compte rendu intégral

PRÉSIDENCE DE Mme Michèle André

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

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PROCÈS-VERBAL

Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

Financement de la sécurité sociale pour 2008

Suite de la discussion d'un projet de loi

Article additionnel après l'article 30 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2008
Article 31

Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, adopté par l'Assemblée nationale (nos 67, 72 et 73).

Quatrième partie (suite)

Dispositions relatives aux dépenses pour 2008

Dans la discussion des articles de la quatrième partie, nous en sommes parvenus à l'article 31.

Quatrième partie
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2008
Articles additionnels après l'article 31

Article 31

I. - Des expérimentations peuvent être menées, à compter du 1er janvier 2008 et pour une période n'excédant pas cinq ans, portant sur de nouveaux modes de rémunération des professionnels de santé ou de financement des centres de santé prévus à l'article L. 6323-1 du code de la santé publique, complétant le paiement à l'acte ou s'y substituant, sur le fondement d'une évaluation quantitative et qualitative de leur activité réalisée à partir des informations transmises par l'organisme local d'assurance maladie dont ils dépendent.

En tant que de besoin, l'expérimentation peut déroger aux dispositions suivantes du code de la sécurité sociale :

1° Articles L. 162-5, L. 162-5-9, L. 162-9, L. 162-11, L. 162-12-2, L. 162-12-9 et L. 162-14 en tant qu'ils concernent les tarifs, honoraires, rémunérations et frais accessoires dus aux professionnels de santé par les assurés sociaux ;

2° 1°, 2°, 6° et 9° de l'article L. 321-1 en tant qu'ils concernent les frais couverts par l'assurance maladie ;

3° Article L. 162-2 en tant qu'il concerne le paiement direct des honoraires par le malade ;

4° Articles L. 322-2 et L. 322-3 relatifs à la participation de l'assuré aux tarifs servant de base au calcul des prestations.

Les expérimentations sont conduites par les missions régionales de santé mentionnées à l'article L. 162-47 du code de la sécurité sociale. À cet effet, elles passent des conventions avec les professionnels de santé et les centres de santé volontaires. Les modalités de mise en oeuvre de ces expérimentations sont définies par décret, après avis de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie, des organisations syndicales représentatives des professionnels concernés et de l'Union nationale des organismes d'assurance maladie complémentaire.

Les dépenses mises à la charge de l'ensemble des régimes obligatoires de base d'assurance maladie qui résultent de ces expérimentations sont prises en compte dans l'objectif national de dépenses d'assurance maladie mentionné au 3° du D du I de l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale.

Les mutuelles régies par le code de la mutualité, les institutions de prévoyance régies par le livre IX du code de la sécurité sociale ou par le livre VII du code rural et les entreprises régies par le code des assurances sont associées à ces expérimentations si elles le souhaitent.

Une évaluation annuelle de ces expérimentations, portant notamment sur le nombre de professionnels de santé et de centres de santé qui y prennent part et sur les dépenses afférentes aux soins qu'ils ont effectués ainsi que sur la qualité de ces soins est réalisée par les missions régionales de santé en liaison avec les organismes locaux d'assurance maladie.

II. - À titre expérimental, à compter du 1er janvier 2008 et pour une période n'excédant pas cinq ans, les missions régionales de santé volontaires prévues à l'article L. 162-47 du code de la sécurité sociale fixent, par dérogation à l'article L. 162-5 du même code, le montant et les modalités des rémunérations des médecins assurant la permanence des soins. Elles financent également des actions et des structures concourant à l'amélioration de la permanence des soins, en particulier les maisons médicales de garde, les centres de santé, ainsi que, le cas échéant, des établissements de santé.

À cette fin, les missions régionales de santé se voient déléguer par le fonds d'intervention pour la qualité et la coordination des soins mentionné à l'article L. 221-1-1 du code de la sécurité sociale les crédits nécessaires. Ce fonds précise les limites dans lesquelles les missions régionales de santé fixent les montants de la rémunération forfaitaire des médecins.

Les missions régionales de santé réalisent annuellement l'évaluation des expérimentations qu'elles ont conduites et la transmettent au fonds d'intervention pour la qualité et la coordination des soins de ville.

Les modalités de mise en oeuvre de ces expérimentations sont déterminées par décret, après avis des organisations syndicales représentatives des médecins.

III. - L'article L. 162-47 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Dans le 3°, après les mots : « Le programme annuel des actions, », sont insérés les mots : « y compris expérimentales, » ;

2° Après le 4°, il est inséré un 5° ainsi rédigé :

« 5° Les expérimentations de nouveaux modes de rémunération des professionnels de santé et des structures de soins, complétant ou se substituant au paiement à l'acte pour tous les professionnels de santé volontaires, ainsi que les expérimentations relatives à la rémunération de la permanence des soins, selon des modalités définies par décret. »

 IV. - Les deuxième et troisième alinéas de l'article L. 183-1-1 du même code sont ainsi rédigés :

« Les engagements de ces réseaux de professionnels peuvent porter sur l'évaluation et l'amélioration des pratiques des professionnels concernés, la maîtrise médicalisée des dépenses, la mise en oeuvre des références médicales, la gestion du dossier médical et la mise en oeuvre d'actions de prévention ou de dépistage. Des objectifs quantifiés peuvent être associés à ces engagements portant notamment sur le respect des recommandations, l'évaluation effective des pratiques des professionnels concernés, l'évolution de certaines dépenses ou la réalisation des actions de prévention ou de dépistage.

« Le contrat peut prévoir le montant des financements alloués à la structure en fonction du respect des objectifs ainsi que la méthode selon laquelle ils sont évalués. »

Mme la présidente. L'amendement n° 424 rectifié, présenté par M. Etienne, Mmes Procaccia, Garriaud-Maylam, Bout et Rozier et MM. J. Blanc, Doublet, Gaillard, Grignon, Laufoaulu, Milon, Pointereau, César, Cointat, Fournier, Lardeux, Seillier, Bernard-Reymond, Cornu, Bourdin, Houel, Sido et Revet, est ainsi libellé :

Dans le premier alinéa du I de cet article, après les mots :

L. 6323-1 du code de la santé publique

insérer les mots suivants :

notamment ceux utilisant la télémédecine,

La parole est à M. André Lardeux.

M. André Lardeux. La loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie a introduit pour la première fois en France la définition de la télémédecine. Son article 32 disposait : « La télémédecine permet, entre autres, d'effectuer des actes médicaux dans le strict respect des règles de déontologie mais à distance, sous le contrôle et la responsabilité d'un médecin en contact avec le patient par des moyens de communication appropriés à la réalisation de l'acte médical. »

La télémédecine améliore la prise en charge du patient, notamment dans les zones sous-médicalisées. Cependant, ces actes qui consomment du temps médical ne sont actuellement pas pris en compte dans le cadre des financements répertoriés par la tarification à l'activité, la T2A. Il convient donc de reconnaître la spécificité de la pratique de la télémédecine et de l'honorer en termes de consommation supplémentaire de temps médical par le professionnel de santé.

La non-prise en compte de cet aspect constitue un frein important au développement de la pratique de la télémédecine, ce qui est d'autant plus regrettable que la généralisation de celle-ci est une source d'économie très importante pour l'assurance maladie.

L'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, dans un rapport publié en 2004, rappelle deux exemples particulièrement motivants dans ce domaine.

La pratique de la télémédecine a permis de réduire de six jours la durée moyenne de séjour dans les centres de soins américains, soit une économie chiffrée à 1,3 million de dollars par malade.

En France, le réseau de neurochirurgie de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, l'AP-HP, a évalué l'intérêt de la transmission d'images radiologiques dans la prise en charge des urgences neurochirurgicales et a estimé le taux de transferts inutiles à 65 % avant l'utilisation de la télémédecine.

L'article 31 dispose que « des expérimentations peuvent être menées, à compter du 1er janvier 2008 et pour une période n'excédant pas cinq ans, portant sur de nouveaux modes de rémunération des professionnels de santé ou de financement des centres de santé prévus à l'article L. 6323-1 du code de la santé publique ».

L'objet de cet amendement est d'intégrer dans ces nouveaux modes de rémunération la prise en compte, éventuellement forfaitaire, du temps médical que peuvent y consacrer les praticiens utilisant la télémédecine.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. L'exposé des motifs présenté par M. Lardeux est assez clair pour que le Gouvernement puisse se prononcer sur la pertinence de cet amendement. Je laisse donc le soin à Mme la ministre de donner son avis.

La commission des affaires sociales, a priori plutôt favorable à cet amendement, s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports. Nous ne sommes pas opposés, bien au contraire, à la télémédecine - je l'ai d'ailleurs indiqué à Jean-Claude Etienne lorsqu'il est intervenu à la fin de la discussion générale -, mais les modalités d'organisation et de fonctionnement de celle-ci, aux termes de la loi de 2004, restent à déterminer, tout comme les orientations qui assureront son développement sur le territoire.

Des réseaux de télémédecine, financés dans le cadre des MIGAC - missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation - et de l'ancien fonds d'aide à la qualité des soins de ville, existent déjà.

Il convient donc d'évaluer ces dispositifs pour définir les modalités d'organisation et de financement de la télémédecine. Ces évaluations sont évidemment préalables à toute réflexion sur un financement. Nous allons d'ailleurs inclure la question de la télémédecine dans la réflexion sur la future offre de soins.

Par conséquent, si le Gouvernement n'est pas défavorable à la télémédecine, il est opposé à l'amendement tel qu'il nous est proposé et en demande le retrait.

Mme la présidente. Monsieur Lardeux, l'amendement n° 424 rectifié est-il maintenu ?

M. André Lardeux. J'ai bien entendu les arguments de Mme la ministre. Mais dire qu'une loi votée en 2004 est encore loin d'être opérationnelle, c'est inquiétant.

Au moment où l'on évoque le problème des zones sous-médicalisées - M. Jean-Marc Juilhard, expert en la matière, ne me démentira certainement pas -, il ne me paraît pas opportun de retirer cet amendement avant l'examen du texte en commission mixte paritaire. Il serait préférable que nous décidions à moment-là, avec nos collègues de l'Assemblée nationale, ce qu'il y a lieu de faire.

En l'absence du professeur Etienne, je ne me sens pas l'autorité nécessaire pour retirer l'amendement, donc je le maintiens.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Juilhard, pour explication de vote.

M. Jean-Marc Juilhard. Je regrette quelque peu la position du Gouvernement, même si je ne méconnais pas les problèmes techniques posés par la télémédecine et je remercie chaleureusement M. André Lardeux d'avoir maintenu l'amendement.

J'ajouterai simplement quelques mots pour appuyer cet amendement. Au cours de l'élaboration du rapport d'information sur la démographie médicale et la permanence des soins que j'ai eu l'honneur de conduire pour la commission des affaires sociales, moi qui ne suis ni un professionnel de santé ni un technicien de la télécommunication à haut débit, j'ai compris l'intérêt majeur et indispensable de la télémédecine.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Si seulement un amendement pouvait résoudre les problèmes ! (Sourires.)

M. Jean-Marc Juilhard. Tout le monde semble s'accorder sur ce point, et Mme la ministre vient de nous indiquer que la télémédecine serait un point majeur dans les discussions futures.

La télémédecine est actuellement sous-employée, pour diverses raisons exposées dans cet amendement. Elle permettra d'améliorer la prise en charge des patients dans les zones sous-médicalisées, notamment dans les zones rurales.

Il convient sans doute de s'assurer, madame la ministre, que la formation des étudiants et la formation continue des praticiens sont adaptées et que les technologies de télécommunication à haut débit sont réellement opérationnelles sur l'ensemble du territoire.

En tout cas, c'est un outil indispensable pour le service de la permanence des soins de proximité. Je voterai donc avec enthousiasme, accompagné, je l'espère, d'un très grand nombre de mes collègues, cet amendement cher au professeur Etienne !

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Houel, pour explication de vote.

M. Michel Houel. Je soutiens bien entendu cet amendement dont je suis cosignataire. Il est évident que la télémédecine est devenue incontournable et sera amenée à se développer de plus en plus.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Si un amendement était à même de résoudre les problèmes posés par le développement de la télémédecine, j'y serais tout à fait favorable. En l'occurrence, nous sommes en pleine confusion.

Il ne s'agit pas d'expérimenter un mode d'exercice ou une nouvelle technologie ; nous le faisons déjà. Cet amendement concerne la rémunération des médecins et n'a rien à voir avec les nouvelles technologies !

Je souscris pleinement à l'objectif de développement de la télémédecine et aux expérimentations technologiques qui ont été engagées, mais cet amendement n'a pas sa place ici.

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Dériot, pour explication de vote.

M. Gérard Dériot. Vous nous assurez, madame la ministre, que vous êtes en train de travailler au développement de la télémédecine : c'est ce qui nous importe. Nous comprenons bien qu'il soit difficile pour le Gouvernement de s'engager sur une rémunération par un amendement.

Si le principe de la mise en place de la télémédecine est acquis, nous devrions pouvoir expliquer au professeur Etienne que son amendement n'était pas tout à fait adapté. Il ne me paraît pas nécessaire d'adopter cet amendement dans la mesure où vous vous êtes engagée, madame la ministre, à aller dans cette voie dans les plus brefs délais. C'est notre souhait à tous !

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Alain Vasselle, rapporteur. Je crois savoir que M. Etienne, par cet amendement, nous invitait à faire bénéficier les professionnels de santé qui utilisent la télémédecine de nouveaux modes de rémunération dont le caractère expérimental est souligné à l'article 31.

Or il ne semble pas utile de prévoir un support législatif pour rémunérer les médecins qui utilisent la télémédecine. Cet amendement est donc superfétatoire et n'est pas nécessaire pour qu'elle puisse se développer.

Si Mme la ministre confirme cette interprétation, j'espère que nos collègues accepteront de retirer leur amendement, car rien ne fera obstacle au souhait exprimé par le professeur Etienne.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je confirme l'analyse de M. le rapporteur.

Mme la présidente. Monsieur Lardeux, retirez-vous votre amendement ?

M. André Lardeux. Je constate que j'ai bien fait de maintenir cet amendement dans un premier temps, car nous avons ainsi pu obtenir des précisions supplémentaires.

Compte tenu des remarques formulées par la commission et par le Gouvernement, je le retire.

Mme la présidente. L'amendement n° 424 rectifié est retiré.

L'amendement n° 320, présenté par M. Autain, Mme David, M. Fischer, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Dans le premier alinéa du I de cet article, après les mots :

code de la santé publique

insérer les mots :

et des maisons de santé pluridisciplinaires

La parole est à M. François Autain.

M. François Autain. L'Assemblée nationale a adopté un amendement visant à étendre le dispositif de l'article 31 aux centres de santé. Or il n'y a pas de raison que les maisons de santé pluridisciplinaires ne bénéficient pas de cette expérimentation. Je souligne que notre collègue Jean-Marc Juilhard, dans son excellent rapport, met bien l'accent sur le rôle qu'elles pourraient jouer dans la mise en oeuvre de l'offre de soins dans les zones sous-médicalisées.

Quant à la définition des maisons de santé pluridisciplinaires, je la donne dans un amendement que nous examinerons ultérieurement.

Dès maintenant, on peut dire que les maisons de santé regroupent des médecins et des professionnels de santé autour d'un projet médical commun visant à une prise en charge globale en matière de santé et de prévention. Là, je souligne l'une des carences de cet article.

Si l'article 30 définit les objectifs des contrats de santé publique, l'article 31 ne contient aucune indication sur les objectifs qui sont assignés à ces nouveaux modes de rémunération. Je présenterai d'ailleurs un amendement tendant à combler cette lacune. Le débat qui vient d'avoir lieu au sujet de la télémédecine prouve bien qu'il y a un problème.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Alain Vasselle, rapporteur. Cet amendement a d'autant plus retenu notre attention que la commission avait déposé un amendement similaire, à une nuance près. Je vous demanderai donc, monsieur Autain, de supprimer le mot « pluridisciplinaires » dans votre amendement, auquel cas la commission pourrait donner un avis favorable.

Je précise que l'article 40 de la Constitution a été opposé à l'amendement de la commission. Mais l'amendement de M. Autain nous permet d'aborder cette question. J'indique dès à présent que plusieurs autres amendements sur le même sujet vont venir en discussion.

Nous avons déposé des amendements sur les maisons de santé, parce qu'il s'agit de la démographie médicale. En définitive, nous ne faisons que rebondir sur les conclusions du rapport de Jean-Marc Juilhard, qui est notre spécialiste du sujet et un expert reconnu sur le plan national par les professionnels de santé. (Sourires.)

Lors des auditions auxquelles j'ai procédé, comme il est de coutume dans notre Haute Assemblée, j'ai constaté que la création des maisons de santé a recueilli l'unanimité chez les professionnels de santé.

M. François Autain. Absolument !

M. Alain Vasselle, rapporteur. Elles permettent de répondre aux attentes des élus locaux, mais surtout elles sont un moyen de satisfaire les besoins de nos concitoyens dans les zones sous-médicalisées. Ce n'est pas une solution miraculeuse qui réglera tous les problèmes, mais c'est une avancée qui mérite d'être retenue.

Nous serions particulièrement heureux que le Gouvernement soutienne cette initiative et accepte cet amendement et tous ceux que je présenterai dans quelques instants.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Les maisons de santé sont une réponse très intéressante à l'accès aux soins primaires. Notre débat très fourni et très riche sur la démographie médicale l'a démontré. En l'occurrence, c'est vraiment une stratégie gagnant-gagnant, puisqu'elles améliorent les conditions d'exercice des professionnels et l'accès aux soins des patients.

Pour autant, monsieur Autain, la précision que vous apportez au champ des expérimentations de l'article 31, en intégrant explicitement les maisons de santé, est trop précoce. Je dirais même qu'elle pourrait être contre-productive pour leur développement.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. En inscrivant les maisons de santé dans les expérimentations des nouveaux modes de rémunération, vous imposez une définition de ces structures. Or celles-ci recouvrent en fait des fonctionnements très différents et qui font l'objet d'expérimentation dans le cadre du FIQCS, le fonds d'intervention pour la qualité et la coordination des soins, que vous connaissez bien.

M. François Autain. Justement !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Avant d'aller plus loin et de définir un label, il conviendrait d'avoir au préalable une vision complète de ce que pourrait être une maison de santé. La poursuite des expérimentations dans le cadre du FIQCS et leur évaluation permettront de mieux apprécier la réalité de ces maisons de santé.

Mais les expérimentations de nouveaux modes de rémunération seront également possibles au sein de ces structures sans avoir besoin de le préciser. Les modalités seront définies dans le décret d'application. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

M. Guy Fischer. Vous ne faites pas de cadeau !

Mme la présidente. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote.

M. François Autain. Madame la ministre, je ne comprends pas votre argumentation. Vous dites que les maisons de santé font actuellement l'objet d'expérimentation. Or il s'agit précisément de mettre en oeuvre des expérimentations. Vouloir écarter les maisons de santé de ce dispositif ne me paraît donc pas cohérent.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Mais non !

M. François Autain. Peut-être vous ai-je mal comprise ?

Je pensais que c'était le moment d'intégrer ces nouvelles structures à un projet qui porte sur les expérimentations en matière de rémunération. À partir du moment où vous avez accepté à l'Assemblée nationale d'intégrer les centres de santé, je ne vois pas pour quelle raison vous refusez au Sénat d'intégrer les maisons de santé.

J'en reviens au rapport de M. Juilhard, qui montre bien le rôle essentiel que ces maisons pourraient jouer en matière d'offre de soins dans les zones sous-médicalisées. Nous en avons longuement débattu ; ces zones appellent de la part des pouvoirs publics des réponses précises afin de lutter contre cette désertification.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je me suis sans doute mal fait comprendre, monsieur Autain.

Une définition juridique du centre de santé a été donnée ; tel n'est pas le cas pour la maison de santé. L'expérimentation ne peut donc pas être appliquée à une telle structure, sauf à la définir juridiquement au préalable.

M. François Autain. C'est ce qu'on fait !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Non, votre amendement vise à étendre l'expérimentation Il conviendrait d'abord de définir ce qu'est une maison de santé pluridisciplinaire.

M. François Autain. Nous allons le faire !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Pour l'instant, nous ne souhaitons pas le faire, car il s'agit d'une démarche expérimentale qui recouvre des réalités très différentes.

À l'intérieur des maisons de santé, quelle que soit par ailleurs leur nature, les médecins bénéficieront bien entendu de l'expérimentation. Il est hors de question de les en exclure. Toutefois, je le répète, la maison de santé est une structure qui n'a pas de définition juridique. Il n'est donc pas possible de lui consacrer une disposition législative.

M. Bernard Cazeau. Pinaillage !

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Mme la ministre a raison, il convient d'abord de donner une définition de la maison de santé.

C'est la raison pour laquelle, madame la présidente, je souhaiterais que soit appelé en priorité l'amendement n° 459, et que l'amendement n° 320 soit réservé.

Mme la présidente. Il n'y a pas d'opposition sur cette demande de priorité ?...

La priorité est ordonnée.

En conséquence, le vote sur l'amendement n° 320 est réservé jusqu'après le vote sur l'amendement n° 459, que j'appelle en priorité avec l'amendement n°329, qui est en discussion commune.

L'amendement n° 459, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Après le chapitre IV du titre II du livre III de la sixième partie du code de la santé publique, il est inséré un chapitre V ainsi rédigé :

« Chapitre V

« Maisons de santé

« Art. L. 6325-1. - Les maisons de santé assurent des activités de soins sans hébergement et participent à des actions de santé publique ainsi qu'à des actions de prévention et d'éducation pour la santé et à des actions sociales.

« Les maisons de santé sont constituées entre les professionnels de santé libéraux. « Elles satisfont à des critères de qualité ainsi qu'à des conditions d'organisation, de fonctionnement et d'évaluation fixées par décret. »

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 459.

M. Alain Vasselle, rapporteur. Mme la ministre a très opportunément posé la question de la définition des maisons de santé et considéré qu'il n'y avait pas lieu de légiférer tant que nous ne connaissions pas précisément leurs caractéristiques. C'est ce que nous avons tenté de faire, avec le concours de M. Juilhard.

Notre collègue n'a pas sorti cette définition de son chapeau un beau matin ou un jour où il était particulièrement de bonne humeur. Il a réalisé un travail de longue haleine, très approfondi, et a procédé à de nombreuses auditions de spécialistes. Cette proposition fait donc consensus. Reste à savoir si le Gouvernement est prêt à l'intégrer dans la loi.

Cet amendement vise donc à définir les maisons de santé et, comme Mme la ministre le souhaite, il laisse au décret le soin de fixer certaines modalités.

Au moment où les maisons de santé se développent sur l'ensemble du territoire, il nous est apparu souhaitable d'encadrer leur activité et de favoriser leur création là où c'est nécessaire, notamment par l'attribution d'aides à l'installation et au fonctionnement. Il convient également de leur permettre de contractualiser avec l'assurance maladie.

Telle est la définition que nous vous proposons, mes chers collègues. Bien entendu, nous n'y avons pas adjoint tous les aspects financiers qui pourraient l'accompagner, sinon nous serions tombés sous le coup de l'article 40. Libre au Gouvernement de compléter ce dispositif s'il le juge utile !

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je suis surprise que l'on veuille définir d'une façon aussi rigide les maisons de santé.

Nous sommes dans une démarche expérimentale. Mais, si tout le monde souhaite leur développement, ce n'est évidemment ni le Gouvernement ni les parlementaires qui feront les maisons de santé. Ce seront les professionnels de santé !

Nous en sommes au balbutiement. Il y a autant de formes de maisons de santé pluridisciplinaires que de modes de fonctionnement de professionnels de santé qui s'organisent librement entre eux.

À ce stade de cette démarche intéressante, définir le statut et les conditions de fonctionnement des maisons de santé en encadrant ces structures me paraît prématuré. Ce sont les professionnels qui prennent l'initiative personnelle de créer ces maisons, avec l'appui de l'assurance maladie et des collectivités territoriales.

Il ne faut pas rigidifier le dispositif par un décret, comme on nous y invite, sans avoir fait l'analyse des modes de fonctionnement de ces maisons pluridisciplinaires, ce qui serait contre-productif.

Le Gouvernement a, une politique de repositionnement des soins primaires à leur juste place, une place première au coeur de notre système de soins. Nous voulons nous appuyer sur un regroupement amélioré des professionnels au travers des maisons de santé.

Je souhaite que ces critères de qualité soient mis en avant au travers des financements que le Fonds d'intervention pour la qualité et la coordination des soins, le FIQCS, consacrera aux maisons de santé en 2008.

Je réunirai les directeurs de missions régionales de santé pour leur fixer des objectifs quantifiés en termes de soutien à la création de maisons de santé.

Je souhaite également que les expérimentations de rémunérations autres qu'à l'acte intègrent des maisons de santé pluridisciplinaires, mais aussi, nous en parlions à l'instant avec François Autain, des centres de santé. Je sais que M. Martin Hirsch y est très attaché et je travaille avec lui sur ce sujet.

Il me semble donc plus pertinent, à ce point de notre débat, de laisser la place aux initiatives des professionnels, qui seront soutenus par les pouvoirs publics, et de tirer au préalable le bilan de ces expérimentations et du modèle que nous visons pour les maisons de santé.

Me demander dès à présent de régler par décret la structure juridique des maisons de santé, leurs conditions de fonctionnement et d'évaluation, c'est décourager les médecins à se regrouper !

M. François Autain. Cela m'étonnerait !

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Mme la ministre a raison ; il ne faut pas lui donner une tâche démesurée ni la contraindre en lui demandant d'agir par voie de décret.

Je propose donc de rectifier l'amendement de la commission des affaires sociales pour supprimer cette contrainte faite au ministre. Le second alinéa de l'article L.6325- 1 serait donc ainsi rédigé : « Les maisons de santé sont constituées entre les professionnels de santé libéraux. Elles peuvent associer des personnels médico-sociaux. »

Nous devons laisser ces maisons de santé vivre leur vie. Cette modification permettra, par exemple, à des assistantes sociales du conseil général de pouvoir également venir travailler dans les maisons de santé.

M. François Autain. Il n'est pas question des professionnels de santé alors ?

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Si, puisqu'il s'agit uniquement de modifier la dernière phrase de l'amendement !

Mme la présidente. Je suis donc saisie d'un amendement n° 459 rectifié, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, et ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Après le chapitre IV du titre II du livre III de la sixième partie du code de la santé publique, il est inséré un chapitre V ainsi rédigé :

« Chapitre V

« Maisons de santé

« Art. L. 6325-1. - Les maisons de santé assurent des activités de soins sans hébergement et participent à des actions de santé publique ainsi qu'à des actions de prévention et d'éducation pour la santé et à des actions sociales.

« Les maisons de santé sont constituées entre les professionnels de santé libéraux. Elles peuvent associer des personnels médico-sociaux. »

J'appelle maintenant l'amendement n° 329, qui est en discussion commune avec l'amendement n°459 rectifié.

L'amendement n° 329, présenté par M. Autain, Mme David, M. Fischer, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...- Après le chapitre IV du titre II du livre III de la sixième partie code de la santé publique, il est inséré un chapitre V ainsi rédigé :

« Chapitre V

« Maisons de santé pluridisciplinaires

« Art. L. 6325-1. - Les maisons de santé pluridisciplinaires assurent des activités de soins sans hébergement, la permanence des soins et participent à des actions de santé publique ainsi qu'à des actions de prévention et d'éducation pour la santé et à des actions sociales.

« Les maisons de santé sont constituées entre les professionnels de santé libéraux et peuvent inclure des personnels paramédicaux et des travailleurs sociaux.

« Elles satisfont à des critères de qualité ainsi qu'à des conditions d'organisation, de fonctionnement et d'évaluation fixées par décret. Elles peuvent pratiquer le tiers payant.

La parole est à M. François Autain.

M. François Autain. Je souhaite réagir aux propos de Mme la ministre.

Le projet de créer des structures appelées « maisons de santé » n'est pas tombé des nues, il ne part pas de rien ! De telles structures existent déjà, même si elles ne s'appellent pas « maisons de santé ».

Je parle sous le contrôle des membres de la commission des affaires sociales, en particulier  de M. Jean-Marc Juilhard. Nous avons auditionné un certain nombre de praticiens, qui nous ont fait part de leurs expériences, et nous avons constaté qu'il existe actuellement dans notre pays un grand nombre de structures qui répondent déjà à cette définition.

En conséquence, si nous avons opté pour cette formule, c'est précisément parce qu'elle correspond à ce qui existe déjà !

Malheureusement, il s'agit de structures expérimentales, qui ne peuvent se développer puisqu'elles ne bénéficient pas d'un statut leur permettant d'être reconnues et d'obtenir un financement pérenne.

À l'heure actuelle, c'est un des griefs que nous avons remarqué, les praticiens se plaignent de ne pas recevoir l'aide qu'ils estiment nécessaire à la mise en oeuvre de leur projet. Ils sont obligés de recourir au FIQCS et ils considèrent qu'il ne s'agit pas de rémunérations suffisantes et pérennes.

Il me semble donc que la définition d'un statut est la condition préalable pour que ces maisons de santé puissent bénéficier d'un financement spécifique qui leur permettra de survivre.