M. le président. Le sous-amendement n° 173, présenté par M. Laffitte, est ainsi libellé :

I. - Dans la première et la seconde phrase du troisième alinéa du I de l'amendement n° 170, remplacer les mots :

depuis moins de cinq ans

par les mots :

dans l'année civile

II. - Compléter la seconde phrase du troisième alinéa du même I par les mots :

, ou au capital d'un incubateur d'entreprises

La parole est à M. Pierre Laffitte.

M. Pierre Laffitte. Ce sous-amendement va tout à fait dans le sens de la position qu'a brillamment défendue le rapporteur général puisqu'il a pour objet, d'une part, de concentrer les effets du dispositif de réduction de l'ISF sur la toute première phase de la vie des entreprises nouvellement créées, c'est-à-dire de le limiter à la première année d'activité, et, d'autre part, d'inclure la participation au capital d'incubateurs d'entreprises.

Il s'agit de conduire les FCPI à privilégier la phase la plus cruciale de la création des entreprises - nous avons longuement débattu de ce point lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2008 -, pour laquelle la France et l'Europe, malheureusement, sont extraordinairement sous-équipées.

M. le président. L'amendement n° 24 rectifié, présenté par MM. Adnot, Bizet, Beaumont et Darniche, Mme Desmarescaux et MM. Türk et Masson, est ainsi libellé :

I. - Après le 2° du II de cet article, insérer deux alinéas rédigés comme suit :

...° Le 1 du II est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Si les titres sont cédés pendant le délai de conservation, pour cause de cession stipulée obligatoire par un pacte d'associés ou d'actionnaires ou pour cause de toute opération sur le capital entraînant une prise de contrôle majoritaire de celui-ci, cette condition de conservation sera considérée comme remplie, dès lors que le prix de souscription des titres cédés sera intégralement réinvesti, dans un délai maximum de six mois à compter de la réalisation effective de la cession, en souscription de nouveaux titres de sociétés exerçant une des activités mentionnées au b du 1 du I. Les titres ainsi souscrits devront être conservés jusqu'à expiration du délai de conservation qui s'appliquait aux titres cédés. La disposition susvisée ne s'applique pas si les titres détenus et cédés correspondent à un bloc de contrôle majoritaire en capital et/ou en droits de vote. »

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes pour l'État résultant du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Philippe Adnot.

M. Philippe Adnot. J'ai déjà défendu cet amendement cet été, et je l'ai encore défendu il y a quelques jours...

À cette dernière occasion, M. Éric Woerth m'a demandé de le modifier de manière qu'il puisse être accepté. J'espère que c'est là le sort qu'il connaîtra ce soir !

L'objet en est tout simple : il s'agit, lorsqu'un quota de placements a été défini dans les entreprises de moins de cinq ans, de tenir compte du pacte d'actionnaires.

Vous le savez, au moment de la création d'une entreprise, c'est-à-dire au moment de la répartition du capital, des pactes d'actionnaires peuvent être conclus qui incluent une clause de cession obligatoire de leurs parts si l'arrivée d'un investisseur important le rend nécessaire lors du premier ou du deuxième tour.

Si, à titre individuel, dans le cadre d'une holding ou d'un fonds d'investissement, on est obligé de vendre ses parts avant les cinq ans, on perd le bénéfice de l'exonération fiscale. Mon amendement vise à faire en sorte que ce droit à exonération soit maintenu, d'abord, si ce sont les actionnaires minoritaires qui sont mis dans l'obligation de vendre et, ensuite, si le produit de la vente est réinvesti dans des placements visant des cibles de même type.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. L'amendement n° 58 vise à supprimer le dispositif voté cet été et même celui de la loi Dutreil : il est donc contraire aux conceptions de la majorité de la commission et celle-ci ne peut qu'émettre un avis défavorable.

Par l'amendement n° 26 rectifié bis, Philippe Adnot sollicite du Gouvernement une interprétation du droit communautaire. Cet amendement vise, en particulier, la catégorie des entreprises dites « en expansion », selon la terminologie communautaire.

M. Philippe Adnot. J'ai retiré cet amendement avant la séance !

M. Philippe Marini, rapporteur général. En effet, monsieur Adnot, mais je vais sans doute être amené à le reprendre, au nom de la commission, car je souhaite entendre le Gouvernement sur le point que vous avez soulevé.

En effet, madame le ministre, c'est un point réellement très important. Les règles communautaires prévoient que ne sont éligibles sur l'ensemble du territoire que les petites entreprises de moins de cinquante salariés, les entreprises moyennes n'étant éligibles que dans les zones dites « assistées ». Or Philippe Adnot avait souhaité que le dispositif soit ouvert aux entreprises en expansion quel que soit le lieu d'implantation.

J'ai donc cherché une carte des zones d'aides à finalité régionale adoptée par la Commission européenne le 7 mars 2007 ; c'est en cours de transposition en droit interne par un décret en Conseil d'État. (M. le rapporteur général montre une carte de France.)

Cette carte pose de réels problèmes. Les zones blanches l'emportent, au moins en superficie, très largement sur les zones teintées. La Champagne compte quelques zones teintées, la Picardie également, mais le département des Alpes-Maritimes -c'est assez significatif - est très largement blanc...

Cela veut dire que, si l'on en restait à la version des députés, il est beaucoup de zones de notre territoire, voire dans des départements entiers où il ne serait pas possible d'investir au titre du dispositif ici visé dans des PME dites « en expansion », selon cette terminologie communautaire, donc forcément très complexe et peu accessible au commun des mortels.

La commission sollicite également du Gouvernement une interprétation des règles communautaires, pour autant que l'on soit en mesure de la faire sans négociation préalable avec la Commission.

M. le président. Monsieur le rapporteur général, vous avez laissé entendre que vous pourriez reprendre l'amendement n° 26 rectifié bis mais, celui-ci n'ayant pas été défendu puisqu'il a été retiré avant la séance, aux termes de notre règlement, ce n'est pas possible. En revanche, vous avez tout loisir de déposer, à tout moment, au nom de la commission, un amendement ayant exactement le même objet. Est-ce le cas ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. Oui, monsieur le président : ainsi, le débat pourra se poursuivre.

M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 26 rectifié ter, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, et ainsi libellé :

Dans le deuxième alinéa (f) du 1° du II de cet article, après les mots :

expansion au sens

insérer les mots :

économique du capital-risque et du capital investissement, tels que définis par

et remplacer le mot :

des

par le mot :

les

enfin, après les mots :

petites et moyennes entreprises (2006/C 194/02)

ajouter les mots :

quel que soit le zonage de la région dans laquelle est sise l'entreprise

Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Sur l'amendement n° 25 rectifié, la commission souhaite également connaître l'avis du Gouvernement.

L'amendement n° 170 et le sous-amendement n° 173 visent à assouplir le dispositif dû à l'initiative de M. Fourgous et de quelques-uns de ses collègues de l'Assemblée nationale en ce qui concerne le quota de souscriptions éligibles à la réduction de cotisation d'ISF.

L'amendement n° 170 aurait pour effet de ramener ce quota à 20 % s'agissant de titres d'entreprises de moins de cinq ans, au lieu de 40 %. De ce fait, on alignerait la structure des actifs sur les dispositions prévues pour les FIP dans le dispositif adopté l'été dernier.

J'avoue ne pas très bien comprendre l'intérêt de rendre éligibles encore plus d'outils qui seraient finalement assez peu investis dans des entreprises nouvelles, donc a priori réellement innovantes.

La commission entendra, bien sûr, avec intérêt l'avis du Gouvernement sur cet amendement ainsi que sur le sous-amendement de M. Laffitte, tout en insistant sur le fait qu'à ce stade la suppression du dispositif lui paraît préférable.

Quant à l'amendement n° 24 rectifié, il vise à tenir compte des pactes d'actionnaires ayant cours dans certaines entreprises en phase de croissance et qui contiennent fréquemment des clauses de cession obligatoires dites « clauses de sortie ». Dans ce cadre, il est proposé des cessions de participation dès lors que le contribuable réinvestit les sommes concernées dans de nouvelles entreprises éligibles. Cela conduirait à modifier sensiblement l'obligation de conservation des titres souscrits, mais ce serait assez conforme à l'idée d'un assouplissement des engagements pris et, de ce point de vue, la commission sera, bien entendu, très attentive à l'avis du Gouvernement, car il sera susceptible de nous guider pour l'évolution des textes en la matière.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi. Je répondrai d'abord à M. le rapporteur général sur l'amendement n° 7.

C'est un débat que nous avons déjà eu longuement lors de l'examen de la loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat, la loi TEPA. Il s'agissait de déterminer de quelle manière nous pouvions mettre en place cette « exonération » d'impôt de solidarité sur la fortune au bénéfice des contribuables qui accepteraient de participer au capital de petites et moyennes entreprises, et cela en visant un double objectif : d'une part, canaliser les financements vers les petites et moyennes entreprises, qui ont, nous le savons, besoin de ces financements ; d'autre part, renforcer l'affectio societatis chez ceux de nos compatriotes qui sont soumis à l'ISF pour leur faire mieux comprendre l'entreprise, ses modalités de fonctionnement, ses nécessités et ses logiques d'investissement.

La mesure sur laquelle nous avions trouvé un accord à l'époque me paraissait conforme à ces deux objectifs.

Or, à l'Assemblée nationale, lors de la discussion du présent projet de loi de finances rectificative, certains députés ont proposé : premièrement, d'étendre le dispositif aux souscriptions de parts de fonds communs de placement dans l'innovation et de fonds communs de placement à risque ; deuxièmement, de rendre compatible le dispositif avec les lignes directrices communautaires en matière de capital investissement, pour sortir de la règle rigoureuse du de minimis.

Ces deux objectifs avaient également pour conséquence d'augmenter le plafond annuel de la réduction d'ISF de 10 000 euros à 25 000 euros pour les souscriptions aux parts des différents fonds d'investissement.

Nous avons procédé à un certain nombre d'études et nous avons consulté la Commission, qui nous a confirmé qu'un régime similaire avait été mis en oeuvre en Irlande et avait été considéré comme compatible avec le marché commun.

Toutefois, le Gouvernement émet un avis défavorable sur votre amendement de suppression, monsieur le rapporteur général, et ce pour les raisons suivantes.

D'abord, vous avez évoqué la notion de risque. Quelle que soit la nature de l'investissement, qu'il s'agisse d'un investissement de proximité ou d'un investissement passant par le canal d'un FCPI ou d'un FCPR, le risque est toujours le même : il est inhérent à ce type d'investissement, bien que les événements de l'été dernier aient pu nous laisser penser que les investissements dans les FCP n'étaient pas non plus nécessairement des placements de père de famille...

Ensuite, même si la nécessité de renforcer l'affectio societatis, de développer la fibre « pro-entreprise » parmi les contribuables de l'ISF est louable, le risque existe, souligné notamment par un certain nombre de représentants des petites et moyennes entreprises, que l'investissement ne se porte pas naturellement vers ces dernières.

En effet, il serait à craindre que des redevables de l'ISF, parce qu'ils ne connaissent pas suffisamment les petites et moyennes entreprises qui les environnent -  et c'est le cas de bon nombre d'entre eux - ou surtout parce qu'ils n'ont pas le temps de chercher à savoir quelles sont les petites et moyennes entreprises de proximité qui ont besoin de financement, ne se disent qu'il est plus simple de passer par le percepteur plutôt que de passer par l'entrepreneur et, finalement, ne renoncent purement et simplement à investir, remettant ainsi en cause notre premier objectif, qui est, je le rappelle, d'orienter plus d'épargne vers des investissements dans les petites et moyennes entreprises.

C'est pourquoi, même si je fais totalement miens les deux objectifs retenus l'été dernier dans le cadre de l'adoption de la loi TEPA, je crois souhaitable de conserver le dispositif Fourgous dans sa rédaction actuelle.

Il est essentiel de réaliser cet objectif, primordial à mes yeux, consistant à orienter les investissements vers les petites et moyennes entreprises non seulement de manière directe, mais aussi par le biais des FIP, des FCPI ou des FCPR. Et je souhaiterais d'ailleurs que nous puissions aussi évoquer d'autres pistes.

C'est pour ces différentes raisons que le Gouvernement est à la suppression de l'article 20 ter.

Pour ce qui concerne l'amendement n° 58, qui vise à abroger l'article 885 I ter du code général des impôts et, donc, à supprimer les dispositions de la loi Dutreil, le Gouvernement partage l'avis défavorable de la commission.

S'agissant de l'amendement n° 26 rectifié ter, le Gouvernement émet un avis défavorable.

En effet, nous sommes actuellement au coeur des négociations avec la Commission européenne, et vous avez eu raison de montrer tout à l'heure, monsieur le rapporteur général, la carte de France des zones d'aides à finalité régionale. La volonté du Gouvernement est d'obtenir de la Commission européenne l'autorisation d'aider toutes les PME sur l'intégralité de notre territoire, et pas seulement dans les zones teintées de la carte. Le texte actuel que nous venons de transmettre pourrait permettre une interprétation extensive des conditions fixées par les lignes directrices. En conséquence, il ne nous semble pas souhaitable d'adopter l'amendement n° 26 rectifié ter.

Pour des raisons qui tiennent encore au droit communautaire, le Gouvernement émet également un avis défavorable sur l'amendement n° 25 rectifié.

En effet, la proposition de M. Adnot va bien au-delà des limites autorisées par le texte puisqu'elle conduirait à porter le montant des investissements à 3 millions d'euros dans le cadre des investissements intermédiés et à 2 millions d'euros dans le cadre des investissements directs. Or, on le sait, c'est sur une base inférieure de moitié, soit 1,5 million d'euros par entreprise cible et par période de douze mois, que l'on peut aborder ce projet d'investissement.

En revanche, le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 170, dont l'objet est de revenir à une meilleure parité entre les risques pris en alignant le dispositif de réduction de l'ISF des FCPI sur celui des FPI, à condition que leur actif soit constitué au moins à hauteur de 20 %, au lieu de 40 %, de titres de petites et moyennes entreprises.

En revanche, pour des raisons de simplicité, le Gouvernement est défavorable au sous-amendement n° 173, qui se situe dans le prolongement de celui qui a été adopté par le Sénat lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2008, puis supprimé par la commission mixte paritaire. Vous le comprendrez, le Gouvernement ne peut souscrire à la proposition de durcir le quota en le réservant à des sociétés de moins d'un an. La rédaction du texte tel qu'il vous est soumis nous paraît à cet égard plutôt équilibrée.

Enfin, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° 24 rectifié.

Nous avons eu l'occasion, lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2008, d'évoquer la clause de réemploi que l'on trouve régulièrement dans les pactes d'actionnaires. Le débat que nous avons eu a été, je le sais, long et laborieux, et je vous remercie infiniment, mesdames, messieurs les sénateurs, d'avoir contribué à améliorer le texte. Cela étant, la condition de conservation des titres pendant cinq ans constitue en l'état la seule obligation mise à la charge du contribuable en contrepartie de la réduction de l'ISF à laquelle ouvre droit son investissement. Le Gouvernement estime que ce dispositif ne doit pas fonctionner comme une espèce d'enveloppe d'épargne défiscalisée qui pourrait, en quelque sorte, tourner.

En outre, je crois que cette clause de réemploi - c'est un argument majeur - serait excessivement difficile à suivre pour l'administration fiscale française et nuirait infiniment à la sécurité du dispositif.

Pour autant, je l'ai déjà dit à M. le président de la commission des finances et à M. le rapporteur général, le Gouvernement sera extrêmement attentif à toute proposition susceptible de conforter la réalisation de son objectif premier, à savoir diriger de l'épargne vers les petites et moyennes entreprises, même si cela se fait un peu - et nous pouvons le regretter - au détriment du second objectif, qui est de rapprocher le contribuable redevable de l'ISF d'une petite ou moyenne entreprise de proximité ou d'un FIP qui lui correspond.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Je remercie Mme le ministre des analyses qu'elle nous a livrées, mais je souhaiterais rappeler quelques éléments d'information supplémentaires pour permettre à la Haute Assemblée de se prononcer en toute connaissance de cause.

Dans un entretien publié le 23 janvier 2007, Nicolas Sarkozy, alors candidat à l'élection présidentielle, s'exprimait de façon extrêmement claire : « Il faut faire revenir les patrimoines et créer une nouvelle génération de capitalistes familiaux, qui investissent dans les PME et au service de l'emploi. J'entends donc donner à ceux qui paient l'ISF la possibilité de déduire de cet impôt, par exemple jusqu'à 50 000 euros, à condition de l'investir dans les PME. Je veux que tous ceux qui ont des projets puissent les financer et pas seulement dans la high tech ou dans Internet. »

Et, le 21 octobre 2004, Nicolas Sarkozy, alors ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, déclarait à l'Assemblée nationale : « Mais je dois à la vérité de dire, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur général, que le Gouvernement serait extrêmement réservé sur la possibilité de choisir des fonds communs de placement. Nous considérons en effet que, pour utiliser au mieux l'argent de l'ISF, celui-ci doit être sorti des dépenses publiques pour aller directement dans le tissu des PME. À vous de nous dire combien et de fixer le cadre. »

J'avoue ne pas comprendre au nom de quoi s'opérerait un changement complet de philosophie.

Contrairement aux informations diffusées complaisamment ces derniers temps dans les milieux financiers, certains professionnels et certaines personnes d'influence sur le plan local organisent déjà le versement direct à des PME ou s'y préparent.

Je recevais, voilà quelques jours encore, un message d'un club, comme il doit en exister des dizaines dans notre pays, qui s'intitule Club-ISF-PME, dont je vous donne lecture, mes chers collègues : « Notre initiative répond à la question souvent opposée à la mesure TEPA concernant l'ISF prétendant qu'il sera impossible pour les investisseurs qui le souhaiteraient de trouver des PME pour y investir directement. Nous pensons qu'en s'appuyant sur la profession des experts-comptables, entre autres, comme dans notre projet, cette possibilité pourrait se développer sans nuire aux autres circuits de financement. Ce dispositif, selon nous, s'adresse aux petites entreprises, tandis que les fonds de placement ne s'intéressent généralement qu'à des investissements plus importants, qui nécessitent des regroupements au-delà de 50 000 euros et excluent de leurs circuits de financement les trop petites PME. »

Je crois que ce message est empreint de bon sens, et nous pouvons connaître dans nos départements bien des initiatives de cette nature.

Enfin, je reviens sur le zonage communautaire, car les députés se sont placés dans le cadre des lignes directrices de la Commission européenne. En principe, celles-ci s'appliquent sur ce zonage. Peut-on supposer une seconde, mes chers collègues, qu'à Paris et en Île-de-France, il n'y a pas une PME qui puisse bénéficier de tels investissements directs sous prétexte que l'Île-de-France n'abrite pas de zones teintées ? Comment imaginer une mesure susceptible d'inciter des redevables de l'ISF à investir dans une PME si on leur interdit de le faire à Paris et en Île-de-France ? C'est absolument impensable !

M. Michel Charasse. C'est un fou de Bruxelles qui a fait cette carte ! (Sourires.)

M. Philippe Marini, rapporteur général. Il y a effectivement de quoi se poser la question !

En outre, ce qui m'a beaucoup choqué dans le vote de l'Assemblée nationale, c'est non seulement que les députés ont substitué une nouvelle rédaction à celle qui a été adoptée au mois de juillet dernier, mais encore qu'ils ont procédé par exclusion. S'ils avaient procédé de manière additive, nous aurions éventuellement pu trouver un équilibre raisonnable. Mais supprimer purement et simplement la possibilité d'investir directement, dans le respect du de minimis, 200 000 euros sur trois ans dans une PME ou TPE de proximité que l'on connaît, c'est proprement invraisemblable !

Nous ne pouvons évidemment pas souscrire à cette approche, qui consacre quasiment l'exclusivité des réseaux bancaires, car c'est une vraie erreur de fond !

Sans doute faudra-t-il, madame la ministre, que, lors de la réunion de la commission mixte paritaire, nous trouvions, avec nos collègues députés, la rédaction adéquate, à laquelle nous ne sommes pas encore parvenus ce soir.

Je suis désolé de vous contredire, madame la ministre, car vous savez quelle considération, quelle estime et, à certains égards, quelle admiration (Exclamations sur les travées de l'UMP) la commission des finances a pour vous-même et pour votre action, mais, malgré ces sentiments très sincères qu'elle vous exprime,...

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. J'en témoigne !

M. Philippe Marini, rapporteur général. ... il lui semble vraiment préférable, pour se placer dans la meilleure position possible en vue de la préparation des travaux de la commission mixte paritaire, de voter ce soir la suppression du dispositif adopté par l'Assemblée nationale.

M. le président. La parole est à M. Pierre Laffitte, pour explication de vote sur l'amendement n° 7.

M. Pierre Laffitte. Madame la ministre, je partage l'admiration de notre rapporteur général pour vos compétences et vos qualités ! (Mêmes mouvements sur les mêmes travées.) C'est pourquoi je me permettrai d'insister surtout auprès de mes collègues, car c'est un point que vous connaissez parfaitement.

Pourquoi, aux États-Unis, tant de start up prennent-elles très vite leur essor ? Tout simplement grâce à la présence de très nombreux business angels, qui sont en outre beaucoup plus riches qu'en France.

Désormais la loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat permet de favoriser le contact direct entre des gens riches, qui sont incités à devenir des investisseurs, et des inventeurs et des créateurs d'entreprise. C'est cela qu'il faut absolument développer, et vous avez confirmé, madame la ministre, qu'il s'agissait là d'un de vos objectifs majeurs, ce dont je ne peux que me féliciter.

En vérité, le problème est d'ordre psychologique : ceux qui ont de l'argent doivent être convaincus qu'il est juste et utile d'investir dans ce qui assurera la croissance future, donc dans l'innovation. Et celle-ci trouve sa source dans les incubateurs d'entreprises, chez les universitaires, chez tous ceux qui ont envie de créer, d'explorer de nouvelles voies, quel que soit leur domaine d'action !

Malheureusement, en France, ils ont beaucoup de mal à trouver de l'argent. Leur fait défaut ce qu'on appelle chez les Anglo-Saxons le love money, l'argent de l'amour, apporté par la famille et les amis. Or cet argent est essentiel pour le démarrage des entreprises. Dans le meilleur des cas, ils parviennent tout juste à réunir 100 000 euros ! Aux États-Unis, pour des projets similaires, les créateurs d'entreprise réussissent à recueillir des millions ! Comment, dès lors, pourrions-nous lutter sur le terrain de l'innovation ? Pourtant, ce ne sont pas les idées qui manquent ! Mais ceux qui en ont s'en vont les développer ailleurs, dans les pays où cela leur est possible !

Je l'ai dit, nous avons maintenant à notre disposition le moyen d'inciter les gens riches à investir. Alors, évitons de diluer l'argent dans des FCPI où, nous le savons, la moitié des fonds récoltés est en fait investie dans des entreprises déjà bien implantées et qui ont beaucoup moins besoin de ces apports extérieurs !

Par conséquent, il faut que les personnes qui ont de l'argent puissent investir des entreprises dès le début de la vie de celles-ci, et aussi d'investir dans des incubateurs. Je trouve tout à fait déplorable que cette disposition ait été supprimée par la commission mixte paritaire réunie sur la loi TEPA ! C'est même catastrophique ! J'avais déjà trouvé dans mon département des dizaines de personnes prêtes à investir dans des incubateurs privés ou publics, ce qui aurait permis de renforcer les capacités de ceux-ci !

La comparaison entre nos incubateurs français et ceux d'Israël, des États-Unis ou des pays nordiques est effarante ! Il s'agit donc là d'un problème majeur et la position de notre rapporteur général est la bonne !

M. Gérard Longuet. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot, pour explication de vote.

M. Philippe Adnot. Permettez-moi tout d'abord de remercier M. le rapporteur général d'avoir repris mon amendement n° 26 rectifié bis.

Dans un premier temps, je m'étais rendu aux arguments du Gouvernement et j'avais accepté de le retirer pour être agréable à Mme la ministre. Mais le problème que M. le rapporteur général a très bien exposé est réel, et je me sens maintenant complètement floué.

Que nous proposez-vous en cet instant ? De ne pas retenir le pacte d'actionnaires, de ramener le quota d'investissement à 20 %, mais d'élargir le champ de la réduction d'impôt de solidarité sur la fortune pour investissement dans les PME aux parts souscrites dans les fonds communs de placement à risque et les fonds communs de placement dans l'innovation.

Pourquoi avoir créé les fonds d'investissement de proximité si ce n'est pour favoriser l'investissement direct dans les entreprises et alimenter les PME ? Car, nous le savons tous, ce ne sont pas les FCPI et les FCPR qui les irrigueront ! Leurs possibilités d'investissement sont limitées pour les PME et ils se tournent davantage vers les entreprises plus importantes. La cause que nous avions défendue, celle des fonds d'investissement de proximité, était donc juste !

Ce matin se tenait dans mon département une réunion de quarante investisseurs de proximité. Obligés de signer des pactes d'actionnaires dans des PME de croissance, des start up, ils seront dans l'impossibilité d'en sortir. Pourtant, ils devaient pouvoir réinvestir sur la même cible et il était prévu que le dispositif s'adresserait à des investisseurs minoritaires et non majoritaires.

Quand je vois la direction qui est prise, je suis déçu de m'être rendu aux arguments du Gouvernement et d'avoir accepté de retirer mon amendement. Finalement, on ne va favoriser que l'investissement dans les très grandes entreprises. Notre objectif ne sera pas atteint, car nous ne parviendrons pas à irriguer l'économie régionale. C'est bien triste !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur le président, je souhaite une brève suspension de séance, le temps de nous accorder sur des objectifs que, me semble-t-il, nous partageons et d'affiner les modalités de réalisation du dispositif.

M. le président. Le Sénat va, bien sûr, accéder à votre demande, madame la ministre.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-deux heures trente-cinq, est reprise à vingt-deux heures cinquante.)

M. le président. La séance est reprise.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous avons réfléchi à une rédaction différente de l'article 20 ter en ayant essentiellement à l'esprit trois objectifs.

Premièrement, il s'agit de faire coexister le dispositif adopté cet été dans la loi TEPA et le régime intermédié. Deuxièmement, nous avons souhaité soumettre la mise en oeuvre du régime intermédié à la décision de la Commission européenne. Troisièmement, nous avons modifié le quota d'investissement fixé par les députés pour le nouveau régime intermédié en le faisant passer de 25 000 euros à 15 000 euros.

Tels sont les trois éléments sur lesquels nous nous sommes fondés pour élaborer l'amendement n° 194, qui remplace l'amendement n° 7, lequel se trouve, par le fait même, retiré.

M. le président. L'amendement n° 7 est retiré.

Je suis donc saisi d'un amendement n° 194, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, et ainsi libellé :

I.- Rédiger ainsi le 5° du II de cet article :

5° Le VI est ainsi rédigé :

« VI.- Lorsque les conditions prévues par les f, g et h du 1 du I ne sont pas cumulativement satisfaites par les sociétés bénéficiaires des versements mentionnées au 1 du I, le bénéfice des dispositions des I à III est subordonné au respect du règlement (CE) n° 1998/2006 de la Commission du 15 décembre 2006 concernant l'application des articles 87 et 88 du traité aux aides de minimis. »

II.- Après le 5° du II de cet article, insérer un II bis ainsi rédigé :

« II bis. 1. Lorsque les conditions prévues par les f, g et h du 1 du I de l'article 885-0 V bis du code général des impôts sont satisfaites par les sociétés bénéficiaires des versements mentionnées au 1 du I de cet article, le bénéfice des dispositions des I à III de cet article n'est pas subordonné au respect du règlement (CE) n° 1998/2006 de la Commission du 15 décembre 2006 concernant l'application des articles 87 et 88 du traité aux aides de minimis. »

« 2. Lorsque les conditions prévues par les f, g et h du 1 du I de l'article 885-0 V bis du code général des impôts sont satisfaites par les sociétés bénéficiaires des versements mentionnées au 1 du I de cet article, le bénéfice des dispositions des I à III de cet article est subordonné au respect du règlement (CE) n° 1998/2006 de la Commission du 15 décembre 2006 concernant l'application des articles 87 et 88 du traité aux aides de minimis. »

III.- Rédiger ainsi le IV de cet article :

« IV.- Le 1. du II bis entre en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard le 30 juin 2008. Le 2. du II bis s'applique jusqu'à l'entrée en vigueur du 1. »

V.- Rédiger ainsi le 4° du II de cet article :

« 4° Dans la première phrase du 2 du III, le montant : "10 000 €" est remplacé par le montant : "15 000 €"; »

Quel est l'avis du Gouvernement sur cet amendement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Je confirme l'accord passé entre la commission et le Gouvernement sur cet amendement, en précisant qu'il s'agit, me semble-t-il, d'un excellent compromis, de nature à répondre aux objectifs que nous nous étions fixés et qui consacre en outre un principe de liberté puisqu'il préserve les dispositions résultant de la loi TEPA et du mécanisme suggéré par l'Assemblée nationale dans le cadre de l'amendement Fourgous. La formule intermédiée est donc restreinte par le nouveau plafond introduit par l'amendement n° 194.

Monsieur Laffite, je tiens simplement à vous confirmer que les incubateurs sont, bien entendu, couverts par le mécanisme actuel dans la mesure où ils sont eux-mêmes des sociétés. Quand bien même ils correspondraient à des fondations ou à des oeuvres, dès lors que celles-ci seraient déclarées d'utilité publique, elles pourraient bien entendu bénéficier, elles aussi, du mécanisme.

Je pense que ces précisions répondent à votre souci d'offrir les meilleures conditions financières, comme c'est le cas avec les business angels aux États-Unis, pour encourager nos petites et moyennes entreprises.

M. le président. La parole est à M. Pierre Laffitte, pour explication de vote.

M. Pierre Laffitte. Madame la ministre, je tiens à vous remercier des précisions que vous venez d'apporter. Je m'inquiète tout de même d'une éventuelle dilution vers des organismes qui n'auraient pas une obligation de financement partiel des petites entreprises nouvellement créées.

En effet, je connais trop le fonctionnement des FCPI ou des FCPR pour ignorer qu'ils n'aiment pas les grands risques, ce qui est au demeurant conforme à leur fonction.

Par conséquent, les sociétés qui en sont à un stade tout à fait initial risquent d'être évincées d'une partie des financements ouvrant droit à la réduction de l'impôt de solidarité sur la fortune.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je me réjouis de ce compromis, qui, je le crois, est équilibré.

Je souhaite également apaiser vos craintes, monsieur Laffitte.

En effet, nous restons attachés à notre principe de base, à savoir la réhabilitation de l'affectio societatis et le lien direct entre l'investisseur et l'entreprise. À cet égard, cet amendement permet d'élargir considérablement la cible : outre les PME communautaires sous plafond de minimis de 200 000 euros, seront concernées les PME en phase d'amorçage, de démarrage ou d'expansion sous plafond maximal de 1,5 million d'euros, ce qui constitue un progrès tout à fait appréciable, qui répond à votre préoccupation.

Pour le reste, je voudrais vous dire que ceux qui passeront par l'intermédiation devront bien réfléchir. Peut-être faudra-t-il d'ailleurs, dans une ultime rédaction, opérer une distinction entre, d'une part, les fonds d'investissement de proximité et, d'autre part, les FCPR et les FCPI.

Prenons en effet le cas d'un FCPR ou d'un FCPI dont l'investissement dans les entreprises ciblées représenterait 20 % des titres. Sachant que la déduction fiscale est de 50 %, elle ne s'appliquerait qu'à 10 % du montant investi. La déduction d'ISF étant plafonnée à 15 000 euros, pour en bénéficier, le contribuable devra souscrire 150 000 euros, ce qui n'est pas à la portée de tous.

À mes yeux, nous avons trouvé un équilibre de bon aloi tout en restant fidèles à notre attachement à la réhabilitation de l'affectio societatis, pour que prospère dans ce pays l'esprit d'entreprise.