gestion des finances publiques et des ressources humaines

Gestion des finances publiques et des ressources humaines - Compte spécial : Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés - Compte spécial : Avances à divers services de l'Etat ou organismes gérant des services publics
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Remboursements et dégrèvements

M. le président. Nous allons procéder à l'examen de l'amendement portant sur les crédits de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » figurant à l'état B.

État B

(En euros)

Mission

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

11 660 912 215

11 222 487 413

Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local

8 490 865 176

8 312 520 176

Dont titre 2

6 755 032 797

6 755 032 797

Stratégie des finances publiques et modernisation de l'État

411 630 246

279 710 246

Dont titre 2

66 350 451

66 350 451

Conduite et pilotage des politiques économique et financière

1 005 858 922

870 629 120

Dont titre 2

387 272 185

387 272 185

Facilitation et sécurisation des échanges

1 528 785 763

1 537 855 763

Dont titre 2

1 008 183 136

1 008 183 136

Fonction publique

223 772 108

221 772 108

Dont titre 2

800 000

800 000

M. le président. L'amendement n° II-19 rectifié, présenté par M. Angels, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

I. Supprimer les programmes :

a) Stratégie des finances publiques et modernisation de l'État

b) Fonction publique

II. Créer le programme :

Modernisation de l'État, de la fonction publique et des finances

III. En conséquence, modifier comme suit les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public localDont Titre 2

Stratégie des finances publiques et modernisation de l'État Dont Titre 2

411.630.246

66.350.45

 

279.710.246

66.350.451

Conduite et pilotage des politiques économique et financière Dont Titre 2

Facilitation et sécurisation des échangesDont Titre 2

Fonction publiqueDont titre 2

223.772.108800.00

 

221.772.108

800.000

Modernisation de l'État, de la fonction publique et des financesDont titre 2

635.402.354

67.150.451

501.482.354

67.150.451

TOTAL

635.402.354

635.402.354

501.482.354

501.482.354

SOLDE

0

0

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Bernard Angels, rapporteur spécial. Cet amendement a pour objet de réunir les programmes 221 « Stratégie des finances publiques et modernisation de l'État » et 148 « Fonction publique » dans un programme nouveau, qui serait intitulé « Modernisation de l'État, de la fonction publique et des finances ».

En effet, la structure de la mission, en laissant perdurer un cloisonnement administratif issu du passé, entre les actions dévolues à la modernisation de l'État et à l'informatisation des services et celles qui sont consacrées à la formation initiale des hauts fonctionnaires, mais aussi à l'action sociale interministérielle, pouvait laisser craindre une absence de cohérence dans la politique de réforme de l'État.

Le nouveau programme permettrait ainsi une action cohérente entre modernisation des ressources humaines, modernisation des systèmes d'information et modernisation des finances publiques.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. La commission des finances de votre assemblée, lors de son examen de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » a souhaité modifier la maquette budgétaire en fusionnant les programmes 148 « Fonction publique » et 221 « Stratégie des finances publiques et modernisation de l'État ».

Cet amendement est motivé par la volonté de regrouper au sein d'un même programme les crédits de la direction du budget, de la direction générale de la modernisation de l'État, de l'agence pour l'informatique financière de l'État ou de l'opérateur national de la paye, qui sont rattachés aujourd'hui au programme 221, avec ceux de la direction générale de l'administration et de la fonction publique, la DGAFP.

Toutefois, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2008, seuls les crédits d'intervention - action sociale interministérielle - d'une part, et les crédits de fonctionnement des écoles et des instituts de formation interministérielle, d'autre part, sont rattachés à ce programme 148.

En effet, les crédits de personnels et de fonctionnement de la DGAFP sont inscrits sur le programme 129, « Coordination du travail gouvernemental », qui est rattaché aux services généraux du Premier ministre.

S'il est bien prévu de regrouper à terme les moyens de la DGAFP sur un seul programme, cela suppose, au préalable, un certain nombre de décisions relatives au positionnement administratif de la DGAFP et de ses agents.

Les évolutions qui, à compter de 2008, pourraient affecter le rattachement juridique de la DGAFP auront bien pour objectif de permettre la meilleure cohérence possible. Ainsi, le rattachement des crédits de personnels de la DGAFP au programme 148 « Fonction publique » de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » pourrait être prévu dans le cadre du projet de loi de finances pour 2009. Alors seulement, une fusion des programmes 148 et 221 pourrait être envisagée.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement demande à la commission des finances de bien vouloir retirer cet amendement, qui semble aujourd'hui prématuré. À défaut, il émettrait un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président la commission des finances. Nous sommes là au coeur d'un processus déterminant de la modernisation de l'État et, vous l'avez compris, nous n'avons pas pu aller aussi loin que nous le souhaitions.

J'entends bien votre argument, monsieur le secrétaire d'État : le programme 129 de la DGAFP devrait faire partie du programme « Stratégie des finances publiques et modernisation de l'État ». Or ce programme est aujourd'hui inclus dans la mission « Direction de l'action du Gouvernement » et il n'est pas dans le pouvoir du Parlement de déplacer des programmes d'une mission vers une autre. Seul le Gouvernement peut procéder à cette translation.

Il me paraît néanmoins nécessaire - et ne vous méprenez pas sur notre intention -, de rassembler ces programmes afin de mettre en oeuvre une véritable synergie de réforme. Les arguments que vous avez développés tout à l'heure à la tribune sur les programmes 221 et 148 mettaient d'ailleurs bien en évidence la nécessité de les rassembler. Par conséquent, ce serait un geste symbolique fort de la part du Sénat que de voter ce soir cet amendement.

Je souhaite que le Gouvernement puisse extraire de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » le programme 129 pour le fusionner avec les programmes 221 et 148. S'il n'est pas possible de le faire d'ici à la commission mixte paritaire, monsieur le secrétaire d'État, je m'engage, sous le contrôle du rapporteur spécial, Bernard Angels, à ce que nous rétablissions les programmes dans leur ordre, mais j'aimerais au moins que, dans les quelques semaines qui nous séparent de la commission mixte paritaire, nous puissions aller plus loin dans l'analyse de ce processus qui nous paraît constituer l'un des bons leviers de la réforme de l'État.

C'est la raison pour laquelle - ne le prenez pas en mauvaise part, monsieur le secrétaire d'État, car je vous sais infiniment gré d'avoir accepté de suppléer M. Éric Woerth -, la commission des finances maintient son amendement en souhaitant que le Sénat veuille bien l'approuver.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Comme je l'ai déjà indiqué, ces changements de périmètre seront examinés dans le projet de loi de finances pour 2009 et nous discuterons ensemble, au cours de 2008, de ce point important.

M. le président. L'amendement est-il maintenu, monsieur le président de la commission des finances ?

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Oui, monsieur le président. J'ai bien noté que le Gouvernement s'engageait à ce qu'en 2009 cette disposition soit effective mais, pour la beauté du geste, je souhaite que cet amendement soit voté dès maintenant par le Sénat !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-19 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » figurant à l'état B.

Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits, modifiés.

(Ces crédits sont adoptés.)

compte spécial : prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés

M. le président. Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits du compte spécial : « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés » figurant à l'état D.

État D

(En euros)

Mission

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés

10 800 000

10 800 000

Prêts et avances à des particuliers ou à des associations

800 000

800 000

M. le président. Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

(Ces crédits sont adoptés.)

compte spécial : avances à divers services de l'état ou organismes gérant des services publics

M. le président. Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits du compte spécial : « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics» figurant à l'état D.

État D

(En euros)

Mission

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics

7 653 700 000

7 653 700 000

Avances à l'Agence unique de paiement, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune

7 500 000 000

7 500 000 000

Avances à des organismes distincts de l'État et gérant des services publics

50 000 000

50 000 000

Avances à des services de l'État

103 700 000

103 700 000

M. le président. Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

(Ces crédits sont adoptés.)

M. le président. Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission : « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » ainsi que des comptes spéciaux : « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés » et « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics ».

Monsieur le secrétaire d'État, permettez-moi de vous remercier d'avoir permis le bon déroulement de la séance en acceptant de venir suppléer M. Éric Woerth, ministre du budget.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures quinze.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures cinq, est reprise à vingt-deux heures quinze, sous la présidence de M. Roland du Luart.)

PRÉSIDENCE DE M. Roland du Luart

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2008, adopté par l'Assemblée nationale.

Remboursements et dégrèvements

Article 33 et Etat B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Article 33 et Etat B

M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements ».

La parole est à Mme le rapporteur spécial.

Mme Marie-France Beaufils, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis l'examen des projets de loi de finances pour 2006 et 2007, je suis amenée, faute d'améliorations tangibles, à formuler les mêmes critiques sur de la mission « Remboursements et dégrèvements ».

Pour la commission des finances, en effet, cette mission n'a aucune raison d'être. D'une part, les crédits qu'elle retrace correspondent à des dépenses diverses participant de politiques publiques hétérogènes, ce qui empêche la définition de toute stratégie cohérente. D'autre part, le système d'évaluation des performances retenu est très insuffisant et ne permet pas de connaître le coût de gestion des dispositifs de remboursements et dégrèvements.

Ainsi, le pilotage et sa gestion budgétaires de cette mission qui, bien que regroupant des crédits évaluatifs, est la mission la plus importante du budget de l'État, avec 83 milliards d'euros, ne répondent pas aux prescriptions de la loi organique relative aux lois de finances et, surtout, ne fournissent pas d'éléments suffisants à l'appréciation des choix législatifs du Parlement en la matière.

En octobre dernier, la Cour des comptes, dans son enquête demandée par la commission des finances, en application de l'article 58, 2°, de la LOLF, a souscrit, pour l'essentiel, à ces observations.

Afin d'améliorer l'identification des dépenses et de permettre un contrôle parlementaire plus efficace, je propose donc trois pistes d'amélioration.

J'observe, tout d'abord, qu'en dépit des sommes en jeu et de leur dynamisme - on relève une augmentation de 8,7 % par rapport à la loi de finances pour 2007 -, les remboursements et dégrèvements sont actuellement exclus de la norme de dépense. Or il me paraît indispensable que les remboursements et dégrèvements d'impôts, qui servent des politiques publiques définies et qui constituent des dépenses budgétaires à part entière, comme la prime pour l'emploi, par exemple, soient au moins intégrés dans la norme de dépense.

Je propose, ensuite, la relocalisation de certains crédits dans leur mission budgétaire de rattachement « naturel », ainsi que la création d'un programme spécifique retraçant les remboursements de crédits de TVA. Je vous présenterai, en ce sens, trois amendements qui s'inscrivent dans la continuité des travaux de la commission des finances pour améliorer l'architecture de cette mission et ouvrir le débat.

Enfin, je déplore que le dispositif d'évaluation des performances, cette année encore, n'enregistre aucun progrès significatif. Pourtant des améliorations rapides sont nécessaires. En particulier, il me paraît indispensable de procéder à la mesure de l'efficacité socio-économique des crédits d'impôts d'État et des dégrèvements d'impôts locaux. Certes, des difficultés techniques et fonctionnelles compliquent l'exercice. Cependant, ce qui a été fait pour le crédit d'impôt recherche notamment, montre que cette démarche est possible.

Je conclurai mon propos par une question, monsieur le ministre. N'ayant pu assister à l'audition « pour suite à donner » à l'enquête de la Cour des comptes, organisée par la commission des finances, vous avez adressé au président de la commission une lettre, datée du 28 septembre 2007, dans laquelle vous indiquez - admettant par là même les limites de la mission - que vous ferez « procéder à une étude dont le mandat sera de rendre l'information des parlementaires plus lisible en restructurant cette mission ». Je souhaiterais donc savoir quand les résultats de cette étude seront disponibles, quelles suites seront données à cette enquête et comment les parlementaires y seront associés.

Au bénéfice de ces observations et sous réserve de l'adoption des amendements qu'elle a déposés, la commission des finances vous propose, mes chers collègues, l'adoption des crédits de la mission ainsi modifiés.

M. le président. J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé, pour cette discussion, à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose et à trois minutes celui dont dispose la réunion des sénateurs n'appartenant à aucun groupe.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de cinq minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Guy Fischer.

M. Guy Fischer. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, n'occupant que quelques minutes dans la discussion budgétaire, la mission « Remboursements et dégrèvements » est pourtant la plus importante mission du projet de loi de finances pour 2008 en termes de crédits ouverts, nonobstant leur caractère évaluatif.

Dans son rapport introductif, ma collègue et amie Marie-France Beaufils a souligné, une fois encore, les limites inhérentes à l'existence de cette mission dont les très importants crédits, au caractère disparate, participent en réalité de politiques publiques retracées dans d'autres missions budgétaires.

Les crédits ouverts dans cette loi de finances au titre de la mission « Remboursements et dégrèvements » sont particulièrement importants, atteignant en effet la somme faramineuse de 83,16 milliards d'euros, soit plus que les crédits retracés, par exemple, dans les missions « Enseignement scolaire » et « Recherche et enseignement supérieur ». La hausse sur 2007 n'est pas négligeable puisqu'elle atteint 6,7 milliards d'euros. Elle est due essentiellement à la progression des crédits de TVA, qui augmentent de plus de 3 milliards d'euros, et à celle des allégements d'impôt sur les sociétés, à hauteur de 600 millions d'euros, et de taxe professionnelle, pour 1,9 milliard d'euros.

Figure également dans ces crédits évaluatifs le coût du bouclier fiscal, dont nous avons dénoncé le caractère inique lors de la discussion de la première partie de ce projet de loi de finances et dont il apparaît clairement, à l'examen de la campagne fiscale de 2007, qu'il est loin d'avoir rencontré le succès que ses promoteurs en attendaient.

Contrairement à une assertion défendue lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2007, le bouclier fiscal ne concerne pas vraiment de petits contribuables, puisque le niveau des remboursements moyens dépasse les 50 000 euros et que moins de 3 % des bénéficiaires annoncés se sont fait connaître des services fiscaux. Le bouclier fiscal est l'illustration parfaite d'une disposition de caractère profondément idéologique, nouveau cadeau fait au pouvoir d'achat des plus riches, loin de l'égalité devant l'impôt, fondement de notre République.

Cependant, pour mieux appréhender les réalités, le caractère évaluatif des crédits de la mission ne peut que nous inciter à examiner les dépenses effectivement réalisées en 2007. En effet, si l'on se réfère au projet de loi de finances rectificative que nous discuterons en fin d'année, les crédits de la mission ont connu une évolution sensible.

Si le niveau de la TVA déductible s'est légèrement contracté - nous sommes loin des attentes de croissance prévues en loi de finances initiale -, si les exonérations liées aux impositions locales s'avèrent finalement légèrement moins importantes elles aussi, il n'en va pas de même de l'un des éléments les plus dynamiques de la mission.

Il s'agit des correctifs apportés par la législation fiscale au rendement de l'impôt sur les sociétés et, notamment, le principe de report en arrière sur les déficits antérieurs ou de remboursement des acomptes trop importants. Pour 2007, cette somme s'élèverait dans le projet de loi de finances rectificative à plus de 12 milliards d'euros, alors même que la mission prévoit, pour 2008, une incidence de cette mesure « limitée » - excusez du peu ! - à 9,9 milliards d'euros. Manifestement, l'optimisation fiscale est largement en oeuvre dans notre pays !

D'autant que les crédits inscrits ne constituent qu'une partie des sommes que l'État consacre à l'allégement des charges fiscales pesant sur les entreprises. En effet, figurent dans le document d'évaluation des voies et moyens les sommes que nous consacrons chaque année à moult dispositions incitatives, dont le crédit d'impôt recherche, la taxation séparée des plus-values ou le régime des groupes ne sont que quelques illustrations.

Nous devons, à notre sens, nous poser la question de l'existence de cette mission à deux titres.

Premièrement, la cohérence même de cette mission et le fait qu'elle se substitue bien souvent à des politiques publiques placées sous le sceau « naturel » de la dépense budgétaire plaident en faveur de sa suppression.

Que pèsent par exemple les crédits des missions « Développement et régulation économiques », « Pilotage de l'économie française », « Écologie, développement et aménagement durables », « Politique des territoires » et « Relations avec les collectivités territoriales » qui représentent tous ensemble un volume de moins de 16 milliards d'euros, au regard des 44 milliards d'euros prévus pour la seule déductibilité de la TVA ?

Deuxièmement, nous devons clairement nous interroger sur le sens de politiques publiques qui ne cessent de restreindre et de comprimer la dépense publique directe au profit de la dépense fiscale - ici imparfaitement retracée - et du service d'une dette improductive de patrimoine collectif.

Compte tenu de ces observations, le groupe communiste républicain et citoyen ne votera pas les crédits de cette mission.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le président de la commission finances, madame le rapporteur, au sujet des dégrèvements, je voudrais tout d'abord remercier Mme le rapporteur spécial de la présentation qu'elle a faite, dans son rapport, de la mission « Remboursements et dégrèvements ».

L'analyse présentée dans le rapport des crédits fait ressortir les spécificités de cette mission et les limites de son architecture actuelle, héritée des travaux préalables à la mise en place de la LOLF.

La mission regroupe aussi bien des décaissements relevant de la seule mécanique fiscale, tels que les remboursements de crédits TVA et les restitutions sur acomptes d'impôt sur les sociétés, et des remboursements de crédits d'impôts, comme la prime pour l'emploi, qui sont la traduction de la mise en oeuvre de politiques publiques. Il faut d'ailleurs souligner que la première catégorie, celle des décaissements purement techniques, représente plus des deux tiers des crédits de la mission, ce qui limite la portée du constat selon lequel celle-ci est la plus importante du budget de l'État.

Cela explique aussi le fait que cette mission soit en décalage par rapport aux prescriptions de l'article 7 de la LOLF et que ses objectifs soient de fait limités à la qualité du service rendu au contribuable et, plus précisément, au respect de certaines normes de délai de remboursement.

Au sujet des indicateurs, Mme le rapporteur spécial remarquera, au-delà des chiffres et indicateurs restitués dans le cadre de ces exercices formellement contraints que sont les plans et rapports annuels de performances, les travaux de prévention visant à diminuer la fraude et le volume des réclamations contentieuses ou encore les conclusions de l'audit de modernisation sur la gestion de la prime pour l'emploi. Cette vision globale pourra conduire Mme le rapporteur spécial à porter une appréciation positive sur le travail des services, ce dont je la remercie par avance.

Il n'en reste pas moins qu'une part importante des crédits de la mission est étroitement liée aux dépenses fiscales, et c'est précisément pour cette part que la question de l'efficacité prend tout son sens.

Mme le rapporteur spécial suggère qu'une partie au moins de ces crédits trouverait sa place dans une norme de dépense élargie, ce qui pourrait aller dans le sens d'une meilleure gouvernance de la dépense publique. Néanmoins, cette orientation, a priori séduisante, qui fait l'objet d'un débat récurrent, se heurte à de nombreuses difficultés de principe et de mise en oeuvre.

En effet, seule la part des crédits d'impôt faisant l'objet d'un remboursement au contribuable est retracée dans cette mission, la part imputée sur le paiement de l'impôt étant de fait porté directement en atténuation de recettes.

Le remboursement ne constituant qu'une partie d'un crédit d'impôt pour une année donnée, il n'apparaît guère pertinent de le soumettre à une norme. De plus, une estimation précoce du coût des dépenses fiscales est parfois fragile, par exemple du fait de comportements d'optimisation fiscale du contribuable.

Ainsi, le coût du bouclier fiscal s'est avéré en 2007 très inférieur aux prévisions techniques de la Direction générale des impôts, du fait d'une certaine réserve des bénéficiaires potentiels, qui ne pouvait pas être anticipée. Nous verrons ce qu'il en est en 2008.

Par ailleurs, une partie de la dépense fiscale est largement émancipée des décisions gouvernementales : il s'agit des évolutions spontanées de dispositifs déjà votés. Si le pilotage sur des critères budgétaires est sans doute possible pour le flux de mesures nouvelles, il est nettement plus problématique pour le stock de dépenses fiscales existant. En particulier, le montant des dégrèvements d'impôts locaux dépend très fortement de la somme des décisions individuelles de fixation des taux par les collectivités territoriales, sur lesquelles l'État n'a que peu de prise.

Avant toute mise en place, les grandes orientations qui peuvent être proposées nécessitent donc une réflexion préalable très poussée. Il nous faut en effet concilier la préservation de la crédibilité de la norme de dépense avec le double souci de piloter les transferts de l'État aux collectivités territoriales et d'assurer leur autonomie financière.

Je vous donne acte du fait que nous devons progresser dans le pilotage des dépenses fiscales. Des améliorations pourraient être apportées dans deux directions.

Premièrement, il faudrait s'assurer de la nécessité et de l'efficience des dépenses fiscales nouvelles. Il serait de bonne gestion que celles-ci soient systématiquement accompagnées d'une étude d'impact et qu'elles soient créées pour une durée limitée, comme nous avons eu l'occasion d'en discuter ici même. Enfin elles feraient l'objet d'une évaluation avant que ne soit proposée leur reconduction. Cette dernière piste est, elle aussi, d'actualité.

Deuxièmement, il faudrait accroître nos marges de manoeuvre fiscale. La progression des dépenses budgétaires et des dépenses fiscales n'est pas strictement comparable du fait, naturellement, des différences de fiabilité dans leur chiffrage, mais également parce que le coût des dépenses fiscales évolue malgré l'absence de mesures nouvelles. Il me semble donc peu opportun d'intégrer les dépenses fiscales à la norme de dépense budgétaire, parce qu'elles ne sont pas de même nature. Il pourrait donc être élaboré un outil de pilotage dédié aux dépenses fiscales s'apparentant à une « norme de dépense fiscale » ou à un « objectif de dépense fiscale ». Sa définition pourrait permettre de lever les difficultés spécifiques qu'elles soulèvent.

Comme nous venons de le voir, la gouvernance des dépenses fiscales nécessite de procéder au cours des prochains mois à un examen très approfondi, auquel nous pourrions associer la commission des finances du Sénat.

Pour en revenir à l'architecture de la mission, je me réjouis que nos diagnostics, de même que celui de la commission des finances de l'Assemblée et celui de la Cour des comptes, convergent très largement.

La mission « Remboursements et dégrèvements » a été constituée, en quelque sorte par défaut, de décaissements de nature variée, qui ne s'articulent pas autour d'une politique publique unique déterminée, et c'est le moins que l'on puisse dire. Une part de ces crédits rend bien compte de diverses politiques publiques, mais, comme nous l'avons vu, seulement de façon très fragmentaire. Encore une fois, voyez l'exemple de la prime pour l'emploi.

Avec quelques années de recul, nous constatons que cette architecture n'est pas satisfaisante, ainsi que vous l'avez souligné, madame le rapporteur spécial.

Le Parlement juge que l'information portée à sa connaissance est ici peu pertinente et peu utilisable, du moins sous cette forme. Je partage cette opinion : une refonte de la mission est aujourd'hui souhaitable et nécessaire.

Comme l'a relevé Mme le rapporteur spécial, les suggestions faites à ce sujet tant par les commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat que par la Cour des comptes -vous avez fait référence à un courrier récent - ont été examinées par mes services avec la plus grande attention. C'est sur la base de ces suggestions que repose la réflexion actuelle sur le devenir de la mission.

Les grandes lignes de cette refonte sont claires et, pour l'essentiel, partagées. Les décaissements qui sont « la conséquence directe et automatique du processus de recouvrement de l'impôt », comme les remboursements de crédits de TVA ou les restitutions sur acomptes d'impôt sur les sociétés, pourraient être considérés comme des atténuations de recettes.

Quant au programme « Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux », il pourrait, comme cela a été suggéré, être rattaché en partie ou en totalité à la mission « Relations avec les collectivités territoriales », donnant une vision globale de l'effort de l'État en faveur de celles-ci.

Pour les raisons exposées plus haut, à savoir la dichotomie entre le coût réel de la dépense fiscale et la part qui en est retracée en comptabilité budgétaire sous forme de remboursements et de dégrèvements, je ne crois pas, en revanche, que l'injection de certains remboursements et dégrèvements - ceux qui sont afférents à la prime pour l'emploi ou au crédit d'impôt recherche, par exemple - dans les missions de politique publique correspondantes soit une solution optimale. Mesdames, messieurs les sénateurs, on n'y verrait plus rien ! J'espère vous en convaincre à l'occasion de l'examen des amendements que vous avez déposés en ce sens.

Les travaux préparatoires à la refonte de cette mission, qui ne manqueront pas d'être riches et fructueux, notamment si, comme le Gouvernement le souhaite, l'Assemblée nationale et le Sénat s'y associent, pourraient aboutir rapidement, c'est-à-dire au cours du premier semestre de 2009.