Articles additionnels avant l'article 8
Dossier législatif : projet de loi de réforme des collectivités territoriales
Article additionnel après l'article 8 (début)

Article 8

Le chapitre III du titre Ier du livre Ier de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :

« Chapitre III

« Création d’une commune nouvelle

« Art. L. 2113-1. (Non modifié) La commune nouvelle est soumise aux règles applicables aux communes, sous réserve des dispositions du présent chapitre et des autres dispositions législatives qui lui sont propres.

« Section 1

« Procédure de création

« Art. L. 2113-2. (Non modifié) Une commune nouvelle peut être créée aux lieu et place de communes contiguës :

« 1° Soit à la demande de tous les conseils municipaux ;

« 2° Soit à la demande des deux tiers au moins des conseils municipaux des communes membres du même établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, représentant plus des deux tiers de la population totale de celles-ci ;

« 3° Soit à la demande de l’organe délibérant d’un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, en vue de la création d’une commune nouvelle aux lieu et place de toutes ses communes membres ;

« 4° Soit à l’initiative du représentant de l’État dans le département.

« Dans le cas mentionné au 3°, la création est subordonnée à l’accord des conseils municipaux des communes concernées dans les conditions de majorité mentionnées au 2°. À compter de la notification de la délibération de l’organe délibérant de l’établissement public au maire de chacune des communes membres, le conseil municipal de chaque commune membre dispose d’un délai de trois mois pour se prononcer. À défaut de délibération dans ce délai, sa décision est réputée favorable.

« Dans le cas visé au 4°, la création est subordonnée à l’accord des deux tiers au moins des conseils municipaux des communes intéressées, représentant plus des deux tiers de la population totale de celles-ci. À compter de la notification de l’arrêté de périmètre, chaque conseil municipal dispose d’un délai de trois mois pour se prononcer. À défaut de délibération dans ce délai, celle-ci est réputée favorable.

« Art. L. 2113-3. –  I. – La création de la commune nouvelle est subordonnée à la consultation des personnes inscrites sur les listes électorales municipales dans chacune des communes concernées sur l’opportunité de la création de la commune nouvelle. Un décret en Conseil d’État fixe les modalités de ces consultations. Les dépenses sont à la charge de l’État.

« La création ne peut être décidée par arrêté du représentant de l’État dans le département où se situe la commune nouvelle que si le projet recueille, dans chacune des communes concernées, l’accord de la majorité absolue des suffrages exprimés correspondant à un nombre de voix au moins égal au quart des électeurs inscrits.

« Tout électeur participant à la consultation, toute commune concernée, ainsi que le représentant de l’État dans le département, ont le droit de contester la régularité des opérations devant le tribunal administratif. Les recours ont un effet suspensif.

« II. – Lorsque la demande fait l’objet de délibérations concordantes des conseils municipaux de toutes les communes concernées, la création ne peut être refusée que pour des motifs impérieux d’intérêt général par le représentant de l’État dans le département où se situe la commune nouvelle.

« Art. L. 2113-4. – Lorsque les communes intéressées par une demande de création de commune nouvelle ne sont pas situées dans le même département ou dans la même région, la décision de création ne peut être prise qu’après modification des limites territoriales des départements ou régions concernés par décret en Conseil d’État pris après accord des conseils généraux et des conseils régionaux concernés. À défaut d’accord, les limites territoriales des départements ou régions ne peuvent être modifiées que par la loi.

« Art. L. 2113-5. – I. – En cas de création d’une commune nouvelle aux lieu et place de communes appartenant à un même établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, l’arrêté portant création de ladite commune nouvelle emporte également suppression de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont étaient membres les communes intéressées.

« L’ensemble des biens, droits et obligations de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre supprimé et des communes dont est issue la commune nouvelle est transféré à cette dernière.

« La création de la commune nouvelle entraîne sa substitution dans toutes les délibérations et dans tous les actes pris par l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre supprimé et par les communes qui en étaient membres.

« Les contrats sont exécutés dans les conditions antérieures jusqu’à leur échéance, sauf accord contraire des parties. Les cocontractants sont informés de la substitution de personne morale par la commune nouvelle. La substitution de personne morale aux contrats conclus par l’établissement public de coopération intercommunale supprimé et les communes n’entraîne aucun droit à résiliation ou à indemnisation pour le cocontractant.

« La création de la commune nouvelle est effectuée à titre gratuit et ne donne lieu au paiement d’aucune indemnité, droit, taxe, salaire ou honoraires.

« L’ensemble des personnels de l’établissement public de coopération intercommunale supprimé et des communes dont est issue la commune nouvelle est réputé relever de cette dernière dans les conditions de statut et d’emploi qui sont les siennes. Les agents conservent, s’ils y ont intérêt, le bénéfice du régime indemnitaire qui leur était applicable ainsi que, à titre individuel, les avantages acquis en application du troisième alinéa de l’article 111 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.

« La commune nouvelle est substituée à l’établissement public de coopération intercommunale supprimé et aux communes dont elle est issue dans les syndicats dont ils étaient membres.

« II. – Lorsque la commune nouvelle est issue de communes contiguës membres d’établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre distincts, elle devient membre de l’établissement public désigné par délibération du conseil municipal dans le mois de sa création. En cas de désaccord, le représentant de l’État dans le département saisit la commission départementale de la coopération interdépartementale qui se prononce à la majorité des deux tiers de ses membres.

« Le retrait du ou des autres établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre s’effectue dans les conditions prévues à l’article L. 5211-25-1. Il vaut réduction du périmètre des syndicats mixtes dont le ou les établissements publics précités sont membres, dans les conditions fixées au troisième alinéa de l’article L. 5211-19.

« III. – L’arrêté du représentant de l’État dans le département prononçant la création de la commune nouvelle peut prévoir que sera opérée une nouvelle dévolution de tout ou partie des biens ou des droits distincts de ceux de la commune nouvelle, y compris l’excédent disponible.

« Art. L. 2113-6.  (Non modifié) L’arrêté du représentant de l’État dans le département prononçant la création de la commune nouvelle en détermine la date et en complète, en tant que de besoin, les modalités. Il en fixe notamment le nom et le chef-lieu.

« Art. L. 2113-7. – (Non modifié) L’arrêté du représentant de l’État dans le département prononçant la création de la commune nouvelle peut prévoir que celle-ci est, sous réserve de l’accord préalable des conseils municipaux et jusqu’au prochain renouvellement, administrée par un conseil où entrent tout ou partie des membres en exercice des anciens conseils municipaux et, dans tous les cas, le maire et les adjoints de chacune d’entre elles.

« L’effectif total du conseil ne peut dépasser soixante-neuf membres, sauf dans les cas où la désignation des maires et adjoints des anciennes communes rend nécessaire l’attribution de sièges complémentaires.

« Art. L. 2113-8. – (Non modifié) Jusqu’au prochain renouvellement du conseil municipal, le nombre de conseillers provenant de chacun des anciens conseils municipaux est proportionnel, suivant la règle du plus fort reste, au nombre des électeurs inscrits.

« Cette répartition s’opère en prenant pour base de calcul un effectif de soixante-neuf sièges au total mais elle ne peut conduire à attribuer à l’une des anciennes communes un nombre de sièges supérieur à celui de ses conseillers en exercice.

« Si, par application des deux alinéas précédents, une ancienne commune n’obtient pas un nombre de sièges permettant la désignation du maire et des adjoints, le ou les sièges qui doivent lui être attribués en sus à cet effet viennent en complément de la répartition effectuée.

« La désignation se fait dans l’ordre suivant : maire, adjoints dans l’ordre de leur élection, conseillers dans l’ordre du tableau.

« Art. L. 2113-9. (Non modifié) Une commune nouvelle regroupant toutes les communes membres d’un ou plusieurs établissements publics de coopération intercommunale ou créée à partir de toutes les communes membres d’un établissement public de coopération intercommunale et d’une ou plusieurs communes non précédemment membres d’un établissement public de coopération intercommunale peut adhérer à un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre à compter du 1er janvier de la deuxième année suivant celle de sa création.

« Section 2

« Création, au sein d’une commune nouvelle, de communes déléguées

« Art. L. 2113-10. (Non modifié) Dans un délai de six mois à compter de la création de la commune nouvelle, des communes déléguées reprenant le nom et les limites territoriales de l’ensemble des anciennes communes dont la commune nouvelle est issue sont instituées au sein de celle-ci, sauf délibération contraire du conseil municipal de la commune nouvelle. Ce conseil municipal peut décider la suppression des communes déléguées dans un délai qu’il détermine.

« La commune nouvelle a seule la qualité de collectivité territoriale.

« Art. L. 2113-11. – La création au sein d’une commune nouvelle de communes déléguées entraîne de plein droit pour chacune d’entre elles :

« 1° L’institution d’un maire délégué ;

« 2° La création d’une annexe de la mairie dans laquelle sont établis les actes de l’état civil concernant les habitants de la commune déléguée.

« Art. L. 2113-12. (Non modifié) Le conseil municipal d’une commune nouvelle peut décider, à la majorité des deux tiers de ses membres, la création dans une ou plusieurs communes déléguées d’un conseil de la commune déléguée, composé d’un maire délégué et de conseillers communaux, dont il fixe le nombre, désignés par le conseil municipal parmi ses membres.

« Art. L. 2113-13. – Le maire délégué remplit dans la commune déléguée les fonctions d’officier d’état civil et d’officier de police judiciaire. Il peut être chargé, dans la commune déléguée, de l’exécution des lois et règlements de police et recevoir du maire les délégations prévues aux articles L. 2122-18 à L. 2122-20.

« Les fonctions de maire de la commune nouvelle et de maire délégué sont incompatibles.

« Art. L. 2113-14. – (Non modifié) Le conseil municipal peut également désigner, parmi les conseillers communaux, un ou plusieurs adjoints au maire délégué.

« Le nombre de ceux-ci ne peut excéder 30 % du nombre total des conseillers communaux.

« Art. L. 2113-15. – (Non modifié) Le conseil de la commune déléguée se réunit à l’annexe de la mairie située sur le territoire de la commune déléguée.

« Art. L. 2113-16. (Non modifié) Le conseil de la commune déléguée est présidé par le maire délégué.

« Le maire de l’ancienne commune en fonction au moment de la création devient de droit maire délégué jusqu’au prochain renouvellement du conseil municipal.

« Art. L. 2113-17. – (Non modifié) Les dispositions des articles L. 2511-9, L. 2511-10-1 à L. 2511-24, du quatrième alinéa de l’article L. 2511-25, des articles L. 2511-26, L. 2511-28 à L. 2511-33, et de l’article 36 de la loi n° 82-1169 du 31 décembre 1982 relative à l’organisation administrative de Paris, Marseille, Lyon et des établissements publics de coopération intercommunale sont applicables aux communes déléguées.

« Les dispositions des articles L. 2511-36 à L. 2511-45 sont applicables aux communes déléguées dotées d’un conseil.

« Art. L. 2113-18. – (Non modifié) Sous réserve des dispositions du présent chapitre, les règles relatives aux délibérations et au fonctionnement des conseils municipaux ainsi que les règles qui s’imposent aux conseils municipaux dans l’exercice de leurs compétences s’appliquent aux conseils des communes déléguées pour l’exercice de leurs attributions définies à la présente section.

« Art. L. 2113-19. – (Non modifié) Les dispositions du chapitre III du titre II du livre Ier de la présente partie relatives au maire et à ses adjoints sont également applicables respectivement aux maires délégués et à leurs adjoints.

« Toutefois, pour l’application de l’article L. 2123-23, les indemnités maximales pour l’exercice effectif des fonctions de maire délégué et d’adjoint au maire délégué sont votées par le conseil municipal en fonction de la population de la commune déléguée, et l’indemnité versée au titre des fonctions d’adjoint au maire de la commune nouvelle ne peut être cumulée avec l’indemnité de maire délégué ou d’adjoint au maire délégué.

« Section 3

« Dotation globale de fonctionnement

« Art. L. 2113-20. – I. – Les communes nouvelles définies à l’article L. 2113-1 bénéficient des différentes parts de la dotation forfaitaire des communes prévues aux articles L. 2334-7 à L. 2334-12.

« II. – La dotation de base et la dotation proportionnelle à la superficie de ces communes sont calculées conformément à l’article L. 2334-7.

« La première année, la population et la superficie prises en compte sont égales à la somme des populations et superficies des anciennes communes. La garantie est calculée la première année par addition des montants correspondants versés aux anciennes communes l’année précédant la création, et évolue ensuite tel que prévu au onzième alinéa de l’article L. 2334-7.

« III. – La commune nouvelle perçoit une part "compensation" telle que définie au 3° de l’article L. 2334-7, égale à l’addition des montants dus à ce titre aux anciennes communes, indexés selon le taux d’évolution fixé par le comité des finances locales.

« La commune nouvelle regroupant toutes les communes membres d’un ou plusieurs établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre perçoit en outre une part "compensation" telle que définie à l’article L. 5211-28-1, égale à l’addition des montants perçus à ce titre par le ou les établissements publics de coopération intercommunale dont elle est issue, indexés selon le taux d’évolution fixé par le comité des finances locales.

« IV. – Lorsque la commune nouvelle regroupe toutes les communes membres d’un ou plusieurs établissements publics de coopération intercommunale, sa dotation forfaitaire comprend en outre les attributions d’une dotation de consolidation égale au montant de la dotation d’intercommunalité perçue, au titre des articles L. 5211-29 à L. 5211-34, l’année précédant sa création par le ou les établissements publics de coopération intercommunale auxquels elle se substitue.

« Cette dotation évolue, au choix du comité des finances locales, selon un taux au plus égal au taux de croissance de la dotation forfaitaire des communes, hors part "compensations", tel que défini au douzième alinéa de l’article L. 2334-7.

« Art. L. 2113-21. – (Supprimé).

« Art. L. 2113-22. – La première année de création de la commune nouvelle, les bases communales prises en compte dans le calcul du potentiel fiscal sont les bases constatées de chaque ancienne commune, calculées dans les conditions prévues à l’article L. 2334-4 ainsi que, le cas échéant, celles de l’établissement public de coopération intercommunale auquel la commune nouvelle se substitue.

« La première année de création de la commune nouvelle, le potentiel financier est composé du potentiel fiscal, de la dotation forfaitaire hors la part prévue au sixième alinéa de l’article L. 2334-7 des communes dont la commune nouvelle est issue et, le cas échéant, de la dotation de compensation et de la dotation d’intercommunalité versées l’année précédente à l’établissement public de coopération intercommunale auquel la commune nouvelle se substitue. Ces éléments correspondent aux données de l’année précédant l’année où la commune nouvelle perçoit pour la première fois le produit de sa fiscalité. Les années suivantes, le potentiel financier de la commune nouvelle prend en compte la dotation particulière définie à l’article L. 2113-21. 

« Art. L. 2113-23. – (Non modifié) Les communes nouvelles sont éligibles aux dotations de péréquation communale dans les conditions de droit commun. »

Mme la présidente. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, sur l'article.

Mme Josiane Mathon-Poinat. L’article 8, qui vise à rendre plus efficace le dispositif de fusion des communes instauré par la loi Marcellin de 1971, suscite scepticisme et inquiétude parmi les élus locaux et les citoyens.

Certes, lorsque le projet de création d’une commune nouvelle fait l’unanimité des élus et de la population concernés, il n’y a aucune raison de s’y opposer.

Toutefois, le dispositif proposé par le Gouvernement traduit une vision plutôt dogmatique de l’organisation territoriale. En outre, le volontarisme affiché dans l’article 8 masque mal une attaque en règle contre l’institution communale.

M. Sarkozy veut du chiffre, c’est vrai : il faut supprimer des élus ; il faut supprimer des fonctionnaires ; il faut supprimer des services publics locaux, tout cela pour réduire le déficit qu’il alimente lui-même par ses décisions nationales. La solution ? Facilitons et imposons même la fusion de communes !

Sous l’empire de la loi Marcellin, seules les communes concernées avaient l’initiative et les populations devaient être consultées. Le présent projet de loi, même modifié par la commission, permettra à une majorité, certes qualifiée, d’imposer la fusion à une ou plusieurs communes si celles-ci ne sont pas suffisamment peuplées.

Pourquoi la loi Marcellin a-t-elle si peu fonctionné ? Est-ce par conservatisme ou bien en raison d’un attachement à une réelle démocratie de proximité ?

Monsieur le rapporteur, vous indiquez dans votre rapport que l’article 8 a suscité beaucoup d’émotion parmi les maires, en particulier bien entendu parmi ceux des petites communes. L’Association des maires de France évoque le risque d’intégration forcée des petites communes. D’autres rappellent le principe de la coopération et la possible fusion sur la seule base du volontariat.

La commission doute et laisse le Gouvernement, moyennant quelques aménagements, d’ailleurs, mettre en péril l’existence de milliers de petites communes.

L’article 8 n’est donc pas anodin. Au-delà des résultats chiffrés, il s’inscrit dans l’architecture globale du texte. L’effort se concentrera donc autour des métropoles.

Ailleurs, pour survivre, des communes devront fusionner au prix du maillage démocratique du territoire et, bien entendu, au prix d’une certaine idée de la ruralité.

Comment ne pas percevoir en effet que, si l’article 8 était mis en œuvre, nous assisterions à une accélération de la désertification rurale ? En effet, sans poste, sans école, loin de tout établissement de santé, une commune est déjà moribonde. Que sera donc une commune sans mairie ?

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, sur l'article.

M. Jean-Pierre Sueur. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, il faut retenir les leçons de l’histoire : jamais dans notre pays les fusions autoritaires de communes n’ont fonctionné, jamais elles n’ont eu de succès, jamais elles n’ont convaincu les habitants. Monsieur le ministre, vous pouvez tenter aujourd'hui d’en imposer de nouvelles, mais c’est à vos risques et périls !

De la même manière, je rappelle que, ce qui a fonctionné ces quinze dernières années, depuis l’adoption des lois de 1992 et de 1999, c’est le développement de l’intercommunalité dès lors qu’il s’est fait dans le respect des communes et des libertés communales. C’est un fait historique !

J’ai eu l’honneur de défendre, en 1992, le projet de loi relatif à l’administration territoriale de la République. S’il avait alors avait suscité quelque scepticisme –  c’est un euphémisme –, y compris au Sénat, il avait été voté parce que l’on y avait affirmé le respect des libertés communales.

Aujourd’hui, monsieur le ministre, vous essayez d’en revenir aux fusions imposées ou aux créations autoritaires de communes nouvelles. C’est, à nos yeux, une erreur.

Nous sommes pour l’intercommunalité, et nous l’avons prouvé ; nous pensons que les métropoles peuvent être une excellente idée ; nous pensons de même que nous pourrons faire à l’avenir de nouveaux progrès en termes de démocratisation des intercommunalités ; mais nous pensons aussi qu’il faut respecter la commune.

M. Bruno Sido. Nous aussi !

M. Jean-Pierre Sueur. Tout à l’heure, monsieur le ministre, nous avons voté l’un des articles que vous avez présentés dans la rédaction proposée par la commission et après la déclaration que vous avez faite et que nous avons entendue. Nous vous avions dit que, si cet article prévoyait une recentralisation, autrement dit, s’il s’agissait de confier aux représentants de l’État l’initiative de la création des pôles métropolitains, nous ne le voterions pas. Vous avez pris des engagements, et nous en avons tiré les conséquences.

Nous connaissons tous nos 36 700 communes, du moins une partie d’entre elles, et nous savons bien que l’on peut faire beaucoup en matière de coopération, beaucoup aussi en matière d’intercommunalité, y compris pour parvenir à des formes plus intégrées avec les métropoles, à condition, je le répète, de respecter les communes.

De la même manière que, lorsque nous avons débattu de l’article sur les métropoles, nous avons dit que ce serait une erreur de supprimer les communes à l’intérieur des métropoles, ce qui se serait passé si on leur avait ôté tout pouvoir fiscal, de même, nous disons ici que ce serait une erreur totale de vouloir créer à marche forcée des communes nouvelles sans respecter les conseils municipaux et les habitants.

Permettez-moi, à cet égard, de relire les premiers alinéas du texte qui nous est soumis et qui concernent la procédure de création: « Une commune nouvelle peut être créée aux lieu et place de communes contiguës :

« 1° Soit à la demande de tous les conseillers municipaux ;

« 2° Soit à la demande des deux tiers au moins des conseils municipaux des communes membres du même établissement public de coopération intercommunale ». Cela signifie donc que l’on pourrait faire disparaître une commune au motif qu’elle ferait partie du tiers des communes qui ne seraient pas d’accord !

M. Bruno Sido. Il faut lire également l’alinéa 14 !

M. Jean-Pierre Sueur. J’ai lu l’alinéa 14, mon cher collègue, mais j’ai lu aussi l’alinéa 11 : « Soit à l’initiative du représentant de l’État dans le département. »

Nous disons « Non ! » et nous demandons la suppression de cet alinéa parce que nous respectons profondément l’identité et la réalité communales. Ceux qui se sont affranchis de ce respect en ont payé le prix. Nous ne serons pas de ceux-là !

Si plusieurs conseils municipaux de communes contiguës décident, tous, de constituer une nouvelle commune et si ce choix est librement consenti, alors, nous le respectons.

En revanche, si le représentant de l’État…

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Il faut que le conseil municipal soit d’accord !

M. Jean-Pierre Sueur. … est à l’origine de la création ou de la disparition d’une commune, parce qu’il aura reçu l’instruction, non pas de donner une conférence de presse, mais de faire en sorte, par exemple, que, là où il y avait quatre, cinq, dix ou vingt communes, il n’y en ait plus qu’une, dans ce cas, nous pensons que c’est une erreur profonde.

Un tel procédé blesse l’idée que nous nous faisons de la démocratie en général et de la démocratie locale en particulier.

Si nous sommes très attentifs à toutes les formes de volontariat, nous pensons qu’il faut respecter le suffrage et la liberté des communes.

M. Bruno Sido. C’est le cas !

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, sur l'article.

M. Claude Bérit-Débat. Mon intervention, madame la présidente, ira dans le même sens que celle de Jean-Pierre Sueur.

L’objectif de cet article sur les communes nouvelles est évident : il nous est proposé de mettre fin à une exception française, à savoir l’émiettement du territoire en plus de 36 000 communes. L’objectif peut paraître légitime pour qui considère qu’il y a trop de communes et qu’il faut œuvrer à leur regroupement. Il y a déjà eu par le passé des tentatives en ce sens, je pense notamment à la loi Marcellin.

Pour cette raison, je le répète, une telle position est tout à fait admissible. On n’est pas obligé d’y adhérer, mais elle est cohérente. En revanche, les moyens qui nous sont proposés pour y parvenir sont, eux, beaucoup moins cohérents ! On constate en effet, à la lecture de l’article 8, que les fusions de communes seront plus orchestrées par les préfets que par les communes elles-mêmes.

Je tiens donc à l’affirmer dès à présent, le texte octroie en la matière aux préfets des pouvoirs exorbitants. S’il fallait extraire un article de ce texte pour mettre en évidence sa philosophie recentralisatrice, l’article 8 serait parfait. C’est la raison pour laquelle je ne peux que m’y opposer.

Il me semble en réalité indispensable de garder à l’esprit que les communes ne sont pas seulement les institutions politiques et administratives les plus proches des citoyens : ce sont aussi des collectivités locales et, à ce titre, elles méritent sinon des égards, du moins le respect de leurs droits.

Quels sont ces droits ?

Tout d’abord, chaque commune doit pouvoir se prononcer sur son devenir. Or, avec ce texte, des communes risquent de se voir imposer une fusion contre leur gré, ce qui n’a pas de sens.

Une commune doit pouvoir décider de son avenir, que ce soit par le biais de ses représentants ou par celui de ses habitants. C’est un principe intangible sur lequel on ne peut pas raisonnablement vouloir revenir. Il me paraît donc important que figurent dans le texte des dispositions consacrant le principe du caractère volontaire de la création d’une commune nouvelle.

Plus globalement, nous défendrons des amendements visant à encadrer les prérogatives accordées aux préfets en la matière, en partant du constat simple qu’il est plus cohérent que ce soit les communes concernées ou leurs habitants qui se prononcent sur d’éventuels regroupements plutôt que le représentant de l’État.

En définitive, cet article traduit un profond mépris pour les communes et leurs représentants.

Compte tenu des constats d’évidence que je viens de rappeler, je voterai contre cet article s’il doit rester en l’état. Je voterai contre une recentralisation qui ne dit pas son nom et surtout pour préserver ce que j’estime être le pouvoir des communes de disposer librement d’elles-mêmes.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Tout cela est caricatural ! Lisez le texte au moins, avant d’en parler !

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Daudigny, sur l’article.

M. Yves Daudigny. Voici un article qui mérite quelques éclaircissements de votre part, monsieur le ministre.

Il s’agit en apparence d’une proposition simple, qui s’inscrit dans le droit fil des travaux de la commission Balladur et qui est conforme au principe énoncé par l’ancien Premier ministre : l’organisation territoriale de notre pays repose sur deux piliers, l’intercommunalité et la région.

L’article 8 organise bien le processus de disparition de l’échelon communal et affirme l’échelon intercommunal, sous l’appellation de « commune nouvelle », comme le premier niveau de collectivité territoriale.

Il s’agit d’une proposition lisible et simple, qui peut susciter des approbations – je le comprendrais – ou de vives oppositions – c’est mon cas –, mais c’est en tout cas un beau sujet de débat.

Décidément, dans ce projet de réforme territoriale, rien n’est clair, rien n’est simple, rien n’est cohérent. En effet, depuis des mois et des semaines, dans les débats, les prises de position, les écrits, les documents du Gouvernement ou de ses soutiens, soit on feint d’ignorer purement et simplement l’article 8 soit ses objectifs sont niés.

On nous dit qu’il s’agit d’une réécriture de la loi Marcellin, que cet article ne sera pas appliqué – je tiens à votre disposition des citations de M. le président de la commission des lois – ou bien encore cet article est masqué par d’enthousiastes déclarations de principe. Permettez-moi à cet égard de vous citer le texte d’un sénateur de l’UMP : « Ce texte devra conforter l’autonomie et le rôle central des communes, qui sont le ciment de la démocratie. » Je suis d’accord avec cette déclaration, mais qu’en est-il exactement, monsieur le ministre ?

Le long article 8 est pourtant précis. Le processus de création de la commune nouvelle envisagé peut être soit le produit d’une démarche volontaire des conseils municipaux ou d’établissements publics – pourquoi pas ? –, soit la conséquence, et c’est bien là que le bât blesse, d’une initiative du représentant de l’État dans le département.

Quant aux anciennes communes, elles deviennent des communes déléguées, le maire délégué assurant les fonctions d’officier d’état civil et d’officier de police judiciaire. Cette organisation est proche du système des mairies d’arrondissement à Paris.

Certes, et on l’a noté, le texte proposé dans le projet de loi initial pour l’article L. 2113-21 du code général des collectivités territoriales a été supprimé par la commission des lois du Sénat. Cet article instituait au bénéfice des communes nouvelles une dotation particulière correspondant à une majoration de 5 % de la dotation forfaitaire.

Que souhaitez-vous donc, monsieur le ministre ? Ou bien cet article vise à une réorganisation fondamentale de notre système territorial local…

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mais non !

M. Yves Daudigny. … et, dans ce cas, dites-le (M. le ministre s’exclame), mais je crois comprendre à votre réaction que ce n’est pas le cas, ou bien vous ne souhaitez pas que cet article s’applique vraiment, auquel cas il suffit tout simplement de le supprimer !

Monsieur le ministre, mes chers collègues, je veux réaffirmer ici combien notre organisation locale, qui repose à la fois sur la commune et sur une intercommunalité de coopération - même si les liens entre les deux doivent être précisés et peuvent évoluer -, n’est pas un handicap pour la France, mais constitue pour celle-ci tout à la fois une force et un atout.

Oui, notre organisation locale constitue une force, avec l’implication essentiellement bénévole de nos 500000 élus locaux, avec l’autorité du maire, non seulement exécutif du conseil municipal mais aussi représentant de l’État dans sa commune, avec, enfin, la connaissance du terrain ainsi que la capacité d’initiative d’élus engagés dans le développement de leur territoire.

Oui, notre organisation locale constitue un atout, en ce qu’elle est le premier espace de vie démocratique - absolument irremplaçable -, mais aussi en ce qu’elle nourrit un tissu social et solidaire authentique et qu’elle permet l’existence d’identités affirmées, reconnues et revendiquées.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avons procédé au premier acte, mercredi dernier, de l’exécution de l’échelon départemental comme échelon d’action publique. Ne procédons pas ce soir à ce qui pourrait être le premier acte de l’exécution de l’échelon local, porteur d’une si riche histoire, de tant de vie, de tant de dynamisme et de tant d’espoirs. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement, sur l’article.

M. Jean-Pierre Chevènement. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’ai lu et relu cet article 8, y compris après les transformations qu’il a subies lors de son examen par la commission des lois, qui sont loin d’être négligeables.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Quand même !

M. Jean-Pierre Chevènement. Je pense néanmoins que cet article reste dangereux et inutile.

Pour avoir défendu la loi de 1999, que M. Mercier connaît bien, puisqu’il était le rapporteur de ce texte au Sénat, nous pensions avoir trouvé une solution simple et pratique au problème dit de « l’émiettement communal ».

Je précise que ce phénomène présente aussi de nombreux avantages. En effet, nous nous plaisons tous à rappeler que la commune est l’échelon de base de la démocratie, l’école de la démocratie, et que nous avions résolu le problème à partir du moment où l’on mettait en commun les compétences stratégiques des communes, à travers les communautés de communes et d’agglomération, les communautés urbaines, et bientôt les métropoles.

Pourquoi aller vers des « communes nouvelles », dans une démarche qui laisse apparaître qu’un conseil communautaire pourrait décider à la majorité de se transformer en commune nouvelle ? Le texte est clair à cet égard : la commune nouvelle peut être créée « à la demande de l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunale ». J’ai bien noté qu’une consultation des électeurs est prévue et que vous aviez substitué à l’expression « dans l’ensemble des communes » l’expression « dans chaque commune ». C’est évidemment important.

Vous ne répondez cependant pas à une question tout à fait centrale : en admettant que cette proposition soit formulée soit par les deux tiers des communes, ou, mieux, par l’organe délibérant de l’EPCI, ou plus encore par le préfet, représentant de l’État, les 36 000 communes existantes vont-elles être remplacées par 2 600 communes nouvelles qui se substitueraient aux EPCI ?

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mais non !

M. Jean-Pierre Chevènement. Je note, à l’alinéa 19 du projet de loi tel que modifié par la commission des lois, qu’en cas de création d’une commune nouvelle aux lieu et place des communes appartenant à un même établissement public de coopération intercommunale, l’arrêté portant création de ladite commune nouvelle emporte également suppression de l’EPCI.

Essayons, par conséquent, de réfléchir en tenant compte du fait que la consultation a lieu dans chaque commune. Prenons l’exemple d’un EPCI de onze communes, parmi lesquelles neuf sont d’accord, et l’expriment par un vote à la majorité de leurs électeurs, tandis que deux ne le sont pas. Que se passe-t-il ? On va procéder à la dissolution de l’EPCI. Mais que vont alors devenir les deux communes récalcitrantes ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Il y a un référendum !

M. Jean-Pierre Chevènement. Je ne comprends pas la logique de votre projet. Je considère qu’il est très dangereux et qu’il ouvre la voie à une remise en cause de l’intercommunalité telle qu’elle fonctionne.

Vous mettez les communes en contradiction les unes avec les autres, et votre texte, parce que vous n’en aurez pas mesuré assez les conséquences, aboutira à un véritable cafouillage. Naturellement, j’écouterai attentivement les réponses que vous ne manquerez pas de m’apporter, mais, dans l’état actuel du texte, je considère que cet article 8 est tout à fait dangereux et inutile.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Mais cohérent avec le reste du texte !

M. Jean-Pierre Chevènement. À cet égard, j’adhère tout à fait à l’argument développé par notre collègue du groupe CRC-SPG pour supprimer cet article, dont je ne laisserais subsister que la seule disposition qui prévoit l’hypothèse d’une création à l’initiative des communes elles-mêmes.

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Maurey, sur l’article.

M. Hervé Maurey. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous entamons ici la discussion d’un article très important, puisque la création des communes nouvelles est l’une des dispositions du projet de loi qui ont le plus fait débat, et qui ont suscité - et suscitent encore - le plus d’inquiétude parmi les élus et notamment les maires.

En écoutant mes collègues qui se sont exprimés juste avant moi, je constate que beaucoup de choses inexactes continuent d’être dites, j’ignore si c’est à dessein ou non.

Je suis néanmoins étonné quand j’entends des personnes qui, comme M. Chevènement, ont pourtant une expertise reconnue sur la question des collectivités locales, expliquer que les EPCI pourraient décider tout seuls de se transformer en communes.

M. Jean-Pierre Chevènement. Je n’ai pas dit cela !

M. Hervé Maurey. Il est tout de même écrit en toutes lettres dans le projet de loi qu’une majorité des deux tiers au moins des conseillers municipaux des communes membres représentant plus des deux tiers de la population est requise. Je remarque d’ailleurs que l’opposition nationale oublie souvent ce détail ! (Protestations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Il est curieux que vous ayez oublié cela, monsieur Chevènement. Dans mon département, le président du conseil général avait fait le même oubli lors de l’assemblée générale des maires. De là à penser qu’il y a une volonté d’inquiéter les élus en diffusant des informations qui, sans être fausses, ne sont pas tout à fait exactes, il n’y a qu’un pas que, naturellement, je ne franchirai pas.

Je suis, comme tout un chacun ici, extrêmement attaché à l’existence des communes, à l’autonomie des communes. Naturellement, je suis entièrement d’accord avec M. Chevènement pour dire que la commune est l’échelon de base de la démocratie, de la proximité, et même de la bonne gestion. Je ne vois néanmoins pas en quoi la création de ces communes nouvelles met en cause l’autonomie et la libre administration des communes.

Il y a, comme je l’ai dit, un certain nombre de dispositifs qui encadrent bien cette possibilité de création de communes nouvelles. La commission des lois est même allée encore plus loin - peut-être trop loin à certains égards, comme je m’en expliquerai – puisque, au-delà de cette majorité des deux tiers des conseillers municipaux des communes représentant deux tiers de la population, elle souhaite que, dans chaque commune, se tienne un référendum et que, dans chaque commune, la création fasse l’objet d’une approbation par la population.

Cela signifie que, sur un territoire donné, la plus petite commune a le pouvoir de s’opposer à la création de la commune nouvelle, ce qui pose d’ailleurs une vraie question d’un point de vue démocratique : est-il sain, démocratiquement parlant, qu’une seule commune puisse s’opposer à la volonté de l’ensemble des autres communes ?

M. Gérard Le Cam. Oui, c’est très sain !

M. Hervé Maurey. C’est plutôt en cela qu’une vraie question persiste dans le texte qui nous est proposé. Je ne crois pas, comme M. Chevènement, que cet article soit dangereux, mais je rejoins notre collègue quand il dit que cet article est inutile.

En effet, tel qu’il est rédigé, avec cette double condition de majorité de deux tiers des conseillers municipaux des communes représentant deux tiers de la population, à laquelle s’ajoute la nécessité d’un référendum dans chaque commune, il est certain que nous ne serons pas nombreux dans nos départements à assister à la création de communes nouvelles…

Le risque, aujourd’hui, est donc de passer encore des heures à discuter d’un article qui, s’il n’est pas un peu revisité, pourrait ne pas trouver à s’appliquer du tout. C’est d’autant plus vrai que la commission des lois a aussi supprimé l’incitation financière qui existait à l’origine pour que ces EPCI puissent se transformer en communes nouvelles.

Eu égard à la suppression de l’incitation financière et à la nécessité de la tenue d’un référendum dans chaque commune - même lorsqu’il y a accord de l’ensemble des conseils municipaux -, il me paraît difficile de voir dans cet article une volonté de porter atteinte à la liberté et à l’autonomie des communes.

Ceux qui défendent un tel point de vue ont soit quelques difficultés de compréhension, ce que je n’imagine pas un seul instant, soit jouent à se faire peur, soit, plus vraisemblablement, tentent une fois de plus d’effrayer les élus des petites communes. Il faudra montrer, au cours de ces débats, que tout cela n’est pas fondé. (Applaudissements sur les travées de lUnion centriste et de lUMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, sur l’article.

M. Pierre-Yves Collombat. Je répondrai tout simplement à mon collègue que, si toutes ces discussions ont lieu, c’est parce que ce texte entretient la confusion systématique entre commune et intercommunalité. Pour vous, les communes nouvelles sont une modalité de l’intercommunalité. J’en veux pour preuve que, lorsque nous avons discuté du nombre de délégués des communes de l’EPCI, nous avons fait la somme des représentants de chacune des communes qui composent la commune nouvelle.

Si l’on fait preuve de cohérence, la commune nouvelle doit avoir pour nombre de représentants le nombre de représentants qu’aurait la commune de même nature et de même niveau démographique. Là aussi, on fait face à la même interrogation : pourquoi maintenir des communes déléguées ? Si des collectivités veulent fusionner, qu’elles fusionnent, puisque telle est leur volonté ! Mais qu’elles ne soient pas amenées à fusionner contre leur gré, fût-ce à une majorité très renforcée de deux tiers plus deux tiers !

Admettez alors la règle de l’unanimité. Si une petite commune refuse d’être intégrée, elle doit pouvoir rester en marge. Ne mélangeons pas tout !

Encore une fois, nous avons ce type de discussions parce que vous mélangez tout et confondez collectivité territoriale et établissement public de coopération intercommunale.

On navigue de l’un à l’autre, et c’est pour cela que le texte prévoyait des incitations financières, qui ont été depuis supprimées par la commission. Pourquoi donc avait-on souhaité introduire des incitations financières ? Si les citoyens souhaitent fusionner et créer une commune, pourquoi ne le feraient-ils pas ?

Admettons donc que ces opérations se font à l’unanimité, et que la commune nouvelle, une fois constituée, est une commune comme les autres et non pas une commune particulière. Des incitations financières ne sont pas nécessaires. Si les collectivités choisissent de fusionner, c’est qu’elles y trouvent leur avantage. Laissons-les faire, et ne nous mêlons pas d’assortir ce dispositif d’incitations financières.

Si l’on parvient à clarifier tout cela, il ne sera plus nécessaire d’agiter des chiffons rouges.

Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Sido, sur l’article.

M. Bruno Sido. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’heure est grave.

Je connais relativement bien le sujet, puisque je suis issu d’un département – la Haute-Marne – qui est champion de la fusion-association et de la loi Marcellin. Nous avions à l’époque 530 communes ; 200 ont fusionné dans des circonstances que j’exposerai plus loin. Il en reste aujourd’hui 100.

Oui, l’heure est grave, monsieur le ministre, mes chers collègues, car, si l’intercommunalité n’est pas aussi avancée qu’il serait nécessaire dans mon département, c’est bel et bien parce que la Haute-Marne et tous ses maires ont été traumatisés par la loi Marcellin.

M. Jean-Pierre Sueur. Il faut entendre cela, monsieur le ministre, mes chers collègues !