M. le président. Veuillez conclure, madame Demontès !

Mme Christiane Demontès. J’en termine, monsieur le président.

Nous savons bien que le gouvernement actuel a pour principal axiome économique la baisse du coût du travail via l’exonération de cotisations sociales. Chaque année, cette politique prive notre système de plus de 41 milliards d’euros de recettes. Or nous savons, et la Cour des comptes l’avait bien souligné dans son rapport de l’année dernière, que cette politique est d’une efficacité toute limitée. Depuis des années, les parlementaires socialistes vous interpellent à ce sujet.

Nous vous demandons, tout comme notre rapporteur M. Alain Vasselle, non seulement d’instaurer l’obligation pour l’État de compenser intégralement ces exonérations, mais également de les conditionner. Vous restez sourds à ces demandes.

M. le président. Il faut conclure !

Mme Christiane Demontès. Je vous signale, monsieur le président, que, si nous siégeons cet après-midi, c’est parce que nos débats ont, ce matin, pris beaucoup de retard.

M. le président. Cela n’a rien à voir avec la durée de votre discours !

Mme Christiane Demontès. Si, cela a à voir avec la durée puisqu’il n’y a pas eu de débat.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C’est précisément parce qu’il y a eu un débat que nous avons pris du retard !

Mme Christiane Demontès. En conclusion, je voudrais simplement revenir sur la situation difficile dans laquelle votre politique - je pense notamment à la tarification à l’activité, la T2A - a plongé nos hôpitaux publics. Les déficits hospitaliers ont atteint en 2007 plus de 690 millions d’euros, dont 370 millions d’euros pour les seuls CHU.

Enfin, nous soutenons les revendications de la Fédération hospitalière de France, notamment pour ce qui concerne l’évolution de l’ONDAM.

Notre collègue Claude Domeizel déclarait, l’année dernière, que votre politique en matière de retraites était « une politique de gribouille ». Elle demeure telle quelle alors que celle que vous menez en matière d’assurance maladie et donc de santé est injuste et dangereuse.

Le groupe socialiste ne saurait la cautionner. Il la dénonce donc avec la plus grande fermeté. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Serge Dassault.

M. Serge Dassault. Monsieur le ministre, je voudrais d’abord vous dire combien je mesure la difficulté de la gestion des finances de l’État dans le contexte actuel. Les graves problèmes financiers de l’économie américaine, la hausse constante du prix du pétrole, une parité dollar-euro très défavorable pour nos exportations, l’augmentation des taux d’intérêt qui aggrave nos charges d’emprunt et la menace de la poussée inflationniste ne facilitent pas votre tâche.

Je voudrais préciser que, dans ce débat comme dans d’autres, je ne suis contre rien a priori, mais que j’essaye de prévoir et d’indiquer les conséquences économiques, qui peuvent être fort graves, de certaines décisions politiques.

Monsieur le ministre, je voudrais vous proposer plusieurs mesures de nature à réduire notre déficit budgétaire, objectif numéro un du Gouvernement.

Premièrement, je souligne que les emprunts utilisés pour financer non pas des investissements mais des charges de fonctionnement récurrentes aggravent sans retour notre endettement. La charge de la dette utilise une part de plus en plus importante de nos recettes fiscales, réduisant d’autant nos capacités de dépenses et nécessitant de nouveaux emprunts. Mortel cercle vicieux !

Il faudrait éviter ce genre d’opérations ou au moins les limiter dans le temps, ce qui n’est malheureusement le cas pour aucune de ces aides. On ne sait pas combien de temps cela va durer. En réalité, ce n’est pas à l’État de payer les charges de sécurité sociale que les entreprises doivent elles-mêmes assumer.

Cela concerne, en particulier, le paiement du passage aux 35 heures, toujours utilisé sans limite depuis dix ans, et sans décision de diminution. Cela aura coûté au budget plus de 100 milliards d’euros à raison de 10 milliards d’euros par an, et tout cela pour ne pas travailler ! Jusqu’à quand cela va-t-il durer alors que les 35 heures disparaissent ?

Cela concerne le projet de loi sur la réforme du temps de travail, dont nous devons, demain matin, aborder l’examen. J’espère pouvoir faire adopter un amendement que je présenterai sur ce sujet.

Cela concerne aussi les paiements par l’État aux entreprises et aux salariés des charges sur salaires jusqu’à 1,6 SMIC, sans limite et sans décroissance, alors qu’il serait utile de les réduire. Jusqu’à quand cela va-t-il durer ? Il faudrait prévoir, dès maintenant, une limite à ces aides et les réduire peu à peu comme l’a proposé Philippe Marini. C’est très urgent.

La réduction des charges au titre des 35 heures et du SMIC représente aujourd’hui plus de 20 milliards d’euros, soit presque la moitié de notre déficit budgétaire en 2008. Il est temps de s’arrêter. Certes, les entreprises vont réagir, peut-être avec le MEDEF. Mais, entre l’aggravation de la dette de l’État et les difficultés des entreprises, il faut choisir.

En tout cas, la suppression de ces mesures réduirait considérablement nos déficits budgétaires et faciliterait le retour à l’équilibre en 2012.

Deuxièmement, il faudrait réduire les charges sur salaires qui supportent une grande partie du financement de la sécurité sociale : 30 % de ces charges concernent le financement de la sécurité sociale. Il faut trouver le moyen - ce n’est pas facile - de financer la sécurité sociale autrement, évidemment sans l’État, qui n’est plus en mesure de le faire.

Aujourd’hui, il n’y a aucune chance d’équilibre entre les dépenses de la sécurité sociale et leur financement par des prélèvements sur les salaires, ca il n’y a aucun lien entre eux. En vérité, il faut parler non pas de déficit mais de financement insuffisant, car la sécurité sociale n’a pas la maîtrise de ses recettes. Il faut donc trouver de nouveaux financements.

À cause de ce prélèvement sur les salaires, nos coûts de production sont plus élevés que ceux de nos voisins qui ne font pas supporter par les salaires les charges de sécurité sociale. La suppression de cette mesure réduirait les charges sur salaires de 30 % et améliorerait la compétitivité des entreprises. C’est absolument indispensable. Cela réduirait aussi le montant des paiements des charges sociales des entreprises par l’État, ce qui diminuerait d’autant notre déficit.

Ensuite il faudra trouver un paramètre ne concernant ni les salaires ni l’État.

J’ai déjà fait une proposition concernant le chiffre d’affaires hors taxes moins la masse salariale. Cette proposition a beaucoup d’avantages et peu d’inconvénients. Il serait utile de l’étudier.

Elle permettrait de réduire les charges sur salaires et présenterait l’avantage d’être financée par les résultats de l’activité des entreprises sans qu’il soit nécessaire de faire appel à l’État. Un coefficient unique affecté à ce paramètre permettrait d’équilibrer les charges réelles de sécurité sociale. En outre, toutes les entreprises seraient concernées.

On arriverait ainsi à équilibrer les comptes de la sécurité sociale, à réduire les charges des entreprises et celles de l’État. Outre l’équilibre de la sécurité sociale, cela permettrait en même temps la réduction de nos coûts de production, l’amélioration de notre compétitivité ; rien que des avantages ! J’ai appelé ce système « coefficient activité ». Pour le promouvoir, je propose de mettre en place un groupe de travail associant des membres de la commission des finances et de celle des affaires sociales.

Rien n’est parfait, mais il serait suicidaire de ne rien faire. Voila une proposition que je souhaitais formuler pour relancer la croissance et financer correctement la sécurité sociale.

Troisièmement, enfin, permettez-moi de vous faire une nouvelle proposition concernant nos relations avec la Communauté européenne : une harmonisation de notre fiscalité avec celle de nos voisins européens, de manière que nos contribuables payent moins d’impôts, qu’ils ne quittent plus la France, ne serait pas inutile, alors que la France préside la Communauté européenne.

En effet, la disparité avec nos voisins en ce qui concerne certains impôts est trop grande et constitue un appel à l’expatriation. Il faut savoir que, actuellement, deux à trois Français par jour, en moyenne, s’expatrient afin de payer moins d’impôts, et ce ne sont pas les moins fortunés.

La France se vide de ses élites jeunes et moins jeunes, et cela nous cause un préjudice considérable. Cela réduit nos capacités d’investissements – investissements qui se font ailleurs –, notre compétitivité et notre croissance. Il serait donc également urgent d’étudier cette question.

Telles sont, monsieur le ministre, les quelques propositions que je voulais vous présenter, dans la perspective de faciliter notre retour à l’équilibre budgétaire, qui est une absolue priorité. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUC-UDF.)

M. le président. La parole est à M. Adrien Gouteyron.

M. Adrien Gouteyron. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous nous livrons depuis ce matin à un exercice intéressant, un véritable exercice de travaux pratiques : le Parlement et le Gouvernement doivent tracer ensemble une trajectoire crédible de redressement de nos finances publiques.

À l’aune, notamment, de mon expérience de rapporteur spécial des crédits de l’action extérieure de l’État, je voudrais vous faire part de deux considérations : pour réussir ce que notre collègue Philippe Marini a appelé, déjà, le « tournant de la législature », il nous faut, tout d’abord, une ambition réaliste et, par ailleurs, une ambition partagée.

En première considération, je soulignerai la nécessité de se fixer un cap ambitieux et réaliste en matière de réduction des déficits et de reflux de la dette publique.

Notre ambition commune, nous la connaissons, c’est celle du retour à l’équilibre, ambition réaffirmée par le Président de la République devant les Français et auprès de nos partenaires européens. Cette ambition est simple et claire, c’est celle d’une politique budgétaire soutenable, qui ne laisse pas à nos enfants le poids d’une dette devenue insupportable.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !

M. Adrien Gouteyron. Le retournement de la courbe des taux d’intérêt et l’accélération de l’inflation engendrent une augmentation mécanique des charges de la dette de plus de 2 milliards d’euros par an.

Mais il n’est pas d’ambition sans réalisme. À entendre, ici et là, ceux qui professent déjà que le retour à l’équilibre des finances publiques est illusoire en 2012, on peut voir, au Quai d’Orsay, comme dans d’autres ministères, les conservatismes redresser la tête. J’entends dire que, dans ces conditions, puisque tout effort est vain, il n’y a qu’à se laisser aller. Ce serait un mauvais service à rendre aux réformateurs, encore trop peu nombreux, dans tous les ministères, que d’afficher une ambition impossible à tenir.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Eh oui !

M. Adrien Gouteyron. Cela désespérerait le « Billancourt des acteurs de la RGPP » et donnerait ainsi des gages à ceux qui croient qu’il est encore possible de laisser filer la dépense, sinon globalement – plus personne n’ose le soutenir -, du moins pour eux-mêmes.

Proposer une ambition réaliste, c’est faire preuve de crédibilité dans la trajectoire de redressement que vous vous attachez à définir, monsieur le ministre, avec courage et constance.

En matière de réalisme, il faut prendre en compte deux paramètres.

Tout d’abord, redresser les finances publiques, ce n’est pas augmenter les impôts, par l’inflation des taxes et des taux. On entend ici et là évoquer, pour faire face à tel ou tel besoin, ou pour combler tel ou tel déficit, l’expression de « ressource nouvelle », de « financement innovant », appellations pudiques issues d’une sorte de marketing fiscal. Mais ces nouvelles ressources sont en réalité autant de « vieilles recettes » pour augmenter les impôts. M. le président de la commission des finances le sait bien, puisqu’il nous invite à la vigilance. (M. le président de la commission des finances acquiesce.)

Atteindre l’équilibre des finances publiques en augmentant les impôts, voilà bien une ambition irréaliste, dont notre économie n’a vraiment pas besoin ! Et la manière peut-être plus douce, mais qui reviendrait un peu au-même, de la suppression radicale des niches ne saurait être un gisement budgétaire exploitable…

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !

M. Adrien Gouteyron.… qu’à condition de bien peser les conséquences économiques de certaines décisions : je pense en particulier au lien entre les allégements de charges et l’emploi.

M. Alain Gournac. Très bien !

M. Adrien Gouteyron. Second paramètre : la trajectoire de redressement des comptes publics ne peut faire abstraction du contexte économique dans laquelle elle intervient. Or l’économie mondiale vit deux chocs majeurs : un choc dans la sphère financière et immobilière ; un choc d’inflation, de hausse des prix des matières premières, à commencer par celui du pétrole.

Dans sa manière d’envisager le retour à l’équilibre des comptes publics, la Commission européenne, comme la France, ne peut faire abstraction de ce double choc de croissance.

Comme le font nos amis anglais, il faut envisager le retour à l’équilibre des finances dans le cadre du cycle économique. Voilà pourquoi je pense que nous avons besoin, à l’horizon 2012, d’une ambition réelle mais aussi tenable : passer d’un déficit de 2,7 % du PIB à un déficit de 1 % en cinq ans, ce ne serait déjà pas rien ! Et d’ailleurs, c’est à cela que s’était engagé M. le Président de la République pendant la campagne électorale.

Ma seconde considération consiste à souligner la nécessité d’un effort partagé. Chaque administration doit y contribuer pour la part qu’elle représente dans les finances publiques : État, sécurité sociale, collectivités territoriales.

Toutefois, il ne doit pas y avoir, dans le domaine des finances publiques, les variables d’ajustement d’un côté et les sanctuaires, voire l’inflation des dépenses, de l’autre. Les collectivités territoriales doivent être à la recherche d’une gestion la plus économe possible, mais elles ne pourront être la variable d’ajustement d’un État qui n’aurait pas tiré toutes les conséquences, dans son organisation, de la décentralisation. De son côté, l’État ne saurait être une variable d’ajustement de dépenses sociales mal maîtrisées.

De la même façon, au sein de l’État lui-même, il paraîtrait peu opportun que les ministères régaliens, comme celui de la défense, supportent la majorité de l’effort de réforme, alors qu’ils constituent le cœur de l’État et financent des « mesures nouvelles » dont l’impact économique apparaît incertain.

M. Adrien Gouteyron. Un rappel en quelques chiffres : le budget du Quai d’Orsay, soit 2,4 milliards d’euros, c’est moins que ce que coûterait aux finances publiques la baisse de la TVA sur la restauration, ou même la généralisation du revenu de solidarité active !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Eh oui !

M. Adrien Gouteyron. J’imagine donc mal que les efforts légitimes que nous demandons aux gestionnaires soient absorbés par de nouvelles dépenses mal calibrées.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Excellent !

M. Adrien Gouteyron. Je m’inquiète lorsque le Livre blanc relatif à l’action extérieure de l’État souligne que le ministère des affaires étrangères a déjà accompli beaucoup d’efforts dans la réduction de ses effectifs – sous-entendu efforts supérieurs à ceux d’autres administrations : il y a là un ferment de contestation de la discipline commune de diminution des emplois publics qui est lié à un constat, fondé ou pas, que la discipline n’a pas toujours été dans le passé aussi commune que cela.

Cette discipline devra être commune dans l’avenir, notamment dans l’application de la règle du non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux.

M. Adrien Gouteyron. C’est à cette condition que nous réussirons la réforme de l’État, lorsque l’affirmation par le Gouvernement d’un certain nombre de priorités budgétaires nécessaires ne dispensera pas les ministères prioritaires de la recherche des gains de productivité qui doivent être recherchés par tous. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUC-UDF.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Éric Woerth, ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens juste à ajouter quelques mots dans un débat très dense et qui a débordé du temps qui lui était imparti. Au demeurant, c’est une bonne chose qu’un débat d’orientation budgétaire dure un peu plus longtemps que prévu : c’est le signe que nous avons beaucoup à dire sur nos finances publiques et beaucoup à partager entre opposition et majorité.

Plusieurs d’entre vous ont souligné la justesse de la stratégie que nous mettons en œuvre : soutien à la croissance potentielle, avec les mesures contenues dans la loi relative au travail à l’emploi et au pouvoir d’achat, dans la loi LME et la loi sur le marché du travail que vous allez bientôt examiner.

Cette stratégie est d’autant plus nécessaire que l’environnement national est très perturbé. Nous ne pouvons pas ne pas réagir ! Au contraire, tout nous appelle à plus de réformes justes et efficaces, mais aussi à des réformes structurelles. C’est bien là le cœur de l’action de la majorité.

Face à cette stratégie de réformes, il y a une stratégie de la dépense budgétaire mais aussi de la dépense fiscale. J’ai bien entendu les orateurs qui se sont exprimés sur ce sujet, au premier titre desquels le président de la commission des finances et le rapporteur général : la maîtrise des dépenses est une question cruciale. Vous avez pu constater, à la lecture des documents que nous vous avons remis, combien nous y attachons d’importance. L’environnement est très contraignant, mais notre réponse est à la hauteur de cet environnement.

Pour maîtriser la dépense, il s’agit d’abord de passer de 2 % à 1 % de progression de la dépense, de mettre en œuvre la politique de révision générale des politiques publiques, avec les décisions qu’elle contient aujourd’hui et celles qui viendront s’y ajouter, d’engager un travail plus en profondeur sur la sphère sociale, même si c’est difficile, même si les mesures à prendre sont délicates : on doit à la fois beaucoup expliquer et beaucoup réformer.

Adrien Gouteyron a évoqué le ministère de la défense et le ministère des affaires étrangères à propos de cet effort de réduction de la dépense. Mais, monsieur le sénateur, tous les ministères sont concernés. Cet effort d’ailleurs n’implique pas moins de politique mais une politique plus adaptée. L’euro dépensé doit être mieux évalué et plus performant. Nous devons cet effort à chacun de nos concitoyens, qui sont aussi des contribuables !

Comme je l’ai indiqué tout à l’heure, le ministère de la défense va faire beaucoup d’économies en matière de fonctionnement ; ce sera difficile. Son rôle est de répondre à des menaces mesurées, calculées, réfléchies, c’est ce qui ressort du travail mené à l’occasion de l’élaboration du Livre blanc. Il va voir ses crédits d’équipement augmenter de manière assez considérable : 15 milliards d’euros ces dernières années, 18 milliards d’euros dans les années à venir. Cette augmentation provient en partie des économies réalisées sur son propre fonctionnement et recyclées. Il me semble que c’est de bonne méthode.

La maîtrise de la dépense est au cœur de la stratégie de redressement ; Philippe Marini, ainsi que de nombreux autres orateurs l’ont rappelé ; je souhaite le répéter à mon tour.

M. Christian Gaudin a indiqué que nos partenaires étaient également concernés par cet effort de maîtrise de la dépense. En effet, chacun est concerné, dans son domaine, avec son propre système de « gouvernance », avec son propre système de décision.

Le domaine social dispose d’un système très particulier, et l’autonomie des collectivités, nul ici ne peut l’ignorer, doit être totalement respectée, ce qui n’empêche pas le dialogue. Tout en se respectant, l’État et les collectivités locales peuvent avoir un débat clair, net et franc sur l’évolution de leurs rapports en matière de finances mais aussi de compétences. Tout cela ressort de rapports et d’études ; il faut bien à un moment donné en tenir compte.

Nous devrons tenir compte également, dans le domaine de la dépense, des opérateurs, et pas seulement des autres partenaires de la dépense publique. Toutefois, les crédits de ces opérateurs sont inclus dans les crédits des ministères, cela permet de mieux contrôler la situation.

Lorsque l’on parle de « zéro volume » ou de « zéro valeur », cela s’adresse aussi aux politiques d’intervention des ministères. Je pense ainsi à la capacité des opérateurs à recruter. Dans le budget, nous présenterons un tableau des emplois des opérateurs avec une volonté bien définie : tout effort de l’État doit être partagé par les opérateurs de l’État.

Je pense aussi au domaine immobilier, dont M. de Montesquiou a parlé à plusieurs reprises. En la matière, nous devons être exemplaires : l’État est en train de faire beaucoup de progrès à cet égard. Nous connaissons exactement le patrimoine de l’État, monsieur de Montesquiou. Ce qu’il faut, c’est connaître le patrimoine des opérateurs ! C’est une autre affaire ! Mais nous nous efforçons de faire avancer les choses.

J’ai été choqué par les propos de M. Foucaud, propos qui ont d’ailleurs été partiellement repris par Mme Bricq : « Il faut retrouver le chemin de la dépense publique ». Au contraire, il me semble qu’il faut arrêter de prendre le chemin de la dépense publique.

Cela ne signifie pas qu’il ne doit pas y avoir de politique publique, cela ne signifie pas non plus qu’il n’y a pas en France de traditions fondées sur l’intervention de l’État et sur l’importance du service public. Tout cela fait bien sûr partie de notre pacte républicain. Mais ce n’est pas une raison pour faire exploser le volume des dépenses publiques ! Quand on en est à plus de 52,4 % de dépenses publiques et que l’on dispute à la Suède la première place mondiale, c’est qu’il y a quelque chose d’anormal ! D’autant que les Suédois, eux, ont des finances publiques à peu près en équilibre dans la mesure où ils font par ailleurs les efforts nécessaires pour faire face à cette dépense publique. Si nous faisions les mêmes efforts, cela irait peut-être… mais nous ne les faisons pas !

Dès lors, nous devons être de plus en plus exigeants sur la qualité de cette dépense publique, et je trouve naturel de le dire aux contribuables que sont l’ensemble de nos concitoyens.

La réduction des déficits et la maîtrise de la dépense publique confortent toutes les autres réformes structurelles, mais aussi la croissance. C’est parce qu’il y a une maîtrise de la dépense publique qu’il y a une réforme structurelle de nos politiques, et ces deux éléments conduisent à une transformation profonde de notre pays, qui va retrouver ainsi des marges de manœuvre.

Nous ne faisons pas de la comptabilité, mais de la politique, au sens le plus noble du terme, c’est-à-dire que nous choisissons et hiérarchisons les dépenses en rendant compte à nos concitoyens de la qualité des politiques suivies !

En ce qui concerne les recettes, j’ai bien entendu le message délivré par Jean Arthuis, Philippe Marini, Serge Dassault et beaucoup d’autres orateurs. J’en conviens tout à fait : nous devons préserver nos recettes.

Tout État qui retrouve l’équilibre de ses finances publiques a dû faire un effort important sur la dépense, certes, mais également un effort décisif de préservation de la recette.

« Préserver les recettes » ne signifie pas qu’il ne faut plus accorder d’aides. En fait, il faudra être très attentifs et sélectifs à l’avenir sur tout ce qui concerne la dépense fiscale et, disant cela, je fais écho à Jean Arthuis, Philippe Marini, Alain Vasselle, Christian Gaudin et bien d’autres. Nous devons être très vigilants sur ce sujet ! Nous avons atteint le plafond de ce qui est supportable aujourd’hui.

Une dépense fiscale peut être créée à partir du moment où on en supprime une autre qui n’est plus utile. Il faut donc établir un bilan. Nous le ferons lors de l’élaboration de la loi de finances et je mettrai tout mon pouvoir de conviction pour vous le présenter.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien ! Rendez-vous est pris.

M. Éric Woerth, ministre. Je m’efforcerai de proposer une évaluation des niches fiscales, une vision très sélective de la dépense fiscale, en procédant point par point ; bien sûr le Sénat nous aidera dans cette tâche.

J’ai été très sensible à ce qu’a dit M. Valade à propos du patrimoine. J’ai bien entendu son plaidoyer, qui l’honore, en faveur du patrimoine, des centres-villes, de la défiscalisation issue de la loi Malraux. Nous partageons sa sensibilité et nous verrons ce que nous pouvons faire dans ce domaine.

D’une manière générale, nous devons être très vigilants sur l’ouverture de nouveaux crédits et de nouvelles dépenses fiscales.

Comme il n’y a plus de moyens budgétaires, le monde politique dans son ensemble se précipite vers la dépense fiscale en se disant que c’est plus simple. Mais on ne peut tolérer de laxisme dans ce domaine : la dépense fiscale est la voie de la facilité mais certainement pas de l’efficacité. Nous devons, certes, conserver une forme de souplesse, pouvoir gérer et ne rien nous interdire mais, en même temps, il nous faut être absolument vigilants : nous le serons.

La concertation sur la modernisation de la fiscalité, notamment sur la fiscalité environnementale, a été engagée par Christine Lagarde. Voilà un sujet qui va nous occuper longtemps dans les semaines et les mois à venir, lors de la préparation du projet de loi de finances pour 2009, mais aussi par la suite.

La concertation s’impose aussi dans le domaine de la révision des bases de la taxe professionnelle. J’ai bien perçu une certaine inquiétude sur ce dernier point. Toute la concertation possible doit être mise en œuvre : la taxe professionnelle est un impôt très décrié et en même temps une source de financement considérable pour les collectivités locales. Il faut continuer à y réfléchir : j’ai bien entendu le message de M. du Luart. Sur la révision générale des prélèvements obligatoires, la petite sœur – ou la petite fille, je ne sais pas – de la révision générale des politiques publiques, nous aurons encore beaucoup de débats dans les semaines à venir.

J’ajouterai un mot sur le taux de TVA applicable à la restauration. Le sujet a été évoqué par le président Arthuis ; j’avais le choix d’en parler ou non, mais finalement je vais l’aborder. Il s’agit, là aussi, de tenir un engagement, comme c’est souvent le cas dans la vie politique, pris par le précédent Président de la République et repris par son successeur.

Au-delà même de la problématique particulière à cette question, nous contestons le refus de la Commission et des institutions européennes de toute modification du taux de TVA sur des services sans incidence sur les échanges entre les États membres, comme c’est le cas de la restauration.