Article 1er A
Dossier législatif : projet de loi en faveur des revenus du travail
Article 1er bis

Articles additionnels après l'article 1er

M. le président. L'amendement no 37, présenté par Mmes Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Printz, Alquier, Bricq, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le quatrième alinéa (3°) de l'article L. 2241-2 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 4° L'évolution des montants des primes distribuées au titre de l'intéressement. »

La parole est à Mme Jacqueline Alquier.

Mme Jacqueline Alquier. L’article L. 2241-2 du code du travail dispose que les négociations de branche portent une fois par an sur les salaires. À cette occasion sont examinées l’évolution économique et la situation de l’emploi dans la branche, les prévisions établies, les perspectives d’utilisation des contrats à durée déterminée et des missions de travail temporaire, les actions de prévention envisagées, compte tenu de ces prévisions, en matière d’emploi – en d’autres termes, la gestion prévisionnelle des emplois avant des plans sociaux –, l’évolution des salaires effectifs.

Nous proposons d’ajouter à cette liste l’évolution des montants des primes distribuées au titre de l’intéressement.

L’évolution qu’il est proposé, dans le projet de loi, de mettre en œuvre conduit en effet à craindre que la substitution de l’intéressement au salaire ne se poursuive et ne s’amplifie. On a déjà constaté que les sommes distribuées au titre de l’intéressement ont crû plus vite que les salaires. C’est le résultat du développement de l’emploi précaire, mais c’est aussi l’effet de l’absence de négociation salariale : à la précarité des contrats de travail des uns correspond la précarité de la rémunération des autres.

Il nous paraît donc important que les partenaires sociaux se saisissent de cette question à l’échelon des branches, ce qui rejoint votre préoccupation apparente de porter les minima conventionnels au niveau du SMIC. Mais nous y reviendrons.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement a pour objet que les branches examinent tous les ans l’évolution du montant des primes d’intéressement.

Néanmoins, dans la mesure où la mise en œuvre d’un accord d’intéressement relève de la seule décision de l’entreprise, il n’est pas sûr que la branche soit le niveau approprié pour mener ces discussions ni qu’elle disposera des données statistiques nécessaires pour se prononcer.

La commission a donc émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Il est défavorable.

Je vois un très grave danger dans cet amendement : le risque de substitution de l’intéressement au salaire, que vous-même et vos amis dénoncez souvent, madame le sénateur. En effet, expliquez-moi comment, s’il entre dans le champ des négociations sur les salaires, l’intéressement ne finira pas, d’une façon ou d’une autre, par s’y substituer ! Ce n’est pas ce que voulez, je ne le veux pas non plus.

J’émets donc un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 37.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement no 93, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :

Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L'article L. 3312-2 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans les entreprises de 50 salariés et moins, l'employeur peut mettre en application unilatéralement un régime d'intéressement conforme aux dispositions du présent chapitre. Les délégués du personnel, s'ils existent, sont consultés sur le projet d'assujettissement unilatéral à l'intéressement au moins quinze jours avant son dépôt auprès du directeur du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle. »

II. – La perte de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

III. – La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Philippe Dominati.

M. Philippe Dominati. Les dirigeants des petites entreprises hésitent parfois à s'engager dans la négociation d'un accord d'intéressement. C'est pourquoi cet amendement vise à faciliter la diffusion de ce dispositif en donnant à l’employeur la possibilité de mettre en place, par décision unilatérale, un régime de participation pour les salariés, et ce par parallélisme des formes avec l'article 9 de la loi du 30 décembre 2006.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Isabelle Debré, rapporteur. La commission est opposée à la mise en place unilatérale d’un régime d’intéressement par le chef d’entreprise.

En effet, les mécanismes d’intéressement liant le versement d’une prime à la réalisation de certains objectifs de performance, il est indispensable que ces derniers soient discutés dans l’entreprise. Un accord d’intéressement est un outil de motivation des salariés : celle-ci ne sera pas au rendez-vous si l’employeur prend des décisions unilatérales.

J’ajoute que la loi du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale a ouvert de nouvelles possibilités de négociations dans les PME dépourvues de délégué syndical.

Pour toutes ces raisons, mon cher collègue, j’émets un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Monsieur le sénateur, je vous ferai une proposition que je qualifierai d’honnête : retirez cet amendement. (Sourires.)

L’intéressement ne peut pas être dissocié du dialogue social, même si l’on peut discuter des formes de celui-ci et, par exemple, décider de recourir, en l’absence de représentant du personnel, au référendum à la majorité des deux tiers. Je sais que cette idée ne vous déplaît pas puisque vous l’avez défendue à plusieurs reprises, notamment cet été, lors d’un autre débat parlementaire !

Ne nous privons pas de la souplesse qu’offre le dialogue social ! En matière d’intéressement, une décision unilatérale ne me semble pas être la meilleure des voies.

Voilà pourquoi je vous inviterai, monsieur le sénateur, à retirer votre amendement, faute de quoi je serai désolé d’émettre un avis défavorable, ce que je ne souhaite vraiment pas.

M. le président. Monsieur Dominati, l'amendement no 93 est-il maintenu ?

M. Philippe Dominati. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement no 93 est retiré.

Articles additionnels après l'article 1er
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Articles additionnels après l'article 1er bis

Article 1er bis

Après l’article L. 3312-7 du code du travail, il est inséré un article L. 3312-8 ainsi rédigé :

« Art. L. 3312-8. – Un régime d’intéressement peut être établi au niveau de la branche. Les entreprises de la branche qui le souhaitent bénéficient de ce régime. Elles concluent à cet effet un accord dans les conditions prévues à l’article L. 3312-5. »

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement no 74, présenté par Mmes David, Pasquet et Hoarau, MM. Fischer, Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Isabelle Pasquet.

Mme Isabelle Pasquet. L’article 1er bis a été inséré dans le projet de loi par le biais d’un amendement de la commission de l’Assemblée nationale. Il vise à permettre l’établissement d’un régime d’intéressement au niveau de la branche.

L’objectif de la majorité est prétendument d’encourager le développement de l’intéressement dans les plus petites entreprises. Cependant, nous voyons deux inconvénients à ce dispositif.

Premièrement, dans la mesure où, il faut le rappeler, les accords de branche en matière de salaires aboutissent rarement, un accord de branche en matière d’intéressement a également peu de chances d’aboutir. Dans ces conditions, il est difficile d’envisager l’extension des négociations de branche aux accords d’intéressement.

Deuxièmement, la branche est le niveau de négociation des salaires ; en en faisant le niveau de négociation de l’intéressement, la majorité et le Gouvernement entretiennent la confusion entre salaire et intéressement, autrement dit entre salaire et éléments accessoires de la rémunération. Une telle démarche n’est pas innocente : elle contribue à la dévalorisation du travail et à la déresponsabilisation des employeurs, particulièrement des grandes entreprises, face à la question salariale. Il leur sera ainsi encore plus facile de couper court à toute revendication collective en matière de salaires en utilisant l’argument de la relance de l’intéressement envisagée dans le projet de loi.

Faire croire aux salariés qu’ils trouveraient avantage dans la possibilité de négocier des accords d’intéressement au niveau de la branche est un leurre : d’une part, parce qu’il ne s’agit que d’une possibilité et que cette disposition n’a rien de contraignant ; d’autre part, parce que, nous le savons, le rapport de force dans la branche est moins favorable aux salariés que dans l’entreprise.

Ces arguments devraient donc logiquement vous conduire, mes chers collègues, à adopter notre amendement de suppression de l’article 1er bis.

M. le président. L’amendement no 95, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :

I. – Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour l’article L. 3312-8 du code du travail :

« Art. L. 3312-8. – Un régime d’intéressement peut être mis en place par accord collectif de branche. Les entreprises de la branche qui le souhaitent peuvent bénéficier de ce régime dans les conditions prévues par cet accord. »

II. – Pour compenser les pertes de recettes résultant pour l’État et les organismes de sécurité sociale du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – 1. La perte de recettes résultant pour l’État de la possibilité pour les entreprises d’une branche de bénéficier directement d’un régime d’intéressement mis en place par accord de branche est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

2. La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale de la possibilité pour les entreprises d’une branche de bénéficier directement d’un régime d’intéressement mis en place par accord de branche est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Philippe Dominati.

M. Philippe Dominati. Seule une grande simplicité dans la mise en œuvre de l’intéressement permettra un réel développement de ce dispositif dans les petites et moyennes entreprises. Cet amendement a donc pour objet de permettre à celles-ci d’appliquer directement le régime d’intéressement défini par l’accord collectif négocié et conclu au niveau de la branche. Une telle solution existe déjà en matière d’épargne salariale et a largement montré son efficacité.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Isabelle Debré, rapporteur. L’article 1er bis vise seulement à légitimer la pratique des accords-cadres négociés au niveau des branches : un ou plusieurs modèles d’accord d’intéressement peuvent être négociés par la branche, puis repris par les entreprises qui le souhaitent.

La commission estime qu’il s’agit d’un bon dispositif et souhaite le conserver. En conséquence, elle a émis un avis défavorable sur l’amendement de suppression no 74.

Monsieur Dominati, comme je l’ai indiqué en donnant son avis sur l’amendement no 93, la commission est attachée à ce que la mise en place d’un régime d’intéressement soit négociée dans l’entreprise. Or votre amendement no 95 ouvrirait la porte à des modalités de mise en place différentes de celles qui sont prévues dans le code du travail.

C’est pourquoi, mon cher collègue, je vous prie de me pardonner de vous demander encore une fois le retrait de votre amendement, à défaut de quoi j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Sur l’amendement no 74, présenté par le groupe CRC, l’avis du Gouvernement est défavorable. Il n’y a aucune raison de penser, de dire ou même d’écrire – et cela ne figure nulle part – que l’intéressement se substituera aux négociations salariales.

Monsieur Dominati, je ne sais pas si vous êtes satisfait, mais j’ai le sentiment que votre amendement l’est.

L’établissement d’un accord d’intéressement au niveau de la branche ne figurait pas, c’est vrai, dans le texte initial du projet de loi. Cette disposition a été ajoutée par l’Assemblée nationale, à l’issue de longues discussions, précisément pour éviter qu’il n’y ait carence dans certaines entreprises. Aussi, peut-être accepterez-vous de retirer votre amendement.

M. le président. Monsieur Dominati, l’amendement no 95 est-il maintenu ?

M. Philippe Dominati. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement no 95 est retiré.

La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l'amendement n° 74.

Mme Annie David. Monsieur le ministre, j’ai sans doute mal compris vos explications sur notre amendement et sur le précédent amendement du groupe socialiste.

Nous demandons la suppression de l’article 1er bis, qui prévoit que des accords d’intéressement peuvent être conclus au niveau des branches. Or vous avez déclaré que l’intégration du suivi de l’intéressement dans les négociations de branche risquait d’apporter de la confusion.

En somme, à un instant donné, vous redoutez que nous n’apportions de la confusion et, à l’article suivant, vous estimez au contraire qu’il faut maintenir le dispositif, car il offre une possibilité intéressante. Je ne comprends pas les deux explications que vous nous avez données à quelques minutes d’intervalle. Il me semble qu’elles se contredisent quelque peu.

Je souhaiterais donc que vous me redonniez des explications sur l’article 1er bis.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre. Un accord de branche peut prévoir un canevas type. Rien n’empêche ensuite les entreprises concernées de faire du sur-mesure.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 74.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 1er bis.

M. Guy Fischer. Le groupe CRC vote contre !

(L'article 1er bis est adopté.)

Article 1er bis
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Article 2

Articles additionnels après l'article 1er bis

M. le président. L'amendement n° 62 rectifié, présenté par Mmes Henneron et Procaccia, M. Revet et Mmes Rozier et Sittler, est ainsi libellé :

Après l'article 1er bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Après le premier alinéa de l'article L. 3312-4 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu'un redressement de cotisations a pour origine une mauvaise application des dispositions prévues à l'alinéa précédent, le redressement de cotisations et contributions ne portera que sur la fraction substituée sauf en cas de mauvaise foi ou d'agissements répétés du cotisant. »

II. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Françoise Henneron.

Mme Françoise Henneron. Monsieur le président, si vous l’acceptez, je vais défendre simultanément l’amendement n° 64 rectifié, qui est pratiquement identique, mais qui tend à insérer un article additionnel après l’article 2 sexies.

L’article L. 3312-4 du code du travail prévoit que les sommes attribuées aux bénéficiaires, en application de l’accord d’intéressement, n’ont pas le caractère de rémunération. Ces sommes ne peuvent se substituer à aucun des éléments de rémunération, au sens des mêmes articles, en vigueur dans l’entreprise ou qui deviennent obligatoires en vertu de dispositions légales ou de clauses contractuelles sauf si un délai de douze mois s’est écoulé entre le dernier versement de cet élément de rémunération et la date d’effet de cet accord.

La jurisprudence est sévère sur ce point estimant que la moindre substitution, comme, par exemple, la suppression d’une prime de moindre importance après la mise en place de l’intéressement, caractérise la substitution et remet en cause l’ensemble des exonérations sociales.

Il convient donc de modérer ce principe en ne prévoyant le redressement que sur la fraction substituée, sauf en cas de mauvaise foi ou d’agissements répétés du cotisant.

On retrouve d’ailleurs ce même principe à l’article L. 133-4-3 du code de la sécurité sociale pour les titres restaurant, ces dispositions ayant été votées lors de la loi de modernisation de l’économie.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement a donné lieu à un débat en commission. Nous sommes bien sûr soucieux de ne pas affaiblir la portée du principe de non-substitution, alors même que nous nous engageons dans une politique qui vise à dynamiser l’intéressement. Dans le même temps, la sanction applicable n’est-elle pas, parfois, un peu disproportionnée ?

La commission a donc donné un avis de sagesse et souhaiterait recevoir l’éclairage du Gouvernement sur ce sujet.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement saura-t-il être éclairant ? C’est la responsabilité qui, à la demande de madame le rapporteur, pèse sur mes épaules. (Sourires.)

Je comprends parfaitement le sens de cet amendement. Il s’agit de déterminer s’il est possible, tout en luttant contre la substitution, d’éviter d’appliquer un redressement trop important, cela sans entrer dans la logique de la bonne ou de la mauvaise foi. Je saisis donc bien le principe visé.

Mais j’ai également examiné en détail cet amendement et j’y vois un problème pratique. Comment réellement identifier la part d’intéressement qui a été versée en plus ?

Après de nombreuses interrogations, nous sommes persuadés que ce point risque d’être un facteur d’insécurité juridique et que nous risquons d’être confrontés à des difficultés au niveau des entreprises redressées.

Comment allons-nous calculer la cotisation réellement due en fonction de l’appréciation qui peut être portée par les URSSAF sur la bonne ou mauvaise foi de l’employeur ? Comment déterminer le surplus qui, justement, dépasse ou diffère de la portion de rémunération ?

Ce sujet est très complexe et vous avez raison de le pointer du doigt.

Pour notre part, nous sommes persuadés que l’amendement, s’il est adopté, ne simplifiera pas la gestion des entreprises. Voilà pourquoi je vous demande de le retirer. À défaut, je rendrai un avis défavorable.

Comprenez-bien que cette position est liée à la seule raison que j’invoque ! J’ai conscience que le fait de baser le calcul de la pénalité sur l’intégralité de l’intéressement est coûteux, mais je ne vois pas trop comment procéder en se basant sur un différentiel.

Je vous parle en toute franchise. Je ne rejette pas en bloc cette proposition et je n’ai pas de certitude complète sur le sujet. Mais elle pose une question de faisabilité et d’insécurité juridique.

M. le président. La parole est à Mme Françoise Henneron.

Mme Françoise Henneron. Je retire l’amendement n° 62 rectifié.

M. le président. Madame Henneron, dois-je comprendre que vous retirez également l’amendement n° 64 rectifié, qui est pratiquement identique, mais s’applique, lui, au redressement de cotisations sur les plans d’épargne d’entreprise et qui appellera sans doute le même avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre. En effet, monsieur le président.

Mme Françoise Henneron. Dans ces conditions, je retire également l’amendement n° 64 rectifié.

M. le président. Les amendements nos 62 rectifié et n° 64 rectifié sont retirés.

L'amendement n° 38, présenté par Mmes Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Printz, Alquier, Bricq, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article premier bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. L'article L. 3322-2 du code du travail est ainsi rédigé :

« Art. L. 3322-2. - À compter du 1er janvier 2009, toute entreprise employant habituellement au moins dix salariés, quelles que soient la nature de son activité et sa forme juridique, est soumise aux obligations de la présente section, destinées à garantir le droit des salariés à participer aux résultats de l'entreprise.

« Pour l'application des dispositions qui précèdent, l'effectif des salariés employés habituellement par les entreprises de travail temporaire est calculé en ajoutant au nombre des salariés permanents le nombre moyen par jour ouvrable des salariés qui ont été liés par un contrat à durée déterminée ou un contrat de travail temporaire au cours de l'exercice.

« Les entreprises constituant une unité économique et sociale reconnue dans les conditions prévues à l'article L. 2322-4 et employant habituellement au moins 10 salariés sont également soumises aux obligations de la présente section, qu'elles mettent en œuvre soit par un accord unique couvrant l'unité économique et sociale, soit par des accords distincts couvrant l'ensemble des salariés de ces entreprises. »

II. Les articles L. 3322-3 et L. 3322-4 du même code sont abrogés.

III. La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des I et II ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

IV. La perte de recettes résultant pour l'État des I et II ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Gisèle Printz.

Mme Gisèle Printz. Cet amendement vise à ce que, à compter du 1er janvier 2009, dans toute entreprise employant habituellement au moins dix salariés, la participation soit rendue obligatoire.

Ce faisant, nous souhaitons que se développe la négociation dans l’entreprise, la négociation sur la participation ne pouvant éluder la négociation sur les salaires.

Par ailleurs, cette mesure serait de nature à conduire les salariés, y compris dans les petites entreprises, à se constituer une épargne de précaution à condition, bien entendu, que celle-ci demeure bloquée pendant cinq ans au minimum.

Aujourd’hui, quand on regarde l’ensemble des éléments – rémunérations et avantages annexes –, on constate que l’on est en présence d’une échelle salariale et d’un droit social à deux vitesses. Tout demandeur d’emploi ira de préférence, s’il le peut, dans une grande entreprise, sachant que les salariés des petites entreprises sont plus mal lotis.

Si la participation doit demeurer un élément important des rapports sociaux, ce à quoi nous ne sommes pas opposés, elle doit concerner aussi les petites et moyennes entreprises, au-delà de dix ou vingt salariés.

À cet égard, nous souhaitons exactement l’inverse de ce que propose le gouvernement : que l’on franchisse un pas en faveur de l’extension d’une véritable participation, conforme à l’éthique qui a présidé à sa mise en œuvre, en faveur des salariés comme de l’entreprise.

La participation ne doit pas devenir un morceau de salaire sans cotisation sociale. Sinon, elle perd sa valeur, qui justifie seule son régime fiscal.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement, qui propose de ramener à dix salariés le seuil de la participation obligatoire, est un peu curieux. Cette mesure ne nous paraît pas opportune. Les petites et moyennes entreprises employant de dix à quarante-neuf salariés risquent d’avoir bien du mal à respecter cette obligation, qui suppose de disposer d’un minimum de ressources techniques, juridiques ou de relations humaines, dans l’entreprise.

Il me semble effectivement curieux et quelque peu surprenant que ce soit le groupe socialiste qui propose cet amendement. En effet, je l’ai bien souvent entendu craindre une substitution de la participation aux salaires. Et, dans cet amendement, il propose d’étendre le dispositif à un grand nombre de petites entreprises !

Je suis donc surprise et, bien évidemment, la commission rendra un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Serge Dassault, rapporteur pour avis. J’interviens à titre personnel, car cet amendement n’a pas été discuté au sein de la commission des finances.

Depuis longtemps, j’entends les petites entreprises exprimer des demandes dans ce sens. Je trouve donc normal d’abaisser le seuil de la participation obligatoire. Il y a tellement d’entreprises de moins de cinquante salariés en France qui ne peuvent pas bénéficier de ces dispositions ! Je suis donc favorable à la fixation de ce seuil, si ce n’est à dix, du moins à vingt salariés.

Évidemment, le seuil avait été fixé à cinquante salariés, dans le cadre d’un dispositif reposant sur des accords passés avec les comités d’entreprise. Cependant, à partir du moment où la participation est régie par des règles bien précises, c’est différent, et la diminution de ce seuil sera très appréciée, en particulier par les petites et moyennes entreprises.

C’est pourquoi je suis favorable à cet amendement. Il me semble que ce serait une bonne mesure pour l’ensemble des petites entreprises et de leurs salariés, même si elle est proposée par le groupe socialiste. D’ailleurs, cela n’a rien d’anormal, puisque nous sommes tous là pour favoriser l’activité économique et la motivation des salariés. Permettre à ces derniers de bénéficier d’une participation n’est-ce pas un bon facteur de motivation ?

Cela dit, je souhaiterais déposer un sous-amendement visant à fixer le seuil à vingt salariés.

M. le président. Je suis donc saisi d’un sous-amendement n° 102, présenté par M. Dassault, et ainsi libellé :

Aux premier et troisième alinéas du texte proposé par l'amendement n° 38 pour l'article L 3322-2 du code du travail, remplacer le chiffre :

dix

par le chiffre :

vingt

Quel est l’avis de la commission ?

Mme Isabelle Debré, rapporteur. Je ferai la même réponse que précédemment. Je le répète, il est possible, aujourd’hui, de mettre en place des accords de participation dans les entreprises, indépendamment du nombre de leurs salariés. Je suis opposée, à titre personnel, à en faire une obligation pour les entreprises de moins de cinquante salariés, alors même que ces processus demandent une grande assistance, aussi bien juridique que technique. Je suis donc défavorable, à titre personnel, à ce sous-amendement et je pense que la commission souscrirait à cet avis : oui à l’incitation, non à l’obligation.