M. Jean Boyer. Monsieur le ministre, mes chers collègues, vous le savez : le lait, c’est le salaire du paysan !

Par ailleurs, monsieur le ministre, je vous interrogerai tout à l’heure, et j’associerai à ma question mon collègue Jean-Paul Amoudry, sur la PHAE, dont a parlé Jacques Blanc et qui suscite de réelles inquiétudes.

Par ailleurs, nous attendons la revalorisation de l’ICHN, l’indemnité compensatoire de handicaps naturels, à hauteur de 50 % pour les vingt-cinq premiers hectares : certes, les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent, mais je n’en regrette pas moins que cette promesse n’ait pas encore été tenue. C’est, monsieur le ministre, le moment de le faire !

Je terminerai en évoquant les inquiétudes relatives à l’autonomie des chambres d’agriculture. Ce sont des organismes de proximité, à l’échelon départemental, dont les conseils techniques mais aussi les conseils sur tout ce qui gravite autour de l’agriculture sont précieux. (Applaudissements sur les travées de lUnion centriste et de lUMP.)

M. Jacques Blanc. Très bien !

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures trente, est reprise à quatorze heures trente-cinq, sous la présidence de Mme Catherine Tasca.)

PRÉSIDENCE DE Mme Catherine Tasca

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales - Compte d'affectation spéciale : Développement agricole et rural (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances  pour 2010
Discussion générale

4

Organisme extraparlementaire

Mme la présidente. J’informe le Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation de deux sénateurs appelés à siéger au sein du Conseil national des villes.

Conformément à l’article 9 du règlement, j’invite la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire à présenter une candidature.

Les nominations au sein de cet organisme extraparlementaire auront lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par l’article 9 du règlement.

5

Modification du calendrier budgétaire

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Madame la présidente, mes chers collègues, comme vous l’avez constaté, la mission « Plan de relance de l’économie » n’a pas pu être examinée hier soir, ainsi que cela était initialement prévu par l’ordre du jour, et ce en raison du retard que nous avons pris dans l’examen des autres missions.

Après discussion avec les différentes parties intéressées, un accord se dessine pour que nous procédions demain, probablement en début d’après-midi, à l’examen des crédits de cette mission, après la discussion des crédits de la mission « Aide publique au développement » et avant l’examen des crédits de la mission « Provisions ».

M. Charles Revet. Très bien ! Merci, monsieur le président de la commission des finances !

Mme la présidente. Demain nous examinerons donc les missions suivantes :

- « Aide publique au développement » ;

- « Plan de relance de l’économie » ;

- « Provisions » ;

- « Engagements financiers de l’État » ;

- « Sport, jeunesse et vie associative » ;

- « Solidarité, insertion et égalité des chances » ;

- « Ville et logement ».

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Nos débats risquent de se prolonger jusqu’à une heure avancée.

6

Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales - Compte d'affectation spéciale : Développement agricole et rural (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances  pour 2010
Deuxième partie

Loi de finances pour 2010

Suite de la discussion d'un projet de loi

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances  pour 2010
Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales - Compte d'affectation spéciale : Développement agricole et rural

Mme la présidente. Nous reprenons la discussion des articles de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2010.

Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales

Compte d’affectation spéciale : Développement agricole et rural

(suite)

Deuxième partie
Dossier législatif : projet de loi de finances  pour 2010
Questions-réponses-répliques

Mme la présidente. Dans l’examen des crédits de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales » et du compte spécial « Développement agricole et rural », la parole est à M. Raymond Vall.

M. Raymond Vall. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, l’examen du budget de l’agriculture intervient à un moment où la crise agricole connaît une ampleur sans précédent. Cela a été dit, toutes les filières sont concernées, et, dans nos campagnes, la détresse de beaucoup d’agriculteurs atteint son paroxysme. De fait, nous sommes dans l’obligation de les entendre et d’être solidaires.

Monsieur le ministre, permettez-moi de vous parler plus particulièrement du département du Gers, que vous connaissez bien. Celui-ci, marqué par le poids de son activité agricole, qui représente plus de 20 % des emplois, n’échappe pas aux difficultés. Dans ce département, comme dans d’autres, nous avons eu à affronter, à canaliser et à comprendre la colère des agriculteurs, en particulier celle des plus jeunes d’entre eux et des producteurs laitiers.

Je n’insisterai pas sur les chiffres, qui ont été largement cités. Le département du Gers cumule les difficultés : ses productions connaissent des baisses de rendement, la fièvre catarrhale entraîne une diminution des naissances dans le cheptel ovin et la vigne subit les effets de l’esca, maladie qui détruit 10 % du vignoble chaque année.

M. Gérard César. Très juste !

M. Raymond Vall. S’agissant de ce dernier point, nous avions instamment demandé à votre prédécesseur, Michel Barnier, de tout faire pour que la recherche débouche sur des solutions nous permettant de sortir de cette dramatique impasse.

Malheureusement, les perspectives ne sont pas de nature à rassurer durablement ni les agriculteurs gersois ni ceux des autres départements. Le plan de soutien exceptionnel, annoncé par le Président de la République à Poligny, semblait prometteur. Mais, alors que les agriculteurs sont déjà très endettés et qu’ils ont du mal à rembourser leurs échéances, on leur propose 1 milliard d’euros sous forme de prêts bonifiés. Cela revient à leur demander de s’endetter pour se désendetter, ce qui est incompréhensible pour eux.

Les 650 millions d’euros restants ne suffiront pas pour les aider à se remettre des pertes enregistrées en 2009. Même s’il vous sera certainement difficile d’accéder à cette requête, monsieur le ministre, ils demandent à pouvoir bénéficier d’une exonération complète de la taxe sur le foncier non bâti. Ils fondent de grands espoirs sur cette mesure.

Je me permets de signaler que nos communes, en ce qui les concerne, ont souvent accordé des exonérations de taxe professionnelle.

Au-delà de ce plan d’urgence, on attendait du budget pour 2010 qu’il accompagne les orientations majeures pour l’avenir de l’agriculture, car la crise est bien structurelle. Or on constate une stagnation des crédits de paiement par rapport à l’exercice précédent !

Mais, rassurons-nous, car, en réalité, cette stagnation cache, nous dit-on, une hausse. La programmation 2009-2012 de la mission prévoyait en effet une diminution marquée des crédits en 2010 et en 2011. Le Gouvernement aurait donc pris la mesure de la situation puisque les crédits augmentent de 10 % par rapport aux prévisions. Soyons objectifs, cette programmation triennale n’était déjà pas réaliste l’an dernier, elle ne peut donc l’être aujourd’hui !

Quant aux majorations décidées par l’Assemblée nationale, elles sont certes positives, mais correspondent à des mesures conjoncturelles du plan annoncé, sans incidence sur le fond.

Quoi qu’il en soit, monsieur le ministre, vous avez été conduit à opérer certaines réductions sur des actions qui, dans un contexte de crise et, surtout, de mutation de grande ampleur, se révèlent pourtant essentielles.

Que dire, en effet, de l’insuffisance des moyens du plan de modernisation des bâtiments d’élevage, dont les crédits enregistrent une baisse de 43 %, du programme de maîtrise des pollutions d’origine agricole et du plan végétal pour l’environnement ? Ces outils permettent aux agriculteurs de rester compétitifs et de pérenniser leurs entreprises, mais aussi de relever le défi des exigences environnementales. Ce n’est donc pas le moment de baisser la garde.

Que penser également de la baisse de 15 % de la dotation aux ADASEA, qui condamne la politique d’accompagnement de l’installation en agriculture ? Ainsi, mon département a enregistré, entre 2004 et 2007, 388 départs pour 134 installations et l’on sait que 26 % des exploitants cesseront leur activité dans un délai de cinq ans.

L’installation de nouvelles générations est pourtant primordiale pour notre agriculture. Rappelons qu’on ne compte plus que 350 000 agriculteurs en France !

Enfin, je dirai un mot sur la prime herbagère agro-environnementale. Celle-ci sera désormais cofinancée à 75 % par le budget européen. Les crédits pour 2010 seront-ils suffisants pour honorer les demandes éligibles en cours ? Qu’en est-il pour les nouveaux ? L’absence d’autorisation d’engagement interpelle fortement les éleveurs.

Je terminerai mon propos sur une note positive. En effet, j’ai relevé avec satisfaction la revalorisation de l’indemnité compensatoire de handicap naturel. Comme vous le savez, le Gers se trouve en zone défavorisée intermédiaire en raison de son relief de coteaux et de la qualité moyenne de ses sols. Aussi, j’espère qu’il bénéficiera de cette revalorisation.

J’ai néanmoins une inquiétude : il semble que les critères retenus par la Commission européenne pour une nouvelle classification des zones agricoles à handicaps naturels excluent ce département. Pouvez-vous rassurer les agriculteurs du Gers sur ce point, monsieur le ministre ?

Le Président de la République a fait part de son engagement à défendre sans faille une régulation rénovée. Alors qu’il nous a expliqué, pendant des années, que le marché réglerait tout, je me réjouis de ce changement de philosophie et j’espère qu’elle trouvera une traduction dans la politique agricole commune.

Monsieur le ministre, dans ces moments difficiles, en dépit du mécontentement des agriculteurs, jamais je n’ai entendu à votre égard le moindre propos désagréable.

M. Charles Revet. C’est vrai !

M. Raymond Vall. Tout le monde considère que vous êtes un homme d’écoute, que vous vous battez pour l’agriculture. Je tenais à vous le dire, même si la majorité des membres du groupe RDSE ne voteront pas votre budget.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Muller.

M. Jacques Muller. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales » du projet de loi de finances pour 2010 appelle, de ma part, deux observations majeures.

Tout d’abord, une analyse attentive des propositions faites par le Gouvernement laisse à penser que la page du Grenelle de l’environnement est bel et bien tournée !

En témoigne l’absence d’efforts significatifs en direction de la recherche-action en matière d’agriculture intégrée, c’est-à-dire de systèmes de production agricole réduisant à la source leurs besoins en intrants, et dont l’optimum économique est recherché non plus en poussant les rendements, mais en réduisant les charges : rotations des cultures, variétés résistantes, pratiques culturales innovantes, etc. Il est vrai que ce concept, considéré par l’Institut national de la recherche agronomique, l’INRA, comme fondateur de l’agriculture durable sur le plan environnemental, fait toujours figure d’épouvantail dans certains milieux professionnels agricoles, et que la majorité en a fait un véritable tabou lors des débats sur les lois Grenelle.

En témoigne également la faiblesse des crédits dédiés à la conversion des exploitations à l’agriculture biologique et au développement de celle-ci. Le déficit structurel de notre balance agroalimentaire en produits biologiques démontre pourtant, s’il en était encore besoin, que c’est au niveau de l’offre que les pouvoirs publics doivent agir en priorité.

Ensuite, dans un autre registre, je constate qu’une fois de plus les crédits européens mobilisés par le Gouvernement au profit du secteur agricole échappent au contrôle parlementaire, alors qu’ils pèsent trois fois plus lourd que ceux de la mission que nous examinons aujourd’hui.

Certes, Michel Barnier, alors ministre de l’agriculture, avait annoncé le 23 février dernier une réorientation de 18 % des aides perçues par les agriculteurs au titre de l’article 63, en prélevant indirectement sur la manne touchée par les céréaliers pour revaloriser les droits à paiement unique, les DPU, des exploitations herbagères. Je m’en félicite : sur le plan environnemental, c’est un premier pas dans la bonne direction, c’est-à-dire vers le soutien à des systèmes de production globalement moins intensifs.

Les modalités d’application retenues par le Gouvernement, dans la plus grande opacité, posent cependant un vrai problème. En effet, cette redistribution au sein du premier pilier s’est accompagnée d’une disparition implicite de la prime herbagère agro-environnementale, la PHAE : s’il existe une enveloppe de 60 millions d’euros pour les contrats en cours, il n’y a aucune trace de dotation en autorisations d’engagement pour les quelque 10 000 contrats arrivant à échéance en 2010.

Ainsi, sous le prétexte que le soutien légitime aux exploitations herbagères reposerait désormais sur les nouveaux DPU revalorisés, au lieu des PHAE, le Gouvernement prend une disposition qui constitue un recul sur le plan de l’agriculture durable – l’éco-conditionnalité liée aux DPU n’étant pas à la hauteur des décisions contractualisées dans le cadre des mesures agri-environnementales, les MAE ! – et qui pénalise objectivement les exploitations herbagères extensives au détriment des autres.

Il en résulte, au final, que les zones défavorisées, notamment de montagne, seront pénalisées : c’est le monde à l’envers, notamment sur le plan de l’aménagement durable du territoire ! Le Grenelle de l’environnement est décidément bien loin...

À cet égard, je voudrais tout particulièrement attirer votre attention, monsieur le ministre, sur le devenir de la politique agricole conduite au niveau de la montagne vosgienne, sous l’impulsion de la direction départementale de l’agriculture et de la forêt, la DDAF, du Haut-Rhin.

Bien avant la concertation du Grenelle de l’environnement, cette politique exemplaire avait su associer tous les acteurs du monde rural montagnard vosgien : élus, profession agricole, autres usagers de l’espace, associations de protection de l’environnement...

Cette démarche de concertation exemplaire avait permis d’élaborer une véritable politique de revitalisation de l’espace rural, en proie à la déprise agricole. Réouverture de paysages, installation des jeunes agriculteurs, développement de filières courtes de produits de qualité, généralisation de pratiques agricoles exemplaires du point de vue de l’environnement : le « plan de gestion des espaces ouverts » a tenu toutes ses promesses. La cohérence de cette démarche prenant en compte l’ensemble de l’exploitation agricole, que les terrains soient situés en zone Natura 2000 ou non, a permis la contractualisation de 90 % de la zone Natura 2000, c’est-à-dire quelque 4 300 hectares, avec un taux de renouvellement des contrats de 100 % !

Tout ce travail concerté engagé depuis une quinzaine d’années, tous ces résultats remarquables en termes de développement agricole et de préservation-valorisation de l’environnement sont aujourd’hui menacés : les estimations réalisées font apparaître que, sans les crédits équivalant à la PHAE, la moitié de la surface contractualisée dans le périmètre Natura 2000 de la montagne vosgienne haut-rhinoise, qui est la première de la région Alsace, va disparaître. Je me dois de souligner que ce véritable gâchis prendrait une dimension d’autant plus emblématique que nous sommes au seuil de l’année 2010, décrétée par l’Union européenne « année de la biodiversité »…

Monsieur le ministre, au nom des élus du massif vosgien, de l’ensemble de la profession agricole et des associations de protection de l’environnement, je me tourne vers vous : vous ne pouvez pas sacrifier l’une des plus belles opérations de développement durable concerté, située de surcroît en zone de montagne fragile, sur l’autel de quelques astuces budgétaires qui vous permettent, aujourd’hui, de baisser de 50 % les crédits de paiement consacrés par la France aux PHAE ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Gérard Le Cam applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard César.

M. Gérard César. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je suis en service commandé, j’interviens au nom de Daniel Laurent, qui est retenu dans sa commune où il assiste aux obsèques d’une conseillère municipale.

Sa question porte sur la fiscalité des vins de liqueur à appellation d’origine contrôlée ; elle s’adresse, certes, au ministre de l’agriculture, mais elle concerne tout autant les ministres chargés du budget et de la santé.

En France, les produits issus de la vigne sont soumis à une fiscalité variable selon leur mode d’élaboration. Les produits dits intermédiaires, comme le pineau des Charentes, le floc de Gascogne, le macvin du Jura et le pommeau de Normandie,…

M. Charles Revet. C’est bon !

M. Didier Guillaume. Effectivement !

M. Gérard César. … chers à mes collègues des régions concernées, sont soumis à une fiscalité différenciée.

En revanche, les produits industriels concurrents sur ce marché des apéritifs, élaborés sans contraintes d’origine ou de production, ont su faire évoluer la fiscalité en leur faveur, en modifiant leur procédé technique, ce qui est impossible pour le pineau. Depuis 2003, certains d’entre eux sont taxés comme le vin, soit 63 fois moins que le pineau. Le résultat est que, depuis trois ans, les ventes totales ont baissé de plus de 15 %.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 a mis en œuvre un principe d’indexation systématique des produits soumis à accises, contre lequel Daniel Laurent et nombre de nos collègues s’étaient élevés, mais en vain. Le résultat ne s’est pas fait attendre : en 2009, les accises ont augmenté de 1,50 %, et pour 2010, elles devraient croître de 2,80 %, comme l’a confirmé l’arrêté du 19 octobre 2009 fixant les tarifs des droits d’accises sur les alcools et les boissons alcooliques pour 2010.

La seule hausse pour 2010 de l’accise sur les produits intermédiaires équivaut au double de la taxation totale de ces apéritifs concurrents. Vous comprendrez dès lors, monsieur le ministre, l’ire de nos viticulteurs.

Depuis de nombreuses années, MM. Laurent et Doublet se battent à leurs côtés pour interpeller les pouvoirs publics sur l’iniquité de cette fiscalité. On ne compte plus les questions écrites, orales, les courriers aux ministres et les rendez-vous ministériels, dont le dernier, en date du 26 novembre, au sein de votre ministère, n’a rien apporté de concret, si ce n’est la programmation d’un nouveau rendez-vous le 16 décembre… 2009, tout au moins, je l’espère ! (Sourires.)

En 2004, lorsque Dominique Bussereau, président du conseil général de Charente-Maritime, était secrétaire d’État au budget et à la réforme budgétaire, la profession avait réussi à obtenir des aides annuelles aux vins de liqueur, preuve que la demande de la profession est légitime ; depuis, il n’y a plus aucune avancée sur le dossier.

Aujourd’hui, selon M. Laurent, nous sommes en train de perdre toute crédibilité et la profession s’exaspère. Elle évoque même l’éventualité d’un recours à la grève du paiement des taxes (Exclamations au banc des commissions), déjà expérimenté il y a sept ans, et qui priverait l’État d’une recette annuelle de 24 millions d’euros, TVA comprise.

Daniel Laurent a bien conscience que le poids économique du pineau des Charentes n’est rien à côté de celui des « géants industriels », mais vous comprendrez aisément que cet état de fait ne peut perdurer et qu’il devient impérieux de clore ce dossier et d’obtenir une réponse immédiate.

Qu’entendez-vous faire, monsieur le ministre, pour mettre fin à cette inégalité fiscale qui pénalise la compétitivité de ces produits ? Je rappelle, une nouvelle fois, que je suis intervenu au nom de Daniel Laurent. (Applaudissements sur plusieurs travées de lUMP. – M. Didier Guillaume applaudit également.)

M. Charles Revet. Il avait un bon représentant !

M. Didier Guillaume. Et vous, monsieur César, quel est votre point de vue ? (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Guillaume.

M. Didier Guillaume. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’ensemble de nos territoires est concerné par la crise sans précédent que traverse actuellement le monde agricole. Ce cri d’alarme ne doit toutefois pas devenir un lieu commun, qui pourrait justifier l’inaction face à cette crise.

« Aucun secteur n’est épargné, aucune région n’est épargnée », a déclaré le Président de la République à Poligny, il y a quelques semaines.

Nous devons affirmer, dans cette enceinte, que l’agriculture, sa défense et sa modernisation, ce n’est pas un combat d’arrière-garde. Bien au contraire !

Les agriculteurs nourrissent les Français, entretiennent l’espace et accueillent les citoyens des villes stressés, qui viennent se détendre à la campagne... Sans agriculteurs, il n’y aurait plus de paysages, seulement des friches.

Dans ce contexte économique désastreux, il semble évident qu’il faille redonner aux agriculteurs espoir et optimisme dans l’avenir.

Ce budget, monsieur le ministre, aurait dû être le moyen de remobiliser toute une profession. Malheureusement, à notre avis, ce n’est pas le cas.

Le budget de l’agriculture est certes maintenu au même niveau qu’en 2009 ; mais c’est l’arbre qui cache la forêt, comme l’a dit très justement Odette Herviaux. Ce budget n’est pas à la hauteur des enjeux auxquels le secteur agricole, actuellement en crise, doit faire face.

Monsieur le ministre, nous saluons tous ici votre sincérité, votre engagement et votre mobilisation au service de l’agriculture.

M. Charles Revet. Tout à fait !

Mme Nathalie Goulet. C’est vrai !

M. Didier Guillaume. Mais nous constatons, malheureusement, que ce budget ne vous donne pas les moyens de mener la politique agricole que vous souhaitez.

Pourtant, aujourd’hui, de nombreux défis sont à relever : problème de non-renouvellement des générations ; baisse de 10 % des revenus agricoles, qui ont déjà subi une baisse de 20 % en 2008 ; déprise foncière lorsque, tous les dix ans, l’équivalent d’un département agricole disparaît.

Monsieur le ministre, cette crise n’est pas conjoncturelle, elle est structurelle. Nous devons donc rechercher des solutions sur le long terme.

Pourquoi le Gouvernement ne se donne-t-il pas véritablement les moyens d’agir ?

Les crédits de paiement du programme 154 « Économie et développement durable de l’agriculture, de la pêche et des territoires » ne sont pas à la hauteur. Ce programme a pour finalité de faciliter l’adaptation des filières aux exigences environnementales et sociales. Nous pensons, pour notre part, que ces filières n’y parviendront pas seules. Cet axe devrait donc être privilégié.

De même, pourquoi les crédits de paiement de l’enseignement technique agricole, prévus dans la mission interministérielle « Enseignement scolaire », baissent-ils de 1,2 % ?

Enfin, le Grenelle de l’environnement a fixé des objectifs ambitieux en matière d’agriculture, notamment un objectif global de réduction de moitié des usages de produits phytopharmaceutiques sur dix ans et le développement de l’agriculture biologique. Je rappelle que 6 % de la surface agricole utile devront être convertis en « bio » en 2012, et 20 % en 2020.

Le Grenelle enjoint le monde agricole de modifier ses pratiques afin de s’adapter aux réalités écologiques de notre planète. Mais comment faire évoluer ces pratiques sans consacrer des moyens et sans faire d’efforts pour former les agriculteurs de demain ? Seuls 3 millions d’euros sont alloués pour la conversion des exploitations au mode de production biologique.

À la lecture de ce budget, nous ne pouvons que constater une évidence reconnue par l’ensemble de la profession : les moyens de mise en œuvre et d’accompagnement de ces objectifs sont très faibles.

Le monde agricole a besoin que soit élaborée une stratégie sur le long terme. Attention à ne pas leurrer les agriculteurs, car ils n’ont plus la force de le supporter !

Nous devons penser, aujourd’hui, à améliorer l’organisation économique du secteur agricole. Nous devons axer nos réflexions sur l’émergence de mesures structurelles. Nous devons, enfin, poser la question qui s’impose : quel type d’agriculture souhaitons-nous soutenir dans les années à venir ?

Si nous avons affaire, comme vous le dites, monsieur le ministre, « à la crise économique la plus grave qu’ait connue le monde agricole depuis ces trente dernières années », croyez-vous sincèrement que ce budget permette d’y apporter des réponses ?

Nous pensons, quant à nous, que ce budget ne permettra pas de redynamiser le monde agricole, car il ne lui alloue pas les moyens nécessaires. Les agriculteurs continueront à courber l’échine et à se battre, mais ils sont bien obligés de constater qu’ils ne parviendront plus à subvenir aux besoins de leur famille.

La loi de modernisation de l’agriculture se profile à l’horizon. Une loi de plus, diront certains.

Monsieur le ministre, notre groupe est prêt à vous accompagner s’il s’agit véritablement d’une nouvelle loi. Oui, la France agricole a besoin d’un nouvel élan pour aborder l’indispensable régulation que vous-même prônez et permettre ainsi à toutes les filières et à l’ensemble des agriculteurs de ne pas être soumis à la loi du marché !

Le Gouvernement évoque la réorganisation des filières, mais, dans le même temps, laisse quasiment à l’abandon les offices agricoles en ne leur allouant qu’un très faible financement.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, l’agriculture biologique est une réponse parmi d’autres à la crise du secteur agricole. Il serait cependant absurde, je le répète, d’opposer les agriculteurs conventionnels et biologiques, dans la mesure où les uns se « nourrissent » des autres. En tout état de cause, l’agriculture biologique doit permettre aux agriculteurs dans certaines filières de disposer d’un revenu supérieur à celui qu’ils perçoivent aujourd’hui.

Pour reprendre ce qu’a exposé si brillamment ce matin mon collègue Yvon Collin, il conviendra, dans le cadre de la loi de modernisation, d’envisager – enfin ! – l’instauration dans notre pays d’une assurance récolte obligatoire mutualisée.

M. Charles Revet. Absolument !

M. Didier Guillaume. Cela permettrait de donner à tous les agriculteurs les moyens de s’en sortir.

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

M. Didier Guillaume. Je n’évoquerai pas le secteur des fruits et légumes, car j’en parlerai plus tard, à l’occasion de l’exercice des questions-réponses-répliques.

Cela étant, je ne saurais terminer mon propos sans vous faire remarquer que la présence du loup est incompatible avec le pastoralisme, très développé dans notre pays. Il faudra bien un jour faire le choix qui s’impose ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées de l’Union centriste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Charles Revet.

M. Charles Revet. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, chacun le sait, je suis très attaché à l’agriculture et j’entends participer activement aux débats qui s’annoncent sur le projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche actuellement en préparation.

Toutefois, aujourd’hui, en ma qualité de président du groupe d’études du littoral et de la mer au Sénat, j’ai choisi de centrer mon propos sur l’ensemble des enjeux liés à la mer.

La France, qui possède la deuxième zone économique maritime du monde, juste derrière celle des États-Unis, en tire des responsabilités très importantes et toutes particulières, pour elle-même, bien sûr, mais également pour l’ensemble de la planète, et ce dans trois domaines à mes yeux indissociables : écologique, scientifique et économique.

Le premier a été traité de manière très approfondie lors du Grenelle de la mer. Quoi de plus légitime, dès lors qu’il convient de prendre des mesures urgentes en faveur de la protection de l’environnement ?

Les deux autres ne sont pas de moindre importance et, en tout état de cause, sont interdépendants.

Ainsi, la recherche française, avec notamment l’IFREMER, est reconnue comme l’une des plus performantes au monde, qu’elle porte sur la préservation des espèces ou le développement de l’aquaculture, activité à fort potentiel. Sur le plan économique, cela représente un gisement de plusieurs milliers d’emplois.

Pour nourrir une population mondiale qui ne cesse de croître, les productions terrestres vont atteindre leurs limites ; en revanche, nous sommes loin d’avoir exploité tout le potentiel du milieu marin, du point de vue tant de la faune que de la flore. L’IFREMER assure une production importante d’alevins, mais, d’après des informations que j’ai reçues cette nuit par courrier électronique, deux tiers des œufs et larves produits en France sont exportés. Le développement de leur utilisation sur le territoire national permettrait d’améliorer la couverture de nos besoins.

De son côté, l’INRA a mis au point une alimentation à base végétale pour les élevages piscicoles, alors qu’elle est actuellement constituée, pour l’essentiel, de farines de poissons.

Monsieur le ministre, je le répète, les domaines écologique, scientifique et économique sont étroitement imbriqués.

Si la France dispose donc de la deuxième zone économique maritime au monde, est-il vraiment acceptable, comme l’a fait remarquer M. Merceron ce matin, qu’elle ne couvre même pas 20 % de ses besoins en poissons et crustacés ?

Bien sûr, notre pays a le devoir de respecter les règlements imposant des limitations des droits de pêche dans la zone Europe. Soit dit en passant, je ne suis pas sûr que certains de nos partenaires européens aient les mêmes scrupules ! Au demeurant, si ces quotas s’imposent naturellement à nous, la protection de l’environnement, ô combien nécessaire, ne semble pas incompatible avec l’objectif de développement des activités économiques, dès lors que les sites s’y prêtent.

Ainsi la promotion de l’aquaculture est-elle de nature à entraîner la création de nombreux emplois et à participer à la couverture de nos besoins alimentaires, voire plus. En effet, non seulement notre pays doit couvrir ses besoins alimentaires en poissons et crustacés, mais il pourrait, à long terme, répondre en partie à la demande mondiale, à condition, bien sûr, de ne pas créer nous-mêmes nos propres limites en classant prématurément des sites qui se prêteraient à cette activité. Ne l’oublions pas, les parcs d’aquaculture français, loin de se développer ces dernières années, ont vu leur superficie régresser !

À cet égard, je dois l’avouer, les projets de classement concernant notre littoral et nos espaces fluviaux me préoccupent énormément. On me rétorquera que des classements de type Natura 2000 n’interdisent pas des implantations d’activités économiques. Certes, mais ils sont si contraignants que les multiples recours auxquels ils donnent lieu aboutissent, de fait, à bloquer presque tous les projets dans ce domaine ou dans d’autres. Pis encore, je l’ai dit, la superficie de nos parcs d’aquaculture a régressé au cours de ces dernières années.

C’est pourquoi, monsieur le ministre, je suggère qu’aucun classement ne puisse être finalisé s’il ne s’inscrit pas dans un projet global faisant ressortir, pour un territoire donné, trois types de sites : premièrement, les sites justifiant d’un classement du fait soit de leur qualité même, soit de la préservation de la faune et de la flore ; deuxièmement, les sites devant être réservés à l’activité économique sous toutes ses formes ; et, troisièmement, les sites à conserver pour un classement ultérieur, ne présentant pas de caractéristiques particulières, mais pour lesquels une destination n’est pas envisagée dans l’immédiat. Il faudrait d’ailleurs prévoir, sous réserve de compensation à surface identique, la possibilité de réviser certains classements antérieurs.

Il est temps, monsieur le ministre, mes chers collègues, de mettre fin à ce funeste paradoxe français d’une nation de marins qui a oublié la mer ! Je prendrai trois exemples emblématiques.

Premier exemple : alors que, dans les années quatre-vingt, la flotte de commerce française occupait la quatrième ou la cinquième place mondiale, elle est aujourd’hui située au vingt-neuvième ou trentième rang.

Deuxième exemple, que je ne cesserai de répéter : alors que nous jouissons du deuxième domaine maritime au monde, nous couvrons à peine 20 % de nos besoins en poissons et crustacés.

Troisième et dernier exemple : le trafic portuaire, qui, vous le savez, me tient à cœur. Je rappelle que 85 % du commerce mondial se fait par la mer. L’Europe est la première destination. La France a la meilleure position stratégique, tant au Nord qu’au Sud, mais ce sont des ports étrangers qui assurent en grande partie l’acheminement des containers à destination ou en partance de notre pays. N’oublions pas qu’Anvers est le premier port français !

Monsieur le ministre, j’en ai bien conscience, certains des dossiers que je viens d’évoquer ne ressortissent pas de votre responsabilité, ce qui prouve, d’ailleurs, que notre politique maritime, sous tous ses aspects, doit manifestement être menée avec une meilleure cohérence. C’est, me semble-t-il, ce à quoi M. le Président de la République nous a demandé de travailler. Voilà un ensemble de défis qu’il nous faut relever. Pour ce faire, monsieur le ministre, le groupe UMP vous apporte son soutien ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et sur plusieurs travées de l’Union centriste.)