M. le président. La parole est à Mme Annie David, sur l'article.

Mme Annie David. L’article 9, qui consacre la création du fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels, le FPSPP, censé remplacer l’actuel fonds national de péréquation, devrait garantir une meilleure péréquation et dégager des ressources suffisantes pour augmenter l’effort national de formation en faveur des publics prioritaires, notamment des demandeurs d’emploi. On ne peut que s’en réjouir. Malheureusement, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, permettez-nous d’en douter.

En effet, les mécanismes d’abondement du fonds, tel qu’ils résultent de la rédaction de cet article, sont largement insatisfaisants. Sa principale source d’alimentation, c’est-à-dire le prélèvement compris entre 5 % et 13 % des sommes dues par les entreprises, risque fort de s’imputer de manière inégale sur les trois actions faisant l’objet d’un financement obligatoire.

La faculté laissée aux branches de répartir librement le financement du FPSPP entre la cotisation due au titre du plan de formation et celle qui est due au titre de la professionnalisation aura immanquablement pour effet de tarir les ressources dédiées à la professionnalisation. Cette situation résultera du choix laissé aux branches et, par voie de conséquence, aux employeurs d’imputer leur part prioritairement sur la professionnalisation. Les amendements défendus par M. le rapporteur sur ce sujet ne nous ont jusqu’à présent pas entièrement convaincus. Le débat y parviendra peut-être.

Par ailleurs, les membres du groupe CRC-SPG sont opposés à la conception trop restrictive de la péréquation. Pour nous, cette dernière doit jouer sur l’ensemble du territoire et pour l’ensemble des formations. Or, en l’état, les actions menées au titre, par exemple, du congé individuel de formation, le CIF, sont exclues de la péréquation, faute de financements suffisants sans doute.

En outre, nous ne pouvons accepter la manière dont l’État, sous prétexte de l’existence de ce fonds et de la mutualisation de quelque 900 millions d’euros, entend se désengager de la responsabilité politique et financière qui est la sienne en matière de politique de l’emploi. Car l’effort national dont il est question est, en réalité, principalement supporté par les régions et par les employeurs, voire par les salariés eux-mêmes, dont les cotisations sociales serviront à financer les préparations opérationnelles à l’emploi.

De surcroît, la convention-cadre conclue entre l’État et le fonds retire tous pouvoirs aux partenaires sociaux, qui ne pourront plus décider de l’affectation des fonds. Le Gouvernement choisira, au regard des sommes qu’il entend épargner sur son propre budget, quelles priorités il entendra favoriser. Et nombreux sont celles et ceux qui, dans les rangs de l’opposition comme de la majorité, parmi les représentants syndicaux tant des employeurs que des salariés, prédisent un financement quasi exclusivement destiné à la formation des demandeurs d’emploi en direction des emplois en tension.

Ce qui paraissait être une avancée historique, la première prise en compte de la formation des demandeurs d’emploi dans un accord national interprofessionnel, apparaît aujourd’hui comme un mécanisme subtil de désengagement de l’État, ce qui est bien regrettable.

Par ailleurs cette convention s’apparente à une mise sous tutelle de ce fonds, ce que nous ne pouvons que déplorer.

C’est pourquoi, sous réserve de l’adoption des amendements que nous avons déposés, nous ne voterons pas l’article 9.

M. le président. L'amendement n° 139, présenté par Mme Demontès, MM. Fichet et Jeannerot, Mmes Blondin, Printz, Le Texier, Schillinger et Bourzai, MM. Patriat, Desessard, Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 6332-18 du code du travail, insérer deux alinéas ainsi rédigés :

« Les régions sont associées à la définition des orientations générales et à la gestion du fonds.

« La déclinaison de l'accord entre les organisations représentatives d'employeurs et de salariés au niveau national et interprofessionnel donne lieu par ailleurs à une convention signée entre chaque conseil régional et le fonds de sécurisation des parcours professionnels.

La parole est à M. François Patriat.

M. François Patriat. J’aurai l’occasion, lors de l’examen des articles 14 et 20, de revenir sur le problème posé aux régions par le présent projet de loi, qui les dessaisit d’une partie de leurs prérogatives, ce qui ne bénéficie ni aux demandeurs d’emploi, ni aux apprentis.

Par l’amendement n° 139, nous souhaitons que les régions soient associées à la définition des orientations générales et à la gestion du fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels.

Ce fonds de péréquation, comme le fonds unique de péréquation auquel il succède, a vocation à financer des actions de formation professionnelle visant à la qualification ou à la requalification des salariés et des demandeurs d’emploi, puisque cette compétence nouvelle lui est accordée par les partenaires sociaux.

La loi de 2004 a donné compétence aux régions en matière de formation des demandeurs d’emploi.

L’amendement n° 139 tend à préciser que les régions sont associées explicitement à la définition des orientations générales et à la gestion de ce fonds. C’est d’autant plus nécessaire que la procédure actuelle – du niveau national vers le niveau local – est lourde, ce qui retarde d’autant, le plus souvent, l’affectation des crédits.

La signature de conventions entre les conseils régionaux et le fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels permettrait de sécuriser aussi la complémentarité entre le fonds et les régions.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Cet amendement concerne l’entrée des régions dans la gouvernance du FPSPP, ce qui risque de complexifier la gestion du fonds au détriment de son efficacité. Autant il est essentiel que les trois acteurs de la formation professionnelle – l’État, les régions, les partenaires sociaux – prennent le temps de se mettre d’accord pour fixer les orientations pluriannuelles du plan régional de développement des formations, le PRDF – j’y reviendrai ultérieurement –, autant il est très important que ce fonds reste très réactif. Je rappelle qu’il a vocation à soutenir les salariés les plus précarisés. Il doit pouvoir être mobilisé rapidement.

Par ailleurs, le texte actuel, sans faire entrer les régions dans la gouvernance du fonds, leur donne la possibilité de signer une convention avec ce dernier, et je parle sous votre contrôle, monsieur le secrétaire d'État. Les régions ne seront donc pas écartées de toute gestion du fonds.

Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. On connaît votre engagement local et vos responsabilités régionales, monsieur Patriat. Il ne s’agit en aucun cas de dessaisir les régions de leurs compétences, notamment dans le domaine de la formation des demandeurs d’emploi. Elles sont l’un des trois acteurs importants, après l’État et les partenaires sociaux, du financement de la formation professionnelle.

Notre objectif est seulement d’articuler deux niveaux.

Le premier est ce fonds paritaire ; les partenaires sociaux, qui l’ont voulu et conçu, n’ont pas souhaité y associer les régions, mais il est évident que des conventions seront passées avec celles-ci.

S’y ajoute un échelon local de gestion, et nous avons travaillé avec M. le rapporteur pour mettre en place un mode de gouvernance qui, me semble-t-il, permettra de concilier divers impératifs, c'est-à-dire à la fois la dimension nationale et républicaine, à laquelle je suis attaché, et la vision territoriale, proche des régions.

Telle est la logique d’ensemble de ce texte, qui ne vise en aucun cas à « recentraliser » les compétences ou à dessaisir les régions, mais plutôt à susciter un travail d’équipe dans un domaine où jusqu’à présent – passez-moi l’expression, mesdames, messieurs les sénateurs – chacun restait dans sa ligne de course !

Bien entendu, même si les partenaires sociaux n’ont pas prévu d’associer les régions, des conventions seront passées avec ces dernières et des partenariats déclinés ensuite à l'échelle territoriale.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Christiane Demontès, pour explication de vote.

Mme Christiane Demontès. Monsieur le secrétaire d'État, je veux réagir à vos propos et compléter ceux de mon collègue François Patriat.

Aujourd'hui, concrètement, et de manière différente selon les territoires, des initiatives sont déjà menées en matière de sécurisation des parcours professionnels, dans lesquelles d'ailleurs les régions interviennent.

Nous comprenons bien que, pour la gestion du fonds, des accords doivent être discutés et conclus par les partenaires sociaux et l'État.

Toutefois, le risque, si l’on ne demande pas l'avis des régions, ni même celui d'une structure opérant à l'échelle régionale – par exemple le comité de coordination régional de l'emploi et de la formation professionnelle, qui, je le rappelle, est coprésidé par le préfet et par le président du conseil régional –, c’est que l’on vienne chercher les régions uniquement pour payer, et jamais pour les associer à la décision et défendre leurs intérêts !

Ce dispositif comporte une dimension nationale, bien sûr, mais nous savons que les besoins ne sont pas forcément identiques en Bourgogne, une région que connaît bien François Patriat, en Bretagne, en Aquitaine et en Île-de-France.

Il est donc extrêmement important, me semble-t-il, d’associer les instances existant à l'échelle régionale, non pas pour qu’elles participent à la décision mais pour qu’elles expriment un avis.

Par ailleurs, je ne ferai de procès à personne, mais nous savons bien que les partenaires sociaux développent parfois des analyses différentes selon qu’ils négocient à l'échelle nationale ou régionale, non parce que leurs différents responsables s’opposeraient, mais parce que, tout simplement, quand on agit au niveau de la région, on tient compte des réalités de celle-ci !

Il est donc important, me semble-t-il, que les régions soient associées à ce processus.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 139.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 62, présenté par Mmes David, Gonthier-Maurin, Pasquet et Hoarau, MM. Autain, Fischer et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 6332-18 du code du travail par trois alinéas ainsi rédigés :

« Il gère les excédents financiers dont peuvent disposer les organismes paritaires collecteurs agréés gérant les contributions des employeurs au financement :

« 1° Soit du congé individuel de formation ;

« 2° Soit des contrats ou des périodes de professionnalisation et du droit individuel à la formation.

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cet amendement tend à modifier la rédaction proposée par le projet de loi pour l’article L. 6332-18 du code du travail, c'est-à-dire pour la définition des missions du fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels.

Nous entendons compléter cette disposition en précisant que le fonds gère également les excédents financiers dont peuvent disposer les organismes paritaires collecteurs agréés, au titre du CIF ou encore des contrats ou des périodes de professionnalisation et du droit individuel à la formation.

Au final, cette disposition ne fait que reprendre la rédaction actuelle du code du travail, qui prévoit un tel mécanisme pour le FUP, le fonds unique de péréquation. Elle est importante, nous semble-t-il, au regard de la spécificité de ce fonds, et elle assume dès son intitulé le paritarisme.

En effet, en raison de la convention qui lie l’État et les partenaires sociaux dans la gestion du fonds et qui permet même, disons-le clairement, à la puissance publique de gérer presque seule les quelque 900 millions d’euros destinés à la péréquation, nous considérons qu’il est nécessaire, par souci d'équilibre et par respect des volontés communes qui se sont exprimées dans l’ANI, l’accord national interprofessionnel, du 7 janvier dernier, de laisser les partenaires sociaux libres de gérer les fonds résultant des éventuels excédents des différents organismes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Cet amendement est satisfait : aux termes du 3° de l'article L. 6332-19, tel qu’il est prévu par l’article 9 du projet de loi, les excédents dépassant le tiers des charges comptabilisées seront versés automatiquement au fonds de péréquation.

La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Madame Gonthier-Maurin, comme vous l’avez clairement indiqué, cet amendement vise à indiquer que le fonds gère les excédents des OPCA, les organismes paritaires collecteurs agréés.

Or de telles dispositions sont déjà prévues par le projet de loi pour les articles L. 6332-19-3, qui traite des disponibilités excédentaires des OPCA, et L. 6332-21-2, qui vise la mission de péréquation des fonds.

Votre amendement est satisfait, me semble-t-il. Je vous demande de bien vouloir le retirer, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. Madame Gonthier-Maurin, l'amendement n° 62 est-il maintenu ?

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Oui, je le maintiens, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 62.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 126 rectifié, présenté par MM. Houel, Gouteyron et Duvernois et Mme Mélot, est ainsi libellé :

Dans le troisième alinéa (2°) du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 6332-19 du code de travail, remplacer les mots :

par les premier et troisième alinéas de l'article L. 6331-9 et

par les mots :

, d'une part, par les premier et troisième alinéas de l'article L. 6331-9, déduction faite des obligations légales de financement de la formation imputables sur cette participation établies par l'article L. 6331-35 du présent code et les articles 1609 sexvicies et 1635 bis M du code général des impôts et d'autre part,

La parole est à M. Adrien Gouteyron.

M. Adrien Gouteyron. Les auteurs de cet amendement, dont le premier signataire est M. Houel, sont partis d’une constatation : le code du travail crée une situation particulière dans certains secteurs.

En effet, il impose aux entreprises du BTP de verser au CCCA-BTP, le comité de concertation et de coordination de l’apprentissage du bâtiment et des travaux publics, un organisme que nous connaissons bien, une cotisation professionnelle destinée à financer la formation initiale, notamment l'apprentissage, dont nous souhaitons favoriser le développement.

Une situation identique prévaut, me semble-t-il, dans d'autres secteurs, notamment – je les cite de mémoire –, ceux de la réparation automobile et des transports.

Pour revenir aux domaines qui nous préoccupent, monsieur le secrétaire d'État, je rappelle que le taux de cette cotisation est de 0,22 % de la masse salariale dans le secteur du BTP et de 0,30 % dans celui du bâtiment.

Cette cotisation est imputée sur la participation des employeurs de dix salariés et plus au développement de la formation professionnelle continue, ce qui signifie que les entreprises du BTP concernées sont tenues, aux termes de la loi, d’affecter à la formation continue non pas 1,6 % de la masse salariale, comme c'est le cas dans les autres branches professionnelles, mais 1,38 % dans le secteur des travaux publics et 1,30 % dans celui du bâtiment.

Telle est la situation actuelle. Il faut noter que les entreprises de travaux publics, notamment les grands groupes, consacrent à la formation continue des sommes très supérieures à l'obligation légale. La cotisation à verser au CCCA-BTP constitue donc un prélèvement obligatoire supplémentaire pour ces entreprises.

Or l'article 9 du projet de loi prévoit que les entreprises doivent verser au fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels un pourcentage de l'obligation légale au titre de la formation professionnelle continue, fixé annuellement par arrêté ministériel.

Pour l'année 2009, ce sera 13 %. Les entreprises du BTP seront donc tenues de verser cette contribution au fonds sur la base d'une assiette de 1,6 %, alors que leur obligation légale réelle au titre de la formation continue n’est que de 1,38 %, ou de 1,30 % pour le bâtiment.

Les entreprises du BTP devront donc verser au fonds un pourcentage de leur obligation légale réelle qui sera nettement supérieur à 13 %, puisque, selon les calculs qui ont été réalisés, il atteindra 15,4 % dans le secteur des travaux publics et 16,5 % dans celui du bâtiment.

Je sais bien qu’à l'Assemblée nationale un amendement identique a été déposé, et que, malheureusement, il n'a pas été adopté...

Toutefois, à travers cette intervention et cette proposition d'amendement, je souhaite, comme mes collègues, revenir sur ce sujet qui est important, d'autant plus que, si nous voulons maintenir l'égalité entre les différents secteurs, afin de ne pas opérer sur les budgets professionnels de la formation continue des salariés du BTP une ponction supérieure à celle qui est prévue par le présent projet de loi, il devrait être nécessaire de diminuer le taux de la cotisation professionnelle affectée au CCCA-BTP.

Dans cette perspective, il serait nécessaire de compléter l'article correspondant du code du travail.

Néanmoins, cette modification, si elle se produisait, aurait inévitablement un effet fâcheux, celui de diminuer les ressources du CCCA-BTP de l'ordre de 8 millions d'euros. Et ce n’est pas à vous, monsieur le secrétaire d'État, qui portez la responsabilité de ce texte, que j’expliquerai quelle est l'importance du CCCA-BTP !

Nous en avons d'ailleurs un exemple concret dans le département dont nous sommes tous deux les élus, puisque ce comité y interviendra de manière très substantielle dans la construction du nouveau centre de formation d'apprentis. Certes, ce n'est là qu'un exemple, qui vaut pour vous et pour moi, mais il a aussi une portée générale. (M. le secrétaire d'État acquiesce.)

Monsieur le secrétaire d'État, je crois donc que ce sujet mérite réflexion, et nous attendons de vous, à tout le moins, des explications.

Par ailleurs, monsieur le rapporteur, si vous pouviez nous donner un avis favorable, nous serions tellement heureux ! Toutefois, comme nous entretenons des rapports suffisamment confiants pour nous être concertés, je sais bien que tel ne sera pas le cas, et je vous invite donc, vous aussi, à nous fournir de bonnes explications ! (Sourires. – Applaudissements sur plusieurs travées de lUMP.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Monsieur Gouteyron, je m’efforcerai de vous fournir de bonnes explications et de vous convaincre.

Je voudrais replacer rapidement cette disposition dans son contexte, que vous avez déjà quelque peu évoqué.

Les entreprises de plus de dix salariés ont, en effet, l’obligation légale de consacrer 1,6 % de leur masse salariale à la formation professionnelle, soit 0,2 % au titre du CIF, 0,5 % au titre de la professionnalisation et 0,9 % au titre du plan de formation.

Dans le secteur du BTP, il existe, il est vrai, deux cotisations supplémentaires : une de 0,3 % pour les bâtiments et une de 0,22 % pour les travaux publics.

Je tiens à souligner que ces cotisations supplémentaires sont le fruit d'une volonté exprimée par la branche elle-même, qui s'est fortement engagée en faveur de la professionnalisation et de l'apprentissage. Je veux d'ailleurs saluer cet engagement, car vous savez combien je suis attaché au développement de l'apprentissage.

M. Adrien Gouteyron. Très bien !

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Mes chers collègues, cette cotisation spécifique au BTP est déductible de l'obligation légale fixée par l'article L. 6331-9 du code du travail, elle ne s'y ajoute pas. (M. Adrien Gouteyron acquiesce.)

Sortir cette cotisation de l'assiette du prélèvement du fonds, comme le proposent les auteurs de cet amendement, reviendrait donc non pas à mettre le BTP sur un pied d'égalité avec les autres secteurs, mais à lui accorder un avantage.

On voit bien la conséquence qu’entraînerait une telle mesure : tous les autres secteurs pourraient légitimement demander au législateur des dérogations, tant et si bien qu'à la fin le fonds disparaîtrait ou du moins perdrait de ses possibilités !

Bien que je sois très reconnaissant au secteur du BTP des efforts qu’il réalise en faveur de la professionnalisation et de l'apprentissage, notamment en lien avec un organisme que je connais bien et qui accomplit un travail remarquable, à savoir le CCCA-BTP, je ne pourrai donc satisfaire votre demande, monsieur Gouteyron : ce serait là, passez-moi l'expression, ouvrir la boîte de Pandore, et d’autres secteurs s’engageraient immanquablement dans cette voie.

J’ai reçu longuement les représentants du BTP, tout comme ceux de l'automobile et ceux des transports, qui se trouvent dans la même situation : je le répète, cette disposition serait dérogatoire et mettrait en cause ce qui constitue véritablement la colonne vertébrale de ce texte.

En revanche, l'effort réalisé par le BTP en matière d'apprentissage et de professionnalisation doit trouver, sinon des compensations, du moins une forme de retour du fonds destiné à professionnalisation.

Je fais confiance aux partenaires sociaux pour qu'ils prennent en compte l'effort accompli par le BTP et les autres secteurs pour le développement de l'apprentissage et de la formation en alternance.

La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Je n’ai pas la tâche facile, car M. Gouteyron et moi-même sommes élus du même département, auquel nous sommes très attachés.

Monsieur le sénateur, vous avez cité l’exemple concret du CFA de Bains, en faveur duquel je sais que vous vous êtes beaucoup investi, et au financement duquel le CCCA-BTP a contribué. Par ailleurs, en particulier sur les questions de la formation professionnelle, vous entretenez des liens étroits avec Armel Le Compagnon, personnalité éminente dans le domaine du BTP. Sur le terrain, celui-ci est pour nous un relais sur lequel nous nous appuyons beaucoup tous les deux, ainsi que vous y avez fait allusion dans votre intervention.

Votre amendement soulève un véritable problème, qui ne doit pas être sous-estimé. Le secteur du BTP, plus résolument que d’autres, a décidé d’investir sur l’apprentissage, ce dont on ne peut que lui être reconnaissant. Ainsi, il a mis en place une cotisation supplémentaire destinée à financer les mécanismes de formation et d’apprentissage. C’est pourquoi il craint d’avoir quelque difficulté à concilier sa politique de branche, favorable à l’apprentissage, et l’abondement du FPSPP. Pour autant, l’une et l’autre ne relèvent pas de la même logique : le FPSPP répond à une logique de mutualisation qui a pour but, par exemple, de permettre le financement des actions en faveur du développement durable ou la mise en place de techniques de construction dans les écolabels – M. Desessard, s’il avait été présent, aurait sûrement apprécié –, ainsi que d’aider des jeunes, demandeurs d’emploi ou non, qui n’ont pas trouvé leur voie, à se reconvertir dans le secteur du BTP.

En d’autres termes, le FPSPP a vocation à cibler des domaines spécifiques, telle l’écoconstruction, ou des publics spécifiques. C’est la raison pour laquelle il bénéficiera particulièrement au BTP. C’est ce que j’ai expliqué à ses représentants. Certaines personnes en recherche d’emploi sont parfois réorientées avec succès vers ce secteur d’activité. En outre, le FPSPP servira à financer certains chantiers d’avenir, tels que les techniques de construction de développement durable.

Au final, le BTP financera certes le FPSPP, mais il bénéficiera d’un important retour sur investissement.

J’en viens maintenant à l’apprentissage. Voilà cinq ou dix ans, le secteur du BTP était confronté à de grandes difficultés de recrutement. Depuis lors, son investissement en faveur de l’apprentissage s’est révélé très positif et la situation s’est beaucoup améliorée. D’ailleurs, je cite souvent son cas en exemple auprès des représentants du secteur de la restauration, lequel, sans doute faute d’avoir engagé un travail de fond identique, n’a pas réussi à valoriser de la même manière ses métiers. C’est bien là l’un des enjeux du passage à 5,5 % du taux de TVA.

Pour les raisons qui ont été exposées par M. le rapporteur, je ne suis pas favorable à ce qu’on ouvre la boîte de Pandore. Si l’on fait une exception avec le BTP, tous les autres secteurs exciperont de leur spécificité pour réclamer un traitement identique.

En revanche, je saisis l’occasion de l’examen de votre amendement pour m’engager devant le Sénat à ce que l’effort financier particulier du secteur du BTP en faveur de la formation soit reconnu par la convention-cadre, laquelle devra garantir à celui-ci de bons retours en termes de financements.

Non seulement ce secteur investit plus particulièrement dans le domaine de la formation, mais encore il est pourvoyeur d’emplois.

Nous veillerons également, grâce au Fonds national de développement et de modernisation de l’apprentissage – et je pense que cela correspondra à la volonté des régions – à accompagner les efforts du secteur du BTP en la matière.

En contrepartie de ces engagements, et compte tenu de notre expérience commune du terrain, monsieur Gouteyron, je vous saurais gré de bien vouloir retirer votre amendement. Soyez assuré que nous suivrons, avec vous, l’évolution de la formation dans le secteur du BTP.

M. le président. Monsieur Gouteyron, l'amendement n° 126 rectifié est-il maintenu ?

M. Adrien Gouteyron. M. le secrétaire d'État est un habile homme qui sait faire vibrer les cordes les plus sensibles. (Sourires.) Si mes collègues cosignataires en sont d’accord, je retirerai cet amendement. (Mme et MM. les sénateurs cosignataires de l’amendement présents dans l’hémicycle manifestent leur approbation.)

Monsieur le secrétaire d'État, on ne peut tout de même pas dire que le BTP tirera bénéfice des dispositions de l’article 9 du projet de loi, encore moins qu’il en tirera un bénéfice supérieur aux autres secteurs d’activité. En tout cas, on ne peut pas le pénaliser pour ce qu’il a fait, il faudrait au contraire lui en rendre grâce et l’encourager. Son action rejoint la politique menée par le Gouvernement.

Toujours est-il que je prends note de votre engagement. Il est important et je sais qu’il sera tenu. Simplement, la voie législative me paraissait meilleure que la voie conventionnelle parce qu’elle est en principe plus stable.

Je ne manquerai pas, en tout cas, de porter à la connaissance des intéressés la teneur de nos échanges.

M. le président. L'amendement n° 126 rectifié est retiré.

L'amendement n° 141, présenté par MM. Gillot, Antoinette, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après le quatrième alinéa (3°) du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 6332-19 du code du travail, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« En Guadeloupe, en application de l'habilitation du conseil régional accordée par l'article 68 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer, ces sommes excédentaires sont versées à l'établissement public régional à caractère administratif chargé d'exercer les missions de service public de formation professionnelle prévu par cet article.

La parole est à Mme Bernadette Bourzai.