M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. En l'état actuel des choses, je suis défavorable à cet amendement.

Le Gouvernement ne souhaite pas, en effet, accroître le nombre de dérogations à l'obligation de dépôt des fonds des collectivités territoriales auprès du Trésor public, puisque, en contrepartie, l'État garantit à chaque collectivité le montant du produit qu'elle vote, quel qu'en soit d'ailleurs le recouvrement. Il anticipe également, de manière significative, le versement des produits de la fiscalité locale en consentant des avances mensuelles, pour lesquelles il ne se fait pas rémunérer, à diverses communes.

J'ajoute que les fonds provisionnés dans ce cadre, et c'est un autre argument, restent disponibles. Ils peuvent d'ailleurs, le cas échéant, être utilisés pour le financement de dépenses d'investissement. Ces fonds ne sont donc pas bloqués sur un compte du Trésor.

En conséquence, j'estime que la situation actuelle est relativement satisfaisante et, même si je n'exclus pas qu'il y ait, comme le souhaite M. Mercier, une réflexion sur ce point, je ne suis pas favorable, je le répète, à l'amendement.

M. le président. Monsieur Pastor, l'amendement n °II-52 est-il maintenu ?

M. Jean-Marc Pastor. Je veux d'abord préciser que ce sont environ 13 % de l'ensemble des sites qui sont concernés. Globalement, c'est donc assez peu.

Vous venez de dire, madame la ministre, que les fonds n'étaient pas bloqués et qu'ils étaient utilisables dans le cadre d'investissements. C'est vrai, mais, sur le plan de la bonne gestion des collectivités, il ne faut pas oublier que ces fonds sont destinés à être mis de côté à titre de provisions et doivent rester disponibles en cas de difficulté. S'ils sont utilisés pour d'autres investissements ou pour baisser le prix, les futurs utilisateurs seront amenés à « payer la note » à la fois pour le traitement de leurs déchets et pour le passé, ce qui serait tout de même un mauvais coup à leur encontre !

En ce qui concerne maintenant mon amendement, j'apprécie, je le dis honnêtement, la proposition de M. le rapporteur spécial, qui m'invite à le retirer en vue d'étudier la question en commission des finances, et j'aurais peut-être acceptée cette proposition si Mme la ministre s'y était associée. Mais Mme le ministre s'est déclarée défavorable sur le principe ; cette approche me gène et me conduit à opter pour le maintien de l'amendement.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je tiens à dire à notre collègue Jean-Marc Pastor que la commission des finances est prête, en effet, à étudier la question qu'il soulève et qu'il serait dommage que ce soir le Sénat exprime par son vote un avis défavorable.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je me permets donc de réitérer, monsieur Pastor; la demande formulée par Michel Mercier en vue du retrait de votre amendement, en m'engageant à ce que la commission des finances vous accueille dans les jours qui viennent afin que nous étudions ensemble cette question.

J'ajoute, monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, que si nous pouvions clore maintenant ce débat, j'en remercierais chacun de vous, car il nous serait alors possible de commencer avant minuit l'examen des crédits de la mission « Sécurité civile ».

M. le président. Monsieur Pastor, acceptez-vous de vous rendre à la demande de la commission des finances ?

M. Jean-Marc Pastor. Puisque M. Arthuis, que je remercie de son engagement, y insiste et que j'ai tout lieu d'avoir confiance en mes collègues de la commission des finances, je retire mon amendement, d'autant que je souhaite participer à la réflexion pour tenter de trouver une solution à un problème auquel les collectivités locales resteront confrontées dans les années à venir.

M. le président. L'amendement n° II-52 est retiré.

Mes chers collègues, nous en avons terminé avec les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».

Sécurité civile

Articles additionnels après l'article 48 septies
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Article additionnel après l'article 48 octies (début)

M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Sécurité civile ».

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Claude Haut, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la sécurité civile est la politique menée par l'État en vue de protéger nos concitoyens contre toutes les formes de risques, qu'ils soient naturels, tels que les feux de forêts et les inondations, ou d'origine criminelle. Le constat de l'accroissement actuel de ces risques donne à cette mission une importance primordiale.

En propos introductif, je tiens à saluer le travail des personnels, sapeurs-pompiers, militaires, secouristes, démineurs, travail qui est remarquable sur tous les types d'interventions.

Je voudrais également signaler la qualité du document de politique transversale, qui montre que la politique de sécurité civile menée par l'État recouvre un domaine bien plus large que ce budget en impliquant d'autres missions de l'État et, surtout, les collectivités territoriales. Ainsi, la question de la mise en place d'une mission interministérielle reste toujours posée, même si, pour ma part, j'estime qu'un rapprochement de la sécurité civile avec la prévention des risques serait plus adapté.

Les crédits de cette mission sont tout de même une source de préoccupations que nous allons maintenant évoquer.

Ma première remarque portera sur l'articulation entre les responsabilités de l'État et celles des collectivités territoriales dans l'organisation de cette politique.

Le budget primitif des SDIS, les services départementaux d'incendie et de secours, dépasse en effet 5 milliards d'euros pour l'année 2007, à comparer aux 418 millions d'euros de la mission « Sécurité civile » et aux 900 millions d'euros de la politique transversale de sécurité civile.

Son augmentation est de presque 20 % par rapport au compte administratif pour 2006 et, en cumulé, de près de 40 % par rapport au même compte pour 2004. Or les départements sont les seuls en charge les dépenses nouvelles des SDIS. Cette augmentation pèse donc lourdement sur leurs budgets et doit être mise en parallèle avec la diminution des crédits de 2,2 % de cette mission.

Cela est d'autant plus préoccupant que de nombreuses décisions - décisions concernant les retraites, les régimes indemnitaires, etc. - qui pèsent sur le budget des SDIS sont prises au niveau non pas local mais national.

De plus, 64 % de l'activité des sapeurs-pompiers concerne les secours à la personne, hors les cas d'incendie. L'activité des SDIS recoupe donc fortement celle des services médicaux d'urgence, qui, en tant que service public national, sont à la charge de l'État. Ce dernier ne doit pas se désengager des services médicaux d'urgence au niveau local, comme on le constate parfois, par un transfert aux départements au travers des SDIS.

Enfin, l'État est censé participer, via le fonds d'aide à l'investissement, le FAI, aux dépenses des SDIS. Or l'avenir du FAI constitue un autre sujet de préoccupation puisque ses crédits diminuent encore de 10 millions d'euros entre 2007 et 2008. Les crédits du FAI seront ainsi descendus de 65,85 millions d'euros en 2006 à 38 millions d'euros en 2007 et à 28 millions d'euros cette année.

La réforme du FAI ne doit pas conduire au désengagement de l'État du financement des investissements des SDIS et, plus largement, de la politique de sécurité civile.

Ma seconde remarque concerne l'évolution des crédits.

Pour le programme « Intervention des services opérationnels », la hausse exceptionnelle des autorisations d'engagement résulte exclusivement du renouvellement d'un contrat de maintenance des avions de la sécurité civile. La mise en place d'un contrat de maintenance sur dix ans, au lieu de quatre ans, devrait stimuler la concurrence et permettre des économies.

Après avoir précédemment attiré l'attention de la commission sur les sur-budgétisations récurrentes des dépenses de personnel, je signale l'effort de rationalisation de ces dépenses, qui correspondent davantage cette année aux besoins réels du programme.

En revanche, s'agissant du programme « Coordination des moyens de secours », outre la baisse de crédits du FAI, je souhaiterais souligner deux sous-budgétisations patentes.

La prévision de crédits pour les colonnes de renfort est de 1,7 million d'euros, soit plus de cinq fois moins que la moyenne en exécution pour les cinq dernières années.

Plus flagrante encore est la sous-budgétisation des secours d'extrême urgence, puisque seuls 100 000 euros sont prévus alors que la moyenne des cinq dernières années s'établit à 26 millions d'euros par an. Que ces dépenses soient par nature imprévisibles ne devrait pas conduire à sous-estimer de manière excessive leur niveau.

Je terminerai mon propos en m'associant aux interrogations exprimées par la commission quant à la performance de l'École nationale supérieure des officiers de sapeurs-pompiers d'Aix-en-Provence, qui semble bien éloignée des ambitions affichées lors de son installation.

En conclusion de ces observations, si ma position personnelle sera réservée dans l'attente des réponses de Mme la ministre à mes interrogations, je vous indique, mes chers collègues, que la commission des finances a décidé de vous proposer d'adopter les crédits de la mission « Sécurité civile ».

M. le président. La parole est à Mme le rapporteur pour avis.

Mme Catherine Troendle, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, je souhaite tout d'abord rendre hommage à tous les personnels de la sécurité civile, aux sapeurs-pompiers volontaires et professionnels, à tous les secouristes, à tous ces acteurs incontournables qui s'engagent au quotidien, au péril de leur vie, à sauver celle des autres

Je pense tout particulièrement à ceux qui ont été blessés ou qui sont décédés, comme les deux jeunes sapeurs-pompiers qui ont trouvé la mort dans l'effondrement d'un immeuble parisien il y a quelques semaines, le week-end du 17 novembre.

Je pense également aux victimes des derniers tremblements de terre en Martinique et en Guadeloupe.

Madame le ministre, je ne reviendrai pas sur les éléments strictement budgétaires qui ont été très précisément présentés par le rapporteur spécial, notre collègue Claude Haut. Je vous ferai part d'une satisfaction, d'un souhait et de quelques réflexions plus globales sur trois sujets qui m'intéressent particulièrement, et qui pourraient appeler une réponse de votre part.

S'agissant tout d'abord du motif de satisfaction, je souhaite saluer la parution des deux décrets d'application forts attendus, complétant les articles 6 et 7 de la loi de modernisation de la sécurité civile du 13 août 2004.

II me reste à vous interroger sur la parution du décret qui devrait lister les projets d'intérêt commun susceptibles d'être financés par les fonds d'aide à l'investissement. Actuellement, seule une circulaire ministérielle apporte quelques éléments de réponse à cette question et la parution d'un décret permettrait de clarifier la volonté gouvernementale.

À présent, je veux exprimer le souhait de voir mise en oeuvre de façon urgente une nouvelle maquette budgétaire, qui reposerait sur une mission budgétaire interministérielle de la sécurité civile,...

M. Paul Girod. Très bien !

Mme Catherine Troendle, rapporteur pour avis. ... dont tout le monde s'accorde à reconnaître la nécessité. Même M. Sarkozy, alors ministre de l'intérieur, en 2006, en convenait.

Nous pourrions ainsi avoir une vision cohérente de l'ensemble des crédits de l'État consacrés à la sécurité civile.

Je voudrais également évoquer trois sujets qui méritent réflexion.

Nous avons tous relevé un réel problème dans l'organisation du secours à personne. Il résulte essentiellement d'une mésentente ou d'une collaboration insuffisante dans certains territoires entre le SAMU, les SDIS, et les ambulanciers. Ce problème est aggravé par la carence de la permanence des soins par les médecins de ville. En effet, nous constatons, d'une part, une croissance de la demande de soins d'une population vieillissante et, d'autre part, un effondrement de la démographie médicale dans bon nombre de territoires.

Enfin, il est constaté un empiètement des acteurs privés sur les missions d'urgence et un manque de coordination entre les ministères de la santé et de l'intérieur.

Ainsi, il serait indispensable d'élaborer selon une logique de complémentarité les schémas régionaux d'organisation sanitaire, les SROS, et les schémas départementaux d'analyse et de couverture des risques, les SDACR, afin de tendre vers une optimisation des compétences et des responsabilités.

Le Gouvernement est conscient que ce sujet est considéré comme essentiel par les Français et qu'une réflexion interministérielle associant les élus devrait être menée. Pouvez-vous, madame le ministre, nous préciser sous quelle forme et à quelle échéance cette expérience sera conduite ? La question de la permanence des soins des médecins de ville sera-t-elle intégrée à cette réflexion ?

Je souhaite également aborder le thème de la culture de la sécurité civile.

La loi de modernisation de la sécurité civile s'est fixé comme objectif majeur la diffusion de la culture de la sécurité civile grâce à une meilleure sensibilisation de la population aux risques, ainsi que par un apprentissage de la conduite à tenir en cas de crise.

Si nous pouvons nous féliciter du développement des réserves communales, élaborées par le Sénat en 2004, nous nous interrogeons néanmoins sur l'obligation de formation scolaire qui devait être mise en oeuvre rapidement. En effet, trois ans après le vote de la loi, le dispositif prévu par le ministère de l'éducation nationale semble complexe.

Je suis particulièrement sensible au développement de toutes les actions qui encouragent la citoyenneté. A ce titre, je vous propose, madame le ministre, de vous approprier le concept qui a été mis en oeuvre dans le Haut-Rhin. Ce concept est basé sur un dispositif simple et efficace, applicable à tous les départements dans de brefs délais. Il s'agit de l'opération « Collégiens, citoyens de demain », qui a été mise en oeuvre en 2006 sur l'initiative des sapeurs-pompiers du Haut-Rhin ; elle est organisée sous forme d'interventions dans les collèges, d'exercices interactifs suivis d'un rendu final.

Le succès de ce dispositif est total et l'opération, initialement prévue pour deux ans, doit être pérennisée.

Enfin, il me paraît important de relever les perspectives de renforcement de la coopération européenne.

Bien entendu, la sécurité civile, ou plutôt la protection civile, n'est pas une matière communautaire. Chaque État doit pouvoir garder suffisamment de souplesse décisionnelle pour lutter contre les catastrophes.

Mais certaines expériences de mutualisation de moyens se sont révélées particulièrement efficaces face à des catastrophes de grande ampleur. En 2005, la France a proposé la création de la FIRE, la Force d'intervention rapide européenne. L'été 2006, l'Espagne, l'Italie, le Portugal et la France ont décidé de travailler ensemble en cas d'inondations, de feux et de tremblements de terre. Depuis les feux de grande envergure en Grèce, ce pays envisage de rejoindre cette coopération, qui compte actuellement un détachement de soixante hommes par pays.

À l'occasion de sa prochaine présidence de l'Union européenne, la France veut développer cette force d'intervention européenne de protection civile constituée de moyens nationaux bien recensés au préalable, mais aussi de certains équipements qui feraient partie d'une réserve européenne, notamment les bombardiers d'eau, à l'exemple de FIRE 4.

Pouvez-vous nous donner, madame le ministre, plus de précisions quant aux moyens qui seront mis en oeuvre à cette fin ? La France sera-t-elle prête pour avancer des propositions concrètes en temps utiles ?

Madame le ministre, mes chers collègues, ces observations effectuées, je vous indique que la commission des lois a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Sécurité civile ». (Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. Je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d'intervention générale et celui de l'explication de vote.

Je vous rappelle également qu'en application des décisions de la conférence des présidents aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser 10 minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quinze minutes pour intervenir.

Dans la suite du débat, la parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, compte tenu du peu de temps qui m'est imparti, je me bornerai à formuler cinq observations.

Premièrement, le budget national de la sécurité civile reste bien modique. Les effectifs, en légère diminution pour 2008, passent à 2 563 équivalents temps plein travaillés, contre 2 598 en 2007, et les crédits de paiement accusent une baisse de 2,2 %.

Il convient de mettre cette diminution de la contribution de l'État en relation avec le montant très élevé des dépenses des SDIS, même si ces dernières n'entrent pas dans le champ de la présente mission.

Ainsi, le budget primitif des SDIS dépasse 5 milliards d'euros pour l'année 2007. Cela représente une hausse de 20 % par rapport au compte administratif pour 2006 et une hausse cumulée de près de 40 % par rapport au compte administratif pour 2004. Je tiens à préciser que cette hausse ne résulte pas, comme certains tentent de le faire croire, de la politique de recrutement des SDIS. Les effectifs des sapeurs-pompiers n'ont en effet augmenté que de 0,8 % en 2005 et de 2,6 % en 2006.

La présente mission occulte ainsi complètement le rôle financier joué par les collectivités territoriales en la matière, alors que celles-ci prennent en charge une part beaucoup plus importante que l'État des missions de secours, donc des dépenses qui en découlent.

Ainsi la contribution des départements au financement des SDIS augmente-t-elle chaque année : 48,7 % en 2005, 51, 1 % en 2006 et 52, 1 % en 2007. La contribution des communes et des EPCI s'élève, pour sa part, à 44, 1 % en 2007. À cet égard, il est inquiétant de constater que la suppression des contributions communales, qui devait intervenir dans un premier temps au 1er janvier 2006, puis au 1er janvier 2008, est désormais reportée au 1er janvier 2010.

La principale raison du décalage qui se creuse entre la contribution de l'État et celle des collectivités est à rechercher du côté de la logique du désengagement de l'État, qui se décharge de ses compétences sur les collectivités territoriales sans en assumer la compensation à un niveau suffisant. C'est la conséquence de la loi de 1996, que nous n'avions pas votée en son temps estimant - c'est encore le cas aujourd'hui - que l'État a le devoir d'assurer ses missions régaliennes de sécurité civile sur tout le territoire et de manière équitable.

C'est une question d'égalité des citoyens devant le service public : la population doit pouvoir bénéficier, quelle que soit la richesse du territoire sur lequel elle se trouve, d'une même qualité de secours. Pour ce faire, il revient à l'État de prendre en charge ce grand service public de la sécurité civile et de l'organiser.

Il est temps de mettre un terme à cette situation dans laquelle l'État décide et les collectivités paient.

Deuxièmement, la situation du Fonds d'aide à l'investissement, créé par la loi de finances de 2003 pour soutenir les SDIS dans leurs efforts d'investissements en équipement et en matériels, démontre une nouvelle fois le désengagement patent de l'État.

En effet, alors que l'État devait participer, au travers du FAI, aux dépenses des SDIS, les autorisations de paiement prévues pour ce fonds n'ont cessé de diminuer budget après budget : 67 millions d'euros pour 2006, 37,5 millions d'euros pour 2007 et 28 millions d'euros pour 2008 !

Troisièmement, en 2007, 64 % des SDIS concernent les secours à la personne hors cas d'incendie. L'ampleur prise par les secours à la personne est à mettre en relation avec l'insuffisance de la présence médicale dans certains secteurs de France, singulièrement en milieu rural, à laquelle il conviendrait de remédier.

Parallèlement à la présence des sapeurs-pompiers, qui doivent supporter uniquement les opérations de secours, il importe de veiller au maintien des services médicaux d'urgence, qui relèvent de la solidarité nationale, donc de la responsabilité de l'État : il ne saurait se désengager et faire supporter aux SDIS la prise en charge de missions qui relèvent de l'assurance maladie.

Cette situation pose la question plus générale de l'effondrement de la démographie médicale dans bon nombre de territoires et de la croissance de la demande de soins d'une population vieillissante à laquelle il faut répondre sans remettre en cause le principe de la gratuité des secours. Ce principe garantit l'égalité de tous devant les secours et leur efficacité au profit de l'ensemble de la collectivité.

Quatrièmement, je voudrais vous faire part de mon inquiétude quant à la teneur du rapport spécial réalisé par M. Ginesta pour l'examen de la présente mission à l'Assemblée nationale.

Ses propos, qui résonnent comme en écho au discours prononcé par Nicolas Sarkozy...

M. Éric Doligé. Le Président de la République !

Mme Éliane Assassi. ...le 29 septembre dernier au congrès national des sapeurs-pompiers, ne présagent rien de bon : maîtrise des coûts, pause dans les dépenses, d'une part, en engageant un mouvement de regroupement des casernes, à l'image du regroupement des tribunaux, alors que la proximité des secours ne peut que renforcer l'efficacité des pompiers et, d'autre part, en cessant les recrutements, alors que le présent budget prévoit déjà la diminution des effectifs. Le Gouvernement donne beaucoup de leçons en la matière, alors que la politique de sécurité civile de notre pays est maintenant largement prise en charge par les collectivités.

Enfin, je terminerai mon propos par les modifications de crédits apportées par l'Assemblée nationale à la suite de l'adoption en seconde délibération d'amendements émanant du Gouvernement.

Il a ainsi été décidé de minorer de 200 000 euros les crédits de la présente mission pour gager les ouvertures de crédits opérées en première délibération au profit de la dotation « Présidence de la République » de la mission « Pouvoirs publics ». Cette minoration de crédits sera imputée sur les dépenses de personnel du programme « Coordination des moyens de secours ». Rien que cela !

Il a également été décidé de minorer de 3,2 millions d'euros les crédits de la présente mission pour gager les ouvertures de crédits opérées en seconde délibération. Cette minoration sera imputée sur le programme « Intervention des services opérationnels et sur le programme « Coordination des moyens de secours ».

Nous estimions que les crédits de la présente mission étaient déjà initialement bien modiques, mais force est de constater qu'après leur examen à l'Assemblée nationale et leur amputation de 3, 4 millions d'euros il n'en reste pas grand-chose.

Dans ces conditions, les sénateurs du groupe CRC voteront contre les crédits de la mission « Sécurité civile », car ils ne permettront de répondre ni aux enjeux en matière de sécurité civile, ni aux attentes de nos concitoyens qui souhaitent avoir accès à un service public de qualité, ni aux préoccupations du personnel concerné, qui mériterait pourtant plus de reconnaissance étant donné la difficulté de ses missions.

M. le président. La parole est à M. Georges Othily.

M. Georges Othily. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, les phénomènes naturels, notamment du fait du réchauffement climatique, constituent des menaces qui ne cesseront de croître pour les populations civiles au cours des années à venir. Se pose alors la question essentielle des moyens pour prévenir et combattre ces risques nouveaux et nombreux.

C'est pourquoi, la baisse, même minime, des crédits de paiement de la mission « Sécurité civile » doit être rapportée à l'augmentation très largement supérieure des dépenses des services départementaux d'incendie et de secours.

Si ces dépenses n'entrent pas strictement dans le champ de la mission « Sécurité civile », je m'inquiète de leur montant très élevé, qui fait des SDIS les premiers acteurs de la lutte contre les incendies.

La part la plus importante, soit 58 %, des crédits de cette mission concerne la modernisation des matériels d'intervention sur les risques naturels, technologiques et terroristes ; je m'en réjouis vivement.

Dans ce projet de budget, l'État dégage par ailleurs des ressources pour renforcer les moyens des SDIS dans leur lutte contre les catastrophes naturelles et le secours aux personnes, tout en améliorant la sécurité des sapeurs-pompiers, grâce à l'acquisition de nouvelles tenues de protection et de robots d'intervention sur sites suspects.

Toutefois, les efforts financiers les plus importants pour la sécurité civile sont réalisés par les collectivités territoriales finançant les SDIS, qui assurent l'essentiel des missions de secours. Les comptes administratifs de ces services affichent un coût total de 4,2 milliards d'euros en 2006 et, pour 2007, les dépenses dépassent les 5 milliards d'euros dans les budgets primitifs.

La participation financière des départements représente 53 % du total de ces contributions, contre 47 % pour celle des communes et des EPCI. Ces efforts sont considérables et ils pèsent très lourdement sur les budgets de certaines collectivités territoriales.

C'est le cas, notamment, pour les communes du département de la Guyane, qui peinent à verser leur contribution au budget du SDIS. Malgré les efforts et la bonne volonté des conseils municipaux concernés, cette situation entraîne aujourd'hui d'importants problèmes de trésorerie pour le SDIS, et elle ne fera qu'empirer dans les mois et les années à venir.

En effet, la loi de modernisation de la sécurité civile de 2004 prévoit que, à compter du 1er janvier 2010, les contributions obligatoires des communes seront remplacées par un dégrèvement à due concurrence de la dotation forfaitaire versée par l'État à ces collectivités, ce qui entraînera un prélèvement annuel sur les ressources fiscales de plus de quatre mille d'entre elles.

Non seulement la suppression de la participation financière des communes, remplacée par un prélèvement sur leur dotation forfaitaire, fera disparaître le lien de proximité existant entre les maires et leurs sapeurs-pompiers, mais surtout elle entraînera de grandes difficultés financières pour de nombreuses communes et, par conséquent, pour les SDIS que celles-ci financent en partie.

Madame le ministre, ces communes n'entendent nullement se soustraire à leurs obligations, mais on constate déjà que la plupart d'entre elles, en Guyane, ne parviennent pas à s'y soumettre. Actuellement, la contribution à verser au SDIS ne fait malheureusement pas partie des premières dépenses engagées par les communes du département.

Dès lors, un défi fondamental attend les SDIS : la clarification de leur financement, qui permettra un assainissement, puis un meilleur équilibre de leurs budgets.

Le fonds d'aide à l'investissement spécifique constitue un autre sujet d'inquiétude pour le financement de notre sécurité civile. Créé par la loi de finances pour 2003, il était destiné à accompagner le financement d'opérations prioritaires ou d'intérêt commun des SDIS. Or, aujourd'hui, l'avenir de ce fonds constitue un sujet de préoccupation, du fait de la diminution de près de 10 millions d'euros de ses crédits entre 2007 et 2008.

Cette baisse, constante depuis plusieurs années, ne doit surtout pas conduire l'État à se désengager du financement des investissements des SDIS, car cela signifierait que celui-ci délaisse fortement la politique de sécurité au sens large du terme. N'oublions pas que le budget des SDIS, qui dépasse cette année les 5 milliards d'euros, fait de ces établissements publics autonomes les premiers acteurs de la lutte contre les incendies.

Alors que de dramatiques feux ont embrasé le Péloponnèse et le Portugal, et plus récemment l'État de Californie, provoquant l'évacuation en masse de centaines de milliers de leurs habitants, nous ne devons pas oublier l'urgente nécessité de renforcer notre sécurité civile, qui devra, sans aucun doute, affronter dans l'avenir les conséquences encore inconnues des bouleversements climatiques.

Si la protection civile relève en premier lieu de la compétence des États, conformément au principe de subsidiarité, l'Union européenne a néanmoins été conduite à prendre des initiatives en la matière.

En tout cas, c'est cette dimension européenne de la protection civile que nous voulons développer, car elle nous paraît essentielle. C'est pourquoi je me réjouis aujourd'hui que la réalisation d'un inventaire complet des ressources dont dispose chaque pays en hommes et en matériels, comprenant notamment l'identification des moyens exportables, ait été décidée pour le printemps 2008.

Madame le ministre, à l'heure où la France va prendre la présidence de l'Union européenne pour un semestre, pouvez-vous nous confirmer que notre pays a la volonté de renforcer cette indispensable dimension européenne de la sécurité civile ?

La mission « Sécurité civile » du projet de loi de finances pour 2008 constitue un enjeu essentiel, car la prévention des dangers, le secours, la protection et le sauvetage des victimes font partie des fondements de notre société.

Grâce à des efforts budgétaires importants et continus, la sécurité civile de notre pays s'est considérablement modernisée, mais la route reste longue. L'État doit devenir le meilleur garant possible de la protection de la population. C'est dans cet espoir, du moins, que la majorité du groupe du RDSE votera les crédits de cette mission. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet.

M. Jean-Claude Peyronnet. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, à l'égard des sapeurs-pompiers, comme dans d'autres domaines, il faut bien distinguer les discours et les actes.

Les discours, ce sont les bonnes paroles prononcées, par exemple, lors des congrès de sapeurs-pompiers ; ce sont les annonces de mesures visant à améliorer leur situation qui sont trop souvent financées par d'autres - je pense, notamment, aux « accords Jacob » ; ce sont les discours émouvants aux obsèques de tel ou tel d'entre eux, tombé dans l'exercice d'une mission dangereuse, et auxquels, bien sûr, nous nous associons.

La réalité, ce sont les actes, en particulier financiers, qui devraient concrétiser les propos magnifiant la mission des pompiers. Et là, les choses sont très différentes car, madame le ministre, le budget de la sécurité civile que vous nous présentez n'est pas bon. Les crédits d'État baissent de 2,5 %, passant de 429 millions d'euros à 418 millions d'euros, ce qui est considérable.

Chaque sapeur-pompier doit prendre conscience de cette distorsion entre les bonnes paroles et l'absence de réalisation concrète, ou, plutôt, il doit mesurer que les premières se traduisent surtout par une charge toujours croissante sur les collectivités : d'un côté, il y a l'État, qui distribue les bonnes paroles et impose des mesures d'amélioration de la situation des SDIS ; de l'autre, il y a les assemblées locales qui les financent, notamment les départements pour ce qui concerne les mesures nouvelles.

J'ai suffisamment dénoncé par le passé les dysfonctionnements suscités par ce pilotage bicéphale pour ne pas m'y attarder aujourd'hui. J'insisterai donc sur un aspect de cette question, qui créé actuellement des débats importants et qui suscite une forte irritation chez les pompiers et surtout au sein des collectivités locales, à savoir le secours à personnes.

Ce fut le thème central du congrès des sapeurs pompiers qui s'est tenu récemment à Clermont-Ferrand. Les dysfonctionnements opérationnels entre les SDIS, le SAMU, le SMUR et les ambulances privées ont été au coeur des discussions. Il s'agit, en effet, d'un problème fonctionnel majeur, car ce qui est en cause, c'est la sécurité sanitaire de nos concitoyens, en particulier en zone rurale - autrement dit, sur une très grande partie du territoire.

Va-t-on enfin reconnaître que les secours de sécurité civile font partie à part entière de la chaîne sanitaire ? Je n'entrerai pas dans les détails techniques de cette question opérationnelle, dont chaque président de SDIS connaît la complexité.

Toutefois, madame le ministre, il faut résoudre au plus vite ce problème, qui est technique, mais néanmoins vital, car la situation s'est dégradée et la sécurité des personnes n'est plus assurée dans les meilleures conditions sur certaines parties du territoire. Pour les SDIS, il s'agit d'un problème de reconnaissance, qui présente un aspect fonctionnel majeur, mais c'est aussi une question de dignité.

Les services d'incendie et de secours sont partie intégrante de la chaîne sanitaire. Leur défaillance serait catastrophique pour nos concitoyens sur une grande partie du territoire français. Ils sont compétents, bien équipés et harmonieusement répartis sur l'ensemble des départements, ce qui constitue un gage de l'efficacité des premiers secours. Il est grand temps de concrétiser cette reconnaissance par des conventions claires entre les SDIS et les hôpitaux.

Il ne vous aura pas échappé, madame le ministre, que parallèlement à ce problème fonctionnel se pose une question financière : les SDIS ne refusent pas d'intervenir au-delà de leur mission, pour pallier les carences d'ambulanciers privés qui ont été constatées en matière de secours aux personnes, y compris à domicile, mais ils veulent que ces actions, qui ne figurent pas parmi leurs attributions et qu'ils sont les seuls à pouvoir effectuer dans de bonnes conditions, soient rémunérées de façon raisonnable.

Actuellement, en cas de carence des ambulanciers privés, les SDIS sont rémunérés à hauteur de 105 euros l'intervention, alors que le coût réel de celle-ci avoisine les 500 euros. II faut régler au plus vite ce problème financier en doublant le remboursement, qui passerait ainsi de 105 euros à 210 euros.

Pis, les autres interventions à domicile par appel direct ne sont pas du tout rémunérées. Pas un sou n'est versé ! II est tout à fait scandaleux que l'action sanitaire, qui constitue une partie intégrante de la politique nationale de santé, soit ainsi financée par le contribuable local !

Madame le ministre, il y a urgence. J'ai observé que le Gouvernement avait mis en place, la semaine dernière, un comité quadripartite sur le secours à personnes, et que, pour la première fois, se trouvait posée la question de « la rémunération des interventions réalisées par les SDIS à la demande des SAMU et en dehors de leur mission ».

C'est une bonne nouvelle ! Mais nous attendons tous des solutions rapides, faute de quoi les SDIS enverront les factures aux hôpitaux, et ce seront les tribunaux qui trancheront. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)