M. le président. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote.

M. François Autain. Madame la ministre, votre longue intervention montre bien dans quelle contradiction vous vous débattez.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Vous savez tout mieux que tout le monde !

M. François Autain. Non, mais il aurait été plus simple…

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Vous pouvez peut-être me dire comment la grippe va évoluer !

M. François Autain. Madame la ministre, il ne me serait pas venu à l’esprit de vous interrompre, alors laissez-moi m’exprimer !

De deux choses l’une. Soit les dépenses relatives à cette pandémie relèvent de la santé publique, conformément à ce que nous vous avons suggéré ; elles ne doivent alors pas être incluses dans l’ONDAM et doivent être prises en charge par l’État; soit ces dépenses relèvent de l’assurance maladie.

Mais vous avez choisi une solution mi-chèvre mi-chou, avec un financement de la CNAM pour environ la moitié des dépenses. Si vous sollicitez l’assurance maladie, madame la ministre, ces dépenses relèvent nécessairement de l’ONDAM !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. C’est le cas !

M. François Autain. Dans ce cas, vous devez laisser au comité d’alerte, dont la mission est de vérifier à mi-parcours si les objectifs de l’ONDAM peuvent être respectés, la responsabilité de la décision en la matière ; et si les objectifs ne peuvent être respectés, ce comité doit prévoir des mesures d’économie. En cas de ressources insuffisantes, il reste toujours la possibilité d’un collectif budgétaire en matière de sécurité sociale, possibilité qui n’a jamais été utilisée mais qui est prévue par la loi organique. Vous pourriez ainsi ajuster les recettes aux nouvelles dépenses découlant d’une épidémie.

Si vous excluez de l’ONDAM les dépenses liées à la pandémie, il faudra bien trouver un système pour que ces dépenses supplémentaires soient prises en charge. C’est sans doute la trésorerie de l’ACOSS qui sera chargée de les financer. Mais, madame la ministre, vous êtes incapable, tout comme moi, d’évaluer le coût des dépenses supplémentaires liées à la pandémie ! Imaginez qu’il soit d’un milliard d’euros : il faudrait alors prévoir pour l’ACOSS un supplément d’avance de trésorerie, puisque le plafond a été fixé à 65 milliards d’euros, étant entendu que vous excluez bien évidemment la possibilité d’augmenter les prélèvements obligatoires.

Extraire ces dépenses de l’ONDAM revient à empêcher l’intervention du comité d’alerte en 2010, puisque tout dépassement de 0,75 % de l’objectif pourra être imputé à la grippe. Madame la ministre, vous estimez avoir les instruments permettant de calculer exactement la dépense résultant de cette pandémie. Moins optimiste que vous, je pense que nous aurons de grandes difficultés pour parvenir à distinguer les dépenses liées aux maladies courantes de celles qui relèvent de la grippe A.

Telles sont les raisons pour lesquelles, mes chers collègues, nous devons voter les amendements de suppression de l’article 28. Tout serait plus simple si l’État prenait en charge les dépenses qui relèvent de la santé publique.

M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.

M. Alain Milon. En commission, j’avais voté la proposition du rapporteur général demandant la suppression de l’article 28. Mme la ministre m’a complètement convaincu qu’il est difficile d’inclure dans l’ONDAM le coût, que l’on ne connaît pas, d’une grippe qui n’existe pas encore. Je voterai finalement contre les amendements de suppression.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je ne suis pas insensible à un argument développé par Mme la ministre. Si les dépenses supplémentaires liées à la pandémie grippale entraînent un dépassement de l’ONDAM, le comité d’alerte sera amené à proposer des économies de dépenses, ce qui risque de pénaliser les patients souffrant de pathologies classiques.

Pour autant, il est difficile de faire porter à l’assurance maladie une dépense dont il est impossible d’évaluer le montant exact. Pour faire face à la dépense, il a bien fallu prévoir un montant prévisionnel, qui s’élève à 2 milliards d’euros…

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Non, 1,1 milliard d’euros !

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. Pour les vaccins ! Au total, c’est bien 2 milliards d’euros.

M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Comme l’a fait remarquer Mme la ministre, nous serons amenés à constater en fin d’année si cette dépense est ou non réalisée.

La fixation de l’ONDAM consiste à appliquer à une base de référence un taux d’évolution, qui synthétise les effets de l’augmentation tendancielle des dépenses corrigée des économies attendues, notamment par l’application des mesures de maîtrise médicalisée. Nous pensons que le taux de progression de cet objectif pourra être contenu à 3 %.

Puisque l’assurance maladie devra à terme supporter les dépenses liées à la pandémie grippale, il faudra bien trouver les recettes correspondantes. Il ne me paraît pas illogique que ces dépenses soient intégrées dans l’ONDAM, au risque que l’alerte puisse être déclenchée par le comité. Cela nécessitera peut-être alors – comme l’a fait remarquer à juste titre M. Autain, cela ne s’est encore jamais produit – un collectif budgétaire pour recaler les prévisions.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Nous verrons bien !

M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Dans ce cas, le comité d’alerte demandera à la CNAM de proposer des mesures pour respecter l’objectif, et un échange s’engagera inévitablement entre le ministre de la santé et le directeur de l’assurance maladie. Ce dernier devra en effet tenir compte des dépenses liées à la pandémie grippale qui pèseront sur le budget de la CNAM, puisque c’est elle qui les supportera.

Ne nous voilons pas la face ! Ce n’est pas en mettant à part les dépenses liées à la pandémie que nous trouverons des solutions miraculeuses pour que la CNAM les finance en plus de toutes les autres dépenses qu’elle supporte chaque année ! Je le répète, il va bien falloir trouver une recette correspondante.

En effet, si l’on décidait de réaliser des économies, cette mesure pèserait alors sur les autres patients alors qu’il n’y a pas de raison qu’ils subissent les conséquences d’une pandémie grippale totalement indépendante de leur volonté. On pourrait aussi choisir de reporter le déficit jusqu’à la fin de l’année. Mais une recette devrait être trouvée pour la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011, et il faudrait intégrer l’effet de la pandémie dans le prochain ONDAM, voire dans les budgets des années suivantes puisque Mme le ministre a indiqué que ce phénomène pourrait durer.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Cinq ans, voire dix !

M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Mes chers collègues, je vous rappelle que nous nous sommes déjà prononcés sur la réquisition des médecins.

En tant que rapporteur général, j’invite donc le Sénat à porter son point de vue jusqu’à la commission mixte paritaire durant laquelle nous aurons un échange avec les députés, qui ont approuvé le dispositif proposé par le Gouvernement. Nous déciderons alors ensemble de la solution la moins mauvaise pour la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010. Pour l’instant, je vous invite à voter les amendements tendant à la suppression de l’article 28.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 10, 56, 139 et 295.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, l'article 28 est supprimé.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Article 28 (début)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2010
Discussion générale

4

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au samedi 14 novembre 2009, à neuf heures trente, à quatorze heures trente et le soir :

- Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale (n° 82, 2009-2010).

Rapport de MM. Alain Vasselle, Dominique Leclerc, Gérard Dériot, André Lardeux et Mme Sylvie Desmarescaux, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 90, 2009-2010).

Avis de M. Jean-Jacques Jégou, fait au nom de la commission des finances (n° 91, 2009-2010).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt-trois heures cinquante-cinq.)

La Directrice

du service du compte rendu intégral,

MONIQUE MUYARD