M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Thiollière, rapporteur. On dit que la loi doit prévoir l’essentiel. Or, ma chère collègue, vous êtes entrée dans un luxe de détails qui devraient n’être énumérés que dans le cahier des charges !

Même si la commission est tout à fait sensible aux notions de diversité et de pluralisme d’expression, elle ne peut pas accepter que figure dans la loi un tel catalogue.

C’est la raison pour laquelle elle émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Albanel, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable. En effet, la définition du pluralisme relève à n’en pas douter du cahier des charges. Je rappelle que toute modification de ce dernier intervient par voie de décret, après avis du CSA, et est soumise à une consultation publique lorsque les modifications sont importantes, à une consultation préalable des collectivités d’outre-mer pour toutes les dispositions qui leur sont particulières, et à une consultation des conseils d’administration des sociétés concernées, ainsi que leur statut le prévoit.

Je suis étonnée par les précisions contenues dans le texte de cet amendement et même par l’emploi de certains termes : « En matière de fictions nationales et européennes, ce pluralisme s’apprécie notamment dans le choix des thématiques, des auteurs, des interprètes, indépendamment des logiques de formatage, de marketing et du star-system. » Comment M. Ralite a-t-il pu envisager que les termes « marketing » et « star-system » figurent dans la loi ?

M. Jacques Legendre, président de la commission des affaires culturelles. Cela m’avait choqué aussi !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 114.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 297, présenté par MM. Assouline, Bel et Bérit-Débat, Mmes Blandin, Blondin et Bourzai, MM. Boutant, Domeizel et Fichet, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, M. Sueur, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après le deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour le I de l'article 44 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Elle édite et diffuse un service dénommé France 2 chargé de concevoir et de programmer des émissions de télévision destinées à être diffusées sur l'ensemble du territoire métropolitain. Ce service propose une programmation généraliste, de référence et diversifiée à l'intention du public le plus large, favorise la création de productions télévisuelles originales et assure une information nationale et internationale.

La parole est à M. David Assouline.

M. David Assouline. Nous venons de nous exprimer sur les dangers de suppression de l’existence légale des différentes chaînes.

France 2 constitue aujourd’hui le vaisseau amiral de France Télévisions.

Dois-je rappeler que « la deuxième chaîne » de l’ORTF – c’est ainsi qu’elle était dénommée – a commencé à émettre le 21 décembre 1963, voilà donc quarante-cinq ans ?

Je me ferai l’écho des remarques que formulait tout à l’heure avec finesse M. Sueur : j’entends encore aujourd’hui parler de « la deuxième chaîne » ! Cela prouve à quel point l’attachement à ces identités est fort.

Nous devons à cette deuxième chaîne des moments de télévision inoubliables, reflétant la spécificité du service public audiovisuel.

Souvenez-vous, monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues : Les Dossiers de l’Écran, les Shadoks, Le Grand Échiquier ! Toutes ces émissions sont regrettées. Des Chiffres et des Lettres existe encore ! 

Le début des années soixante-dix marque l’avènement de grandes séries : Arsène Lupin, les Rois Maudits, les Brigades du Tigre. Qui parmi vous ne s’en souvient pas ?

J’ai revu récemment les Rois Maudits dans la version de l’époque : cette première version, plus que la récente, qui a été réalisée à grand renfort de moyens techniques, m’a subjugué, je vous l’assure !

La société nationale de programmes Antenne 2 naquit le 1er janvier 1975. À cette époque apparurent Apostrophes mais aussi Champs Élysées ou Récré A2.

Antenne 2 fut ensuite la première chaîne à proposer un journal du matin, dans Télématin, en 1985. C’était alors une grande audace !

J’ajoute que la chaîne émet de la publicité depuis le 1er janvier 1971.

Ce résumé des grands moments des quarante-cinq années d’existence de la deuxième chaîne – ensuite nommée Antenne 2 et enfin France 2 – démontre, s’il en était besoin, l’importance de l’existence d’une télévision généraliste, diversifiée et ambitieuse, remplissant parfaitement sa mission de service public.

Et je précise, à l’intention de tous ceux qui ont parfois décrié les périmètres actuels en les considérant comme trop figés et ne permettant plus l’innovation, que l’histoire d’Antenne 2 – puis France 2 – est précisément une histoire d’innovation. J’ai égrené quelques-unes de ses audaces, y compris dans le domaine du journal d’information.

Le présent amendement a donc pour objet de pérenniser l’existence légale de ce qui constitue le « vaisseau amiral » de France Télévisions.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Thiollière, rapporteur. Je ne réitérerai pas l’argumentaire que j’ai déjà proposé sur la question, même si celle-ci est maintenant déclinée pour chacune des chaînes du groupe France Télévisions.

Je comprends – et je partage – la pointe de nostalgie qui nous a envahis, sur toutes ces travées, à l’évocation de programmes que nous avons regardés étant enfants, adolescents ou étudiants ! (Sourires.)

Cela dit, nous sommes là pour préparer l’avenir de France Télévisions. Et, même si nous regrettons notre jeunesse, nous nous devons, en tant que législateurs, d’inventer cet avenir ! Telle est la raison pour laquelle, ne pouvant céder au culte du passé, aussi sympathique soit-il, nous émettons un avis défavorable sur cet amendement !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Albanel, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable, même si je m’associe moi aussi à tous les souvenirs évoqués. J’ajouterai d’ailleurs à la liste de M. Assouline Les Gens de Mogador ! (Sourires.)

M. Jacques Legendre, président de la commission des affaires culturelles. C’est toute une génération qui s’exprime ! (Nouveaux sourires.)

M. le président. La parole est à M. Hugues Portelli, pour explication de vote.

M. Hugues Portelli. Un certain nombre d’amendements similaires ayant été déposés sur cet article, mon explication vaudra pour celui-ci et les suivants.

Nous ne sommes pas là pour légiférer en regardant dans le rétroviseur. Nous devons au contraire chercher à comprendre ce que sera demain, voire après-demain, l’état de la question sur laquelle nous travaillons.

Cela n’a donc pas de sens de légiférer en s’extasiant sur le côté sympathique de la télévision de papa et de grand-papa, et en prétendant la pérenniser.

Notre rôle est de décider si nous voulons ou non un service public, et si nous lui donnons les moyens d’exister. Quant à la manière dont il évoluera, ce n’est pas à nous d’en décider ; la vie de l’entreprise s’en chargera, en fonction des téléspectateurs et des auditeurs. Et cela, encore une fois, ce n’est pas notre travail !

M. Jean-Jacques Mirassou. Mais si ! Les auditeurs et les téléspectateurs y tiennent aussi !

M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.

M. David Assouline. Ce que je viens d’entendre m’amuse. En effet, en évoquant son parcours de quarante-cinq années, j’ai justement cité tout ce qui a fait que la deuxième chaîne a toujours été en avance. Il n’est donc pas question de rétroviseur !

Au contraire, cette chaîne va bien entendu continuer à évoluer. Et c’est précisément pourquoi nous ne voulons pas la sacrifier. Pour cela, elle peut bien changer de nom. Ce n’est d’ailleurs pas le problème, puisqu’elle a déjà eu trois noms différents. La vraie question est donc celle de la préservation de l’entité elle-même. De plus, notre position ne tient en rien du conservatisme.

Ce qui est en cause, c’est le périmètre de la chaîne. Je sais bien que nous faisons semblant de ne pas nous comprendre, mais tout le monde ici est conscient du fait que l’enjeu tient non pas au logo ou au nom, mais bien au périmètre et à la fonction que l’on donne à la chaîne.

Je vous le dis très sincèrement : je ne pense en aucune façon que regarder de l’avant et tendre vers la modernité, ce soit faire fi du passé. Je vous dirai même que j’ai beaucoup réfléchi à cette phrase que j’ai pourtant souvent scandée moi-même quand j’étais jeune : « Du passé faisons table rase ».

Je suis maintenant persuadé que, quand on commence à vouloir faire table rase du passé, on se débarrasse de beaucoup trop de choses, et qu’en général on ne prépare pas l’avenir. Il faut à la fois se souvenir d’où l’on vient et savoir accepter résolument la mutation et l’innovation.

C’est d’ailleurs ainsi que l’on peut réformer. En effet, je peux vous assurer que toutes les réformes qui sont aujourd’hui nécessaires à la modernisation de notre pays seraient beaucoup plus faciles à effectuer et à faire accepter aux gens si, en leur annonçant une réforme, on n’en profitait pas pour casser tout ce qui existe.

Il est amusant, monsieur Portelli, que ce soit vous qui parliez de modernité et moi qui défende le passé, alors même que je n’ai pas l’impression, dans le travail que j’accomplis à la commission des affaires culturelles, de ne m’attacher qu’à de vieilles choses. Ainsi, dans mon dernier rapport, j’ai étudié l’impact des nouveaux médias sur la jeunesse.

Je réfléchis à tout ce qui est innovant. Quant à vous, c’est seulement maintenant que vous vous réveillez, pour vous énerver parce qu’on discute trop. Je regrette – car je connais votre point de vue et celui de vos collègues sur les autres aspects, beaucoup plus fondamentaux, de cette loi – que vous fassiez preuve de si peu d’énergie au regard du sentiment que nous avons tous, dans cet hémicycle, d’avoir été bafoués, compte tenu de la mise en œuvre de l’essentiel de ce projet de loi avant même que nous en discutions.

Arrêtez donc de vous énerver au motif que nous essayons de préciser un peu les choses, alors même que vous avez été méprisés pour ce qui relève du cœur de votre fonction de parlementaire. Or, sur la question que j’évoque, on n’a pas vu la droite exprimer la moindre colère dans cet hémicycle !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 297.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 298, présenté par MM. Assouline, Bel et Bérit-Débat, Mmes Blandin, Blondin et Bourzai, MM. Boutant, Domeizel et Fichet, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, M. Sueur, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après le deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour le I de l'article 44 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Elle édite et diffuse un service dénommé France 3 chargé de concevoir et de programmer des émissions de télévision à caractère national, régional et local, destinées à être diffusées sur tout ou partie du territoire métropolitain. Ce service propose une programmation généraliste et diversifiée. Elle assure en particulier une information de proximité et rend compte des événements régionaux et locaux. Elle contribue à la mise en valeur de la richesse de ces territoires et contribue à favoriser l'expression des langues régionales.

La parole est à Mme Bariza Khiari.

Mme Bariza Khiari. Je rappellerai que c’est au moment de l’éclatement de l’ORTF, en 1974, qu’a été créée la Société nationale de programmes de télévision France Régions 3, ou FR3, chargée de gérer et de développer les centres régionaux de radio et de télévision. Elle comprenait alors vingt-deux stations régionales et vingt-neuf centres radiophoniques régis par onze directions.

On comptait à l’époque sur les productions de vingt-deux stations régionales, équivalant alors à trente-cinq minutes de télévision régionale !

La déstabilisation profonde que connaît aujourd’hui le service public de la télévision du fait de la réforme en cours met en danger, à terme, son existence même.

Le démantèlement de France Télévisions est en effet une menace bien réelle au regard du sous-financement structurel de la télévision publique qu’organise ce projet de loi. Cela a été dit et redit, et l’absence de réponse claire de Mme la ministre confirme nos préventions.

De ce point de vue, France 3 est la chaîne la plus exposée. Pourtant, ses rédactions nationale et européenne, ses vingt-quatre rédactions régionales, ses trente-cinq rédactions locales, ses cinquante-cinq bureaux décentralisés, ainsi que leurs moyens de production propres, forment un réseau unique en Europe.

Présente sur tous les supports de diffusion, avec notamment la diffusion de vingt-quatre décrochages régionaux sur la télévision numérique terrestre, ou TNT, France 3 met à disposition la totalité de ses programmes à la totalité de la population française, prouvant ainsi ce que l’innovation peut apporter à la proximité. C’est ce que Jean-Pierre Sueur entend par « identité humaine », alors que vous réduisez la question à une identité juridique.

Malheureusement, ce remarquable outil de fabrication d’une télévision de qualité, s’adressant à tous les Français en permettant par exemple la diffusion de programmes dans sept langues régionales différentes et la production de quatre cents reportages inédits chaque jour, pourrait bien être réduit au simple rôle de variable d’ajustement dans les restructurations que les responsables de France Télévisions devront conduire dans les années qui viennent afin d’éviter la faillite de leur entreprise.

En conséquence de la merveilleuse réforme dont nous débattons, les décrochages de sept minutes à 19 heures 55 viennent d’être supprimés pour diffuser les cinq dernières minutes de publicité avant 20 heures ! Désormais, seul le journal d’informations locales de 18 heures 38 subsiste, mais pour combien de temps encore, madame la ministre ?

La « vente à la découpe » de France 3 au bénéfice, par exemple, des acteurs de la presse quotidienne régionale constituerait une perte irréparable pour notre télévision publique, qui affecterait profondément les Français. Ces derniers placent en effet régulièrement la « chaîne des régions » en tête de leurs chaînes de télévision préférées.

Je n’ai l’intention d’évoquer ni le passé, comme M. Portelli nous a reproché de le faire, ni l’avenir, dont a parlé M. Assouline. Je parlerai du présent.

Vous le savez bien, le corollaire d’une mondialisation désincarnée, c’est l’attachement au niveau local, qui s’ancre dans des territoires, dont chacun a sa spécificité, fort bien valorisée par France 3.

Mais le présent, ce sont aussi, bien évidemment, tous les élus locaux de la nation, qui marquent dès aujourd’hui, en relayant les inquiétudes des personnels des directions régionales de France 3, leur attachement particulier à la continuité du service public de l’audiovisuel sur l’ensemble du territoire, que ne pourront assurer des opérateurs privés.

Il est donc essentiel que la loi garantisse la présence d’un service audiovisuel public de proximité, offrant à tous les Français, quel que soit leur lieu de résidence, un accès à des programmes diversifiés et de qualité, ainsi qu’à une information pluraliste, couvrant l’ensemble de l’actualité, du local à l’international.

Tel est le sens de notre proposition d’amendement, qui prévoit la reconnaissance légale de France 3.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Thiollière, rapporteur. Vous ne serez pas surpris que la commission émette le même avis que celui qu’elle a précédemment exprimé au sujet de France 2.

En revanche, je tiens à souligner que, s’agissant de nos territoires, nos collègues sont particulièrement attachés à ce que la vitalité locale soit relayée, sous forme d’informations, par une chaîne de télévision du service public. Or, cela nous est garanti aussi bien par la loi que par le cahier des charges.

Cet aspect a été évoqué assez longuement hier lors de la discussion générale. De ce point de vue, nous sommes donc bien entendu satisfaits, ce qui ne nous empêche pas de veiller à ce que les services de France Télévisions disposent d’une telle chaîne permettant de témoigner de la vitalité de nos territoires à travers des documentaires, des émissions d’information et un ensemble de programmes qui leur seront dédiés.

Telles sont les raisons pour lesquelles, si concernés que nous soyons par ces problématiques, notre avis sur cet amendement est défavorable. Encore une fois, nous n’allons pas citer les chaînes les unes après les autres dans la loi, dont ce n’est pas le rôle.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Albanel, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable, pour les mêmes raisons.

Je voudrais simplement faire remarquer, puisqu’on ne cesse de répéter que France Télévisions souffre de sous-financement, que le groupe va disposer d’un budget de pratiquement 3 milliards d’euros, ce qui n’est pas rien, dont près de 2,5 milliards d’euros de ressources publiques, ce qui n’est pas non plus négligeable. Qui plus est, en ces temps de crise, qui affectent également le marché publicitaire, avoir une garantie de ressources publiques de 2,5 milliards d’euros est une chose considérable.

Dans le projet que nous portons, la dimension régionale et locale est bien sûr extrêmement forte. Elle figure dans l’exposé des motifs, ainsi, bien entendu, que dans le cahier des charges. Il n’est donc nullement question de sacrifier cette dimension.

Sur ce sujet, beaucoup de fantasmes circulent. Toutes ces allégations n’ont rigoureusement aucune réalité. D’ailleurs, celle qui consiste à annoncer l’achat des antennes de France 3 par la PQR, la presse quotidienne régionale, est tout simplement ridicule, surtout quand on considère la situation réelle de la PQR aujourd’hui ! Tout cela est donc sans aucun fondement.

J’ajoute que l’information va se trouver accrue, plutôt que réduite, pour ce qui est de sa dimension locale et régionale, avec la création de programmes inédits qui proposeront cinq minutes d’informations régionales et trois minutes d’informations locales supplémentaires, sans compter également cinq minutes dans Soir 3.

Mme Catherine Tasca. Sans moyens !

Mme Christine Albanel, ministre. Voilà qui constitue précisément une affirmation de la dimension régionale et locale de France 3.

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour explication de vote.

M. Jean-Jacques Mirassou. Vos propos sont loin de nous avoir convaincus. D’ailleurs, en dehors même de la représentation nationale, tout le monde peut s’apercevoir, pour peu d’ouvrir les yeux et les oreilles, que, dans les différentes régions, les salariés de France 3 ne sont guère convaincus non plus. Ils expriment depuis quelques semaines leurs inquiétudes au sujet de leur devenir et de celui de leur entreprise.

Par ailleurs, comment pouvez-vous affirmer que France 3 continue d’assurer son rôle, c'est-à-dire de garantir la pérennité de l’information, alors qu’il a été démontré tout à l’heure que, ne serait-ce que par la suppression de la rediffusion du journal local, telle qu’elle existait auparavant à 19 heures 50, la quantité d’information a subi de fait une amputation ? Les Françaises et les Français, fort attachés à France 3, désapprouvent bien entendu ce type de mesures.

Pour ces raisons, vous comprendrez, madame la ministre, que vous ne nous ayez pas convaincus. Tout au contraire, nous continuons à affirmer la nécessité et la pertinence de notre amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 298.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 301, présenté par MM. Assouline, Bel et Bérit-Débat, Mmes Blandin, Blondin et Bourzai, MM. Boutant, Domeizel et Fichet, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, M. Sueur, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après le deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour le I de l'article 44 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Elle édite et diffuse un service dénommé France 5 chargé de concevoir et de programmer des émissions de télévision à caractère éducatif et favorisant l'accès au savoir, à la connaissance et à la formation, destinées à être diffusées sur l'ensemble du territoire métropolitain. Cette programmation doit contribuer à l'éducation à l'image et aux médias. Ce service favorise la diffusion de programmes éducatifs et de formation sur des supports diversifiés ainsi que leur utilisation par d'autres services de communication audiovisuelle et par les organismes d'enseignement et de formation. »

La parole est à Mme Catherine Tasca.

Mme Catherine Tasca. Au risque d’accroître l’impatience mais non, je l’espère, l’incompréhension, nous présentons un amendement qui a pour objet d’affirmer et de garantir l’existence de France 5 dans son périmètre actuel.

Cette série d’amendements d’ailleurs ne plaide pas en faveur d’un statu quo  cela semble être l’une de vos inquiétudes – mais constitue plutôt pour nous une clause de non-recul. Nous pensons que la nation a consacré à l’audiovisuel public et à ses différentes chaînes un effort considérable et qu’il est de notre devoir d’affermir ce socle et de garantir qu’il ne sera pas renié à l’avenir.

J’ai plaisir à parler de France 5 parce que c’est une chaîne encore toute jeune dans le panorama de l’audiovisuel public. Lorsque fut lancée, en décembre 1994, une chaîne publique de la connaissance et du savoir sur le cinquième réseau analogique, peu d’observateurs auraient parié que, près de quinze ans plus tard, celle-ci aurait pris une place incontournable dans le paysage audiovisuel français.

L’ambition était alors de rattraper le retard de la France sur les États-Unis, le Royaume-Uni, le Canada, le Japon, pays dans lesquels, depuis plusieurs décennies déjà, des chaînes comme l’américaine PBS ou la britannique Channel Four prouvent qu’il existe bien une audience, à la télévision, pour des programmes « éducatifs » au sens large du terme.

Sur l’ensemble de l’année 2008, et aux seules heures de sa diffusion sur le cinquième réseau hertzien analogique – de 6 heures 45 à 19 heures –, France 5 a réuni 5,5 % des téléspectateurs, ce qui la classe au cinquième rang des chaînes nationales, alors même que son espace à l’antenne est limité par le partage avec ARTE.

En s’inscrivant dans le paysage audiovisuel français à ce niveau déjà remarquable d’audience depuis le début des années 2000, en proposant au public des émissions qui sont devenues de vrais repères, comme C dans l’air, France 5 s’est affirmée, auprès des téléspectateurs, comme la chaîne du décryptage, programmant de nombreux magazines et documentaires dans des formats innovants et attractifs. Il faut noter aussi une réelle modernité de l’esthétique de cette antenne qui a su trouver, dans la forme comme sur le fond, sa propre identité.

Vous voyez comme certains acquis encore récents de l’audiovisuel public peuvent être de véritables promesses pour l’avenir.

Diffusée aussi vingt-quatre heures sur vingt-quatre sur la TNT et dans une vingtaine de pays d’Afrique subsaharienne par l’intermédiaire du bouquet CanalSat Horizons, France 5 est, de fait, d’ores et déjà devenue une offre de média global.

Avec plus de vingt millions de pages vues, le site internet france5.fr reçoit plus de 3,5 millions de visites par mois. Ce succès public significatif est notamment lié à la possibilité, pour les internautes, d’accéder aux programmes de France 5 gratuitement pendant une semaine. Cela préfigure, madame la ministre, ce vers quoi doit aller France Télévisions si, véritablement, on veut en faire un média global.

D’ailleurs, France 5 a vu couronner ses efforts pour produire et diffuser une télévision éducative vraiment populaire et réellement de service public, avec la remise, en juin 2007, du prix de la « meilleure chaîne télévisée » à l’occasion de la neuvième édition du grand prix des médias organisé par CB News.

France 5 joue ainsi pleinement son rôle au sein du service public audiovisuel, en permettant aux Français de se cultiver et même de se former par une offre de programmes ambitieuse, exigeante et diversifiée.

Elle est aussi – on ne l’évoque pas assez souvent, et je tiens à le dire dans ce débat – un pont entre la télévision et le monde de l’éducation, qui en a grand besoin.

Il est donc très important, à nos yeux, que France 5 soit légalement reconnue et pérennisée avec sa « différence », laquelle en fera non pas un objet du passé mais, au contraire, un moteur pour l’ensemble France Télévisions.

Tout comme l’actuelle signalétique de France Télévisions fait apparaître le bouquet de ses chaînes liées mais distinctes, chacune avec sa propre couleur, il faut que cet article consacre, pour l’avenir, l’existence de France 5.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Thiollière, rapporteur. Je rejoins Mme Catherine Tasca sur toutes les qualités, qu’elle a parfaitement rappelées, de cette chaîne que nous sommes nombreux à apprécier. Cela étant, pour les raisons déjà exposées, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Albanel, ministre. Pour les raisons précédemment évoquées, je suis défavorable à cet amendement, même si je m’associe effectivement à tout ce que Mme Catherine Tasca a dit de France 5, qui a su en effet trouver son identité en tant que chaîne de décryptage et de la connaissance, avec des émissions très emblématiques que nous aimons beaucoup, comme C dans l’air ou encore Ripostes.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 301.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 302, présenté par MM. Assouline, Bel et Bérit-Débat, Mmes Blandin, Blondin et Bourzai, MM. Boutant, Domeizel et Fichet, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, M. Sueur, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après le deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour le I de l'article 44 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Elle édite et diffuse un service dénommé Réseau France Outre-mer, chargé de concevoir et de programmer des émissions de télévision et de radio destinées à être diffusées dans les collectivités françaises d'outre-mer. Ce service assure la promotion de la langue française ainsi que celle des langues et cultures régionales. Les émissions des autres services de France Télévisions sont mises à sa disposition à titre gratuit. Les programmes qu'il produit sont mis gratuitement à la disposition de la société France Télévisions ainsi que de la société Radio France qui assurent la promotion et le rayonnement des cultures de la France d'outre-mer en métropole. Il assure la continuité territoriale des autres services de France Télévisions, suivant des dispositifs qui peuvent être différenciés, en prenant en compte les particularités propres des départements d'outre mer ou de la collectivité départementale de Mayotte, selon des modalités déterminées par son cahier des missions et des charges, après consultation de chaque conseil régional. Il conclut des accords pluriannuels de coopération avec la société Radio France, notamment en matière de développement, de production, de programmes et d'information. »

La parole est à M. Jean-Etienne Antoinette.