M. Jean Desessard. Mes chers collègues, pourquoi vouloir soustraire le Grand Paris au code de l’environnement ? C’est inacceptable !

On ne peut pas, d’un côté, vanter la réussite du Grenelle de l’environnement comme le fait la majorité et, de l’autre, faire une exception sur ce qui, je vous le rappelle, est censé être un projet faisant la promotion du développement durable. Je me réfère ici à l’article 1er du projet de loi.

Je dirai même que les villes-monde se doivent d’être écologiques. Comment peut-on concevoir, à l’échelle de la planète, qu’elles ne respectent pas l’environnement ?

Le Gouvernement a déjà écarté les propositions novatrices des dix équipes pluridisciplinaires ayant planché sur le sujet. Ne souhaitant pas ralentir les travaux et vous empêcher, monsieur le secrétaire d’État, de creuser le plus rapidement possible, je ne ferai pas d’inventaire à la Prévert. Voici donc seulement quelques-unes des propositions que vous avez laissées de côté.

L’équipe de Richard Rogers voulait intégrer un maillage serré du territoire parcouru par des modes de transport « doux ». Plusieurs équipes, notamment Studio 09, l’équipe d’Antoine Grumbach, celle de Jean Nouvel, proposaient un système permettant de passer d’un mode de transport interurbain à un autre plus local.

Les transports ferrés et fluviaux retrouvaient une place de choix. Dans le projet porté par l’équipe de Christian de Portzamparc, la Seine et les canaux reprenaient du service pour assurer le transport de personnes.

L’équipe de Richard Rogers souhaitait l’irrigation du Grand Paris par une trame verte et bleue assurant la liaison écologique entre les biotopes, trame doublée de circulations douces, avec multiplication des espaces verts afin que les habitants y aient accès en moins de dix minutes à pied de chez eux. L’équipe d’Antoine Grumbach proposait la végétalisation des façades, des toits et des cours. Enfin, Studio 09 soutenait la production alimentaire en circuit court et l’équipe Lin, la prévention des inondations.

Toutes ces propositions, vous les avez balayées, monsieur le secrétaire d’État ! Vous n’avez qu’un seul objectif : foncer, creuser, avancer, réduire les délais !

Mais ce n’est pas tout. Vous voulez maintenant faire en sorte que le Grand Paris déroge à notre législation sur l’environnement. Vous voulez la ville-monde, sans le respect du code de l’environnement !

Soyez raisonnables, mes chers collègues ! Votez cet amendement et maintenez le Grand Paris dans le cadre du code de l’environnement !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. J’admire l’attachement de notre collègue Jean Desessard au code de l’environnement, mais je précise que nous mettons en place un nouveau schéma de transport attendu par nombre de nos concitoyens. L’alinéa 14 de l’article 3 ne fait que compléter le mécanisme particulier que nous souhaitons inscrire dans la loi pour ce grand projet.

La commission émet donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Blanc, secrétaire d'État. L’avis du Gouvernement est également défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 261.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 262, présenté par Mme Voynet, M. Desessard, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery et M. Muller, est ainsi libellé :

Alinéa 15

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Par cet amendement, nous souhaitons rétablir une évidence démocratique : la concertation publique des habitants concernés par le projet de loi.

L’article L. 300-2 du code de l’urbanisme, que la majorité entend supprimer, dispose : « […] l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunale délibère sur les objectifs poursuivis et sur les modalités d’une concertation associant, pendant toute la durée de l’élaboration du projet, les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées dont les représentants de la profession agricole, avant :

« a) Toute élaboration ou révision du schéma de cohérence territoriale ou du plan local d’urbanisme ;

« b) Toute création, à son initiative, d’une zone d’aménagement concerté ;

« c) Toute opération d’aménagement réalisée par la commune ou pour son compte lorsque, par son importance ou sa nature, cette opération modifie de façon substantielle le cadre de vie ou l’activité économique de la commune et qu’elle n’est pas située dans un secteur qui a déjà fait l’objet de cette délibération au titre du a) ou du b) ci-dessus. Un décret en Conseil d’État détermine les caractéristiques des opérations d’aménagement soumises aux obligations du présent alinéa. »

Monsieur le secrétaire d'État, nous vous demandons de respecter cet article du code de l’urbanisme. Il ne s’agit plus ici du code de l’environnement, même si je souhaite que les dispositions de ce dernier soient également respectées !

Il serait contreproductif de priver les habitants de la concertation publique sur le bien-fondé d’un projet.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est évident !

M. Jean Desessard. Nous demandons donc la suppression de cet alinéa, qui serait à coup sûr un déni de démocratie.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. Sur l’initiative de notre collègue Yves Pozzo di Borgo, la commission spéciale a jugé utile d’éviter l’organisation concomitante de deux procédures : le débat public sur le Grand Paris et la procédure de concertation préalable prévue dans le code de l’urbanisme. C’est de cette façon que nous sommes parvenus à unifier la procédure dans un délai de quatre mois.

Je tiens à préciser à M. Desessard, lequel fait preuve de beaucoup de passion pour défendre l’ensemble des articles du code de l’urbanisme, qu’une enquête publique sera organisée, ce qui est normal, pendant une durée de six mois, sur chaque contrat de développement territorial, pour le périmètre situé autour de la gare qui comprendra des logements sociaux, des équipements publics et des entreprises.

Ainsi, il y aura, d’une part, l’enquête publique générale pour le projet dans un délai de quatre mois et, d’autre part, à chaque point de sortie de tunnel – vous devriez en sortir également, mon cher collègue ! (M. Jean Desessard rit.) – et à chaque gare d’interconnexion, une enquête publique de six mois pour chaque contrat de développement territorial.

C’est de cette manière que nous pensons avoir réglé les problèmes importants de concertation et d’association du public à l’ouvrage dont nous parlons.

La commission a donc émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Blanc, secrétaire d'État. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 262.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les trois premiers sont identiques.

L'amendement n° 29 est présenté par Mmes Assassi et Gonthier-Maurin, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 75 est présenté par M. Dallier.

L'amendement n° 126 est présenté par M. Caffet, Mme Bricq, M. Angels, Mmes Campion et Khiari, MM. Lagauche, Madec, Mahéas et Repentin, Mme Tasca, M. Teston, Mme Voynet, MM. Bodin et Assouline, Mme Le Texier, M. Badinter et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 17

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour présenter l'amendement n° 29.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Nous abordons là une « innovation » majeure introduite, sur l’initiative de notre collègue Yves Pozzo di Borgo, lors de l’examen de ce projet de loi par la commission spéciale : je veux bien évidemment parler de l’abandon pur et simple, préconisé par cet alinéa, du débat public relatif au projet Arc Express.

Ce projet a fait l’objet d’une saisine de la Commission nationale du débat public par le Syndicat des transports d’Île-de-France en juillet dernier. Le débat public sur ce projet emblématique porté par les usagers et les élus locaux, permettant des liaisons banlieue-banlieue, aurait dû débuter cette année.

Ainsi, sous couvert de cohérence et de simplification, cet alinéa entérine purement et simplement l’abandon non seulement du débat public, mais également du projet lui-même.

Je le dis avec solennité, nous sommes en profond désaccord avec une telle mesure qui illustre parfaitement l’objet de ce Grand Paris : écraser et réduire en cendres tous les projets de transports menés par le STIF et la région.

À ce titre, je vous rappelle que le projet Arc Express n’est pas le même que celui du Grand huit : ils ne peuvent donc se fondre dans un même schéma.

Le quotidien Le Parisien titrait vendredi : « Grand Paris : la guerre est déclarée ». La formule me semble assez juste. Le Grand Paris, dans sa forme institutionnelle, comme avec ses projets, est conçu comme une arme de guerre contre la région, contre le schéma directeur et contre le STIF.

Monsieur le secrétaire d'État, vous pouvez prévoir à l’article 2 que le financement du projet de Grand huit sera indépendant des financements des contrats de projets. Mais que restera-t-il à financer au titre des transports dans le cadre des contrats de projets, si le Grand Paris écrase et se substitue à tout autre projet ?

En outre, comment justifier auprès des usagers le report du débat public, alors qu’ils sont quotidiennement confrontés à d’importantes difficultés en termes de déplacements, que leurs besoins sont si criants et qu’ils attendent impatiemment le projet d’Arc Express ?

Nous estimons, à l’instar du département du Val-de-Marne et du président de l’association Orbival, que le débat public sur le Grand Paris doit intégrer les conclusions du premier débat sur Arc Express-Orbival, dont le dossier est prêt.

Cela serait d’autant plus simple, en ce qui concerne le Val-de-Marne, qu’un consensus et une mobilisation très larges se sont déjà opérés sur le projet Orbival.

Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression d’une telle disposition, qui sonne comme une déclaration de guerre, un acte de défiance envers les projets portés par les élus franciliens, comme un déni de démocratie inacceptable.

M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour présenter l'amendement n° 75.

M. Philippe Dallier. Nous rencontrons, là encore, des difficultés liées à la méthode employée.

Je comprends tout à fait la problématique soulevée par M. le secrétaire d’État, avec les deux projets qui sont complémentaires sur certaines parties du trajet et opposés sur d’autres.

À mon sens, nous devons nous mettre autour de la table et discuter des voies et moyens d’aboutir à la meilleure solution.

Je le redis, pour ce qui est du tracé Est, je suis favorable à celui qui a été proposé par M. le secrétaire d’État, tracé qui dessert les zones aujourd’hui les plus enclavées du département de la Seine-Saint-Denis.

Mais je souhaite également prendre en considération la demande de ceux qui estiment que le projet de liaison Sud entre le Val-de-Marne et Noisy-le-Sec est pertinent. Nous ne pouvons rayer d’un trait de plume, passer par pertes et profits cette importante question.

Monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, je souhaiterais que nous trouvions un consensus sur ce sujet très délicat, qui est perçu comme un point sur lequel certains voudraient aller à l’affrontement.

Je suis persuadé que vous ne le souhaitez pas et que ce n’est pas non plus le souhait du président de la région, quoique j’en doute parfois lorsque je l’entends. Profitez de cette occasion pour faire un geste et inviter les uns et les autres à la table des négociations !

Mme Nicole Bricq. Monsieur le secrétaire d'État, faites un geste !

M. le président. La parole est à M. Serge Lagauche, pour présenter l'amendement n° 126.

M. Serge Lagauche. L’ajout par la commission de ce nouveau paragraphe à l’article 3 a pour effet de mettre fin au projet Arc Express.

Nous vous avons démontré à quel point l’urgence de la situation régionale exigeait, au contraire, que les projets soient menés de front.

Nous maintenons que la poursuite du projet Arc Express répond à l’objectif de mise en cohérence des infrastructures existantes et des projets de la région d’Île-de-France et qu’il n’est pas, de surcroît, incompatible avec la double boucle.

Nous vous proposons donc de supprimer cette disposition inacceptable.

Avant de vous inviter solennellement à voter notre amendement, je veux vous donner lecture d’un extrait du compte rendu intégral des débats du 30 janvier 2009. Nous évoquions alors ensemble la question des transports franciliens dans le cadre de l’examen du Grenelle I, précisément de son article 13, devenu l’article 14 de la loi définitivement adoptée : « Monsieur le ministre d’État, madame la secrétaire d’État, je crains que ceux qui approuvent l’inscription de l’aménagement d’un métro périphérique circulaire dans les grandes priorités ne se bercent d’illusions et n’aient un réveil difficile.

« Il ne faudrait pas que la complexité et la durée de ce chantier servent de prétexte à l’abandon de tous les projets de transports en commun en site propre déjà en cours de réalisation ou à l’étude, car ceux-ci sont complémentaires de cette fameuse rocade. C’est pourquoi j’ai voté tout à l’heure l’amendement présenté par Mme Bernadette Dupont.

« Monsieur le ministre d’État, pouvez-vous m’apporter la garantie formelle que le lancement du chantier du métro automatique circulaire ne conduira pas à l’abandon de ces autres projets ? »

À cette question, le ministre d’État Jean-Louis Borloo répondait ainsi : « La réponse est oui ! »

Que le Gouvernement ait changé d’avis depuis ne nous étonne pas particulièrement, car c’est devenu une habitude. Mais qu’en est-il de vous, monsieur le rapporteur ? Ce sont vos propos que je viens de citer in extenso à l’instant. Voilà tout juste un an, vous demandiez des garanties pour que les projets en cours d’élaboration ne soient pas abandonnés et, aujourd’hui, vous fermez les yeux sur la mise à mort d’Arc Express !

Une telle attitude n’est pas raisonnable. Avez-vous des raisons solides pour expliquer ce revirement ? Malheureusement, je crains que non. N’oubliez pas que, en tant que sénateurs, nous représentons les collectivités territoriales.

Cette disposition est une verrue qui entache la sincérité de l’ensemble du texte. Revenez dessus, et nous pourrons alors examiner avec apaisement la suite de ce projet de loi.

Mme Nicole Bricq. Très bien !

M. le président. L'amendement n° 241, présenté par Mme Voynet, M. Desessard, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery et M. Muller, est ainsi libellé :

Alinéa 17, première phrase

Après les mots :

en Île-de-France

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

cette consultation est organisée conformément aux articles L. 121-8 à L. 121-15 du code de l'environnement. Ses conclusions sont intégrées en tant qu'annexe au dossier de consultation défini au II du présent article.

La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Monsieur le président, mon intervention sera brève, car je ne voudrais pas freiner le dynamisme dont fait preuve M. le secrétaire d’État et l’empêcher de démarrer les travaux et de creuser pour la ville-monde ! (Rires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Mme Isabelle Debré. Nous ne sommes pas au cirque !

M. Jean Desessard. Cet amendement vise tout simplement à réintroduire les dispositions du code de l’environnement applicables en la matière.

Par ailleurs, comme il n’est pas très éloigné des trois amendements identiques qui viennent d’être présentés, j’indique dès à présent que je voterai ces derniers.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. Nous sommes là sur un point difficile, chacun le sait.

M. Jacques Mahéas. Tout à fait !

Mme Nicole Bricq. Nous en sommes tous d’accord !

M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. Chers collègues siégeant dans la partie gauche de cet hémicycle, puisque vous ne cessez de vous référer à M. Carrez, je me permets de vous rappeler quel était le sentiment de ce dernier lors de son audition par la commission spéciale.

À la question que nous lui avons posée sur ce problème de télescopage, en quelque sorte, de différents projets devant la Commission nationale de débat public, il nous a indiqué que l’obligation d’organiser des débats publics sur les différents projets de transports franciliens existants induisait pour la Commission nationale du débat public de réelles difficultés d’articulation et de calendrier.

Je précise à M. Lagauche, avec qui nous avons beaucoup travaillé autrefois, qu’il y a à mes yeux, outre le problème du lamentable état des quatre principales lignes de réseau RER que j’ai évoqué hier, deux projets de la région qu’il est essentiel de mener à bien pour donner satisfaction à nos concitoyens.

Il s’agit, d’une part, du prolongement d’EOLE jusqu’à La Défense, ce qui permettra d’innerver une grande partie du cœur de Paris, comme nous l’avons voté, et, d’autre part, plus important encore, l’amélioration de la circulation vers le nord par le prolongement jusqu’à Pleyel de la ligne automatique n° 14, que nous avons mise en place lorsque M. le secrétaire d’État était président de la RATP.

C’est à ces deux projets essentiels que je pensais lorsque je suis intervenu en séance publique pour tenir les propos que vous avez rappelés et que je maintiens. En effet, le premier projet soulagera la ligne A du RER, la plus surchargée, et le second améliorera le problème lancinant de la ligne 13 de la RATP. Je rappelle là mes vieux souvenirs d’ancien conseiller régional, lorsque je siégeais notamment à la commission des transports.

Tels sont donc les deux projets majeurs que j’avais à cœur de faire avancer.

Oserais-je d’ailleurs rappeler dans cet hémicycle, où l’on me donne en permanence des leçons, qu’il a fallu l’intervention du Président de la République pour mettre en service sur la ligne A du RER des véhicules à deux étages ?

Mme Nicole Bricq. C’était prévu avant !

M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. Cette solution a permis d’améliorer la circulation. Or les grands penseurs dans ce domaine avaient toujours estimé qu’elle était impossible !

J’en viens aux amendements. Nous risquons d’avoir un télescopage. La proposition qu’a faite notre collègue Yves Pozzo di Borgo est claire, et la commission spéciale l’a adoptée.

M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. Selon moi, il doit y avoir une bonne articulation entre le projet, que nous soutenons, défendu par le Gouvernement et le projet Arc Express, qui se développe sur deux arcs, l’un au Sud, l’autre au Nord.

Reste que le bouclage du projet Arc Express a été renvoyé au-delà de 2025 et que la Commission nationale du débat public n’a pas fixé de calendrier pour son examen.

Afin d’éviter tout télescopage, la CNDP devra donc examiner en priorité le projet dont nous discutons, dès que le texte de loi sera adopté, ce qui ne saurait tarder (Sourires.), sans omettre d’intégrer tous les éléments techniques et financiers du projet Arc Express qui lui sont assimilables, ainsi que le prévoit l’amendement de M. Pozzo di Borgo, que la commission a adopté. Dans ces conditions, celle-ci ne peut être que défavorable aux amendements de suppression nos 29, 75 et 126, ainsi qu’à l’amendement n° 241.

M. David Assouline. C’est clair !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Blanc, secrétaire d'État. Le Gouvernement a été favorable à l’introduction de cette disposition dans le texte de la commission.

M. Jean-Pierre Caffet. Et pour cause !

M. Christian Blanc, secrétaire d'État. Il la reprend volontiers à son compte.

M. Jacques Mahéas. Donnez-nous des arguments !

M. Christian Blanc, secrétaire d'État. Certains considèrent que, de façon autoritaire, l’État dessaisit la région de l’un de ses projets, …

M. Jacques Mahéas. Ils ont raison !

M. Christian Blanc, secrétaire d'État. … alors même que les citoyens viennent de lui renouveler leur confiance.

M. David Assouline et M. Jacques Mahéas. Eh oui !

M. Christian Blanc, secrétaire d'État. Je crois qu’il convient de dépassionner ce débat.

M. Jacques Mahéas. Cela va être difficile !

M. David Assouline. Surtout avec cet amendement !

M. Christian Blanc, secrétaire d'État. Je rappelle, comme je l’ai indiqué au cours de la discussion générale, que le tracé indicatif de la double boucle a été présenté dès le 29 avril 2009, lors de l’intervention du Président de la République au Palais de Chaillot.

Je rappelle également que le STIF a saisi la CNDP au sujet du projet Arc Express en juillet 2009, après avoir eu connaissance de ce schéma.

Je rappelle en outre que, entre temps, de mai à juillet, des discussions approfondies ont eu lieu avec l’exécutif régional et le STIF et que celui-ci, dans le protocole d’accord auquel nous avons abouti, connaissait parfaitement le tracé.

Je rappelle enfin que, à la suite de ces discussions approfondies, l’État a modifié le tracé prévisionnel de la double boucle de façon à mieux reprendre le tracé d’Arc Express là où cela était possible,…

M. Christian Blanc, secrétaire d'État. … et cela a été souvent possible, notamment dans la boucle de Gennevilliers. Le tracé ainsi modifié a été rendu public le 30 juin 2009.

Tous ces éléments sont factuellement vérifiables.

C’est donc en connaissant parfaitement l’existence de la double boucle du métro automatique que le STIF a saisi la CNDP sur le projet Arc Express.

M. David Assouline. Elle a rendu un avis !

M. Christian Blanc, secrétaire d'État. Il était important que je retrace cette chronologie.

Quelles sont les conséquences d’une telle saisine ? Le code de l’environnement n’autorise pas la CNDP à se prononcer sur l’opportunité d’un projet plutôt qu’un autre. Il l’autorise seulement, au regard de la nature du projet, à définir les conditions de sa mise en débat public.

Concrètement, même si elle le souhaitait, la CNDP ne serait pas fondée en droit à mettre fin à une procédure dont l’objet même relève d’une obligation de débat public.

C’est pourquoi la disposition introduite par la commission spéciale nous paraît utile, pour tous ; à défaut, nous nous dirigerions tous dans une impasse qui aurait pour conséquence deux débats sur deux infrastructures, dont l’une est en très grande partie incluse dans l’autre. Cela serait illisible, conduirait nos concitoyens à une confusion certaine et entraînerait des coûts absolument inutiles.

Je le répète, je veux poser ce problème de façon dépassionnée. Il se trouve que c’est une question que je connais assez bien, personnellement, historiquement.

Arc Express est un projet que je connais bien.

M. Jean-Pierre Caffet. Contrairement à nous qui sommes des ignorants !

M. Christian Blanc, secrétaire d'État. Non, pas du tout !

M. Jean-Pierre Caffet. C’est insupportable de vous entendre dire en permanence que vous connaissez bien le sujet et que nous n’y connaissons rien ! (Exclamations sur les travées de l’UMP.)

M. Christian Blanc, secrétaire d'État. Ai-je dit cela ?

M. Christian Cambon. M. le secrétaire d'État n’a jamais dit cela !

M. Christian Blanc, secrétaire d'État. Monsieur Caffet, je peux arrêter là mon intervention ! Permettez-moi de souligner que j’ai simplement dit que Arc Express était un projet que je connaissais bien.

C’est en 1992, alors que j’étais président de la RATP, que je l’ai proposé et défendu, malheureusement sans succès.

Mme Isabelle Debré. Vous voyez !

M. Christian Cambon. Si vous écoutiez !

M. Christian Blanc, secrétaire d'État. Depuis, dix-huit ans ont passé, soit une génération entière. Les questions qui se posaient à l’époque sont les mêmes aujourd’hui. Les trajets de banlieue à banlieue représentaient déjà 70 % des déplacements. Cependant, nous n’étions pas encore au même niveau de saturation du réseau.

Je note d’ailleurs que, en 2005-2006, lorsque ce projet a été remis sur la table sous le nom de Métrophérique, la région était favorable à un tracé ferré passant en grande couronne. Il aura fallu attendre quelques années pour qu’elle accepte d’inscrire ce nouveau projet, que j’avais proposé sous le nom d’Orbital, qui est devenu Orbival, dans le SDRIF.

Le projet étant un peu technique, je pense qu’il était intéressant de le resituer, et je crois pouvoir en parler en connaissance de cause.

Arc Express était donc, à l’origine, un projet de rocade. Je dis « à l’origine », car, désormais, comme l’indique bien son nom, il ne s’agit plus que de réaliser deux arcs, l’un joignant La Défense au carrefour Pleyel, puis à Bobigny, l’autre joignant Issy-les-Moulineaux à Villejuif, puis à Noisy-le-Grand Mont d’Est avec une variante vers Val de Fontenay.

Au total, cinquante kilomètres de métro automatique seraient mis en service entre 2020 et 2025, du moins si les calendriers affichés sont tenus alors même que n’ont été étudiées, à ma connaissance, ni les questions de financement, ni les questions de maîtrise d’ouvrage, ni même les contraintes environnementales qui auront nécessairement une incidence sur le projet.

Le projet assume clairement le fait que les travaux qui viseraient à compléter ces deux arcs pour en faire une rocade complète ne seraient pas entrepris avant 2025, pour une mise en service au mieux dans les années 2030-2035, soit dans vingt-cinq ans ! Tout ce que je viens de dire est vérifiable auprès du STIF.

Je rappelle que la totalité du dispositif proposé par l’État, s’agissant du financement non budgétaire, de la maîtrise d’ouvrage et des procédures – j’ai évoqué ces points hier –, permettra d’avoir réalisé en 2023, non pas deux arcs, mais la totalité de la double boucle.

Enfin, pour la compréhension de chacun dans cette enceinte, il faut savoir que toutes les études montrent – M. le rapporteur l’a dit à plusieurs reprises –, qu’un système de transport est 40 % plus efficace lorsqu’il est bouclé. Cela signifie concrètement qu’il répond aux besoins de 40 % d’usagers en plus.

Comme je l’avais indiqué au président de la région voilà dix-huit mois, je reste convaincu qu’il aurait fallu faire ce projet voilà dix-huit ans. Mais, aujourd’hui, il est devenu insuffisant. À l’époque, j’avais proposé au président de la région que nous réfléchissions ensemble à la meilleure manière de concilier l’urgence et l’avenir, c’est-à-dire de répondre aux besoins des citoyens non seulement en 2010, mais tels qu’ils se présenteront dans treize ans lors de la mise en service du futur réseau.

C’est d’une telle réflexion qu’est né le projet de double boucle. À ma connaissance, il s’agit du seul projet de transport permettant à la fois la desserte de banlieue à banlieue et la traversée de Paris. C’est là également une donnée factuelle ! C’est le seul projet qui réponde à la fois aux besoins urgents de nos concitoyens, compte tenu des délais de mise en œuvre, et qui corresponde aux besoins de Paris, ville-monde.

Comment peut-on justifier aujourd’hui un schéma d’ensemble qui n’intégrerait pas une articulation avec les trois aéroports de Roissy, d’Orly et du Bourget, qui ne s’articulerait pas avec le réseau de TGV, qui n’intégrerait pas Saclay et, surtout, qui ne permettrait pas de désenclaver les populations du nord-est de la région ?

Mesdames, messieurs les sénateurs de gauche, permettez-moi de vous dire que j’ai été stupéfait de découvrir que le STIF n’avait pas intégré à son juste niveau la question de la cohésion sociale et du désenclavement et qu’il avait accepté d’abandonner à leur désespoir des centaines de milliers de citoyens, en particulier dans le nord-est du territoire. Aux dernières élections, le taux d’abstention dans ce secteur de l’Île-de-France a dépassé 70 % dans certaines communes, voire plus de 80 %. Pour nous tous qui sommes au service de la République, un tel désaveu pour notre action à tous ne peut nous laisser indifférents. Là encore, il y a donc urgence !

M. Yannick Bodin. La vôtre !

M. Christian Blanc, secrétaire d'État. II faut un réseau de métro automatique qui réponde à tous ces objectifs. Nous pensons qu’un réseau de cent trente kilomètres est un minima nécessaire. Voilà pourquoi un réseau de cinquante kilomètres ne suffit pas.

M. David Assouline. Soit, mais encore ?

M. Christian Blanc, secrétaire d'État. J’aimerais vous convaincre que l’enjeu n’est pas politique, mais simplement technique. (Mme Nicole Bricq s’exclame.)

La seule façon, me semble-t-il, de permettre à la Commission nationale du débat public de mener à bien les opérations qui lui sont confiées, c’est d’adopter le texte de la commission spéciale, qui n’est pas une proposition dilatoire, mais simplement une disposition opérationnelle. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – M. Yves Pozzo di Borgo applaudit également.)

M. David Assouline. C’est la guerre !

M. Christian Blanc, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements nos 29, 75, 126 et 241.

M. le président. La parole est à M. Jean-François Voguet, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 29, 75 et 126.