (Sourires) - elle n'en était pas moins intéressante ! -, qui ont abordé ce sujet, je précise que la conduite de ces projets sera effectivement confiée à une agence nationale des titres sécurisés. Cet établissement public administratif, placé sous la tutelle du ministre de l'intérieur, prendra en charge, dès 2007, la production des passeports. Ses compétences s'étendront progressivement à d'autres titres.

L'objectif est clair : il s'agit de renforcer la qualité des prestations assurées par l'État, en regroupant des compétences aujourd'hui dispersées entre plusieurs ministères.

La modernisation, c'est aussi le nouveau système d'immatriculation des véhicules, SIV, qui entrera en vigueur en 2008. Fondé sur un numéro unique pour la durée de vie du véhicule, il permettra de dématérialiser 60 % des 23 millions d'opérations annuelles touchant l'immatriculation. Il a été prévu sur ces plaques une possibilité d'identification géographique, régionale ou départementale ; je crois me souvenir qu'il y a les deux possibilités.

Il s'agit d'une réforme indispensable non seulement pour remplacer un système à bout de souffle de gestion des cartes grises, mais aussi pour simplifier les démarches des usagers et, surtout, pour lutter contre la fraude.

Enfin, la refonte de l'application de gestion des titres des étrangers sera lancée en 2007 ; c'est le projet Gregoire. L'objectif est d'intégrer la dimension interministérielle de ces dossiers et de prendre en compte l'introduction des empreintes dans les titres. Cela permettra d'accélérer les procédures, de mieux sécuriser les titres et de fiabiliser nos statistiques sur les flux migratoires. Le déploiement national interviendra en 2009.

Au total, les titres seront mieux protégés, plus faciles à produire et offriront à leurs détenteurs des services plus performants.

Monsieur Sueur, j'ai bien intégré, derrière une attaque un peu facile, pardonnez-moi de le dire, vos remarques relatives à la stratégie ministérielle de réforme, désormais qualifiée feuille de route de modernisation.

M. Jean-Pierre Sueur. Stratégie complexe !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Quant aux budgets opérationnels de programme, ils ne sont que la conséquence de la mise en oeuvre de la LOLF adoptée, me semble-t-il, à une très large majorité par la Haute Assemblée.

Mais la modernisation ne s'arrête pas à la définition de nouveaux titres. J'en donnerai un seul exemple avec le contrôle de légalité.

Si la loi du 13 août 2004 a permis de réduire de 20 % le nombre d'actes transmis aux préfectures, ils étaient encore près de 7 millions en 2005. Chacun comprendra qu'un examen exhaustif de ces actes rend impossible un contrôle approfondi.

C'est pourquoi, monsieur Mercier, avec le ministre d'État, nous avons demandé aux préfets de se doter de stratégies de contrôles ciblées sur les enjeux principaux : intercommunalité, commande publique, urbanisme et environnement. C'est la circulaire du 17 janvier 2006.

Les préfets ont aussi été encouragés à mettre en place des pôles de compétences, en déclinant ce qui existe avec le pôle interrégional de Lyon, qui assiste vingt-six préfectures et couvrira, à partir du 1er janvier, le territoire national, à l'exception de l'Île-de-France.

En parallèle, toutes les collectivités qui le souhaitent auront la possibilité, d'ici à la fin de l'année, de transmettre leurs actes sous une forme dématérialisée. Cette faculté est déjà utilisée dans près de quarante départements.

La deuxième priorité est de renforcer les compétences des agents afin d'offrir un meilleur service aux Français.

D'ici à la période 2010-2015, le ministère de l'intérieur va devoir relever deux défis que j'avais évoqués l'année dernière : le doublement des départs à la retraite et le développement de missions exigeant des agents plus qualifiés.

Pour y faire face, le plan de requalification lancé l'an dernier sera accéléré. Près de 1 100 postes seront ainsi requalifiés en 2007, et 4 700 d'ici à 2010.

Monsieur Sueur, cet effort est rendu possible par le non-remplacement, dès cette année, de 404 départs, dont 315 en préfectures. Les intervenants, dans leur quasi-totalité, ont évoqué cette donnée. D'ici à 2010, 1500 emplois seront supprimés. Enfin, dès 2007, les crédits de formation atteindront 1,5 % de la masse salariale, contre 1,2 % aujourd'hui.

Au final, cela signifie moins d'activité de guichet et plus de cadres, mieux payés et mieux formés. Cette préoccupation faisait l'objet de l'une de vos interrogations, monsieur Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Qu'y aura-t-il au guichet ? Des machines ?

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Je vais le préciser !

Ce progrès ne tombe pas du ciel. Il résulte en réalité d'une analyse assez approfondie des besoins que nous avons estimés jusqu'à 2010. Cette évolution des effectifs se fait non pas à qualité de service inchangée, mais à qualité de service améliorée.

Ces évolutions s'inscrivent dans le champ des réformes statutaires, notamment la fusion des corps. À partir du 1er janvier, 40 000 agents d'administration centrale, des préfectures, de la police et de l'outre-mer seront progressivement regroupés en trois corps, au lieu de seize aujourd'hui. Cette réforme offrira aux agents des possibilités nouvelles de mobilité et une gestion des ressources humaines beaucoup plus cohérente.

Enfin, madame Mathon-Poinat, 11,4 millions d'euros seront consacrés à la poursuite du rattrapage indemnitaire avec les autres ministères, soit deux fois plus qu'en 2006. L'objectif clair qui est le nôtre - mais il peut y avoir des différences entre nous - est que la rémunération prenne mieux en compte la performance des agents et devienne un véritable outil de motivation.

Nous voulons apporter la preuve par l'exemple que la modernisation de la fonction publique est possible, et que chacun peut y trouver son compte : les contribuables, grâce à la diminution du nombre d'emplois, les citoyens, grâce à l'amélioration du service, mais aussi les fonctionnaires, auxquels cette modernisation offre de nouvelles perspectives.

M. Jean-Pierre Sueur. Qui y aura-t-il derrière le guichet ?

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Cette nouvelle approche exige une adaptation des structures territoriales de l'État.

Elle a été lancée en 2005 au niveau régional, avec le regroupement des services déconcentrés en huit pôles permettant au préfet de mieux assurer la cohérence de l'État.

La réforme départementale a été engagée en 2006 avec les mêmes objectifs : renforcer l'unité de l'État, la rendre plus visible, mais aussi rationaliser les dépenses.

M. Balarello l'a rappelé, la réforme s'est appuyée sur les propositions des préfets. La fusion des DDE et des DDAF dans huit départements entrera ainsi en vigueur le 1er janvier prochain. Des délégations interservices très intégrées sont déjà à l'oeuvre sur des thèmes comme la politique de l'eau, la cohésion sociale ou la politique de la ville, de même que la mutualisation des moyens sur des fonctions transverses - achats, immobilier, formation.

L'expérience la plus emblématique est conduite dans le Lot, avec le regroupement de tous les services de l'État - plus de vingt - en trois directions, respectivement chargées de la sécurité, des populations et des territoires, et le renfort d'une direction logistique.

L'adaptation des structures m'amène à évoquer, cher Henri de Raincourt, le rôle et la pérennité des sous-préfectures, préoccupation exprimée et partagée par M. Sueur.

Ma conviction est que si les sous-préfets ont un rôle fondamental à jouer au coeur de l'action publique, ce rôle doit nécessairement évoluer. Il devra désormais reposer sur deux piliers identifiés : la sécurité des populations et l'utilité publique, au sens de la capacité à dégager l'intérêt général.

L'exigence de sécurité, ce n'est pas seulement la lutte contre la délinquance. C'est aussi la préservation de l'emploi, la gestion des risques naturels et industriels, ou encore la protection sanitaire et alimentaire.

L'utilité publique, elle, rejoint la question du développement durable, au sens de l'équilibre entre l'ensemble des priorités qui s'expriment sur un territoire.

La vocation première du sous-préfet est d'incarner la proximité de l'État dans ces deux objectifs de sécurité et d'utilité publiques. C'est pour moi le préalable à toute réflexion sur le maillage du territoire. Au-delà des symboles, le nombre et l'implantation à venir des sous-préfectures découleront d'abord des missions et des moyens que l'on décidera de leur confier.

Bien que cela concerne plutôt la mission « Relations avec les collectivités territoriales », je voudrais répondre à Bernard Saugey au sujet des suites du rapport de la commission présidée par le professeur Machelon.

Ce document, extrêmement riche, a été adressé aux responsables des grandes familles spirituelles et aux associations d'élus. Comme M. le ministre d'État et moi-même l'avons dit à plusieurs reprises, nous souhaitons ouvrir ce débat sans tabou. Il faut faire vivre les principes fondamentaux de la laïcité, mais sans s'interdire de réfléchir à des ajustements des textes aux réalités de notre temps.

Le financement de la construction des lieux de culte est ici une question centrale. Il n'est pas sain et il n'est pas juste que les fidèles de certaines confessions rencontrent des difficultés pour pratiquer leur culte. Le rapport propose plusieurs pistes. Faut-il aller jusqu'à permettre aux communes de subventionner la construction des lieux de culte ?

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Il faut y réfléchir et savoir si c'est un moyen pour éviter des financements obscurs. C'est, en tout cas, un débat que nous devrons avoir.

Monsieur Fortassin, je vous rassure : grâce à la LOLF, nous avons enfin une mesure précise des effectifs de l'État en équivalents temps plein. Pour le reste, je vous le réaffirme, nous sommes attachés à l'État fort, pour soutenir autant que pour contrôler.

Je voudrais maintenant revenir sur ce qui fonde ce projet de budget : améliorer la performance en rationalisant les dépenses. J'en donnerai deux exemples.

Le premier concerne les crédits de fonctionnement courant des préfectures, qui diminueront ainsi de 5 % en 2007. Comme vous l'avez relevé dans un récent rapport, monsieur de Raincourt, cette baisse est le fruit d'une gestion rigoureuse, qui a permis de réaliser d'importantes économies depuis 2004. Je vous remercie d'en avoir donné acte.

Á ceux qui ont ironisé sur les baisses des frais de téléphonie fixe, je ferai remarquer qu'entre 2003 et 2005 ces frais ont diminué de 21 %, les achats informatiques et les dépenses de téléphonie mobile de 10 %. Dans le même temps, le délai de traitement des titres reculait de près de 60 % pour les cartes d'identité, de 25 % pour les passeports et de 11 % pour les cartes grises. L'exercice en cours confirme ces évolutions.

Madame Mathon-Poinat, s'agissant de la téléphonie mobile, on peut baisser de 10 % ces dépenses sans diminuer le volume des appels. Cela s'appelle la mise en concurrence - vous n'avez pas employé ce mot, je ne comprends pas pourquoi. (Sourires.)

M. Henri de Raincourt, rapporteur spécial. Elle ne l'aime pas !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Ou, si vous préférez, une économie d'échelle. Ce sont autant de concepts qui doivent contribuer à une vision moderne de l'État.

Le second exemple a trait à l'immobilier. La prochaine installation du pôle Renseignements à Levallois - qui regroupera la Direction de la surveillance du territoire, ou DST, la Direction centrale des renseignements généraux, ou DCRG, et la Division nationale antiterroriste, ou DNAT - rassemblera 1 800 agents qui traitent de sujets communs. Cette opération s'inscrit dans un processus visant à rationaliser les implantations, afin de les adapter aux besoins des usagers et des services, et de les sécuriser.

Vous vous interrogez aussi, monsieur le rapporteur spécial, sur la lisibilité du programme « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur », CPPI, qui regroupe les fonctions transversales du ministère, comme la gestion des ressources humaines, le conseil juridique ou les systèmes d'information.

Je crois, comme vous - nous sommes une fois de plus sur la même ligne -, qu'il faut mieux préciser sa finalité. « CPPI » ne peut, en effet, être réduit à un simple programme de soutien. Il s'agit bien plus d'assurer la continuité de l'action du ministre de l'intérieur sous les angles des communications, de la sécurité juridique et du dialogue social, sans oublier l'indispensable prospective stratégique. C'est donc un programme qui a toute sa cohérence et qui est capital pour le fonctionnement de l'État.

M. le rapporteur spécial et M. le rapporteur pour avis ont aussi souligné l'importance des dépenses pour refus de concours de la force publique. Les mesures prises pour les contenir, notamment l'encadrement des transactions amiables, permettront de maintenir ces dépenses dans l'enveloppe prévue pour 2006. La généralisation en 2007 des bonnes pratiques développées par les préfectures renforcera, j'en suis certain, cette tendance positive.

Concernant le délai nécessaire à l'aboutissement des reconnaissances d'utilité publique, plusieurs mesures ont déjà été mises en oeuvre, comme un délai limité à deux mois pour la concertation interministérielle ou la numérisation et la mise en ligne des dossiers. Très concrètement, cela signifie que l'exercice en cours devrait aboutir à un taux de traitement en moins de six mois de l'ordre de 60 % et l'objectif pour 2007 est fixé à 95 %.

Un mot enfin sur l'organisation des élections présidentielle et législatives de 2007. (Ah ! sur les travées de l'UMP.)

M. Michel Mercier. Quel jour ?

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Je sens qu'il y a quelques candidats motivés dans la Haute Assemblée ! (Sourires.) Je rappelle, de mémoire, que trente-huit candidats sont recensés par la presse à ce jour.

M. le président. Quarante !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Donc, deux de plus aujourd'hui ! Et des vocations sont encore possibles ! (Nouveaux sourires.)

C'est l'organisation de ces élections qui explique, pour l'essentiel, la progression des crédits de la mission AGTE. Nous avons évalué au plus juste, à 244 millions d'euros, les crédits de paiement nécessaires.

Il reste toutefois, comme vos rapporteurs l'ont souligné, plusieurs facteurs d'incertitude, notamment le nombre de candidats à chaque scrutin ou l'évolution des dépenses postales. C'est pourquoi les autorisations d'engagement ont été prudemment estimées plus largement à 404 millions d'euros, en sachant qu'elles couvriront aussi des dépenses n'intervenant qu'en 2008.

Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, les lignes de force de ce projet de budget pour la mission AGTE. Vous avez bien voulu noter, messieurs les rapporteurs, et vous aussi, monsieur Saugey, les progrès accomplis depuis l'an dernier et l'assimilation de la culture de la performance par les agents. Je veux remercier chacun de ceux qui sont intervenus, ainsi que M. Michel Mercier qui, lui, n'est pas intervenu.

M. Henri de Raincourt, rapporteur spécial. Mais qui pense la même chose !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Permettez-moi de saluer en votre nom les hommes et les femmes qui ont permis ce résultat par leur faculté d'adaptation et leur sens du service public.

La volonté du ministre d'État, comme la mienne, est de continuer à progresser dans cette voie, sous le double signe de la responsabilité et de la performance. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l'État » figurant à l'état B.

État B

(En euros)

Mission

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Administration générale et territoriale de l'État

2 714 613 515

2 492 255 668

Administration territoriale

1 653 515 529

1 613 316 599

dont titre 2

1 304 598 761

1 304 598 761

Vie politique, cultuelle et associative

545 810 098

379 318 531

dont titre 2

104 538 990

104 538 990

Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur

515 287 888

499 620 538

dont titre 2

222 446 103

222 446 103

M. le président. Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.

Je mets aux voix les crédits de la mission.

(Ces crédits sont adoptés.)

M. le président. Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l'État ».

Relations avec les collectivités territoriales

Compte de concours financiers : avances aux collectivités territoriales

Administration générale et territoriale de l'Etat
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Article 34 et état B

M. le président. Le Sénat va examiner les crédits des missions « Relations avec les collectivités territoriales » (et articles 51 bis à 51 sexies) et « Compte de concours financiers : avances aux collectivités territoriales ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il est sûrement quelque peu redondant d'entreprendre un nouveau débat sur les relations financières entre l'État et les collectivités territoriales puisque nous y avons déjà consacré un après-midi et une soirée au cours desquels nous avons examiné l'essentiel de la question.

Néanmoins, le formalisme de la discussion budgétaire nous conduit à présenter, le plus rapidement possible d'ailleurs, les crédits des missions « Relations avec les collectivités territoriales » et « Compte de concours financiers : avances aux collectivités territoriales ». Sans reprendre tout ce que nous avons dit, je me limiterai à de brèves observations et à quelques questions.

Monsieur le ministre, au cours de votre intervention, vous m'avez lancé quelques appels, et je ne manquerai pas d'y répondre.

L'ensemble des crédits consacrés à ces deux missions, qui ne sont pas tous des crédits budgétaires, représentent 130 milliards d'euros. C'est donc une somme très importante qui sous-tend les relations entre l'État et les collectivités locales.

Pour que vous puissiez plus facilement répondre à ma première question, monsieur le ministre, compte tenu du classement politique dans lequel M. Copé vous a rangé voilà quelques jours à cette tribune (Sourires),...

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Pas de provocation !

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. ...j'utiliserai une expression que vous reconnaîtrez à l'évidence comme faisant partie du clan chiraquien : pourquoi l'effort financier réel du Gouvernement à l'égard des collectivités locales fait-il « pschitt » ? (Nouveaux sourires.)

M. Henri de Raincourt. C'est  abracadabrantesque !

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. En tout cas, elles ne sont pas satisfaites de leurs relations avec l'État.

On peut se poser la question : alors que les crédits sont là, alors que le Gouvernement a fait un réel effort, pourquoi les choses ne vont-elles pas mieux ? Á cette question, il y a, à l'évidence, plusieurs réponses. L'une de celles qui s'impose à nous, c'est qu'avec l'Acte II de la décentralisation les collectivités locales ne forment plus un bloc unique.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Leurs problèmes n'étant plus tous les mêmes, on ne saurait leur apporter une seule réponse.

Il est vrai que pour les communes, la première question, c'est celle des recettes. De ce point de vue, vous apportez un certain nombre de réponses, sur lesquelles je ne reviens pas.

Les intercommunalités, notamment toutes celles qui ont été poussées par le Gouvernement et par l'ensemble des acteurs à choisir la taxe professionnelle unique, sont inquiètes, et on peut tout à fait le comprendre. En effet, la mise en place de la réforme de la taxe professionnelle va geler une part importante de leurs bases.

Pour les régions, la question est probablement de savoir comment Réseau ferré de France va, demain, leur demander de financer tout le développement du ferroviaire de proximité.

Pour les départements, monsieur le ministre, je serai tenté de vous dire que la question concerne non pas les recettes, mais les dépenses. Dès lors, je voudrais, de ce point de vue, vous poser une question toute simple : quand les ministres vont-ils cesser de dépenser pour les collectivités locales, notamment pour les départements ? C'est une vraie question.

Vous faites un effort important en augmentant la DGF des départements. Malheureusement, cette augmentation est entièrement consommée par les décisions de dépenses qui vont être prises, auxquelles vous concourez vous-même.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Ah non !

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Ah si ! et c'est bien ce qui me désole.

Vous avez notamment mis sur la table 65 millions d'euros pour les sapeurs-pompiers,...

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Qui n'en ont pas voulu !

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. ...qui, n'étant en effet pas satisfaits, sont partis et, tel que je vous connais, vous allez sûrement rajouter 10 millions d'euros pour qu'ils reviennent, ce qui fera 75 millions d'euros. C'est plus que ce que vous donnez aux départements !

Les dépenses sont donc devenues pour les collectivités locales une question centrale et essentielle : il faut véritablement que le Gouvernement cesse de dépenser pour elles.

Dans quelques jours, le Gouvernement va publier toute une série d'arrêtés et de décrets visant à augmenter les minima sociaux et notamment le RMI, dont la hausse va probablement être plus ou moins égale à l'inflation, ce qui m'amène, monsieur le ministre, à vous poser une troisième question, qui concerne le droit à compensation au titre du RMI.

Le droit à compensation, qui est régi par la loi, a été délimité par le Conseil constitutionnel, et je vous donne volontiers acte, monsieur le ministre, que vous faites non seulement tout ce que le Conseil constitutionnel vous a imposé de faire, mais même un peu plus à travers la dotation du FMDI, le fonds de mobilisation départementale pour l'insertion. Néanmoins, monsieur le ministre, faites-vous réellement ce que vous devez faire dès lors que c'est le Gouvernement qui fixe le montant de la dépense liée au RMI ?

Le droit à compensation peut être bloqué au moment du transfert si la dépense ne relève que de la collectivité locale. Or, avec le RMI, elle relève chaque année de l'État, ce qui constitue un vrai problème, sur lequel j'aimerais entendre vos observations.

Puis, je le dis très clairement, pour le RMI, c'est un problème de gestion et de pouvoir de la collectivité locale sur l'ensemble des questions de gestion, notamment dans les relations avec les caisses d'allocations familiales.

Quant à la mission « Avances aux collectivités territoriales », elle est, normalement, structurellement déficitaire. Or, depuis plusieurs années, elle est excédentaire, et excédentaire non pas de quelques euros mais de 500 millions d'euros !

Je souhaiterais savoir, monsieur le ministre, ce que représentent ces 500 millions d'euros. S'agit-il de sommes que vous avez « oublié » de verser aux collectivités locales, de sommes que vous avez perçues en trop sur les contribuables locaux, ou encore - ce qui n'est pas impossible - de sommes dont on ne sait rien ? (Sourires.)

Dans cette troisième hypothèse, qui est peut-être la plus certaine, je suggère que cette année la commission des finances s'attache, si son président le veut bien, à découvrir l'origine de ces 500 millions d'euros.

En effet, qu'à un moment où les collectivités locales sont confrontées à des problèmes de financement pour nombre de leurs dépenses une mission affiche un excédent de 500 millions d'euros dont on ne sait ni d'où ils viennent ni où ils iront - si ce n'est dans la caisse unique de l'État, qui en a bien besoin, je vous l'accorde, monsieur le ministre - est tout de même curieux, et il serait bon d'éclairer les collectivités locales sur ce point.

Telles sont, monsieur le ministre, les quelques questions que, sans refaire un exposé général, je souhaitais vous poser.

Je rappelle à la Haute Assemblée que la commission des finances lui recommande d'adopter les crédits des missions « Relations avec les collectivités territoriales » et « Avances aux collectivités territoriales », qu'elle a émis un avis favorable sur les articles 51 bis, 51 ter, 51 quinquies et 51 sexies, et qu'elle réserve son avis sur l'article 51 quater. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Bernard Saugey, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, lors du débat sur les recettes des collectivités territoriales, organisé la semaine dernière, j'ai eu l'occasion d'évoquer l'évolution des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales, les compensations financières des transferts, créations et extensions de compétences, et la question de la maîtrise des finances locales.

Mon propos se concentrera donc aujourd'hui, d'une part, sur la mise en oeuvre de la LOLF et, d'autre part, sur l'évolution de l'intercommunalité.

Comme je l'indiquais déjà l'an passé, la LOLF constitue un cadre peu adapté aux relations financières entre l'État et les collectivités territoriales.

Tout d'abord, les concours financiers de l'État n'ont pu être regroupés au sein d'une mission unique. En effet, près des trois quarts d'entre eux prennent la forme de prélèvements sur recettes et figurent dans la première partie du projet de loi de finances.

Pour ce qui concerne les crédits budgétaires, la mission « Relations avec les collectivités territoriales » retrace uniquement les dotations inscrites au budget du ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, leur montant étant fixé à un peu plus de 3 milliards d'euros.

Certains crédits restent rattachés à d'autres missions, dont la responsabilité relève d'autres ministères que le ministère de l'intérieur. Leur montant atteindra 1,7 milliard d'euros en 2007.

Ensuite, nombre de concours financiers de l'État aux collectivités territoriales obéissent à des règles de calcul et d'évolution qui sont fixées par la loi et qui constituent pour elles autant de garanties, mais les gestionnaires des programmes ne disposent d'aucun pouvoir de décision. Dès lors, l'élaboration d'objectifs de performance et d'indicateurs de résultat perd une grande partie de son intérêt.

Quelques objectifs et indicateurs n'en ont pas moins été retenus : certains mesurent l'efficacité des gestionnaires de programmes, d'autres celle de la législation.

Les premiers résultats enregistrés en 2005 grâce à ces indicateurs sont globalement satisfaisants.

Ils mettent en lumière l'efficacité de la direction générale des collectivités locales dans le calcul des dotations de l'État, qui, il faut le dire, n'ont pas fait l'objet de rectifications de grande ampleur.

Ils mettent aussi en valeur des effets de levier importants pour la dotation globale d'équipement des communes mais décevants pour la dotation de développement rural et la dotation globale d'équipement des départements.

Enfin, ils montrent un renforcement sensible de la péréquation, puisque le montant total des différentes composantes de la dotation globale de fonctionnement qui y sont spécifiquement consacrées est passé de 3 milliards à 5,4 milliards d'euros entre 2003 et 2006, ainsi qu'un fort développement de la coopération intercommunale, lequel constitue l'un des objectifs assignés aux prélèvements sur recettes de l'État.

À cet égard, permettez-moi d'évoquer plus particulièrement le sujet des établissements publics de coopération intercommunale.

Au 1er janvier 2006, on dénombrait 2 573 établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, regroupant 32 915 communes et presque 56 millions d'habitants. En outre, un peu moins de 1 200 établissements, regroupant 40 % des communes et 64 % de la population française, avaient opté pour le régime fiscal de la taxe professionnelle unique.

Ce succès quantitatif masque cependant des faiblesses, mises en exergue par un grand nombre de rapports récents, qui tiennent au manque de rationalité de certains périmètres, à la difficulté d'effectuer un partage clair entre les compétences conservées par les communes et celles qui ont été transférées aux EPCI, ainsi surtout qu'à l'apparition de surcoûts plutôt que d'économies d'échelle.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Hélas !

M. Bernard Saugey, rapporteur pour avis. La question du mode d'élection des délégués communautaires est également posée même si, à titre personnel, je ne suis guère favorable aux modifications envisagées par crainte de voir disparaître nos communes : le jour où les communes ne désigneront plus leurs représentants aux EPCI, elles deviendront des « coquilles vides ».

M. Bernard Saugey, rapporteur pour avis. Diverses réformes ont d'ores et déjà été entreprises pour remédier à ces faiblesses ; d'autres sont à l'étude.

Je souhaiterais, monsieur le ministre, vous interroger sur deux points.

Afin d'éviter que les EPCI à fiscalité propre ne soient des « coquilles vides », la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales puis la loi du 13 juillet 2005 d'orientation sur l'énergie ont exigé que l'intérêt communautaire, qui constitue la ligne de partage entre les compétences conservées par les communes et celles qui sont transférées à l'établissement, soit défini avant le 18 août 2006. Passé ce délai, les compétences devaient être intégralement exercées par les EPCI. Qu'en est-il ?

Par ailleurs, pour favoriser les économies d'échelle, la loi du 13 août 2004 a autorisé une gestion conjointe des personnels et des équipements entre les communes et les EPCI. Je crois savoir que ces possibilités sont contestées par la Commission européenne. Là encore, qu'en est-il exactement ?

Sous réserve des réponses à ces deux questions, la commission des lois, consultée pour avis, s'est bien entendu déclarée favorable à l'adoption des crédits. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :

Groupe Union pour un mouvement populaire, 10 minutes ;

Groupe socialiste, 26 minutes ;

Groupe Union centriste-UDF, 16 minutes ;

Groupe communiste républicain et citoyen, 14 minutes ;

Groupe du rassemblement démocratique et social européen, 13 minutes.

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d'intervention générale et celui de l'explication de vote.

Je rappelle également qu'en application des décisions de la conférence des présidents aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt-cinq minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en ce qui concerne les relations financières entre l'État et les collectivités locales, nous avons deux sujets de préoccupation : la justice et la péréquation.

S'agissant d'abord de la justice, force est de constater, monsieur le ministre, que plusieurs des mesures qui ont été prises lui tournent le dos.

Je veux parler du « bouclier fiscal », qui profite à nos concitoyens dont les revenus sont les plus élevés mais qui se traduit par un manque à gagner de 43 millions d'euros sur la dotation globale de fonctionnement pour les collectivités locales.

Je veux parler des décisions, prises sur l'initiative de M. le Président de la République, relatives à la taxe sur le foncier non bâti, qui mettent en grande difficulté nombre de communes rurales dont les ressources diminuent, ce qui a naturellement des répercussions sur leurs capacités d'investissement et de fonctionnement.

Je veux parler aussi de la réforme de la taxe professionnelle : alors que le rapport remis au Gouvernement contenait des idées intéressantes, le plafonnement qui a été décidé a des conséquences très difficiles à gérer pour les intercommunalités, dont beaucoup ne savent comme traiter le problème,...

M. Bernard Saugey, rapporteur pour avis. C'est vrai.

M. Jean-Pierre Sueur. ...mais peut-être, monsieur le ministre, allez-vous pouvoir nous éclairer.

D'abord, si rien ne change, ce sont 526 millions d'euros qui seront prélevés sur le budget des collectivités territoriales.

M. Bernard Saugey, rapporteur pour avis. Cela sauve aussi la vie des entreprises !

M. Jean-Pierre Sueur. Oui, monsieur le rapporteur pour avis, mais ou ce prélèvement est compensé à due proportion, et, dans ce cas, il n'y a pas de problème, ou il ne l'est pas. Or il ne l'est pas.

Les intercommunalités se trouvent donc, et se trouveront, devant le dilemme suivant : augmenter soit les impôts sur les ménages, soit la taxe professionnelle sur les entreprises qui ne sont pas plafonnées, lesquelles sont le plus souvent des PME, et je ne crois pas que cette augmentation serait bénéfique pour notre économie !

À ce jour, ces interrogations restent sans réponses, mais j'en viens, monsieur le ministre, à la question de la péréquation.

Le Gouvernement avait beaucoup insisté pour que soit inscrite dans le cinquième alinéa de l'article 72-2 de la Constitution la disposition suivante : « La loi prévoit des dispositifs de péréquation destinés à favoriser l'égalité entre les collectivités territoriales. »

Or, hélas ! on constate dans le présent projet de loi de finances que la péréquation n'augmentent pas.

Je voudrais, à cet égard, suggérer une réflexion sur l'évolution de la DGF depuis plusieurs années.

La dotation globale de fonctionnement, tout au long de son histoire, me paraît l'exemple même de l'addition perpétuelle de bonnes intentions qui aboutissent souvent à des effets contraires à ceux qui étaient annoncés.

Avant 1993, c'est-à-dire avant la réforme qui a été mise en oeuvre par Daniel Hoeffel, plusieurs dizaines de critères entraient en jeu - population, potentiel fiscal, effort fiscal, voirie, logements sociaux, nombre de classes, considérations touristiques, etc. -, qui étaient pris en compte dans le calcul de la DGF, tant et si bien qu'il était très difficile de voir l'effet concret de chacun de ces critères pour la bonne raison que la masse de ces derniers annulait l'effet de chacun d'entre eux pris individuellement. L'on aboutissait ainsi à une sorte d'illisibilité, rendant très ardue la compréhension du dispositif.

Daniel Hoeffel a proposé au Parlement, qui l'a accepté, de cristalliser les choses et une part de la DGF a ainsi été transformée en cette dotation forfaitaire. L'ennui, c'est que cela a conduit à un système dans lequel la dotation forfaitaire côtoyait les dotations dites de péréquation qui, elles-mêmes, n'étaient que la conséquence en quelque sorte de ce qui restait une fois que l'on avait satisfait aux règles fixant la dotation forfaitaire.

Je me permets de dire que, s'agissant des dotations dites de péréquation, bien du travail reste à faire.

Quant à la dotation d'intercommunalité, elle a, certes, des effets péréquateurs, mais de manière relativement marginale, me semble-t-il. Ce n'est pas parce qu'on est une intercommunalité qu'on est riche ou pauvre : il existe des intercommunalités riches et des intercommunalités pauvres. Or il est clair que l'on a créé cette dotation pour développer l'intercommunalité. D'ailleurs, aujourd'hui, l'intercommunalité à fiscalité propre s'est presque généralisée, et il n'est pas sûr que les montants qui y sont affectés aient un effet péréquateur massif. Je crois, à vrai dire, que c'est tout le contraire.

La dotation de solidarité rurale, pour sa part, est censée être péréquatrice, et je crois effectivement que l'effort en faveur des communes rurales est très important ; cela étant dit, son mode de répartition obéit à des règles telles que je ne suis pas sûr qu'elle corrige véritablement les inégalités. En tout cas, je crois qu'elle pourrait les corriger davantage.

Concernant la dotation de solidarité urbaine, on devrait réfléchir à la situation des communes qui la perçoivent. On comprendrait alors tout l'intérêt de réorienter cette dotation vers les communes qui éprouvent réellement des difficultés - elles sont nombreuses dans ce cas -, je pense, notamment, à la reconstruction de certains quartiers qui demande un effort considérable.

Mais je reviens à la question du rapport entre la dotation forfaitaire et la dotation de péréquation.

On a voulu réformer cette dotation forfaitaire, et ce faisant, on a retrouvé le chemin de la complexité, avec toujours, soit dit en passant, de très bonnes intentions. Ainsi a-t-on pris en considération la base, la population, les ressources, la superficie auxquelles ont été ajoutées la compensation de la taxe professionnelle puis cette fameuse dotation de garantie.

Cette dotation de garantie, et je parle sous le contrôle du président du Comité des finances locales...

M. Jean-Pierre Sueur. Comme pour les ministres, monsieur le ministre, quand on l'a été, on le reste à vie. (Sourires.) Cette dotation de garantie, disais-je, recouvre deux situations très différentes que l'on discerne d'ailleurs très bien à la lecture des amendements proposés par l'Association nationale des élus de la montagne.

La difficulté est la suivante : d'une part, certaines collectivités sont dans une situation atypique, c'est-à-dire qu'elles perçoivent une dotation plus élevée que la moyenne, ce qui leur permet de maintenir leurs ressources, et, d'autre part, d'autres collectivités sont en difficulté.

La réforme qui a été proposée à l'Assemblée nationale, à savoir le plafonnement pour les communes dont la garantie par habitant est supérieure à 1, 5, entraîne des effets tout à fait pervers que l'on nous demande de rectifier.

Cependant, nous en sommes arrivés à une complexité telle que l'on doit toujours rectifier les choses pour aboutir finalement à une sorte de statu quo dont l'illisibilité est toujours plus grande.

De la même manière, on pourrait parler - et nous le ferons sans doute lors de la discussion des amendements - de la DGF des départements et de la manière dont la prise en compte de la dotation forfaitaire dans leur potentiel financier aboutit à de véritables aberrations. C'est ainsi que le département de la Lozère, qui était au deuxième rang des départements les moins riches, se situe désormais, après cette opération, au trente-cinquième rang, tandis que la Haute-Corse passe du cinquième au soixante-cinquième rang !

Par conséquent, on va une nouvelle fois changer ce dispositif. Nous sommes ici un certain nombre à nous efforcer de suivre ce feuilleton, mais c'est extrêmement compliqué.

Je voudrais terminer mon intervention, mes chers collègues, par une épître, très brève, à la prochaine ou au prochain Président de la République - l'ordre dans lequel je place ces deux adjectifs montre mon choix, qui est d'ailleurs bien connu, pour l'élection présidentielle, même si je ne sais pas, et d'ailleurs nul ne le sait, quel sera celui des Françaises et les Français !

Cette épître pourrait s'énoncer ainsi : Madame la présidente, ou monsieur le Président de la République, je vous fais une modeste suggestion. Étant donné que le quinquennat ne dure, par définition, que cinq ans, il serait primordial de ne pas commencer par charger un brillant parlementaire de rédiger un rapport au terme duquel, une fois que ce dernier sera publié, sera mise en place une commission - il en fut d'excellentes - qui, après un an de travaux, nous fera part de ses conclusions. Je crains, en effet, que l'ensemble du champ politique ne considère, les prochaines élections se profilant, qu'il est sage de reporter les nécessaires réformes.

Dans cette brève épître, je voudrais suggérer deux dispositions qu'il faudrait prendre rapidement.

La première consisterait à mettre tout de suite en oeuvre une réforme de la fiscalité en introduisant, d'une part, le facteur revenu et, d'autre part, une réactualisation permanente et décentralisée des bases locatives.

Nous savons tous que le dispositif actuel ne peut perdurer. Or, si on passe cinq ans à réfléchir, eh bien, on ne le réformera pas plus qu'on ne l'a fait, tous gouvernements confondus, dans les années passées !

Par ailleurs, je propose que l'on revoie cette DGF en déclarant clairement que si l'on veut faire de la péréquation et si l'on veut que celle-ci augmente, on ne peut maintenir les dotations forfaitaires au même niveau pour tout le monde. En effet, si l'on fait le choix de la péréquation, on ne peut en même temps faire le choix du statu quo.

Certes, je n'ignore pas le grand nombre de pressions, madame la présidente ou monsieur le Président de la République, que vous ne manquerez pas de subir, ainsi que l'ensemble de vos ministres, pour que les communes - qu'elles soient petites, moyennes ou grandes, qu'elles soient touristiques ou non, qu'elles soient situées en plaine ou en montagne - continuent à percevoir la même chose que l'année précédente ! C'est peut-être une bonne idée, mais si tout le monde perçoit la même somme que l'année précédente et que l'on raisonne à volume constant, alors il n'y a pas plus de péréquation.

Nous devons donc faire le choix de la justice en faveur des zones rurales et des quartiers en difficulté, car nous savons que dans ce domaine nous sommes loin du compte. S'il s'agit réellement de priorités, il conviendra alors de faire des choix simples.

Je note que si ces choix étaient énoncés et mis en oeuvre de cette manière - même si des dispositifs de transition sont inévitables -, cela aurait de surcroît le mérite d'être lisible, tandis que, je le répète, il est aujourd'hui devenu complètement impossible de comprendre les dispositifs dont nous parlons. En effet, le système est d'une complexité telle que l'on s'y perd et cette complexité va toujours croissant, tant il est vrai que l'on ne cesse de réformer un dispositif qui, lui-même, est devenu illisible et dont les effets ne sont pas prévisibles.

Nous connaissons aujourd'hui deux situations qui montrent que les bonnes intentions affichées l'an dernier ne se sont pas traduites dans les faits.

En conclusion, mes chers collègues, j'espère vivement, au-delà des choix que chacun fera en 2007, que le pouvoir alors en place aura la volonté de conduire cette réforme qui, selon nous, doit aller prioritairement dans le sens de la péréquation et de la justice. (M. Pierre-Yves Collombat applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade.

M. Jean-Pierre Fourcade. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je me réjouis d'intervenir après M. Sueur, car je considère que ce dernier a, sur la péréquation, des idées quelque peu obsolètes !

M. Henri de Raincourt. Ce sont des idées socialistes !

M. Jean-Pierre Fourcade. Je m'explique : lorsque, voilà quelques années, nous avons modifié complètement l'armature de la DGF en doublant, et même en triplant, son produit, nous avons décidé de donner une accélération à la dotation de péréquation qui profite tant à la DSU qu'à la DSR et de ralentir la croissance d'autres dotations.

Certes, les villes qui ne bénéficient ni de la DSR ni de la DSU sont aujourd'hui en situation un peu difficile, notamment celles dont le potentiel financier est faible, et ce parce qu'elles ne parviennent pas à équilibrer leur budget et leurs comptes.

En revanche, si je regarde ce qui s'est passé, d'une part, pour les 4 000 bourgs ruraux qui constituent l'armature du pays et, d'autre part, pour les communes les plus concernées par la DSU, je m'aperçois qu'en quelques années, grâce à cette réforme, la péréquation a été très fortement augmentée.

À cet égard, monsieur le ministre, - c'est ma première observation - je souhaite que le Gouvernement publie de manière claire, en mentionnant un certain nombre d'exemples précis - je pense à Chanteloup-les-Vignes, à Monflanquin et à un certain nombre de bourgs ruraux et de communes en difficulté -, les résultats réels de la péréquation depuis 2001. (M. Alain Gournac opine.)

Je voudrais maintenant, monsieur le ministre, évoquer la compensation dont M. Bernard Saugey, rapporteur pour avis, a dit qu'elle se heurtait à une difficulté.

Je dois, pour ma part, témoigner à cette tribune que le Gouvernement a fait tous les efforts possibles pour que le calcul de la compensation soit le plus honnête et le plus proche de la réalité.

Cela étant dit, un problème se pose, je veux parler du transfert des personnels. En effet, nous nous sommes aperçus de deux choses : d'une part, les administrations centrales ne connaissent pas parfaitement l'état réel de leurs effectifs sur le terrain - ce qui crée beaucoup de problèmes de postes vacants, de gens en congé de maladie ou en difficulté, etc. - et, d'autre part, le transfert de l'organisation d'une administration centrale ou régionale à des départements ou des communautés d'agglomération pose des problèmes extrêmement complexes.

C'est la raison pour laquelle - c'est ma deuxième observation - je souhaite, monsieur le ministre, que vous mettiez en place un groupe de travail avec l'Association des maires de France, l'Association des régions de France et l'Assemblée des départements de France, afin d'examiner de quelle manière il serait possible de donner quelques marges de manoeuvre aux départements, aux régions ainsi qu'aux grandes collectivités pour réformer l'organisation de leurs services.

Les lois que nous avons votées sont très précises et il faut réfléchir au système d'organisation qui convient le mieux. Je pense ici à un exemple très significatif dont j'ai eu à connaître dans mon propre département. Le texte que nous avons adopté sur la maison du handicap risque de centraliser au niveau du département l'ensemble des actions en matière du handicap.

Or cela est absurde ! En effet, il vaut mieux que les communes ou les communautés d'agglomération s'occupent de ce problème pour ne laisser au département que le calcul et le versement de l'indemnité compensatoire.

Il se pose donc un problème d'organisation qui explique l'inquiétude des collectivités bénéficiant de subventions, alors que le Gouvernement déclare qu'il a fait ce qu'il fallait en accordant l'argent nécessaire.

Pour ma part, il me semble qu'il faut examiner attentivement la façon dont peuvent fonctionner, dans le cadre de l'Acte II de la décentralisation, un certain nombre de services qui ont été transférés aux départements ou aux régions, car c'est là que gît la difficulté. Cette situation est aggravée par les problèmes liés aux indemnités, à la durée du travail, à l'existence ou non d'un certain nombre de personnels au sein des différentes organisations, etc.

Enfin, monsieur le ministre, après la péréquation et la compensation, je voudrais aborder un troisième point qui me paraît tout aussi important.

J'assistais hier, comme vous-même d'ailleurs, au conseil d'orientation des finances publiques et j'ai pu, à cette occasion, me rendre parfaitement compte de l'effort qu'avait accompli l'État pour limiter la croissance de son budget et pour essayer de réaliser les objectifs que nous nous étions fixés l'année dernière.

La mission dont nous examinons les crédits traduit un effort tout à fait considérable en faveur des collectivités locales,...

M. Alain Gournac. Il faut le reconnaître !

M. Jean-Pierre Fourcade. ...je dois vous en rendre témoignage, monsieur le ministre.

M. Alain Gournac. Très bien !

M. Jean-Pierre Fourcade. Je crois qu'il est important de rendre publiquement cet hommage au Gouvernement, car nous ne le faisons pas assez souvent. Mes chers collègues, nous sommes plus prompts aux jérémiades qu'aux remerciements, c'est la nature humaine !

M. Alain Gournac. Et c'est très français !

M. Jean-Pierre Fourcade. Tout à fait, monsieur Gournac, Vercingétorix le disait déjà en son temps ! (Sourires.) Il s'agit d'un travers ancien !

Monsieur le ministre, j'ai apprécié deux dispositions de cette mission budgétaire, en particulier.

Premièrement, vous avez majoré fortement les crédits du Fonds de compensation pour la TVA. Certes, cette hausse correspond à l'augmentation réelle des investissements des collectivités territoriales, mais voilà plusieurs années qu'une telle remise à niveau n'avait pas eu lieu. Dans un budget marqué par les restrictions et la rigueur, cette majoration du fonds de compensation me semble très positive.

Deuxièmement, je crois pouvoir affirmer qu'en ce qui concerne le RMI, malgré quelques difficultés qui persistent ici ou là, la loi de règlement de 2006 et le projet de loi de finances pour 2007 permettront de dégager une solution satisfaisante.

Restent deux écueils, mais qui ne sont pas imputables au gouvernement auquel vous appartenez, monsieur le ministre : l'allocation personnalisée d'autonomie...

M. Alain Gournac. Oui, c'est une catastrophe !

M. Jean-Pierre Fourcade. ...et, surtout, car cette mesure est impossible à chiffrer, la maison du handicap. Il nous faut sérieusement étudier ces deux questions essentielles.

En ce qui concerne la loi de 2004, mes chers collègues, la commission que vous m'avez demandé de présider a fait son travail, qui a conduit à la publication d'une série d'arrêtés interministériels, dans des conditions satisfaisantes.

Toutefois, il reste trois problèmes à régler, et c'est sur cette trilogie que je conclurai mon intervention : les transferts de personnels - qui suscitent de nombreuses difficultés, et notamment un problème d'organisation -, le handicap et l'allocation personnalisée d'autonomie. Il nous faudra réfléchir à ces trois questions.

Monsieur le ministre, le budget que vous nous présentez va dans la bonne direction et traduit un effort méritoire du Gouvernement à l'égard des collectivités territoriales. Il faut poursuivre dans cette voie et approfondir notre réflexion sur les trois problèmes que je viens d'évoquer. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Gournac. Très bien ! C'était court, rapide et percutant.

M. le président. La parole est à M. François Fortassin.

M. François Fortassin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, vous ne serez pas étonné que je ne partage pas tout à fait l'enthousiasme de notre éminent collègue Jean-Pierre Fourcade.

Au fond, qu'est-ce qui est important dans les relations entre l'État et les collectivités locales, quelles qu'elles soient ? C'est de savoir si nous voulons un véritable aménagement équilibré et harmonieux du territoire national.

Or, il faut bien le dire, l'action de l'État en la matière souffre d'une certaine obsolescence, et si ses intentions de départ sont excellentes, elle aboutit souvent à de véritables inepties quand elle est confrontée à la réalité.

Sur le plan intellectuel, qui peut être contre le plafonnement de la taxe professionnelle ? Personne, mais nous nous apercevons que les départements qui ont le plus perdu à cette réforme sont ceux qui sont les plus pauvres, comme la Lozère, en particulier, alors que les départements qui ont tiré leur épingle du jeu sont les Hauts-de-Seine et la Haute-Garonne,...

M. François Fortassin. ...ce qui signifie qu'au bout du compte, au lieu de réduire la fracture territoriale, nous l'avons aggravée !

Sur le plan intellectuel, qui peut être contre la compétitivité des territoires ? Personne, bien entendu, mais nous savons très bien que si nous finançons massivement un petit nombre de réalisations, celles-ci ont plus de chances de se trouver à Blagnac ou à Labege, pour ne citer que des communes de ma région, qu'à Pierrefite Nestalas !

Aussi allons-nous subir des désagréments considérables, mes chers collègues. Il ne suffit pas d'inscrire le principe de la péréquation dans la Constitution pour régler le problème des inégalités entre les territoires !

Si nous étions partis de l'idée simple - qui a sans doute été jugée simpliste ! -que, dans une même catégorie de collectivités, les ressources entre les plus riches et les plus pauvres ne devraient pas dépasser un certain écart, qu'il resterait à déterminer, l'un de nos départements n'aurait pas, aujourd'hui, un budget équivalant à celui de la Grèce, ce qui n'est pas, me semble-t-il, une situation idéale !

Je voulais rappeler l'importance de ce principe général, car la réussite de ses applications en dépend. Si nous ne partons pas d'une base solide, à savoir une certaine conception de l'équité entre les territoires, nous risquons d'aboutir, comme par le passé, à des inepties.

Je poserai ensuite une question importante : l'État, quel qu'il soit, a-t-il le droit d'imposer aux collectivités, à travers une réglementation, des dépenses qu'il ne finance pas lui-même ? L'exemple des sapeurs-pompiers est à cet égard assez éclairant.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Ah oui ! J'y reviendrai !

M. François Fortassin. Dans la plupart des départements, les SDIS, les services départementaux d'incendie et de secours, ont vu leurs effectifs multipliés par six, sept, ou huit en cinq ans. Pour autant, les collectivités territoriales devront-elles augmenter leur fiscalité jusqu'au moment où nos concitoyens seront dans l'impossibilité de payer leurs impôts locaux ? Telle est la question qu'il nous faut nous poser.

De même, monsieur le ministre, je vous accorde que les dépenses liées au RMI seront cette année compensées à l'euro près. Toutefois, il y a un rattrapage pour 2005 et 2006 et, par conséquent, rien ne nous garantit que cet équilibre sera maintenu à l'avenir !

Enfin, dans le cadre du principe très simple de la libre administration des collectivités territoriales, est-il normal que les représentants de l'État imposent certaines règles en matière d'intercommunalité, s'agissant, notamment, de la pertinence et des limites de ces structures ?

Bien entendu, cette contrainte s'applique de manière feutrée, et les communes sont entièrement libres de rester à l'écart de l'intercommunalité, mais dans ce cas elles n'auront pas droit à certains financements de l'État. Ce chantage est tout de même assez curieux, et il serait sans doute possible de procéder autrement.

En tant qu'élu local, je suis pour ma part partisan de l'intercommunalité. D'ailleurs, dans mon canton, toutes les communes ont adhéré dès le départ à une telle structure, et il n'y a donc pas de problème.

Toutefois, il faut le dire, des mesures curieuses ont parfois été adoptées en matière d'intercommunalité. On a vanté en son temps la taxe professionnelle unique, la TPU, alors qu'aujourd'hui certains établissements publics de coopération intercommunale qui ont choisi ce régime se demandent s'ils ne vont pas revenir à la fiscalité additionnelle. De telles variations sont très inquiétantes, mes chers collègues, s'agissant de structures jeunes et non encore stabilisées.

Pour ma part, j'aurais préféré que l'on accorde un délai aux communes. Par exemple, de petites communautés de communes, regroupant trois cents ou quatre cents habitants, se sont constituées - il aurait été préférable qu'elles ne voient pas le jour -, et elles ont mis en commun toutes leurs compétences.

Or, aujourd'hui, d'autres communes souhaitent les rejoindre, mais à la condition de ne pas mutualiser toutes leurs compétences, d'autant que, souvent, celles-ci n'ont pas été effectivement mises en oeuvre dans les structures intercommunales.

Monsieur le ministre, il serait plus judicieux de donner à ces communes un délai de trois ou cinq ans pour qu'elles puissent entrer dans les intercommunalités au moment où elles le désirent.

Ainsi, nous éviterions l'éclatement des communes entre plusieurs intercommunalités, surtout dans les départements où la géographie s'y prête, car elles permettent aux élus de choisir indifféremment une communauté plutôt qu'une autre. Cette politique serait préférable au refus rigide des intercommunalités organisées à une échelle inférieure à celle du canton.

Monsieur le ministre, voilà quelques-uns des problèmes qui préoccupent les élus locaux. Au-delà de nos divergences, qui sont tout à fait naturelles en démocratie, nous avons tout intérêt à entretenir de bonnes relations et à nous comprendre mutuellement. D'ailleurs, je ne doute que vous adopterez les mesures nécessaires pour améliorer la situation dans ce domaine. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Mme Josiane Mathon-Poinat. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les relations entre l'État et les collectivités territoriales ne sont plus de toute quiétude, et l'euphorie qui régnait autour des lois sur la décentralisation est quelque peu retombée.

Certes, le principe de la libre administration des collectivités territoriales est inscrit dans la Constitution, mais il est aujourd'hui impossible de déterminer qu'il s'applique de manière effective et satisfaisante.

D'un côté, l'État s'oriente vers une décentralisation plus poussée et donne davantage d'autonomie aux collectivités territoriales. Nous en avons eu l'illustration avec les deux actes de la décentralisation Raffarin.

L'acte I, avec la loi constitutionnelle relative à l'organisation décentralisée de la République, a consacré l'autonomie des collectivités territoriales à l'article 72-2 de la Constitution, et a créé notamment le droit à l'expérimentation.

L'acte II était censé entériner ce principe d'autonomie en transférant de nouvelles compétences aux collectivités. Mes chers collègues, je n'évoquerai pas immédiatement le problème des transferts financiers, sur lequel j'aurai l'occasion de revenir.

Si nous nous en tenons à cette vision purement conceptuelle, il n'est pas faux d'affirmer que l'État a fait le choix de renforcer l'autonomie des collectivités territoriales.

D'un autre côté, toutefois, certaines décisions politiques et budgétaires prises par le Gouvernement entravent cette autonomie et portent atteinte au principe de libre administration.

En évoquant les choix politiques du Gouvernement, dont les conséquences sur les finances des collectivités sont dramatiques, je pense à la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales. Cela dit, nous n'avons cessé de le répéter lors des débats, et la justesse de nos propos semble, aujourd'hui, atteindre les élus locaux de la majorité, catastrophés par la situation financière dans laquelle ils se trouvent.

La loi du 13 août 2004, et plus précisément les transferts de compétences et de personnels qu'elle a organisés, pèse aujourd'hui lourdement sur le budget des collectivités, qui se retrouvent dans des situations inextricables.

Ainsi, les collectivités ne sont pas en capacité financière, à moins d'augmenter considérablement leur fiscalité, d'exercer leurs missions et de répondre de façon pleinement satisfaisante aux attentes de leurs habitants.

Le Gouvernement a beau jeu d'appeler les collectivités territoriales à plus de responsabilité : celles-ci ne sont plus en mesure de compenser les carences de l'État et elles ne pourront augmenter indéfiniment la fiscalité locale.

Toutefois, la situation n'est pas près de s'arranger, si l'on en croit le rapport d'information d'Éric Doligé sur les transferts des personnels TOS et DDE, c'est-à-dire des personnels techniciens, ouvriers et de service et des personnels des directions départementales de l'équipement

En effet, notre collègue constate que, « malgré un processus de transferts des personnels en bonne voie, [le] volet financier [est] d'ores et déjà préoccupant ».

La fonction publique territoriale a, jusqu'à présent, remporté un véritable succès auprès des personnels TOS. Au 29 septembre 2006, 50,35 % de ces personnels avaient fait connaître leur choix : 73,5 % d'entre eux avaient choisi d'être intégrés dans la fonction publique territoriale dès le 1er janvier 2007, et 26,49 % avaient opté pour le détachement sans limitation de durée.

Il existe une explication à cet engouement : les rémunérations et les primes versées dans la fonction publique territoriale sont sensiblement plus élevées que dans la fonction publique d'État.

Dans ces conditions, l'État sera-t-il en mesure de compenser les transferts à l'euro près, comme cela a été promis, alors que la compensation affectée aux collectivités locales est établie sur les rémunérations et les primes versées dans la fonction publique d'État ?

Par ailleurs, les collectivités se trouveront certainement dans l'obligation d'embaucher. La commission consultative sur l'évaluation des charges indiquait, dans son relevé de conclusions du 6 avril 2006, que la compensation des emplois disparus doit intervenir à la fin de la période d'exercice du droit d'option, soit le 1er janvier 2009 pour les postes relevant du ministère de l'éducation nationale et le 1er janvier 2010 pour ceux qui relèvent du ministère de l'équipement.

Les compensations arriveront donc très tardivement, alors que les besoins en personnels se font sentir dès à présent. Les collectivités devront par conséquent faire des avances de trésorerie pour procéder aux recrutements nécessaires.

Enfin, la question des retraites de ces personnels transférés est une véritable épée de Damoclès au-dessus de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, la CNRACL.

En l'état actuel, le régime de retraite des agents des collectivités locales devra financer, sans contrepartie de cotisations, la retraite des agents transférés. De la part de l'État, il s'agit d'une facétie quelque peu mesquine ! Le transfert de ces personnels vers la fonction publique territoriale constituera autant de pensions en moins à verser, sans que l'État ait, en contrepartie, à transférer aux collectivités les cotisations déjà perçues.

Les comptes de la CNRACL seront donc lourdement affectés par ces transferts de personnels. Parallèlement, ce seront les finances des collectivités locales qui en pâtiront. Rien ne leur est épargné !

Cette situation fait dire à notre collègue Éric Doligé que le volet financier des transferts constitue une véritable « bombe à retardement » pour les collectivités, du fait notamment de la faiblesse de la compensation des emplois disparus ou vacants, de la non-compensation « au réel » de l'alignement des indemnités des agents transférés sur celles de leurs collègues de la fonction publique territoriale, et de la dégradation, d'ici à 2015-2020 des comptes de la CNRACL.

La décentralisation, telle qu'elle a été voulue par le Gouvernement, coûtera décidément très cher au contribuable, sans pour autant que la qualité des services publics de proximité soit améliorée.

Les dotations de l'État que nous examinons aujourd'hui, et qui ont prétendument pour vocation de permettre aux collectivités d'assumer leurs compétences et de corriger les inégalités existant entre elles, sont très loin de correspondre à leurs besoins. Elles sont d'autant moins suffisantes que l'État reprend d'une main ce qu'il donne de l'autre, en opérant des choix budgétaires allant à l'encontre de l'intérêt des collectivités, et donc des contribuables locaux.

Je pense ici à l'instauration du bouclier fiscal par la loi de finances pour 2006.

Le plafonnement de la taxe professionnelle à 3,5 % de la valeur ajoutée constituera un important manque à gagner pour les collectivités locales. Même l'Association des maires de France s'inquiétait, l'année dernière, de l'adoption d'une telle disposition. La position de son bureau était claire et sans équivoque : « Le Bureau refuse la prise en compte des impôts locaux dans le calcul du bouclier fiscal. En tout état de cause, si ce dispositif était retenu, l'État devrait en assumer intégralement le coût. » Mais il n'est pas question pour l'État d'en assumer totalement le coût, puisque la compensation de ce financement ne sera plus assurée à partir de 2007.

Cette décision est d'une extrême gravité, d'un point de vue tant moral que financier, car elle remet en cause le principe de responsabilité de l'entreprise devant la collectivité locale. Par ailleurs, elle grèvera fortement le budget des intercommunalités, dont la principale recette est souvent la taxe professionnelle unique.

Par conséquent, le plafonnement de la taxe professionnelle remet en cause le principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales, pourtant si cher au Gouvernement.

En conclusion, je partage les propos de ma collègue Marie-France Beaufils, qui plaidait la semaine dernière pour une réforme urgente de la fiscalité locale. Les collectivités sont censées disposer d'une plus grande autonomie. Pourtant, elles se retrouvent prises dans un véritable carcan fiscal et auront de plus en plus de difficultés à assumer leur mission de service public. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

Mme Hélène Luc. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme l'a fait remarquer Bernard Saugey, avec l'art consommé de la litote qui est le sien, « les règles édictées par la LOLF semblent toujours aussi peu adaptées aux relations financières entre l'État et les collectivités territoriales ».

M. Bernard Saugey, rapporteur pour avis. Ce n'est pas une litote !

M. Pierre-Yves Collombat. Rappelons d'abord que, à strictement parler, les crédits regroupés sous la mission « Relations avec les collectivités territoriales » ne représentent pas plus de 3 milliards d'euros et 4,4 % des concours financiers de l'État aux collectivités locales, et même 3,6 % si l'on inclut les impôts transférés.

Michel Mercier fait observer pour sa part qu'il s'agit d'« une mission peu propice à la fongibilité des crédits », l'État n'ayant aucun pouvoir direct de décision sur 80 % des crédits. En principe, pourtant, la fongibilité est bien l'une des vertus de la LOLF !

Constatons aussi que la plupart des indicateurs censés mesurer la performance de l'administration ou l'effet des dispositions budgétaires n'indiquent rien, ou pas grand-chose de significatif pour les collectivités. Les programmes « ont d'autant moins d'indicateurs qu'ils sont d'un montant plus élevé », observe encore, facétieux, Michel Mercier.

Comme dans l'histoire du fou cherchant sous le réverbère sa clé perdue, parce que là est la lumière, les indicateurs se trouvent non pas là où ils seraient utiles, mais là où il est facile d'en inventer.

Il aurait par exemple été utile - c'est aussi l'avis du rapporteur spécial et du rapporteur pour avis - d'avoir un indicateur permettant de mesurer l'impact d'une mesure annoncée à son de trompe l'année dernière comme particulièrement favorable au monde rural : le « fléchage » de 20 millions d'euros de la DDR pour financer le service public en milieu rural.

Le Gouvernement y songe, mais je ne suis pas sûr d'avoir bien compris ses explications. Je vous livre donc ce pur chef-d'oeuvre de galimatias bureaucratique : « La mesure de la performance de la seconde part de la DDR pourrait être réalisée en distinguant, au sein de l'objectif n°1 "Promouvoir les projets de développement local" du programme 119 "Concours financiers aux communes et groupements de communes", les investissements réalisés au titre de la première part de la DDR et ceux réalisés au titre de la seconde part. Les indicateurs illustrant cet objectif seraient alors modifiés en ce sens. » Voilà ce que l'administration a répondu à notre rapporteur spécial. On se prend à rêver d'un indicateur permettant de quantifier l'usage du français standard par la haute administration ! (Sourires.)

Même mesurer l'effet de levier des dotations - ce qui serait pourtant très utile - se révèle aléatoire. Ainsi, en 2005, l'effet de levier aurait été au rendez-vous pour la dotation globale d'équipement des communes, mais pas pour celle des départements.

Tout cela est fort bien, sauf que la plupart des opérations réalisées en 2005 renvoient très probablement à des décisions des collectivités et à des bouclages de plans de financement antérieurs. Seuls s'en étonneront ceux qui ignorent les délais de plus en plus longs entre l'attribution des aides financières et le solde budgétaire des opérations. En tout état de cause, sur une seule année, les mesures de performance d'un tel indicateur ne sauraient être significatives.

« Effet de levier » : l'expression est belle, mais correspond-elle à quelque chose ?

En 2005, les dépenses d'équipement des communes ont représenté 17,2 milliards d'euros, les communes de moins de 10 000 habitants investissant plus par rapport à leur population que les communes de plus de 10 000 habitants. Il faut comparer ce montant à celui de la DGE des communes et à celui de la DDR : respectivement 459 millions d'euros et 124 millions d'euros en 2006, soit trois dix millionièmes !

Ce n'est pas un levier, c'est peut-être un catalyseur, à moins que ce ne soit un agent homéopathique ! (Sourires.)

Les rédacteurs du projet de budget ne croient pas eux-mêmes à leur effet de levier.

Comme le fait remarquer Michel Mercier, d'un côté, on privilégie des taux d'intervention de DGE élevés pour accentuer l'effet de levier et, de l'autre, on y croit si peu que l'on se résigne à ce que les investissements réalisés grâce à eux ne progressent pas plus vite que les autres.

Tout ce qui vaut pour la mission « Relations avec les collectivités locales » stricto sensu vaut pour le reste des contributions de l'État. Quand on pense que M. Copé songe à transposer la LOLF aux budgets locaux, on tremble !

De réforme en réforme des nomenclatures comptables, les documents budgétaires ne sont plus lisibles que par les fonctionnaires et les spécialistes. Le contrôle des exécutifs par les assemblées n'est plus qu'un souvenir.

La présentation qui nous est faite des relations financières entre l'État et les collectivités locales est l'exemple parfait de ce théâtre d'ombres.

Je prendrai deux exemples pour étayer mon propos.

Le premier a trait à la péréquation. Le rapporteur spécial titre sur « le renforcement de la péréquation », sans justifier sérieusement son affirmation.

Si, dans la DGF, la part de la péréquation passe de 13,3 % à 14,4 % de 2005 à 2006, rappelons qu'elle était de 16 % en 2003. Si l'on réintroduit le Fonds national de péréquation qui n'était pas alors intégrée à la DGF, cette part passe à 18,5 % en 2003. On voit le progrès !

Mais là n'est pas le plus important. Selon ces mêmes chiffres, en 2005, le montant total des mesures à visée péréquatrice pour les communes, y compris la DSU, la DSR, la DGE, la DDR et la dotation élu local, est de l'ordre de 2,5 milliards d'euros. Il n'est qu'à le comparer aux 66,3 milliards d'euros de recettes de fonctionnement des communes en 2005. Cela représente 3,8 %. Là encore, il faut croire aux vertus de l'homéopathie pour penser qu'une intervention à ce niveau aura un réel effet correctif !

Évaluer l'évolution de la péréquation intercommunale à travers celle des dotations ayant officiellement cet objectif revient à sonder la profondeur de la mer en mesurant la hauteur des vagues !

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Ce n'est pas facile ! (Sourires.)

M. Pierre-Yves Collombat. C'est ignorer volontairement les deux inégalités les plus massives entre les communes : la répartition des bases de taxe professionnelle et le mode de construction de la DGF.

En matière de taxe professionnelle, l'écart entre les communes est de 1 à 8 500 ! Ainsi, 1 % des communes les mieux dotées reçoit quarante-quatre fois ce que reçoit 1 % des communes les moins bien dotées ; 5 % des communes perçoivent 80 % de la taxe professionnelle.

Ces différences recoupent, à quelques exceptions près, la hiérarchie des tailles de communes. En 2003, le potentiel fiscal des communes de moins de 10 000 habitants était de 489 euros, contre 718 euros par habitant pour les communes de plus de 10 000 habitants.

Depuis 2003, l'écart se creuse entre les communes bien dotées et les autres. Et ce n'est certainement pas la dernière réforme de la taxe professionnelle qui va le réduire, bien au contraire ! Pour le même produit, des communes qui disposent de bonnes bases ont des taux plus bas, donc moins de risque de le voir plafonner.

La DGF, pour ce qui la concerne, a pérennisé l'inégalité fondamentale qui présida à sa naissance. Le système des strates démographiques, fossilisé dans la dotation forfaitaire, devenue la dotation la plus importante pour le plus grand nombre des communes, continue à pénaliser fortement les communes rurales.

En 2003, un urbain valait 2,5 ruraux. En 2004, l'écart a été ramené à 2,2, ce que j'avais salué à cette même tribune. On en est resté là pour 2006 et pour 2007. C'est d'autant moins normal que les charges des communes rurales ressemblent de plus en plus à celles des communes urbaines, comme le montre la dernière étude de l'INSEE.

Quatre chiffres montrent sans ambiguïté l'ampleur du défi auquel ces communes sont confrontées.

En 2005, les recettes de fonctionnement inscrites au budget primitif des communes de moins de 10 000 habitants et des communes de plus de 10 000 habitants étaient respectivement de 819 euros par habitant et de 1 278 euros par habitant. Pour les dépenses d'équipement, c'est l'inverse : elles sont plus importantes pour les communes de moins de 10 000 habitants - 639 euros par habitant - et moindres pour les communes de plus de 10 000 habitants - 369 euros par habitant.

Dans ces conditions, parler de « renforcement de la péréquation » relève de la méthode Coué - vous l'aurez remarqué, je n'ai pas dit de la méthode Copé ! (Sourires.)

Le second exemple concerne l'effort financier réel de l'État envers les collectivités. Nous nageons dans une telle confusion que nous ne le connaissons même pas : est-il de 3 milliards d'euros, de 67,5 milliards d'euros, de 84 milliards d'euros, de 130 millions d'euros comme l'a dit Michel Mercier ? On s'y perd, ou plutôt on nous perd, en mettant sur le même plan de réelles contributions comme la DGE, des remboursements d'impôts acquittés par les collectivités, le FCTVA, des prises en charge d'effets de décisions d'État étrangères à toute visée locale - compensations d'exonérations et dégrèvements -, des dotations, voire des impôts en contrepartie de compétences et de charges transférées.

Le principal avantage de la méthode, c'est qu'on peut affirmer à peu près tout et son contraire. On peut dire, comme le rapporteur pour avis, que, par rapport à 2006, l'effort financier de l'État envers les collectivités locales est maintenu pour ce budget, voire se féliciter, une dernière fois, de la progression de 2,56 % de la DGF. On peut aussi constater, si on part de l'enveloppe normée et si on enlève le FCTVA, les compensations d'impôt, etc., que l'effort n'est plus que de 1,46 %, soit même pas l'inflation !

Je conclurai en évoquant ce qui me semble être l'escroquerie intellectuelle la plus pernicieuse.

Période préélectorale oblige, la tentative de réduire le montant des dotations de l'État aux collectivités locales, initiée avec le rapport Pébereau et la Conférence nationale des finances publiques, a, cette année, fait long feu. En « com langue » et dans le langage de bureau, on appelle cela « associer les collectivités locales à l'effort de maîtrise des dépenses publiques ». Mais la menace est toujours là.

L'État, en tout cas le Gouvernement, entend toujours donner des leçons de vertu financière aux collectivités locales ! C'est proprement l'hôpital qui se moque de la charité !

Je veux maintenant, mes chers collègues, vous faire part de quelques chiffres et de ma conclusion, que j'emprunte à Philippe Laurent, maire de Sceaux, président de la commission des finances de l'Association des maires de France.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Et membre de l'UDF !

M. Pierre-Yves Collombat. « En 2005, l'augmentation de la dette de l'État a été de 49 milliards d'euros. Pendant ce temps-là, il a réalisé 8 milliards d'euros d'investissement. La même année, l'augmentation de la dette des collectivités locales atteint 5 milliards d'euros, quand l'investissement public local représente 39 milliards d'euros. Ça veut donc dire que l'État s'est endetté pour payer des dépenses courantes alors que les collectivités locales ont autofinancé la plupart de leurs investissements.

« Les collectivités locales ne sont donc pas responsables de la dette publique, bien au contraire...

« Ce que l'on appelle les ?concours de l'État? ne sont pas des dépenses de l'État mais correspondent à un ?prélèvement sur recettes?, et dans ces conditions, ils doivent croître au même rythme que les recettes de l'État.

« C'est donc une malhonnêteté intellectuelle que de dire que les concours aux collectivités locales sont le premier poste de dépenses de l'État et que donc, pour réduire les dépenses de l'État, il faut réduire les concours aux collectivités locales. » Il est difficile d'être plus clair ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. -  M. André Boyer applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur spécial, monsieur le rapporteur pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, comme l'ont rappelé, brillamment et brièvement, M. le rapporteur spécial, Michel Mercier, et M. le rapporteur pour avis, Bernard Saugey, la mission « Relations avec les collectivités territoriales » ne représente qu'une petite partie, soit 3,2 milliards d'euros, des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales. Nous l'avons largement évoqué lors du débat sur les recettes des collectivités, à la fin du mois de novembre dernier : le périmètre des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales atteindra, en 2007, près de 67,5 milliards d'euros.

Le ministère de l'intérieur est également chef de file pour ce qui concerne le financement des transferts de compétences issus de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.

Je remercie, en cet instant, M. Fourcade d'avoir souligné les différents efforts qui ont été accomplis par l'État alors qu'il s'astreint lui-même à une discipline budgétaire très rigoureuse.

Je souligne à l'attention de M. Collombat que le montant atteint par le FCTVA, la DGE et la DDR s'élève au total à 5,3 milliards d'euros, ce qui n'est pas négligeable. (M. Pierre-Yves Collombat s'exclame.)

Je rappellerai très brièvement les différentes mesures qui concernent les collectivités territoriales dans ce projet de loi de finances, avant de répondre aux questions posées par les orateurs.

La première mesure, c'est, naturellement, la reconduction du contrat de croissance et de solidarité. L'effort accompli en la matière est important, comme vous le savez. De ce fait, la DGF progressera de 2,5 %, soit 956 millions d'euros. Concrètement, les communes et leurs groupements verront leur enveloppe augmenter de 542 millions d'euros, les départements de 286 millions d'euros et les régions de 127 millions d'euros. Monsieur Collombat, j'ai pesé autant que je le pouvais sur cette décision. Vous admettrez qu'elle a, de ce fait, un impact réel sur le budget de l'État.

La reconduction du contrat de croissance et de solidarité, c'est aussi l'occasion de consolider la réforme des dotations, en particulier de renforcer la péréquation. Ainsi, les aménagements apportés à la DGF des communes, des départements et des régions permettront au Comité des finances locales, s'il le souhaite, de dégager plus de 100 millions d'euros supplémentaires en ce sens.

La deuxième mesure concerne la compensation des transferts de compétences, qui se poursuit dans une double démarche de concertation et de consolidation. L'année 2007 sera la troisième année de montée en puissance des transferts de compétences. Je voudrais faire, sur ce point, deux observations.

Première observation : le 1er janvier prochain commencera le transfert des emplois TOS. Sur les 93 000 agents concernés par cette décentralisation, plus de la moitié ont d'ores et déjà choisi la fonction publique territoriale. C'est d'ailleurs ce que souligne Eric Doligé dans son rapport rendu au nom de l'Observatoire de la décentralisation. Je suggère à ceux qui ne sont pas d'accord de mettre très clairement dans des programmes d'alternance qu'ils demanderont aux personnels TOS de rejoindre la fonction publique d'État, si c'est vraiment leur idée.

Seconde observation : grâce à la Commission nationale de conciliation et à la Commission consultative de l'évaluation des charges, la CCEC, présidée par Jean-Pierre Fourcade, la concertation dans ce domaine a très largement porté ses fruits, puisqu'elle se traduit, par rapport à ce qui aurait résulté d'une application très stricte des règles de compensation, par un surcroît de 157 millions d'euros.

La troisième mesure concerne le RMI. Je ne serais naturellement pas complet si je n'évoquais pas cette question. La compensation du transfert du RMI obéit à l'article 72-2 de la Constitution et conduit, de ce fait, à attribuer aux départements un montant de 4,941 milliards d'euros, sur la base de la dépense de l'État en 2003.

Depuis, c'est vrai, sous l'effet de l'augmentation du nombre de RMIstes, la dépense s'est alourdie. Le Gouvernement a pris en compte cette situation, d'abord par l'attribution de 457 millions d'euros au titre de l'année 2004, puis par la mise en place du Fonds de mobilisation départementale pour l'insertion, qui, comme vous le savez, sera doté de 500 millions d'euros pour chacune des trois années suivantes. Les modalités de répartition de ce fonds seront précisées en loi de finances rectificative.

Au total, et j'insiste sur ce point, la dépense supportée par les départements en 2005 au titre du RMI sera couverte à hauteur de 93,5 % par l'État, et le département du Rhône ne sera pas une exception en la matière, monsieur le rapporteur spécial.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Bien sûr que si !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Les départements recevront, en 2007, un apport de 1 milliard d'euros : 500 millions d'euros au titre de 2005, en loi de finances rectificative, et 500 millions d'euros au titre de 2006, dans le projet de loi de finances.

Je sais, monsieur Mercier, que nos points de vue sur cette question, et, plus généralement, sur les libertés données aux départements dans le pilotage de leurs dépenses sociales, convergent très largement. Comme vous et comme la majorité sénatoriale, je pense qu'une pause dans les transferts de compétences est nécessaire.

M. Yves Fréville. Très bien !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Chacun connaît d'ailleurs la position que j'ai défendue sur la réforme des tutelles, nécessaire, mais qui doit prendre en compte le calendrier des départements. Comme vous, je pense qu'une plus grande marge de manoeuvre doit vous être laissée dans le pilotage des dépenses sociales. Mais jusqu'où une telle liberté doit-elle aller ? Est-ce jusqu'à vous confier le soin de revaloriser le RMI, voire d'en fixer le montant ? Il ne faut pas seulement poser ces questions, il faut aussi mesurer les conséquences des réponses que nous pouvons leur apporter. Comme l'a souligné M. Fourcade, il est très clair que les départements doivent être, au moins, libres de leur organisation interne.

Je veux, après ces rappels, répondre aux autres questions que vous m'avez posées, messieurs Mercier et Saugey.

Je veux d'abord vous remercier des propos élogieux que vous avez tenus à l'endroit des services du ministère, en particulier de la direction générale des collectivités locales. Le respect des délais de calcul des dotations et le faible nombre de rectifications apportées à ces calculs témoignent en effet, monsieur Mercier, de l'excellence de cette direction.

Monsieur le rapporteur spécial, je veux aussi vous apporter quelques précisions sur les indicateurs qui figurent dans le projet annuel de performance de la mission et dans l'annexe, qui est plus particulièrement consacrée aux prélèvements sur recettes. Je suis bien sûr tout à fait d'accord avec vous pour considérer qu'il est nécessaire, lorsque des inflexions significatives sont apportées aux objectifs, que cela soit expliqué, et je m'y engage. En revanche, monsieur Collombat, je ne peux partager vos critiques sur ces indicateurs. Si leur nombre est limité, c'est parce que la plupart des dotations obéissent à des règles fixées très précisément par la loi.

Je veux maintenant répondre plus précisément sur deux points.

D'abord, monsieur Mercier, s'agissant de la part des projets subventionnés, entre 25 % et 35 %, par la DGE des communes et par la DDR, j'ai clairement souhaité - et je vous l'avais dit - que l'on cesse la politique de saupoudrage des dotations. La fourchette de 25 % à 35 % me paraît équilibrée. J'ai demandé aux préfets de respecter cette valeur cible, notamment dans la circulaire du 17 novembre dernier relative à la DGE des communes. Comme vous êtes très attentif - il vous arrive parfois de me signaler quelques erreurs lors de la signature de certains décrets -, je suis étonné que vous n'ayez pas vu cette circulaire, et je la tiens à votre disposition. (M. le rapporteur spécial s'exclame.)

Concernant le nombre de rectifications prévues sur la répartition des dotations en 2007, je peux vous rassurer : la direction générale des collectivités locales n'a pas pour objectif d'accroître le nombre des erreurs, qui, vous l'avez vous-même noté, est très bas. Mais, alors que le chiffre de 100 avait été fixé de manière un peu forfaitaire, le chiffre de 110 retenu pour 2007 procède, pour sa part, d'un décompte plus précis. Nous essayerons naturellement de tenir une cible inférieure.

Vous m'avez également interrogé sur la mission « Avances aux collectivités territoriales ».

L'excédent de 500 millions d'euros que vous avez évoqué et qui, il faut bien le reconnaître, vous a quelque peu perturbé,...

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Effectivement !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. ...résulte, en réalité, d'un effet de caisse.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Ça, c'est nouveau ! Alors, c'est une grosse caisse !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. La viscosité des tuyaux, sans doute ! (Sourires.)

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. En effet, l'État verse les dotations et la fiscalité par douzièmes, mais encaisse les impôts locaux en fin d'exercice. Le compte est donc structurellement déséquilibré sur neuf mois de l'année. Il s'équilibre toutefois in fine grâce à l'obligation de dépôt des fonds libres d'emploi des collectivités, qui demeurent très stables à un haut niveau grâce aux dépôts des communes. Un rapport de la Cour des comptes, établi en 2004, a d'ailleurs mis en lumière ces mouvements de trésorerie. Vous voilà rassuré.

Je veux également répondre à deux questions précises de M. Saugey sur l'intercommunalité.

Je veux d'abord aborder la définition de l'intérêt communautaire et l'échéance que j'avais fixée au 18 août dernier. L'enquête menée auprès des préfectures montre que le respect de cette échéance varie selon le type d'EPCI. Ainsi, pour les communautés urbaines et les communautés d'agglomération, qui représentent, par définition, les structures les plus intégrées et dont l'intérêt communautaire est déterminé par les seuls conseils communautaires, le calendrier est globalement tenu. En revanche, pour les communautés de communes, quelques retards dans cette définition ont été relevés, comme on s'y attendait.

Ces retards sont généralement imputables aux difficultés rencontrées par les petites communes, soit pour réunir leur conseil municipal en période estivale, soit pour procéder à la définition des critères pour certaines compétences. Dans le premier cas, qui était le plus facile, des correctifs ont été prévus pour les premiers jours de l'automne, et les préfets ont fait preuve de la souplesse nécessaire, comme je le leur avais demandé. Dans le second cas, un travail de concertation a été entrepris par les services préfectoraux auprès des communes et de leurs groupements sur la nécessaire délimitation de la compétence, puis ils ont appliqué la loi, en procédant, par arrêté, à un transfert intégral et immédiat des compétences attendues.

S'agissant, ensuite, des mises à disposition de services entre les communes et les EPCI dont elles sont membres, il est exact que le dispositif mis en place par la loi relative aux libertés et responsabilités locales a conduit à s'interroger sur la nécessité de soumettre ces mises à disposition aux procédures de marchés publics, et vous savez combien la Commission européenne est vigilante sur ce point. Les explications fournies par le Gouvernement selon lesquelles il s'agit de relations exclusivement internes à la sphère publique entre des communes et des EPCI dont les assemblées délibérantes sont exclusivement composées de représentants des communes devraient permettre de lever toute ambiguïté sur ce point.

Monsieur Sueur, je suis un peu étonné des critiques que vous avez émises sur la complexité du système des dotations. En effet, depuis 2002, les gouvernements successifs ont mené des réformes de grande ampleur en la matière. Ayant vous-même exercé les responsabilités qui sont les miennes aujourd'hui, vous êtes certainement mieux à même d'en mesurer l'importance.

Tout d'abord, des modifications ont été apportées afin de répartir les dotations forfaitaires en fonction de critères objectifs, pour effacer progressivement des rentes historiques. Cette première étape constitue, selon moi, un progrès.

Ensuite, nous avons accrû la péréquation dans des proportions qui n'avaient jamais été atteintes, comme l'a rappelé Jean-Pierre Fourcade tout à l'heure. Il a d'ailleurs parlé en expert puisqu'il présidait le Comité des finances locales lorsque celui-ci a préparé la réforme en 2005.

Par ailleurs, sur la fiscalité locale, je ne peux que répéter ma conviction, ce qui prouve que je n'en change pas : la réforme fiscale devra être menée après les prochaines échéances. J'attends beaucoup du rapport du Conseil économique et social, qui, je l'espère, nous éclairera. Chacun connaît l'obsolescence des bases, certaines d'entre elles datant de 1970. La seule condition est que les transferts de l'État n'augmentent pas, la réforme devant être menée de manière très équilibrée.

Sur la réforme de la taxe professionnelle, monsieur Sueur, l'objectif est d'assurer la compétitivité de nos entreprises, en leur garantissant que le prélèvement n'ira jamais au-delà de 3,5 % de la valeur ajoutée. Or, aujourd'hui, 200 000 entreprises acquittent jusqu'à 10 % de leur valeur ajoutée au titre de cette taxe. Cette situation, vous en conviendrez puisque, à l'évidence, vous ne manquez ni d'honnêteté ni d'objectivité, nous fait perdre des milliers d'emplois chaque année et accroît les risques de délocalisations. Lorsque celles-ci ont lieu, nous avons d'ailleurs beaucoup de mal, les uns et les autres, à les expliquer à nos concitoyens.

Selon la réforme que nous avons fait voter, l'État prend à sa charge les conséquences des augmentations intervenues entre 1995 et 2004, ce qui représente tout de même 1,6 milliard d'euros. Nous avons prévu de nombreux garde-fous pour régler le maximum de cas problématiques : ainsi, pour les EPCI à taxe professionnelle unique, une réfaction de 20 % du ticket modérateur sera automatique dès lors que ces EPCI auront 50 % de leurs bases plafonnées. Vous n'êtes d'ailleurs pas le seul à nous avoir alertés sur le sujet, plusieurs parlementaires, en particulier des sénateurs, ayant fait de même. Finalement, la réponse que nous apportons me semble équilibrée.

Monsieur Fortassin, vous avez apparemment oublié les efforts très importants du Gouvernement en faveur des territoires ruraux.

Nous avons veillé à ce que les dotations de péréquation allouées aux territoires ruraux progressent à un rythme équivalant à celui des dotations de péréquation urbaine. Reconnaissez-le, cet alignement n'allait pas de soi et ne s'est pas fait tout seul ni par l'opération du Saint-Esprit ! Il a bien fallu une volonté politique pour aboutir.

De plus, Nicolas Sarkozy, Christian Estrosi et moi-même avons mis en place une politique ambitieuse en faveur des territoires ruraux, au travers du soutien aux services publics en milieu rural et, surtout, par l'intermédiaire des pôles d'excellence rurale, dont vous connaissez d'ailleurs le calendrier et les enjeux puisqu'ils font actuellement l'objet d'un débat.

En ce qui concerne les sapeurs-pompiers, même si c'est peut-être la règle de la discussion parlementaire, je vous trouve franchement très injuste. Vous évoquez des décisions prétendument imposées par l'État.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Eh oui !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. C'est totalement faux ! Une discussion s'est engagée avec les organisations syndicales. J'ai voulu y associer, ce qui est une première, votre collègue Éric Doligé, président de la Conférence nationale des SDIS, et Claudy Lebreton, président de l'Assemblée des départements de France, qui est le partenaire institutionnel indispensable en la matière. Je leur ai proposé de rencontrer ensemble les organisations syndicales, afin que celles-ci ne puissent pas espérer profiter d'éventuelles divergences de vue entre nous. À mon sens, cette initiative était particulièrement raisonnable et utile. Je vous suggère d'ailleurs d'interroger vous-même Claudy Lebreton, qui pourra témoigner de ma volonté constante de l'associer le plus largement possible aux discussions en cours.

Concernant, enfin, les intercommunalités, j'ai effectivement fait le choix d'un effort de rationalisation des périmètres, d'une meilleure définition de l'intérêt communautaire et du renforcement des mises à disposition de service. C'était une nécessité absolue au regard du débat de l'année dernière, qui a effectivement été engagé sur des bases pour le moins dangereuses. Mais j'ai personnellement veillé à ce que le mouvement s'opère dans la concertation la plus large : c'est l'esprit des schémas départementaux qu'ont établis les préfets à la suite de la circulaire bien connue de novembre dernier.

Madame Mathon-Poinat, je vous remercie d'avoir souligné le succès de la décentralisation des personnels TOS.

Mme Josiane Mathon-Poinat. À moitié seulement !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Ce n'était peut-être pas votre intention, mais c'est ce qui est ressorti de votre propos ! Je répète ce que j'ai dit : si vous estimez que les TOS ne doivent pas rester dans la fonction publique territoriale, je vous suggère, les uns et les autres, de l'inscrire clairement dans vos programmes politiques d'alternance.

MM. Christian Demuynck. Très bien !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Vous ne pouvez pas à la fois critiquer la mesure et ne pas en tirer les conséquences.

M. Henri de Raincourt. Tout à fait !

M. Jacques Blanc. Monsieur le ministre, vous avez raison !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Si vous voulez être en accord avec le message que vous faites passer, écrivez donc, noir sur blanc, que votre première décision serait de « renvoyer » les personnels TOS dans le giron de l'État ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme Josiane Mathon-Poinat. Ne soyez pas de mauvaise foi ! Ce n'est pas ce que j'ai dit !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Mais je ne m'adresse pas simplement à vous, madame la sénatrice. Ma remarque vaut pour l'ensemble de vos collègues de l'opposition.

S'agissant, maintenant, de la CNRACL,...

Mme Josiane Mathon-Poinat. C'est sur ce point que j'ai insisté !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Vous avez raison : c'est plus prudent pour vous !

Concernant la CNRACL, disais-je, je ferai deux observations.

Premièrement, à court terme, l'augmentation du nombre de cotisants devrait, de manière mécanique, améliorer la situation de la CNRACL. Le coût des cotisations à cette caisse a d'ailleurs été intégré à la compensation allouée aux départements et aux régions.

Deuxièmement, à plus long terme, je vous rappelle que la CNRACL repose sur le système par répartition. Il n'y a donc aucune raison de lui transférer les cotisations versées par l'État dans le passé. Ou alors cela supposerait de revenir sur un certain nombre de mécanismes que nous connaissons dans d'autres domaines.

En outre, comme je l'ai rappelé le 28 novembre dernier, les régions et les départements sont, globalement, dans une situation favorable. D'après les analyses chiffrées de Dexia, que je tiens d'ailleurs à votre disposition, rien ne permet d'envisager une dégradation pour 2007. Le silence approbateur des présidents de conseil général que sont Jean Arthuis et Michel Mercier ne tient absolument pas au fait qu'ils n'écoutaient pas mes propos : ils sont d'accord avec moi, parce que j'ai dit la vérité ! (Sourires.)

Telles sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les explications que je souhaitais vous donner. J'espère avoir répondu aussi précisément que possible à vos interrogations. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

relations avec les collectivités territoriales

Relations avec les collectivités territoriales - Compte de concours financiers : avances aux collectivités territoriales
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Article additionnel avant l'article 51 bis ou après l'article 51 bis

M. le président. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » figurant à l'état B.

ÉTAT B

(En euros)

Mission

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Relations avec les collectivités territoriales

3 264 831 560

3 155 598 560

Concours financiers aux communes et groupements de communes

727 440 521

656 753 521

Concours financiers aux départements

797 632 482

784 521 482

Concours financiers aux régions

1 462 674 111

1 446 239 111

Concours spécifiques et administration

277 084 446

268 084 446

dont titre 2

8 405 610

8 405 610

M. le président. L'amendement n° II-262, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Concours financiers aux communes et groupements de communes

 

 

 

 

Concours financiers aux départements

 

 

 

 

Concours financiers aux régions

2.862.854

 

2.862.854

 

Concours spécifiques et administration

Dont Titre 2

 

2.029.642

 

2.029.642

TOTAL

 2.862.854

2.029.642 

2.862.854 

2.029.642

SOLDE

+ 833 212

+ 833 212

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Cet amendement vise à procéder à des ajustements sur la dotation générale de décentralisation des régions d'outre-mer et sur celle des départements : pour les régions, c'est une majoration de quelque 2,8 milliards d'euros ; pour les départements,...

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. C'est une minoration !

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. ...c'est effectivement une minoration.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. La commission des finances n'a pas eu le temps d'examiner cet amendement, qui lui a été transmis très tardivement. À ce propos, monsieur le ministre, je regrette, que vous n'ayez pas pu finir vos additions plus rapidement...

La majoration prévue pour les régions est sûrement bienvenue. Quant à la minoration constatée pour les départements, si elle est l'assurément beaucoup moins, elle résulte d'un calcul probablement exact. Par conséquent, la commission des finances émet un avis favorable sur cet amendement.

M. Pierre-Yves Collombat. Quelle abnégation !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Monsieur Mercier, le fait que la commission des finances n'ait pas été saisie plus tôt de cet amendement est certes regrettable, mais celui-ci est une conséquence des ajustements décidés le 30 novembre dernier par la Commission consultative sur l'évaluation des charges.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-262.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits, modifiés, de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » figurant à l'état B.

J'ai été saisi d'une demande d'explication de vote de la part de Mme Josiane Mathon-Poinat.

Je rappelle que cette explication de vote vaut pour les deux missions que nous examinons.

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Mme Josiane Mathon-Poinat. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le moins que l'on puisse dire est que la discussion générale des crédits de cette mission comme les amendements que nous allons examiner dans quelques instants et qui feront sans doute l'objet d'un débat intéressant montrent, s'il en était besoin, que le pacte de la décentralisation souffre de bien des limites.

Les concours de l'État aux collectivités locales subissent en effet, quoi qu'on en dise, l'application de la régulation budgétaire. Sans entrer dans les arcanes - qui sont pour le moins complexes - des relations entre l'État et les collectivités locales, nombre de communes et de départements vont une fois encore se trouver confrontés en 2007 à des pertes de ressources importantes, lesquelles viendront largement compenser à la baisse les petits « bonus » accordés au travers du contrat de croissance et de solidarité.

Au demeurant, monsieur le ministre la simple reconduction de ce contrat de croissance, que vous nous avez encore présentée tout à l'heure, ne fait pas le compte.

Ainsi, de par la simple mécanique de l'élévation du niveau de la fiscalité locale, l'État percevra pour lui-même 150 millions d'euros de plus au titre des frais de rôle, auxquels s'ajouteront 200 millions d'euros au titre du produit de la cotisation minimale de taxe professionnelle payée par les plus petites entreprises. Ces 350 millions d'euros de recettes fiscales complémentaires annulent largement le prétendu cadeau que représente la reconduction du contrat de croissance et de solidarité.

Année après année, les collectivités locales sont ainsi mises à contribution pour assurer l'équilibre budgétaire de l'État, alors même qu'elles participent très largement, par leur politique d'investissement, au développement du pays. De ce point de vue, l'état du compte d'avances aux collectivités locales est d'ailleurs sans équivoque et dégage, encore une fois, un excédent qui avoisine aujourd'hui un milliard d'euros.

L'autre inquiétude légitime des élus locaux tient à la compensation des transferts de compétences prévue par la loi relative aux libertés et responsabilités locales.

Outre que nous nous interrogeons avec persistance sur l'absolue pertinence de certains des transferts, qui s'apparentent plutôt à un « délestage » de l'État sur les budgets locaux, le fait est que ces transferts, je le répète, risquent fort de coûter particulièrement cher dans les années à venir.

Monsieur le ministre, pour en revenir à la situation des personnels TOS, je ne conteste pas le choix d'opérer un tel transfert. En revanche, je critique fortement l'insuffisance des moyens financiers prévus à cet effet, que les collectivités auront à subir dans le temps.

Par ailleurs, la non-réalisation par l'État des travaux préventifs ou des travaux de rénovation, notamment pour le réseau routier national transféré aux départements, ne va pas manquer, très rapidement, de grever la situation financière tant des départements que des communes. Nous risquons de voir se rééditer pour les routes ce que nous avons connu, dans les années quatre-vingt, pour les établissements scolaires.

M. le président. Je mets aux voix les crédits, modifiés, de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».

(Ces crédits sont adoptés.)

compte de concours financiers : avances aux collectivités territoriales

M. le président. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Compte de concours financier : avances aux collectivités territoriales » figurant à l'état D.

ÉTAT D

(En euros)

Mission

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Avances aux collectivités territoriales

78 348 624 606

78 348 624 606

Avances aux collectivités et établissements publics, et à la Nouvelle-Calédonie

6 800 000

6 800 000

Avances sur le montant des impositions revenant aux régions, départements, communes, établissements et divers organismes

78 341 824 606

78 341 824 606

M. le président. Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.

Je mets aux voix les crédits du compte de concours financier : « Avances aux collectivités territoriales ».

(Ces crédits sont adoptés.)

M. le président. J'appelle en discussion les articles 51 bis à 51 sexies et les amendements tendant à insérer des articles additionnels, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».

Article 34 et état B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Articles additionnels avant l'article 51 bis

Article additionnel avant l'article 51 bis ou après l'article 51 bis

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° II-201 rectifié, présenté par Mmes Mathon-Poinat, Assassi, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Après l'article 51 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 1611-6 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. L... - La répartition des concours de l'État aux collectivités territoriales tient compte des caractéristiques des territoires ruraux, notamment de leur faible densité de population, de la situation socio-économique de leur population, ainsi que des nouvelles obligations de nature environnementale qui s'imposent aux collectivités de ces territoires. Elle prend en compte notamment, selon des critères adaptés, les charges liées à la longueur des réseaux et des infrastructures de desserte, à la dispersion de l'habitat, aux surcoûts dus au relief et au climat, aux coûts liés à l'entretien et à l'amélioration de la qualité environnementale des espaces et réseaux hydrographiques ainsi que les charges liées à la protection contre les risques. »

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Mme Josiane Mathon-Poinat. Actuellement, 6 130 communes de notre pays, dont 4 314 comptant moins de 500 habitants, répondent à la définition des « communes de montagne » et sont, à ce titre, confrontées à des problématiques particulières de gestion, de programmation de leurs équipements et de mise en oeuvre des politiques locales, tout à fait particulières.

Le moins que l'on puisse dire, c'est que, malgré les éléments retenus dans le cadre de la réforme de la dotation globale de fonctionnement, la situation des communes concernées ne peut être appréhendée de manière tout à fait positive. La faiblesse des moyens financiers et les contraintes spécifiques liées à la géographie sont autant de paramètres qu'il convient de prendre en compte, tout comme les revenus et la demande sociale des habitants eux-mêmes.

Citons quelques paramètres simples et accessibles.

Un certain nombre de départements - l'Allier, les Alpes-de-Haute-Provence, l'Ardèche, l'Ariège, notamment - bénéficient aujourd'hui de la dotation de fonctionnement minimale, la DFM. La situation de ressources des habitants de ces départements devrait, selon nous, être mieux prise en compte. Ainsi, parmi les départements métropolitains où le nombre de foyers non imposables est majoritaire figurent notamment les Alpes-de-Haute-Provence et l'Ariège.

La situation des collectivités locales de montagne, confrontées à des problèmes spécifiques liés à la géographie, doit donc être prise en compte de manière plus pertinente pour la détermination des conditions d'attribution des dotations budgétaires de l'État.

Force est de constater, à la lecture des amendements qui concernent cette question, que le dispositif adopté lors de la discussion de la loi de finances pour 2005 présente une imperfection évidente, car il s'est asphyxié aussi vite qu'il a été créé, ce que nous avions d'ailleurs prévu à l'époque.

La prise en compte des spécificités de la vie locale est l'un des postulats essentiels qui devraient guider la démarche de l'État et donner du sens à la qualité de ses relations avec les collectivités territoriales.

M. le président. L'amendement n° II-223 rectifié, présenté par MM. J. Blanc,  Amoudry,  Hérisson,  Gouteyron,  Faure,  Fournier et  Besse, est ainsi libellé :

Avant l'article 51 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Il est inséré, après l'article L. 1611-6 du code général des collectivités territoriales, un article ainsi rédigé :

« Art. L. ... - La répartition des concours de l'État aux collectivités territoriales tient compte des caractéristiques des territoires ruraux, notamment de leur faible densité de population, ainsi que des nouvelles obligations de nature environnementale qui s'imposent aux collectivités de ces territoires. Elle prend en compte notamment, selon des critères adaptés, les charges liées à la longueur des réseaux et des infrastructures de desserte, à la dispersion de l'habitat, aux surcoûts dus au relief et au climat, aux coûts liés à l'entretien et à l'amélioration de la qualité environnementale des espaces et réseaux hydrographiques ainsi que les charges liées à la protection contre les risques. »

La parole est à M. Jacques Blanc.

M. Jacques Blanc. Monsieur le ministre délégué, retenu ce matin à la réunion du Comité des régions, à Bruxelles, j'ai voulu cependant participer à ce débat budgétaire, car je tiens à faire entendre la voix de ces départements à faible densité de population, incarnés par la Lozère, qui doivent acquitter des charges très importantes par rapport à leur surface. Au passage, je tiens à saluer l'effort fait par ce gouvernement à de multiples occasions, que vous avez rappelées, monsieur le ministre délégué.

Cet amendement tend à souligner la nécessité d'intégrer, pour la répartition des dotations d'État entre les communes de territoires ruraux, des critères objectifs tels la longueur des réseaux, les infrastructures de desserte, la dispersion de l'habitat, les surcoûts dus au relief et au climat, le coût lié à l'entretien, à l'amélioration de la qualité environnementale des espaces et réseaux hydrographiques, ainsi que les charges liées à la protection contre les risques.

Il me semble que nous n'avons pas assez insisté sur cette dimension de la répartition des dotations d'État. Ce sont d'ailleurs les propos, très appréciés, que vous avez tenus, monsieur le ministre délégué, lors de l'assemblée générale de l'Association nationale des élus de la montagne, l'ANEM, qui m'ont incité à intervenir dans ce débat. Je pense en effet qu'il est bon de traduire cette volonté dans les textes.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Les amendements de Mme Mathon-Poinat et de M. Blanc sont intéressants. M. Blanc avait d'ailleurs déjà présenté le sien l'an dernier, et il a visiblement su convaincre sa collègue. Il est donc sur la bonne voie ! (Sourires.)

Ces amendements ont pour objet d'attirer notre attention sur le problème de la répartition des dotations d'État, mais ils ne sont en rien normatifs et ne tendent à proposer aucune mesure concrète. Peut-être pourraient-ils être retravaillés par leurs auteurs et déposés l'année prochaine, mais avec un contenu plus normatif, car des règles claires sont toujours préférables à de simples intentions, fussent-elles louables.

Par ailleurs, je rappelle à M. Blanc que le département de la Lozère est celui dont la DFM a connu la plus forte croissance, puisqu'il a gagné plus de 60 euros par habitant en six ans ! Vous avez donc d'ores et déjà satisfaction, mon cher collègue.

À défaut d'un retrait, je serai contraint d'émettre un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Le Gouvernement partage l'avis de la commission : cette disposition est trop générale et pas assez normative. Certes, l'intention est louable, et je ne peux qu'y souscrire, je le dis d'autant plus volontiers, monsieur Blanc, que vous avez évoqué de façon très sympathique mon passage à l'assemblée générale de l'ANEM.

Je rappelle cependant, après M. le rapporteur spécial, ce qui témoigne d'une réelle complicité entre nous, que les territoires ruraux sont d'ores et déjà protégés, et selon des critères très précis. De surcroît, la DFM du département de la Lozère a effectivement augmenté de manière très sensible, puisqu'elle est exactement le double de celle des autres départements.

M. le président. Monsieur Blanc, l'amendement n° II-223 rectifié est-il maintenu ?

M. Jacques Blanc. Je note que M. le ministre délégué et M. le rapporteur spécial, parlant sous le contrôle du président de la commission des finances, ont tous deux affirmé qu'ils souscrivaient à notre objectif et qu'un certain nombre d'évolutions avaient permis de mieux prendre en compte la réalité de ces départements.

Notre inquiétude concerne surtout l'avenir. Certes, nous reconnaissons que des progrès ont été faits. Toutefois, M. le président de la commission des finances avait indiqué, l'année dernière, qu'il ne manquerait pas d'analyser d'une manière à la fois forte et objective les perspectives d'avenir, celles-là mêmes qui nous préoccupent.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C'est ce que j'ai fait ! (M. le président de la commission des finances brandit un graphique.)

M. Jacques Blanc. Nous donnons acte à la commission des finances et au Gouvernement de l'évolution très positive de la DFM. Mais nous exprimons notre crainte de voir la situation se figer, ce qui aurait pour conséquence en quelque sorte de nous mettre en panne, et ce alors même que vous avez fait naître l'espoir dans nos départements, monsieur le ministre délégué.

Tenant compte des remarques de M. le rapporteur spécial portant sur le caractère peu normatif de ces propositions, je vais retirer cet amendement. Avec ce groupe des vingt-quatre départements les plus pauvres, qui ne sont toujours pas devenus les plus riches, si ce n'est en apparence et de manière pour le moins artificielle, nous allons réfléchir afin de proposer pour ces dotations, lors de l'examen des futurs budgets de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », des évolutions positives.

Pour l'heure, je retire cet amendement.

M. le président. L'amendement n° II-223 rectifié est retiré.

La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je sais combien Jacques Blanc aime jouer « collectif ». Je suggère donc, monsieur le ministre délégué, que nous élargissions cette réflexion. Le nombre de vingt-quatre départements, arrêté en 1992, est en effet un peu réduit. Je pense que l'heure est venue de travailler à soixante-quatre et de remettre ce dossier sur la table afin de lever toutes les ambiguïtés.

Je ne doute pas que M. Blanc sera à nos côtés pour répondre aux exigences de l'équité républicaine.

M. Jacques Blanc. De l'équité et de la solidarité !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-201 rectifié.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 70 :

Nombre de votants 321
Nombre de suffrages exprimés 321
Majorité absolue des suffrages exprimés 161
Pour l'adoption 127
Contre 194

Le Sénat n'a pas adopté.

Article additionnel avant l'article 51 bis ou après l'article 51 bis
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Article 51 bis

Articles additionnels avant l'article 51 bis

M. le président. L'amendement n° II-239, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 51 bis, insérer un article additionnel rédigé comme suit :

I. - Après le premier alinéa de l'article L. 2334-1 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« La dotation forfaitaire par habitant attribuée aux communes et à leurs groupements est comprise dans une fourchette de plus ou moins 20 % par rapport à la moyenne constatée au sein de leur strate démographique. »

II. - Le solde résultant de l'ajustement de la répartition de la dotation forfaitaire proposée au I, est affecté à la dotation de solidarité urbaine visée à l'article L. 2334-15 du même code.

III. - Les I et II font l'objet d'une mise en oeuvre progressive entre le 1er janvier 2007 et le 1er janvier 2012.

Les conditions de ce lissage sont définies par décret.

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Nous avons précédemment insisté sur l'importance d'accroître la péréquation, qui est désormais un objectif de valeur constitutionnelle.

L'un de nos collègues, M. Fourcade, a estimé que ma conception de la péréquation était obsolète. C'est une façon de voir les choses !

Mais quelle est précisément notre idée de la péréquation ? Nous sommes favorables à un accroissement de la part de la péréquation dans la masse de la DGF, à périmètre constant, c'est-à-dire de la part de la justice et de la solidarité. Si l'on considère que cette position est obsolète, cela témoigne en effet d'une certaine conception, que nous ne partageons pas. Au moins, les choses ont le mérite d'être d'une grande clarté.

Vouloir impérativement maintenir une dotation forfaitaire invariable pour toutes les communes, c'est être défavorable à l'augmentation de la péréquation.

Le statu quo pour tout le monde est strictement incompatible, à périmètre constant, avec la péréquation en faveur des communes les plus en difficulté.

Je ne souscris pas aux propos que vous avez tenus, monsieur le ministre délégué. À toutes périodes, des efforts ont été accomplis. Le premier effort a consisté à créer la DSU puis à augmenter son montant. Mais aujourd'hui tout le monde sait que les moyens financiers consacrés à la politique de la ville et aux quartiers en grande difficulté sont insuffisants. On pourrait disserter à l'infini sur l'urbanisme des années cinquante et soixante et sur son héritage, mais, les choses étant ce qu'elles sont, si l'on veut répondre aux défis que constitue la réhabilitation en profondeur des quartiers où l'on vit mal, il faut de l'argent, beaucoup plus d'argent que ce que donne la DSU. Par conséquent, si l'on pense que c'est une véritable priorité, il faut y affecter les moyens.

Dans le rapport qu'ils ont consacré à la péréquation, MM. Guy Gilbert et Alain Guengant soulignent que l'appréciation du niveau global de correction des inégalités demeure « délicate en l'absence d'un chiffrage précis, par les pouvoirs publics, du degré souhaitable de réduction des inégalités territoriales, tant dans la loi que désormais dans la Constitution ».

Si le principe dorénavant constitutionnel d'autonomie financière est précisé dans une loi organique et fait l'objet d'un suivi spécifique, tel n'est pas le cas du principe de péréquation.

C'est la raison pour laquelle nous proposons avec cet amendement que la dotation forfaitaire par habitant attribuée aux communes et à leurs groupements soit comprise dans une fourchette de plus ou moins 20 % par rapport à la moyenne constatée au sein de leurs strates démographiques, le solde résultant de l'ajustement de la répartition de la dotation forfaitaire étant affecté à la péréquation. En l'espèce, nous visons la dotation de solidarité urbaine, mais on pourrait élargir le dispositif à la DSR, dès lors que l'on reverrait ses critères de répartition, ce qui me paraît nécessaire si l'on veut plus de péréquation.

Notre proposition n'est nullement obsolète, mais est au contraire l'expression concrète de la solidarité entre les collectivités locales. Certes, la mise en oeuvre d'une telle mesure exige du temps. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous prévoyons un dispositif de lissage.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. On peut comprendre les raisons qui ont conduit M. Sueur à présenter cet amendement : il veut augmenter la capacité péréquatrice de la DGF.

Je rappelle cependant que la DGF a aussi pour fonction de couvrir un certain nombre de charges de base des collectivités. C'est d'ailleurs ce pour quoi elle a été créée. La dotation forfaitaire concourt à couvrir ces charges de base générales que toutes les collectivités doivent assumer.

Si nous comprenons l'objectif, la méthode que nous propose M. Sueur ne nous semble pas la bonne. En effet, réduire, au nom de la péréquation, la dotation forfaitaire, ou décider d'une moindre augmentation, alors que, nous le savons tous, les dépenses qu'elle doit couvrir augmentent, c'est condamner certaines communes à ne plus voir la totalité de leurs charges couvertes.

Je signale à cet égard qu'à la suite d'un débat similaire que nous avons eu lors de l'examen, en première partie, d'un amendement déposé par notre collègue François Marc, celui-ci avait accepté de le retirer pour cette raison.

Mon cher collègue, je vous demande de bien vouloir aujourd'hui faire de même. À défaut, la commission émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Comme vient de le dire M. le rapporteur spécial, votre intention, à l'évidence, n'est pas illégitime, monsieur Sueur. Elle s'inscrit d'ailleurs dans l'esprit de la réforme de 2005.

Néanmoins, j'attire votre attention sur les risques que ferait courir votre amendement qui, s'il était adopté, pourrait se traduire pour un certain nombre de communes par des pertes de ressources en ce qu'il réduirait très vraisemblablement les montants de dotation forfaitaire qui leur sont attribués. Évidemment, tel n'est pas votre objectif.

Je vous rappelle que le plan de cohésion sociale lancé par Jean-Louis Borloo garantit une augmentation régulière de la DSU pendant cinq ans. Comme je l'ai précédemment précisé, cela représente 120 millions d'euros par an. On ne peut quand même pas en faire abstraction !

Pour toutes ces raisons, comme M. le rapporteur spécial, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement.

M. le président. Monsieur Sueur, l'amendementn° II-239 est-il maintenu ?

M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le président, je comprends parfaitement les propos de M. le ministre et de M. le rapporteur, mais ne puis malheureusement y souscrire.

On peut discuter les modalités pratiques de cet amendement, mais, sur le fond, je conteste que son adoption entraînerait une perte de ressources pour les collectivités locales de ce pays. Les sommes seraient identiques, mais simplement réparties différemment.

Il n'y a pas trente-six solutions. Si l'on veut que les dotations versées à chaque collectivité restent inchangées, mais que la DSU soit dans le même temps augmentée, alors il faut accroître la masse. Cela signifie qu'il faut accroître les concours de l'État aux collectivités locales. Or il n'est pas prévu d'aller au-delà du pourcentage qui a été inscrit dans le projet de loi de finances.

Il y a donc entre nous un désaccord de fond. Toutes les associations d'élus demandent finalement que leurs ressortissants touchent en année N +1 au moins la même chose qu'en année N. Mais, avec ce système, on arrive aujourd'hui à un taux de péréquation réel de l'ordre de 7 % de la masse de la DGF. C'est très faible, parce que la dotation forfaitaire, par définition, n'est pas péréquatrice. La dotation d'intercommunalité, quant à elle, ne l'est guère parce qu'elle ne prend que peu en considération le niveau de richesse de la structure intercommunale. Enfin, la DSR aide globalement les communes rurales, mais elle est peu péréquatrice en vérité. Il reste la DSU, dont on pourrait d'ailleurs améliorer la formule.

Si l'on pense que la péréquation est une priorité, il faut avoir le courage d'en tirer les conséquences. Sinon, on aura beau jeu de réclamer toujours plus de solidarité pour les quartiers en difficulté, et des moyens en conséquence, tout en demandant que la situation reste inchangée pour les autres, y compris pour ceux qui vont très bien.

Telle n'est pas notre conception. Il y a là matière à un débat de fond et à un choix politique fort. Voilà pourquoi je maintiens cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-239.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune ; les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° II-219 rectifié est présenté par MM. J. Blanc, Jarlier, Hérisson, Amoudry, Bailly, Gouteyron, Faure, Fournier, Besse et Humbert.

L'amendement n° II-238 est présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Avant l'article 51 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le deuxième alinéa de l'article L. 2334-4 du code général des collectivités territoriales est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Pour les communes de montagne, il est minoré d'une partie de leur dotation proportionnelle à la superficie prévue au cinquième alinéa (2°) de l'article L. 2334-7 du présent code, correspondant à la majoration par hectare dont elles bénéficient par rapport aux autres communes. »

La parole est à M. Jacques Blanc, pour présenter l'amendement n° II-219 rectifié.

M. Jacques Blanc. En 2005, la spécificité des communes de montagne a, de manière fort heureuse, été reconnue par une majoration de la dotation attribuée en fonction de la superficie. C'est ainsi que les communes de plaine bénéficient d'une dotation proportionnelle à la superficie de 3 euros par hectare, et les communes de montagne de 5 euros par hectare.

Cependant, comme je l'avais déjà fait observer l'année dernière, cette compensation de charge est prise en considération dans le calcul du potentiel financier, ce qui vient en partie annihiler la prise en compte de cette spécificité.

Cet amendement vise par conséquent à « éviter d'enlever d'une main ce que l'on donne de l'autre », pour reprendre les déclarations qu'a faites, au cours du quatre-vingt-neuvième congrès des maires et des présidents de communautés de France, Jean-François Copé, ministre délégué au budget, lors d'un débat sur les finances locales. À cette occasion, il s'était d'ailleurs prononcé en faveur d'un examen de la situation spécifique des communes de montagne, les élus ayant fait part de leur déception.

Cet amendement se justifie par la volonté que cette spécificité soit bien reconnue et que l'on ne reprenne pas d'un côté ce qui a été donné de l'autre.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour présenter l'amendement n° II-238.

M. Jean-Pierre Sueur. J'ajouterai à ce que vient de dire Jacques Blanc qu'on mesure ici l'un des effets tout à fait pervers de la prise en compte de la dotation proportionnelle pour le calcul du potentiel financier. En effet, certaines communes dont les ressources sont faibles ou qui se trouvent en situation de quasi pauvreté se trouvent injustement défavorisées. C'est aberrant !

C'est pourquoi nous proposons tout simplement avec cet amendement de supprimer ce mécanisme, qui porte atteinte à l'équité, pour aller vers plus de péréquation.

M. le président. L'amendement n° II-222 rectifié, présenté par MM. J. Blanc, Amoudry, Hérisson, Gouteyron, Faure, Fournier et Besse, est ainsi libellé :

Avant l'article 51 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après la première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 2334-4 du code général des collectivités territoriales, est insérée une phrase ainsi rédigée :

« Pour les communes classées montagne et dont la part de la garantie prévue au huitième alinéa (4°) de l'article L. 2334-7 représente plus de la moitié de la dotation forfaitaire, le potentiel financier est égal à son potentiel fiscal, majoré du montant de la dotation forfaitaire perçu par la commune l'année précédente, hors la part prévue au sixième alinéa (3º) de l'article L. 2334-7 et dans la limite de 25 % du montant du potentiel fiscal. »

La parole est à M. Jacques Blanc.

M. Jacques Blanc. Dans le même esprit, pour éviter de pénaliser les communes de montagne dont le montant de la dotation forfaitaire est très élevé - ce qui signifie qu'elles sont en situation difficile - du fait de la part prépondérante de la dotation de garantie par rapport à leur potentiel fiscal, et afin d'appréhender de manière plus réaliste leur richesse, nous proposons de limiter la proportion de cette dotation dans le calcul du potentiel financier à un niveau réaliste pour les communes dont le complément de garantie représente au moins 50 % de la dotation forfaitaire.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Chers collègues, il faut choisir ! On ne peut pas tout à la fois souhaiter augmenter les dotations de péréquation au motif que certaines collectivités sont moins riches que d'autres et refuser de mesurer la richesse de chacune d'entre elles pour calculer l'effort de péréquation pertinent.

Or la dotation forfaitaire - M. Sueur a proposé, dans son précédent amendement, de la réduire, tandis que vous suggérez de ne pas en tenir compte dans le calcul du potentiel financier, ce qui est plus simple - fait partie de la richesse intrinsèque de la collectivité. En effet, elle lui est acquise, elle ne diminue pas et même augmente, qu'il s'agisse de la part superficiaire ou de la fraction versée pour la montée et la descente de la colline !

C'est seulement une fois cette dotation forfaitaire connue, ajoutée aux autres richesses mesurées par le potentiel fiscal de la collectivité, que l'on se rend compte de la situation financière de cette collectivité par rapport aux autres et que l'on peut corriger, peu ou prou, les disparités. J'admets tout à fait que la correction n'est pas totale par des dotations de péréquation. Mais on ne peut pas, d'un côté, vouloir augmenter la péréquation et, de l'autre, choisir d'enlever la mesure de la richesse réelle.

Donc, si vous voulez tendre vers plus de péréquation, vous devez retirer vos amendements. Sinon, vous faussez le calcul, vous cassez le thermomètre (Sourires), et vous supprimez l'égalité des collectivités de France devant la mesure de la richesse. Et, sans cette nécessaire égalité, on ne pourra pas justifier la péréquation, c'est-à-dire donner plus aux uns et moins aux autres.

Ces trois amendements trahissant votre intention, qui est tout à fait louable, je vous demande, chers collègues, de bien vouloir les retirer. Sinon, je serai contraint de demander au Sénat de les rejeter.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Il est vrai que les communes de montagne bénéficient d'une mesure favorable pour le calcul du montant de leur dotation forfaitaire, qui est calculée sur la base de 5 euros et non de 3 euros.

Mais il est juste, aussi, que le montant résultant de ce calcul soit bien pris en compte pour l'appréciation du potentiel financier, puisque, à l'évidence, cela constitue une ressource garantie pour les communes, comme d'ailleurs l'ensemble de la dotation forfaitaire.

Les charges qui incombent aux communes de montagne font déjà l'objet d'un traitement spécifique dans le calcul des dotations de péréquation, et il ne me paraît pas utile de modifier cette situation.

Le Gouvernement est donc défavorable à ces trois amendements.

M. le président. Monsieur Blanc, voulez-vous vraiment casser le thermomètre ? (Sourires.)

M. Jacques Blanc. Le médecin que je suis sait qu'il faut toujours se méfier et prendre la vraie température ! Mais, en l'espèce, nous n'avons pas aujourd'hui le moyen objectif d'apprécier exactement la situation financière de ces communes. Et le fait d'introduire, pour le calcul de la richesse, la dotation qui est attribuée à la collectivité en raison de sa pauvreté est contradictoire.

J'accepte de retirer mes amendements, mais je demande à la commission des finances d'essayer de trouver une réponse plus adaptée. Il est vraiment difficile de comprendre, je le répète, que la somme supplémentaire accordée à une collectivité compte tenu de son degré de pauvreté soit introduite dans le calcul de sa richesse.

M. le président. Les amendements nos II-219 rectifié et II-222 rectifié sont retirés.

La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je comprends bien ce que souhaite Jacques Blanc : au fond, pour mesurer la richesse relative d'une commune ou d'un département, il faut enlever les dotations de garantie. Nous pouvons avancer dans cette voie, monsieur le ministre délégué, et estimer que le calcul s'effectuera par rapport à la population. Je suis très ouvert à cette proposition.

M. Jacques Blanc. Pas uniquement la population !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Notamment la population !

M. Jacques Blanc. Me permettez-vous de vous interrompre, monsieur le président de la commission des finances ?

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je vous en prie, mon cher collègue.

M. le président. La parole est à M. Jacques Blanc, avec l'autorisation de M. le président de la commission des finances.

M. Jacques Blanc. Je reviens à ce que j'avais indiqué au départ. Dans les territoires ruraux, le critère de population n'est pas le bon, et le retenir, c'est faire fausse route.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Soit !

M. Jacques Blanc. Il faut introduire les charges que j'évoquais ce matin.

M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Nous prendrons d'autres critères.

Je voudrais vous en convaincre, il est temps de considérer que des dotations garanties font partie de la richesse relative.

Vous vous dites certainement que, si l'on tient compte de ces dotations, dont le montant n'est pas toujours le même, vous n'aurez plus droit à celles qui sont accordées aux collectivités les plus pauvres. Si vraiment vous souhaitez que vos collectivités soient considérées comme très modestes, nous pourrons toujours décider d'enlever ces ressources garanties du calcul de la richesse. La discussion est possible. Mais vous ne pouvez pas demander à bénéficier de dotations garanties et en faire ensuite abstraction pour le calcul d'un supplément.

Je sens bien une résistance de votre part...

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Nous avons déjà eu ce débat l'an dernier, mais je suis à votre disposition pour que nous reprenions nos réflexions ensemble dans les prochaines semaines.

M. le président. Monsieur Sueur, l'amendement n° II-238 est-il maintenu ?

M. Jean-Pierre Sueur. Je vais également retirer cet amendement, compte tenu du débat qui a eu lieu.

Mais un problème continue de se poser, qui n'est pas lié aux dotations de péréquation ; il tient à l'architecture nouvelle de la dotation dite forfaitaire, à l'intérieur de laquelle figure la dotation de superficie, la deuxième après la dotation de base, et la dotation de garantie, la quatrième après la dotation de compensation de la taxe professionnelle.

Le système est d'une grande perversité, et nous en avons ici un exemple. Si M. Copé, un ministre délégué au budget qui ne parle pas à la légère a dit qu'il ne fallait pas, au sujet des communes de montagne, reprendre d'une main ce que l'on avait donné de l'autre, c'est que à l'évidence, monsieur le ministre délégué, même certains membres du Gouvernement ont le sentiment que ce nouveau dispositif de la dotation forfaitaire suscite des situations paradoxales. Donc, il me paraît nécessaire de poursuivre la réflexion sur ce point.

M. le président. L'amendement n° II-238 est retiré.

L'amendement n° II-79 rectifié, présenté par MM. Masson,  Jarlier,  Adnot,  Alduy,  Balarello,  Barraux,  Baudot,  Beaumont,  Belot,  Bernardet et  Besse, Mmes Bout et  Brisepierre, MM. Cambon,  Cléach,  Darniche,  Del Picchia et  Dériot, Mme Desmarescaux, MM. P. Dominati et  Dulait, Mme B. Dupont, MM. J.L. Dupont,  Esneu et  Faure, Mmes Garriaud-Maylam et  G. Gautier, MM. A. Giraud,  Girod et  Goulet, Mme Gousseau, MM. Grillot et  Hérisson, Mme Hummel, M. Huré, Mme Létard, MM. Longuet,  Milon et  Othily, Mme Payet, MM. Portelli et  Revet, Mme Sittler, MM. Souvet,  Türk,  Vendasi et  Virapoullé, est ainsi libellé :

Avant l'article 51 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - L'article L. 2334-16 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les communes dont la population est inférieure à 5 000 habitants, dont une partie de la population est située en zone urbaine sensible et qui font partie d'une agglomération de plus de 5 000 habitants. Pour les communes concernées par le présent alinéa, la dotation de solidarité rurale n'est pas cumulable avec la dotation de solidarité urbaine ».

II. - Les dispositions du I entrent en application le 1er janvier 2007.

La parole est à M. Claude Belot.

M. Claude Belot. Il s'agit de mettre fin à ce qui me semble une anomalie. Vous le savez, des zones urbaines sensibles ont été dessinées en France en fonction d'une réalité sociale malheureusement difficile. Or il se trouve que seize communes, ni plus ni moins, auparavant classées en zones rurales et bénéficiant, à ce titre, de la dotation de solidarité rurale, ne peuvent bénéficier de la DSU, alors qu'elles supportent toutes la charge particulière des zones urbaines sensibles, au motif que cette DSU, dont le montant est multiplié notamment d'un coefficient proportionnel à la population située en ZUS, ne peut pas être attribuée à des communes de moins de 5 000 habitants.

Cette situation, absurde, est totalement injuste à l'égard de ces communes. C'est la raison pour laquelle des souhaits ont été formulés pour qu'elle soit réexaminée, au nom d'une certaine cohérence. Je rappelle que cette question ne concerne que seize communes de moins de 5 000 habitants.

Peut-être cela tient-il à l'histoire. On a d'abord créé les zones urbaines éligibles à la DSU ; on a ensuite institué les zones sensibles, mais sans tenir compte de la législation antérieure.

Monsieur le ministre délégué, un amendement identique a été présenté à l'Assemblée nationale. Et, fort logiquement, vous aviez répondu qu'il n'était pas possible de cumuler la dotation de solidarité rurale et la dotation de solidarité urbaine, ce qui était cohérent. Mais l'amendement a été modifié de façon que précisément les communes ne puissent pas bénéficier cumulativement de la DSR et de la DSU. Cette disposition peut donc se justifier à tous points de vue.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. La demande, formulée au Sénat par M. Belot et un nombre très important de nos collègues, de rendre éligibles à la DSU certaines communes de moins de 5 000 habitants dès lors qu'elles sont en ZUS apparaît pertinente. J'aurais souhaité connaître l'avis du Gouvernement avant de me prononcer.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Monsieur Belot, à l'évidence, votre remarque n'est pas infondée, et vous avez eu la sagesse, et l'habileté, de vous renseigner sur les propos que j'ai tenus à l'Assemblée nationale, ce qui ne me surprend pas de votre part. (Sourires.)

Mais il y a un autre argument que je n'ai pas utilisé à l'Assemblée nationale, puisque ce n'était pas le sujet.

En fait, si je vous suis bien, votre proposition aurait pour conséquence d'intégrer quatorze communes de moins de 5 000 habitants dans le dispositif, mais, compte tenu du critère des ressources et des charges, d'exclure des communes de plus de 5 000 habitants. Donc, paradoxalement, votre proposition aboutirait à une inégalité supplémentaire. Cela, vous ne pouviez pas le savoir, puisque ces chiffres m'ont été communiqués assez récemment. Voilà pourquoi je préférerais que vous retiriez cet amendement.

M. le président. Monsieur Belot, l'amendement n° II-79 rectifié est-il maintenu ?

M. Claude Belot. Monsieur le ministre délégué, je ne vais pas me battre. Je sais que nous touchons à une réalité complexe, mais je ne souhaite pas créer une nouvelle injustice en en supprimant une autre.

Néanmoins, il faut expliquer à ces communes de moins de 5 000 habitants pourquoi elles disposent de moyens bien inférieurs à ceux d'une municipalité voisine de 5 002 habitants, par exemple.

Cette situation, incohérente, n'est pas tenable, et il faudra que vous traitiez ce sujet. Cela dit, je retire mon amendement.

M. le président. L'amendement n° II-79 rectifié est retiré.

Articles additionnels avant l'article 51 bis
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Article 51 ter

Article 51 bis

Le quatrième alinéa du 4° de l'article L. 2334-7 du code général des collectivités territoriales est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Toutefois, pour les communes dont la garantie par habitant est supérieure à 1,5 fois la garantie par habitant moyenne constatée l'année précédente, le taux de progression de la garantie est nul. »

M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les trois premiers sont identiques.

L'amendement n° II-196 est présenté par Mmes Mathon-Poinat,  Assassi,  Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

L'amendement n° II-220 rectifié est présenté par MM. J. Blanc,  Jarlier,  Amoudry,  Hérisson,  Gouteyron,  Faure,  Fournier et  Besse.

L'amendement n° II-241 est présenté par M. Bockel.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme  Hélène Luc, pour présenter l'amendement n° II-196.

Mme Hélène Luc. Cet amendement est défendu.

M. le président. La parole est à M. Jacques Blanc, pour présenter l'amendement n° II-220 rectifié.

M. Jacques Blanc. Cet amendement vise à supprimer la disposition, adoptée à l'Assemblée nationale, prévoyant le gel de la dotation de garantie pour les communes bénéficiant d'une dotation de garantie de plus de 1,5 fois la dotation de garantie moyenne.

Il convient d'avoir pour objectif le maintien d'une croissance significative à l'ensemble des composantes de la dotation forfaitaire des communes, particulièrement de celles dont la dotation de garantie représente une proportion importante de leur dotation forfaitaire, et, par ailleurs, dont le potentiel fiscal et les bases de taxe professionnelle sont, hélas ! généralement faibles.

En effet, pour certaines communes, la part de la garantie devient prépondérante au sein de la dotation forfaitaire et conduit à une évolution de cette dotation très inférieure à l'inflation, a fortiori si toute progression leur est supprimée. Ces communes risquent ainsi de perdre, au niveau de la dotation forfaitaire, ce qu'elles gagnent au niveau des dotations de solidarité ou de péréquation.

On relève, par exemple, s'agissant des communes de montagne de la première strate, c'est-à-dire de moins de 500 habitants, que, pour l'année 2006, la part du complément de garantie dans la dotation forfaitaire s'établit à 47,56 % pour les communes de montagne, alors que, pour l'ensemble des communes de la métropole, elle représente 41,93 %.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. La garantie, voilà tout de même quelque chose de bien !

M. le président. L'amendement n° II-241 n'est pas soutenu.

L'amendement n° II-230 rectifié, présenté par MM. J. Blanc,  Jarlier,  Amoudry,  Hérisson,  Gouteyron,  Faure,  Fournier et  Besse, est ainsi libellé :

I. - Compléter le texte proposé par cet article pour compléter le quatrième alinéa du 4° de l'article L. 2334-7 du code général des collectivités territoriales par une phrase ainsi rédigée :

Pour les communes dont la garantie représente plus de 40% de la dotation forfaitaire, cette garantie évolue selon un taux égal au taux de progression de l'ensemble des ressources de la dotation globale de fonctionnement.

II. - En conséquence, au premier alinéa de cet article, remplacer les mots :

une phrase ainsi rédigée

par les mots :

deux phrases ainsi rédigées

La parole est à M. Jacques Blanc.

M. Jacques Blanc. Il s'agit d'un amendement de repli.

M. le président. L'amendement n° II-221 rectifié bis, présenté par MM. J. Blanc,  Jarlier,  Amoudry,  Hérisson,  Gouteyron,  Faure,  Fournier et  Besse, est ainsi libellé :

I. - Compléter le texte proposé par cet article pour compléter le quatrième alinéa du 4° de l'article L. 2334-7 du code général des collectivités territoriales par une phrase ainsi rédigée :

Pour les communes dont la garantie représente plus de 40% de la dotation forfaitaire, cette garantie évolue selon un taux égal au taux de progression de la dotation de base prévue au deuxième alinéa de ce même article.

II. - En conséquence, au premier alinéa de cet article, remplacer les mots :

une phrase ainsi rédigée

par les mots :

deux phrases ainsi rédigées

La parole est à M. Jacques Blanc.

M. Jacques Blanc. Il s'agit également d'un amendement de repli.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Très cher Jacques Blanc, afin que nous parvenions tous à comprendre, je souhaiterais vous poser une question simple et claire.

Vous nous avez expliqué que plus de péréquation était nécessaire pour les communes les plus pauvres. J'entends bien. L'article 51 bis a justement pour objet, en gelant la dotation de garantie, de libérer les possibilités financières pour augmenter la péréquation. Or vous déposez un amendement tendant à supprimer cet article. Une telle démarche va donc réduire les possibilités de péréquation !

Vous ne pouvez pas, me semble-t-il, prétendre vouloir plus de péréquation et plus de garantie, nous n'y parviendrons pas. Il faut choisir !

J'ai compris que tout le monde avait clairement opté pour la péréquation, d'ailleurs introduite dans la Constitution. Certes, elle est encore très imparfaite aux yeux de ceux qui en bénéficient, mais j'observe qu'elle est également tout à fait parfaite pour ceux qui n'en bénéficient pas, et ils sont un certain nombre !

Monsieur Blanc, vos amendements sont contraires à l'esprit de ceux que vous avez précédemment défendus. En effet, nous aurons beaucoup de peine à vous donner satisfaction à l'avenir : nous ne pourrons pas faire plus aujourd'hui, si vous demandez plus de garantie une fois et plus de péréquation la fois d'après ! Je vous demande donc instamment de retirer vos amendements, sinon la commission émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Le Gouvernement émet le même avis.

Je tiens à insister simplement sur un point : supprimer l'article 51 bis, c'est se priver de 13,5 millions d'euros que l'on pourrait affecter à la péréquation. On ne peut pas tout à la fois réclamer un effort de péréquation et le torpiller ensuite !

M. le président. Monsieur Jacques Blanc, l'amendement n° II - 220 rectifié est-il maintenu ?

M. Jacques Blanc. Je vais le retirer, mais je ne crois pas que l'on puisse suivre votre raisonnement, monsieur le ministre délégué. En effet, il n'est pas question de réduire la péréquation ; il s'agit de faire en sorte que la dotation de garantie, dont la part peut être importante pour certaines communes, ne soit pas figée.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Voyons, monsieur Blanc, vous obtiendrez ainsi une réduction de la péréquation !

M. Jacques Blanc. Il y a là, me semble-t-il, un malentendu.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Retirez donc vos amendements et nous étudierons le problème !

M. Jacques Blanc. Nous ne souhaitons pas diminuer la péréquation de 13,5 millions d'euros.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Cela fera moins de péréquation pour ceux qui en ont besoin !

M. Jacques Blanc. Nous voulons simplement que certaines communes, dont la situation est telle que la dotation de garantie s'élève à une fois et demie la dotation de garantie moyenne, ne voient pas cette dernière figée.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Vous admettez donc que leur dotation est une fois et demie au-dessus de la moyenne !

M. Jacques Blanc. Oui, et cela prouve vraiment que leur situation est extrêmement difficile. Nous souhaitons simplement que l'évolution ne soit pas bloquée et que l'on aide ceux qui en ont le plus besoin. Si l'on en donne un peu plus à ceux qui en ont le plus besoin, il y en aura évidemment un peu moins pour les plus privilégiés...

Mais, de grâce, ne présentez pas nos amendements comme tendant à la diminution de la solidarité. Au contraire, il s'agit de faire en sorte que les communes les plus pauvres ne soient pas pénalisées par le gel de leur dotation de garantie.

Vous l'aurez compris, je maintiens mes amendements.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Sueur. Si ces amendements sont soumis au vote, nous serons amenés à nous abstenir. Je tiens à vous en expliquer les raisons.

Tout d'abord, depuis tout à l'heure, nous parlons de péréquation, mais j'observe que la question qui nous occupe aujourd'hui porte sur la dotation dite forfaitaire et, au sein de la dotation forfaitaire, sur la dotation de garantie, c'est-à-dire une sous-dotation de la dotation forfaitaire.

Il s'agit de déterminer comment doit évoluer cette dotation de garantie. Dans un esprit de péréquation au sein de la partie de la dotation forfaitaire appelée dotation de garantie, les députés ont proposé un plafonnement. Pour comprendre le problème, je me permets de citer un extrait de la revue Décision locale qui l'explique extrêmement bien.

S'agissant de la dotation dite de garantie, il convient de distinguer deux catégories de communes : « Les premières, les plus nombreuses, ont une DGF très supérieure à celle des autres communes, en raison de différents héritages du passé, comme, par exemple, une forte activité touristique. Des villes comme Vichy ou Lourdes ont ainsi une DGF trois fois plus élevée que d'autres communes de même catégorie.

« Par conséquent, supprimer la dotation de garantie du potentiel financier des communes minorerait artificiellement la prise en compte de la richesse de certaines d'entre elles. Cela irait à l'encontre du renforcement de la péréquation, promu par la réforme de la DGF.

« Cependant, le problème est que la seconde catégorie de communes, qui perçoivent une dotation de garantie, est constituée par celles qui ont bénéficié de dispositifs de péréquation au sein de la DGF, entre 1985 et 1993. Elles sont néanmoins beaucoup moins nombreuses. »

En bref, il existe deux catégories de bénéficiaires de cette dotation de garantie : les villes, nombreuses, qui vont relativement bien, et les communes que visent nos collègues.

C'est le mécanisme qui est pervers. En effet, pour la première catégorie de communes, je souscris complètement aux propos de M. le rapporteur spécial : le plafonnement prévu au sein de la sous-dotation de la dotation forfaitaire est effectivement justifié et péréquateur. En revanche, une telle disposition a un effet pervers pour la seconde catégorie de communes. Malheureusement, nous ne trouvons aucune solution pour corriger ou supprimer cet effet pervers.

Nous nous abstiendrons donc de voter de telles mesures puisque le plafonnement est justifié pour la première catégorie desdites communes, mais, parce qu'il ne l'est pas pour la seconde, nous pensons que nos collègues ont raison de vouloir réparer cette injustice.

M. le président. La parole est à M. Yves Fréville, pour explication de vote.

M. Yves Fréville. Il y a une part de vérité dans les propos de Jacques Blanc et de Jean-Pierre Sueur, et seulement une part. Il en est de ce sujet comme du célèbre pâté d'alouette, composé d'un cheval et d'une alouette : le problème est de définir la proportion de cheval qu'il faudra maintenir et la proportion d'alouette qu'il faudra corriger.

S'agissant du cheval, le complément de garantie est le cimetière de toutes les dotations et de tous les impôts morts depuis 1966. Si Vichy et Lourdes ont effectivement les DGF de loin les plus fortes de France, c'est parce qu'une taxe locale au taux de 8,5 % pesait sur le chiffre d'affaire des cafés, hôtels et restaurants. Une telle taxe a rapporté à ces villes des sommes importantes, et notre système de garantie permet de conserver une ressource dont on a bénéficié à un moment donné, et ce ad vitam aeternam.

J'ai fait quelques calculs : sur les deux milliards d'euros de complément de garantie visés à l'article 51 bis, un cinquième correspond à la seule ville de Paris. C'est en effet elle qui bénéficie le plus de ce système de garantie. Le voilà, le cheval ! Il est bien normal que, à son égard, un écrêtement soit institué.

S'agissant de l'alouette, monsieur le ministre délégué, j'ai pris l'exemple du Puy-de-Dôme, et il apparaît, toujours d'après mes calculs, que 126 communes sont touchées par la réduction à 0 % du taux de croissance de la dotation de garantie. Cela représente une perte de 100 000 euros, secondaire certes ; toutefois, il faudra absolument trouver des solutions pour les communes qui sont du côté de l'alouette. Nous pourrions peut-être prévoir une augmentation de la dotation forfaitaire de cinq ou six euros par hectare. Le comité des finances locales pourra d'ailleurs y travailler.

D'autres villes sont concernées par le problème ; c'est le cas des communes minières du Pas-de-Calais, telles que Bruay ou Sallaumines. Il faudrait peut-être également engager une réflexion à leur sujet.

Toutefois, je maintiens mon avis très favorable à cette mesure parce qu'elle constitue le seul moyen d'augmenter la dotation de garantie.

M. le président. Monsieur Blanc, les amendements nos II-220 rectifié, II-230 rectifié et II-221 rectifié bis sont-ils maintenus ?

M. Jacques Blanc. Non, je les retire, monsieur le président.

M. le président. Les amendements nos II-220 rectifié, II-230 rectifié et II-221 rectifié bis sont retirés.

Je mets aux voix l'amendement n° II-196.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 51 bis.

(L'article 51 bis est adopté.)

Article 51 bis
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Articles additionnels après l'article 51 ter

Article 51 ter

Le dernier alinéa de l'article L. 3334-3 du code général des collectivités territoriales est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« En 2005, la dotation forfaitaire du département de Paris est égale à la dotation forfaitaire qu'il a perçue l'année précédente indexée selon le taux de progression fixé en application du quatrième alinéa.

« À compter de 2006, la dotation forfaitaire du département de Paris est égale à la dotation forfaitaire qu'il a perçue l'année précédente indexée selon le taux de progression correspondant à la moyenne pondérée des deux taux fixés par le comité des finances locales en application du cinquième alinéa. » - (Adopté.)

Article 51 ter
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Article 51 quater

Articles additionnels après l'article 51 ter

M. le président. Je suis d'abord saisi de trois amendements identiques.

L'amendement n° II-198 est présenté par Mmes Mathon-Poinat,  Assassi,  Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

L'amendement n° II-214 rectifié bis est présenté par MM. J. Blanc,  Hérisson,  Gouteyron,  Faure,  Fournier et  Besse.

L'amendement n° II-236 est présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l'article 51 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Au deuxième alinéa de l'article L. 3334-6 du code général des collectivités territoriales, les mots : « et de la dotation forfaitaire prévue à l'article L. 3334-3, hors les montants antérieurement perçus au titre de la compensation prévue au I du D de l'article 44 de la loi de finances pour 1999 » sont supprimés.

II. - La perte de recettes pour l'État résultant de l'application de cette disposition est compensée à concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Hélène Luc, pour présenter l'amendement n° II-198.

Mme Hélène Luc. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, cet amendement porte sur la question essentielle de la dotation globale de fonctionnement des départements.

Les outils de péréquation et de détermination des capacités financières de chaque collectivité sont loin d'être satisfaisants, c'est le moins que l'on puisse dire. Nous avons notamment eu l'occasion de le rappeler lors de la discussion portant sur la seconde partie du projet de loi de finances pour 2006 qui comportait maintes dispositions concernant les collectivités territoriales.

Ainsi en est-il de la notion de potentiel financier, qui a fini par correspondre, relativement, à une forme de gommage des inégalités de ressources entre collectivités, notamment dès lors que ledit potentiel inclut la dotation forfaitaire.

Ainsi, ma collègue Marie-France Beaufils, intervenant sur la réforme de la DGF au nom de mon groupe, a pu dire que « La notion de potentiel financier constitue donc la première évolution significative de la réforme. Cette modification aura une certaine influence sur l'évolution ultérieure de la DGF des communes, qu'il s'agisse de la dotation forfaitaire ou des dotations de solidarité. » Et elle avait raison !

Les faits sont aujourd'hui manifestes : des départements comme la Creuse, la Lozère, le Gers ou le Cantal voient ainsi leur potentiel financier largement majoré par leur dotation de telle sorte qu'ils ne tirent plus de la solidarité nationale tout ce qui devrait leur revenir de manière tout à fait légitime.

Si l'on prend le cas de la Creuse, le potentiel fiscal n'y représente ainsi que 50,3 % du potentiel financier ; pour la Lozère, ce taux est de 47,9 % ; pour le Gers, il est de 57,6 % ; et pour les Côtes-d'Armor à peine de 60 %. Il s'agit là de départements qui sont tous éligibles à la dotation minimale.

De fait, l'écart de ressources découlant de la seule prise en compte du potentiel fiscal est de 1 à 4,4, tandis qu'il est lissé de 1 à 2,4 si l'on retient le critère du potentiel financier.

Cet amendement vise donc, concrètement, à mieux prendre en compte la réalité des inégalités de ressources entre collectivités départementales en revenant sur une réforme qui crée sans doute beaucoup plus de difficultés nouvelles qu'elle n'apporte de solutions aux problèmes posés.

De plus, dans un contexte bouleversé, s'agissant des champs de compétence des uns et des autres, par le transfert des personnels TOS de l'éducation nationale ou des DDE, par la montée en charge des dépenses liées à la dépendance et à l'autonomie, force est de constater qu'à défaut d'apporter une réponse parfaitement satisfaisante aux départements, nous nous trouvons confrontés à des difficultés majeures.

Quel sens pourra avoir la décentralisation si elle conduit les départements, sous la pression des coûts, à réduire la qualité du service public rendu à la population ou à trouver des moyens par le biais d'un accroissement de la pression fiscale ? Vous savez bien que le danger est réel puisque nous avons déjà commencé à constater un mouvement en ce sens.

Des menaces pèsent, de fait, sur la stricte application du principe d'égalité, si désormais, parce que l'on réside dans tel ou tel département, on ne peut disposer d'une réponse collective adaptée aux besoins sociaux.

C'est bien ce qui est sous-tendu dans la démarche actuelle en matière de définition des concours de l'État aux collectivités territoriales et ici, singulièrement, aux départements. C'est ce qu'il convient, à la lumière de l'expérience, de corriger.

La cohérence exigerait que nos collègues élus de départements disposant de faibles ressources votent notre amendement.

M. le président. La parole est à M. Jacques Blanc, pour présenter l'amendement n° II-214 rectifié bis.

M. Jacques Blanc. Mon propos sera relativement bref, puisque nous retrouvons le principe déjà évoqué pour les communes, mais cette fois pour les départements.

Le potentiel financier s'est substitué au potentiel fiscal, en intégrant la dotation forfaitaire à l'occasion de la réforme de la dotation globale de fonctionnement intervenue en 2005. À nos yeux, ce nouvel indicateur de la richesse des départements fausse la réalité.

Pour les départements les plus pauvres exclusivement éligibles à la dotation de fonctionnement minimale jusqu'en 2004, le poids relatif des dotations intégrées - dont la dotation forfaitaire - dans le potentiel financier va varier de 17,41 % à 52,16 %. On constate donc un enrichissement artificiel des départements les plus pauvres,...

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Artificiel ?

M. Jacques Blanc. ...dont les ressources fiscales restent en réalité extrêmement faibles.

Nous ne souhaitons pas bouleverser les mécanismes de la péréquation. En proposant d'exclure la dotation forfaitaire du potentiel financier, nous voulons garder une vision réaliste des ressources propres des départements. Le comité des finances locales, dès le mois de février 2005, avait d'ailleurs admis que cette situation devrait être corrigée.

Monsieur le ministre délégué, monsieur le président de la commission des finances, nous voulons sortir de cette situation dans laquelle un département comme la Lozère, qui était classé deuxième au regard du potentiel fiscal, se retrouve subitement en trente-cinquième position selon le potentiel financier.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Renoncez à la dotation forfaitaire !

M. Jacques Blanc. Sa capacité financière propre n'a pas fondamentalement changé, situation qui traduit la solidarité dont il a fait l'objet et dont nous nous félicitons.

Nous craignons cependant l'évolution dans le temps. Comme je l'avais dit en 2005, nous ne condamnons pas la mécanique. Puisqu'il a été question tout à l'heure de thermomètre, je me permets de filer la métaphore médicale. Il est vrai que, en tant que médecin, je sais qu'une fois le diagnostic établi, le traitement prescrit, même s'il est de bonne qualité, doit pouvoir être reconsidéré en fonction de l'évolution du malade et apprécié au regard de la réalité des résultats obtenus.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour présenter l'amendement n° II-236.

M. Jean-Pierre Sueur. La réforme de la DGF de 2005 s'est traduite par la création du potentiel financier, nouvel indicateur de richesse des départements qui s'est substitué au potentiel fiscal. L'intégration de la dotation forfaitaire au sein du potentiel financier a clairement abouti à un resserrement de la richesse entre les départements.

Ainsi, pour les départements les plus pauvres, exclusivement éligibles jusqu'en 2004 à la dotation de fonctionnement minimale, on constate que le poids relatif des dotations intégrées dans le potentiel financier, dont la dotation forfaitaire, varie de 17,41 % à 52,16 %.

Pour limiter cet « enrichissement » - j'emploie les guillemets à dessein - des départements qui ont de faibles ressources fiscales, un enrichissement bien artificiel en réalité, et pour éviter un bouleversement des mécanismes de la péréquation, nous proposons d'exclure la dotation forfaitaire du potentiel financier.

D'ailleurs, mes chers collègues, dès le mois de février 2005, le comité des finances locales avait considéré qu'il fallait corriger les aberrations constatées en reconsidérant la composition du potentiel financier.

Monsieur le ministre délégué, monsieur le rapporteur spécial, j'espère que vous n'allez pas demander le retrait de ces amendements, parce qu'il est essentiel de rectifier une situation qui a des conséquences importantes pour les départements les moins favorisés.

Nous pensons vraiment que la correction des effets néfastes de la réforme de 2005 aura des conséquences péréquatrices. Si nous n'agissons pas, cela se traduira par une situation plus difficile pour les vingt-quatre départements les plus pauvres de notre pays.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Au rythme de nos débats, mes chers collègues, nous allons devoir reporter l'examen des crédits d'une mission à samedi prochain, contrairement à ce qui était prévu. Je plaide donc pour que nous évitions les débats redondants. Celui-ci a déjà eu lieu s'agissant des communes et il me semblait que M. Jacques Blanc avait compris.

M. Jean-Pierre Sueur. C'est différent !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Chers collègues, le mécanisme à l'oeuvre depuis 2005 devrait se traduire, en 2010, par une progression en valeur absolue de l'ordre de 40 euros par habitant dans des départements tels que la Lozère, alors que quarante départements ruraux avaient été oubliés dans les négociations de 1992, pour des raisons qu'il s'agirait d'ailleurs d'éclaircir. C'est ce qui avait justifié, je vous le rappelle, la réforme de 2005.

Cette réforme s'est donc engagée très modestement, si modestement que seuls vingt-quatre départements ont été intégrés dans le dispositif, alors que d'autres, qui étaient dans des situations pratiquement identiques, n'y ont pas eu droit. Pour ceux-là, la dotation de fonctionnement minimale progressera de 33 euros par habitant entre 2004 et 2010, alors que, dans le même temps, la Lozère connaîtra une augmentation de 60 euros par habitant et la Creuse, qui suscite l'émotion de Mme Luc, de 50 euros...

Cela étant dit, je laisse Michel Mercier exprimer l'opinion de la commission.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Nous avons déjà eu ce débat, qui est récurrent, monsieur le président, aussi serai-je bref.

Je m'adresserai d'abord à MM. Jacques Blanc et Adrien Gouteyron : vous avez voté la réforme de la DGF, qui consistait à remplacer le potentiel fiscal par le potentiel financier.

M. Adrien Gouteyron. C'est vrai !

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Il est incohérent de nous demander ensuite de ne pas utiliser le potentiel financier, et vous ne faites pas autre chose dans vos amendements !

La Lozère a un potentiel fiscal de 211 euros par habitant et un potentiel financier de 442 euros par habitant. L'apport de l'État est tout de même très important. Et il faudrait, selon vous, que nous ne tenions pas compte de la compensation et que nous continuions à calculer la DGF à partir de ces 211 euros ? Et pour les autres départements, qui n'ont pas reçu autant, comme la Haute-Loire, comment fait-on ?

M. Yves Fréville. Tout à fait !

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Où est l'équité ? Ce système est probablement imparfait, comme tous les systèmes, mais l'inclusion de la dotation forfaitaire dans le potentiel financier avait précisément pour but de le rendre plus équitable.

Vous avez justement demandé que la compensation soit la plus forte possible pour les vingt-quatre départements les moins riches de France, qui étaient parvenus à constituer une catégorie fortement soudée. La Haute Assemblée l'a accepté, elle a également accepté de traiter spécifiquement les quarante autres départements qui les ont rejoints.

Ces départements ont donc fait l'objet d'un vrai traitement spécifique.

Venir nous demander ensuite de ne pas tenir compte du versement de la dotation forfaitaire, qui fait passer la Lozère de 211 euros de potentiel fiscal par habitant à 442 euros de potentiel financier par habitant, c'est impossible ! Mais vous vous en rendez bien compte, mes chers collègues, et je considère d'ores et déjà que vous avez retiré votre amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Le Gouvernement reprend naturellement à son compte les arguments du rapporteur spécial, M. Michel Mercier, et du président de la commission des finances, M. Jean Arthuis.

Je voudrais simplement apporter une précision à l'intention de M. Sueur, qui a évoqué le comité des finances locales. Un groupe de travail du CFL s'est en effet penché, au printemps dernier, sur la question de la péréquation départementale. Il a présenté un rapport d'étape, au cours de la séance qui s'est tenue au début du mois de juillet, dans lequel il a montré que le potentiel financier permettait de recenser près de 74 % des recettes de fonctionnement des départements, alors que le potentiel fiscal ne prenait en compte que 43 % de ces recettes.

À l'évidence, la notion de potentiel financier permet de comparer les départements sur une base plus équitable ; je tenais à le préciser. Je conclus naturellement comme Michel Mercier.

M. le président. Madame Luc, l'amendement n° II-198 est-il maintenu ?

Mme Hélène Luc. Je le maintiens, monsieur le président.

M. le président. Monsieur Jacques Blanc, l'amendement n° II-214 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Jacques Blanc. Je ne veux pas prolonger le débat. Je rappellerai simplement que, dès le vote de la réforme de 2005, nous avions reconnu l'effort qui était réalisé, tout en exprimant nos inquiétudes pour l'avenir, faute à l'époque d'avoir disposé des simulations nécessaires pour apprécier l'évolution prévisible.

Cet amendement s'inscrit donc dans la logique du vote intervenu en 2005 ; néanmoins, je le retire, en espérant que nous parviendrons ensemble à une analyse objective.

M. le président. L'amendement n° II-214 rectifié bis est retiré.

Monsieur Sueur, l'amendement n° II-236 est-il maintenu ?

M. Jean-Pierre Sueur. Il est maintenu, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-198 et II-236.

M. Adrien Gouteyron. Je m'abstiens.

M. Jacques Blanc. Je m'abstiens également.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis maintenant saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° II-199 est présenté par Mmes Mathon-Poinat, Assassi, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

L'amendement n° II-215 rectifié bis est présenté par MM. J. Blanc, Hérisson, Gouteyron, Faure, Fournier et Besse.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l'article 51 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans le troisième alinéa de l'article L. 3334-7 du code général des collectivités territoriales, après les mots : « potentiel financier » sont insérés les mots : « , de leur densité de population »

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l'amendement n° II-199.

Mme Josiane Mathon-Poinat. Cet amendement participe des mêmes fondamentaux que les précédents.

De la densité de population, plus faible dans certains départements de notre pays que dans d'autres, ne dépend pas strictement la densité des services publics ou des infrastructures qu'il convient de mettre en place et de mettre en oeuvre à raison des besoins collectifs.

Il convient ainsi de noter que, parmi les vingt-quatre départements bénéficiant de l'ancienne dotation de fonctionnement minimale, la densité de population est particulièrement réduite puisqu'elle varie, selon les endroits, entre 14 et 52 habitants au kilomètre carré.

On peut également observer que ces densités de population n'excluent pas, notamment dans les départements de montagne, de grandes différences de répartition et qu'il n'est pas rare de trouver, dans certaines communes et localités, voire dans des cantons entiers, des densités encore plus faibles que celles que nous venons d'évoquer. On rappellera pour mémoire que la densité moyenne de notre pays est de 111 habitants au kilomètre carré, quand bien même cette notion n'est pas exclusive des difficultés sociales et économiques des habitants.

Il est cependant patent que la densité de population participe souvent de la situation sociale et économique des territoires, notamment quand cette densité est faible : il est tout de même assez rare de trouver un haut niveau de revenus et un développement économique dynamique dans des territoires sous-peuplés !

M. le président. La parole est à M. Jacques Blanc, pour présenter l'amendement n° II-215 rectifié bis.

M. Jacques Blanc. Il s'agit simplement d'introduire la densité de population dans les critères de répartition. Je crois que chacun comprendra le pourquoi de cet amendement !

M. le président. L'amendement n° II-237, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 51 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans le troisième alinéa de l'article L. 3334-7 du code général des collectivités territoriales, après les mots : « potentiel financier » sont insérés les mots : « , de leur densité de population, de la proportion de bénéficiaires du revenu minimum d'insertion et de l'allocation personnalisée d'autonomie au sein leur population, ».

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Nonobstant les déclarations que nous venons d'entendre, je voudrais insister sur le fait que la réforme de la DGF a profondément modifié les conditions d'éligibilité des départements ruraux à la dotation de fonctionnement minimale, puisque l'on est passé de vingt-quatre départements éligibles en 2004 à soixante-quatre départements en 2005. Tout irait pour le mieux si cet élargissement de l'éligibilité ne jouait pas au détriment des vingt-quatre départements les plus pauvres. Or, entre 2004 et 2006, la dotation des départements nouvellement éligibles a connu une progression de 51 %, alors que celle des départements qui recevaient l'ancienne DFM a augmenté de 15,9 % seulement, monsieur Mercier.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Oui !

M. Jean-Pierre Sueur. En 2007, d'après les données de l'excellente DGCL, que je tiens toujours à saluer, les quarante départements nouvellement bénéficiaires de la dotation de fonctionnement minimale verraient leur dotation évoluer en moyenne de 27,22 % ; seize d'entre eux connaîtraient une variation de DFM plafonnée à 30 %. Or, pour les vingt-quatre départements bénéficiaires de l'ancienne dotation de fonctionnement minimale, la progression des crédits ne serait que de 4,51 % en moyenne, la fourchette allant de 11,14 % à 2,69 %, et dix-huit de ces vingt-quatre départements auraient une DFM inférieure à cette moyenne de 4,51 %. Je donne ces chiffres pour que les choses soient claires.

J'ajoute que, pour la période 2007-2010, la moyenne de la dotation, toujours d'après la direction générale des collectivités locales, passerait de 18,82 à 35,61 euros par habitant pour les « quarante » et de 46,54 à 70,84 euros par habitant pour les « vingt-quatre ». Ainsi, pour les premiers, la dotation par habitant serait multipliée par 2,12, alors que, pour les seconds, elle le serait de seulement 1,52. La distorsion au détriment de ces vingt-quatre départements est évidente.

L'amendement que je présente comporte un plus par rapport aux amendements précédents, puisque nous proposons d'ajouter aux critères de population et de voirie des critères sociaux, en l'espèce la proportion de personnes bénéficiaires du RMI et celle de personnes bénéficiaires de l'allocation personnalisée d'autonomie, l'APA.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Ces amendements sont d'inspiration identique, même s'ils diffèrent dans leur contenu.

Je m'adresserai à leurs auteurs : chers collègues, je suis comme vous élu local depuis longtemps, et j'ai toujours pensé que les dépenses étaient décidées pour les habitants, et non pour le seul plaisir de dépenser !

Sans population, il n'y a pas de services publics à faire fonctionner. À l'inverse, plus les habitants sont nombreux, plus les dépenses sont élevées. Aussi, vouloir que la densité de population figure parmi les critères de répartition pour des départements peu peuplés, c'est aller vers une répartition moins large et des recettes en diminution.

Vos amendements ne sont donc pas justifiés : très honnêtement, ajouter le critère de la densité de population n'apporte rien et va même à l'encontre du but recherché.

Quant à l'amendement de M. Sueur, je reconnais qu'il est de la même inspiration, mais présenté d'une façon plus subtile.

M. Jean-Pierre Sueur. Il est plus social !

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. J'ai même cru un moment, mon cher collègue, que vous alliez vous sentir obligé de nous indiquer le sens du sigle « DGCL ». (Sourires.) Mais vous pourrez le faire lorsque vous reprendrez la parole pour retirer votre amendement !

Vous avez parlé pourcentages : bien sûr, en pourcentage, vous avez raison ; mais vous avez totalement tort, et vous le savez parfaitement, en valeur absolue.

Une nuit, il y a bien longtemps, le groupe des vingt-quatre départements s'est accordé cette DFM à l'Assemblée nationale. Je me souviens fort bien de ce grand moment de solidarité nationale réalisé par quelques-uns, pendant que les autres étaient couchés (Rires.) Il faut tout de même garder à l'esprit que, dans la DFM nouvelle formule, ces vingt-quatre départements perçoivent en moyenne 40,40 euros par habitant, tandis que les quarante départements nouvellement éligibles n'ont que 13,97 euros par habitant. Mes chers collègues, trouvez-vous juste cette différence, qui est énorme ? S'il n'était pas si tard, nous prendrions le temps d'analyser ensemble la liste des vingt-quatre et celle des quarante !

Il est tout à fait équitable - et je suis sûr que Mme Mathon-Poinat et M. Sueur seront sensibles à l'argument de l'équité - que la DFM des « quarante nouveaux » augmente plus en pourcentage : la base étant plus faible, l'augmentation plus forte en pourcentage donne un résultat moindre en valeur absolue, tandis que, pour les « vingt-quatre d'origine » l'augmentation plus faible en pourcentage donne davantage en valeur absolue, et ils continuent donc de recevoir plus que les quarante autres. C'était le résultat voulu, et c'est le résultat obtenu.

Comme vous avez satisfaction, mes chers collègues, je vous suggère de retirer vos amendements, sans quoi je serai obligé de demander au Sénat de les repousser.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Les amendements identiques nos II-199 et II-214 rectifié bis ont pour objet d'ajouter la densité de population aux critères de répartition de la DFM. Or, je le rappelle, la DFM tient déjà compte, au moins indirectement, de la densité puisqu'elle est répartie en fonction de la longueur de voirie, du potentiel financier et du potentiel financier superficiaire.

Quant aux critères sociaux de l'amendement n° II-237, monsieur Sueur, je me réfère pour ma part aux conclusions du groupe de travail que le comité des finances locales a chargé d'étudier la DGF des départements et que j'ai cité tout à l'heure. Après avoir analysé les écarts entre les vingt-quatre départements éligibles à la DFM avant 2005 et les quarante nouvellement éligibles, ce groupe de travail tire des conclusions intéressantes, montrant qu'en fait la proportion du nombre de bénéficiaires du RMI avantagerait légèrement les quarante nouveaux, tandis que la proportion de personnes âgées ou la densité avantageraient plutôt les vingt-quatre anciens et que, compte tenu de cet équilibre, il n'était sans doute pas utile de modifier les critères actuels.

Je me rallie donc à la position du groupe de travail du CFL.

M. le président. Monsieur Jacques Blanc, l'amendement n° II-215 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Jacques Blanc. Je vais le retirer, monsieur le président, mais je veux auparavant souligner à l'intention de M. Mercier que moins la population est nombreuse, quand l'habitat est dispersé, plus les dépenses par habitant sont élevées. Je suis convaincu qu'il coûte plus cher de maintenir une population lorsque sa densité est de 14 habitants au kilomètre carré que lorsqu'elle est regroupée dans une agglomération. Je vous invite à venir dans le département de la Lozère, et vous verrez par vous-même !

Mme Hélène Luc. Bien sûr !

M. Jacques Blanc. Cela étant, je retire l'amendement, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° II-215 rectifié bis est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° II-199.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Monsieur Sueur, l'amendement n° II-237 est-il maintenu ?

M. Jean-Pierre Sueur. Je vais retirer cet amendement au bénéfice de la déclaration que vient de faire M. le ministre délégué. En effet, je ne disposais pas de cette information, qui est importante, sur les conséquences visiblement équilibrées de la prise en compte du critère APA, d'un côté, et du critère RMI, de l'autre.

Dans la cohérence même de ma proposition, cette information m'incite à retirer l'amendement.

M. le président. L'amendement n° II-237 est retiré.

Articles additionnels après l'article 51 ter
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Article 51 quinquies

Article 51 quater

L'avant-dernier alinéa de l'article L. 3334-7 du code général des collectivités territoriales est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Par dérogation en 2007, les départements éligibles ne peuvent percevoir une dotation de fonctionnement minimale inférieure au montant perçu l'année précédente indexé selon le taux de progression de l'ensemble des ressources de la dotation globale de fonctionnement. »

M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° II-216 rectifié, présenté par MM. J. Blanc, Hérisson, Gouteyron, Faure, Fournier et Besse, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit cet article :

Les quatrième et avant-dernier alinéas de l'article L. 3334-7 du code général des collectivités territoriales sont ainsi rédigés :

« À compter de 2005, les départements éligibles ne peuvent percevoir une dotation de fonctionnement minimale inférieure à 106 % ou supérieure à 130 % au montant perçu l'année précédente. Pour 2005, le montant à prendre en compte correspond au montant de dotation de péréquation perçu en 2004 par chaque département, majoré le cas échéant de la dotation de fonctionnement minimale perçue en 2004.

« Par dérogation en 2006, les départements éligibles ne peuvent percevoir une dotation de fonctionnement minimale inférieure à celle perçue l'année précédente ou supérieure à 130 % du montant perçu cette même année. »

La parole est à M. Jacques Blanc.

M. Jacques Blanc. Il s'agit de faire bénéficier la dotation de fonctionnement minimale, non seulement pour 2007 mais aussi pour les années suivantes, d'une garantie minimale de progression de 6 % initialement prévue uniquement pour 2005.

M. le président. L'amendement n° II-240, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit cet article :

L'avant-dernier alinéa de l'article L. 3334-7 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :

« À compter de 2007, les départements éligibles ne peuvent percevoir une dotation de fonctionnement minimale inférieure à 106 % ou supérieure à 130 % au montant perçu l'année précédente. »

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Cet amendement est clairement péréquateur, pour le coup, puisqu'il vise à faire bénéficier la dotation de fonctionnement minimale, pour 2007 et les années suivantes, de la garantie minimale de progression de 6 % initialement prévue uniquement pour 2005, mais aussi à plafonner les évolutions possibles à 130 %.

L'objectif est d'éviter que la réforme des critères de la DGF, qui a rendu éligibles à la dotation de fonctionnement minimale quarante nouveaux départements, n'intervienne au détriment de la péréquation destinée aux départements les plus pauvres, à savoir les vingt-quatre départements bénéficiaires de l'ancienne DFM.

Ce dispositif assez simple se traduirait à l'évidence par une péréquation, expression même de la solidarité.

M. le président. L'amendement n° II-200 rectifié, présenté par Mmes Mathon-Poinat, Assassi, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

I. - Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 3334-7 du code général des collectivités territoriales :

« Par dérogation en 2007, les départements éligibles ne peuvent percevoir une dotation de fonctionnement minimale inférieure à 106 % ou supérieure à 130 % au montant perçu l'année précédente. »

II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - L'augmentation éventuelle du prélèvement sur les recettes de l'État résultant de l'avant-dernier alinéa de l'article L. 3334-7 du code général des collectivités territoriales est compensée à due concurrence.

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Mme Josiane Mathon-Poinat. Cet amendement porte sur la progression de la dotation des départements bénéficiaires de la dotation de fonctionnement minimale. En effet, la réforme de la dotation globale de fonctionnement adoptée dans la loi de finances pour 2005 montre d'ores et déjà ses limites.

Ma collègue Marie-France Beaufils a longuement évoqué cette question lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances. Aussi, je vous conseille vivement de relire les remarques tout à fait pertinentes qu'elle nous a livrées.

M. le président. L'amendement n° II-217 rectifié, présenté par MM. J. Blanc, Hérisson, Gouteyron, Faure, Fournier et Besse, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour compléter l'avant-dernier alinéa de l'article L. 3334-7 du code général des collectivités territoriales :

« Par dérogation en 2007, les départements éligibles ne peuvent percevoir une dotation de fonctionnement minimale inférieure à 106 % ou supérieure à 130 % au montant perçu l'année précédente ».

L'amendement n° II-218 rectifié, présenté par MM. J. Blanc, Hérisson, Gouteyron, Faure, Fournier et Besse, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour compléter l'avant-dernier alinéa de l'article L. 3334-7 du code général des collectivités territoriales :

« Par dérogation en 2007, les départements éligibles ne peuvent percevoir une dotation de fonctionnement minimale dont le taux de progression est inférieur à deux fois le taux de progression de l'ensemble des ressources de la dotation globale de fonctionnement. »

La parole est à M. Jacques Blanc.

M. Jacques Blanc. Ce sont deux amendements de repli, monsieur le président.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Repliez-vous vite ! (Sourires.)

M. Jacques Blanc. J'attends donc d'avoir entendu le rapporteur spécial et le ministre. Je ne voudrais surtout pas prolonger inutilement les débats !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Ces amendements sont très intéressants, à ceci près qu'ils auraient pour conséquence de limiter la péréquation.

Monsieur Sueur, le plafonnement à 130 % de la garantie minimale que vous inscrivez dans votre amendement figure déjà dans la loi, à l'article 49 de la loi du 30 décembre 2004 modifiant la loi du 27 juillet 1999 : « À compter de 2006, les départements éligibles ne peuvent percevoir une dotation de fonctionnement minimale inférieure à celle perçue l'année précédente ou supérieure à 130 % du montant perçu cette même année. » Vous avez donc déjà satisfaction, mon cher collègue.

Par conséquent, la commission sollicite le retrait de ces différents amendements.

Si vous voulez véritablement faire progresser cette cause, il faut bâtir un principe et voir comment on peut le faire progresser. Pour le moment, il me semble logique de ne pas revenir sur une DGF qui vient d'être modifiée ni d'en retrancher certaines des dispositions. Ou alors il ne fallait pas la voter !

M. Jean-Pierre Sueur. Nous ne l'avons pas votée !

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Mais je m'adresse à Adrien Gouteyron et à Jacques Blanc.

M. Jacques Blanc. Nous, nous l'avons votée !

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. Vous l'avez votée, vous devez donc en accepter les conséquences.

D'ailleurs, votre département a été le principal bénéficiaire de cette réforme de la DGF et tous les habitants de la Lozère doivent vous en être reconnaissants ! Vivez de cette reconnaissance, mon cher collègue, et retirez vos amendements ! (Sourires.)

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Monsieur Jacques Blanc, depuis votre arrivée, le débat tourne quasi exclusivement autour de la Lozère. Vous l'avez par gentillesse étendu à la Haute-Loire, ce qui renforce la solidarité, mais peut-être pourrait-on parler de votre département dans d'autres circonstances. La situation de la Lozère ne va tout de même pas mobiliser l'attention de la Haute Assemblée toute la journée !

Ce que je voulais vous dire, monsieur Jacques Blanc, et je le dis également à M. Jean-Pierre Sueur, c'est que j'ai été interrogé sur ce dispositif à l'Assemblée nationale avec cette même proposition consistant à aligner l'évolution de la DFM sur celle de la DGF ; je m'en étais remis à la sagesse de l'Assemblée nationale.

Aujourd'hui, je ne peux pas aller plus loin parce que ce serait sinon remettre en cause l'objectif, qui consistait à réduire l'écart entre les vingt-quatre anciens départements éligibles et les quarante nouveaux, écart qui, de un à trois, passerait de un à deux.

Telle est la raison pour laquelle le Gouvernement demande le retrait de ces amendements.

M. le président. Monsieur Jacques Blanc, les amendements nos II-216 rectifié, II-217 rectifié et II-218 rectifié sont-ils maintenus ?

M. Jacques Blanc. Non, je les retire, monsieur le président.

M. le président. Les amendements nos II-216 rectifié, II-217 rectifié et II-218 rectifié sont retirés.

Monsieur Sueur, l'amendement n° II-240 est-il maintenu ?

M. Jean-Pierre Sueur. Je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° II-240 est retiré.

Madame Mathon-Poinat, l'amendement n° II-200 rectifié est-il maintenu ?

Mme Josiane Mathon-Poinat. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-200 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 51 quater.

(L'article 51 quater est adopté.)

Article 51 quater
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Article 51 sexies

Article 51 quinquies

Un montant de 9,34 millions d'euros est prélevé sur le montant ouvert au titre de l'année 2006 de la dotation mentionnée à l'article L. 2334-26 du code général des collectivités territoriales. Il majore la dotation d'aménagement définie à l'article L. 2334-13 du même code au titre de la répartition de 2007. - (Adopté.)

Article 51 quinquies
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Action extérieure de l'Etat

Article 51 sexies

Le Gouvernement présentera au Parlement, avant le 30 juin 2007, un rapport présentant l'impact sur la dotation globale de fonctionnement des communes de l'éventuelle intégration des compensations d'exonérations fiscales dans le calcul du potentiel financier. Le rapport mesurera en outre l'impact de la non-prise en compte de la garantie de la dotation de base dans le calcul du potentiel financier, et celui qu'aurait l'application simultanée des deux mesures.

M. le président. L'amendement n° II-197, présenté par Mmes Mathon-Poinat,  Assassi,  Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Mme Josiane Mathon-Poinat. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. En général, je suis contre les rapports parce que personne ne les lit jamais, mais celui-là me semble pertinent. Il est judicieux de disposer d'un rapport sur ce qui a constitué le coeur de nos débats cet après-midi, c'est-à-dire la mesure de la richesse de la commune. Nous en tirerons tous des enseignements.

Et, si ce rapport est bien fait, chers collègues du groupe CRC, je ne doute pas que vous y trouverez l'inspiration pour de nouveaux amendements ! (Sourires.) Je vous demande donc de retirer cet amendement de suppression.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Le Gouvernement partage l'avis de la commission.

M. le président. Madame Mathon-Poinat, l'amendement n° II-197 est-il maintenu ?

Mme Josiane Mathon-Poinat. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° II-197 est retiré.

Je mets aux voix l'article 51 sexies.

(L'article 51 sexies est adopté.)

M. le président. Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission : « Relations avec les collectivités territoriales » et des articles rattachés, ainsi que des crédits du compte de concours financiers : « Avances aux collectivités territoriales ».

Modification de l'ordre du jour

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. À cette heure avancée de l'après-midi, il convient de faire le point sur le déroulement de nos travaux.

Nous allons maintenant entamer l'examen des crédits de la mission « Action extérieure de l'État », pour lesquels la conférence des présidents a prévu trois heures trente de discussion, ce qui nous conduira, à l'évidence, au-delà de minuit.

Or la conférence des présidents a posé le principe selon lequel la discussion d'une mission ne peut débuter après minuit. En conséquence, monsieur le président, nous devons reporter l'examen des crédits de la mission « Développement et régulation économiques » initialement prévu à la suite de nos présents travaux.

Notre ordre du jour de demain, vendredi 8 décembre, étant déjà particulièrement dense, je suggère que nous reportions à samedi après-midi l'examen des crédits de la mission « Développement et régulation économiques ».

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le président de la commission des finances, on me fait savoir que seul François Loos serait disponible samedi, et uniquement le matin.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Deux problèmes se posent, monsieur le ministre délégué. D'une part, samedi matin, nous n'avons pas de président de séance. D'autre part, compte tenu des onze heures de séance, peut-être douze, prévues pour demain, il est vraisemblable que nous irons bien au-delà de minuit. Dans ces conditions, il ne serait pas possible de reprendre la séance samedi dans le courant de la matinée.

Le principe de précaution nous conduit donc à maintenir la date de samedi, à quinze heures, pour la discussion reportée. J'espère que, d'ici là, un membre du Gouvernement aura pu se rendre disponible.

Au demeurant, je le rappelle, la conférence des présidents n'avait pas exclu de siéger ce samedi, pour les discussions éventuellement reportées. Nous avons essayé de tenir les plages prévues, mais l'important est que les débats puissent se dérouler comme le souhaite la Haute Assemblée.

M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinq, est reprise à dix-neuf heures vingt.)

M. le président. La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2007, adopté par l'Assemblée nationale

Action extérieure de l'État

Article 51 sexies
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Article 34 et état B (début)

M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Action extérieure de l'État ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite vous présenter les principales conclusions de la commission des finances sur la mission « Action extérieure de l'État », qui est dotée, en 2007, de 2,3 milliards d'euros en crédits de paiement, soit 0,84 % des dépenses du budget général. Les emplois de la mission représentent 13 480 équivalents temps plein, soit 0,6 % du plafond global d'emploi de l'État.

Sur le plan budgétaire, les enjeux liés à la présente mission paraissent limités. Mais il est vrai que la mission ne représente que 37 % des crédits réellement dévolus à l'action extérieure de l'État. Rappelons-le, la mission « Aide publique au développement » et le programme « Audiovisuel extérieur » inclus, le Quai d'Orsay gère seulement 50 % des dépenses de l'État à l'étranger.

Cependant, sur le plan politique, la mission « Action extérieure de l'État » revêt une importance particulière. Elle recense, en effet, les moyens alloués à notre diplomatie et, donc, la capacité de celle-ci à porter dans le monde la voix de la France, que nous espérons singulière. Cette mission peut être aussi, si l'on n'y prend garde, le lieu de nos contradictions, puisque des écarts peuvent être relevés entre les déclarations et la réalité.

Au cours de mon intervention, je m'efforcerai de répondre à quatre questions : ce projet de budget pour 2007 prépare-t-il l'avenir ? L'évolution des crédits est-elle maîtrisée ? La justification de la dépense est-elle sincère ? Les performances de nos administrations sont-elles satisfaisantes ?

Première question : ce projet de budget pour 2007 prépare-t-il l'avenir ?

Sur ce point, je crois qu'il faut décerner à vos services, et à vous-même, monsieur le ministre, un vrai satisfecit. Nous assistons en effet, malgré quelques résistances, ici et là, à un véritable changement de culture au Quai d'Orsay, comme en témoignent les outils de modernisation dont vous vous êtes doté en 2006, à savoir le contrat pluriannuel de modernisation, le comité interministériel des moyens de l'État à l'étranger, et la directive nationale des ambassades. Il reste à en tirer les dividendes, pour permettre au ministère des affaires étrangères de ne plus subir la rigueur budgétaire, mais d'améliorer sa performance avec des moyens maîtrisés.

Je souhaite insister, parce que je l'ai appelé de mes voeux l'an passé, sur le contrat de modernisation 2006-2008. Celui-ci doit être un accord gagnant-gagnant vous garantissant, en contrepartie de réformes structurelles et donc profondes, un certain nombre d'assurances sur le plan budgétaire.

S'agissant des réformes structurelles, certaines, comme la couverture du risque de change pour les contributions internationales, ont été engagées sur la suggestion de la commission des finances. Pour d'autres, notamment la constitution d'une fondation dédiée au développement des alliances françaises à l'étranger, la commission des finances a souhaité être à vos côtés, monsieur le ministre, en programmant, lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances, deux millions d'euros pour doter en capital ce nouvel outil de rayonnement culturel.

Dans mon rapport écrit, je vous propose par ailleurs quelques réformes supplémentaires, en particulier la constitution d'un guichet unique, confié à l'une de vos directions, pour gérer deux programmes, « Personnalités d'avenir » et « Invitation de journalistes ».

Pour 2007, je me félicite que les engagements budgétaires prévus par le contrat de modernisation soient tenus. Par contraste, je regrette qu'un certain nombre d'accrocs soient survenus au cours de l'exercice 2006. Contrairement en effet aux engagements initiaux de Bercy, le Quai d'Orsay ne bénéficiera pas, en 2006, du retour du produit issu des droits de visa acquittés auprès de nos consulats.

En matière de gestion de l'immobilier, des progrès réels ont été accomplis. Une politique de cession d'actifs a été engagée. Il nous faut toutefois reconnaître la spécificité de l'immobilier de l'État à l'étranger, en particulier des bâtiments diplomatiques ayant fait l'objet d'accords internationaux ou de conventions avec les autorités locales. À l'inverse, les accords s'appliquant à l'immobilier de l'État à l'étranger doivent être négociés par nos diplomates, afin de permettre une réversibilité des implantations des services.

Chacun a conscience du nécessaire rééquilibrage géographique de la présence française à l'étranger. Le contrat de modernisation renforce le mouvement de redéploiement des moyens en cours en Europe et en Afrique. Mais nous sommes tous conscients du fait que nos postes ne pourront jamais couvrir la totalité des grandes villes du monde. J'ai donc proposé d'utiliser les technologies nouvelles, en prévoyant, par exemple, comme les Américains le font déjà, la création de « postes de présence virtuels ».

Sur le strict plan de la gestion, j'ai regretté, dans un rapport publié en début d'année, l'émiettement de la gestion des crédits à l'étranger. Le comité interministériel des moyens de l'État à l'étranger a répondu à cette observation par le développement des services administratifs et financiers uniques, les SAFU. Cette démarche est excellente, à condition que ces services aient de vraies responsabilités de gestion.

Les bases de la modernisation étant posées, l'évolution des crédits de la mission « Action extérieure de l'État » est-elle maîtrisée ? En apparence, tel est le cas, car la dépense paraît globalement encadrée. En réalité, on relève quelques exceptions : certains postes budgétaires paraissent mal maîtrisés. Il en est ainsi, monsieur le ministre, de la masse salariale des recrutés locaux. Je compte engager, en 2007, en relation étroite avec vos services, un travail d'observation et de réflexion sur ce sujet. Je ne doute pas que je disposerai à cette occasion de la collaboration de vos services.

La progression des contributions aux 150 organisations internationales dont la France est membre constitue également un autre sujet d'inquiétude. Ces contributions, évaluées, pour 2007, à 774 millions d'euros par la commission des finances, représentent, et de loin, le principal poste budgétaire de la mission « Action extérieure de l'État ». Entre 2003 et 2007, elles auront progressé de 50 %.

Bien sûr, la place de la France dans le monde et sa participation au Conseil de sécurité lui confèrent des obligations.

Dans une réponse au questionnaire budgétaire, vous avez d'ailleurs eu l'honnêteté, monsieur le ministre, de reconnaître « un besoin de sensibilisation plus marquée de l'ensemble des négociateurs, à l'administration centrale et dans les postes, aux aspects budgétaires des programmes d'action de chaque organisation ». Dans mon rapport, j'insiste sur la nécessité de faire un tri dans les contributions diverses et variées, au nombre de cent cinquante. Il y a un vrai problème de répartition des tâches entre votre ministère et les ministères techniques compétents. Vos diplomates et vos services ont bien d'autres choses à faire que de gérer certaines de ces contributions !

Quel est aujourd'hui le risque lié à l'inflation des contributions internationales ? Nous craignons que notre réseau diplomatique ne joue comme une variable d'ajustement, mais nous tenons à ce réseau qui, par sa densité, nous permet une action efficace.

Or le présent projet de loi de finances tente parfois de dissimuler une partie des crédits affectés aux organisations internationales. Ces fameuses contributions internationales sont évaluées à 587 millions d'euros. Mes investigations auprès de vos services m'ont permis d'établir, grâce à la justification au premier euro, que cette somme serait plus proche en réalité de 774 millions d'euros.

Ces réserves étant posées, et elles sont substantielles, il faut souligner, monsieur le ministre, que les progrès sont sensibles par rapport au projet de loi de finances pour 2006. Je note en particulier la volonté de votre administration d'évaluer le coeur de son action, l'avancement des négociations multilatérales, par exemple, méritant d'être encouragé. Cette évaluation est réalisée sous la forme d'une autonotation, d'une auto-évaluation, ce qui constitue un premier pas. Sur ce point, je rejoins notre collègue député Jérôme Chartier, qui propose de confier cette notation au nouveau Conseil des affaires étrangères, qui verra ainsi ses attributions clarifiées.

Les objectifs présentés au Parlement, monsieur le ministre, engagent votre ministère. Pour prendre l'exemple des délais de traitement des demandes d'asile, les objectifs de 60 jours pour l'OFPRA, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, et de 90 jours pour les recours devant la Commission des recours des réfugiés, ne seront pas tenus. Faut-il changer ces objectifs et en établir de plus réalistes, ou bien devons-nous adopter des mesures destinées à faire en sorte qu'ils soient respectés ?

Pour conclure, la performance est désormais au coeur de la réforme de l'État. Elle oblige le ministère des affaires étrangères : nous aurons sans doute tout à l'heure un débat s'agissant de l'exercice, par le Quai d'Orsay, de sa tutelle sur certains opérateurs.

Elle engage aussi le Parlement, notamment le Sénat et sa commission des finances. C'est pour cette raison que je présenterai plusieurs amendements sur la présente mission, qui, tous, visent à tirer les conséquences des travaux de contrôle menés durant l'année et à accompagner votre ministère dans la modernisation engagée.

Sous réserve de l'adoption de ces amendements, la commission des finances proposera au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Action extérieure de l'État ». (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Guy Branger, rapporteur pour avis.

M. Jean-Guy Branger, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne reviendrai pas sur l'excellente analyse financière que vient d'effectuer notre collègue Adrien Gouteyron.

En revanche, je veux souligner que la légère croissance des crédits alloués à la mission « Action extérieure de l'État » doit être appréciée, d'une part, au regard de l'évolution du budget du ministère des affaires étrangères depuis dix ans, d'autre part, en considérant les éléments contenus dans le contrat triennal de modernisation conclu le 18 avril dernier entre vous-même, monsieur le ministre, et le ministre délégué au budget et à la réforme de l'État, pour la période 2006-2008. C'est une bonne chose.

Le projet de budget pour 2007 est donc caractérisé par les garanties et les engagements pluriannuels contenus dans ce contrat. Ce budget s'inscrit également dans une vaste réflexion menée par le Gouvernement sur l'architecture de l'ensemble de nos réseaux à l'étranger, avec la réunion, inédite depuis 1997, du comité interministériel des moyens de l'État à l'étranger, le CIMEE.

Ce contrat triennal arrive à temps. Le ministère des affaires étrangères a en effet beaucoup contribué à la rationalisation des finances de l'État : la part de son budget dans le produit intérieur brut français s'est réduite, passant de 0,28 % en 1996 à 0,21 % en 2006. Certes, le PIB a crû entre temps, mais la réduction des « frais de structure » du ministère avait atteint ses limites.

Ce contrat de modernisation portant sur les années 2006 à 2008 donne au ministère une visibilité sur l'évolution de ses effectifs et de ses moyens de fonctionnement, et va lui permettre d'entreprendre les indispensables réformes des réseaux de l'État à l'étranger, dont les défauts sont bien connus : éparpillement, absence de priorités fonctionnelles ou régionales, rigidités face à la rapide évolution de la sphère internationale.

Un de ses premiers effets consiste dans l'attribution de 50 millions d'euros supplémentaires au profit des contributions aux opérations de maintien de la paix, OMP ; cet effort devra impérativement se poursuivre en 2008, dans un contexte où un volume croissant des opérations est prévisible sans que le ministère des affaires étrangères dispose des financements adéquats.

En effet, le problème récurrent du coût de ces opérations s'ajoute à la charge que constitue la participation de quelque 15 000 soldats français à différentes opérations. La place des crédits consacrés au financement des OMP ne cesse de croître au sein du programme 105, dont ils représentaient près de 20 % en 2005. En 2006, les crédits inscrits dans le budget s'élevaient à 136,22 millions d'euros, alors que les dépenses effectives se sont montées à 251 millions d'euros.

Étant obligatoires, ces contributions aux OMP doivent impérativement être acquittées ; ce sont donc les autres actions du ministère, particulièrement les actions bilatérales, qui en pâtissent.

Sur un autre point, je note que le taux de retour au budget du ministère de 50 % des recettes issues de la délivrance des visas apportera un financement complémentaire à la modernisation du réseau consulaire, induite notamment par la délivrance des visas biométriques. Je m'interroge cependant sur les capacités du ministère des affaires étrangères à obtenir les quelque 145 millions d'euros prévus pour cette adaptation en trois ans. Certes, ce chiffre peut être discuté, mais je n'en ai pas d'autre à ce jour.

En revanche, la réflexion entreprise sur l'évolution souhaitable de nos réseaux diplomatiques, consulaires et culturels est un motif de satisfaction ; il faut le souligner avec force.

Cette rénovation se traduit déjà par la rédaction d'une « directive nationale d'orientation des ambassades » qui établit des priorités différentes selon le classement des postes dans une nouvelle typologie : partenaires mondiaux, espace européen, partenaires privilégiés, et pays à enjeu bilatéral spécifique. Cette typologie est perfectible, mais elle a le mérite de reconnaître la nécessité d'une action diplomatique différenciée selon les priorités fixées par le Gouvernement.

En considération de l'ensemble de ces éléments, dont la majorité sont positifs, voire très positifs, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a émis un avis favorable à l'adoption du budget affecté à la mission « Action extérieure de l'État » pour 2007. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, pas de « bons points » pour les bons élèves, voilà le résumé des dotations budgétaires des programmes 185 « Rayonnement culturel et scientifique » et 115 « Audiovisuel extérieur ».

Au sein de la mission « Action extérieure de l'État », les crédits consacrés au rayonnement culturel et scientifique atteignent 526 millions, soit 8 millions d'euros de plus qu'en loi de finances initiale pour 2006.

En 2007, seulement 13,1 % des moyens globaux du ministère des affaires étrangères seront affectés à notre politique culturelle extérieure. Contrairement à ce que nous entendons toute l'année, la baisse se confirme : budgétairement, la diplomatie culturelle et la francophonie ne sont pas du tout des priorités. C'est sensible sur les plans universitaire et scolaire.

S'agissant de l'accueil des étudiants étrangers, la régression des crédits consacrés au renforcement des échanges scientifiques, techniques et universitaires ne permettra pas de maintenir à niveau les programmes de bourses d'excellence destinées aux meilleurs étudiants. Le mouvement avait déjà commencé l'an dernier pour les bourses Eiffel. Pourtant, en troisième cycle, ce sont eux qui garantissent l'avenir de notre recherche, surtout en mathématiques, sciences dures et biologie.

S'agissant de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, il apparaît, à l'issue du conseil d'administration qui s'est tenu le 30 novembre dernier, que les crédits de bourses scolaires n'augmenteront pas, que les frais de scolarité continueront à croître - ils ont crû de 10 % entre 2005 et 2006 - et que le Fonds d'aide à la scolarisation des enfants francophones disparaît, faute de financement.

Monsieur le ministre, je vous ai entendu dire à plusieurs reprises qu'il fallait en priorité construire nombre d'établissements de l'AEFE dans le monde. Pourtant, quand on assiste au conseil d'administration de l'AEFE, on s'aperçoit que ce n'est pas une priorité du tout !

La subvention totale de l'État est de 332 millions d'euros, mais, compte tenu des règles de mise en réserve, elle sera réduite à moins de 328 millions d'euros, contre 324 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2006. Ainsi, même en prévoyant un déficit de 19 millions d'euros, l'AEFE ne disposera que de 7,9 millions de crédits d'investissement, équipements, entretien des écoles, construction, en dépit de ses nouvelles obligations immobilières.

Monsieur le ministre, les questions que je vous pose sont graves, mais celles-ci le sont particulièrement : dans ces conditions, l'AEFE peut-elle soutenir des établissements dont la situation financière est préoccupante, comme ceux de la Mission laïque française au Liban ? Que comptez-vous faire pour ces établissements qui, après avoir rendu un service exceptionnel pendant la guerre de juillet, connaissent de très fortes tensions ? D'une façon générale, comment va-t-on faire face à la croissance inéluctable de la demande d'aide à la scolarisation ?

Le programme 115 « Audiovisuel extérieur » reçoit un budget qui est la quasi-reconduction du montant accordé en loi de finances initiale pour 2006. Le ministère des affaires étrangères, vos services, monsieur le ministre, reconnaît que « les entreprises de l'audiovisuel connaîtront de très grandes difficultés et devront revoir à la baisse de manière drastique, dès le début de l'année, leurs ambitions et donc leurs missions ».

Les deux opérateurs principaux ne sont pas dans une situation facile.

Tout d'abord, TV 5 Monde va devoir revenir sur le premier accord de partenariat avec l'Alliance française de Paris pour l'utilisation du dispositif multimédia d'apprentissage du français « Apprendre et enseigner avec TV 5 », notamment par Internet, ainsi que sur son effort de sous-titrage, destiné à élargir son audience, à diffuser notre culture. Pourtant, cette remarquable action de promotion de notre langue faisait partie du plan d'orientation stratégique signé par Mme Girardin à l'automne dernier.

RFI, ensuite, qui a réussi la renégociation de son contrat de diffusion en ondes courtes avec TDF, faisant ainsi une économie de 35,5 millions d'euros sur cinq ans, voit ses efforts bien mal récompensés, puisque sa dotation est réduite.

Cela se produit naturellement au moment où RFI doit répondre aux défis des mutations technologiques et régler les problèmes sociaux qui en découlent pour s'intégrer dans l'audiovisuel extérieur TRI-MEDIA du futur - télévision, radio, Internet -, qui représente la solution d'avenir pour la France, avec France 24 et TV 5.

En conclusion, j'évoquerai la nécessité d'améliorer la cohérence de la maquette budgétaire.

Le partage de la politique d'action culturelle extérieure de la France entre les programmes 185 et 209 a peu de sens. Dans ces conditions, vos services ne peuvent, cette année, éclairer le Parlement par leurs réponses aux questions budgétaires sur les bourses ou les centres culturels, par exemple, qui portent sur les deux programmes confondus. On ne s'y retrouve absolument pas !

Je ne suis pas la seule à demander une modification de la répartition. D'autres rapporteurs budgétaires de l'Assemblée nationale et du Sénat, Mme Brisepierre et M. de Charrette, notamment, font de même. Monsieur le ministre, il est temps d'étudier sérieusement ce regroupement de l'action culturelle extérieure au sein d'un seul programme.

Par ailleurs, en matière de politique audiovisuelle extérieure, on peut légitimement se demander pourquoi la nouvelle chaîne France 24 ne serait pas rattachée à un programme global de l'audiovisuel extérieur français. Certes, il faut voir si cela serait rentable, mais cela ferait au moins progresser la cohérence de l'action de la France en ce domaine, marquée par une dispersion des moyens préjudiciable à la fois au bon usage des fonds publics et à l'efficacité.

En conclusion, en dépit de toutes ces remarques quelque peu négatives, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat a donné un avis favorable à l'adoption des crédits des programmes 185 et 115. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi qu'au banc des commissions.)

M. le président. La parole est à M. Louis Duvernois, en remplacement de M. David Assouline, rapporteur pour avis.

M. Louis Duvernois, en remplacement de M. David Assouline, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. Monsieur le ministre, monsieur le président, mes chers collègues, dans l'architecture budgétaire actuelle de l'État, l'action culturelle extérieure, dont les crédits sont divisés entre deux missions, est supposée contribuer au rayonnement culturel et scientifique de la France lorsqu'elle est orientée vers les pays développés, mais elle devient de l'aide au développement lorsqu'elle est dirigée vers les pays en développement.

Inutile de vous dire que ce n'est pas la conception que se fait la commission à laquelle j'appartiens de la diplomatie culturelle.

M. Jacques Legendre. Très bien !

M. Louis Duvernois, rapporteur pour avis. Les crédits de l'action culturelle ne changent pas de nature en traversant le détroit de Gibraltar ! En outre, la dispersion entre deux missions de crédits clairement dédiés à une même politique publique nuit à l'information du Parlement et à la responsabilité du gestionnaire des crédits.

Par ailleurs, des éléments d'incertitude pèsent sur les crédits de notre action culturelle extérieure.

Le premier sujet d'inquiétude est le budget de l'Agence de l'enseignement français à l'étranger.

C'est dès le plus jeune âge que l'on transmet un goût pour une langue et une culture étrangère. C'est pourquoi ce réseau d'établissements français du primaire et du secondaire constitue un facteur puissant du rayonnement de la langue et des cultures françaises. « Qu'ont en commun l'architecte espagnol Ricardo Bofill, l'actrice américaine Jodie Foster, l'homme politique égyptien Boutros Boutros Ghali et la dessinatrice iranienne Marjane Satrapi ? », peut-on lire sur le site internet du ministère. C'est bien leur scolarité dans une école française ! Ces personnalités, ainsi que beaucoup d'autres passées dans les écoles françaises, font, il faut bien l'admettre, beaucoup plus pour le rayonnement de la France que de nombreuses actions de promotion de la France à l'étranger.

Or que prévoit l'État pour ce réseau en 2007 ? De lui remettre en dotation de nombreux immeubles, afin qu'il puisse les gérer directement. On pourrait s'en féliciter, mais il s'agit d'un cadeau empoisonné étant donné le sous-investissement notoire de l'État dans le patrimoine immobilier du réseau. Je cite, sur ce thème, un rapport de juillet dernier de l'inspection générale des affaires étrangères : « Sur 73 établissements en gestion directe, 37 n'ont bénéficié d'aucun entretien de la part du ministère des affaires étrangères, sur la période 1990-2005, soit un déficit de l'ordre de 17,5 millions d'euros pour ces seuls établissements. »

Pour financer les opérations d'acquisition, de construction ou d'extension, un rythme annuel moyen de dépenses à hauteur de 10 millions d'euros doit, en outre, être envisagé. Il est donc clair que l'augmentation de la subvention du ministère à l'Agence de 8 millions d'euros en 2007 est largement insuffisante pour compenser les coûts liés à ses nouvelles responsabilités immobilières.

Quelles en sont les conséquences ? À court terme, le fonds de roulement de l'Agence est utilisé ; à moyen terme, ce sont les frais de scolarité qui augmentent ; et, à long terme, l'attractivité du réseau en pâtit forcément. Nous souhaiterions vous entendre sur ce sujet, monsieur le ministre.

Deuxième sujet d'inquiétude, l'accueil des étudiants étrangers en France. Dans ce domaine, la France n'est pas, loin s'en faut, première de la classe. L'augmentation des crédits des bourses d'excellence est, cependant, un bon point pour le Gouvernement.

La mise en place des centres pour les études en France, qui ont notamment pour tâche de faciliter l'ensemble des démarches administratives des étudiants étrangers, est un autre bon point. La création de CampusFrance est plus difficile à évaluer. Si la fusion d'Édufrance et d'Égide paraît légitime, la baisse des crédits attribués à Édufrance au titre du programme 185 est plus critiquable.

Rappelons que la promotion du réseau universitaire français est une priorité. L'attraction d'étudiants étrangers, si possible les meilleurs d'entre eux, constitue un investissement extrêmement rentable sur le long terme.

Troisième sujet d'inquiétude, auquel on pourrait rapidement remédier, le réseau des établissements culturels. Le ministère tente de rationaliser, d'une part, l'installation des centres culturels et des alliances françaises, d'autre part, l'organisation de ces opérateurs, en fusionnant l'Association française d'action artistique, l'AFAA, et l'Association pour la diffusion de la pensée française, l'ADPF, en une unique agence appelée CulturesFrance. On donne ainsi une suite à une demande que j'avais adressée dans mon rapport de 2004 sur l'action culturelle extérieure de la France.

Le but est à la fois d'améliorer l'efficacité du dispositif de promotion de la culture française dans le monde et de lui donner une visibilité croissante grâce à la nouvelle appellation unique CulturesFrance, sur le modèle du Goethe-Institut allemand ou du British Council anglais.

Cette fusion a répondu préventivement aux critiques formulées par la Cour des comptes sur la gestion de l'AFAA à la suite de l'enquête demandée par la commission des finances. La Cour a cependant déploré le fait que la fusion ne soit pas encore mise en oeuvre.

La commission des affaires culturelles approuve cette fusion, mais considère qu'il faut laisser le temps à CulturesFrance de s'organiser. Elle sera attentive à ce que les nouvelles structures ne reproduisent pas sous une nouvelle appellation des méthodes et des comportements qui ont été à juste titre critiqués.

S'agissant de la dotation de CulturesFrance, la commission, qui a examiné les crédits de la mission avant la commission des finances, n'a pu se prononcer sur l'amendement proposé par M. Gouteyron.

Le président de la commission des affaires culturelles regrette, à cet égard, de n'avoir pu être informé plus en amont de cette intention, ce qui aurait permis à la commission de procéder aux consultations nécessaires et de débattre plus sereinement des moyens de cet opérateur stratégique.

La commission des affaires culturelles, qui a pris note des observations formulées tant par la Cour des comptes que par la commission des finances du Sénat, veillera très attentivement, à travers un groupe de réflexion, à ce que les engagements des uns et des autres soient tenus, afin qu'il ne soit pas porté atteinte au rayonnement culturel de la France

Dans l'attente des réponses que M. le ministre ne manquera pas d'apporter aux interrogations qu'elle a formulées, la commission des affaires culturelles s'en remet à la sagesse du Sénat sur l'ensemble des crédits destinés à la mission « Action extérieure de l'État » pour 2007. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :

Groupe Union pour un mouvement populaire, 77 minutes ;

Groupe socialiste, 29 minutes ;

Groupe Union centriste-UDF, 17 minutes ;

Groupe communiste républicain et citoyen, 15 minutes ;

Groupe du rassemblement démocratique et social européen, 13 minutes.

Je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d'intervention générale et celui de l'explication de vote.

Je vous rappelle également qu'en application des décisions de la conférence des présidents aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quinze minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.

M. Yves Pozzo di Borgo. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, contrairement aux rapporteurs, je souhaite m'exprimer, non sur l'économie générale de la mission, mais plutôt sur un problème particulier, qui rejoint les préoccupations de notre rapporteur spécial, auquel, monsieur le ministre, j'espère que vous pourrez répondre.

Après nos collègues députés Bernard Schreiner et Marc Reymann, qui sont intervenus lors de la discussion à l'Assemblée nationale, M. Jacques Legendre exprimera tout à l'heure sa perplexité vis-à-vis de la position paradoxale de la France.

Ainsi, la contribution de la France à une organisation, le Conseil de l'Europe, dont le siège est situé dans notre pays, à Strasbourg, est soumise à une croissance zéro depuis plusieurs années.

L'organisation, qui rassemble quarante-six États, est constituée de trois branches principales, le Comité des ministres et le secrétariat général, l'Assemblée parlementaire, au sein de laquelle j'ai l'honneur de représenter le Sénat, et la Cour européenne des droits de l'homme.

Mes quarante-cinq collègues viennent d'ailleurs d'élire notre compatriote M. Jean-Paul Costa à la présidence de cette cour, et je suis sûr, mes chers collègues, que vous voudrez joindre vos félicitations aux miennes, à l'adresse de ce grand magistrat.

Comme j'ai eu l'occasion de le faire au moment de l'examen de la participation de la France au budget des Communautés européennes, je voudrais revenir, à l'instar de mes collègues, sur la création d'une « agence de l'Union européenne des droits fondamentaux », dont a débattu le conseil « Justice et affaires intérieures », ce 4 décembre.

Au même moment, on constate le succès de la Cour de Strasbourg, qui peine à statuer sur les milliers de recours dont elle est saisie. Cet « encombrement » est la marque de la confiance dans la Cour des quelque 800 millions de citoyens européens, ressortissants des quarante-six États du Conseil de l'Europe, pour leur garantir l'exercice des droits proclamés par la convention de 1950.

Les États ne peuvent ignorer ni ce succès, ni le besoin de renforcement des moyens de travail de la Cour de Strasbourg. Bloquer le budget global du Conseil de l'Europe, c'est donc demander aux autres branches de l'organisation paneuropéenne de restreindre leurs propres moyens de fonctionnement pour financer par voie interne les besoins de la Cour. Cela peut se concevoir.

Le paradoxe est donc de réduire les possibilités d'action du Conseil de l'Europe et du système de contrôle des droits de l'homme, alors même que l'Union européenne s'apprête à dégager quelque 30 millions d'euros chaque année pour une nouvelle institution, cette « agence » dont ne sont fixées ni les compétences ratione loci ni les compétences ratione materiae.

Même si nous le regrettons, le traité constitutionnel n'est pas entré en vigueur. La Charte des droits fondamentaux n'a donc pas encore de portée normative. Dès lors, à quel texte de droit positif devrait se référer la future « agence » ? Jusqu'où s'étendrait sa compétence ? L'Union, augmentée des « nouveaux voisins » ?

Mais alors, la superposition avec le Conseil de l'Europe brouillerait un peu plus un système déjà peu lisible. On risque, tôt ou tard, d'aboutir à un conflit de droits, doublé d'un conflit de juridictions, car, n'en doutons pas, la future « agence » n'aura de cesse de développer sa propre jurisprudence et de se constituer en quasi-juridiction.

Il y a là plus qu'un paradoxe, un véritable gâchis financier et un gaspillage d'énergie.

M. Jacques Legendre. Très juste !

M. Yves Pozzo di Borgo. Il y a quelques années, une rencontre avait été organisée au Luxembourg entre la Cour européenne des droits de l'homme de Strasbourg et la Cour de justice des Communautés européennes de Luxembourg.

Les hauts magistrats étaient convenus qu'il était tout à fait possible d'organiser une répartition rationnelle afin d'éviter, précisément, les conflits de compétences et, surtout, les divergences de jurisprudence. La Cour européenne des droits de l'homme pourrait constituer en son sein une chambre spécialisée où ne siégeraient que les seuls juges issus des États de l'Union européenne.

Or, à cette solution de raison, d'ailleurs inscrite dans l'évolution normale des traités européens, on oppose une nouvelle institution, qui sera tôt ou tard concurrente des deux premières.

Je comprends bien le souhait de la Commission et du Parlement européen de mettre en avant leur rôle proactif en faveur des droits fondamentaux. Mais, outre que les vingt-sept États de l'Union européenne adhèrent depuis de nombreuses années à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et que leurs ressortissants connaissent le chemin de la cour de Strasbourg, nos concitoyens ne sont pas dupes de ces affichages.

Cette prolifération institutionnelle pourrait même être contre-productive. Nous devons empêcher que ne se développe le sentiment d'une Europe « usine à gaz » aux compétences incompréhensibles parce qu'enchevêtrées, et, donc, de plus en plus coûteuses.

D'emblée, la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, inspirée par notre compatriote René Cassin, prix Nobel de la paix, a été rédigée pour une Europe dont on espérait la pleine réunification continentale, dans la liberté et la garantie des droits fondamentaux.

Tous les États qui se sont émancipés de la dictature soviétique siègent au Conseil de l'Europe ; la Cour de Strasbourg les accompagne dans leur mutation vers l'État de droit. N'élevons pas, à nouveau, un mur entre l'Union européenne, dotée d'une « agence » propre, et les autres États européens.

Le pire serait d'accréditer l'existence d'un « double standard », excluant ceux qui ont payé parfois si cher la division du continent. Les droits de l'homme sont le socle du « modèle européen ». Nos concitoyens n'ont que faire de querelles de bornage entre institutions concurrentes, donc ruineuses. Finalement, cette prolifération affaiblit un système qui a fait ses preuves.

La polysynodie risque de donner une image bureaucratique de l'Europe, alors même que les droits de l'homme sont désormais le patrimoine commun de quelque 800 millions d'Européens.

Vous souhaitez, monsieur le ministre, avec MM. les rapporteurs ici présents, rationaliser les dépenses de l'action extérieure de la France. Comment ne pas vous approuver ? Il faut en effet toujours se souvenir que toute dépense nouvelle signifie des impôts alourdis.

Si vous souhaitez rationaliser la contribution de la France, n'est-il pas urgent d'organiser, bien sûr dans des formes décentes, la fin d'une nouvelle organisation créée par les gouvernements des quarante-six États du Conseil de l'Europe lors de leur troisième sommet, à Varsovie, les 16 et 17 mai 2005 ?

Il s'agit du « Forum du Conseil de l'Europe pour l'avenir de la démocratie pour renforcer la démocratie », forum qui rassemblerait « des décideurs, des fonctionnaires, des acteurs de terrain et des universitaires ».

J'apprécierais, monsieur le ministre, que vous nous communiquiez les noms, que je serais curieux de connaître, des représentants de ces catégories, toutes estimables, que vous avez dû désigner...

Je m'interroge sur la légitimité des personnes qui participeront à ce « forum » chargé de « renforcer, par sa réflexion et ses propositions, les travaux de l'Organisation dans le domaine de la démocratie », des personnes toutes nommées pour débattre de la démocratie alors même qu'elles ne détiennent aucun mandat du suffrage universel !

Pourtant, le Comité des ministres du Conseil de l'Europe, réuni le 27 septembre 2006, a prodigué de nouveaux encouragements à ce « forum », qui s'est déjà réuni deux fois, à Varsovie puis à Moscou, avant de se réunir en Suède l'année prochaine, puis en Espagne, puis en Ukraine, puis en Arménie...

Est-il judicieux, dans un contexte budgétaire de croissance zéro, de susciter la mise en place d'un nouvel organe nommé, dont le financement devra lui aussi être assuré « en interne », sans doute aux dépens de l'Assemblée parlementaire ? Or je rappelle que cette dernière est, elle, représentative puisque composée d'élus dont chacun représente le Parlement de son pays et qu'elle fait vivre la démocratie européenne depuis 1949. La démocratie est-elle donc trop sérieuse pour être confiée aux démocrates ?

Enfin, j'aurais voulu dire un mot du budget de l'Union de l'Europe Occidentale, dont on organise l'étouffement budgétaire, mais je crains que mon temps de parole ne soit épuisé.

Aussi je conclurai, monsieur le ministre, en vous assurant que le groupe UC-UDF votera vos crédits.

Vous savez les liens d'amitié et de pensée qui nous unissent. Certes, je soutiens la position du rapporteur spécial, car il est en effet nécessaire que ce ministère s'adapte aux nécessités budgétaires, mais je me mets aussi un peu à votre place, et je tenais à vous dire que nous sommes toujours très fiers de votre action : toutes les critiques qui ont accueilli celle-ci ont été injustes.

Je tenais aussi à vous dire que le fait qu'un médecin exerce les fonctions de ministre des affaires étrangères est une très bonne chose,...

M. Jacques Blanc. Très bien !

M. Yves Pozzo di Borgo. ...comme l'on peut s'en apercevoir lorsque l'on « bouge » un peu dans le monde, car la santé entre aussi dans le champ de la diplomatie : tous nos amis étrangers que je rencontre apprécient que la France ait une action aussi efficace dans ce domaine. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt-deux heures.)

M. le président. La séance est reprise.

Nous poursuivons l'examen des dispositions du projet de loi de finances pour 2007 concernant les crédits de la mission « Action extérieure de l'État ».

La parole est à M. Jean-Pierre Cantegrit.

M. Jean-Pierre Cantegrit. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'aurais aimé vous entretenir des nombreux sujets qu'un sénateur représentant les Français de l'étranger peut aborder. J'imagine toutefois que certains de mes collègues le feront avec autant de talent que moi-même. Aussi aborderai-je les crédits d'assistance de votre ministère, monsieur le ministre.

Depuis 1977, ces crédits permettent d'aider nos compatriotes expatriés démunis, handicapés ou âgés et, ce qui est plus récent, les enfants français en détresse.

Les crédits inscrits dans le projet de loi de finances dans le cadre de la mission « Action extérieure de l'État », rattachés au programme 151 « Français à l'étranger et étrangers en France » et dévolus à la sous-action 13 « Pôle Social », sont d'un montant de 16,89 millions d'euros pour 2007. Ils sont répartis entre l'aide aux personnes, pour 16,09 millions d'euros, et les subventions aux sociétés de bienfaisance, pour 800 000 euros.

Si l'on compare ces crédits à ceux qui avaient été alloués en 2006, soit 16,81 millions d'euros, on ne peut que regretter la stagnation constatée alors que, dans le même temps, les crédits d'ensemble de votre département augmentent de 3,8 % et que ceux de la mission dont fait partie l'action sociale progressent de 2,4 %. Si on leur avait appliqué ce coefficient, ils seraient de 17,22 millions d'euros. Ce serait encore bien loin de nous permettre d'engager toutes les actions que nous pourrions entreprendre pour les Français démunis, monsieur le ministre.

Du fait de cette stagnation, si l'on veut continuer à aider les quelque 5 150 allocataires, sans oublier les enfants français en détresse dont le nombre ne cesse d'augmenter, les services de la direction des Français à l'étranger vont devoir continuer à gérer l'attribution des allocations de solidarité ou des allocations aux handicapés, ainsi que les diverses aides qui sont accordées, avec la minutie et la rigueur dont ils font preuve depuis plusieurs années. Je tiens ici à rendre hommage à M. Barry Delongchamps et à ses collaborateurs, dont la gestion est exemplaire.

La commission permanente pour la protection sociale des Français de l'étranger du ministère des affaires étrangères, où je représente le Sénat et à qui il revient en principe de décider du montant de ces diverses allocations, ne peut plus désormais qu'entériner les propositions qui lui sont soumises. Augmenter l'un des montants proposés reviendrait en effet à en diminuer un autre de la même somme et l'arbitrage nous est extrêmement difficile.

Cette gestion restrictive, mais nécessaire, de la direction des Français à l'étranger est due à la pérennisation d'une situation dont je crains qu'elle ne se maintienne. On ne peut que le déplorer, car cela empêche toute progression, toute action novatrice à l'égard des Français de l'étranger, pour lesquels on remarque une paupérisation croissante.

Or, tant que les crédits du « Pôle social » de votre ministère ne connaîtront pas de hausse significative, on ne pourra engager aucune action qui permettrait à nos compatriotes expatriés de sentir que la solidarité nationale s'exprime aussi à leur égard.

Quelles améliorations pourrait-on apporter, me direz-vous, monsieur le ministre, puisque de nombreuses aides sont déjà accordées à nos compatriotes en difficulté à l'étranger.

Eh bien ! il s'agit d'abord d'aider l'enfance en détresse, élément nouveau auquel nous devons faire face. Je connais votre grand coeur, monsieur le ministre, et je ne doute pas que ce sujet vous interpelle.

Je prendrai un autre exemple : la caisse de sécurité sociale des Français de l'étranger, la CFE, que je préside. La suspension du paiement de la rétroactivité de cotisation correspondant à deux ans de cotisation pour les allocataires du ministère des affaires étrangères a été demandée. La CFE ne serait pas opposée à une telle mesure, mais c'est une caisse d'assurance volontaire. Elle gère des fonds dont elle est responsable. Elle considère donc que c'est à l'État, c'est-à-dire au ministère des affaires étrangères, sur ses crédits sociaux, de faire en sorte que cette rétroactivité ne s'applique pas.

En ce qui concerne les personnes âgées résidant à l'étranger qui ne peuvent revenir en France, il serait équitable de leur permettre d'avoir accès, dans leur pays de résidence, à des maisons de retraite françaises, comme il en existe déjà au Brésil, au Maroc ou en Tunisie.

De telles maisons pourraient être multipliées pour nos compatriotes âgés qui terminent leur vie dans leur pays de résidence et n'ont pas les moyens de rentrer en France. Pourquoi d'ailleurs le feraient-ils ? Comment seraient-ils accueillis ?

Au moyen des crédits du « Pôle social », le ministère des affaires étrangères pourrait participer à la création de tels établissements, aux côtés d'associations locales ou de sociétés de bienfaisance. Sans vouloir récréer à l'étranger ce qui existe en France pour les plus démunis, ce qui est évidemment impossible, nous pourrions nous engager dans une voie similaire et adaptée aux contingences locales.

Enfin, je ne vous l'apprendrai pas, monsieur le ministre, puisque vous avez été ministre de la santé, il existe en France un système d'accès aux soins particulier aux plus démunis. Pour veiller à la santé des Français de l'étranger, dont les plus démunis sont, comme en France, ceux qui sont le plus touchés par la maladie, nous pourrions mettre en oeuvre des campagnes d'information et de prévention relatives au Sida, aux maladies endémiques, mais aussi à la vaccination. Ces campagnes seraient spécifiquement destinées à nos compatriotes et ciblées sur les risques médicaux liés à leur pays de résidence.

Nos consulats, qui oeuvrent déjà dans ce sens, n'ont que des moyens limités, de même que les associations ou les sociétés de bienfaisance : leur action est forcément restreinte. Si l'on veut mener de véritables campagnes préventives, et toucher ainsi tous les Français, il faut plus de moyens.

Parallèlement, il serait souhaitable de multiplier les dispensaires, où nos compatriotes les plus démunis pourraient se faire vacciner et recevoir des soins d'urgence dans de bonnes conditions. Bien entendu, il faut agir avec précaution et discernement, afin de ne pas heurter les autorités locales et de ne pas contrevenir à la législation locale.

Mais, sans argent, comment pouvons-nous faire ? Si nous voulons que les Français de l'étranger connaissent l'équivalent de ce qui se fait en métropole, ce qui est bien entendu l'objectif d'un représentant des Français de l'étranger, et ce qui n'est pas le cas aujourd'hui, il est indispensable que les crédits d'assistance s'accroissent de façon substantielle, monsieur le ministre. Sinon, nous finirons par régresser, et les Français expatriés exclus du système continueront à être de plus en plus nombreux, ce qui serait inacceptable.

C'est pourquoi, monsieur le ministre, tout en soutenant votre action, que j'apprécie, j'aurais souhaité que ce budget soit augmenté de façon plus significative.

M. Jean-Pierre Cantegrit. Des augmentations ont eu lieu lorsque M. Juppé ou M. Védrine étaient ministres des affaires étrangères. J'aurais aimé que vous, qui êtes un homme de coeur, attachiez votre nom à l'accroissement de ce budget. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur des travées socialistes.)

M. le président. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou.

M. Aymeri de Montesquiou. Monsieur le ministre, vous êtes assis au bureau de M. de Vergennes, dans le fauteuil de Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord, vos illustres prédécesseurs, ce qui est sans doute à la fois très confortable, mais aussi fort incommode, car aujourd'hui la réalité diplomatique de la France n'est plus celle des rois, de l'Empire ou de la Restauration, ni celle de la présidence du Général de Gaulle. Notre pays n'occupe plus la même place dans le concert des nations.

M. Robert Hue. Dans les colonies, surtout !

M. Aymeri de Montesquiou. Néanmoins, il semble que les ors du Palais d'Orsay nous laissent croire qu'il en est ainsi, puisque le poids de l'histoire nous entraîne à conserver le deuxième réseau diplomatique après celui des États-Unis, mais avec un budget des affaires étrangères de 4,5 milliards d'euros, alors que ce pays dispose de 25 milliards.

Cela nous conduit à un saupoudrage qui émousse considérablement notre action et va à l'encontre de l'efficacité et de la culture du résultat, alors que celle-ci s'impose à tous les ministères.

Elle a pour objectif la meilleure utilisation possible de chaque euro et doit exprimer aussi une stratégie. L'histoire a façonné notre diplomatie et l'implantation de nos ambassades, mais, aujourd'hui, notre appartenance à l'Union européenne et les techniques de télécommunications nous imposent de transformer considérablement notre carte diplomatique. Le fait de posséder le deuxième réseau diplomatique constitue-t-il une garantie d'efficacité ? Non !

Je crains que la hiérarchie des postes diplomatiques ne soit obsolète, car trop peu différente de celle de l'époque de la création des Nations unies. De plus, le budget des affaires étrangères soutient-il une stratégie ? Avant de défendre l'idée d'un réseau diplomatique qui devrait être beaucoup plus adapté au service d'une stratégie, je voudrais souligner le caractère exemplaire des réformes conduites par votre ministère, monsieur le ministre.

J'évoquerai tout d'abord les effectifs.

Alors qu'ils sont en baisse depuis douze ans, pour 2007, une nouvelle réduction de 257 équivalents temps plein travaillés, ou ETPT, est prévue. Les effectifs de ce ministère étant très modestes au regard de l'ensemble des effectifs de l'État - de l'ordre de 0,5 % - il n'est plus justifié de poursuivre cette baisse, car cela risquerait de mettre en danger le bon déroulement des missions régaliennes dont ce ministère a la charge. En quinze ans, les effectifs du ministère ont déjà été réduits de 11 %.

Des progrès sont également à relever en matière de réalité budgétaire. Avec la LOLF, sont reconnus comme faisant partie du ministère les recrutés locaux. Leur rémunération ne fait donc plus partie des dépenses de fonctionnement, mais constitue une partie de la masse salariale du ministère, ce qui a plus de sens.

Par ailleurs, la signature, le 18 avril dernier, d'un contrat triennal de modernisation liant le ministère des affaires étrangères et le ministère du budget représente une première, ce dont je vous félicite, monsieur le ministre.

Les principales évolutions inscrites dans ce projet de budget sont la conséquence des engagements pris dans le cadre de ce contrat : la rétrocession de 100 % des produits des ventes immobilières à l'étranger, afin d'atteindre un autofinancement de politique immobilière du ministère en trois ans ; un taux de retour au budget du ministère de 50 % de la recette issue des frais de visas, qui représentera un financement complémentaire pour la modernisation du réseau consulaire ; enfin, l'introduction de la biométrie dans les visas.

Toutefois, quelle stratégie a-t-elle été décidée ?

La nécessité de conduire une réflexion structurée sur notre diplomatie vient seulement d'être relancée. Le comité interministériel des moyens de l'État à l'étranger ne s'était pas réuni depuis huit ans. Il l'a enfin été sous l'égide du Premier ministre le 25 juillet dernier. Monsieur le ministre, huit ans de réflexion ne sont pas un gage de réactivité.

De plus, aucune ligne budgétaire n'est inscrite pour l'intelligence économique, qui demeure un programme de défense. Cela n'est-il pas aberrant, alors que celle-ci devrait constituer un élément essentiel de notre stratégie économique ?

La création prochaine d'un conseil des affaires étrangères a été annoncée le 17 octobre dernier ; il s'agit là d'une bonne décision.

Les plus grandes diplomaties mondiales se transforment ; ainsi, soulignons la réorganisation du Foreign Office, le redéploiement annoncé du réseau nord-américain au service d'une diplomatie « transformationnelle ».

Pour bien poser la problématique, je reprendrai l'intitulé du séminaire de Royaumont : « L'outil diplomatique face aux défis de l'européanisation et de la mondialisation » ; ce sont là deux défis qu'il faut absolument relever.

En dix ans, le nombre d'implantations dépendant du ministère des affaires étrangères situées en et hors de France est passé de 461 à 418. Cette reconcentration va dans le bon sens, même si elle est encore insuffisante pour donner plus d'efficacité à notre diplomatie par un laser beaming destiné à muscler notre stratégie.

La réorganisation du réseau consulaire, notamment en Europe, se poursuit, mais beaucoup trop lentement.

Ainsi, pourquoi conserver en Espagne, en plus de l'ambassade et du consulat général de Madrid, trois consulats généraux à Bilbao, Séville et Barcelone, ainsi que deux antennes consulaires à Alicante et Malaga ? Je m'étonne également de la conversion d'un certain nombre de consulats dans l'Union européenne en « consulats d'influence », exerçant à la fois une mission d'influence et une fonction culturelle. Pourquoi conserver un consulat d'influence à Anvers, c'est-à-dire à cinquante kilomètres de Bruxelles ? J'arrête là l'énumération !

Ayons à l'esprit - ce n'est pas une boutade - que certains petits consulats consomment près de la moitié de leur budget pour fêter le 14  juillet ! Les maintenons-nous pour comptabiliser le camembert, le champagne, l'armagnac consommés comme des exportations ?

Plus solennellement, sommes-nous trop peu européens pour penser que nos ressortissants ne sont pas partout chez eux dans l'Union européenne ? Pourquoi maintenons-nous des dizaines de fonctionnaires dans les capitales européennes, alors que les villes chinoises allant jusqu'à 10 millions d'habitants en sont dépourvues ?

M. Aymeri de Montesquiou. Des consulats généraux seront créés en Russie, à Ekateringburg, en Inde, à Calcutta, Bangalore et Chennai, anciennement Madras, ainsi qu'en Chine. La création de ces consulats est justifiée par la demande croissante de visas dans certaines zones, à la suite, par exemple, de l'accord sur le tourisme conclu avec Pékin.

L'expérimentation de pôles consulaires régionaux est en projet. Ils seraient structurés autour d'un poste disposant des moyens nécessaires pour traiter les demandes et de postes plus petits ayant essentiellement un rôle d'accueil du public et de réception des demandes ; il s'agit là d'une bonne rationalisation.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire quelles sont les grandes lignes qui présideront à la réorganisation du dispositif consulaire dans l'Union européenne, prévue de 2008 à 2013 ? J'espérais sa suppression par l'accessibilité de nos ressortissants aux administrations locales.

En 2006, une ambassade a été ouverte au Liberia, une autre au Monténégro. Pourquoi ne pas avoir pris les mêmes dispositions qu'au Malawi, où l'agent diplomatique français est hébergé par l'ambassade d'Allemagne et au Sierra Leone, où il est hébergé par l'ambassade britannique ?

Cette configuration pourrait être étendue à d'autres pays qui ne constituent pas des priorités pour l'action de la France, par exemple en Amérique centrale.

D'une façon plus drastique, pourquoi ne pas mettre en place, en dehors des pays prioritaires, des consulats de l'Union européenne : à même passeport, celui de l'Union européenne, même consulat !

Quelle priorité formuler ?

L'Asie doit être un axe prioritaire de développement de notre diplomatie. La Chine, en particulier, devrait attirer toute notre attention en tant que future première puissance économique mondiale. Au-delà de nos partenaires européens, notre concurrent principal était les États-Unis ; aujourd'hui, la Chine est présente partout : en Asie, en Amérique du Sud, où elle échange des satellites contre du pétrole, ou encore en Afrique, où elle vend désormais des avions.

M. Aymeri de Montesquiou. Inversement, le marché chinois a des besoins énormes et suscite toutes les convoitises de tous ceux qui traitent des transports et de l'énergie, domaine où nous excellons. Comment se fait-il que nous ne soyons qu'au dix-septième rang des fournisseurs de ce pays ? Soit l'action extérieure de l'État est inutile, soit elle est très mal organisée.

La dernière grande opération immobilière fondée sur un projet d'architecture ambitieux sera la construction du complexe diplomatique à Pékin, projet longtemps attendu et qui atteint 25 millions d'euros pour la première phase de construction. Nous devrons cependant compléter cette construction hautement symbolique par des échanges qui, eux, sont concrets, plus nourris, ainsi que par une meilleure pénétration française dans les réseaux chinois.

Les États-Unis ont mis en place un dialogue biannuel de très haut niveau, le stratégic economic dialogue, coprésidé par le Secrétaire américain au Trésor, M. Paulson, et Mme Wu Yi, vice-premier ministre de la République populaire de Chine. Que faisons-nous d'équivalent ?

Ne convient-il pas également de renforcer notre action en Asie centrale, région stratégique du point de vue tant économique que politique, véritable trait d'union entre l'Europe et l'Asie qui sera traversée d'ici aux prochaines décennies par des liaisons ferrées Europe-Chine, où le Kazakhstan deviendra, dans dix à quinze ans, le cinquième exportateur de pétrole, où l'Ouzbékistan, tout comme le Turkménistan et le Tadjikistan, est frontalier de l'Afghanistan dont les convulsions ne font que grandir, plutôt que de nous contenter d'être derrière tous nos concurrents européens et asiatiques, ce qui affaiblit, comme c'est le cas aujourd'hui, notre représentation ?

On peut regretter qu'aucun indicateur ne concerne directement l'évolution des réseaux du ministère alors que plusieurs actions leur sont consacrées et que toute décision de cet ordre peut avoir des conséquences politiques notables dans les relations entre la France et les pays concernés. En dix ans, la carte politique et économique du monde a été bouleversée, alors même que notre représentation extérieure au service non seulement de nos valeurs, mais aussi de notre économie, est restée à peu près la même.

Monsieur le ministre, notre pays possède des atouts incontestables. Or nous ne les utilisons pas au mieux, car nous sommes freinés par l'illusion de pérenniser notre passé. Nous dispersons inutilement nos moyens et sommes trop absents de zones où se jouera une partie de l'avenir du monde.

La réorganisation timide de notre appareil diplomatique ne fait pas apparaître les axes majeurs d'une stratégie mise au service de l'action extérieure de l'État. Notre potentiel, de par la qualité de son personnel, devrait être mieux utilisé grâce à des choix clairs afin d'atteindre de bien meilleurs résultats.

M. Aymeri de Montesquiou. Néanmoins, monsieur le ministre, conscients des efforts très importants entrepris par le ministère pour se moderniser, nous adopterons les crédits de la mission « Action extérieure de l'État ». (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Robert Hue.

M. Robert Hue. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la guerre en Irak, le conflit israélo-arabe et la situation au Liban, la grave question du nucléaire iranien, les crises au Darfour, en Centrafrique, au Tchad, au Soudan et en Côte-d'Ivoire sont autant de signes que le monde ne tourne pas rond et que la diplomatie est plus que jamais nécessaire. Vous êtes bien placé pour le savoir, monsieur le ministre !

Le budget de la mission « Action extérieure de l'État » que nous examinons ce soir, en hausse de 3,8 %, atteint 4,5 milliards d'euros.

Le maintien de la paix dans le monde mérite, certes, amplement cette augmentation, mais ce budget est-il réellement à la hauteur des attentes tant de nos concitoyens que des dirigeants des nations concernées et des peuples qui souffrent ? Vous comprendrez que je profite de ce débat pour évoquer d'une façon plus générale quelques aspects de la politique étrangère de la France, de votre politique, monsieur le ministre.

Un rapide tour d'horizon permettra à chacun d'apprécier notre position et de constater les manquements de la France, même si, souvent, des efforts sont faits et même si les déclarations du Président de la République ne manquent pas, parfois, de pertinence ; mais les faits et les actions concrètes ne suivent visiblement pas.

Depuis 2003, date à laquelle M. de Villepin tentait de convaincre, dans un élan majestueux et positif, le Conseil de sécurité de l'ONU de renoncer au projet irakien de l'administration Bush, force est de constater que la diplomatie française connaît de sérieux revers.

Alors que, non dénuée d'atouts, la France possède le deuxième meilleur réseau diplomatique dans le monde, fait preuve d'une ambition certaine et dispose d'une puissance militaire importante, elle a cependant rencontré d'importants écueils : l'isolement en Europe sur le dossier de l'Organisation mondiale du commerce, l'OMC, les hésitations sur l'ouverture des négociations avec la Turquie, l'échec du sommet de Barcelone, boudé par de nombreux dirigeants de pays arabes, l'absence d'un véritable accord de coopération avec l'Algérie, les discussions houleuses et les difficultés persistantes de la France en Afrique et leur aggravation inéluctable.

D'ailleurs, même si elle s'en défend, la France donne l'impression de vouloir continuer à défendre son pré carré francophone sur ce continent.

Les forces militaires françaises sont activement présentes sur le sol africain avec, depuis quelque temps, un engagement de nos soldats en Afrique centrale qui mérite une clarification rapide. Peut-être pouvez-vous nous éclairer sur ce point, monsieur le ministre ? Ainsi, avec 11 000 hommes répartis dans les différents pays, dont 4 000 soldats en Côte d'Ivoire, notre pays a pour objectif de contribuer au maintien de la paix.

D'ailleurs, la France pourra d'autant mieux jouer un rôle reconnu par les Ivoiriens et l'Union africaine qu'elle contribuera à mettre en oeuvre le dispositif proposé par cette dernière en faveur d'une issue politique à la crise, dans le cadre de l'ONU et dans le respect scrupuleux du processus électoral qui a été retenu.

À cet égard, le point de vue de la France semble de plus en plus ambigu quand, du côté de l'Élysée, on donne parfois l'impression de traiter la Côte d'Ivoire comme un pays sous tutelle. Une telle attitude altère l'image de la France en Afrique, malheureusement déjà ternie. Si, de façon générale, notre présence militaire sur ce continent me semble nécessaire au maintien de la paix, elle ne peut plus, désormais, se traduire par un engagement en première ligne.

La question ne se pose-t-elle pas du maintien, à terme, de nos 4 000 soldats en Côte d'Ivoire, dont le coût s'élève à 170 millions d'euros, et de leur efficacité réelle pour mettre en oeuvre, sous le contrôle des Nations unies, un processus électoral et un désarmement garantissant aux Ivoiriens des élections libres et démocratiques ?

La protection de nos concitoyens doit être notre préoccupation première, mais en aucun cas notre présence ne doit apparaître comme partisane et tutélaire aux yeux des Ivoiriens, car nous risquerions alors de nous trouver, et peut-être très rapidement, dans une situation de conflit frontal particulièrement dangereuse. Tout cela ne m'empêche pas de saluer le travail difficile des soldats de la force Licorne et de nos diplomates, que j'ai pu apprécier.

La situation gravissime au Proche-Orient ne doit laisser personne indifférent. La France est attendue sur cette question, tant sont forts les liens qui nous unissent au peuple palestinien, mais aussi aux forces de paix israéliennes et, plus globalement, dans la réponse aux problèmes qui se posent dans cette région.

La mise en place d'un gouvernement d'union nationale et les manifestations des forces progressistes israéliennes réclamant l'arrêt du conflit me semblent porteuses d'espoir. La France a un rôle particulier à jouer pour que la politique reprenne le dessus sur la force, et on peut lui reprocher son manque d'initiative politique. Pourquoi tant d'inertie ?

Afin qu'une solution de paix s'impose entre Israël et la Palestine, notre pays doit se montrer plus efficace et plus entreprenant. Il doit impulser la tenue d'une conférence internationale sous l'égide des Nations unies, tandis que l'Union européenne doit agir pour que soient rétablis tous les financements de l'Autorité palestinienne.

Monsieur le ministre, quand la France prendra-t-elle, avec ses partenaires européens, des initiatives pour soutenir ce projet et pour que soient rappelées les conditions d'un règlement politique juste, qui passe par l'application des résolutions des Nations unies ? C'est dans ces conditions, en effet, qu'une paix durable est possible au Proche-Orient.

Face aux provocations et aux propos inacceptables du président iranien, la France doit être ferme. L'affaiblissement du traité de non-prolifération des armes nucléaires est une honte ! Avec ses partenaires européens, la France doit mettre tout en oeuvre pour trouver une solution politique à la crise, c'est-à-dire ne pas rompre le dialogue, sans pour autant faire la moindre concession sur l'application in extenso du traité de non-prolifération, et notamment de son article 3.

En ce qui concerne la guerre qui a ravagé le Liban cet été, en mettant la région à feu et à sang, les États engagés dans la résolution de ce conflit, dont la France, ont été incapables de faire respecter les conventions et les résolutions qu'ils ont eux-mêmes portées et signées.

L'attentat contre le ministre de l'industrie libanais est intervenu dans ce contexte et, compte tenu du climat politique tendu, le risque d'une déstabilisation du pays n'est que plus grand.

Le Liban a besoin de paix, de souveraineté, de sécurité. Il faut absolument parvenir à un règlement politique de la crise libanaise, en intensifiant les discussions, en contrôlant l'embargo sur les armes et en refusant les survols de l'aviation israélienne. Le rôle renforcé de la force intérimaire des Nations unies au Liban, la FINUL, est essentiel.

Mes chers collègues, je termine ce trop rapide tour d'horizon des crises en évoquant l'Afghanistan, où la situation se dégrade. Si la sécurisation des environs de Kaboul est très positive, les opérations offensives ponctuelles de nos forces en direction du sud du pays le sont nettement moins. La lutte contre les talibans et le trafic d'opium constitue plus que jamais une nécessité, et nous devons l'exiger du gouvernement afghan.

Mes chers collègues, j'ai tenu à donner mon point de vue sur la politique internationale de la France en général, car le Parlement, et notamment le Sénat, doit avoir plus fréquemment l'occasion d'en débattre, me semble-t-il.

M. Serge Vinçon, président de la commission des affaires étrangères. C'est vrai ! D'ailleurs, nous y travaillons !

M. Robert Hue. Chacun doit pouvoir donner son sentiment sur ces questions !

J'en viens maintenant au programme « Rayonnement culturel et scientifique », au sein duquel l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, l'AEFE, voit ses crédits augmenter de 8 millions d'euros, après une baisse constante depuis 2005. L'État finançait cet établissement public à hauteur de 60 % lors de sa création, contre seulement 40 % aujourd'hui. Les familles participent de plus en plus au financement de cette agence et supportent donc l'essentiel du coût du désengagement de l'État.

Pourtant, au travers de l'AEFE, c'est l'avenir de la présence française dans le monde, le rayonnement de notre culture et l'influence économique et politique de notre pays qui se préparent. Monsieur le ministre, pourriez-vous nous préciser, concrètement, quels sont les moyens dont dispose l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger pour entretenir son matériel et moderniser ses établissements ?

Le mois dernier, vous avez vous-même déclaré sur les bancs de l'Assemblée nationale que votre objectif était « d'améliorer l'offre de bourses scolaires au profit de nos concitoyens les plus défavorisés ». Dont acte ! L'AEFE et les lycées bilingues comprenant des filières francophones constituent un atout largement sous-exploité, faute de volonté et de moyens pour renforcer l'attractivité de notre enseignement supérieur.

De même, l'évolution de la politique de coopération culturelle, scientifique et technique est très préoccupante, puisque les coopérants civils, qui étaient 23 000 en 1980, ne sont plus que 1 300 en 2005.

En outre, ces contrats, qui sont déjà peu nombreux, n'ont qu'une durée d'un an. Comment peut-on sérieusement penser qu'une durée aussi courte est de nature à finaliser de véritables programmes de coopération culturelle, surtout quand on sait que dix-neuf centres culturels français ont été fermés ?

Le programme « Français à l'étranger et étrangers en France » constitue une transcription parfaite de la politique du ministre de l'intérieur. Le délai des traitements des demandes d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, l'OFPRA, a été réduit pour la deuxième année consécutive ; 45,5 millions d'euros sont affectés à cette manoeuvre scandaleuse, dont le but non avouable est de solder, sans investigations poussées, les demandes.

Est-ce digne d'une nation comme la France ? Est-ce digne d'une bonne politique extérieure de l'État et d'une bonne gestion des flux migratoires, question essentielle pour l'avenir de l'humanité ? Est-ce digne de notre histoire ?

Le deuxième objectif du programme 151 est d'assurer un service consulaire de qualité. Les nombreux témoignages que j'ai pu recueillir, que ce soit lors de mes déplacements à l'étranger ou lors de rendez-vous à ma permanence locale, attestent effectivement de ce besoin d'écoute, de qualité d'accueil et de rapidité d'exécution des formalités demandées.

L'année dernière, lors de l'examen de ce même budget, j'avais rendu hommage à la qualité du travail fourni par les personnels qui forment notre réseau diplomatique. Je ne reviendrai pas sur les nombreuses insuffisances qui ont été soulignées par les orateurs qui m'ont précédé, à la différence que je ne voterai pas les crédits de cette mission.

Je renouvelle aujourd'hui cet hommage et demande que ces personnels reçoivent les moyens qui leur sont nécessaires pour accomplir leurs missions dans les meilleures conditions et rendre le service qui est attendu.

Notre politique étrangère doit être forte, par son influence mais aussi par sa capacité de proposition.

Vous l'aurez compris, monsieur le ministre, compte tenu de la politique extérieure que votre gouvernement a choisi de mener et de l'incohérence totale entre les missions de notre diplomatie, le discours du chef de l'État sur la scène internationale et les trop faibles moyens mis à la disposition du Quai d'Orsay, nous n'avons d'autre choix que de voter contre votre budget. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Plancade.

M. Jean-Pierre Plancade. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le débat budgétaire sur l'action extérieure de la France est aussi l'occasion de faire le point sur les affaires du monde et sur le rôle qu'y joue notre pays.

Aussi, je souhaite aborder avec vous plusieurs sujets, à savoir la question de la prolifération nucléaire, l'évolution de la situation en Afghanistan et dans toute la région Est de l'Afrique, mais j'évoquerai tout d'abord l'Irak, et le probable infléchissement de la politique américaine dans la péninsule arabique.

Mardi dernier, devant le Sénat des États-Unis, le nouveau secrétaire d'État à la défense, M. Robert Gates, laissait entendre que les troupes américaines « n'étaient pas en train de gagner la guerre en Irak ». Ces propos révélaient déjà une nouvelle appréciation de la situation. Un nouveau coup de tonnerre a éclaté hier, avec la publication des conclusions du rapport de la commission Baker. Un retrait, progressif et complet, des troupes américaines est désormais préconisé, et ce dès 2008.

Désordre, guerre civile, fluctuation des marchés pétroliers et impact sur l'économie mondiale, déplacements de djihadistes, risque d'embrasement de la région et terrorisme, tel est le constat que chacun d'entre nous peut faire. La décision d'intervenir en Irak a été une catastrophe, et la France a été le premier pays à le dire. Mais si, aujourd'hui, les Américains se retirent, c'est certainement une autre catastrophe qui s'annonce.

Face à ce dilemme, la France doit-elle aujourd'hui modifier sa politique irakienne ? L'Europe doit-elle intensifier son aide aux Américains et au peuple irakien ? Monsieur le ministre, quel est votre sentiment en la matière ?

Je voudrais évoquer également la question de la prolifération nucléaire. L'équilibre que nous étions parvenus à maintenir pendant des décennies, malgré les crises, se trouve sur le point d'être rompu, alors que l'Iran et la Corée du Nord sont si près d'obtenir l'arme atomique.

Je souhaiterais formuler trois brèves remarques.

Premièrement, ces deux pays tiennent des discours belliqueux, et parfois même tout à fait inacceptables quant à leurs intentions. Si l'histoire nous a appris quelque chose, c'est bien que les extrémistes disent ce qu'ils font et font ce qu'ils disent. Il y a tout lieu de ne pas l'oublier, et donc d'être inquiet.

Deuxièmement, si ces deux États accèdent à l'arme nucléaire, il y a de fortes chances que se produise un « effet domino », c'est-à-dire une accélération de la prolifération, dont nous ne pouvons savoir où elle s'arrêtera. En effet, ni le Japon ni la Corée du Sud, en Asie, ni l'Égypte, l'Arabie Saoudite ou la Turquie, au Moyen Orient, n'accepteront de rester démunis face aux ambitions de leurs voisins nouvellement nucléarisés.

Troisièmement, si cela se produit, le traité de non-prolifération deviendra obsolète. Aussi, il me semble nécessaire d'agir en amont et de poser dès à présent la question de l'efficacité et de la pertinence actuelle de ce traité.

Je sais bien qu'à l'origine même du traité se trouve le droit pour tous les États d'accéder au nucléaire civil, à la condition de renoncer au nucléaire militaire. Cet accord a fonctionné pendant longtemps, mais qui peut dire que c'est encore le cas aujourd'hui, alors que, depuis des années, l'Iran refuse de véritables contrôles de l'Agence internationale de l'énergie atomique, l'AIEA, et que la Corée du Nord est sortie unilatéralement du traité ?

Nous savons tous que le nucléaire constitue par définition une technologie duale, qui rend possible le passage d'une utilisation civile à un usage militaire. Aussi, en l'absence de contrôle, rien ne peut nous garantir que l'Iran ou la Corée du Nord ne sont pas déjà passés du civil au militaire.

Monsieur le ministre, le moment n'est-il pas venu de reconsidérer à présent la question du nucléaire civil sous l'angle de la proposition faite par M. El Baradeï, me semble-t-il, c'est-à-dire de créer une agence internationale du nucléaire civil auprès de laquelle les États pourraient s'approvisionner ?

Chaque jour, le comportement des États voyous rend caduc le Traité de non-prolifération. Nous devons porter ce grave débat devant l'opinion publique. D'autant que nous constatons les difficultés, pour ne pas dire l'impuissance du Conseil de sécurité lorsqu'il s'agit de trouver un accord pour engager, puis faire appliquer des sanctions, notamment à propos de l'Iran.

À ce sujet, monsieur le ministre, pourriez-vous nous dire exactement où en sont les discussions avec ce pays ? De multiples informations confirment l'accroissement de la coopération entre Téhéran et Pyongyang : nous savons que de plus en plus de scientifiques et d'ingénieurs iraniens se rendent en Corée du nord pour collaborer à la conception du missile Taepodong 2, dont le troisième étage ressemble étrangement à celui du missile iranien Shahab 4 ? La question de la coopération irano-nord-coréenne a-t-elle été posée au sein du Conseil de sécurité ?

S'agissant de l'Afghanistan comme de l'Iraq, le constat paraît clair. Dans les deux cas, c'est mal engagé ! Et l'énorme manne financière engendrée par la production d'opium ne fait qu'aggraver le problème et provoque, en France et dans toute l'Europe, un afflux croissant d'héroïne.

En Afghanistan, notre engagement militaire devait être réévalué en fonction de l'intensification des combats. C'est ce qui a été fait lors du sommet de Riga. Cependant, je déplore que la représentation nationale n'ait pas été consultée sur la question de la réévaluation de notre engagement en Afghanistan, comme cela a été le cas lorsqu'il a été décidé d'envoyer nos hommes là-bas. Ce refus d'impliquer le Parlement dans la procédure de prise de décision sur des questions aussi essentielles demeure, à mon sens, problématique.

Je rappellerai que cette mission est la première qui est réalisée par l'OTAN en dehors du strict cadre euro-atlantique. Gardons à l'esprit que l'OTAN n'a pas vocation à devenir une alliance planétaire.

M. Jean-Pierre Plancade. Vouloir sans cesse élargir le cadre d'intervention de l'OTAN, comme le souhaitent nos amis américains, c'est d'abord s'éloigner des principes qui la fondent, mais c'est aussi et surtout affaiblir la défense de l'Europe.

S'agissant du Darfour et de ce qui est en train de devenir une crise régionale symptomatique, cette guerre menée à « huis clos » a déjà provoqué la mort de 200 000 personnes, en moins de quatre ans. Ne nous y trompons pas, chaque jour, le nombre de victimes et de « déplacés » ne cesse de croître.

Malgré les grands discours, les déclarations, les engagements, et même la présence des 7 000 Casques blancs de l'Union Africaine, ce drame semble ne pas prendre fin. Bien plus, les récentes actions de groupes rebelles montrent que le conflit déborde sur le Tchad et en Centrafrique. En un mot, cette crise se régionalise.

Combien de morts, combien de massacres, combien de réfugiés supplémentaires faudra-t-il avant qu'une action efficace soit conduite ? Combien de temps faudra-t-il encore attendre avant de faire appliquer la résolution 1706 de l'ONU votée voilà plus de trois mois ? Quel autre drame faudra-t-il pour enfin imposer les décisions de la communauté internationale et envoyer sur place les 17 000 Casques bleus et les 3 000 policiers prévus ?

Monsieur le ministre, vous savez comme moi que nos accords de défense mobilisent nos soldats dans la région pour faire face aux groupes rebelles, dont tout porte à croire qu'ils sont armés par Khartoum.

Aussi, devant la montée des périls, je souhaite connaître la prochaine étape de notre action dans la région. Au Tchad, ne pensez-vous pas que notre aide politique et militaire devrait être conditionnée à la tenue d'un véritable dialogue politique, pour offrir une issue autre que militaire ?

S'agissant de la Somalie, les tribunaux islamiques contrôlent désormais Mogadiscio et la majeure partie du territoire somalien. Il n'est nullement besoin de souligner les nouveaux risques de violation des droits de l'homme dans cet « Afghanistan potentiel », où opéreraient désormais des agents d'Al-Qaida. Au-delà, la victoire des tribunaux islamiques s'accompagne de vives tensions avec l'Éthiopie et l'Érythrée : l'Éthiopie a massé des troupes à ses frontières.

Dans une résolution adoptée hier à l'unanimité, le Conseil de sécurité a approuvé le déploiement d'une force régionale, qui vise à protéger les membres et les infrastructures du gouvernement provisoire face à l'avancée de l'Union des tribunaux islamiques.

Le risque d'un embrasement imminent de la région est donc bien réel. Croyez-vous, monsieur le ministre, que cette résolution sera réellement appliquée, et surtout suffisante, pour stabiliser la région, contrer l'action des tribunaux islamiques et faire enfin respecter l'embargo sur les armes ?

Plus globalement, je m'interroge sur une certaine vacuité de notre politique africaine. Quelles sont ses lignes de force ? Où est la cohérence dans toutes ces actions réalisées au coup par coup ? Face au risque sérieux de voir une crise régionale profonde s'installer, il me semble urgent de répondre à cette question.

Telles sont les remarques que je souhaitais formuler sur ces sujets majeurs qui occupent notre diplomatie.

Monsieur le ministre, s'agissant du budget que vous nous présentez, je constate, à l'instar de nombreux orateurs, y compris de votre propre majorité, que les crédits ont bien diminué depuis quatre ans.

Dans le domaine de l'action extérieure, le « moins-d'État » est-il synonyme du « mieux-agir » ? Je ne le crois pas ! La réduction des crédits et des personnels se poursuivra-t-elle jusqu'à rendre notre outil diplomatique complètement inefficace ?

Aujourd'hui, sur ces travées, nous nous accordons tous à dire que l'action extérieure de l'État est une nécessité impérieuse à l'heure de la globalisation. Or le budget qui nous est proposé n'est pas, de mon point de vue, à la hauteur de ces enjeux. C'est pourquoi, monsieur le ministre, le groupe socialiste ne le votera pas. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Robert Del Picchia.

M. Robert Del Picchia. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mise en oeuvre du contrat de modernisation permet d'envisager aujourd'hui l'avenir avec une certaine sérénité. Les progrès déjà réalisés seront poursuivis et confortés en 2007.

Les hommes et les femmes du ministère des affaires étrangères ont consenti de nombreux efforts afin que notre diplomatie s'adapte aux nouvelles réalités. Qu'ils en soient ici remerciés au nom des Français de l'étranger et en mon nom.

S'agissant de la politique étrangère, la volonté politique n'a jamais failli depuis le début de la législature : la détermination du Président de la République ne s'est pas démentie. Ainsi, la France a pu influer sur les décisions internationales et elle a su, à maintes reprises, faire entendre sa voix et montrer la voie.

M. Serge Vinçon, président de la commission des affaires étrangères. C'est vrai !

M. Robert Del Picchia. Vous y avez contribué, monsieur le ministre, et nous vous en remercions.

Je n'analyserai pas en profondeur le budget consacré à la mission « Action extérieure de l'État », les rapporteurs l'ont fait excellemment. Dans un premier temps, je me concentrerai sur les opérations de maintien de la paix décidées par l'Organisation des Nations unies, puis, dans un second temps, je traiterai de sujets qui concernent plus directement les Français établis hors de France et les conseillers à l'Assemblée des Français de l'étranger, l'AFE.

La France assume des responsabilités déterminantes dans les opérations de maintien de la paix J'insiste sur le fait que nos armées interviennent désormais exclusivement sous mandat de l'ONU - ce qui légitime donc pleinement leur action -, dans un cadre interallié ou multinational, le plus souvent.

La France participe à onze opérations sur quinze. Elle se situe au premier rang des grands pays industrialisés. Sa présence est particulièrement notable au Liban, en Côte d'Ivoire et au Kosovo.

En dix ans, à l'échelon mondial, le nombre de militaires et de civils participant aux opérations de maintien de la paix est passé de 20 000 à 80 000, pour un coût qui, lui, est passé de 1,25 milliard de dollars à 5 milliards de dollars. Avec une quote-part de 7,32 % du budget, la France se place au cinquième rang des contributeurs de l'Organisation des Nations unies.

Mes chers collègues, les affrontements qui embrasent de nombreux pays ont des répercussions régionales, voire mondiales, parce qu'elles sont amplifiées par le progrès des techniques de l'information. Je procéderai à un rapide tour d'horizon.

L'Afghanistan éprouve des difficultés à instaurer un État de droit et à lutter contre la drogue. Nous sommes présents en Afghanistan.

Au Kosovo, les positions se durcissent depuis le référendum serbe sur la Constitution, qui reconnaît le Kosovo partie inaliénable du pays. Nous sommes présents au Kosovo.

La situation au Proche-Orient est très préoccupante en raison des suites du conflit israélo-libanais et du conflit avec la Palestine. Nous sommes présents au Proche-Orient.

Cependant, les crises les plus dramatiques se situent en Afrique : en 2003, 20 % de sa population étaient touchés par la guerre. Leurs conséquences sont désastreuses.

Le Darfour représente la plus grave des crises africaines. Le drame est à la fois humanitaire et politique ; il est également régional, puisqu'il affecte très fortement le Tchad, la République centrafricaine et le reste du Soudan. Nous sommes présents dans la région.

La Côte d'Ivoire tarde à retrouver l'unité : les Ivoiriens souhaitent ardemment recouvrer la liberté. Nous sommes présents en Côte d'Ivoire.

Vous le voyez, nous sommes présents un peu partout. Nous ne cherchons pas à résoudre les crises que traverse l'Afrique au nom d'une pseudoculpabilité coloniale. Nous y menons des missions humanitaires, des actions de stabilisation, parce que notre destin et celui de ce continent sont liés et que nous ressentons toutes les secousses qui l'agitent.

Après ce tour d'horizon des opérations de maintien de la paix, permettez-moi d'aborder maintenant des sujets qui préoccupent nos compatriotes expatriés.

S'agissant de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, son budget est accepté par le conseil d'administration de l'Agence, mais il est refusé par Bercy. Nous sommes donc dans l'impasse, monsieur le ministre.

Dans le budget primitif de l'AEFE, sur les 47 millions d'euros de budget des bourses scolaires, 2,35 millions d'euros sont inscrits en réserve au titre de la prévision de régulation pour 2007, ce qui représente 5 % de ce budget. S'agit-il d'un gel provisoire ? Une baisse du budget des bourses scolaires ne pourrait être que très mal perçue par nos ressortissants. J'espère donc qu'une solution budgétaire sera trouvée, monsieur le ministre.

Monsieur le ministre, vous venez de publier le premier numéro de La Dépêche du Quai d'Orsay. Je vous remercie d'informer les parlementaires par cette voie. Vous rappelez le dispositif mis en place pour permettre aux Français inscrits sur une liste électorale consulaire de voter pour l'élection présidentielle ; près de 700 000 personnes ont déjà fait le choix de voter à l'étranger. Vous précisez également que plusieurs mesures ont été adoptées pour lutter contre l'abstention et pour faciliter le vote. Est notamment prévue la création de 200 bureaux de vote décentralisés, à côté des 200 bureaux habituellement ouverts dans les consulats et dans les ambassades.

S'agissant de ces bureaux décentralisés, monsieur le ministre, permettez-moi de vous faire part des interrogations des conseillers de l'Assemblée des Français de l'étranger. Quels sont les critères retenus pour leur création ? Selon quels paramètres le chef de poste procèdera-t-il au découpage de la liste électorale consulaire en sections ? Quand et comment les électeurs seront-ils informés du lieu du bureau de vote dont ils dépendent ?

Le bureau de vote décentralisé sera présidé par le chef de poste ou son représentant. Que faut-il entendre précisément par « représentant » ? Cela signifie-t-il tout agent de l'État ? Par exemple, des militaires ou des enseignants, qui sont des agents de l'État à l'étranger, pourront-ils présider un bureau de vote décentralisé ?

Monsieur le ministre, l'information des électeurs est également déterminante pour lutter contre l'abstention. Les adresses électroniques sont-elles utilisées pour inciter nos concitoyens de l'étranger à s'inscrire sur la liste électorale, et pour informer régulièrement les électeurs tout au long de la campagne ?

Des spots d'information et des émissions électorales seront-ils relayés sur TV5, RFI, et France 24 - la nouvelle chaîne internationale d'information -, à une heure de grande écoute, comme vous l'avez suggéré ?

Dans le livre vert sur la protection diplomatique et consulaire des citoyens de l'Union dans les pays tiers qu'elle a présenté voilà quelques jours, la Commission européenne dresse un bilan de la situation : les vingt-cinq États membres ne sont représentés que dans trois pays, la Chine, les Etats-Unis et la Russie ; dans 107 pays sur 167, dix États de l'Union européenne au plus sont représentés.

La Commission européenne soumet des pistes de réflexion visant à renforcer, à l'échelon européen, la protection des citoyens sur deux axes : d'une part, le développement de la coopération entre les États membres dans les affaires consulaires pour assurer une protection similaire à tous les citoyens de l'Union européenne ; d'autre part, l'amélioration de l'information des citoyens de l'Union européenne sur leurs droits en matière de protection diplomatique et consulaire,.

La Commission européenne propose la création de bureaux communs, fondés sur un système de suppléance, pour assurer la cohérence des fonctions et économiser les coûts de fonctionnement.

La délégation parlementaire pour l'Union européenne m'a chargé d'établir un rapport, que je présenterai au mois de janvier prochain, dans lequel je formulerai des propositions pour défendre le modèle français et la représentation de nos citoyens expatriés. J'ai associé les conseillers de l'Assemblée des Français de l'étranger à cette réflexion, afin qu'ils apportent leur expertise au débat. En effet, il est essentiel que les élus jouent pleinement leur rôle dans l'élaboration des textes qui concernent les Français établis hors de France.

Enfin, je profiterai de l'occasion qui m'est donnée pour rectifier l'interprétation erronée, me semble-t-il, de la réponse que vous avez adressée au vice-président de l'Assemblée des Français de l'étranger, monsieur le ministre. J'ai lu attentivement cette lettre : je n'y trouve ni refus catégorique ni rejet des propositions qui ont été formulées ; je pense en particulier à celle qui concerne la collectivité d'outre-frontière. Vous relevez que des difficultés sérieuses restent à surmonter - nous en sommes conscients - mais vos services comme vous-même restez ouverts à une poursuite de la réflexion. Je vous demande donc, monsieur le ministre, pour septembre 2007, peut-être, la continuation des travaux de la commission de décentralisation afin d'approfondir cette réflexion, ainsi que vous le suggérez dans votre lettre.

Ma dernière question, subsidiaire, concerne le Centre international de conférences de l'avenue Kléber, qui, nous dit-on, va être mis en vente. Quand doit être réalisée cette opération ? Et qu'adviendra-t-il des réunions de l'Assemblée des Français de l'étranger ? Peut-être auront-elles lieu au Sénat...

Sans doute ne pourrez-vous pas répondre ce soir à ces nombreuses questions, monsieur le ministre, mais vos services pourront le faire ultérieurement. Quoi qu'il en soit, je vous assure que, sans hésitation, sans arrière-pensée, je voterai très volontiers votre budget. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, « Le budget du Quai d'Orsay épinglé au Sénat », « France - Dérapage des factures internationales du Quai d'Orsay », « Le Sénat épingle le Quai d'Orsay », « Les dépenses du Quai d'Orsay épinglées » : cette campagne de presse hostile à votre ministère portera préjudice à vos services, à vos agents et, par ricochet, aux Français de l'étranger, qui sont administrés par votre ministère. Je le regrette, parce que ces attaques ne portent pas sur les vrais problèmes.

Le budget que vous nous présentez n'est ni plus ni moins sincère que les années précédentes. Il gère la pénurie en organisant une répartition sur tous les postes.

Ce budget n'est pas sincère, car les dépenses de maintien de la paix ne sont pas réellement budgétées. À combien évaluez-vous les financements qui seront nécessaires en cours d'année pour faire face aux dépenses relatives à la FINUL renforcée, à la gestion des conflits au Darfour, au Timor ? À 150 millions d'euros, à 200 millions d'euros, à 300 millions d'euros ?

Ce budget, comme d'aucuns ont pu le soutenir, ne présente pas le défaut majeur d'organiser le transfert de la puissance de l'État français, en tant que membre du Conseil de sécurité, aux organismes internationaux. En revanche, on peut lui reprocher d'afficher des augmentations de crédits qui sont en réalité des baisses.

Ainsi, le programme « Français à l'étranger et étrangers en France » bénéficie, en apparence, de 16 millions d'euros supplémentaires, mais cette somme est entièrement affectée à la mise en place des visas biométriques. Pour tout le reste du programme, c'est la stagnation ou la baisse, comme l'ont fort bien dit mes collègues de la majorité.

D'un côté, des augmentations fictives nous sont présentées, et, d'un autre côté, apparaissent des difficultés auxquelles sont confrontés vos services et, en matière consulaire, les Français qui dépendent d'eux, difficultés tout à fait tangibles.

Quand les autres ministères multiplient des structures coûteuses, plus ou moins bien intégrées dans notre réseau diplomatique, le ministère que vous dirigez réduit, en dix ans, ses implantations et son personnel de 10 %. Les coûts de fonctionnement et de personnel, eux, passent d'un tiers du budget à un quart en cinq ans. Je salue cette progression de la productivité et la mobilisation des agents qui la rend possible. En cet instant, j'ai une pensée particulière pour ceux qui ont été décorés hier soir.

Mais ce n'en est jamais fini des sacrifices. Peut-être est-ce mon expérience de vie de femme qui m'amène à penser cela. Quoi qu'il en soit, on a parfois tort d'en faire trop.

Dans le cadre du contrat de modernisation triennal 2006-2008, le ministère des affaires étrangères perdra encore 419 emplois - les données dont je dispose sont différentes de celles de M. de Montesquiou -, et l'on nous présente le retour au budget du ministère de la moitié de la masse salariale correspondante comme une belle compensation dont il faudrait se réjouir. Certes, c'est mieux que les pertes sèches des années passées, mais le solde est tout de même négatif !

Et encore faudrait-il que les engagements du ministère des finances soient tenus. Or, dès l'exercice 2006, votre ministère a reçu moins du tiers des 16 millions d'euros que devait lui verser le ministère des finances dans le cadre de la mise en oeuvre du contrat de modernisation, d'où le retard pris pour la réalisation du plan biométrie. Le comité interministériel de contrôle de l'immigration, le CICI, annonce 55 postes équipés en 2007. Avec quels crédits et quels personnels ?

Quant aux capacités de notre réseau consulaire à faire face aux charges supplémentaires que lui impose la loi relative au contrôle de la validité des mariages, vous ne m'avez pas répondu en commission, monsieur le ministre. Je réitère donc ma question. Selon le « bleu » budgétaire, les consulats perdraient encore huit emplois cette année.

La nouvelle loi - que le Sénat a adoptée, même si j'ai voté contre -, doit être appliquée. Elle génèrera un travail de contrôle très lourd : audition des fiancés préalable au mariage, audition des mariés préalable à la transcription, rédaction de comptes rendus, correspondances avec le parquet de Nantes, les préfectures, la SDCE. Où sont les agents compétents, en nombre suffisant, pour accomplir ces tâches difficiles ? Ce n'est pas la fermeture des consulats de Naples ou de Sarrebrück qui va dégager les dizaines d'agents nécessaires ! Je formule cette remarque à l'intention de tous ceux qui croient qu'en fermant les postes consulaires dans l'Union européenne on réglera les problèmes du ministère des affaires étrangères.

Pour que ce dernier puisse remplir toutes les nouvelles fonctions qui lui sont dévolues - biométrie, contrôle des mariages -, 150 agents supplémentaires seraient nécessaires, selon les rapports. Comment fera-t-on, monsieur le ministre ?

Par ailleurs, je demande que l'on cesse de dénigrer les agents d'exécution des services de visas, accusés de tous les maux, en particulier de corruption, surtout s'ils sont recrutés locaux et mal rémunérés. Qu'on les mette d'abord en situation de réussir dans une mission délicate et ingrate ! Ce sera plus honorable, pour le ministère et pour un certain nombre d'observateurs, que d'ajouter l'humiliation aux bas salaires.

Vous annonciez, en commission, monsieur le ministre, que les crédits de bourses scolaires pour les élèves français de l'AEFE augmenteraient. Il n'en est rien ! Les droits de scolarité ont augmenté de 10 % l'année dernière. Le nombre d'enfants français scolarisés dans ce réseau est, cette année, en augmentation de 3 000, et une partie d'entre eux seront nécessairement demandeurs de bourse.

De surcroît, l'AEFE est dans l'impossibilité d'assumer ses nouvelles compétences immobilières, faute de financement. Je sais, monsieur le ministre, que vous allez me répondre « PPP », c'est-à-dire partenariat public-privé, alors que la réponse habituellement donnée est « redéploiement ». Mais, en pratique, comment va-t-on faire ? Pour un PPP au Caire, que se passe-t-il ailleurs ? Il y a donc péril dans le domaine immobilier ; le rapport d'audit réalisé à ce sujet est inquiétant.

Les bourses scolaires doivent être sanctuarisées et le budget de l'AEFE défendu face au ministère des finances. Peut-être faudrait-il penser à un arbitrage à Matignon.

Par ailleurs, aussi bien à Paris qu'à Nantes, je rencontre maintenant des agents de votre ministère soulagés de leur retour à l'administration centrale, après l'épreuve nerveuse et morale de leur dernier séjour en poste. Dans les conditions actuelles de fonctionnement et de financement, votre ministère a de plus en plus de difficultés à pourvoir des postes exposés, et ce à tous les niveaux de la hiérarchie ; la direction des ressources humaines le constate tous les jours. M. de Charette avait formulé la même remarque.

Ni le contrat de modernisation - une amélioration peut en être attendue, à condition qu'il soit respecté - ni le budget pour 2007 n'annoncent des jours meilleurs pour la diplomatie française. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. Louis Duvernois.

M. Louis Duvernois. Monsieur le ministre, je souhaiterais vous interroger sur deux secteurs essentiels du rayonnement de la France, afin de tenter de lever quelques incertitudes.

Notre réseau de quatre cent trente écoles, collèges et lycées installés dans cent trente pays, est, certes, unique au monde, mais vous savez bien que l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, établissement public administratif, placé sous votre tutelle, est dans une situation ambiguë.

Dans un rapport public, la Cour des comptes notait que l'AEFE, en théorie autonome, était, dans les faits, « étroitement soumise aux ingérences du ministère, tant dans la maîtrise de son budget, que dans la gestion de son patrimoine, ce qui nuisait à la cohérence de ses actions ».

Certes, depuis peu, l'Agence a la possibilité de disposer d'un patrimoine immobilier et de recevoir en dotation les bâtiments des établissements en gestion directe appartenant à l'État. Si l'intérêt de ce transfert est réel, il pose cependant des difficultés de financement. Le retard accumulé dans l'entretien des bâtiments entraîne de nombreux problèmes de sécurité. La moitié des soixante-treize établissements en gestion directe n'a bénéficié d'aucun entretien de la part du ministère des affaires étrangères au cours des cinq dernières années. Cela représente un déficit d'entretien de près de 20 millions d'euros, eu égard aux dépenses moyennes d'entretien au mètre carré dans des établissements scolaires similaires d'Île-de-France.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Il faut en tirer les conséquences !

M. Louis Duvernois. Un audit récent évalue le coût total de rénovation et de gros entretien du parc immobilier des soixante-treize établissements en gestion directe à quelque 240 millions d'euros, qui devront être investis d'ici à 2012, comme le préconise l'AEFE. Sur cette somme, 100 millions d'euros devraient être consacrés à la modernisation et 140 millions d'euros à de nouveaux investissements immobiliers.

Dans le projet de loi de finances pour 2007, le poste « Dotation en capital des opérateurs » ne comporte aucuns crédits. Pourtant, cela aurait permis, pour la première fois, de distinguer les financements consacrés aux investissements de l'État des subventions pour charges servant principalement au fonctionnement des organismes.

Les 8 millions d'euros d'augmentation de la subvention du ministère à l'AEFE sont très insuffisants pour compenser les coûts liés à ses nouvelles responsabilités budgétaires immobilières. Le recours privilégié au fonds de roulement des services centraux de l'Agence pour les investissements immobiliers suscite la crainte, justifiée, d'une hausse progressive des frais de scolarité. Cette pratique devient insupportable pour un nombre grandissant de familles françaises contributrices, et votre ministère doit rester vigilant sur ce point.

M. Louis Duvernois. Le transfert de financement de l'État vers les familles pose de réels problèmes. Les sommes déboursées par les familles sont passées de 50 % en 2000, à 62,4 % en 2006. Je voudrais tout de même souligner que la scolarisation d'un élève français de l'AEFE représente en moyenne pour l'État environ 40 % du coût généré par une scolarisation en France. Les parents d'élèves français à l'étranger ne sont pas des privilégiés.

Venons-en, maintenant, à l'action culturelle extérieure. Elle est toujours menée par plusieurs structures, dont les crédits ne sont pas distingués dans le « bleu » budgétaire. La somme totale n'est pas clairement visible, dans la mesure où ces crédits sont éparpillés entre plusieurs missions et encore plus de programmes et d'actions, selon la nomenclature de la LOLF.

Nous soutenons, monsieur le ministre, votre objectif de mise en cohérence du réseau culturel, mais nous restons sceptiques quant à son application par le seul ministère des affaires étrangères. La mise en place, au mois de mai dernier, de la nouvelle agence CulturesFrance, dont l'objet est de fédérer les moyens interministériels et de donner une meilleure lisibilité à l'extérieur, répond à la nécessité de nous adapter dans un marché évolutif. C'est une excellente initiative ! CulturesFrance arrive au bon moment. Je m'en étais également fait le promoteur dans mon rapport d'information, dès 2004, à la commission des affaires culturelles du Sénat. Force est de constater, en revanche, que les synergies recherchées sont encore incertaines.

Il nous faut à présent aborder l'étape suivante : CulturesFrance, association au fonctionnement trop imprécis dans ses nouvelles perspectives, doit être transformée en un établissement public industriel et commercial, un EPIC, ou en groupement d'intérêt public, un GIP, garantissant une rigueur de gestion. L'établissement ainsi créé gagnera en efficacité, en cohérence et, finalement, en notoriété, tous objectifs recherchés dans le mouvement continu de la mondialisation.

L'EPIC ou le GIP disposerait, entre autres, de l'ensemble des compétences des centres culturels malmenés dans leur redéploiement, voire placés dans l'obligation de fermer pour plusieurs d'entre eux. Ce redéploiement de notre action extérieure serait encore plus difficile sans l'adhésion préalable des personnels impliqués.

Nous voudrions que vous considériez les statuts disparates de nombreux agents français expatriés, non titulaires de la fonction publique et recrutés localement, et que soient explorées toutes les pistes pour mieux gérer leurs carrières à l'étranger. À chacun de mes déplacements dans les circonscriptions de l'Assemblée des Français de l'étranger, j'observe la disparité de leur situation, selon qu'ils sont rémunérés par le ministère des affaires étrangères ou par celui de l'économie, des finances et de l'industrie et selon les affectations, avec des incidences sensibles sur leurs revenus.

Monsieur le ministre, le problème n'est pas nouveau, mais il s'amplifie et il en résulte une situation inique. Dans les seuls pays de l'OCDE, la masse salariale de ces agents augmente d'environ 5 % par an, alors que, parallèlement, les indemnités de résidence des agents titulaires au Quai d'Orsay sont fortement contraintes. Nous devons reconnaître, hors qualifications professionnelles, la complexité des différents droits du travail locaux et aussi l'insuffisante connaissance de ces questions par nos postes diplomatiques.

Les agents locaux représentent 46 % des effectifs totaux au Quai d'Orsay, ce qui n'est pas négligeable, dont 25 % sont Français. Dans ces circonstances, une gestion rigoureuse de leurs carrières s'impose, avec une triple préoccupation : une maîtrise globale de l'évolution salariale ; une adaptation au marché de l'emploi dans le pays de résidence ; une substitution de personnels locaux aux titulaires du ministère, sauf en cas de compétences particulières.

Enfin, je voudrais appeler une fois de plus votre attention, au titre de la tutelle que vous exercez sur l'AEFE, sur la nécessaire formation d'autres recrutés locaux, pour être tuteurs dans les écoles de notre réseau éducatif de classes CNED. Le Centre national d'enseignement à distance scolarise en effet partout dans le monde quelque 25 000 enfants français en classe complète ou en complément d'enseignement. Sous tutelle de l'éducation nationale, il est prêt, me semble-t-il, à prendre une part active dans la formation spécifique de ces tuteurs ou maîtres-assistants, pivots indispensables de ce type de scolarisation.

Il serait souhaitable que le ministère des affaires étrangères soutienne l'idée d'une convention élargie avec le CNED. Peut-être serait-ce là une autre opportunité pour votre ministère de collaborer davantage avec le ministère de l'éducation nationale, partenaire essentiel de notre réseau éducatif à l'international.

Sur l'ensemble des crédits destinés à l'action extérieure de l'État pour 2007, nonobstant l'argumentaire critique développé sur certains aspects de cette politique et escomptant, monsieur le ministre, que vous pourrez en tenir compte, je voterai l'ensemble des crédits de la mission « Action extérieure de l'État ». (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à Mme Catherine Tasca.

Mme Catherine Tasca. Monsieur le ministre, j'ai envie de vous poser d'emblée une question : considérez-vous toujours l'action culturelle extérieure comme un instrument essentiel de l'action diplomatique de la France ?

Votre réponse devrait être oui, car seule cette conviction politique donne pleinement son sens non seulement au maintien du réseau des établissements culturels à l'étranger et des établissements d'enseignement du français à l'étranger, mais aussi au mouvement croissant d'accueil de manifestations culturelles venant de pays étrangers, en réponse, pourrais-je dire, aux représentations diverses de la culture française à l'étranger.

La France a bataillé à l'UNESCO pour faire adopter la Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, mais les quelque 38 000 euros alloués à l'application de ce texte paraissent bien dérisoires. Notre pays doit se donner les moyens d'assurer une présence active sur la scène internationale, afin de faire de la culture un vecteur de paix et de progrès. Or cet objectif semble s'être considérablement obscurci. J'en veux pour preuve trois exemples.

Premièrement, le recul des crédits alloués à l'action n° 2 « Langue et culture française, diversité linguistique et culturelle » du programme « Rayonnement culturel et scientifique », en baisse de 2,5 millions d'euros, est une atteinte directe au rayonnement de la langue française dans le monde.

C'est surtout un mauvais signe pour l'engagement de la France dans l'action multilatérale francophone, qui fonde notre politique spécifique depuis plus de vingt ans. Ainsi, la contribution de la France aux quatre opérateurs de la francophonie stagnera par rapport à 2006, puisqu'elle s'élèvera à 54,5 millions d'euros en 2007 contre 55,2 millions d'euros cette année. La disparition du document annexe au projet de loi de finances présentant l'« état des crédits de toute nature concourant au développement de la langue française et à la défense de la francophonie » constitue d'ailleurs un mauvais signe supplémentaire.

Deuxièmement, nous déplorons l'absence de perspective pour TV5. Certes, la chaîne internationale francophone voit sa subvention augmentée de 4,4 %. Mais nous pouvons légitimement nous inquiéter pour son avenir, alors même qu'elle a fait la preuve de son dynamisme et qu'elle contribue à soutenir la production cinématographique et audiovisuelle française à l'exportation.

La même remarque peut être faite pour CFI, qui voit sa subvention baissée d'un demi-million d'euros, alors que cette chaîne est le partenaire indispensable des télévisions du Sud.

Le lancement hier de France 24, dont nous ne pouvons que souhaiter la réussite et qui dispose déjà d'une subvention supérieure à celle de TV5, est l'exemple même de la fuite en avant caractérisant notre politique audiovisuelle extérieure et contredisant les objectifs affichés. Le fait d'avoir « sorti » le programme « Audiovisuel extérieur » de la mission « Action extérieure de l'État » pour l'intégrer dans la mission « Médias » est tout à fait regrettable et révèle votre perte d'ambition pour l'action extérieure de la France.

Troisièmement, nous regrettons l'offensive contre CulturesFrance. En réalité, la commission des finances lui fait un bien mauvais procès. Si nous pouvons partager l'exigence d'une plus grande rigueur de gestion, encore que la Cour des comptes ait pointé plus des désordres que des fautes, nous ne suivrons pas les critiques injustes de la commission sur l'activité de cet organisme, car c'est bien là que réside le fond du problème.

Ainsi M. Marini déclarait-il ici même, mardi dernier : « lorsqu'il est question de la programmation de l'AFAA, devenue CulturesFrance, on n'entend pas que des compliments, loin de là. Or tout prestataire doit accepter les critiques des clients ». Et M. Legendre d'ajouter : « J'ai été saisi par les acteurs de l'action culturelle française de plaintes sur la nature élitiste des spectacles qui leur sont imposés par l'AFAA [...] la transformation de l'AFAA en CulturesFrance doit être l'occasion de corriger certains errements ».

Voilà la vraie raison de cette diminution de crédits proposée, qui a donc un parfum de sanction. Nous sommes loin des questions soulevées par la Cour des comptes !

Quant au procès visant la place prétendument excessive faite aux saisons culturelles étrangères en France, il est totalement injuste. D'abord, ces opérations sont imposées justement par la tutelle. Ensuite, elles sont la marque d'une réciprocité dont le principe est au coeur même de la Convention sur la diversité culturelle. Enfin, elles ne pénalisent pas le budget de l'AFAA puisqu'elles bénéficient, le plus souvent, du mécénat.

De fait, cette deuxième annulation de crédits proposée pénaliserait forcément nos partenaires, en particulier au Maghreb et en Afrique subsaharienne, avec lesquels de nombreux projets devraient être annulés en 2007. Monsieur le ministre, laisserez-vous faire cela ? Si oui, au profit de quelles actions ?

En tout cas, s'agissant du budget global de l'action extérieure de l'État, je le répète, à nos yeux, la francophonie, la diffusion des idées et de la création française dans le monde, ainsi que la promotion de la diversité culturelle ne sont pas des objectifs secondaires. Il semblerait que, pour le Gouvernement, ils le soient devenus. En conséquence, monsieur le ministre, nous ne voterons pas votre budget. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. André Ferrand.

M. André Ferrand. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à cette heure, tout a été dit, ou presque. Cependant, compte tenu de l'intérêt du sujet, je voudrais encore revenir très brièvement, mais très concrètement, sur l'enseignement français à l'étranger. Dans ce domaine, j'aurais beaucoup de choses positives à dire.

Au premier chef, monsieur le ministre, je tiens à vous remercier de votre décision de demander à tous les postes d'élaborer, par établissement scolaire et par pays, un « plan école » à moyen terme. Cela étant, je suis obligé de constater que la prochaine année budgétaire risque de ne pas être facile pour l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger.

Certes, votre ministère n'est pas en cause puisque l'AEFE bénéficiera de la quasi-totalité de l'augmentation des crédits du programme 185. Je suis, moi aussi, conscient de la nécessité d'accomplir un effort collectif en matière de réduction de la dette publique.

C'est surtout au niveau de la réalisation de ses obligations nées de la dévolution d'une partie du patrimoine immobilier scolaire à l'étranger que l'Agence éprouvera des difficultés. Il va nous falloir l'aider à se montrer, comme on prend l'habitude de le dire, particulièrement « innovante », pour que notre réseau continue à se développer sans que le niveau de contribution des parents devienne insupportable.

Monsieur le ministre, il nous faut, si j'ose dire, « positiver ». Dans cet esprit, vous l'avez compris, les consignes adressées aux postes, sur vos instructions, par la direction générale de la coopération internationale et du développement, la DGCID, leur demandant de préparer, en concertation avec tous les acteurs publics et privés de nos communautés à l'étranger, un « plan école » à trois ans, représentent une avancée majeure.

Dorénavant, notamment s'ils bénéficient de l'implication personnelle de l'ambassadeur, comme cela doit être la règle, ces plans mobiliseront l'ensemble des forces vives de la communauté française, qui devra s'attacher à trouver des solutions pour soutenir le développement de nos écoles. Pour que cette opération soit une réussite complète et pour motiver tous les acteurs, vous devrez montrer votre intérêt personnel pour la question, monsieur le ministre. D'avance, je vous en remercie.

Le deuxième point pour lequel je sollicite votre appui concerne la nomination d'un vice-président du conseil d'administration de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, qui est issu de l'éducation nationale.

Vous le savez, cela faisait partie des recommandations préconisées. Même si la tutelle de l'Agence demeure sous la responsabilité de votre seul ministère, l'objectif est de faire en sorte que le ministère de l'éducation nationale redevienne, comme cela est naturel et comme il a d'ailleurs très heureusement commencé à le faire, de plus en plus concerné par le sujet et qu'il se comporte en partenaire, lui aussi partie prenante.

Je crois savoir que tout est prêt pour qu'une telle nomination soit officialisée. Seul subsisterait un petit problème d'ordre purement administratif et formel. Pourriez-vous, monsieur le ministre, faire en sorte qu'il soit réglé au plus vite ?

Si l'ensemble des établissements scolaires dans tous les pays méritent notre intérêt et notre soutien, il me faut cependant à mon tour attirer votre attention sur les difficultés particulières des élèves et des familles de nos établissements en Côte d'Ivoire et au Liban.

En ce qui concerne, d'abord, la Côte d'Ivoire, nos plus grands lycées, les plus emblématiques, c'est-à-dire Jacques-Prévert, Blaise-Pascal et Jean-Mermoz ont été pillés et n'ont pas été rouverts. En revanche, d'autres établissements, situés à des emplacements moins exposés, n'ont pas fermé et continuent d'accueillir les enfants de nos compatriotes qui n'ont pas quitté le pays ou qui y sont revenus.

Du fait de son départ officiel, l'AEFE a rompu sa convention, en particulier avec l'école Sévigné, entraînant de ce fait la suppression de l'homologation par l'éducation nationale. Aujourd'hui, malgré la difficile et incertaine situation politique, il est urgent d'organiser une mission sur place avec un double objectif : faire le point avec les acteurs et les familles et les éclairer sur ce qui peut être fait pour les aider ; au moins leur accorder le retour à l'homologation quand cela est pédagogiquement possible.

Quant au Liban, monsieur le ministre, nous saluons encore une fois l'efficace réactivité et la grande souplesse dont ont fait preuve, à tous les niveaux, sur place, tout d'abord, mais aussi à Paris, les équipes du ministère des affaires étrangères. Nous n'oublions pas non plus l'action de nos élus et de toutes celles et tous ceux qui se sont mobilisés, à leur poste, dans l'intérêt de tous.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Très bien !

M. André Ferrand. Je me permets d'ailleurs de vous féliciter d'avoir organisé, hier, une cérémonie au cours de laquelle vous avez honoré plusieurs de ces personnes, avec d'autres qui se sont particulièrement distingués dans d'autres crises, en leur remettant la médaille d'honneur des affaires étrangères.

M. Jean-Guy Branger, rapporteur pour avis. Très bien !

M. André Ferrand. Cela étant, je voudrais attirer votre attention sur le cas des familles de nos compatriotes dont les revenus ont été affectés directement ou indirectement par les récents événements et qui éprouvent des difficultés à régler les frais de scolarité de leurs enfants. Lors de la dernière rentrée, un effort particulier, que nous saluons, a été accompli. Les bénéficiaires comme les acteurs en sont conscients et reconnaissants.

Malheureusement, beaucoup de problèmes demeurent. Je vous prie d'obtenir de vos services, monsieur le ministre, que soient dégagés les moyens d'une augmentation ad hoc de l'enveloppe mise à la disposition de la commission locale des bourses, laquelle serait particulièrement bienvenue.

Quittant le domaine de l'enseignement, je profite de l'occasion qui m'est donnée d'intervenir à cette tribune pour attirer votre attention sur la place et le rôle, dans leurs circonscriptions, de nos élus à l'Assemblée des Français de l'étranger.

Le plus souvent, heureusement, tout se passe bien. Nos postes jouent le jeu et nos conseillers, à leur place, assument le rôle qui leur revient. Mais ce n'est pas toujours le cas et, là aussi, votre intervention serait très appréciée. Monsieur le ministre, pourriez-vous faire les rappels nécessaires ? D'avance, nous vous en sommes reconnaissants.

Vous l'avez compris, je voterai les crédits de votre ministère. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. André Rouvière.

M. André Rouvière. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon propos, très court, se limitera aux OPEX. Je ne reviendrai pas sur leur sous-budgétisation ; je l'ai déjà soulignée lors de la discussion du budget de la défense. J'évoquerai donc la préparation, l'encadrement et la finalité des OPEX.

À la lumière des difficultés rencontrées par les États-Unis en Irak, on voit bien que gagner la guerre ne signifie pas gagner la paix. Nos soldats connaissent également de sérieuses difficultés en Afghanistan, en Côte d'Ivoire, au Kosovo, au Liban, et ailleurs. Leur présence peut, certes, contribuer à faire cesser partiellement ou totalement les affrontements. Mais pour combien de temps ? Un jour, ils devront partir, et j'espère qu'ils laisseront une situation améliorée. Mais ce n'est pas toujours évident, car j'ai le sentiment que les volets diplomatique et économique viennent après le volet purement militaire.

Je prendrai l'exemple du Kosovo, où nos soldats, nombreux, bien équipés et bien entraînés, se trouvent sous mandat de l'ONU. Avec leurs collègues d'autres nations, ils font régner une paix précaire, qui ne semble pas mettre en place les possibilités d'entente entre Albanais et Serbes.

J'ai été stupéfait d'apprendre et de constater sur le terrain que chaque communauté a ses propres écoles, interdites à l'autre. Autrement dit, les enfants serbes apprennent le serbe et ignorent l'albanais. Quant aux enfants albanais, ils font de même à l'égard du serbe. Et l'ONU laisse faire ! Nos soldats veillent, à côté de ces écoles du rejet de l'autre. Comment imaginer que ces enfants, demain, puissent se comprendre, s'accepter et s'entendre ?

Notre diplomatie, monsieur le ministre, aurait dû ne pas accepter cette situation et exiger de l'ONU qu'elle impose aux Albanais et aux Serbes une école pour tous. Chacun aurait ainsi pu préparer un avenir commun.

Lorsque les soldats de l'ONU, c'est-à-dire aussi les nôtres, partiront du Kosovo, il est à craindre que ces deux communautés se déchirent une nouvelle fois. À quoi aurons-nous servi ? À retarder un nouvel affrontement ? Mais est-ce suffisant ? Personnellement, je ne le pense pas.

Les OPEX ont besoin de plus de diplomatie pour préparer, pour accompagner et, éventuellement, pour finaliser les opérations. Car il ne suffit pas d'y aller ! Il faut savoir comment, pourquoi et en discuter, afin d'éviter ce que vont connaître les États-Unis : quitter l'Irak en laissant une situation pire que celle qu'ils ont trouvée en arrivant.

Il me paraît indispensable d'avoir un débat au Parlement sur ce problème des OPEX, qui ne cesse de s'amplifier en coût et en risque. Si vous ne pouvez pas demander à tous nos partenaires de l'Union européenne de partager les risques physiques liés aux OPEX, monsieur le ministre, vous pourriez en revanche leur demander d'en partager le coût. Qu'en pensez-vous ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre.

M. Jacques Legendre. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la France croit-elle encore en la nécessité du Conseil de l'Europe ? Il peut sembler choquant de poser cette question.

Le Conseil de l'Europe est en effet le produit d'une grande histoire, d'un grand espoir. Il a été créé le 5 mai 1949 afin de rassembler les pays européens décidés à défendre, ensemble, des valeurs essentielles, menacées dans le contexte de la guerre froide : les droits de l'homme, l'état de droit, la démocratie. Son siège a été fixé en France, à Strasbourg, parce que cette ville est le symbole de la réconciliation franco-allemande. Le Conseil de l'Europe relançait ainsi un concept millénaire : l'unité de l'Europe.

Certes, pendant la guerre froide, le Conseil de l'Europe ne comptait parmi ses membres que les démocraties européennes occidentales. Mais, précisément parce qu'il incarnait la démocratie, les pays européens libérés de la sujétion soviétique ont considéré leur adhésion au Conseil de l'Europe comme le symbole de leur émancipation.

Les représentants de quarante-six États européens se retrouvent régulièrement à Strasbourg. Comme tous mes collègues représentant le Sénat ou l'Assemblée nationale, je peux témoigner, monsieur le ministre, de la qualité des travaux de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, la plus ancienne assemblée parlementaire pluraliste internationale composée de parlementaires élus démocratiquement.

Mais le Conseil de l'Europe et son Assemblée parlementaire sont vulnérables. Les compétences du Conseil sont larges, mais les moyens dont il dispose sont faibles. Pourtant, avec ces faibles moyens, il a donné naissance à un véritable espace juridique européen : 200 conventions ou traités européens ayant force de loi, sur des questions allant des droits de l'homme à la lutte contre le crime organisé, et de la prévention de la torture à la protection des données ou la coopération culturelle.

Mais surtout, et c'est un succès insigne, l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe est à l'origine de la Cour européenne des droits de l'homme, dont les nombreux arrêts ont permis de faire évoluer les législations nationales.

C'est ainsi que la France a notamment introduit dans notre code de procédure pénale la faculté de demander la réouverture par la Cour européenne des droits de l'homme de tout procès pénal considéré comme irrégulier. Malgré tout, il arrive que la France fasse encore l'objet de critiques de la part de la Cour. Je souhaite, monsieur le ministre, que vous nous rassuriez s'agissant de l'attitude du Gouvernement à l'égard des arrêts de la Cour et de leur pleine application.

Si je me réjouis de la véritable reconnaissance européenne dont bénéficie la Cour européenne des droits de l'homme, il ne faudrait pas que ce succès remette en cause le bon fonctionnement de l'Assemblée parlementaire.

Depuis des années, l'Assemblée et le Conseil sont soumis à un régime de croissance zéro ! Il a fallu accomplir de réels efforts de rationalisation, supprimer ou regrouper des commissions, diminuer les moyens réels de fonctionnement. Mais il n'y a maintenant plus grand-chose à économiser et il va désormais falloir tailler dans les moyens absolument nécessaires.

Les causes de cette situation s'expliquent simplement : tout provient du refus des gouvernements de tenir compte des besoins budgétaires croissants, et pour l'essentiel légitimes, de la Cour européenne des droits de l'homme, qui siège désormais à plein temps et où 89 000 requêtes sont en instance.

Afin de dégager des moyens pour la Cour, l'Assemblée parlementaire en est réduite à tailler dans sa substance vitale. Et voilà que les pays membres de l'Union européenne, qui s'opposent à toute augmentation des moyens du Conseil de l'Europe, s'apprêtent à mettre en place une Agence des droits fondamentaux dotée, dès le départ, de 16 millions d'euros, de 29 millions d'euros en année pleine, et qui disposerait rapidement de cent personnes.

M. Jean-Guy Branger, rapporteur pour avis. C'est du gaspillage !

M. Jacques Legendre. Et pour faire quoi ? Pour contribuer à l'élaboration des politiques prévoyant le contrôle et la promotion du respect des droits fondamentaux ! Mais c'est déjà ce que fait, avec un succès reconnu, le Conseil de l'Europe, grâce à l'Assemblée parlementaire et à la Cour européenne des droits de l'homme.

M. Jean-Guy Branger, rapporteur pour avis. Il y a d'autres choses à faire !

M. Jacques Legendre. Et les vingt-sept pays de l'Union européenne, qui financeront largement cette agence, sont tous membres du Conseil de l'Europe.

Monsieur le ministre, que les États de l'Union européenne acceptent de mettre en place cette agence redondante, c'est leur affaire et celle du Parlement européen, mais, pour nous, cela ressemble à un dangereux gaspillage.

Qu'ils donnent au Conseil de l'Europe, à son assemblée et à la Cour européenne des droits de l'homme les moyens de continuer à faire le travail utile qui est la marque de ces institutions, voilà ce que nous demandons !

Je suis actuellement le seul Français à présider une commission de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, celle de la culture, de la science et de l'éducation. Nous traitons de sujets essentiels et brûlants, tels que la liberté d'expression confrontée au respect des sensibilités religieuses. Il n'existe pas jusqu'ici d'autres espaces parlementaires pour parler de ces questions.

Je ne serai pas complice de l'étouffement discret d'un espace de débat irremplaçable. Comme mes collègues de l'Assemblée nationale siégeant au sein de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, j'attacherai beaucoup d'importance aux réponses que vous voudrez bien nous apporter ce soir, monsieur le ministre, et j'espère y trouver de bonnes raisons de voter le budget de la mission « Action extérieure de l'État ». (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à M. Richard Yung. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. Richard Yung. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le dernier projet de loi de finances de la présente législature confirme malheureusement le désengagement du gouvernement vis-à-vis de nos compatriotes établis hors de France.

Je considère que la hausse des crédits alloués au programme 151 « Français à l'étranger et étrangers en France » est une hausse en trompe-l'oeil. En effet, les crédits passent bien de 281 à 287 millions d'euros. Mais si on les analyse de façon plus fine, on s'aperçoit que la partie consacrée aux Français établis à l'étranger passe, elle, de 180 à 174 millions d'euros ; elle baisse donc de 6 millions d'euros. En revanche, la sous-action consacrée aux visas augmente de 16 millions d'euros.

La politique suivie est donc claire : il s'agit moins de s'occuper des Français de l'étranger que d'empêcher les étrangers d'entrer en France. Nous ne jugeons cette politique ni convenable ni positive.

Une fois de plus, les Français établis hors de France font office de variable d'ajustement budgétaire. Nos consulats devront donc continuer à travailler dans des conditions de plus en plus difficiles, alors qu'un certain nombre d'entre eux sont d'ores et déjà à bout de souffle.

Il en est de même des moyens humains, puisque votre budget prévoit que les effectifs de ce département passeront, après plusieurs années de diminution, de 2 430 équivalents temps plein en 2006 à 2 421, ce qui représente encore une fois une baisse de neuf postes.

Nous le voyons partout : les consulats n'arrivent plus à fonctionner. On supprime même les gendarmes qui gardent les consulats ! On va donc privatiser la garde des ambassades et des consulats. Cela signifie que l'on confiera, par exemple, à une société iranienne le gardiennage de notre ambassade à Téhéran. Je vous laisse imaginer le résultat le jour où 50 000 Iraniens manifesteront devant l'ambassade !

On augmente donc les tâches de service public - par exemple le contrôle de la validité des mariages - tout en diminuant les effectifs. À moins qu'un aspect de la question ne nous ait échappé, nous ne voyons pas comment tout cela pourrait fonctionner.

De plus, le désengagement de l'État est particulièrement marqué en matière d'aide sociale. Les crédits consacrés à cette action fondamentale sont demeurés stables pendant plusieurs années, à 17,8 millions d'euros. L'an dernier, ils s'élevaient à 17,6 millions d'euros et, cette année, ils s'établiront à 16 millions d'euros, soit une baisse de 8,8 %.

Ainsi, le projet de loi de finances pour 2007 aggrave la dégradation des aides sociales attribuées à nos compatriotes les plus démunis.

Je vous rappelle que, dans un rapport au Premier ministre, notre collègue Monique Cerisier-ben Guiga avait évalué à 22 millions d'euros le coût annuel de l'action sociale consulaire pour les Français de l'étranger.

La situation est désastreuse ! Je reviens, ce matin même, d'une visite dans le sud de Madagascar, où j'ai rencontré des communautés françaises qui se sont appauvries au même rythme que le pays. C'est le devoir de la République de les aider ! Or on constate qu'il n'est plus possible de faire face. Par exemple, j'ai vu un médecin scolaire payer de sa poche les frais d'hospitalisation et les médicaments des élèves de l'école ou du lycée français, parce que les parents n'ont pas les moyens de les acquitter. On a l'impression que l'on parle du Zimbabwe, et non de la France !

Enfin, les crédits alloués à l'emploi et à la formation professionnelle baissent de 34 %. Ils vont finir par disparaître ! Mieux vaux ne rien faire que de faire les choses à moitié ou de mal les faire !

La formation professionnelle que l'on peut proposer à des enfants français à l'étranger est une bonne alternative, dans la mesure où une partie d'entre eux, à 14 ou 15 ans, ne peut pas suivre le parcours royal qu'offre l'AEFE et qui consiste à préparer le concours d'entrée à l'École normale supérieure. Il vaut donc mieux former de bons mécaniciens, de bons maîtres d'hôtel ; les pays en ont besoin.

Telles sont les quelques remarques que je voulais formuler.

La plupart d'entre nous ont dit à peu près la même chose et dressé le même bilan. Mais, à l'évidence, les conclusions ont été différentes quant au vote. Pour ma part, je voterai contre ce budget. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères. Monsieur le président, monsieur le président de la commission, madame, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi d'abord de remercier l'ensemble des rapporteurs des différentes commissions et de vous dire le plaisir que j'ai à me trouver parmi vous ce soir.

Madame, messieurs les rapporteurs, vous avez tous bien voulu étudier en détail ce budget que j'ai l'honneur de vous présenter. Dans le même temps, vous avez soulevé un certain nombre de questions stratégiques, et je m'efforcerai de vous apporter des réponses précises.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de budget pour 2007 que j'ai l'honneur de vous présenter doit nous permettre de conduire une politique étrangère ambitieuse.

Permettez-moi de souligner ce qu'a dit d'emblée Mme Cerisier-ben Guiga, en constatant que les critiques qui avaient accompagné la présentation de ce budget n'étaient pas justifiées. Celui-ci s'établit, pour cinq programmes répartis entre trois missions, à 4,5 milliards d'euros, soit une hausse globale de 3,8 %.

M. Jean-Guy Branger, rapporteur pour avis. C'est exact !

M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Je me réjouis de cette augmentation,...

M. Serge Vinçon, président de la commission des affaires étrangères. Nous aussi !

M. Philippe Douste-Blazy, ministre... qui traduit dans les faits la volonté du Gouvernement de faire face à nos engagements internationaux.

Je m'attacherai plus particulièrement aujourd'hui à la mission « Action extérieure de l'État », qui regroupe, quant à elle, trois programmes, pour un montant de 2,25 milliards d'euros.

Le programme « Action de la France en Europe et dans le monde » voit ses crédits - hors masse salariale - croître de plus de 7,5 %. Ainsi, 50 millions de crédits supplémentaires sont affectés à la couverture des seize opérations de maintien de la paix des Nations unies, monsieur Del Picchia, et 10 millions d'euros complémentaires seront consacrés à nos autres contributions internationales.

Cette contribution est conforme aux dispositions du contrat de modernisation que j'ai conclu avec le ministre délégué au budget et qui prévoit le rebasage de ces contributions sur trois ans, comme l'a rappelé M. le rapporteur spécial.

Pour autant, et les rapporteurs pour avis l'ont souligné à juste titre, la résolution des crises échappe souvent à un cadre planifié, comme les événements du Liban l'ont montré cet été.

Si la FINUL renforcée s'est effectivement mise en place, la budgétisation de ces dépenses nouvelles n'est pas encore achevée, comme MM. Gouteyron, Del Picchia et Branger ont bien voulu le rappeler.

Les travaux en cours aux Nations unies laissent à penser qu'un appel de contributions sera lancé au début de l'année 2007, pour un montant qui sera vraisemblablement supérieur à 50 millions d'euros.

Monsieur Rouvière, vous m'interrogez sur les raisons de notre engagement dans des opérations extérieures au-delà de la simple urgence militaire et sur les objectifs. En réalité, rares sont les opérations extérieures qui auraient exclusivement une composante militaire. En dehors des cas d'urgence, les opérations s'accompagnent, bien sûr, d'une réflexion globale sur le cadre politique, sur la restauration ou la mise en place de l'état de droit et d'institutions viables, sur le développement économique et social.

Cet engagement de la France est un devoir. Il répond à nos responsabilités internationales pour le maintien de la paix et de la sécurité.

Au-delà du traitement politique de ces crises, je me préoccupe naturellement de leur aspect financier.

Un renforcement des contrôles a priori et a posteriori, en relation avec nos partenaires britannique et allemand, est aujourd'hui mis en place à New York comme sur le terrain. S'il n'est pas concevable que nous puissions nous soustraire aux responsabilités qui sont les nôtres sur la scène internationale, il est en revanche essentiel que nous nous montrions soucieux du bon usage des fonds alloués à ces opérations de maintien de la paix.

Il est d'ailleurs tout aussi important, au vu de la complexité croissante de ces opérations, de procéder à un rebasage de nos dotations budgétaires, plus rapide sans doute que celui qui est prévu au contrat.

Soyez assurés qu'avec l'aide du Parlement je m'y emploierai.

Je voudrais également remercier M. le rapporteur spécial d'avoir bien voulu attirer l'attention de la Haute Assemblée sur les instructions que j'ai données à nos négociateurs et sur le rapport que j'ai effectivement commandé à mon administration sur la situation d'un certain nombre d'accords internationaux : 156 exactement. Il importe - et vos rapporteurs ont raison de le souligner - d'aller au bout de cette analyse.

Un comité d'examen sera mis en place au ministère pour poursuivre ce travail de remise à plat de nos contributions obligatoires.

Plusieurs pistes sont à l'étude : une redistribution en direction des ministères techniques, qui sont les véritables porteurs de certaines contributions, ou simplement des renégociations de certains accords. Je compte d'ailleurs vous diffuser le rapport qui servira de base à nos travaux.

MM. Pozzo di Borgo et Legendre ont abordé la question de notre contribution au Conseil de l'Europe. Je voudrais leur dire que la France attache une grande importance au Conseil de l'Europe et à l'implantation de cette institution sur notre territoire.

Cet attachement se traduit par une augmentation de près de 800 000 euros de notre contribution pour 2007, dans un contexte budgétaire pourtant particulièrement difficile en matière de contributions internationales. Cet effort constitue aussi un signal adressé aux autres pays contributeurs dans les discussions en cours, alors que nombre d'entre eux ont adopté une position très restrictive sur l'évolution du budget.

Nous souhaitons donner au Conseil de l'Europe les moyens nécessaires à ses missions, notamment pour permettre à la Cour européenne des droits de l'homme de répondre à un nombre croissant de requêtes.

S'agissant de l'Agence des droits fondamentaux de l'Union européenne, monsieur Pozzo di Borgo, la France est parvenue à éviter toute duplication avec les attributions déjà reconnues au Conseil de l'Europe et à garantir leur complémentarité. L'Agence n'interviendra en effet que dans le champ d'application du droit communautaire, pour les institutions européennes, les États membres et les États candidats à l'Union.

Enfin, l'Agence a l'obligation de coordonner ses activités avec celles du Conseil de l'Europe, avec lequel elle devra négocier un accord de coopération.

En ce qui concerne le forum pour la démocratie, monsieur Pozzo di Borgo, c'est à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe que je vous suggère de vous adresser. C'est elle, en effet, qui soutient cette initiative. Je comprends néanmoins parfaitement vos interrogations.

Pour terminer sur ce volet, je dirai un mot sur les objectifs de ce programme.

La majorité des indicateurs de performance a été conçue, vous le savez, d'une manière plus qualitative que quantitative.

M. le rapporteur spécial de la commission des finances a bien voulu relever les progrès réalisés, alors même que l'action politique du ministère se prête difficilement à une analyse quantifiée.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. C'est vrai !

M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Je le remercie de son commentaire et je tiens à ajouter, parce que je partage son avis, que cette réflexion est prometteuse, mais qu'elle reste inachevée.

Nous devons continuer sur cette lancée. C'est pourquoi je souhaite effectivement saisir le tout nouveau Conseil des affaires étrangères que je viens de mettre en place : c'est à lui que je confierai l'expertise de nos outils et, surtout, de nos procédures d'évaluation, monsieur le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !

M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Au-delà de l'action diplomatique stricto sensu, permettez-moi d'évoquer à présent notre activité consulaire, décrite dans le programme « Français à l'étranger et étrangers en France » et dont parlait tout à l'heure brillamment M. de Montesquiou.

Dans le cadre de la politique du Gouvernement en faveur de la maîtrise des flux migratoires, ce programme, je tiens à le souligner, voit également ses crédits augmenter.

L'introduction de la biométrie dans les visas est une priorité avec, en perspective, la mise en oeuvre d'une base européenne de données.

Lancée en 2005 à titre expérimental dans cinq consulats, la biométrie sera étendue à vingt postes avant la fin de cette année - M. le président de la commission des affaires étrangères le sait -, soit un total de vingt-cinq consulats équipés. Nous avons ainsi couvert 21 % de la demande mondiale de visas sans financement extérieur.

Le comité interministériel de contrôle de l'immigration, le CICI, qui s'est réuni mardi, a décidé sa généralisation à l'ensemble du réseau consulaire.

Comme l'ont noté MM. Branger et de Montesquiou, 16 millions d'euros supplémentaires seront affectés à ce dispositif en 2007, conformément aux mesures du contrat de modernisation, qui prévoit un retour de 50 % de la recette des visas au profit du ministère des affaires étrangères. J'ai d'ailleurs bien l'intention, monsieur le rapporteur spécial, de m'assurer que mon ministère recevra effectivement la part qui lui est due dans le cadre de ce contrat.

Madame Cerisier-ben Guiga, vingt-trois emplois de titulaires vont être ouverts au recrutement au profit de mon ministère pour faire fonctionner les premiers postes équipés de biométrie. Un audit de modernisation permettra de préciser l'ampleur des besoins en personnel que ce nouvel outil nécessite, le CICI ayant d'ailleurs pris l'engagement de doter mon département ministériel des « renforts nécessaires » dans le projet de loi de finances pour 2008.

Il est vrai que l'entrée en vigueur, le 1er mars prochain, de la loi relative au contrôle de la validité des mariages induira une augmentation importante du nombre des auditions de conjoints que nos consulats devront effectuer avant ou après le mariage étranger, selon que les nouvelles dispositions auront ou non été respectées.

L'impact de cette charge supplémentaire sera toutefois très différent selon les postes et les pays. Les redéploiements d'effectifs qui seront nécessaires ont été intégrés à notre programmation pour 2007.

Je tiens également à le souligner devant vous, mon ministère a conduit avec succès la négociation sur les frais de dossiers des visas Schengen, qui passent donc de 35 à 60 euros. Pour donner une nouvelle impulsion, messieurs Del Picchia et de Montesquiou, à la coopération consulaire européenne, nous avons proposé à nos partenaires de développer la colocalisation des guichets consulaires et de mettre en place des services consulaires européens communs.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Cette mutualisation est un levier essentiel pour mettre en place, dès 2007, la biométrie dans la délivrance des visas.

La France a également lancé, avec le Royaume-Uni, une initiative en matière de protection consulaire d'urgence dite « d'État pilote », qui vise à mieux coordonner les interventions des États en cas de crise.

Mais la maîtrise de l'immigration dépend également d'autres paramètres. La lutte contre la fraude documentaire et la reconduite des étrangers en situation irrégulière, tout d'abord, appellent de notre part un dialogue courtois, mais sans complaisance, avec les pays d'origine. C'est dans cet esprit que j'ai souhaité engager la mise en oeuvre d'une politique de l'asile renouvelée et cohérente, conforme à nos traditions d'accueil, mais qui ne doit pas être détournée de nos objectifs.

La réduction des délais de traitement des demandes d'asile par l'OFPRA se trouve aujourd'hui bien engagée. Les premiers effets bénéfiques sont là, comme en témoigne la diminution des demandes en instance.

Je serai particulièrement vigilant, monsieur Gouteyron, à ce que, dans la droite ligne de vos observations, la légère décrue des moyens budgétaires que nous autorise cette amélioration du travail de l'OFPRA ne remette pas en cause, à l'avenir, le respect des objectifs de délais rappelés en juillet par le Président de la République. Quant aux décisions, monsieur Hue, elles sont examinées en toute indépendance et peuvent faire l'objet d'un recours juridictionnel.

Le budget de ce programme, vous le savez, organise le déploiement de moyens minima dédiés à la sécurité de nos compatriotes, autour de l'organisation d'une veille sécuritaire et de la mise en place de réseaux de communication et de stocks de sécurité. Nous sommes très attentifs, monsieur Gouteyron, à améliorer sans cesse notre dispositif de gestion des crises. C'est pourquoi je souscris tout à fait à l'idée d'enregistrer en ligne, sur notre site, les coordonnées des voyageurs français, l'objectif étant naturellement de les contacter plus facilement, en cas de difficulté.

Enfin, je rappellerai que les opérations exceptionnelles ou imprévisibles, comme l'évacuation du Liban cet été, rendent nécessaire l'ouverture de crédits nouveaux. Je pense en l'occurrence au décret pour dépenses accidentelles et imprévisibles, qui est porté à 9,3 millions d'euros sur le budget de 2006.

Pour répondre à MM. Cantegrit et Yung sur l'action sociale, l'objectif est non pas de dépenser davantage par principe, mais d'agir plus efficacement. C'est ce que nous avons fait, et je vous remercie, monsieur Cantegrit, de l'avoir noté. Nous avons été favorisés par l'effet change-prix dans le monde. Notre action a toujours été étroitement coordonnée avec les élus, localement et à Paris. Nous sommes ainsi parvenus à mettre en place une gestion équilibrée qui a permis de réduire sensiblement l'écart de traitement, en matière d'aide sociale, entre les Français résidant en France et les Français établis à l'étranger.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Il ne fallait pas aller jusque-là !

M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Monsieur Cantegrit, nous avons entrepris une action nouvelle en faveur de l'enfance en détresse et poursuivi notre effort pour les personnes handicapées. Nous avons accrû de façon sensible notre soutien aux activités des associations de bienfaisance et installé des centres médicosociaux auprès des consulats.

Les crédits inscrits au budget pour 2007 doivent nous permettre de poursuivre les efforts entrepris, à la fois dans l'intérêt de nos compatriotes en difficulté et pour assurer une bonne gestion des deniers publics.

Un mot, enfin, des élections pour vous répondre, monsieur Del Picchia, sur ce sujet majeur des prochains mois. La décision de créer des bureaux de vote décentralisés relève des ambassadeurs et des chefs de postes consulaires en fonction des circonstances locales et des moyens techniques disponibles, mais j'ai souhaité que nous adoptions une attitude volontariste en incitant à la création de tels bureaux.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Une enquête a ainsi été lancée auprès de nos postes pour identifier les zones de grande densité de résidents français. Sur cette base, la direction des Français à l'étranger et des étrangers en France a identifié une centaine de villes où pourraient être implantés des bureaux de vote.

De leur côté, nos postes ont parfaitement joué le jeu et proposé la création de 167 bureaux de vote décentralisés, qui s'ajoutent aux 356 bureaux de vote ouverts dans les locaux diplomatiques ou consulaires : au total, ce sont 523 bureaux de vote qui seront ouverts pour la prochaine élection présidentielle. (M. Robert Del Picchia applaudit.)

Quant à la présidence des bureaux de vote, elle revient en principe à l'ambassadeur, au chef de poste consulaire ou à leur représentant, lequel peut être un fonctionnaire relevant de leur autorité ou l'un des Français inscrits sur la liste électorale consulaire.

Monsieur Del Picchia, je termine sur l'information des électeurs, sujet majeur évidemment, en vous indiquant que chaque électeur sera individuellement informé par lettre ou par courrier électronique des modalités de l'élection, y compris la localisation du bureau de vote. Ces renseignements seront disponibles également par Internet sur le serveur ELECTIS, dès le 10 mars.

Concernant le programme « Rayonnement culturel et scientifique », les crédits pour 2007 sont en hausse de 9 millions d'euros, dont 8 millions d'euros sont consacrés à notre réseau scolaire à l'étranger.

S'agissant de ce programme, j'ai bien noté les interrogations de Mmes Cerisier-ben Guiga et Tasca, de MM. Gouteyron et Duvernois, mais aussi celles de M. Legendre - dans son rapport sur l'aide publique au développement - portant sur son périmètre budgétaire et géographique.

Je ne crois pas, pour ma part, que notre pilotage global souffre de la séparation en deux programmes de notre action de coopération culturelle et scientifique extérieure, car nous visons des objectifs souvent différents dans les pays développés et dans les pays en développement. Mais je comprends le sens des réflexions des différents sénateurs. C'est pourquoi il conviendra, me semble-t-il, d'y apporter des réponses dans le cadre de l'étude qui sera lancée prochainement sur l'architecture du budget pour 2008.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Pour l'année 2007, le premier poste de dépenses du programme et le premier bénéficiaire de la hausse des crédits est l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger. Ce faisant, et pour répondre à Mme Cerisier-ben Guiga ainsi qu'à MM. Duvernois, Ferrand, Hue et Legendre, notre objectif est bien de donner à l'Agence les moyens d'améliorer son offre de bourses scolaires, au profit de nos concitoyens les plus défavorisés.

Au-delà du dégel partiel de la mise en réserve des crédits de 2006, j'ai donc obtenu, avec mes autres collègues tuteurs d'établissements publics, que les règles de mise en réserve de crédits pour 2007 ne pénalisent pas les établissements qui ont de fortes dépenses de personnel, à l'image de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger.

Madame Cerisier-ben Guiga, monsieur Del Picchia, je sais quelles sont vos inquiétudes sur les crédits finançant les bourses destinées aux élèves français. Ces crédits sont bien en augmentation, et le fait qu'ils soient logés au sein du programme « Français à l'étranger et étrangers en France » garantit leur fléchage et le bon aboutissement des procédures de dégel. Je vous précise d'ailleurs qu'une abstention de la direction du budget dans un processus de vote n'a pas la même signification qu'un vote négatif.

Comme vous l'avez souligné, l'Agence poursuit effectivement, à ma demande, un programme de travaux de rénovation et de construction de lycées français, avec plusieurs projets, certes en partenariat public-privé, notamment au Caire, à Londres, au Vietnam ou en Espagne. Dans ces différents cas, toutes les solutions pertinentes seront étudiées en liaison étroite avec les parents d'élèves.

Par ailleurs, monsieur Ferrand, je vous remercie de vos propos sur le « plan école », et je tiens à vous rassurer sur la mobilisation de nos ambassadeurs et de nos chefs de postes consulaires. Quant à la nomination d'un administrateur issu du ministère de l'éducation nationale, retardée par un souci d'ordre juridique, je peux vous assurer, monsieur Ferrand, qu'elle aura lieu très rapidement.

Si le contexte politique le permet, une mission de l'AEFE se rendra en Côte d'Ivoire au début de l'année prochaine.

S'agissant, enfin, du Liban, Mme Cerisier-ben Guiga et M. Ferrand ont abordé, à juste titre, le souci de nombreuses familles concernant le domaine scolaire. Je voudrais leur dire qu'une aide complémentaire exceptionnelle a permis d'aider les familles pour l'achat des livres et des fournitures et pour la totalité des propositions d'attribution de bourses. Tout cela sera examiné favorablement, et d'ailleurs à la demande du Président de la République.

Un audit de modernisation a également été mené, à ma demande - je m'adresse à Mme Cerisier-ben Guiga, ainsi qu'à MM. Hue et Duvernois -, pour établir un diagnostic partagé entre mon ministère et celui du budget sur les conditions dans lesquelles devra être financée la nouvelle compétence immobilière de l'Agence. C'est un enjeu majeur, vous l'avez dit, pour l'avenir de notre réseau de lycées français.

J'ai insisté auprès de mon collègue du budget sur l'usage qu'il convient de faire de cet audit : nous disposons désormais d'un cadre clair ; quelques règles de bonne gestion financière ont été énoncées, s'agissant notamment du fonds de roulement de l'Agence. J'ai donc indiqué très clairement à Jean-François Copé qu'il conviendrait de suspendre l'exercice si celui-ci devait s'avérer dangereux pour les finances de l'établissement ou pour les contributions demandées aux parents. J'ai également demandé à mes services de neutraliser les charges d'amortissements qui auraient dû incomber à l'Agence en 2007 en raison de ces remises en dotation immobilières.

Enfin, Mme Tasca, si les crédits consacrés à la coopération avec les pays développés restent stables, j'ai souhaité initier un plan de relance de la langue française pour stopper la décrue des crédits consacrés à cette action, que le budget de ce ministère enregistrait depuis cinq ans.

L'Europe, mesdames, messieurs les sénateurs, est un enjeu essentiel pour l'avenir de notre langue. L'un de nos objectifs est précisément de soutenir et d'encourager le plurilinguisme dans les systèmes éducatifs de nos partenaires européens.

Au total, ce sont donc 46 millions d'euros qui sont consacrés à la langue française pour l'année 2007 sur les deux programmes « Rayonnement culturel et scientifique » et « Solidarité à l'égard des pays en développement ».

De plus, je présenterai tout à l'heure un amendement gouvernemental permettant de doter de 2 millions d'euros la Fondation constituée par l'Alliance française. Nous nous devons d'encourager cette initiative qui renforcera l'action exceptionnelle de ce réseau, et de montrer ainsi l'exemple à d'autres potentiels contributeurs, comme vous le souhaitez, monsieur Gouteyron.

En matière de rayonnement culturel et scientifique, j'ai souhaité également lancer un nouvel axe d'action fondé sur deux opérateurs plus visibles et plus efficaces, comme l'avait proposé M. Duvernois : je veux naturellement parler de l'agence culturelle CulturesFrance, qui a été créée grâce à la fusion de l'Association française d'action artistique et l'Association pour la diffusion de la pensée française, et de l'agence universitaire CampusFrance. J'ai particulièrement noté ce que Mme Tasca a dit sur CulturesFrance.

La commission a lancé un débat sur le devenir de CulturesFrance, et je voudrais l'en remercier. L'audit rendu par la Cour des comptes sur l'Association française pour l'action artistique, en soulignant ses difficultés de gestion, rejoint très largement l'analyse que j'avais faite et qui m'avait conduit à engager une réforme en profondeur de cet opérateur. Les recommandations du rapport de la Cour des comptes ont donc bien été prises en compte : un contrat d'objectifs et de moyens a été établi, et l'exercice de la tutelle se renforce.

Quant au statut, la suggestion de MM. Duvernois et Legendre d'aller vers un établissement public industriel et commercial rejoint ma propre analyse, et je tiens à vous assurer que mes équipes y travaillent, en liaison étroite avec le ministère de la culture et la nouvelle agence CulturesFrance.

Dans le même temps, et je tiens à le souligner, ce n'est pas le moment, mesdames, messieurs les sénateurs - Mme Tasca l'a relevé -, d'affaiblir le nouvel opérateur qui vient de se constituer. Il convient plutôt de faire converger nos efforts pour soutenir l'agence CulturesFrance, afin qu'elle se dote de l'organisation nécessaire pour améliorer sa performance et qu'elle puisse enfin se développer. Permettez-moi de vous dire qu'au Foreign Office, lorsqu'on parle du British Council, on parle du rayonnement du Royaume-Uni dans le monde.

Par ailleurs, en ce qui concerne le futur opérateur universitaire CampusFrance, la concertation se poursuit aujourd'hui très activement avec les différents acteurs universitaires et le ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, pour donner naissance à cette nouvelle agence dans les meilleures conditions possibles.

Je souhaite, à ce propos, rassurer Mme Cerisier-ben Guiga et M Duvernois en leur précisant qu'il n'est nullement question d'un désengagement de l'État. Au contraire, l'objectif que je poursuis est de rapprocher les différents opérateurs intervenant dans l'accueil et la gestion des bourses des étudiants étrangers, de clarifier leurs missions, et ce afin de renforcer, dans toutes ses dimensions, le pilotage stratégique de l'État. Tel est d'ailleurs l'objet des discussions en cours entre mes services et ceux du ministère de l'éducation nationale, dont j'ai bon espoir qu'elles aboutiront très vite.

C'est là, à bien des égards - et je vous rejoins sur ce point, monsieur Duvernois - un enjeu majeur et stratégique pour notre pays.

La France, qui a retrouvé cette année le troisième rang mondial en matière d'accueil d'étudiants étrangers, monsieur Yung, doit réussir cette nouvelle et profonde mutation. Tout notre dispositif y concourt ; je pense, en particulier, aux bourses d'excellence accordées par l'AEFE aux étudiants étrangers les plus brillants ; je pense aussi au déploiement des centres pour les études en France qui couvriront, dès la fin de l'année 2007, vingt et un pays et 70 % de la demande de visas pour études.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le programme audiovisuel extérieur dont vous aviez approuvé la création l'an dernier a été intégré, cette année, au sein de la mission « Médias » placée sous l'autorité du Premier Ministre. Il vous sera présenté vendredi par mon collègue Renaud Donnedieu de Vabres.

J'ai bien noté les réserves de Mme Cerisier-ben Guiga concernant ce rattachement interministériel et le souhait de plusieurs d'entre vous de voir le programme consacré à France 24 fusionner avec celui des autres opérateurs de l'audiovisuel extérieur et placé au sein de la mission « Action extérieure de la France ». C'est là une préoccupation que je partage dès lors que, dans le même temps, l'action de TV5 peut être préservée, madame Tasca. Il conviendra donc d'envisager une telle évolution dans le cadre du prochain budget.

Pour améliorer le pilotage interministériel de ce secteur, j'ai proposé au Premier Ministre la réactivation du Conseil audiovisuel extérieur de la France. Je pense, mesdames Cerisier-ben Guiga et Tasca, que ce dispositif sera de nature à répondre à vos inquiétudes.

Les ministres concernés doivent pouvoir réfléchir ensemble aux questions stratégiques de l'audiovisuel extérieur et décider collectivement, sous l'autorité du Premier Ministre, des améliorations à apporter. Un rapport du Gouvernement sur l'action audiovisuelle extérieure serait ainsi rédigé chaque année, afin que notre politique audiovisuelle extérieure devienne enfin plus compréhensible, visible et lisible pour le Parlement comme pour l'opinion publique.

Dans le projet de loi de finances pour 2007, les crédits du programme « Audiovisuel extérieur » restent stables, mais un rééquilibrage est opéré en faveur de TV5, qui voit ses moyens s'accroître de 2,5 millions d'euros afin de financer la politique de sous-titrage de la chaîne ; j'apporte cette précision en réponse à Mme Cerisier-ben Guiga.

Enfin, le dynamisme de la redevance, d'une part, les économies dégagées par Radio France Internationale, d'autre part, ont rendu possible une légère diminution des moyens budgétaires accordés par mon département pour 2007. Je tiens néanmoins à vous rassurer : Radio France Internationale bénéficie de l'entier soutien de ce ministère dans les réformes qu'elle a engagées et, notamment, pour la transition majeure qu'elle amorce vers le multimédia.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez bien voulu voter la mission « Aide publique au développement » que Mme Brigitte Girardin vous a présentée mardi matin. Notre pays sera ainsi en mesure d'atteindre l'objectif de 0,5 % du produit intérieur brut consacré à l'aide publique au développement pour 2007, conformément à l'objectif qui nous avait été assigné par le Président de la République.

Permettez-moi, en tant que ministre de tutelle, de mettre l'accent sur un aspect particulier de cette mission : notre pays accomplit aujourd'hui un effort remarquable, et d'ailleurs remarqué par nos partenaires, dans la lutte contre les pandémies. C'est là un sujet essentiel pour notre action diplomatique - je remercie M. Pozzo di Borgo de l'avoir souligné - car la fracture sanitaire, par ses conséquences économiques, migratoires, culturelles et sociétales, est d'abord et avant tout une question éminemment politique ; 90 % des nouveaux cas de maladies infectieuses surviennent, nous le savons, dans les pays du Sud.

Aussi, je me réjouis que la France ait accordé, pour l'année 2007, au Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme une dotation de 300 millions d'euros.

De la même manière, je suis heureux que la contribution de solidarité sur les billets d'avion, qui a permis de créer UNITAID avec dix-neuf pays, puis quarante-quatre aujourd'hui, permette, d'ici à deux ans, de soigner 250 000 enfants de moins de quinze ans par trithérapie, alors qu'ils n'étaient jusqu'à présent que 10 000.

Le tableau que je viens de brosser devant vous, mesdames, messieurs les sénateurs, resterait incomplet si je n'évoquais pas l'action que je conduis, avec le soutien de mes services, en faveur de la modernisation du ministère.

Comme l'ont souligné MM. Branger et de Montesquiou, le 25 juillet dernier, le Premier Ministre a réuni le comité interministériel des moyens de l'État à l'étranger, le CIMEE. C'était une première depuis la dernière réunion de ce comité en 1996, c'est-à-dire il y a dix ans.

Une directive nationale d'orientation des ambassades a été approuvée, même si je n'ignore pas qu'elle reste perfectible. Des orientations ont été données pour favoriser le redéploiement progressif du réseau vers les pays émergents, en Asie ou en Europe orientale notamment, comme le souhaite M. Gouteyron. Des principes de mutualisation interministérielle ont également été fixés, en particulier pour mieux adapter notre gestion à l'étranger aux contraintes de la loi organique relative aux lois de finances.

Avec le CIMEE, nous voulons apporter des solutions pérennes à de vrais enjeux. Monsieur de Montesquiou, je partage votre constat sur la nécessaire évolution du réseau. L'impulsion donnée à son redéploiement vers la Chine, l'Inde ou la Russie en témoigne. On ne comprendrait pas que la France n'ouvre pas de nouveaux consulats dans ces grands pays, cela pouvant naturellement conduire à en fermer dans d'autres régions du monde. Toutefois, en Chine, sachez que nos effectifs consulaires ont été augmentés de 30 % en 2006.

Les efforts que nous avons consentis et négociés dans notre contrat de modernisation reposent, aujourd'hui, sur un cadrage politique précis et clair.

D'une part, nous bénéficions d'une hausse de nos moyens d'intervention et d'une clarification de nos conditions de gestion, telles que l'amélioration de notre politique immobilière et la mise en place d'une couverture contre le risque de change ; M. Gouteyron a bien voulu le souligner.

D'autre part, nous contribuons légitimement à la baisse des effectifs de la fonction publique de l'État ; je remercie MM. Branger et de Montesquiou et Mme Cerisier-ben Guiga de l'avoir relevé. Notre masse salariale diminue en effet de 1,4 %, avec 141 postes supprimés et 129 autres postes transférés à l'Agence française de développement.

Quant à l'intelligence économique, monsieur de Montesquiou, soyez assuré que ce ministère prend toute sa part à l'effort du Gouvernement en la matière, notamment avec des comités d'intelligence économique dans certaines ambassades. Je reconnais cependant que c'est insuffisant.

C'est dans le cadre du contrat de modernisation et de l'audit réalisé cette année que nous traitons la question des agents de droit local ; je le souligne à l'attention de MM. Duvernois, de Montesquiou et Gouteyron. Je prends bonne note du problème de la disparité de situation.

C'est également dans ce cadre, messieurs Del Picchia et Gouteyron, que j'engage le regroupement de nos services parisiens sur trois sites : le Quai d'Orsay, le bâtiment en cours de construction à La Courneuve et un troisième site en cours d'identification.

Mais surtout, je tiens à le souligner, le département est aujourd'hui assuré de conserver l'intégralité du fruit de ses efforts de productivité. C'est évidemment un élément fondamental si nous voulons poursuivre, dans de bonnes conditions, la modernisation que nous avons engagée avec détermination, persévérance et la volonté d'agir dans la durée pour affirmer et renforcer l'efficacité de notre action diplomatique.

Je répondrai rapidement aux questions qui m'ont été posées sur la politique étrangère.

Tout d'abord, MM. Hue, Plancade et Del Picchia ont abordé le sujet du Tchad, de la République centrafricaine et du Soudan.

Pour répondre aux interrogations relatives aux interventions françaises au Tchad et en République centrafricaine, je tiens à rappeler que voilà plusieurs mois que nous appelons l'attention de l'opinion et de la communauté internationale sur le grave danger de déstabilisation régionale de la crise du Darfour. Il s'agit sans aucun doute du conflit le plus préoccupant de l'ensemble du continent africain, et ce en raison de trois risques.

Le premier risque est d'ordre humanitaire : 300 000 morts, 2,5 millions de personnes déplacées, plus de 300 000 personnes sans aide humanitaire.

Le deuxième risque est d'ordre politique, avec une partition du Soudan et une remise en cause des accords du Sud ; ces derniers ont été signés en janvier 2004, après vingt ans de guerre civile.

Enfin, troisième risque, la déstabilisation de la région : le Soudan est le plus grand pays d'Afrique ; neuf pays voisins, dont le Tchad et la République centrafricaine.

Il y a deux urgences.

Il s'agit, d'abord, de la stabilisation du Darfour ; l'Union africaine vient de voter à Abuja, le 30 novembre, la prolongation de six mois de son mandat au Darfour. Récemment, à l'occasion de mon deuxième voyage au Soudan, j'ai demandé au président Bachir que l'Union africaine puisse être aidée par la logistique des Nations unies.

Cela dit, il n'y aura jamais de paix au Darfour sans accord politique entre le gouvernement soudanais et les différents groupes rebelles. La France est prête à jouer un rôle en la matière.

Nous disposons désormais d'un accord de principe concernant les autorités tchadiennes et centrafricaines sur la méthode. Car la seconde urgence, c'est éviter la déstabilisation de la région.

Le Président de la République a eu l'idée de mettre en place une force internationale aux frontières entre le Tchad et le Soudan, d'une part, entre la République centrafricaine et le Soudan, d'autre part. Le principe d'une telle présence internationale a été accepté par le président Deby le 30 novembre dernier, à N'Djamena, lors de la visite de Dominique de Villepin.

M. Serge Vinçon, président de la commission des affaires étrangères. C'est un progrès !

M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Il reste à en déterminer les modalités, notamment les rôles respectifs de l'Union africaine et des Nations unies. Mais c'est ce qui motive la décision de la France de réagir sans attendre par un appui militaire auprès des gouvernements tchadien et centrafricain, afin de préserver l'intégrité territoriale de ces deux pays.

Monsieur Hue, en ce qui concerne la Côte d'Ivoire, comme vous, je regrette la dérive actuelle que connaît ce pays. Plus encore que la vitrine de l'amitié franco-africaine, la Côte d'Ivoire a surtout été le pays phare de l'Afrique de l'Ouest. Je souhaite sincèrement qu'elle retrouve au plus vite sa place et son rang.

Seules des élections crédibles permettront à ce pays, désormais coupé en deux, de sortir définitivement de la crise dans laquelle il s'enlise chaque jour davantage. La tenue de ces élections dans les meilleurs délais et dans des conditions de nature à ramener la confiance doit être notre seul objectif. Tous ceux qui continueraient de s'y opposer ou de compter sur une autre solution compromettraient la sécurité de la population ivoirienne et l'avenir de ce pays.

Les efforts considérables consentis aujourd'hui par la communauté internationale, et en particulier par la France, doivent maintenant porter leur fruit s'agissant des deux objectifs de l'action internationale : les élections et le désarmement.

Pour ce qui est de l'opération Licorne, je rappellerai que nos soldats sont présents en Côte d'Ivoire, sous mandat et à la demande des Nations unies, en appui aux Casques bleus de l'ONUCI, dont le mandat expirera le 15 décembre prochain. Les consultations relatives au renouvellement de ce mandat se tiendront le 12 décembre et le mandat de la force Licorne sera examiné dans ce cadre par l'ensemble de nos partenaires.

Depuis la résolution 1718 de l'ONU, monsieur Plancade, la Corée du Nord ne peut plus exporter de missiles.

S'agissant de l'Iran, les négociations sur les sanctions progressent. Les directeurs politiques des cinq pays membres permanents du Conseil de sécurité et de l'Allemagne se sont réunis voilà à peine vingt-quatre heures au Quai d'Orsay. En outre, une session s'est tenue le 5 décembre dernier à cette fin. Les discussions progressent. Nous devrions passer au vote à New York avant la fin de l'année, du moins je l'espère, sur le fondement de l'article 41 du chapitre 7 de la Charte.

Concernant l'Irak, monsieur le sénateur, vous avez souligné que la France avait prévu les effets de l'opération américaine. Il n'en reste pas moins que notre intérêt est de parvenir à un Irak stable et démocratique. C'est l'objectif auquel l'Union européenne et la France participent activement, en apportant leur soutien aux autorités irakiennes.

En réalité, comme nous y invite la lecture du rapport Baker, il faut garder en tête deux idées simples : d'un coté, le respect de la souveraineté et de l'intégrité territoriale et, de l'autre, le transfert le plus rapide possible des compétences de sécurité aux autorités irakiennes.

Monsieur Plancade, la Somalie est effectivement un sujet de préoccupation croissant dans une zone névralgique du continent africain.

Nous avons toujours soutenu le gouvernement de transition, depuis sa mise en place en 2004, et nous continuons à le faire. Les institutions de transition sont les seules institutions politiques légitimes de Somalie. Après quinze ans de chaos et de vide institutionnel, il faut tout faire pour préserver le fragile processus de transition.

Seul le dialogue politique peut parvenir à définir une solution mettant fin au fractionnement du territoire somalien. Pour autant, le temps joue en faveur des tribunaux islamiques, qui se renforcent, au détriment des institutions de transition.

Nous pensons qu'un compromis est encore possible. Malgré la mobilisation militaire, il existe de chaque côté des forces prêtes à poursuivre le dialogue afin de trouver une solution politique. Une formule de compromis faisant clairement apparaître la force africaine régionale IGASOM pour soutenir le processus de règlement de la crise a notre préférence.

C'est pourquoi nous avons proposé aux Américains d'amender leur projet de résolution sur les plans du mandat --- observation et vérification, à Baidoa et à ses abords - de la taille et de la durée de la mission, ainsi que de sa composition, sans la participation des pays limitrophes, afin d'éviter une escalade militaire du fait d'une implication éthiopienne.

Cette formule doit permettre d'amorcer une désescalade, monsieur le président de la commission des affaires étrangères, et de créer les conditions pour réaliser les engagements pris à Khartoum en juin 2006, sous l'égide de la Ligue arabe.

Nos amendements n'ont pas tous été adoptés. Nous restons donc très prudents sur les conditions de déploiement de cette force. C'est la raison pour laquelle nous n'avons pas coparrainé la résolution du Conseil de sécurité adoptée hier, sur proposition américaine, autorisant la création de cette force de paix en Somalie.

Je conclurai par la question du Kosovo, qu'a évoquée M. Rouvière. Nous avons tous préféré attendre les élections serbes du 21 janvier prochain. M. Marti Ahtisaari, à la demande du secrétaire général des Nations unies, proposera au Kosovo, et donc aux Serbes, un projet de statut final qui permettra de réaliser les aspirations légitimes des uns, tout en assurant la protection des autres. Notre présence militaire débouchera donc, monsieur le sénateur, sur un règlement politique. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Action extérieure de l'Etat
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Article 34 et état B (interruption de la discussion)

M. le président. Nous allons procéder à l'examen des amendements portant sur les crédits de la mission « Action extérieure de l'État » figurant à l'état B.

État B

(En euros)

Mission

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Action extérieure de l'État

2 556 860 785

2 255 409 537

Action de la France en Europe et dans le monde

1 746 453 138

1 445 001 890

dont titre 2

506 192 367

506 192 367

Rayonnement culturel et scientifique

474 905 576

474 905 576

dont titre 2

89 906 805

89 906 805

Français à l'étranger et étrangers en France

335 502 071

335 502 071

dont titre 2

189 469 854

189 469 854

M. le président. L'amendement n° II-3, présenté par M. Gouteyron, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits de la mission des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

Dont Titre 2

 

2.760.500

 

2.760.500

Rayonnement culturel et scientifique

Dont Titre 2

 

 

 

 

Français à l'étranger et étrangers en France

Dont Titre 2

 

 

 

 

TOTAL

2.760.500

2.760.500

SOLDE

- 2.760.500

- 2.760.500

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. En préambule, je voudrais répondre à certaines observations que je n'ai guère appréciées !

Ainsi, Mme Cerisier-ben Guiga a évoqué une « campagne de presse » en brandissant des coupures de journaux. Je ne comprends pas ! En effet, une campagne de presse suppose un chef d'orchestre, qui a la volonté de nuire, mais à qui ? Au ministre ? C'est un ami ! À notre diplomatie ? J'y suis attaché autant que vous, madame !

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Je souhaite simplement que la commission des finances fasse son travail et j'essaie d'en être le modeste exécutant. Je propose des mesures qui me paraissent susceptibles de faciliter la prise de conscience, voire d'améliorer certaines situations.

M. Jean-Guy Branger, rapporteur pour avis. Très bien !

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Mais que l'on ne parle pas de « campagne de presse » !

Si des éléments de mon rapport vous paraissent contestables, erronés ou inopportuns, dites-le !

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. C'est votre droit en démocratie, mais ne supposez pas des choses qui ne sont pas !

Si la presse s'est intéressée à mon rapport, est-ce mauvais pour le Sénat et pour nous tous qui le représentons ? Si les titres ne correspondent pas au contenu de l'article, écrivez aux journalistes, vous en connaissez sans doute plus que moi !

J'en viens maintenant à l'amendement, qui vise à réduire les crédits dévolus à la sous-action 43 de l'action 4, consacrée au paiement de contributions internationales. Vous en avez bien compris l'objectif, monsieur le ministre, comme en témoigne l'allusion glissée dans votre propos, même si la presse a relevé l'aspect folklorique de l'énumération des organisations concernées.

Votre ministère a des responsabilités immenses, il est largement porteur de l'image de la France dans le monde. Peut-être a-t-il mieux à faire que de gérer certaines contributions à des organisations internationales aussi diverses que variées, dont toutes ne sont pas à la mesure, il faut bien le reconnaître, de la noblesse de votre tâche.

Cet amendement n'a pas d'autre objectif. Le transfert de la gestion de ces crédits vers des ministères techniques est une action de clarification, qui permettra d'alléger la tâche des responsables de votre administration. Vous ne vous en plaindrez sans doute pas, monsieur le ministre, nous non plus !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Je voudrais, une nouvelle fois, saluer la qualité du dialogue incitatif que vous avez établi avec mes services, monsieur le rapporteur spécial. J'apprécie, par ailleurs, pleinement l'aide que vous apportez au ministère sur la difficile question du financement de nos contributions internationales.

La proposition d'effectuer un nouveau tri parmi les contributions portées par le ministère, de manière à transférer celles qui ont un caractère plus technique que diplomatique au ministère sectoriel compétent, rejoint tout à fait mes propres préoccupations.

Comme je l'ai rappelé, j'ai demandé à mes services de procéder à une revue des 156 accords internationaux et des 156 contributions obligatoires que gère le ministère des affaires étrangères, puis de me faire des propositions pour rationaliser leur gestion.

Ce rapport, qui sera naturellement diffusé au Parlement, servira de base à une négociation interministérielle sur la valeur ajoutée technique apportée par les différentes administrations qui sont susceptibles de faire vivre effectivement les dossiers.

J'ajouterai que ce procédé n'est pas nouveau et qu'au moment de l'entrée en régime de la LOLF, c'est-à-dire à l'occasion de la loi de finances pour 2006, nous avons procédé au transfert des crédits du CERN au ministère de la recherche, pour un montant de 140 millions d'euros. En effet, nous avions jugé, l'an dernier, que la valeur ajoutée du Quai d'Orsay en matière d'accélération des particules ne justifiait pas que cette contribution internationale transite par notre budget. (Sourires.)

Il s'agit maintenant d'aller plus loin, monsieur le rapporteur spécial, en harmonie avec vos propositions, en s'attaquant à des dizaines de contributions, pour des montants qui vont de la dizaine de milliers au million d'euros. Mon ambition va donc au-delà des huit organisations que vous avez bien voulu cibler.

Si nous nous accordons sur l'objectif, il convient d'examiner le processus de mise en oeuvre. En d'autres termes, la conclusion budgétaire doit-elle précéder la négociation technique ? Des contacts interministériels doivent être engagés rapidement avec les administrations concernées, de sorte que, en accord avec le Premier ministre et avec le ministre du budget, des décisions concertées puissent être formulées et prises en compte dans la préparation du projet de loi de finances pour 2008.

Mme Catherine Tasca. Bien sûr, c'est dans cet ordre qu'il faut procéder !

M. André Rouvière. C'est évident !

M. Robert Hue. Bien sûr !

M. Philippe Douste-Blazy, ministre. En annulant dès à présent des crédits sans que les dossiers aient pu être transférés aux ministères techniques, nous courons le risque de provoquer des ruptures de financement de nos engagements internationaux.

C'est pourquoi, dans la mesure où nous avons défini ensemble un objectif intéressant et valable tant pour l'équilibre des finances publiques que pour le bon ordre des affaires, monsieur le rapporteur spécial, je vous serais reconnaissant de bien vouloir retirer votre amendement.

M. le président. Monsieur le rapporteur spécial, l'amendement n° II-3 est-il maintenu ?

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Le sens de notre amendement a été compris. Monsieur le ministre, ce que vous avez dit, il était important que nous l'entendions. (M. Jean-Guy Branger, rapporteur pour avis, acquiesce.)

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Notre objectif est atteint.

Vous avez évoqué les crédits du CERN ; vous admettez que bien d'autres contributions sont concernées et vous vous êtes engagé dans un processus de clarification et de transfert. Je conçois parfaitement que la décision ne nous appartienne pas et qu'elle se prenne en concertation avec les ministères « techniques » qui en auront la charge.

J'accepte donc volontiers de retirer cet amendement.

M. Serge Vinçon, président de la commission des affaires étrangères. Très bien !

M. le président. L'amendement n° II-3 est retiré.

La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais me réjouir du climat qui préside à nos échanges et rendre un hommage particulier à Adrien Gouteyron, en sa qualité de rapporteur spécial.

MM. Jean-Guy Branger, rapporteur pour avis, et Robert Del Picchia. C'est vrai !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Depuis un an, il se livre chaque mois à des missions de contrôle sur place et sur pièces. Il se rend dans les ambassades. Il a présenté des communications sur la gestion du patrimoine immobilier du ministère des affaires étrangères : vous avez des marges de progression et vous les empruntez avec détermination, monsieur le ministre, ce dont je tiens à vous féliciter.

Adrien Gouteyron s'est rendu au Niger, avec Michel Charasse, pour apprécier la situation s'agissant de la crise alimentaire.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Michel Charasse est de bonne compagnie !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je vous rappelle, pour dissiper toute ambiguïté, que les rapporteurs spéciaux sont prêts à conduire des missions avec les rapporteurs pour avis.

Notre collègue a également conduit une mission sur l'usage d'Internet et ses propositions ont été rappelées ce soir.

Il s'est aussi rendu en Asie...

M. Robert Hue. Il voyage !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. ...pour apprécier la mobilisation des moyens au lendemain du tsunami, avec Michel Charasse.

M. Jean-Pierre Plancade. Le couple infernal ! (Sourires.)

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Il a été au Liban, pour apprécier la situation de crise. Il a, en outre, conduit un important travail sur le fonctionnement de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, l'OFPRA.

Donc, les opinions qu'il exprime sont fondées sur un travail en profondeur.

Madame Cerisier-ben Guiga, nous sommes des sénateurs et nous devons rendre compte de nos diligences. Par conséquent, je m'étonne de vos propos.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Pourquoi vous sentez-vous attaqués ?

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Nous ne sommes pas mandatés pour conduire nos missions dans la clandestinité. Certains Français se demandent quel est le rôle du Sénat. Je voudrais saluer celles et ceux qui rendent compte de leurs travaux pour que nos compatriotes ne doutent pas du rôle institutionnel de la Haute Assemblée.

Certains se demandent même si le Parlement a encore du pouvoir. Je rappelle qu'il dépend de chacun d'entre nous, chers collègues, que le pouvoir soit ici, à condition que nous assumions nos prérogatives.

J'ai entendu M. Duvernois, dire l'étonnement de la commission des affaires culturelles à propos d'un amendement. Pourtant, chaque fois que les rapporteurs spéciaux rendent compte de leur analyse du projet de budget, nous invitons les rapporteurs pour avis, et M. Assouline était présent à cette réunion de la commission des finances !

M. Jean-Pierre Plancade. Vous avez de belles références !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Par conséquent, je m'élève contre l'idée que nous pourrions avoir pris une initiative qui n'aurait pas été concertée avec la commission des affaires culturelles.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Ni avec les sénateurs représentant les Français établis hors de France !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Peut-être nous reste-t-il quelques progrès à faire, nous-mêmes sénatrices et sénateurs, pour mieux coordonner nos initiatives et les rendre plus efficaces encore.

Monsieur le ministre, c'est en effet un appel qui vous a été lancé à travers ce premier amendement et, naturellement, nous enregistrons votre réponse avec satisfaction. Nous ne doutons pas que les décisions que vous prendrez seront tout à fait conformes au souhait que nous avons exprimé.

M. le président. L'amendement n° II-255, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

Dont Titre 2

 

 

 

 

Rayonnement culturel et scientifique

Dont Titre 2

2.000.000

 

2.000.0000

 

Français à l'étranger et étrangers en France

Dont Titre 2

 

 

 

 

TOTAL

2.000.000

2.000.000

SOLDE

+ 2.000.000

+ 2.000.000

La parole est à M. le ministre.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Cet amendement concerne le réseau des Alliances françaises.

Ce réseau est l'instrument d'une présence française dans 136 pays. Ce sont, chaque année, plus de 420 000 étudiants de français, ce sont de très nombreuses manifestations culturelles, qui contribuent de manière éminente à la diffusion de la langue et de la culture françaises.

L'Alliance française de Paris, ce grand mouvement international fondé en 1883, lui a apporté jusqu'ici, faute de moyens propres, un soutien essentiellement moral. Or elle bénéficie de la légitimité et de l'expertise nécessaires pour coordonner ce réseau, soutenir son développement, l'aider à améliorer la qualité de son offre.

La création par l'Alliance française d'une fondation internationale reconnue d'utilité publique répond à cet objectif. Elle doit permettre de mobiliser les ressources des entreprises privées aussi bien que de la puissance publique, sans négliger l'apport financier ou technique des individus, des universités, des collectivités locales.

Le ministère apporte donc à l'Alliance française un soutien, sous la forme notamment de la rémunération de 250 agents et de 74 volontaires internationaux, ainsi que par l'octroi de subventions. Je souhaite compléter notre effort en dotant la fondation des moyens qui lui permettront d'augmenter ses ressources et, surtout, d'asseoir son indépendance.

Nous donnons ainsi un signal aux autres contributeurs pour les encourager à suivre cet exemple.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Monsieur le ministre, vous savez que cet amendement, et ce n'est pas le président de la commission qui me contredira, nous fait un très grand plaisir,...

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Bien sûr !

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. ... parce qu'il est la concrétisation d'une démarche entreprise depuis longtemps.

Le rapporteur général et moi-même avions proposé de prélever 2 millions d'euros sur le produit des privatisations ; au cours du débat, M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget, a fait valoir qu'il préférait accorder une dotation pour accompagner votre propre volonté, monsieur le ministre.

Je me réjouis vivement qu'en la matière le ministre et le Parlement aient travaillé dans la même direction et aboutissent à ce résultat ; je crois que nous pouvons en être très fiers. L'Alliance française est, en effet, un instrument tout à fait extraordinaire, et la création de la fondation, les responsables nous l'ont dit et répété, lui permettra certainement de franchir un pas nouveau.

L'avis de la commission est donc, bien sûr, très favorable, monsieur le président. (Applaudissements sur les travées de l'UMP, de l'UC-UDF et du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-255.

(L'amendement est adopté à l'unanimité. - Applaudissements.)

Mme Hélène Luc. Très bien !

M. le président. L'amendement n° II-2 rectifié, présenté par M. Gouteyron, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

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+

-

+

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Action de la France en Europe et dans le monde

Dont Titre 2

 

1.000.000

 

1.000.000

Rayonnement culturel et scientifique

Dont Titre 2

 

 

 

 

Français à l'étranger et étrangers en France

Dont Titre 2

1.000.000

500.000

 

1.000.000

500.000

 

TOTAL

1.000.000

1.000.000

1.000.000

1.000.000

SOLDE

0

0

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Cet amendement est peut-être plus compliqué à exposer, monsieur le ministre, et je ne sais quelles seront finalement nos positions respectives, mais je veux en expliquer le sens.

Il a un triple objet.

L'objet de base, celui qui en a commandé la rédaction, correspond à l'une de vos préoccupations. Elle ne date pas d'aujourd'hui, puisque vous venez d'y faire allusion en répondant aux observations qui ont été formulées et que vous en aviez déjà fait état dans les réponses écrites que vous nous avez adressées. Il s'agit d'inciter nos diplomates à mieux négocier les contributions de la France aux organisations internationales et ainsi de mieux en maîtriser, autant que faire se peut - je sais combien c'est difficile ! -, l'évolution. C'est absolument nécessaire, et le sens profond de cet amendement est d'abord là.

Je veux prévenir une critique en expliquant pourquoi la commission a adopté cette position.

Vous pourriez, en effet, m'opposer une objection, monsieur le ministre : alors que j'ai souligné tout à l'heure que les contributions aux organisations internationales étaient sans doute sous-évaluées, voilà que je veux supprimer 1 million d'euros. N'est-ce pas incohérent ?

Vous savez bien que non, monsieur le ministre : ma proposition a une valeur incitative, et ce n'est pas ce million d'euros qui aggravera la situation !

Cet argent une fois prélevé sur les contributions internationales, se pose la question de sa réaffectation.

Le deuxième objet de cet amendement m'a été inspiré par les constatations que j'ai pu faire assez récemment au Liban, après la guerre, et qui rejoignent les remarques formulées par nos collègues représentant les Français établis hors de France : il faut pouvoir tenir compte de la situation sociale de certains de nos compatriotes que le sort a frappés, et être en mesure de les aider. Je propose donc qu'une partie de ce prélèvement soit affectée à l'aide à nos ressortissants, en particulier dans les pays qui traversent une crise.

Le troisième objet que je vise à travers cet amendement concerne l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, l'OFPRA. Vous avez rappelé, monsieur le ministre, votre attachement au travail de cet organisme, de cette institution, et je veux confirmer le mien.

Le travail de l'OFPRA dépend largement de la qualité des relations qui s'établissent entre son administration de tutelle - la vôtre, monsieur le ministre - et l'Office lui-même : il faut que les informations circulent. C'est ce qui m'a conduit à me demander pourquoi l'OFPRA ne placerait pas dans quelques-uns de nos postes, choisis parmi les plus exposés à la pression migratoire, certain de ses agents - j'ai proposé le chiffre de cinq -, qui pourraient ainsi faciliter ces liaisons. Je propose donc l'affectation de 500 000 euros, c'est-à-dire de la seconde moitié du prélèvement sur les contributions extérieures, pour financer, en manière de contrepartie, ce détachement d'agents de l'OFPRA.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Si je comprends bien, monsieur le rapporteur spécial, vous souhaitez réaliser un prélèvement de 1 million d'euros sur les contributions internationales afin d'inciter le Gouvernement à en maîtriser l'évolution...

Je rappelle à la Haute Assemblée que plus de 95 % de la dépense nouvelle surgie depuis 2003 sont imputables à cinq nouvelles opérations de maintien de la paix : Côte d'Ivoire, Liberia, Haïti, Congo et sud du Soudan. En ce domaine, vous en conviendrez, le critère de maîtrise de la dépense, s'il existe, n'est pas le seul élément de décision, loin s'en faut.

L'adoption de cet amendement renforcerait les difficultés que nous connaissons pour financer nos contributions internationales, alors même que nous attendons, monsieur le rapporteur spécial, les résultats du travail de remise à plat de nos engagements que j'ai entrepris avec détermination et que vous-même préconisez.

Vous proposez d'affecter la moitié des crédits transférés au programme 151, soit 500 000 euros, à la création de cinq postes d'agents de l'OFPRA à l'étranger. Je suis naturellement avec attention les travaux que vous avez bien voulu mener sur le fonctionnement de l'Office, et j'ai pris bonne note de vos suggestions relatives au renforcement des relations entre l'OFPRA et les postes diplomatiques consulaires.

L'idée d'accueillir quelques agents de l'OFPRA en détachement dans nos ambassades ou nos consulats mérite d'être étudiée. Il convient toutefois de définir parfaitement le projet : il ne s'agirait pas, en effet, de créer de nouvelles structures administratives sous la forme d'un réseau de l'OFPRA hors de France - ce qui, au demeurant, mettrait ces officiers de protection dans une situation un peu particulière vis-à-vis des autorités locales. Je comprends donc qu'il s'agirait simplement de les accueillir en stage, en mission ou en détachement dans quelques consulats judicieusement choisis.

Je note dès lors, monsieur le rapporteur spécial, que, s'il s'agissait de missions même longues, de deux ou trois mois, il vaudrait mieux conserver ces crédits au budget de l'OFPRA. Si, a contrario, on souhaitait de vrais séjours, par exemple de deux ans, la procédure du détachement sur emploi du Quai d'Orsay est toujours ouverte et ne nécessite aucun transfert de crédits.

Par ailleurs, vous proposez d'affecter 500 000 euros à la rémunération au mérite des agents qui, en situation de crise, viendraient en aide à nos compatriotes en difficulté. Il s'agit, là encore, de transformer des crédits du titre 6 en crédits du titre 2.

Un tel effort a déjà été réalisé en 2006 au profit tant des agents de droit local en poste au Liban, à Chypre ou en Israël que des agents d'administration centrale mobilisés par la cellule de crise. Un effort similaire serait naturellement réalisé en 2007, si la nécessité s'en présentait, je tiens à vous l'assurer.

Pour terminer, monsieur le rapporteur spécial, j'ajoute que le transfert proposé vers le seul programme 151 aurait pour effet d'exclure du bénéfice de cette rémunération au mérite les agents affectés aux autres programmes.

En conséquence, pardonnez-moi, mais je me dois de vous faire part de l'opposition du Gouvernement à cet amendement, tout en vous confirmant mon intérêt pour une amélioration des relations entre l'OFPRA et le réseau diplomatique consulaire, sur les bases, d'ailleurs, que vous évoquez.

M. le président. La parole est à M. André Ferrand, pour explication de vote.

M. André Ferrand. Je m'interroge : le rapporteur spécial nous parle de contributions internationales, et le ministre évoque le financement d'opérations de maintien de la paix. Les deux notions sont-elles strictement identiques ? Se recouvrent-elles ?

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Le prélèvement de 1 million d'euros est effectué non pas sur les opérations de maintien de la paix, mais bien sur les contributions internationales, le texte de l'amendement est clair sur ce point.

En ce qui concerne l'OFPRA, j'ai bien entendu les réponses du ministre. Cependant, je crois réellement que des dispositions administratives peuvent être assez facilement prises pour permettre à des agents de l'OFPRA d'aller dans les consulats travailler avec les agents consulaires.

Je sais par ailleurs, car j'ai un peu suivi la manière dont les propositions que j'ai pu faire ont été reçues à l'OFPRA, que celle-ci n'a pas été mal accueillie du tout ; les responsables et les agents de l'OFPRA y ont même vu un grand intérêt.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le ministre, il s'agit d'un sujet sensible. Le problème de l'immigration irrégulière en France est mal vécu par nos concitoyens.

Le Gouvernement fait des déclarations. Sur le terrain, les préfets s'évertuent à organiser des reconduites à la frontière, mais les consulats, ici, à Paris, n'assument pas toujours leurs responsabilités en trouvant tous les prétextes pour ne pas rendre possible le départ du territoire.

C'est à se demander parfois s'il n'y a pas une sorte de schizophrénie d'État entre, d'un côté, le ministère de l'intérieur, qui organise aussi rigoureusement que possible le contrôle des frontières et qui, après un bref séjour dans des centres de rétention administrative, s'efforce d'organiser les reconduites à la frontière, et de l'autre, les consulats, qui ne sont pas mis à l'épreuve pour rendre possibles ces départs et délivrer les laissez-passer.

Dans le cas particulier de l'OFPRA, les procédures sont claires, respectueuses des droits de l'homme, mais les délais ne sont absolument pas tenus. M. Adrien Gouteyron en porte témoignage dans son rapport écrit.

L'objectif est satisfaisant, mais, en pratique, nous connaissons les pires difficultés.

Par conséquent, l'idée d'affecter momentanément un agent de l'OFPRA dans les cinq pays dont les citoyens sont les plus tentés de venir en France permettrait de tester une autre procédure. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. André Rouvière. Cela ne changera rien !

M. Jean-Pierre Plancade. Vous croyez qu'ils vont demander l'asile depuis leur pays ?

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Non, mais on appréhendera mieux les flux migratoires sur le terrain et les démarches entreprises pour essayer de contourner les procédures...

Mme Catherine Tasca. C'est le travail des ambassades !

M. Jean-Pierre Plancade. Je m'étonne qu'une personne de votre qualité puisse avancer de tels arguments, monsieur le président de la commission des finances !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. La proposition, qui résulte du rapport d'Adrien Gouteyron, est fondée sur un travail sur place et sur une concertation très étroite avec les responsables.

Par conséquent, nous pourrions faire preuve d'un peu de pragmatisme pour essayer d'avancer dans cette voie dont, manifestement, les grands objectifs sont séduisants, mais ne sont pas réalisables dans l'immédiat. Nos concitoyens attendent autre chose.

M. André Rouvière. Ce transfert de crédits ne changera rien à la situation !

M. le président. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Vous mélangez sans arrêt demande d'asile et immigration clandestine.

Il est évident que certains immigrants clandestins essaient d'obtenir l'asile. Mais comment allez-vous obtenir d'un pays souverain qu'il accepte que l'on installe, dans l'ambassade de France, un agent dont le rôle sera de voir si l'on respecte les droits de l'homme dans le pays ?

Tous les « guignols » qui sont autour de l'ambassade de France à Tunis et qui surveillent les entrées et les sorties vont regarder de près ce qui se passe, et votre agent de l'OFPRA ne restera pas longtemps !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Je voudrais, d'abord, souligner qu'il n'y a qu'une seule ligne budgétaire concernant les opérations de maintien de la paix et les contributions internationales.

Par ailleurs, monsieur le président de la commission des finances, le rôle de l'OFPRA n'est ni de surveiller les frontières ni de reconduire les déboutés du droit d'asile.

Je comprends très bien votre idée, mais c'est un point de vue technique que j'ai exprimé tout à l'heure, parce que je ne suis pas sûr qu'il s'agisse d'un bon signal.

M. Jean-Pierre Plancade. C'est incohérent !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Je veux d'abord préciser qu'il y a trois sous-actions au sein des contributions internationales et que nous ne prélevons pas ces crédits sur la sous-action « Opérations de maintien de la paix ».

Ensuite, en ce qui concerne l'OFPRA, permettez-moi de vous dire, mes chers collègues, que je suis allé dans ses locaux - mon rapport n'est pas livresque -, que j'y ai passé beaucoup de temps, que j'ai rencontré les agents et que j'ai beaucoup apprécié leur travail, je le leur ai dit.

J'ai assisté aux conversations dans les boxes, là où l'agent reçoit le demandeur d'asile...

Mme Hélène Luc. Ce n'est pas ce qui est en cause !

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. ..., et j'ai parlé, ensuite, avec les agents de l'OFPRA et leurs représentants, y compris leurs représentants syndicaux.

Que demandent-ils ? Que les relations avec les diplomates, entre les postes consulaires et eux-mêmes, soient meilleures et que les informations circulent. Tel est le sens du dispositif que nous proposons. (Murmures sur les travées du groupe socialiste.)

Chaque fois que l'on formule une proposition, cela vous paraît extravagant !

Il s'agit d'une expérimentation. Si cela ne marche pas, on verra, mais avouez tout de même qu'il n'est pas « mirobolant » de transférer cinq agents de l'OFPRA dans les postes les plus sensibles, là où l'échange d'informations peut se faire de la manière la plus utile.

Je ne comprends pas pourquoi cette proposition suscite tant de scepticisme. J'ai peut-être, sur beaucoup d'entre vous, l'avantage d'avoir vu travailler les agents de l'OFPRA. Je les ai entendus, je les ai écoutés longuement et je vous dis que c'est l'une de leurs demandes. Croyez-le ou non, mais quoi qu'il en soit, je maintiens ma proposition.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2 rectifié.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° II-4 rectifié est présenté par M. Gouteyron, au nom de la commission des finances.

L'amendement n° II-80 est présenté par M. Assouline.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

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(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

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+

-

+

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Action de la France en Europe et dans le monde

Dont Titre 2

 

 

 

 

Rayonnement culturel et scientifique

Dont Titre 2

2.040.000

 

 

2.040.000

 

 

Français à l'étranger et étrangers en France

Dont Titre 2

 

2.040.000

 

 

2.040.000

 

TOTAL

2.040.000

2.040.000

2.040.000

2.040.000

SOLDE

0

0

 

La parole est à M. le rapporteur spécial, pour défendre l'amendement n° II-4 rectifié.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Cet amendement nous ramène à ce qui s'est passé l'année dernière. En effet, au cours de débats identiques, notre collègue député Jérôme Chartier avait proposé le transfert de la gestion des bourses de l'AEFE du programme 185 au programme 151.

Je ne reviendrai pas sur ce point, mais un problème se pose : il convient de réajuster le montant du transfert en augmentant les crédits de l'action 5 « Service public d'enseignement à l'étranger » du programme 185 de 2,04 millions d'euros, pour rétablir la gestion des bourses des étudiants étrangers sur ce programme. En effet, elles aussi avaient été transférées, ce qui n'est évidemment pas cohérent.

M. le président. La parole est à M. Louis Duvernois, rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° II-80 rectifié.

M. Louis Duvernois, rapporteur pour avis. L'argumentaire de la commission des affaires culturelles est en tout point identique à celui de la commission des finances.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Je me rallie très volontiers à ces excellents amendements.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-4 rectifié et II-80 rectifié.

(Les amendements sont adoptés à l'unanimité.)

M. le président. L'amendement n° II-5, présenté par M. Gouteyron, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

  Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

Dont Titre 2

 

 

 

 

Rayonnement culturel et scientifique

Dont Titre 2

 

500.000

 

500.000

Français à l'étranger et étrangers en France

Dont Titre 2

500.000

 

500.000

 

TOTAL

500.000

500.000

500.000

500.000

SOLDE

0

0

 

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Cet amendement est attendu ; ce n'est pas une surprise, puisqu'il renvoie aux débats assez longs que nous avons eus voilà deux jours, alors que Michel Charasse était à la place que j'occupe aujourd'hui.

Je veux dire simplement à cette heure tardive, sans revenir sur les points qui ont été amplement développés alors, qu'il ne s'agit pas de critiquer injustement l'action de CulturesFrance. Ce n'est pas le problème.

CulturesFrance est le résultat de la fusion entre l'Association française d'action artistique, l'AFAA, et l'Association pour la diffusion de la pensée française, l'ADPF. Nous considérons que cette fusion est une bonne chose et nous espérons, monsieur le ministre, qu'elle s'appuiera bientôt sur un support juridique solide. Ce sera le travail du Parlement ; espérons que l'ordre du jour permettra de trouver un créneau pour y parvenir.

Je propose, comme cela a été fait avant-hier, que l'on réduise les crédits de 500 000 euros. Je ne veux pas revenir - je crois que c'est très clair dans l'esprit de tout le monde - sur la trésorerie de CulturesFrance, et l'on verra bien quelles seront les suites de ma proposition.

CulturesFrance peut, sans aucun dommage, supporter ce prélèvement et je suis persuadé que le signal que nous donnons sera à tous égards salutaire.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Monsieur le rapporteur spécial, il est très ennuyeux d'aborder ce sujet maintenant parce que, en définitive, en dehors du cadre que le Président de la République doit définir concernant la politique de la France dans le monde, il y a deux domaines dans lesquels mon ministère joue un rôle majeur : le premier, c'est la langue française et l'enseignement du français à l'étranger ; le second, c'est le rayonnement de la culture et des valeurs de la France.

La question est de savoir si l'on veut, oui ou non, que la France rayonne.

Vous nous dites que des améliorations doivent être apportées ; peut-être. Cela dit, nous sommes passés d'une association à un établissement public industriel et commercial, et au moment où l'on fait cet effort de sérieux, vous diminuez les crédits de 200 000 euros mardi et de 500 000 euros aujourd'hui, soit 700 000 euros !

Vous allez m'objecter que cela peut marcher avec 700 000 euros en moins. Probablement ; nous sommes tous des élus et nous savons très bien que l'on peut diminuer les budgets. Mais cela est particulièrement gênant pour nous, au moment où nous voulons consolider notre démarche.

Peut-être pourriez-vous faire un geste, monsieur le rapporteur spécial, en remplaçant ces 500 000 euros par 200 000 euros. Bien sûr, 200 000 euros ont déjà été supprimés mardi et, au total, cela ferait donc 400 000 euros qui seraient retirés !

Monsieur Ferrand, nous étions récemment à Tel-Aviv : toute la ville, soit 300 000 à 350 000 personnes, était rassemblée au bord de la plage, pour regarder ce que la France avait pu organiser. Et c'était l'oeuvre de l'AFAA !

On me dira qu'il s'agit de « babioles », qui ont lieu hors de France. C'est l'artiste qui s'amuse ! Je répondrai que ce sont des manifestations importantes.

Certes, nous devons pouvoir mieux faire, je suis d'accord avec vous, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur spécial ; j'ai très bien compris ce que vous vouliez me dire. Soyons donc plus sérieux dans la gestion et, dans ce domaine, il est vrai que beaucoup d'efforts restent à accomplir.

Avec, d'un côté, CampusFrance et, de l'autre, CulturesFrance, j'ai voulu un dispositif lourd et sérieux. L'adoption de cet amendement serait, selon moi, extrêmement pénalisante pour les opérations que nous voulons mener, à l'instar du British Council au Royaume-Uni, qui reste notre référence.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Monsieur le ministre, je ne cherche pas à remettre en cause l'action culturelle de la France à l'étranger, vous le savez bien. Et ce ne sont ni cette réduction de 500 000 euros ni les 200 000 euros dont la suppression a été votée voilà deux jours qui aboutiraient à ce résultat.

Mais je suis obligé, puisqu'on m'y conduit, de rappeler un certain nombre de réalités totalement indiscutables.

Tout d'abord, quelle est la situation de la trésorerie de CulturesFrance ? Elle a été présentée par cet organisme lui-même, que je ne mets pas en cause.

Aujourd'hui, CulturesFrance dispose de 10 millions d'euros de trésorerie. Or, nous sommes en fin d'année.

M. Robert Hue. C'est de la trésorerie ! Ce n'est pas le budget !

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Cette remarque est curieuse !

Une partie de cette trésorerie est mise en réserve, pour trois millions d'euros. Il s'agit, notamment, de la réserve légale.

Par ailleurs, des entrées de trésorerie sont prévues à hauteur de 650 000 euros ; une subvention du ministère des affaires étrangères de 1,25  million d'euros sera versée dans les prochains jours ; enfin, les dettes à acquitter par CulturesFrance pour payer ses fournisseurs et tous ceux qui ont des créances à son égard s'élèvent à 5,75 millions d'euros. Par conséquent, au 31 décembre 2006, il restera à CulturesFrance 3,4 millions d'euros, soit 47 jours de fonctionnement. Ce sont autant de crédits mis en report, monsieur le président de la commission des finances, ce qui est contraire à la LOLF et à la loi organique que nous avons unanimement adoptées.

Certes, vous pouvez ne pas le savoir, mes chers collègues, mais le rôle de la commission des finances est de vous rappeler ces dispositions : les reports ne doivent pas excéder, selon la LOLF, 3 % des crédits initiaux. Je tenais à le souligner, même si tout cela est un peu technique.

Par ailleurs, il a été reproché à CulturesFrance d'effectuer un certain nombre de dépenses importantes dans l'hexagone. Certes, je me rends à l'argument invoqué par mes interlocuteurs, selon lequel ces dépenses sont multiplicatrices, puisque le mécénat et des participations diverses y concourent. Encore faudrait-il que ces interventions n'excèdent pas certaines limites.

Pour illustrer mon propos, je ne peux mieux faire que de citer quelques phrases prononcées lors d'un conseil d'administration qui s'est tenu en 2003 : « La tendance amorcée en 2001 de réaliser moins de projets à l'étranger au profit d'opérations se déroulant en France transforme peu à peu la nature de l'association. L'AFAA est de moins en moins en mesure de répondre favorablement aux demandes de postes des artistes ou des partenaires pour la diffusion de la scène artistique à l'étranger, tendance qui ne devrait pas s'inverser en 2004, avec l'organisation des années France-Chine et de la saison de la Pologne. »

Ces propos, qui ne sont pas de moi, retracent une réalité qui mérite au moins une certaine réflexion.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Cet échange me semble tout à fait intéressant. La LOLF nous incite à adopter une pratique différente et à discuter autrement du budget. Jusqu'à maintenant, l'exercice budgétaire nous permettait, en première partie, de souhaiter un abaissement des impôts, et, en seconde partie, d'augmenter les dépenses. Nous tenions également des propos généraux sur les déficits et la dette abyssale.

Chacun comprend bien que nous ne pouvons pas continuer ainsi. Je rappelle que la LOLF est le produit d'une conjonction astrale qui a permis que la gauche et la droite, la majorité et l'opposition, conviennent de se doter d'un instrument de lucidité, pour tenter de faire prévaloir une logique de performance dans la gestion publique.

Partant de là, notre devoir est d'aller à la rencontre des opérateurs et de procéder à des contrôles sur place et sur pièces. Dans ce cas particulier, peut-être y a-t-il eu, dans un premier temps, entre CulturesFrance et la Cour des comptes, quelques incompréhensions. Peut-être l'exigence de sincérité de la communication a-t-elle été sous-estimée. Mais tout cela a pu être surmonté.

Nous comprenons bien votre ambition, monsieur le ministre, et nous y souscrivons, sans ambiguïté. Mais, dans toute la sphère publique, il existe des marges de progression. Les uns et les autres, nous devons emprunter le chemin tracé par la LOLF. Il ne suffit pas de dire que, parce que c'est public, cela fonctionne bien ! Il existe, en effet, des associations qui sont, en fait, des commanditaires de l'État, puisque ce dernier en nomme le président et les administrateurs. S'agit-il encore d'associations ? Je ne le crois pas ! Il arrive même que certaines d'entre elles ne tiennent pas d'assemblée générale. Et c'est pourtant l'État qui est derrière, puisqu'elles utilisent des fonds publics.

Prenons le temps d'y mettre bon ordre ! Peut-être faudra-t-il passer du statut d'association à celui d'EPIC, comme cela a été proposé ce soir par plusieurs d'entre nous. Une telle démarche est à l'oeuvre.

Notre initiative, aujourd'hui, est tout simplement un appel pour une amélioration de la gestion. M. Gouteyron a souligné suffisamment qu'elle ne met en aucune façon en péril la situation de trésorerie de cette association. Monsieur le ministre, vous feriez rêver nombre de patrons de PME en leur disant qu'ils peuvent avoir devant eux, comme cela, quelques millions d'euros !

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Et les collectivités !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Absolument !

Ce n'est pas parce que c'est l'État qui paye que plusieurs millions d'euros doivent nécessairement être mis en réserve, au motif que le trésorier estime préférable d'avoir de l'argent de côté ! Cet argent est ensuite placé dans une banque, ce qui permet d'en tirer des intérêts. Or, tel n'est pas le but ! Il s'agit, en effet, d'argent public et notre objectif, c'est la trésorerie zéro, seul indice d'une bonne gestion.

Dans ce cas particulier, après l'appel lancé par M. le ministre en faveur d'une diminution de la réduction de crédits prévue par cet amendement, je me tourne vers M. le rapporteur spécial. Peut-être, en effet, y aurait-il moyen de trouver une position intermédiaire.

Dans un an, la commission des finances organisera, dans un climat extrêmement serein, l'audition de M. le président Jacques Blot et de M. le directeur général Olivier Poivre d'Arvor. Nous constaterons avec eux les progrès accomplis. À cette occasion, naturellement, nous inviterons les rapporteurs pour avis des commissions des affaires culturelles et des affaires étrangères.

M. Serge Vinçon, président de la commission des affaires étrangères. Absolument !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Ce soir, nous pourrions peut-être répondre à l'appel de M. le ministre et fixer une somme intermédiaire.

M. le président. Alors, combien ? (Sourires.)

La parole est à M. le ministre.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre. Je souhaite tout d'abord remercier M. le président de la commission des finances d'avoir envisagé une proposition intermédiaire.

La trésorerie de CulturesFrance est également constituée de fonds propres et de réserves statutaires, immeubles et retraites. Sachez surtout, mesdames, messieurs les sénateurs, qu'elle résulte du mécénat, qui est tellement rare en France, ainsi que des aides des collectivités territoriales, qui contribuent au financement des différentes saisons. Il ne s'agit donc pas de l'argent de l'État. Le contrôleur financier estime que ce niveau de trésorerie est très convenable.

Je reviens sur les propos tenus en 2003, que M. Gouteyron vient de nous rapporter. Pourquoi, à un moment donné, les actions de CulturesFrance ont-elles eu lieu davantage en France qu'à l'étranger ? Cette situation résulte de l'organisation des saisons, qui se sont, durant un an ou deux, déroulées en France. Il y a eu l'année du Brésil en France et l'année de la France au Brésil : souvenez-vous, le président Lula était présent au moment de la grande saison du Brésil en France !

Au demeurant, le Président de la République et le Premier ministre ont organisé une réunion sur ce sujet, afin de limiter une telle tendance.

Mettons-nous d'accord ! Si 200 000 euros ont été supprimés mardi, peut-être pourrions-nous nous contenter de 100 000 euros ce soir...

M. Robert Hue. C'est le marché aux puces ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Il faut, au moins, que le prélèvement soit proportionné à l'importance des crédits sur lesquels il est effectué. Or les crédits dont nous traitons aujourd'hui sont nettement plus importants que ceux que nous évoquions voilà deux jours !

Je ne veux pas avoir l'air de mégotter ! Je propose 300 000 euros et je suis prêt à rectifier mon amendement en ce sens.

M. le président. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Je ne souhaite pas m'immiscer dans ce marchandage !

M. Jean-Pierre Plancade. Allumez la bougie pour les enchères, monsieur le président !

M. le président. La commission a proposé 300 000 euros.

M. le président. Non, il est proposé de transformer l'enveloppe de 500 000 prévue par l'amendement n° II-5 en une enveloppe de 300 000, compte tenu du fait que les sommes en jeu sont importantes.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Monsieur le président, le groupe socialiste ne votera pas cet amendement. Nous n'avons pas changé d'avis depuis mardi dernier. Nous estimons en effet que l'AFAA, d'une part, et l'ADPS, d'autre part, mènent des actions tout à fait utiles.

Au moment où l'on rationalise et où l'on fusionne, ce qui va engendrer des effets multiplicateurs, nous jugeons qu'il n'est pas souhaitable d'effectuer un tel prélèvement.

Par ailleurs, ce que nous avons fait pour l'Alliance française, à savoir la mise en place d'une fondation, nous devrions le faire pour l'AFAA.

M. le président. La parole est à M. André Ferrand, pour explication de vote.

M. André Ferrand. Je voterai l'amendement qui vient de nous être proposé. Mais si M. le rapporteur spécial proposait 200 000 euros plutôt que 300 000 euros, je le voterais plus volontiers encore !

Je présenterai deux ou trois réflexions, qui devraient permettre à M. Gouteyron de prendre le temps de la réflexion et, peut-être, de faire un pas supplémentaire.

En effet, j'ai assisté, sans y participer, au débat sur la mission « Aide publique au développement », qui s'est révélé d'un grand intérêt. J'étais d'accord avec les positions défendues par la commission des finances, en particulier par son président et son rapporteur spécial, M. Charasse.

Je pensais que l'organisation concernée devait recevoir un message destiné à lui signaler des problèmes d'organisation et de programmation.

Je retiens le témoignage de M. Legendre, car il m'est arrivé, à moi aussi, de me demander si ce que nous exportions dans certains pays plaisait autant qu'à Paris. Je regrette également que Kirikou n'ait pas la même carrière internationale que Harry Potter, par exemple - pourquoi pas ? -, car c'est aussi la mission de cette agence que de promouvoir et de vendre notre production artistique. On l'a, me semble-t-il, un peu oublié.

Un message me paraissait nécessaire ; il a été passé. J'aurais préféré qu'un pas supplémentaire soit fait. Je voterai néanmoins l'amendement, mais j'aurais été beaucoup plus heureux si la réduction avait été de 200 000 euros.

M. le président. Monsieur le rapporteur spécial, on en reste à 300 000 euros ?

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Oui, monsieur le président.

M. Jean-Pierre Plancade. Adjugé ? Un petit coup de marteau, monsieur le président ! (Sourires.)

M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° II-5 rectifié, présenté par M. Gouteyron, au nom de la commission des finances, et ainsi libellé :

  Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

Dont Titre 2

 

 

 

 

Rayonnement culturel et scientifique

Dont Titre 2

 

300.000

 

300.000

Français à l'étranger et étrangers en France

Dont Titre 2

300.000

 

300.000

 

TOTAL

300.000

300.000

300.000

300.000

SOLDE

0

0

Je le mets aux voix.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° II-6, présenté par M. Gouteyron, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros) 

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

Dont Titre 2

3.000.000

 

3.000.000

 

Rayonnement culturel et scientifique

Dont Titre 2

 

 

 

 

Français à l'étranger et étrangers en France

Dont Titre 2

 

3.000.000

 

3.000.000

TOTAL

3.000.000

3.000.000

3.000.000

3.000.000

SOLDE

0

0

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial.  Cet amendement résulte d'un travail de contrôle qui a mis en évidence l'éclatement préoccupant de la gestion des crédits à l'étranger ; c'est, je crois, une constatation qui est faite par tous ceux qui se rendent dans nos ambassades et dans les postes diplomatiques. Le Comité interministériel des moyens de l'État à l'étranger, le CIMEE, a d'ailleurs répondu à ce problème par le développement des services administratifs et financiers uniques, les SAFU.

La démarche est excellente, à condition que ces SAFU aient de vraies responsabilités de gestion à l'échelon interministériel.

Dans votre ministère, monsieur le ministre, vous avez regroupé un certain nombre de crédits de fonctionnement au sein de l'action « Soutien » du programme 105, afin que les achats, de voitures par exemple, et la gestion des emplois de soutien, tels que le personnel d'entretien, de gardiennage - que sais-je encore ? -, soient effectués dans les postes à l'étranger de manière rationnelle.

Je suggère d'aller plus loin, en regroupant de manière expérimentale certains emplois de chauffeurs des consulats et des ambassades pour les gérer de manière consolidée. À cette fin, je propose une première enveloppe de 3 millions d'euros pour mener l'expérimentation dans les postes les moins concernés par le passage au visa biométrique.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Philippe Douste-Blazy, ministre. De l'amendement que vous me proposez, monsieur le rapporteur spécial, je retiens principalement l'importance que vous accordez au développement de l'outil de rationalisation de notre gestion à l'étranger que sont les SAFU. Vous avez raison et, encore une fois, je salue le dialogue nourri que vous entretenez avec le ministère.

Toutefois, permettez-moi de présenter deux observations.

D'abord, il faut savoir que les SAFU gèrent déjà tous les personnels, quel que soit le programme d'imputation de leur salaire. Votre amendement ne modifierait donc rien à la pratique pour les chauffeurs où les gardiens qui dépendent du programme 151.

Par ailleurs, j'ai bien compris le caractère forfaitaire du calibrage de votre amendement. J'appelle toutefois votre attention sur les objectifs nouveaux que le Gouvernement vient d'assigner à ce ministère en matière de contrôle de l'immigration, notamment avec l'extension, en 2007, des visas biométriques.

Dès lors, vous comprendrez que toute la masse salariale disponible sur le programme doit pouvoir être mobilisée. Ainsi, sans minorer l'utilité des emplois de soutien, j'ai besoin de donner la priorité à la biométrie.

C'est pourquoi, monsieur le rapporteur spécial, je vous serais reconnaissant de bien vouloir envisager de retirer votre amendement, sachant que je demeure ouvert à toutes vos propositions relatives aux SAFU, notamment la création rapide d'un tel service à Beyrouth, sur laquelle vous avez attiré mon attention.

M. le président. Monsieur le rapporteur spécial, l'amendement n° 6 est-il maintenu ?

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Monsieur le président, je retiens des propos du ministre son intention, qui est claire, de constituer les SAFU et de leur donner effectivement le rôle qu'ils doivent avoir.

Monsieur le ministre, je crains que la description que vous venez de faire ne corresponde pas à la réalité partout ; je ne manquerai pas de vous le dire lorsque je me rendrai dans un poste diplomatique.

Avec cet amendement, je voulais donner une impulsion nouvelle. Je souhaite, monsieur le ministre, qu'il soit bien entendu que cet objectif est aussi le vôtre. Cela dit, je retire l'amendement, monsieur le président. (M. Serge Vinçon, président de la commission des affaires étrangères, applaudit.)

M. le président. L'amendement n° 6 est retiré.

La parole est à M. le président de la commission des affaires étrangères.

M. Serge Vinçon, président de la commission des affaires étrangères. Monsieur le président, je voudrais m'adresser au président de la commission des finances.

Je retiens bien volontiers la proposition qu'il nous a faite tout à l'heure de participer, avec les rapporteurs pour avis, au contrôle sur place et sur pièces, en compagnie des rapporteurs spéciaux. Nous apprécions cette proposition et nous y répondons favorablement.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, au-delà des chiffres dont nous avons discuté ce soir, que la commission des affaires étrangères approuve et sur lesquels nous allons nous prononcer dans un instant, il y a, bien entendu, l'action de la France sur la scène internationale et son rayonnement. C'est l'occasion pour moi de le dire, l'action de notre pays est pertinente, son analyse est lucide et son engagement dans les multiples crises que connaissent aujourd'hui l'ensemble des continents est majeur et apprécié.

Monsieur le ministre, je veux rendre hommage à l'action que vous menez au service de la diplomatie française, au service des valeurs que nous exprimons dans chacune de nos prises de position internationale. Je veux aussi rendre hommage à tous les diplomates et à toutes les personnes qui, à l'image de ce qui s'est passé cet été au Liban, nous ont permis d'être à la première place en termes diplomatique et militaire, mais aussi sur le plan humanitaire et, donc, de l'humanité.

Je vous le dis au nom de la commission des affaires étrangères, où que nous allions dans le monde, nous entendons l'hommage qui est rendu à la voix de la France, voix si pertinente à chaque crise, et Dieu sait si elles sont nombreuses aujourd'hui ! Je vous remercie, monsieur le ministre ; c'est aussi l'occasion de saluer l'action du Gouvernement et celle du Président de la République. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.

Je mets aux voix les crédits de la mission « Action extérieure de l'État », modifiés.

(Ces crédits sont adoptés.)

M. le président. Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Action extérieure de l'État ».

Article 34 et état B (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Discussion générale

3

TEXTES SOUMIS AU SÉNAT EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION

M. le président. M. le président a reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :

- Proposition de décision du Conseil relative à la conclusion d'un accord entre la Communauté européenne et le Canada. Proposition de règlement du Conseil concernant la mise en oeuvre de l'accord conclu par la CE à l'issue des négociations menées dans le cadre du paragraphe 6 de l'article XXIV du GATT de 1994, modifiant et complétant l'annexe I du règlement (CEE) n° 2658/87 relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun.

Ce texte sera imprimé sous le n° E-3349 et distribué.

M. le président a reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :

- Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CEE) n° 3030/93 relatif au régime commun applicable aux importations de certains produits textiles originaires des pays tiers.

Ce texte sera imprimé sous le n° E-3350 et distribué.

4

ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd'hui, vendredi 8 décembre 2006, à neuf heures trente, quinze heures et le soir :

Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2007, adopté par l'Assemblée nationale (nos 77 et 78, 2006-2007) (M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation).

Seconde partie. - Moyens des politiques publiques et dispositions spéciales :

- Santé :

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial (rapport n° 78, annexe n° 25) ;

M. Alain Milon, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n° 82, tome IV).

- Solidarité et intégration (+ articles 53 à 56) :

M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial (rapport n° 78, annexe n° 29) ;

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n° 82, tome VI).

- Médias,

- Compte de concours financiers : avances à l'audiovisuel public (+ articles 63, 64 et 65) :

M. Claude Belot, rapporteur spécial (rapport n° 78, annexe n° 16) ;

M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles (avis n° 79, tomes VI et X).

- Culture,

- Compte d'affectation spéciale : cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale :

M. Yann Gaillard, rapporteur spécial (rapport n° 78, annexe n° 7) ;

M. Philippe Nachbar, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles (avis n° 79, tome III) ;

M. Serge Lagauche, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles (avis n° 79, tomes III et IX) ;

M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles

(cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale - avis n° 79, tome IX).

- Sport, jeunesse et vie associative :

M. Michel Sergent, rapporteur spécial (rapport n°78, annexe n° 30) ;

M. Bernard Murat, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles (avis n° 79, tome VIII) ;

M. Pierre Martin, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles (avis n° 79, tome VIII).

Délai limite pour le dépôt des amendements aux articles de la seconde partie, non joints à l'examen des crédits des missions du projet de loi de finances pour 2007

Le délai limite pour le dépôt des amendements aux articles de la seconde partie, non joints à l'examen des crédits des missions du projet de loi de finances pour 2007 est fixé au vendredi 8 décembre, à seize heures.

Délai limite pour les inscriptions de parole et pour le dépôt des amendements

Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, préalable au Conseil européen des 14 et 15 décembre 2006 ;

Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : lundi 11 décembre 2006, à dix-sept heures.

Débat sur les énergies renouvelables, la transition énergétique et le Plan Climat : rapport d'information de MM. Claude Belot et Jean-Marc Juilhard fait au nom de la Délégation du Sénat pour l'aménagement du territoire (n° 436, 2005-2006) et question orale avec débat n° 19 de M. Pierre Laffitte sur la transition climatique et le plan climat ;

Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : mardi 12 décembre 2006, à dix-sept heures.

Question orale avec débat n° 23 de M. Nicolas About sur l'état d'application de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées ;

Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : mardi 12 décembre 2006, à dix-sept heures.

Projet de loi tendant à promouvoir l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives (n° 93, 2006-2007) ;

Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 13 décembre 2006, à dix-sept heures ;

Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 12 décembre 2006, à dix-sept heures.

Personne ne demande la parole ?...

La séance est levée.

(La séance est levée le vendredi 8 décembre 2006, à une heure quarante.)

La Directrice

du service du compte rendu intégral,

MONIQUE MUYARD