M. le président. Merci de conclure, monsieur Fischer.

M. Guy Fischer. Faute de temps, je laisserai à ma collègue Annie David le soin d’exprimer nos positions sur la branche famille et sur la branche accidents du travail et maladies professionnelles.

S’agissant du secteur médico-social, vous lui imposez un système de pilotage à la performance qui est à mon sens une véritable tutelle.

Et vous ne craignez pas de transférer à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA, le financement des contrats de projets entre l’État les régions concernant les maisons de retraite et les établissements pour handicapés, malgré l’opposition quasi unanime des associations et des présidents de conseils généraux.

Avec ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, sans oublier le projet de loi « hôpital, patients, santé et territoires », ou HPST, qui le suivra, vous préparez, à notre sens, la privatisation de notre système de protection sociale…

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Oh !

M. Guy Fischer. Mais si ! Parlons clairs !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Donc, d’un côté, j’étatise et, de l’autre, je privatise !

M. Alain Vasselle, rapporteur. Que de turpitudes, madame la ministre ! (Sourires sur les bancs des commissions et du Gouvernement.)

M. Guy Fischer. Si vous préférez, je parlerai de privatisation rampante !

Vous préparez en tout cas une concentration des pouvoirs sans précédent entre les mains de quelques hauts fonctionnaires tout puissants, ce qui va à l’encontre de notre modèle social, fondé sur la solidarité.

En outre, en prévoyant de nouveaux transferts vers la CADES, vous accroissez la fiscalisation de notre système de santé.

D’ailleurs, le rapporteur Alain Vasselle ne préconise-t-il pas un alourdissement du poids de la CRDS ? Entre 1978 et 2006, la part des cotisations n’est-elle pas passée de 97 % à 72 %, tandis que celle des impôts et taxes affectées passait quant à elle de 3 % à 28 % ?

M. Alain Vasselle, rapporteur. Je proposais de le faire à financement constant ! Vous ne dites pas tout, monsieur Fischer !

M. Guy Fischer. Pour notre part, nous vous ferons, comme chaque année, des propositions visant à créer des recettes pérennes ; et nous voterons, bien sûr, contre ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Serge Dassault.

M. Serge Dassault. Monsieur le président, mesdames les ministres, monsieur le ministre, mes chers collègues, je n’ai que peu de critiques à formuler sur ce projet de loi (Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC) et sur les dépenses prévues en faveur de notre système de santé, qu’il conviendrait d’ailleurs de renforcer encore.

Je remercie Mme Roselyne Bachelot de tous ses efforts pour mettre en œuvre un système de santé à la fois efficace et accessible à tous, ce qui n’est pas facile !

Mon intervention portera sur les points suivants : les charges sur salaires des entreprises, l’épargne salariale, la retraite des pilotes et le financement des allégements de charges.

L’idée majeure que je souhaite développer devant vous concerne la suppression du financement de l’assurance maladie et de la famille par les entreprises, sur les salaires qu’elles versent.

En effet, les coûts de production sont en France trop élevés par rapport à ceux de nos concurrents, notamment du fait des charges sur salaires, qui doublent pratiquement les salaires nets. Par exemple, un salarié qui perçoit 1000 euros nets coûte en réalité 2000 euros à son entreprise. Cette charge, qui est supérieure à celle de tous les autres pays, rend nos produits beaucoup moins compétitifs et conduit souvent à des délocalisations, à la sous-traitance à l’étranger – en Roumanie, en Pologne ou ailleurs – et au chômage.

En vérité, les salaires supportent des charges qui n’ont rien à voir avec les activités des entreprises. Il conviendrait donc de fractionner ces charges en deux parties totalement distinctes : d’un côté, celles qui, destinées à financer l’assurance chômage et la retraite, concernent donc les salariés des entreprises et continueraient à être financées par celles-ci ; de l’autre, celles qui, ayant trait à l’assurance maladie et aux allocations familiales, n’ont rigoureusement rien à voir avec l’activité des entreprises. Si ces charges-là étaient supprimées pour les entreprises, leurs coûts s’en trouveraient réduits de 30 %, ce qui faciliterait nos activités économiques et favoriserait la création d’emplois.

Comme il n’est pas question de faire payer l’État à la place des entreprises, il faut trouver un moyen de faire payer les charges autrement par chaque entreprise, sans pour autant avoir recours à la TVA.

L’idée que je défends serait donc de créer un « coefficient activité » qui, associé au chiffre d’affaires de l’entreprise, diminué de la masse salariale, permettrait de payer la différence entre les charges totales supportées actuellement par les entreprises et celles qui les concernent directement, tels le chômage et la retraite.

Cela favoriserait les entreprises employant de la main-d’œuvre : pour un chiffre d’affaires donné, et avec davantage de main-d’œuvre, donc une masse salariale plus importante, elles paieraient moins. En revanche, celles qui, comme les entreprises de services, réalisent leur chiffre d’affaires avec relativement peu de personnel paieraient plus. Les entreprises qui délocalisent seraient, elles aussi, défavorisées puisqu’elles n’auraient que très peu de salaires à déduire de leur chiffre d’affaires, l’essentiel des salaires étant versé hors de France.

Un tel système favoriserait les embauches, accroîtrait notre compétitivité et permettrait d’augmenter les salaires et le pouvoir d’achat, le tout sans augmenter les charges de l’État, et même en les diminuant. En effet, avec le coefficient activité, les recettes pourraient être supérieures à ce qu’elles sont actuellement avec les salaires, ce qui permettrait de réduire encore le déficit de la sécurité sociale. Au demeurant, ce déficit n’en est pas vraiment un : il s’agit simplement d’un défaut de financement, car un déficit correspond à des activités représentant un montant équivalent.

Voilà donc le dispositif que je vous demande d’étudier, monsieur le ministre. Bien sûr, on peut toujours critiquer, mais le pire est de ne rien faire, et ce qui est inquiétant, c’est précisément qu’on ne fait rien dans ce domaine ! On ne cherche pas à réduire ces charges, ce qui nuit à notre activité économique, à la lutte contre le chômage et à nos exportations. Je souhaiterais donc que le dispositif du coefficient activité soit au moins étudié consciencieusement par les services de Bercy, ce qui n’a pas encore été le cas. Ces derniers pourraient ainsi me fournir un avis sur sa valeur et ses inconvénients éventuels. Mais, jusqu’à présent, je n’ai jamais réussi à obtenir qu’il soit donné suite à cette demande !

Je souhaite également vous soumettre trois autres propositions, sur lesquelles nous reviendrons lors de l’examen des articles.

La première consiste à exclure du forfait social de 2 % les formules d’épargne à long terme. En effet, d’un côté, on cherche à augmenter l’épargne à long terme, notamment par l’intermédiaire du PERCO, ce qui est une bonne chose, mais, de l’autre, on taxe le produit à hauteur de 2 %. Certes, ce n’est pas énorme, mais c’est encore ça de moins pour les retraites de nos salariés !

Je présenterai également un amendement tendant à supprimer l’article 13 du projet de loi. En effet, il semble tout de même paradoxal que le Gouvernement, d’une part, prétende inciter les entreprises à développer l’intéressement en leur proposant un crédit d’impôt de 20 % – que l’on a d’ailleurs critiqué ici même, sans résultat – et que, d’autre part, il décide de taxer à hauteur de 2 % ces mêmes sommes consacrées à l’épargne salariale et à la participation !

C’est illogique, car il s’agit de charges supplémentaires qui ne faciliteront pas le développement de l’intéressement et de la participation. Au contraire, la disposition aura un effet dissuasif. Je ne crois donc pas qu’elle soit particulièrement nécessaire !

J’ai déposé un autre amendement visant simplement à donner la possibilité aux pilotes de prendre, s’ils le souhaitent, leur retraite à soixante-cinq ans dès le 1er janvier 2009, c’est-à-dire à la même date que celle qui a été retenue pour tous les autres personnels navigants. Actuellement, la date fixée pour l’application de la mesure aux pilotes est le 1er janvier 2010, ce qui risque de leur poser des problèmes de financement de leur retraite. Ils souhaitent donc que la mesure s’applique à eux aussi à partir de 2009.

J’évoquerai enfin le problème du transfert de charges, pour un montant – mais les chiffres dont je dispose, je le précise, ne sont pas forcément les plus récents – de l’ordre de 30 milliards d’euros, qui pèsent sur le budget de l’État, et cela dans le but de favoriser certaines activités.

Il est bien beau de procéder à des allégements de charges ! Bien sûr, cela fait plaisir à ceux qui n’ont pas à les payer, mais je ne vois pas pourquoi c’est l’État qui paie la facture. C’est d’autant plus regrettable que cette somme aggrave le déficit, donc les emprunts, donc la charge de la dette, alors que la raison d’être de l’État n’est absolument pas de financer les charges des entreprises privées.

Je souhaiterais donc que ces allégements de charges de 30 milliards, qui se sont accumulés depuis un certain temps, arrêtent de croître, et même qu’ils diminuent.

Ces allégements servent en partie à financer les charges sur les salaires s’élevant jusqu’à 1,6 SMIC. Pourquoi ne pas les faire diminuer de façon progressive, afin que cela ne soit pas trop difficile pour les entreprises, en cherchant à atteindre par exemple 1,4 SMIC, voire 1,1 SMIC.

En tout état de cause, il n’y a pas de raison pour qu’une entreprise ne paye pas la totalité des charges sur salaires et que ce soit l’État qui les paie à sa place, alors même qu’il n’a pas d’argent et doit emprunter pour le faire !

Il y a donc là une source d’économies potentielles particulièrement intéressante, d’autant que ces 30 milliards représentent plus de la moitié de notre déficit budgétaire puisque le déficit prévu pour 2009 dépassera 50 milliards d’euros. Autrement dit, si l’État n’avait pas ces 30 milliards à assumer, la situation de nos finances publiques s’en trouverait sensiblement améliorée.

Telles sont donc les suggestions que je souhaite vous soumettre à l’occasion de l’examen de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009.

M. le président. La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle.

Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Monsieur le président, mes chers collègues, le Gouvernement s’emploie cette année à afficher un certain « volontarisme » dans le PLFSS, comme dans de nombreux dossiers. Le terme est d’ailleurs employé à tour de bras par la majorité !

À ce volontarisme s’ajoute la satisfaction que semble procurer aux ministres Bachelot, Woerth et Bertrand – celui-ci nous a malheureusement quittés – le succès de la politique conduite par le Gouvernement depuis l’élection du Président Sarkozy, satisfaction d’ailleurs partagée par l’ensemble des rapporteurs.

M. Woerth se félicite ainsi d’avoir « respecté les objectifs fixés en 2008 », d’avoir « réduit le déficit, en dépit d’une progression moins forte que prévu de la masse salariale, 4,5 % au lieu de 4,8 % », de constater que le « déficit du régime général continue de baisser », s’élevant à « 8,9 milliards d’euros, contre 9,5 milliards l’année dernière ». Après avoir précisé que le déficit de la Caisse nationale d’assurance maladie serait de 4 milliards d’euros, soit « le meilleur niveau atteint depuis 2001 », il affirmait triomphalement le 15 octobre dernier devant la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l’Assemblée nationale : « On peut donc parler de bonne nouvelle ! »

M. Éric Woerth, ministre. C’est une réalité !

Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Et d’ajouter : « Notre objectif est ambitieux, mais je pense qu’il est possible, d’ici à 2012, de parvenir à l’équilibre du régime général, en poursuivant la réduction du déficit de la sécurité sociale. »

En son temps, et avec la même volonté affichée et la même assurance, M. Douste-Blazy nous promettait l’équilibre des comptes à un horizon… que nous avons dépassé depuis longtemps, sans que sa volonté connaisse l’ombre d’une concrétisation !

Au moins le ministre Woerth prend-il quelques précautions en avouant que la voie est étroite, que cela suppose d’être très ferme sur la dépense et d’optimiser les financements. Son principe d’action, c’est la responsabilité : il faut que chacun assume ses responsabilités et que les efforts soient partagés. Nous y voilà !

À vrai dire, mes chers collègues, nous ne sommes pas surpris de voir rôder le loup. Car la majorité affichait déjà son volontarisme l’année dernière, l’année d’avant, etc. Et l’horizon de M. Douste-Blazy se situait en 2007 ! N’est pas devin qui veut !

Pour ma part, je pourrais presque reprendre mon intervention de l’année dernière sur le PLFSS et vous servir des formules équivalentes, qui n’entameraient pas d’un iota votre détermination, ni votre autosatisfaction. Malheureusement, le contexte a changé et, malgré vos bonnes intentions, les améliorations que vous mettez en avant par l’usage des chiffres ne suffisent pas à rassurer les Français quant à ce qui les attend. En tablant sur une prévision de croissance de 1 %, vous nous feriez presque rire !

Mais venons-en aux faits. Traquons les loups ensemble !

En amont de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale par branches, il convient de nous attarder sur l’équilibre financier général des comptes.

J’ai bien sûr consulté le rapport de la Cour des comptes à ce sujet. Je tiens d’ailleurs à saluer la grande qualité de ce dernier, notamment pour ce qui est de la sincérité des analyses qui y sont dispensées, sous la houlette d’un Premier président, M. Séguin, que l’on ne peut suspecter de partialité.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Ça ! (Sourires.)

Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Que la Cour des comptes refuse de certifier les comptes de l’ACOSS et du recouvrement pour 2007, constate des désaccords et des incertitudes, émette des réserves sur les sept autres états financiers de cette même année, nous renseigne sur la sincérité du PLFSS présenté par le Gouvernement, qu’il s’agisse de 2007 ou des années suivantes.

L’année 2007, on le sait, a connu un nouveau dérapage des comptes. Le déficit d’ensemble des régimes de la sécurité sociale est estimé par la Cour à plus de 10 milliards d’euros. C’était la cinquième année consécutive où les déficits dépassaient 10 milliards d’euros, alors même que la conjoncture économique était encore favorable !

Je vous épargnerai la description du tour de passe-passe ayant permis de déplacer 640 millions d’euros de 2007 vers 2008 et de fausser, en quelque sorte, les écritures comptables. Avec de telles méthodes, en effet, il n’est pas difficile de respecter ses objectifs, en l’occurrence de ramener le déficit des régimes à moins de 9 milliards d’euros alors qu’il devrait s’élever à 10,5 milliards d’euros.

Qu’en est-il du côté des recettes ? Si la masse salariale a progressé de 4,5 %, la forte augmentation des exonérations sociales a limité la hausse des cotisations des employeurs. C’est pour cette raison que la croissance des recettes assises sur les revenus d’activité s’est limitée à 3,6 % en 2007.

De plus, la forte augmentation des exonérations de cotisations, due aux allégements généraux déjà en place l’année précédente ainsi qu’à l’entrée en vigueur de la loi TEPA exonérant les heures supplémentaires de charges sociales, crée un manque à gagner de 28 milliards d’euros qui n’est pas intégralement compensé, selon le rapport de la Cour des comptes.

Le dernier projet de loi du Gouvernement sur les revenus du travail va renforcer, une fois encore, le coût total des allégements de cotisations sociales patronales en 2009. La Cour exprime des doutes quant aux réelles intentions du Gouvernement de prélever, au profit de la CADES, des recettes de CSG actuellement attribuées au Fonds de solidarité vieillesse, dont l’excédent ne serait que très provisoire si la situation de l’emploi devait encore se dégrader. Et il semble pourtant que ce soit le cas !

Je rappelle que les allégements de cotisations patronales sont passés de 3 milliards d’euros à 28 milliards d’euros en douze ans, et qu’ils concernent en majorité le secteur tertiaire, dont – pour 40 % – la grande distribution, pourvoyeuse de bas salaires et de temps partiel.

Par ailleurs, sept mesures d’exonérations de charges sociales ne sont toujours pas compensées. Quand va-t-on rationaliser le coût des exonérations ? Quand va-t-on exiger des contreparties à ces exonérations ? Quand va-t-on les réserver aux petites entreprises créatrices d’emplois ?

Bien sûr, M. Bertrand, qui n’est plus là, pourrait nous rappeler la réduction des niches fiscales au profit de nouvelles niches censées relancer notre économie, ou peut-être sa très courageuse taxation des stock-options à 2 %, sans aucune garantie…

Il n’en reste pas moins que, dans un contexte économique dégradé, il y a de fortes chances pour que la dette se reconstitue dès 2009 et que le plafond des ressources non pérennes serve de nouveau à financer des besoins permanents, dès 2010.

Voilà pour ce qui est de la lecture que nous faisons de certaines données, avec un enthousiasme plus réservé que celui qu’affiche la majorité.

Ce ne serait que chamailleries sur le succès ou non d’une réforme en cours si, entre-temps, une crise structurelle majeure n’avait heurté de plein fouet notre économie, malgré l’optimisme volontaire affiché par Mme la ministre Lagarde et une prévision de croissance revue à 0,2 %. Le FMI est moins guilleret !

Mes chers collègues, soyons sérieux : ce budget est bâti sur des prévisions économiques pour le moins erronées, voire complètement farfelues.

M. Alain Vasselle, rapporteur. Elles ont été corrigées !

Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Pas encore, monsieur Vasselle !

Dans un contexte de tensions économiques, les choix opérés par ce gouvernement n’auront pour conséquence qu’une notable dégradation des recettes. Le ralentissement économique qui touche de très nombreux secteurs ne pourra qu’aggraver cette situation, d’autant plus dommageable que la politique menée depuis six ans et accentuée depuis un an et demi a prouvé son incapacité à amortir ou à contrer la baisse de la croissance.

Ce PLFSS est bâti sur une croissance prévisionnelle de 1 % en 2009, avec une augmentation de 3,5 % de la masse salariale. La semaine dernière, Mme Lagarde a revu les prévisions de croissance à la baisse ; avez-vous révisé parallèlement l’évolution de la masse salariale et ses incidences sur le PLFSS ?

M. Alain Vasselle, rapporteur. Cela a été fait !

Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Pas pour le moment !

Le contexte actuel pèsera nécessairement sur ce PLFSS, les recettes étant tirées pour une grande part des cotisations sociales, elles-mêmes fonction de la bonne marche de notre économie.

M. Alain Vasselle, rapporteur. Il fallait assister au débat sur le projet de loi de programmation des finances publiques !

Mme Annie Jarraud-Vergnolle. J’étais présente !

La politique d’exonération, qui porte à près de 30 milliards d’euros le coût de cette mesure non totalement compensée, n’incite même pas la majorité à envisager sereinement une solution comme celle qui était préconisée dans la proposition de loi présentée la semaine dernière, au nom du groupe socialiste, par mes collègues Nicole Bricq et François Marc. Cette proposition de loi avait pourtant le double mérite d’injecter un peu d’éthique dans le statut et la rémunération des dirigeants, conformément au souhait volontariste du Président de la République, tout en développant une source de revenus supplémentaires par la fiscalisation des revenus annexes souvent exorbitants de patrons protégés par des boucliers et rassurés par des parachutes.

De même, les recommandations faites depuis plusieurs années par la Cour des comptes pour lutter contre les niches sociales et fiscales et atteindre l’équilibre des comptes ne semblent pas vous concerner.

En somme, vous paraissez bien volontaires et autrement plus efficaces quand il s’agit de favoriser les plus aisés, de leur faciliter la tâche, fût-ce au prix de l’assèchement des ressources de notre système de protection sociale, fût-ce au péril de l’emploi et d’un équilibre comptable qu’il ne serait pourtant pas si compliqué d’orchestrer.

M. Éric Woerth, ministre. Ah bon ?

Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Non contents de faire peser l’effort sur les plus faibles, comme nous le verrons lors de l’examen des articles, notamment en ce qui concerne les mutuelles ou les retraites, non contents de « plomber » le pouvoir d’achat des Français en prétendant l’améliorer, assez peu lucides ou honnêtes pour reconnaître l’échec des réformes engagées par MM. Douste-Blazy et Fillon, non contents de masquer la dégradation générale du contexte économique, vous avez assez peu de scrupules pour vous servir du PLFSS afin de faire passer par la voie d’amendements des mesures qui ne relèvent en rien d’une idéologie progressiste – « travailler plus » devient « travailler plus longtemps » –, en vous payant le luxe d’essayer de nous faire avaler que l’équilibre se profile à l’horizon 2012 !

Après les salariés, les retraités et bientôt les patients, sur qui comptez-vous faire peser vos errances de gestionnaires dérégulateurs pour mettre les comptes à l’équilibre ? Sur nos enfants, peut-être ?

Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Ils sont déjà mis à contribution virtuellement par la réouverture de la CADES, qui porte le montant de la dette cumulée à plus de 100 milliards d’euros. Nous n’aurons pas le temps de réunir une telle somme ; les générations futures s’en chargeront pour vous !

M. le président. Veuillez conclure, madame Jarraud-Vergnolle.

Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Alors, permettez que nous doutions du bien-fondé d’un PLFSS réputé transitoire en attendant la loi « hôpital, patients, santé, territoires ».

Permettez que nous n’ayons pas foi en ce gouvernement, digne d’un triste duo rendu célèbre par le fameux dessin animé de Walt Disney. Souvenez-vous du prince Jean, usurpateur affublé de son shérif de Nottingham et affameur de petites gens. S’il s’agissait d’une fiction, nous pourrions compter sur Robin des Bois pour reprendre ce qui fut pris aux plus modestes et rétablir un équilibre mis à mal par les caprices de quelques-uns.

En l’occurrence, il s’agit de la vraie vie de millions de Français, de leur santé, de l’équilibre général financier de notre système de protection sociale. Cela mérite un peu plus de clarté, de transparence et de garanties. N’est pas devin qui veut, ai-je dit plus haut. De même, il ne suffit pas de clamer son volontarisme pour en faire preuve : il s’agit de le traduire en mesures concrètes. Or celles qu’appelle la situation actuelle ne sont pas compatibles avec vos choix antérieurs. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Alain Vasselle, rapporteur. Vous manquez d’informations !

M. le président. La parole est à Mme Muguette Dini.

Mme Muguette Dini. Monsieur le président, mesdames les ministres, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans le contexte financier et économique dégradé que nous connaissons, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 insiste tout particulièrement sur la maîtrise de nos dépenses sociales.

En matière de dépenses de soins, monsieur le ministre, vous avez indiqué, dans une interview accordée récemment à un quotidien médical, votre volonté de « resserrer les vis et les boulons d’un échafaudage qui n’est pas si mauvais ». Les membres de mon groupe et moi-même en sommes d’accord.

Dans ce cas, nous plébiscitons un resserrage efficace des vis et des boulons.

Mme Raymonde Le Texier. Je le qualifierais de « bancal » !

Mme Muguette Dini. En effet, nous sommes sensibles à la crainte des professionnels de santé de voir, en ces temps de menace de récession, ressurgir le réflexe d’une maîtrise purement comptable des dépenses de soins. Cette crainte est d’autant plus fondée que, toujours dans le cadre de cette même interview, monsieur le ministre, vous déclariez ne pas faire de différence entre la maîtrise comptable et la maîtrise médicalisée des dépenses de santé.

M. Guy Fischer. La voilà, la vérité !

Mme Muguette Dini. Pourtant, la différence est de taille.

M. Alain Vasselle, rapporteur. L’une est la conséquence de l’autre !

Mme Muguette Dini. La maîtrise comptable se définit comme étant un contrôle de type purement budgétaire, qui se caractérise par une définition a priori et centralisée de l’offre, traduite en prix, et de la demande de biens de santé, notamment par le biais d’enveloppes de soins.

Les nouvelles baisses sur les actes de radiologie et de biologie, où les gains de productivité ont certes permis de dégager des « marges importantes », de même que le plafonnement du nombre de séances de certains actes paramédicaux, flirtent avec cette approche quantitative et sectorielle des problèmes de santé.

La maîtrise médicalisée se rapporte, quant à elle, à la notion de juste soin. La sûreté, l’efficacité, l’utilité et l’efficience médicales sont les seuls critères considérés comme valables pour supprimer les gaspillages et obtenir la baisse des dépenses de santé.

Ainsi, les mesures de rétablissement financier se conjuguent avec les mesures dites structurelles, dont l’objet est de modifier l’organisation du système de soins et le comportement des acteurs de santé, cela dans le sens d’une prise en charge de meilleure qualité et plus économe des deniers publics.

Avec la loi du 13 août 2004, nous nous sommes résolument engagés dans la voie d’une maîtrise médicalisée des dépenses de santé à la fois par une coordination effective des soins – lancement du dossier médical personnel, organisation du parcours de soins, meilleure collaboration entre l’hôpital et le secteur ambulatoire, mais aussi mesures d’aide à l’accès aux soins –, par la généralisation des démarches de qualité – création de la Haute Autorité de santé, instauration de nouveaux instruments contractuels d’incitation au bon usage des soins et amélioration des pratiques hospitalières –, par la responsabilisation du patient, le renforcement des contrôles et de la lutte contre les fraudes, enfin par la mise en place d’une nouvelle gouvernance de l’assurance maladie.

Monsieur le ministre, madame la ministre, nous vous rejoignons entièrement, cette fois-ci, sur le fait qu’à ce jour l’élan de cette maîtrise médicalisée se trouve brisé. Vous indiquez que seuls 60 % des objectifs fixés sont atteints. Ce n’est, en effet, guère satisfaisant.

Je me réjouis que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale comporte des éléments propres à relancer la dynamique de la réforme de 2004.

Au nombre des outils et dispositifs que je viens d’énumérer, je citerai pêle-mêle : un dossier médical personnel repensé, repositionné et nouvellement piloté ; une Haute Autorité de santé ayant un rôle renforcé en matière de prescription médicale au travers de la publication d’avis médico-économiques, de recommandations et de référentiels ; une plus lourde sanction des assurés sociaux qui n’ont pas de médecin traitant ou qui ne respectent pas le parcours de soins coordonnés ; la participation de l’Union nationale des organismes d’assurance maladie complémentaire aux négociations conventionnelles ; l’instauration de nouvelles peines planchers plus rapides, plus dissuasives en matière de fraudes aux prestations sociales, et ce tant pour les patients que pour les dispensateurs de soins.

Je retiens surtout que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale donne un véritable coup de pouce à la mise en œuvre et à la généralisation de nouveaux modes de rémunération complétant le paiement à l’acte ou s’y substituant.

Je suis convaincue que nous devons aller plus loin dans notre réflexion sur les mécanismes de rémunération et d’incitation des professionnels de santé libéraux.

En 2001, une étude de l’Institut d’économie publique montrait déjà très clairement les conséquences du système de rémunération des prescripteurs et producteurs de soins en termes d’arbitrage entre qualité du diagnostic et maîtrise des dépenses de soins.

Notre système de paiement procure au professionnel de santé un revenu égal à la multiplication du nombre d’actes effectués par le prix de chaque prestation, fixé dans le cadre conventionnel. Il faut bien le reconnaître, ce fee for service system, ou système de paiement à l’acte, peut inciter à la surproduction puisque le revenu dépend directement du nombre d’actes réalisés.