PRÉSIDENCE DE M. Christian Poncelet

M. le président. La séance est reprise.

Article 5 quater (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile
Rappel au règlement (début)

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Questions d'actualité au Gouvernement

M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions d'actualité au Gouvernement.

Je rappelle que l'auteur de la question de même que la ou le ministre pour sa réponse disposent chacun de deux minutes trente.

politique de l'immigration

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC. - M. Bernard Frimat applaudit également.)

Mme Éliane Assassi. Ma question s'adresse à l'ensemble du Gouvernement, car c'est l'image de la France dans le monde, le respect des principes fondamentaux de notre République qui sont en cause.

M. Jacques Valade. La question !

Mme Éliane Assassi. Le Président de la République a convoqué le Parlement en session extraordinaire pour envoyer un signe à son électorat le plus droitier en stigmatisant une nouvelle fois l'immigré.

À cet égard, le projet de loi présenté par M. Hortefeux tombe à pic pour masquer la casse du pacte social annoncée par le candidat Sarkozy et mise en oeuvre aujourd'hui par le Gouvernement, soutenu par sa majorité parlementaire.

Toutes les dispositions de ce texte sont insupportables, mais l'introduction de la génétique dans le débat relatif à l'immigration constitue un tournant dans l'approche française des droits de la personne. Elle heurte profondément les pays de migrations, notamment ceux qui, durant des années, ont subi la domination coloniale ; elle heurte une part croissante de l'opinion : citoyens, salariés, artistes, philosophes, religieux, mais aussi femmes et hommes politiques de tous bords. Ensemble, ils s'alarment d'une disposition qui porte atteinte frontalement aux droits de l'homme. L'introduction de la génétique dans le débat heurte, au sein même de la majorité, d'éminentes personnalités, dont un ancien ministre de l'intérieur qui déclarait, voilà quarante-huit heures : « Le choix des tests ADN n'est pas acceptable, cela rappelle des mauvais souvenirs à nous gaullistes, on sait l'usage qu'ont fait les nazis de la génétique ». (Protestations sur les travées de l'UMP.)

La commission des lois du Sénat a, à deux reprises, rejeté toute référence à l'ADN dans ce projet de loi, mais M. le ministre a repris sa plume et a proposé une version qui maintient cette rupture honteuse : c'est non plus le lien social qui, en dernier ressort, détermine la filiation, mais le patrimoine génétique.

On nous dit que cela existe déjà en droit français, mais soyons sérieux ! Il s'agit là de tests pratiqués à l'étranger. C'est une affaire de droit international, pas de droit interne.

Mes chers collègues, j'invite solennellement les cent trente-huit sénateurs qui ont voté contre l'introduction de la génétique dans le droit de l'immigration à saisir le Conseil constitutionnel.

Toutefois, cela peut être évité. Je demande donc au Gouvernement de tenir compte de l'émotion que cette mesure suscite en France comme dans le reste du monde.

Je vous pose donc la question suivante, monsieur le ministre (Exclamations sur les travées de l'UMP.) : ...

M. Jacques Valade. Ah, enfin !

Mme Éliane Assassi. ... après la réunion de la commission mixte paritaire, irez-vous jusqu'à déposer un amendement de suppression du futur article 5 bis du projet de loi, dont vous êtes le véritable initiateur ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement. Madame la sénatrice, l'examen de ce projet de loi par la Haute Assemblée n'est pas encore terminé : il se poursuivra tardivement dans la nuit. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s'exclame.)

Je tiens d'ores et déjà à saluer la très grande qualité des échanges qui ont eu lieu depuis mardi après-midi.

M. Alain Gournac. Très bien !

M. Brice Hortefeux, ministre. Je vous rappelle que deux cent dix amendements ont été déposés.

M. Brice Hortefeux, ministre. Par ailleurs, j'espère que vous me rendrez grâce au moins sur un point : j'ai écouté avec attention chacun des intervenants et je tiens à vous rendre hommage d'avoir vous-même été très présente durant les débats et extrêmement active, même si vos interventions ont surtout, hélas ! souligné vos divergences avec le Gouvernement et la majorité.

M. Brice Hortefeux, ministre. Enfin, je note que vingt et un amendements et sous-amendements ont jusqu'à présent été adoptés, dont un amendement et quatre sous-amendements émanant du groupe socialiste...

Plusieurs sénateurs de l'UMP. C'est trop !

M. Robert Bret. Mais nous n'avons pas été entendus !

M. Brice Hortefeux, ministre. ... et votés à l'unanimité. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

Madame Assassi, je vous le dis très fermement : je ne laisserai pas caricaturer ce texte !

M. Jacques Mahéas. Il est pourtant caricatural !

M. Brice Hortefeux, ministre. C'est un texte qui est à la fois clair et protecteur.

Pourquoi est-il clair ? Parce qu'il a pour objet de rééquilibrer immigration familiale et immigration économique : 92 500 titres de séjour ayant été délivrés au titre du regroupement familial et 11 000 seulement au titre de l'immigration économique, soit simplement 7 %, il est nécessaire que, progressivement, calmement, nous parvenions à un rééquilibrage.

Ce texte est également protecteur, grâce, notamment, à l'instauration d'un test de langue suivi d'une formation.

M. Christian Cambon. Très bien !

M. Brice Hortefeux, ministre. Je le réaffirme : quel meilleur vecteur d'intégration dans notre communauté nationale que la langue ? Comment trouver un travail, faire ses courses, comprendre et suivre la scolarité de ses enfants, discuter avec ses voisins si l'on ne possède pas quelques notions de français ?

L'objectif du Gouvernement est clair, madame la sénatrice : il est de lutter contre toutes les formes de communautarisme. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s'exclame.)

Enfin, vous avez évoqué l'article concernant les tests de filiation. La réalité est simple :...

M. le président. Veuillez terminer, monsieur le ministre !

M. Brice Hortefeux, ministre. ...ils sont utilisés dans douze pays d'Europe, qui, pour la plupart, sont socialistes, socio-démocrates, travaillistes. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Brice Hortefeux, ministre. La loi sera bien encadrée. Je me réjouis que le texte adopté par le Sénat présente toutes les garanties, grâce à l'initiative du président de la commission des lois, M. Jean-Jacques Hyest.

Je rappelle ces garanties : le volontariat, c'est-à-dire qu'il n'y a pas d'obligation, l'expérimentation, qui signifie que cette mesure n'est pas définitive,...

M. Alain Gournac. Très bien !

M. Brice Hortefeux, ministre. ... l'autorisation par le juge civil, la gratuité, à laquelle -  et je ne comprends pas pourquoi - l'opposition n'a pas souscrit, ...

M. Jacques Mahéas. Nous nous sommes abstenus !

M. Brice Hortefeux, ministre. ... la preuve de la filiation par la mère et l'absence de fichage génétique.

Cela signifie très simplement, madame Assassi, que, pour nous, il faut, pour réussir l'intégration, commencer par maîtriser l'immigration. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées de l'UC-UDF.)

suppression du samedi matin à l'école primaire

M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau.

M. Gérard Delfau. Monsieur le ministre de l'éducation nationale, vous avez annoncé unilatéralement, en septembre, la suppression des cours à l'école primaire le samedi matin. Vous avez indiqué dans la foulée que vous « réfléchissiez » à la même mesure pour le collège.

M. Bruno Sido. Oh ! la la !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Travailler moins pour apprendre plus à l'école !

M. Gérard Delfau. Cette mesure, dont les conséquences seront importantes sur la vie quotidienne des Français, divise l'opinion, inquiète les parents d'élèves et les enseignants, place une nouvelle fois les communes dans l'obligation de se substituer au désengagement de l'État.

M. Gérard Delfau. D'où mes questions : pourquoi avoir pris si brutalement et sans concertation une telle décision ? N'y aurait-il pas une raison cachée, d'ordre financier ?

Pourquoi ne pas avoir saisi cette occasion pour repenser l'organisation des rythmes scolaires, qui surchargent la journée de travail de nos enfants ?

Pourquoi ces explications contradictoires de vos services : tout d'abord, transfert des cours du samedi matin au mercredi, puis vague engagement de consacrer ce volume d'heures d'enseignement à l'aide aux élèves en difficulté ? N'y a-t-il pas le risque d'un affaiblissement généralisé du niveau des élèves, comme le craint le collectif « Sauver les lettres » ?

Comment pallier l'inégalité de traitement entre les enfants suivant que leurs parents habitent dans une commune rurale, dans une ville moyenne, pauvre, sans ressources, ou dans une riche agglomération qui propose gratuitement des activités de loisirs et de culture à ses résidents ?

Enfin, je poserai une dernière question en présence de M. le Premier ministre : combien de milliers de postes d'enseignant pensez-vous pouvoir économiser dans les prochains budgets de l'éducation nationale grâce à cette suppression de trois heures de cours le samedi matin à l'école primaire, à l'école maternelle et au collège ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale. Monsieur le sénateur, je puis vous rassurer quant à la plupart des questions que vous avez posées.

Vous me dites que cette mesure a été prise sans concertation, qu'elle inquiète les familles, qu'elle crée de la confusion. Selon moi, c'est tout le contraire ! Telle école ne travaille jamais le samedi matin, telle autre travaille tous les samedis, une autre encore travaille un samedi matin sur deux, certains établissements pratiquent la « semaine de quatre jours », qui impose aux enfants de reprendre les cours dès la fin du mois d'août et de les poursuivre jusqu'au début du mois de juillet. Plus personne ne s'y retrouve !

M. René-Pierre Signé. Mais c'est cela, la concertation !

M. Xavier Darcos, ministre. Il est inexact de dire que les familles sont hostiles à la suppression des cours le samedi matin, puisque deux sondages successifs...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ah, les sondages !

M. Xavier Darcos, ministre. ... ont montré que 82 % des parents y étaient favorables. (Vifs applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées de l'UC-UDF.)

Par ailleurs, vous prétendez que le fait de libérer le samedi matin va entraîner des exigences en termes d'ouverture d'école.

C'est possible, mais ce n'est pas certain, car, aujourd'hui, dans la plupart des écoles fermées le samedi matin, les familles n'ont pas demandé que l'école soit ouverte ce jour-là, tout simplement parce que le week-end est le temps de la famille.

Par ailleurs, s'agissant du mercredi matin, je n'ai pas dit, contrairement à ce que certains affirment, qu'il fallait à tout prix mettre en place la semaine de quatre jours. Si certaines communes souhaitent organiser les cours sur quatre jours et demi et faire travailler les enfants le mercredi matin, je n'y vois absolument aucun inconvénient.

Il n'y a pas non plus d'inquiétude à avoir concernant l'accompagnement éducatif, puisque, dès la rentrée 2009, des études surveillées seront organisées dans toutes les écoles communales, comme l'a souhaité M. le Premier ministre.

M. Jacques Mahéas. Payées par qui ?

M. Xavier Darcos, ministre. Il me semble donc, monsieur le sénateur, que vos préventions ne sont pas fondées et que cette décision est de nature à satisfaire les familles.

Quant aux 15 % d'élèves en difficulté, il ne sert à rien de s'apitoyer sur leur sort et de ne rien faire ! Je propose que les deux heures qui ont été dégagées pour les professeurs soient consacrées par ces derniers à s'occuper plus spécifiquement de ces élèves en grande difficulté. C'est une mesure de justice sociale que vous, monsieur le sénateur, qui êtes un universitaire, vous devriez approuver.

Enfin, où voulez-vous que j'économise des emplois, puisque les professeurs des écoles continueront à assurer vingt-sept heures de cours hebdomadaires ? Une partie de ces heures sera désormais consacrée aux élèves en grande difficulté. Cette mesure ne cache aucune logique budgétaire ; elle est purement pédagogique et est approuvée par toute la nation. (Très bien ! et vifs applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées de l'UC-UDF. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

suppression du samedi matin à l'école

M. le président. La parole est à M. Pierre Martin.

M. Pierre Martin. Monsieur le ministre de l'éducation nationale, ma question porte également sur la suppression des cours le samedi matin, sujet ô combien d'actualité.

Vous avez annoncé une telle suppression à l'école primaire, afin, d'une part, d'éviter aux élèves une charge de travail trop lourde à supporter et, d'autre part, de permettre aux parents et aux enfants de passer plus de temps en famille. Cette mesure ne peut donc que nous réjouir. (M. Jackie Pierre applaudit.)

Toutefois, nous aimerions avoir des précisions sur plusieurs points.

Tout d'abord, avec cette décision, ne s'oriente-t-on pas vers la généralisation de la semaine de quatre jours, comme cela semble être le cas ?

M. Roland Courteau. Il n'a pas écouté...

M. Pierre Martin. Ensuite, vous venez d'indiquer que la durée de travail hebdomadaire des enseignants serait maintenue à vingt-sept heures. Mais puisque le samedi est supprimé, ceux-ci auront-ils l'obligation d'assurer, un autre jour de la semaine, l'accompagnement éducatif que vous avez évoqué ? J'avais pourtant cru comprendre que cet accompagnement se ferait sur la base du volontariat.

Par ailleurs, l'accompagnement scolaire sera introduit dans les collèges situés en zone d'éducation prioritaire juste après les prochaines vacances de la Toussaint, puis sera étendu à tous les collèges à la rentrée 2008.

Dans le cadre de l'école ouverte, cet accompagnement scolaire sera-t-il mis en place également dans le primaire ? Si oui, quels jours de la semaine et sous la conduite de quels intervenants ? Je pense en particulier à la situation des enseignants qui pourraient être volontaires.

Monsieur le ministre, afin que le temps ainsi libéré profite véritablement à toute la famille, il serait judicieux de supprimer également les cours du samedi matin dans les collèges. Si rien n'a été annoncé pour l'instant, vous orientez-vous vers cette solution ? Cela aurait d'autant plus de mérite que l'organisation du ramassage scolaire, qui est de la compétence non pas de l'État mais des départements, en serait grandement simplifiée. Je vous laisse imaginer l'impact d'une telle décision sur le plan financier.

Enfin, la suppression de l'école le samedi matin amputera l'emploi du temps des écoliers d'une centaine d'heures de cours par an. Jusqu'à maintenant, on a beaucoup de peine à finir les programmes : leur modification est-elle donc envisagée ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale. Monsieur Martin, vous parlez en expert, étant vous-même un ancien directeur d'école. Je vais donc reprendre, point par point, les différentes questions que vous m'avez posées.

Premièrement, j'ai déjà répondu en partie, en m'adressant à M. Delfau, sur l'organisation de la semaine elle-même. Je le répète, le Gouvernement n'a aucunement l'intention de faire pression pour rendre obligatoire la semaine de quatre jours sur tout le territoire. C'est au niveau des communes, en fonction des usages de chacun et en concertation avec la communauté éducative et les familles, que le dispositif pourra être organisé de la manière la plus souple possible dans les écoles.

Deuxièmement, je vous le confirme, le Président de la République a effectivement souhaité que les collégiens puissent bénéficier, à raison de quatre jours par semaine, de deux heures d'accompagnement éducatif en fin de journée. Nous le savons tous, si l'école joue évidemment un rôle déterminant dans la réussite scolaire, cette dernière dépend aussi de la famille, du milieu social et du temps que les parents peuvent consacrer à leurs enfants.

En prévoyant des études surveillées pour tous, nous organisons un dispositif de nature à éviter les disparités et les iniquités constatées. Celui-ci sera mis en place dès cette année dans tous les collèges situés en zone d'éducation prioritaire, puis, à la rentrée 2008, dans tous les collèges et, enfin, à la rentrée 2009, dans toutes les écoles primaires.

Voilà pourquoi M. le Premier ministre a rendu un arbitrage très important, qui permet aux professeurs du premier degré, même lorsqu'ils sont rémunérés par des communes pour des activités complémentaires, de bénéficier du dispositif de défiscalisation et d'exonération totale de charges sociales sur les heures supplémentaires effectuées. Cette annonce était très attendue par les professionnels concernés.

Troisièmement, l'organisation des transports scolaires est effectivement une question difficile. Vous l'avez rappelé, les départements sont compétents en la matière. Nous avons donc ouvert un débat avec leurs représentants, et nous sommes en train d'avancer sur ce sujet. À mon sens, il est tout à fait légitime d'envisager l'uniformisation des horaires scolaires, de sorte que tout le monde sorte au même moment et qu'il n'y ait qu'une seule « tournée ». (Applaudissements sur certaines travées de l'UMP.)

M. Xavier Darcos, ministre. Enfin, quatrièmement, si les heures de cours diminueront effectivement, n'oublions tout de même pas que les élèves du premier degré suivent actuellement, en France, 936 heures de cours, quand la moyenne européenne est inférieure à 800 heures. Il convient donc de recentrer les programmes sur des objectifs nets, clairs et précis, car les petits Français ne sont évidemment pas plus bêtes que leurs camarades européens

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ces derniers sont beaucoup mieux encadrés !

M. Xavier Darcos, ministre. Avec 800 heures, et des programmes mieux recentrés, l'année scolaire sera pleinement utile pour tous ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées de l'UC-UDF.)

temps de parole du chef de l'état dans les médias

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Les syndicats de journalistes se mobilisent, aujourd'hui même, pour défendre l'indépendance des rédactions, menacées, à leurs yeux, par la « mainmise » du pouvoir sur les grands médias. (Exclamations et rires sur les travées de l'UMP.)

Ils ont ainsi déclaré : « Rarement l'indépendance des journalistes n'avait été autant bafouée. Rarement l'un des droits fondamentaux du citoyen, à savoir l'accès à une information honnête, complète et indépendante des pressions politiques [...] n'avait été autant menacé ». Pour les syndicats, cette situation, « inédite en France », est le symbole de la « dérive actuelle » où « une majorité des organes de presse sont détenus par des industriels, qui ont des liens très étroits avec le pouvoir ».

M. Jacques Valade. Vous parlez de Libération ?

M. Roland Courteau. Dans ce contexte, les syndicats demandent, à juste raison, la mise en oeuvre de mesures garantissant non seulement l'indépendance juridique des rédactions, mais aussi le respect de l'éthique professionnelle. Il s'agit là d'une question de démocratie.

Mais il est une autre question, et non des moindres : c'est le déséquilibre qui règne dans l'expression des grands courants politiques, à la suite des interventions répétées du Président de la République dans les médias.

M. Robert Bret. Que fait le CSA ?

M. Alain Gournac. C'est le Président de tous les Français !

M. Roland Courteau. D'autres ont même évoqué l'« accaparement » des médias. Nous considérons donc que le temps d'exposition médiatique du Président de la République doit désormais être décompté par le CSA, au même titre que celui du Gouvernement.

En effet, force est de constater que l'évolution institutionnelle, voulue et revendiquée par le Président lui-même, rend sans objet la règle dite « des trois tiers », destinée à assurer l'équilibre des temps de parole.

M. Roland Courteau. Je le rappelle, cette règle réserve un tiers au Gouvernement, un tiers à la majorité et un tiers à l'opposition.

Aujourd'hui, le Président « conduit la politique de la nation », qu'il commente d'ailleurs plus qu'abondamment. Aujourd'hui, c'est le Président « qui gouverne », selon les propres termes de M. Sarkozy lui-même. Aujourd'hui, le Président est omniprésent dans les médias.

M. René-Pierre Signé. Et omnipotent !

M. Roland Courteau. Dès lors, nous semble-t-il, la règle sur laquelle s'appuie le CSA, autorité certes indépendante, doit être reconsidérée, et ce pour imposer un minimum d'équité.

M. Ladislas Poniatowski. Il faut un quatrième tiers ! (Sourires.)

M. Roland Courteau. Il s'agit, là encore, d'une question de démocratie.

Par conséquent, nous souhaiterions connaître le sentiment de M. le Premier ministre sur ces deux questions essentielles au regard de la démocratie. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

M. René-Pierre Signé. Monsieur le président, la question s'adresse au Premier ministre !

Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication. Monsieur Courteau, il vous suffit d'analyser les différents médias et de lire tous les jours la presse pour être pleinement rassuré sur le degré d'indépendance des journalistes ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et sur plusieurs travées de l'UC-UDF. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Yannick Bodin. Paris-Match, par exemple ?

M. Didier Boulaud. Ou La Pravda ?

Mme Christine Albanel, ministre. Il n'est donc point besoin, à mon sens, de légiférer en la matière.

S'agissant du temps de parole du chef de l'Etat, vous avez souligné, évidemment pour le déplorer, qu'il n'était pas pris en compte par le Conseil supérieur de l'audiovisuel, lequel a en effet considéré que le Président de la République ne pouvait être assimilé à l'une ou l'autre des catégories dont les interventions donnent lieu à des temps d'antenne (Ah ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.), qu'il s'agisse du Gouvernement, de la majorité présidentielle, de l'opposition ou d'autres formations. (Marques d'approbation sur les travées de l'UMP.)

M. Yannick Bodin. Quelle nouvelle !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. La donne va sûrement changer avec la révision constitutionnelle !

Mme Christine Albanel, ministre. Ce faisant, le CSA ne fait qu'appliquer une jurisprudence du Conseil d'État. Se référant à nos institutions, ce dernier a ainsi estimé : « Considérant qu'en raison de la place qui, conformément à la tradition républicaine, est celle du chef de l'État dans l'organisation constitutionnelle des pouvoirs publics, le Président de la République ne s'exprime pas au nom d'un parti ou d'un groupement politique ». (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Jean-Pierre Sueur. C'est extraordinaire !

M. Yannick Bodin. Rappelez-vous ce qui s'est passé hier soir !

Mme Christine Albanel, ministre. À l'évidence, en l'état actuel, le CSA est tenu de se conformer à cette jurisprudence et ne peut la modifier sans manquer à celle-ci.

Enfin, je le rappelle, le Conseil supérieur de l'audiovisuel est une instance indépendante, et il n'appartient pas au Gouvernement d'interférer dans ses réglementations. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et sur plusieurs travées de l'UC-UDF.)

M. Roland Courteau. Ce n'est pas une réponse, monsieur le président !

suppression du samedi matin à l'école primaire

M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Mme Catherine Morin-Desailly. Monsieur le ministre, je souhaite, comme deux collègues qui m'ont précédée, vous interroger sur la suppression des cours le samedi matin. Puisque vous avez déjà répondu sur ce sujet, sinon en totalité, du moins en partie, j'orienterai ma question de façon différente. Pour ma part, je suis plutôt favorable à une telle suppression,...

Mme Catherine Morin-Desailly. ... comme une grande partie des enseignants et des parents.

Par cette mesure, vous entendez mettre fin à une situation confuse, due à l'application de la semaine de quatre jours dans de nombreuses communes. Actuellement, en effet, une école primaire sur quatre est fermée le samedi. Pour autant, la mise en oeuvre de cette disposition n'est pas sans poser question.

Harmoniser les calendriers et les horaires des enfants est un objectif tout à fait louable, car il vise à répondre à la demande fréquente des parents et, surtout, à faciliter la vie familiale par une meilleure prise en compte de l'évolution des modes de vie. Vous l'avez vous-même évoqué, il faudra également réfléchir à la suppression des cours du samedi matin au collège, pour que les fratries et les familles bénéficient pleinement du temps ainsi dégagé.

Nous le savons aussi, les élèves français ont beaucoup plus d'heures de cours que leurs petits voisins européens, puisque, à l'école primaire, ils suivent 936 heures annuelles d'instruction obligatoire.

Toutefois, monsieur le ministre, nous sommes nombreux à nous interroger sur les conséquences d'une telle mesure sur les programmes et sur les matières qui seront plus particulièrement affectées. Vous avez certes déjà répondu en partie, mais qu'en sera-t-il des horaires aménagés pour la musique et le sport, ces activités étant concentrées à la fois le mercredi et le samedi matin ? Sur ce point, il faudra trouver des réponses.

En tout cas, en l'absence d'information et de concertation préalables, vous comprendrez que les élus locaux que nous sommes et que nous représentons - je pense en particulier à nos collègues maires - aimeraient obtenir un certain nombre de précisions.

Aussi, monsieur le ministre, au-delà des interrogations, il faut, me semble-t-il, profiter de cette annonce pour engager une réflexion avec l'ensemble des acteurs sur les rythmes d'apprentissage les plus adaptés aux intérêts des enfants. Très concrètement, comment comptez-vous vous y prendre pour que la concertation s'engage, notamment avec les collectivités territoriales ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Ladislas Poniatowski. Il n'y en a que pour lui, aujourd'hui ! (Sourires.)

M. Robert Bret. Il est omniprésent ! Sarkozy peut se faire du souci ! (Nouveaux sourires.)

M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale. Madame Morin-Desailly, vous m'avez posé plusieurs questions.

Tout d'abord, la suppression des cours n'est pas un but en soi. Alléger la charge scolaire, c'est bien. Pour autant, nous devons nous mettre d'accord sur les objectifs pédagogiques que nous assignons à l'école primaire.

Or, la discussion à venir sur l'aménagement du rythme scolaire, plus particulièrement sur la légère réduction de deux heures par semaine pour le groupe classe, va nous donner l'occasion de nous mettre d'accord sur les fondamentaux qu'il convient d'enseigner à l'école.

Il y a des principes simples. Pour ma part, je persiste à trouver anormal que certains parents aient tant de mal à comprendre les programmes imposés à leurs enfants. Il faut des programmes clairs, simples et lisibles.

M. Adrien Gouteyron. Très bien !

M. Xavier Darcos, ministre. Il nous faut revenir à des objectifs compréhensibles et partagés par tous, de sorte que les élèves du premier degré et surtout leurs familles puissent s'y retrouver.

M. Paul Raoult. Qu'a fait Robien ?

M. Didier Boulaud. Robien, bon à rien !

M. Xavier Darcos, ministre. Du reste, comme vous le savez, la concertation a déjà commencé sur ce sujet. Dès la fin du mois, nous serons à mon avis en mesure de présenter une première maquette, qui servira de base à la discussion.

Ensuite, j'ai déjà précisé tout à l'heure le calendrier, s'agissant de l'accompagnement éducatif : dès la rentrée 2009, ce dernier sera généralisé à toutes les écoles. Les enseignants apporteront leur contribution, mais nous serons aidés également par les associations, notamment culturelles et sportives. C'est un sujet sur lequel j'ai eu très souvent l'occasion de discuter avec mes collègues Roselyne Bachelot-Narquin et Christine Albanel. Nous y avons travaillé en commun, car l'enfant est un tout : il importe donc de privilégier l'unité de la personne, même si, selon les heures, il est avec sa famille, il suit des cours à l'école, il fait du sport ou de la musique ; toutes les activités éducatives doivent être abordées dans leur globalité.

En outre, vous avez soulevé le problème du rythme scolaire dans le premier degré. Apparemment, vous connaissez bien le sujet, puisque vous avez évoqué implicitement la question des cycles.

Peut-être, en effet, devrions-nous être plus clairs sur le fait que chaque année d'étude à l'école primaire doit avoir ses propres objectifs, bien compris et partagés par tous, vérifiés en fin d'année, de sorte que les élèves progressent et passent d'une classe à l'autre seulement lorsqu'ils sont capables d'assumer l'enseignement supplémentaire. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les résultats ne sont pas brillants !

M. Xavier Darcos, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, le Président de la République l'a dit, nous n'accepterons plus que des enfants entrent au collège sans être capables de profiter des enseignements qui les concernent.

M. Charles Revet. Très bien !

M. Xavier Darcos, ministre. C'est ce qui nous a d'ailleurs conduits à dégager les deux heures auxquelles j'ai fait allusion : il faut que les élèves les plus en difficulté puissent être accompagnés de manière personnelle et réussir aussi bien que leurs camarades. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF. -Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)