M. Denis Badré. Je suis amené à me spécialiser dans les causes un peu difficiles ! (Sourires.)

Mes chers collègues, je vous rassure tout de suite, je vous épargnerai le détail de cet amendement. S’il est très compliqué, c’est parce que la question est particulièrement complexe et c’est, me semble-t-il, ce que l’auteur de l’amendement voulait d’abord souligner.

Il s’agit de la transposition dans le droit national de la directive relative à la taxation de l’énergie, en mettant en conformité avec ces dispositions communautaires notre régime actuel de taxation de l’énergie.

Le système actuel est mauvais : il est compliqué et illisible. Cet amendement tend à l’améliorer, mais il n’y parvient que très modérément. (Nouveaux sourires.)

C’est d’abord un amendement de questionnement : Jean-Paul Amoudry souhaite savoir, monsieur le ministre, comment vous envisagez de poursuivre les travaux sur cette question. Il faut aboutir à un dispositif efficace, simple et conforme au droit communautaire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. Je m’associe à ce questionnement et je souhaite que notre légitime curiosité soit satisfaite par M. le ministre.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Eric Woerth, ministre. Voilà quelques jours, nous avons transmis à la commission des finances un projet de transposition de la directive « Énergie ». Voilà où nous en sommes. On ne peut pas aller plus vite !

C’est un sujet très compliqué, sur lequel la commission mènera très certainement une réflexion approfondie…

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Bien sûr !

M. Eric Woerth, ministre. …compte tenu de la complexité des paramètres.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je confirme que le Gouvernement nous a fait parvenir un projet de transposition. Nous avons estimé que le présenter sous la forme d’un amendement au collectif budgétaire n’était pas vraiment la meilleure démarche : il convient de consulter les collectivités intéressées ; il faut pour le moins réaliser une étude d’impact. Lorsque ces travaux auront été menés à leur terme, nous pourrons nous saisir de ce texte et nous prononcer en toute connaissance de cause.

Serons-nous prêts à la fin du mois de janvier ? Je n’en sais rien !

M. le président. Monsieur Badré, l’amendement n° 65 est-il maintenu ?

M. Denis Badré. Je suis évidemment de ceux qui souhaitent que la transposition des directives communautaires se fasse dans les meilleures conditions possibles, dans la clarté et de façon lisible.

Je fais confiance au Gouvernement, assisté par les experts de notre commission, si nécessaire.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Dont vous êtes, mon cher collègue !

M. Denis Badré. J’espère que nous aboutirons à un bon texte et je retire l’amendement.

M. le président. L’amendement n° 65 est retiré.

L'amendement n° 79, présenté par M. Botrel, Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 48, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le I de l'article 53 de la loi n° 2003-1311 du 30 décembre 2003 de finances pour 2004 est complété par trois alinéas ainsi rédigés :

« 3° - Les collectivités territoriales et établissements publics de coopération intercommunale peuvent bénéficier d'une attribution de compensation majorée au titre des années 2009 et 2010, dans la mesure où une perte de produit de taxe professionnelle afférente aux établissements de France Télécom est constatée entre 2003 et 2008, à condition que cette perte soit égale ou supérieure, pour les communes et les établissements publics de coopération intercommunale soumis au régime fiscal défini à l'article 1609 bis du code général des impôts et aux I et II de l'article 1609 quinquies C du même code, à une fraction du produit fiscal global de la taxe d'habitation, des taxes foncières et de la taxe professionnelle qu'ils ont perçu en 2008 et, pour les établissements publics de coopération intercommunale soumis au régime fiscal défini aux articles 1609 nonies B et 1609 nonies C du même code, à une fraction du produit de taxe professionnelle qu'ils ont perçu en 2008.

« Ces fractions sont fixées à 15 %.

« Par dérogation aux dispositions prévues deuxième alinéa du 2°, les communes et les établissements publics de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre éligibles à cette compensation majorée bénéficient d'attributions égales à 90 % de la perte en 2009 et en 2010, et 15 % en 2011 ».

II- La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Yannick Botrel.

M. Yannick Botrel. En transférant, en 2003, aux collectivités territoriales les bases de la taxe professionnelle de France Télécom, moyennant une minoration pérenne et réévaluable des dotations qu’il leur attribue annuellement, l’État a réalisé, de son point de vue, une excellente affaire, mais au détriment, voire aux dépens, des collectivités concernées.

L’État s’est effectivement garanti une recette stable, établie sur les bases de taxe professionnelle de 2003, qui se sont littéralement effondrées depuis. Pour la communauté d’agglomération de Lannion-Trégor, par exemple, ces dernières sont passées de 34 millions d’euros à 22 millions d’euros et, pour la communauté d’agglomération de Poitiers, de près de 34 millions d’euros à 18,4 millions d’euros en 2008.

C’est ainsi que les deux collectivités se retrouvent aujourd’hui, parmi d’autres, redevables à l’État d’un prélèvement qui n’a cessé de croître, pour la seconde, et qui, pour la première, repart à la hausse après un fléchissement en 2006.

Au total, sur la période, l’agglomération de Poitiers a perdu 6,7 millions d’euros et celle de Lannion-Trégor, 5,7 millions d’euros. Ces sommes, rapportées au budget de ces collectivités, sont bien sûr considérables, surtout dans le cas de Lannion-Trégor.

Dans une précédente réponse, Mme la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi a argué de compensations déjà obtenues par ces collectivités.

Celles-ci étant bien réelles, on ne saurait les contester. Pour autant, d’un point de vue comptable, ces mesures n’atténuent que très partiellement l’impact du dispositif et sont loin de compenser la perte constatée. Ainsi, la perte globale finalement comptabilisée représente 4,15 millions d’euros pour Lannion-Trégor et 5,3 millions d’euros pour l’agglomération de Poitiers.

De surcroît, le dispositif de compensation mis en place est fortement dégressif. Sur la fin de sa période d’application, c’est-à-dire en 2011, son impact financier sera peu significatif, d’où une nouvelle aggravation attendue de la situation.

L’amendement proposé tend donc à rendre justice à ces collectivités territoriales, lourdement pénalisées, à un moment où elles sont par ailleurs affectées par la conjoncture économique.

Le Sénat, en qualité de représentant des collectivités territoriales, ne peut qu’être sensible à tout ce qui touche à la nécessité d’instaurer un rapport équitable entre ces collectivités et l’État. Quant à ce dernier, il ne saurait avoir pour objectif, en perpétuant un système aberrant, bien que profitable pour lui, de mettre ces mêmes collectivités en difficulté.

Enfin, compte tenu de l’évolution annoncée du régime de la taxe professionnelle à l’échéance de 2011, que le Gouvernement semble vouloir mettre en débat, la compensation n’aurait plus lieu d’être au-delà de cette date, alors même qu’elle est essentielle pour les collectivités concernées.

Le but de l’amendement que je soumets à notre assemblée est simple : que nul ne soit lésé ! En d’autres termes, que les collectivités ne soient pas plus longtemps les victimes de ce marché de dupes !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. Comme notre collègue Botrel l’a indiqué, un amendement analogue a été présenté lors de notre séance du 9 décembre 2008, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2009. Par conséquent, nous ne reviendrons pas sur le fond du sujet.

Néanmoins, je voudrais rappeler que le ministre alors présent au banc du Gouvernement, Mme Christine Lagarde, avait proposé d’inclure le sujet dans la réflexion sur la réforme de la fiscalité locale. Je ne sais pas si vous pourrez nous en dire plus ce soir, monsieur le ministre.

Considérant que le sujet n’a pas pu progresser depuis le 9 décembre, la commission, après avoir entendu vos explications, demandera aux auteurs de cet amendement de bien vouloir le retirer. Naturellement, elle ne nie pas pour autant les difficultés qui ont été signalées et qui sont certainement cruelles pour les budgets des collectivités concernées.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Eric Woerth, ministre. Cette discussion est récurrente.

En 2006, il a été décidé de réévaluer cette compensation, sur plusieurs années, à hauteur de 55 millions d’euros. Le 9 décembre dernier, Christine Lagarde a effectivement déclaré, devant le Sénat, qu’il faudrait essayer de trouver une solution plus définitive que cette solution de compensation ponctuelle. Depuis, le débat n’a pas évolué.

Ce sujet doit donc être traité dans le cadre de la prochaine réforme de la fiscalité des collectivités locales, qui suivra la réforme, également à venir, et la discussion à laquelle elle donnera lieu en 2009, de l’organisation de ces collectivités.

Par conséquent, le Gouvernement n’entend pas revenir sur le dispositif qui a été instauré récemment et, compte tenu de ces explications, je souhaiterais que vous retiriez votre amendement, monsieur Botrel.

M. le président. Monsieur Botrel, l’amendement n° 79 est-il maintenu ?

M. Yannick Botrel. La question que j’ai soulevée ne relève pas de la politique politicienne. Pour les collectivités concernées, c’est une question réelle et grave, dont l’existence est attestée par deux faits.

Premièrement, la loi de finances rectificative pour 2006, en introduisant le système de compensation dont M. le ministre vient de faire état, a reconnu qu’un problème se posait véritablement. Mais elle n’est pas allée jusqu’au bout de la démarche car certaines collectivités rencontrent toujours des difficultés. J’y reviendrai.

Deuxièmement, le 9 décembre 2008, lorsque cette question a été évoquée devant notre assemblée, Mme Lagarde a aussi reconnu de manière implicite l’existence d’un problème, puisqu’elle a proposé la constitution d’un groupe de travail. Elle a d’ailleurs avancé cette proposition avant de demander que l’amendement soit retiré.

Les conséquences du dispositif en place sont extrêmement dommageables. Monsieur le ministre, j’ai entendu votre réponse. Elle m’interpelle et, dans le même temps, m’intéresse à certains égards. Vous indiquez que le problème doit être résolu. Je n’en doute pas ! Mais, je voudrais savoir comment nous allons procéder et quel calendrier nous allons respecter pour atteindre cet objectif.

Les budgets des collectivités concernées seront élaborés d’ici au mois de mars. Bien évidemment, nos collègues élus de ces collectivités attendent des réponses très précises quant à la manière dont leurs budgets vont être construits.

Voilà dans quelle perspective nous nous plaçons ! Je souhaiterais donc que M. le ministre puisse nous indiquer le plus précisément possible la méthode et le calendrier que le Gouvernement compte retenir pour traiter cette question.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Eric Woerth, ministre. Le groupe de travail va se mettre en place. Les propos de Christine Lagarde seront donc suivis d’effet. Ce sujet ne prête pas à débat !

M. Denis Badré. C’est un vrai sujet !

M. Eric Woerth, ministre. C’est un sujet qui n’est effectivement pas d’ordre politique, monsieur Botrel, et je vous remercie de l’avoir souligné. Ce sujet n’est ni de droite, ni de gauche : il est technique !

M. Jean-Jacques Jégou. Cela nous coûte très cher, monsieur le ministre ! De plus, la situation est très injuste !

M. le président. Monsieur Botrel, qu’advient-il de votre amendement ?

M. Yannick Botrel. Je ne reprendrai pas les propos que j’ai tenus car cela n’apporterait rien de plus à ce que j’ai voulu exposer. Je veux bien prendre acte de la position que M. le ministre vient de confirmer. Mais je ne voudrais pas que le groupe de travail dont il est question soit un moyen que d’autres ont déjà utilisé en leur temps : un problème se pose, on crée une commission... Je ne souhaite pas que nous en arrivions là !

Cela étant dit, j’accepte, dans un esprit constructif, de retirer mon amendement. Mais j’entends bien que M. le ministre nous apporte ensuite des précisions quant aux modalités de mise en place et de fonctionnement de ce groupe de travail.

Mme Nicole Bricq. Rendez-vous au collectif 2009, le 21 janvier prochain !

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.

M. Jean-Jacques Jégou. Je voudrais simplement souligner la gravité de ce sujet, que je connais bien en tant qu’élu d’un établissement public de coopération intercommunale accueillant un site de France Télécom depuis des années. Notre situation ne cesse de s’aggraver !

Monsieur le ministre, nous avons bien noté que Mme Christine Lagarde allait réunir un groupe de travail. Cette réflexion devrait être menée en concertation avec tous les acteurs concernés afin de bien cerner la situation.

Ainsi, il ne peut échapper au Gouvernement que ces difficultés affectent souvent – nous sommes dans ce cas de figure, mais c’est un hasard – des établissements publics de coopération intercommunale qui sont pauvres en taxe professionnelle. Et, chaque année, on continue de nous taxer au travers de nouvelles déductions.

Il y a donc là un vrai sujet ! Nous serons très heureux de participer à la réflexion et d’aider le Gouvernement à progresser sur le dossier.

M. le président. L’amendement n° 79 est retiré.

Articles additionnels après l'article 48
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2008
Articles additionnels après l'article 48 bis

Article 48 bis 

I. - Après l'article L. 1611-2 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 1611-2-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 1611-2-1. - Dans le cadre des missions confiées aux maires en tant qu'agents de l'État, les communes assurent la réception et la saisie des demandes de cartes nationales d'identité et de passeports ainsi que la remise aux intéressés de ces titres. »

II. - Sous réserve des décisions passées en force de chose jugée, les communes ne peuvent se prévaloir, sur le fondement de l'incompétence du pouvoir réglementaire à mettre à leur charge les dépenses résultant, postérieurement au 25 novembre 1999, de l'exercice par les maires des missions de réception et de saisie des demandes de cartes nationales d'identité ainsi que de remise aux intéressés de ces titres, d'un préjudice correspondant à ces dépenses.

Sous réserve des décisions passées en force de chose jugée, les communes ne peuvent se prévaloir, sur le fondement de l'incompétence du pouvoir réglementaire à mettre à leur charge les dépenses résultant, postérieurement au 26 février 2001, de l'exercice par les maires des missions de réception et de saisie des demandes de passeports ainsi que de remise aux intéressés de ces titres, d'un préjudice correspondant à ces dépenses.

III. - En contrepartie de l'application du II, une dotation exceptionnelle est attribuée aux communes au titre de l'indemnisation des charges résultant pour elles, jusqu'au 31 décembre 2008, de l'application du décret n° 99-973 du 25 novembre 1999 modifiant le décret n° 55-1397 du 22 octobre 1955 instituant la carte nationale d'identité et du décret n° 2001-185 du 26 février 2001 relatif aux conditions de délivrance et de renouvellement des passeports, pour le recueil des demandes et la remise aux intéressés des cartes nationales d'identité et des passeports.

Cette dotation, d'un montant de 2 € par titre dans la limite de 65 millions d'euros, est répartie entre les communes en fonction du nombre de titres qu'elles ont délivrés en 2005, 2006, 2007 et 2008. Si le nombre total de titres émis ces quatre années est supérieur à 32,5 millions, la somme de 65 millions d'euros est répartie entre les communes proportionnellement au nombre de titres qu'elles ont émis en 2005, 2006, 2007 et 2008.

Les communes qui ont engagé un contentieux indemnitaire fondé sur l'illégalité du décret n° 99-973 du 25 novembre 1999 ou du décret n° 2001-185 du 26 février 2001 précités ne sont éligibles à cette dotation exceptionnelle qu'à la condition que cette instance soit close par une décision passée en force de chose jugée et excluant toute condamnation de l'État.

M. le président. La parole est à M. Bernard Vera, sur l'article.

M. Bernard Vera. L’article 48 bis porte sur la question de la compensation de la charge de suivi administratif d’édition des documents personnels d’identité de nos compatriotes.

Cette mission a effectivement été confiée aux services des collectivités locales, donc aux mairies, et fait l’objet d’un important contentieux car l’État ne prend pas en compte la réalité des coûts supportés par les collectivités. Ainsi, de nombreuses villes ont déposé un recours devant la juridiction administrative. Elles ont obtenu gain de cause et reçu une indemnisation importante quant à la charge transférée.

Ce contentieux commence à coûter cher : l’ensemble des recours couronnés de succès représente d’ores et déjà une charge de 118 millions d’euros imputable sur le budget de l’État !

L’article 48 bis tend donc à éviter toute prolifération de contentieux sur ce sujet en inscrivant, dans les charges de l’État, une provision maximale de 65 millions d’euros, répartie entre toutes les collectivités locales à concurrence d’une prise en charge de deux euros par titre d’identité traité.

Il s’agit donc d’une forme de dispositif pour solde de tout compte, qui viendrait a priori éteindre les contentieux, dans l’attente de l’adoption d’un dispositif pérenne de compensation des charges administratives transférées.

Nous avions présenté à cet article 48 bis un amendement, qui a été déclaré irrecevable, tendant à majorer le montant unitaire de la prise en charge des documents d’identité traités par les services municipaux. Cette proposition s’appuyait sur des dispositions, déjà votées, qui ont retenu des niveaux plus élevés d’indemnisation des collectivités, ces derniers dépassant parfois six euros par titre émis.

En effet, sans nier la portée de ce qui a manifestement été négocié entre le ministère de l’intérieur et l’Association des maires de France, il va sans dire que le dispositif de l’article 48 bis est une forme de compromis, bien insuffisant au regard de la réalité des charges transférées.

Nous pouvons donc nous interroger sur ce qui empêche l’État, quand son déficit budgétaire avoisine 80 milliards d’euros, de prévoir, pour compenser les charges transférées aux services publics locaux, une dotation non pas de 65 millions d’euros, mais de 130 millions d’euros, voire de 200 millions d’euros. De fait, cela correspondrait un peu plus à la réalité du coût supporté.

Plus directement, alors même qu’il est évident que le dispositif mis en œuvre par voie réglementaire créait les conditions de ce contentieux, pourquoi continuer à faire participer les collectivités locales, contre leur gré, à la maîtrise du déficit public ? En effet, pour récupérer les sommes qui ne leur seront pas versées, les élus locaux augmenteront une nouvelle fois les impôts, ce qu’il faudrait éviter de faire dans le contexte économique actuel.

Enfin, cet article 48 bis soulève une question qui est loin d’être secondaire, celle de la préemption sur les procédures en cours. En effet, la sollicitation de l’indemnité qu’il instaure emportera extinction de toute procédure contentieuse. Est-ce là, mes chers collègues, une bonne manière de résoudre les problèmes de relation entre l’État et les collectivités locales ? Nous ne le pensons pas !

Aussi, nous ne pourrons voter cet article en l’état. Nous attendons du débat, comme de l’avis de la CMP, qu’il préserve les droits des communes ayant instruit un recours contre les décrets incriminés.

M. le président. L'amendement n° 173, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

I. - Supprimer les I et II de cet article.

II. - En conséquence, rédiger comme suit le début du III de cet article :

Une dotation exceptionnelle...

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Pour être tout à fait précis, le Gouvernement a déposé un amendement n° 197 qui serait susceptible de se substituer à l’amendement n° 173, dans la mesure où il reflète un état des choses plus récent. Je souhaiterais donc entendre le Gouvernement présenter l’amendement n° 197 avant d’aller plus avant sur le sujet.

M. le président. L'amendement n° 197, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. - Dans la première phrase du deuxième alinéa du III de cet article, remplacer le montant :

2 €

par le montant :

3 €.

 

II. - Dans les première et seconde phrases du même alinéa, remplacer le montant :

65 millions

par le montant :

97,5 millions.

La parole est à M. le ministre.

M. Eric Woerth, ministre. L'article 48 bis met fin à une situation de contentieux qui est défavorable aux communes comme à l'État.

Le Conseil d’État a indiqué, en 2005, que seule la loi peut confier aux maires la mission de recueillir et de délivrer les titres d’identité. Or, en 1999 et en 2001, le gouvernement d’alors avait confié, par décret, cette mission aux maires. Cette erreur de droit a été la source d’un certain nombre de contentieux, fondés sur un simple vice de forme.

Dans ces conditions, le Gouvernement a conclu un accord avec le président de l’Association des maires de France, en retenant le principe d’indemniser, par souci d’équité, toutes les communes, et pas seulement celles qui ont engagé un contentieux. Toutefois, je suis sensible aux interrogations formulées par la commission des finances.

Le Gouvernement vous propose, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur général, de faire un pas en relevant le montant de l’indemnisation de deux euros à trois euros par titre émis ces quatre dernières années.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !

M. Eric Woerth, ministre. Il s’agit là d’un geste supplémentaire significatif pour les titres émis par les communes ces dernières années. Cela complète le compromis auquel nous étions parvenus pour l’avenir, lors de l’examen du projet de loi de finances. Pour l’avenir, je le rappelle, la délivrance des titres biométriques donnera lieu à une indemnisation pour les 2 000 communes volontaires. L’indemnisation par station qui s’élevait à 3 200 euros a été portée par le Gouvernement à 5 000 euros lors de l’examen par le Sénat du projet de loi de finances pour 2009.

Nous sommes, me semble-t-il, parvenus à un bon équilibre pour ce qui concerne tant les stations biométriques que l’indemnisation par titre des communes.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. En fait, se posent ici trois questions différentes, qui ont d’ailleurs été traitées de manière approfondie par la commission des finances, notamment par Mme Michèle André, rapporteur spécial pour les questions relevant du ministère de l’intérieur.

Premièrement, il s’agit de traiter les conditions de dénouement du contentieux existant entre les communes et l’État pour ce qui concerne la délivrance des documents d’identité.

Deuxièmement, il s’agit d’examiner la question de l’équipement en station biométrique de certaines communes pour délivrer les nouveaux documents d’identité biométriques et des conditions de compensation.

Troisièmement, enfin, il s’agit d’aborder la rémunération des services afférents aux machines biométriques, en se demandant notamment si la prestation englobe ou non la photographie, une question que nous allons examiner dans quelques instants.

Tels sont les trois sujets connexes que nous avons à traiter.

Pour le passé, au départ, la commission des finances n’était pas très enthousiaste à propos de la transaction intervenue entre Mme le ministre de l’intérieur et M. le président de l’Association des maires de France, à savoir une indemnisation de deux euros par titre émis à compter du 1er janvier 2005. Il nous semblait que le compte n’y était pas, puisque cette indemnisation représentait 65 millions d’euros, contre une condamnation vraisemblable de l’État à hauteur de 118 millions d’euros. Telle est la raison qui avait conduit la commission des finances à déposer l’amendement n° 173.

Toutefois, par l’amendement n° 197, le Gouvernement propose une indemnisation de 97,5 millions d’euros, une somme plus proche des 118 millions d’euros.

Dans ces conditions, nous pouvons accepter cette avancée, qui est significative puisqu’elle représente un supplément de 32,5 millions d’euros à étaler sur les prochaines années.

En conséquence, la commission retire l’amendement n° 173 et émet un avis favorable sur l’amendement n° 197.

Par ailleurs, nous avons obtenu, lors de l’examen de la seconde partie de la loi de finances, une revalorisation de l’indemnisation forfaitaire, qui est passée de 3 200 euros à 5 000 euros, accordée aux communes qui s’équiperont d’une station biométrique. C’est là encore un geste significatif de l’État, bien que cette revalorisation ne compense pas la totalité des coûts entraînés, loin de là ! Le maire de Chantilly le sait bien, lui qui a été l’un des tout premiers à implanter de telles stations à l’intérieur de sa mairie. Mme le rapporteur spécial s’est d’ailleurs rendu dans cette mairie pour voir le fonctionnement de ce dispositif.

M. le président. L'amendement n° 173 est retiré.

La parole est à Mme Michèle André, pour explication de vote sur l'amendement n° 197.

Mme Michèle André. M. le rapporteur général a résumé la situation.

D’une manière générale, j’ai l’impression qu’il a fallu faire preuve d’une grande patience pour argumenter et convaincre les services du ministère de l’intérieur de mieux rémunérer les mairies.

Nous sommes actuellement dans la problématique du contentieux, qui représente 118,2 millions d’euros. Le Gouvernement réalise effectivement une avancée, en proposant une indemnisation de 97,5 millions d’euros.

Comme M. Vera l’a souligné tout à l'heure, voilà une manière un peu curieuse de considérer les communes, qui méritent d’être traitées en adultes pour négocier clairement dans la transparence. Toutefois, un tiens vaut mieux que deux tu l’auras ! Je suppose que les maires des communes concernées – 336 requêtes ont été déposées au 1er septembre 2008 – seront satisfaits. À défaut, – et vous savez pouvoir compter sur le rapporteur spécial de votre commission des finances, mes chers collègues – nous y reviendrons.