Mme Nicole Bricq. Je veux bien considérer cet amendement comme un amendement d’appel dans la mesure où nous l’avions déjà déposé en loi de finances rectificative, quand vous avez modifié en profondeur le crédit impôt recherche.

Nous avions exprimé, à l’époque, notre crainte de voir le dispositif profiter d’abord aux grandes entreprises ; cette inquiétude n’est pas dissipée. Je rappelle que, dans le rapport écrit, le crédit d’impôt est évalué à un montant variant entre 3,5 milliards et 4,5 milliards d’euros en année pleine. C’est énorme ! Je l’ai dit hier soir, c’est l’équivalent de l’ISF. Raison de plus pour maintenir cet impôt, d’ailleurs…

Le texte qui nous est soumis prétend renforcer l’attractivité et la compétitivité. Or nous n’avons toujours pas de réaction par rapport à la situation que nous avons signalée il y a six mois, celle des grandes entreprises, qui seraient les premières bénéficiaires –  à hauteur de 80 %, me dit-on – de ce crédit d’impôt recherche, et qui délocalisent actuellement leurs centres de recherche.

J’attire votre attention sur ce point essentiel : que font les virtuels- et heureux !-destinataires du CIR ? Ils délocalisent leurs centres de recherche ! Et cela ne les empêcherait pas de bénéficier tout de même du crédit d’impôt, alors que les PME, qui, elles, ne délocalisent pas, n’y auraient pas droit ?

De surcroît, encore selon certaines rumeurs, madame la ministre, vos services examineraient une nouvelle modification du crédit d’impôt recherche afin de réintégrer les avances remboursables.

Je dirai ultérieurement ce que je pense du rescrit concernant le crédit d’impôt recherche. Pour ce qui concerne cet amendement, je suis tout à fait prête à le retirer si vous nous donnez des informations chiffrées. Si vous n’êtes pas en mesure de le faire aujourd'hui, je souhaiterais que vous vous engagiez à nous les transmettre lors de l’examen de la prochaine loi de finances.

S’il apparaît que mes réserves sont fondées, je le dis à nos collègues, il vous faudra comprendre que ce texte n’est pas fait pour renforcer la compétitivité des PME et qu’il est destiné aux grandes entreprises qui délocalisent leurs centres de recherches !

M. le président. L'amendement n° 743, présenté par M. C. Gaudin et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Supprimer le second alinéa du II de cet article.

La parole est à Mme Anne-Marie Payet.

Mme Anne-Marie Payet. Depuis la loi de finances pour 2008, l'absence de réponse de l'administration fiscale dans le délai de trois mois suivant une demande d'une entreprise vaut accord tacite sur le principe de l'admission des dépenses dans le calcul du crédit d’impôt recherche et fait donc obstacle à la remise en cause de l'avantage fiscal qui serait fondée sur une appréciation différente lors d'un contrôle ultérieur.

Le 2° du paragraphe I de l’article 36 permet aux redevables de s'adresser directement aux services du ministère de la recherche ou à un organisme chargé de l'innovation pour demander si leur projet de dépenses de recherche est éligible au crédit d'impôt recherche.

Cette mesure n'a de sens et d'efficacité que si un délai est imposé pour la réponse. Le report de l'entrée en vigueur de cette disposition à 2010 rend la mesure inutile jusqu'à cette date.

En effet, le contribuable qui adresse une demande doit être en mesure de déterminer rapidement si son projet présente un caractère scientifique et technique qui le rend éligible au crédit d'impôt recherche. Le délai de réponse de trois mois doit donc impérativement être exigé dès le 1er janvier 2009, comme le reste des dispositions de cet article.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. L’amendement n° 481 visant à supprimer l’article 36, nos collègues du groupe CRC ne seront pas surpris que j’exprime un avis négatif. (Sourires.)

L’amendement n° 739 vise à contraindre l’administration de la recherche et les organismes habilités à traiter les demandes de rescrit, en pratique OSEO, à motiver toute réponse négative. La commission est sensible à cette demande. Elle souhaite entendre l’avis du Gouvernement et s’en remet à la sagesse du Sénat.

La commission a adopté la même position sur l’amendement n° 740.

J’en viens à l’amendement n° 369. La commission y est défavorable dans la mesure où il tend à revenir de manière significative sur la réforme du crédit d’impôt recherche décidée dans la loi de finances pour 2008.

Cette réforme a été qualifiée de robuste ; ses objectifs sont clairs. Elle peut laisser sur le côté telle ou telle catégorie d’entreprises, mais ses effets économiques me paraissent indéniables. C’est un dispositif beaucoup plus puissant que le précédent, et nous l’avions soutenu. Il serait sans doute malencontreux de le modifier, du moins si rapidement.

La commission sollicite l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 743. Je crains toutefois qu’il ne soit nécessaire de le retirer, car le compte rendu des débats à l’Assemblée nationale montre que le report de délai résulte de la situation technique et matérielle d’OSEO, qui ne pourra pas répondre sous trois mois dès l’année 2009. Peut-être nous le confirmerez-vous, madame la ministre.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 481 de suppression.

Il est favorable à l’amendement n° 740 présenté par Mme Payet.

Le Gouvernement est également favorable à l’amendement n° 17 rectifié de la commission, qui a pour objet de supprimer la saisine du ministère de la recherche au bénéfice du guichet unique.

L’amendement rédactionnel n° 1046 a reçu un avis favorable.

Le Gouvernement a émis un avis favorable sur l’amendement n° 739 présenté par Mme Payet. Celui-ci instaure une obligation de motivation, ce qui nous paraît tout à fait approprié.

En ce qui concerne l’amendement d’appel n° 369, madame Bricq, je voudrais vous apporter quelques précisions.

Pour l’instant, environ 1,4 milliard d’euros ont été engagés au titre du crédit d’impôt recherche, ce qui correspondra probablement au coût du crédit d’impôt recherche sur l’exercice. En année pleine, notre estimation, sans doute quelque peu conservatrice, s’établit à 2,7 milliards d’euros.

Je serais très heureuse que cette estimation soit largement dépassée. Cela signifierait que les entreprises françaises ont enfin à cœur d’atteindre l’objectif que se sont fixé les pays de l’Union européenne à Lisbonne, à savoir de consacrer au moins 3 % de leur produit intérieur brut à la recherche. La France n’en est pas encore là, puisqu’elle n’y consacre aujourd'hui qu’un peu plus de 2 % de son PIB.

Les entreprises privées doivent pouvoir contribuer, dans des conditions auxquelles nous nous associons, à cet effort de recherche et développement, qui est seul de nature à nous permettre de triompher d’un certain nombre de vicissitudes auxquelles sont confrontées nos entreprises dans la concurrence internationale.

En ce qui concerne les petites et moyennes entreprises, nous avons précisément établi des taux majorés, les deux premières années, respectivement de 50 % et de 40 %, particulièrement pour les PME de croissance, dont nous pensons qu’elles doivent absolument, elles aussi, être incitées à participer à cet effort.

Je suis pour ma part très hostile à la modification du mécanisme en place. Toutes les entreprises, grandes, petites, moyennes, ont clamé haut et fort qu’elles souhaitaient le mécanisme le plus simple et le plus sécurisé possible. Elles veulent savoir si les dépenses qu’elles engagent en recherche et développement sont ou non éligibles, grâce justement à l’obtention de rescrits ou d’ « opinions » de l’administration.

En ajoutant des plafonds, des restrictions, des contraintes, des conditions, nous allons retomber dans les errements dont nous sommes coutumiers consistant, lorsqu’un mécanisme est simple et qu’il fonctionne, à en réduire progressivement la portée, au bénéfice de je ne sais quel principe dont on n’a pas encore la certitude.

Alors j’entends ici ou là, j’ai lu sous la plume de tel ou tel, que les grands seraient privilégiés au détriment des petits… Laissons le mécanisme s’appliquer dans la vie économique, puis faisons des audits. Nous avons procédé ainsi pour les pôles de compétitivité. Quatorze d’entre eux ont été mis en garde et risquent de perdre leur label s’ils ne réalisent pas un effort considérable en termes tout à la fois de gouvernance et d’organisation pour rassembler les PME autour des projets dans l’année qui vient.

De la même manière, il faut laisser le crédit d’impôt recherche, dont chacun s’accorde à penser que c’est un bon mécanisme - les étrangers vantent ses mérites pour implanter en France des centres de recherche et développement – jouer son rôle sans l’alourdir ou le modifier à ce stade.

L’amendement n° 743 présenté par Mme Payet vise à ramener la date d’entrée en vigueur au 1er janvier 2009 et non plus au 1er janvier 2010, comme l’avait prévu l’Assemblée nationale, avec l’accord du Gouvernement.

Nous mettons en place un nouveau mécanisme qui va permettre à OSEO d’instruire l’ensemble du dossier. Pour ce faire, les personnels doivent être formés, organisés dans une structure dont la gouvernance permette leur indépendance totale. Nous avons donc besoin d’un délai, qui ne sera certainement pas suffisant si la date d’application est fixée au 1er janvier 2009.

Au bénéfice de ces explications, je vous demanderai d’avoir l’obligeance de retirer cet amendement, madame Payet. Si nous essayons de brûler les étapes, je crains que le mécanisme ne fonctionne pas bien et que les entreprises soient déçues.

M. le président. Madame Payet, l'amendement n° 743 est-il maintenu ?

Mme Anne-Marie Payet. Comte tenu des déclarations de Mme la ministre, je retire cet amendement, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 743 est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 481.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 740.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet, pour explication de vote sur l'amendement n° 17 rectifié.

Mme Anne-Marie Payet. Je voterai l’amendement présenté par la commission spéciale, mais je souhaiterais attirer l’attention sur un point particulier.

M. Marini souhaite que l’administration des impôts sollicite l’avis d’un seul organisme chargé de soutenir l’innovation et désigné par décret en Conseil d’État. Il a cité OSEO, mais il faut savoir que cet organisme n’est pas présent dans certains départements d’outre-mer, comme à la Réunion, où c’est l’Agence française de développement qui exerce les missions confiées à OSEO. J’aimerais que l’on en tienne compte et que Mme la ministre nous rassure à ce sujet.

M. le président. La parole est à M. Marini, rapporteur.

M. Philippe Marini, rapporteur. Mme Payet nous fait remarquer que le groupe OSEO, à qui est confié l’essentiel de la compétence dans le domaine du rescrit destiné à valider l’inscription d’une dépense au sens du crédit d’impôt recherche, n’a pas de réelle capacité d’intervention dans les départements d’outre-mer, plus précisément à la Réunion.

Dans l’amendement n° 17 rectifié, qui a reçu l’avis favorable du Gouvernement, il est bien indiqué « l’organisme chargé de soutenir l’innovation mentionné au 3° ». Je me demande donc si l’organisme compétent pour la Réunion et l’outre-mer est ou non visé dans cette formulation. Peut-être Mme la ministre va-t-elle nous en donner confirmation. Comme il s’agit d’une lecture par référence, les choses ne sont jamais très simples.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre. En l’état de la rédaction de l’amendement n° 17 rectifié, le mécanisme peut fonctionner dans la mesure où, je vous en donne l’assurance, le Gouvernement sera très attentif, dans la rédaction du décret, à ce que sur tous les territoires, y compris ceux où OSEO ne serait pas actif, un organisme désigné puisse instruire les demandes.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 17 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Avant de mettre aux voix l’amendement n° 1046, monsieur le rapporteur, j’appelle votre attention sur le fait que, en l’état actuel de leur rédaction, les amendements nos 1046 et 739 sont incompatibles.

Vous avez la parole, monsieur le rapporteur.

M. Philippe Marini, rapporteur. Le Gouvernement et la commission ayant exprimé un avis favorable sur l’amendement de Christian Gaudin et des membres du groupe de l’Union centriste-UDF, il faudrait à mon sens, pour que l’amendement n° 1046 de la commission ne fasse pas tomber l’amendement n° 739, que ce dernier soit rectifié comme suit : « Après la première phrase du troisième alinéa du 2° du I de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée : “Cette réponse doit être motivée.” »

En procédant ainsi, nous rendons les deux amendements techniquement compatibles.

M. le président. Madame Payet, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens suggéré par la commission ?

Mme Anne-Marie Payet. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 739 rectifié, présenté par M. C. Gaudin et les membres du groupe Union centriste - UDF, et ainsi libellé :

Après la première phrase du troisième alinéa du 2° du I de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée :

Cette réponse doit être motivée.

Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Favorable !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1046.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 739 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Madame Bricq, l’amendement n° 369 est-il maintenu ?

Mme Nicole Bricq. J’ai indiqué tout à l’heure qu’il s’agissait d’un amendement d’appel destiné à obtenir des réponses de la part du Gouvernement.

Mme la ministre a précisé que 1,4 milliard d’euros avaient été engagés au titre du crédit d’impôt recherche au 1er juillet. Elle a également donné l’estimation en année pleine, même si je remarque que M. le rapporteur n’est pas d’accord avec les chiffres annoncés par ses services. En outre, elle s’est engagée, si j’ai bien compris, à commander des audits qui permettront enfin d’établir le ratio d’utilisation par type d’entreprise ; nous saurons ainsi si cette réforme profite plus aux grandes entreprises qu’aux petites, ce qui est l’idée communément admise. La réforme étant récente, je comprends que l’on ne puisse pas encore exactement le déterminer.

Madame la ministre, vous comprendrez notre souci de disposer de chiffres exacts pour mieux appréhender la réalité de ce dispositif. Vous ne serez donc pas surprise de voir réapparaître un amendement semblable au moment de l’examen de la loi de finances ou de la loi de finances rectificative visant à connaître le bilan de ce nouveau dispositif.

En attendant, je retire le présent amendement.

M. le président. L’amendement n° 369 est retiré.

La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote sur l'article.

Mme Nathalie Goulet. Puisque l’on parle de chiffres, je voudrais appeler l’attention de la Haute Assemblée sur l’importance de la recherche.

Tout le monde ici connaît l’attachement de Pierre Laffitte à ce secteur. Grâce au précédent dispositif, notamment au système des business angels, une holding a été créée le 28 mai à Sophia-Antipolis – il s’agit là d’une réalité et non de prospectives – qui a pu investir 5 millions d’euros dans quinze sociétés innovantes avant le 15 juin de cette année. Il existe donc des dispositifs qui fonctionnent.

C’est pourquoi M. Laffitte s’interroge, en ce qui concerne les procédures facilitant la recherche et l’innovation, sur l’opportunité de créer dans un avenir proche des zones d’innovation privilégiées sur le modèle des pôles d’attractivité.

Les dispositifs d’innovation-recherche actuels donnent d’excellents résultats. Il faudra donc les suivre et favoriser leur développement.

M. le président. Je mets aux voix l'article 36, modifié.

(L'article 36 est adopté.)

(M. Roland du Luart remplace M. Adrien Gouteyron au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. Roland du Luart

vice-président

Article 36 (priorité)
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'économie
Article 36 bis (priorité)

Article additionnel après l'article 36 (priorité)

M. le président. L'amendement n° 616, présenté par M. Adnot, Mme Desmarescaux et MM. Türk, Darniche, J.L. Dupont, Détraigne, Laffitte et P. Dominati, est ainsi libellé :

Après l'article 36, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le III de l'article 244 quater B du code général des impôts est ainsi rédigé :

« III. - Lorsqu'une avance remboursable en cas de succès consentie par un établissement public ou l'une de ses filiales est reçue par une petite ou moyenne entreprise autonome au sens de la recommandation 2003/361/CE de la Commission européenne, celle-ci n'est pas déduite de la base du crédit d'impôt recherche déterminée au titre de l'exercice au cours duquel elle est reçue. Ces avances remboursables publiques seront déduites des bases du crédit d'impôt recherche établi au titre de l'exercice au cours duquel elles sont définitivement acquises, ou au titre de l'exercice suivant celui du constat d'échec du projet de recherche financé. Il en est de même des sommes reçues par les organismes ou experts désignés au d et au d bis du II, pour le calcul de leur propre crédit d'impôt. Ce report de déduction de l'avance remboursable est subordonné à la souscription par l'entreprise d'un état conforme au modèle fourni par l'administration faisant apparaître, pour chaque avance remboursable, les renseignements nécessaires à l'ajustement ultérieur du crédit d'impôt recherche. »

II. - La perte de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Philippe Adnot.

M. Philippe Adnot. Mme la ministre a opportunément rappelé l’évolution du crédit d’impôt recherche. Les chiffres dont j’ai connaissance sont même beaucoup plus importants que ceux qu’elle a cités. Nous ne pouvons donc que nous réjouir d’un tel succès.

Pour autant, on constate que ce système bénéficie d’abord aux entreprises les plus importantes et pose un problème de trésorerie aux sociétés plus petites, puisque les avances remboursables perçues par ces dernières sont déduites de l’assiette des dépenses éligibles. Je propose donc de réintégrer ces avances dans l’assiette des dépenses éligibles au crédit d’impôt recherche afin d’éviter d’affaiblir ces PME et de leur permettre au contraire de se développer. Le coût serait extrêmement faible.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. Cet amendement vise à réintégrer les dépenses ayant bénéficié d’avances remboursables dans l’assiette des dépenses éligibles au crédit d’impôt recherche.

Les avances remboursables ont été exclues de l’assiette du crédit d’impôt recherche lors de la réforme de l’an dernier, à la suite d’un rapport de la Cour des comptes. Tant qu’elles ne sont pas remboursées, ces avances sont assimilables à des subventions.

Compte tenu de la doctrine que nous appliquons en la matière depuis longtemps, il me semble difficile de les incorporer à l’assiette du crédit d’impôt recherche. Il s’agirait en effet sinon d’une « aide sur une aide ».

Cela étant, ce n’est qu’une analyse rapide. Je pense que celle du Gouvernement aura plus de valeur que les modestes travaux de la commission.

Mme Isabelle Debré, vice-présidente de la commission spéciale. Quelle humilité, mon cher collègue ! (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur le rapporteur, je ne pense pas que l’analyse du Gouvernement ait d’autre valeur que celle de la répétition. (Nouveaux sourires.)

En effet, je confirme votre analyse, ces avances remboursables tant qu’elles n’ont pas été remboursées ont la nature de subventions publiques. Dans ces conditions, il nous paraît légitime qu’elles ne soient pas réintégrées dans l’assiette permettant de calculer le crédit d’impôt recherche. Cela évite de cumuler une aide d’État et un mécanisme fortement incitatif, qui est également une forme de soutien, quoi que destiné spécifiquement à l’innovation et qui est à ce titre parfaitement légitime.

Le Gouvernement vous invite donc, monsieur Adnot, à retirer votre amendement. À défaut, il émettrait un avis défavorable.

M. le président. Monsieur Adnot, l’amendement n° 616 est-il maintenu ?

M. Philippe Adnot. Il y a la théorie et il y a la pratique, madame la ministre.

Avant qu’il soit modifié, le crédit d’impôt était calculé tel que je le propose. Mais la réforme aura permis de dépenser beaucoup d’argent en faveur des grandes entreprises et au détriment des plus petites, qui ont vu leur trésorerie se réduire.

Je veux répondre à l’objection de la Cour des comptes : il est possible à l’administration fiscale d’apprécier, le moment venu, le remboursement ou le non-remboursement des avances en mettant en place un mécanisme de suivi des avances remboursables reçues par les entreprises éligibles au crédit d’impôt recherche. De tels mécanismes existent déjà en matière d’intégration fiscale.

Je demande à la commission et au Gouvernement de tenir compte du fait que la réforme qui a été instituée augmente considérablement la dépense et a pour effet de réduire la trésorerie des entreprises créatrices de la richesse de demain.

Cette mesure très importante n’aurait pas un coût très élevé. Je le répète, d’une part, c’est le régime qui prévalait avant la réforme et, d’autre part, il est parfaitement possible de répondre aux objections de la Cour des comptes.

Je maintiens donc mon amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 616.

(L'amendement n'est pas adopté.)