M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Nous avons en effet ouvert ce débat lors de la discussion générale. Monsieur Bérit-Débat, je vous remercie d’avoir lu le rapport (Sourires) et d’avoir fait référence aux précisions que j’ai pris soin d’apporter pour éviter toute confusion…

La commission des lois a expressément accepté le principe de la pluralité de patrimoines affectés en cas d’activité professionnelle indépendante, contrairement à ce que vous proposez. Certes, en pratique, il est vraisemblable que peu d’entrepreneurs individuels créeront plusieurs patrimoines affectés. En outre, en cas d’intention frauduleuse, des sanctions sont déjà prévues, de même que dans le cas d’affectation d’un seul patrimoine, d’ailleurs.

Une personne peut exercer une première activité en tant qu’entrepreneur individuel, puis une deuxième en créant une EIRL, voire une troisième en instituant une EURL. Juridiquement, rien ne l’interdit. Seule l’affectation d’un seul patrimoine à plusieurs activités différentes est totalement interdite. Nombre de collègues se sont interrogés sur ce sujet, tout comme M. le secrétaire d’État.

Par ailleurs, les règles de taxation des éventuels dividendes s’appliqueront au sein de chaque patrimoine affecté. Le fait de détenir un seul ou plusieurs patrimoines affectés est neutre fiscalement, sous réserve, bien évidemment, du choix du seuil de 10 % : sera taxé au-delà de 10 % un dividende de 100 issu d’un seul patrimoine ou deux dividendes de 50 issus de deux patrimoines, et le résultat sera identique. Mes chers collègues, je tiens à votre disposition une étude comparative prenant en compte les deux hypothèses, un seul ou deux patrimoines affectés.

Je me suis beaucoup interrogé avant d’aboutir à cette conclusion juridiquement juste, mais que certains trouvent un peu complexe. Mais on faisait déjà ce reproche à l’affectation de patrimoine elle-même...

Pour toutes ces raisons, la commission des lois émet un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. L’amendement n° 15, intéressant, pose un certain nombre de problèmes, et M. le rapporteur en a traité éloquemment.

On nous propose ici d’interdire la pluralité de patrimoines affectés. Or, je le rappelle, le projet de loi prévoit que le patrimoine est affecté à un objet précisé lors du dépôt de la déclaration constitutive. La rédaction actuelle n’interdit pas la pluriactivité au sein d’un même patrimoine affecté. Une telle possibilité est déjà ouverte en droit des sociétés au travers de la notion d’objet social, qui permet l’exercice de plusieurs activités.

Le Gouvernement est bien évidemment favorable à la pluriactivité dans le cadre d’une EIRL.

Sur le principe, le Gouvernement n’est pas opposé à la constitution concomitante de plusieurs EIRL, mais il estime plus raisonnable de l’autoriser ultérieurement, au terme de plusieurs années d’application du dispositif.

Par conséquent, il s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée, et Dieu sait si elle est grande !

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour explication de vote.

M. Claude Bérit-Débat. Même si je comprends les explications de M. le rapporteur, j’ai encore quelques craintes. Mais laissons de côté l’aspect juridique et voyons plutôt le problème sous l’angle fiscal.

Monsieur le rapporteur, vous dites que le dispositif est neutre fiscalement, mais, en ce qui concerne la taxation des dividendes, les 10 % peuvent s’ajouter, multipliant ainsi les exonérations de cotisations sociales. Où est alors la limite ? Cela s’ajoute et ne se retranche pas !

De manière plus générale, quelle est la réalité économique ? Je connais bien le monde de la petite entreprise, surtout l’artisanat et le petit commerce. Je vois mal un artisan créer plusieurs entreprises pour bénéficier du statut proposé. S’il veut se lancer dans l’électricité et la plomberie, il créera une entité globale, dénommée « EIRL Tartempion, entreprise d’électricité et de plomberie ». Je ne vois pas l’intérêt économique, et pratique, de la disposition.

M. le secrétaire d’État s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée ; il ne semble donc pas convaincu du bien-fondé de la rédaction proposée. Le Sénat ferait preuve de sagesse en acceptant l’amendement n° 15 !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 15.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 1 rectifié bis, présenté par MM. César, Cornu et Pointereau, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 7

Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :

Par exception au précédent alinéa, l'entrepreneur individuel exerçant une activité agricole au sens de l'article L. 311-1 du code rural peut conserver les terres, utilisées pour les besoins de son exploitation, dans son patrimoine personnel. Cette faculté s'applique à la totalité des terres dont l'exploitant est propriétaire.

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Gérard Cornu.

M. Gérard Cornu. Cet amendement tend à offrir aux exploitants agricoles la possibilité de conserver leurs terres dans leur patrimoine personnel ou de les affecter à leur patrimoine professionnel.

En fait, il s’agit de leur accorder un régime dérogatoire, au même titre que celui dont ils bénéficient au plan fiscal : s’ils le souhaitent, les exploitants agricoles peuvent en effet conserver les terres dont ils sont propriétaires dans leur patrimoine privé, à condition d’exercer en ce sens une option expresse qui concerne alors l’ensemble des terres dont ils sont propriétaires.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. L’Assemblée nationale a étendu l’EIRL aux exploitants agricoles, qui n’étaient pas concernés initialement par le projet de loi. Plutôt que de prévoir une EIRL agricole spécifique dans le code rural, sur le modèle de l’EARL, on a préféré rester dans le cadre commun prévu par le texte, autrement dit le code de commerce.

On s’est aperçu ensuite que ce système posait des difficultés en raison des spécificités agricoles, en particulier en matière d’affectation des terres agricoles et de registre d’immatriculation des professionnels agricoles.

D’un point de vue fiscal, les terres agricoles peuvent être considérées comme biens non professionnels. Elles sont le premier patrimoine de la famille. Le problème est donc bien réel.

Cependant, au moment où le législateur crée l’EIRL, est-il raisonnable de prévoir d’emblée une telle dérogation, certes nécessaire, aux règles d’affectation ?

L’EIRL est de toute façon applicable aux exploitants agricoles en l’état actuel du projet de loi. En outre, si les terres ne figurent pas dans le patrimoine affecté, l’accès au crédit s’en trouvera freiné d’autant pour les exploitants agricoles.

Au lieu de légiférer quelque peu hâtivement, je propose que le temps de l’analyse et de l’expertise soit pris, y compris par le Gouvernement – il semble d’ailleurs partager ce sentiment –, pour déterminer la manière d’ajuster au mieux le statut de l’EIRL aux exploitants agricoles, le cas échéant en l’insérant dans le code rural. D’autres difficultés demeurent peut-être, que nous n’avons pas vues.

À titre conservatoire, je propose donc de laisser inchangé le texte de la commission en ce qui concerne les exploitants agricoles. Le droit commun leur sera applicable en attendant l’établissement de règles spécifiques propres aux « EIARL », les futurs entrepreneurs individuels agricoles à responsabilité limitée.

En tout état de cause, le sujet n’est pas renvoyé aux calendes grecques : je vous rappelle, mes chers collègues, que le Sénat examinera dans les prochaines semaines le projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, qui pourrait être définitivement adopté par le Parlement au mois de juillet, du fait du recours à la procédure accélérée. On conçoit en effet que la modernisation agricole soit urgente.

Ce texte permettra de poursuivre avec profit la réflexion sur l’EIRL agricole après l’adoption définitive du texte créant l’EIRL dans quelques semaines.

La commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire est extrêmement attentive à ce sujet : si le Gouvernement ne formule pas de propositions, elle sera en mesure d’en faire.

Pour l’heure, n’allons pas exiger tout, tout de suite ; la mise en œuvre de la future loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche sera peut-être plus rapide que celle de la loi générale sur l’EIRL telle qu’elle résultera de nos travaux de ce jour.

Pour toutes ces raisons, la commission vous demande, monsieur Cornu, de bien vouloir, pour le moment, retirer l’amendement n° 1 rectifié bis.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Cet amendement est incontestablement intéressant et utile, mais il tend à créer une exception aux règles générales applicables à l’EIRL. Au moment de la création d’un nouveau statut, il est paradoxal de prévoir d’ores et déjà un régime dérogatoire !

Sur le fond, je veux reprendre certains des arguments avancés par M. le rapporteur.

L’EIRL doit apporter à l’exploitant agricole individuel une protection supérieure à celle dont il bénéficie aujourd’hui, sinon qu’elle en serait l’utilité ? Selon la législation actuelle, ses terres, qui constituent un élément essentiel de son patrimoine, peuvent être mobilisées par ses créanciers professionnels. Si leur affectation au patrimoine professionnel était obligatoire, le nouveau régime proposé n’apporterait pas la protection supplémentaire attendue.

De plus, l’obligation d’affecter les terres au patrimoine professionnel aurait des conséquences fiscales négatives pour l’agriculteur. En effet, l’article 38 sexdecies D du code général des impôts, annexe 3, permet à l’exploitant de demander à l’administration fiscale de conserver ses terres dans son patrimoine privé. En pratique, les conséquences de l’appartenance ou non de ces biens à l’actif sont importantes. Ainsi, notamment, une déduction de charges ou une exonération de plus-values est possible, dans certaines conditions.

Cette disposition, très utilisée par les agriculteurs, ne pourrait plus être appliquée par les exploitants ayant fait le choix de l’EIRL si on ne leur permettait pas de maintenir leurs terres dans leur patrimoine personnel. Par conséquent, deux principes s’affrontent.

L’amendement n° 1 rectifié bis, dont l’objet est d’introduire une dérogation aux règles générales qui vont être adoptées aujourd’hui, soulève une difficulté. Si un amendement de même nature était déposé lors de l’examen du projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, nul doute qu’il recevrait un accueil très favorable.

Je suis sensible à l’argument de M. Hyest qui, dans toute la rigueur de la logique juridique, considère paradoxal de prévoir des règles dérogatoires dans un régime général.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement, dont vous aurez compris l’embarras, s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.

Mme la présidente. Monsieur Cornu, l’amendement n° 1 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Gérard Cornu. Je tiens tout d’abord à remercier tant M. le rapporteur que M. le secrétaire d’État de leurs explications sur cet amendement effectivement très intéressant.

Monsieur le rapporteur, vous m’invitez, comme M. le secrétaire d'État, à retirer cet amendement et à le redéposer lors de l’examen du projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, au motif qu’il serait dommage de prévoir d’ores et déjà une dérogation à la loi générale que nous sommes en train d’élaborer. Je n’y suis pas, a priori, défavorable, mais se pose un problème de calendrier.

En effet, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée sur le projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Sur le présent projet de loi aussi !

Mme Odette Terrade. Encore une fois !

M. Gérard Cornu. Par conséquent, je voudrais savoir lequel de ces deux projets de loi sera adopté le premier. Le retrait n’est envisageable qu’à la condition que le projet de loi relatif à l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée, donc le texte général, soit adopté avant le projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, dans lequel serait donc prévue cette dérogation.

Aussi, avant de me décider, j’aimerais que l’on m’apporte ces quelques précisions.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Mon cher collègue, le calendrier se présente bien, puisque la commission mixte paritaire sur le présent projet de loi se réunira le 28 avril, ses conclusions étant examinées au Sénat le 5 mai.

Pour ma part, je vous suggérerais plutôt de déposer au projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche non pas un amendement identique à celui-ci, mais un autre, visant à définir un régime spécifique pour les activités agricoles, ce qui va bien au-delà. C’est dans ce sens qu’il convient de travailler.

En outre, je rappelle que 21 % des exploitations sont des exploitations agricoles à responsabilité limitée, tandis que 41 % sont des sociétés, qu’elles soient civiles, agricoles ou autres. Les autres exploitations, c'est-à-dire, concrètement, les agriculteurs qui sont encore au forfait, notamment les très petites exploitations, sont des entreprises individuelles. Ce sont ces dernières qui sont visées par un dispositif de type « EIARL ». Quant à l’insaisissabilité, elle est ouverte aux agriculteurs.

Les problématiques ne sont pas les mêmes. D’ailleurs, assez curieusement, si l’on dénombre autant d’EARL et aussi peu d’EURL, cela montre bien que la mobilisation des conseillers naturels des entreprises est toujours bénéfique. Une moindre mobilisation conduit toujours à des résultats moins favorables…

Mon cher collègue, c’est la commission de l’économie, et non la commission des lois, qui sera saisie du projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche. Néanmoins, je puis vous assurer que j’apporterai tout mon concours s’il le faut à la recherche d’un régime spécifique pour les agriculteurs.

Mme la présidente. Monsieur Cornu, qu’en est-il en définitive de l'amendement n° 1 rectifié bis ?

M. Gérard Cornu. J’ai bien compris que le présent projet de loi n’était pas le véhicule législatif idoine pour mettre en place le dispositif fiscal visé par mon amendement. M. le rapporteur m’a invité à retravailler la question et à présenter un nouvel amendement lors de l’examen du projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche.

Compte tenu de l’ensemble de ces explications, et bien que le Gouvernement s’en soit remis à la sagesse que j’imagine positive du Sénat, je retire mon amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 1 rectifié bis est retiré.

L'amendement n° 17, présenté par MM. Yung, Bérit-Débat et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Dans le cadre de son activité professionnelle, l'entrepreneur individuel ne peut en aucun cas être placé, directement ou par personne interposée, dans un lien de subordination juridique permanente à l'égard d'un donneur d'ouvrage. »

La parole est à M. Richard Yung.

M. Richard Yung. Tout récemment, nous avons eu la chance de prendre connaissance du bilan dressé par le Sénat, sous la direction de M. Marini, sur le régime de l’auto-entrepreneur.

Il en ressort que la crainte concernant le risque de substitution entre salariat et auto-entrepreneur, que le groupe socialiste avait manifestée, en séance publique, lors de la discussion du projet de loi créant ce nouveau régime, était fondée. Ce n’était pas simplement une vue de l’esprit de notre part !

Des employeurs peu scrupuleux obligent en effet des salariés, voire des personnes étrangères en situation précaire, à adopter ce statut.

En période de crise, ce chantage à l’emploi est plus facile à exercer, les employeurs expliquant qu’ils n’ont plus de quoi payer les charges sociales, ou bien qu’il s’agit d’une période transitoire, faisant miroiter une embauche définitive en contrat à durée indéterminée.

Ce ne sont souvent que de belles promesses, car, en réalité, ceux qui sont soumis à ces statuts, que ce soit celui de l’EURL ou celui, à venir, de l’EIRL, non seulement doivent désormais payer eux-mêmes leurs charges, mais encore ne perçoivent ni prime de précarité ni congés payés. En outre, les heures supplémentaires qu’ils effectuent ne sont pas comptabilisées puisque le code du travail ne s’applique pas. Enfin, les personnes ayant choisi ce régime peuvent être remerciées sans préavis et ne bénéficient d’aucun droit au chômage.

Nous craignons que, avec l’EIRL, nous rencontrions les mêmes difficultés majeures que celles que nous rencontrons avec l’EURL. Libérer les énergies créatrices et entrepreneuriales, oui, monsieur le secrétaire d’État, mais pas au prix d’une régression sociale !

On pourrait nous rétorquer que ce que nous dénonçons est un banal phénomène de travail dissimulé ou falsifié et que les employeurs indélicats n’ont pas attendu ce nouveau statut pour faire travailler au jour de faux indépendants ou au noir de vrais ouvriers, et que dès lors qu’il existe un lien de subordination, un contrat passé entre un sous-traitant et un donneur d’ordre s’expose à être requalifié en contrat de travail ordinaire.

C’est l’argument qui nous a été opposé tant en commission qu’en séance publique.

M. le secrétaire d’État a annoncé qu’il avait donné des instructions pour réprimer durement ces fraudes. Je m’en réjouis et je souhaite que cela soit réellement suivi d’effet. Mais, pour mettre en accord le discours et les actes, nous proposons de renforcer l’information sur le caractère illégal de ces pratiques visant à dissimuler une relation salariale de subordination sous la forme d’une relation commerciale de sous-traitance.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Monsieur Yung, il n’est pas utile d’inscrire dans la loi des dispositions purement déclaratives, qui n’apportent pas grand-chose. Notre but est d’améliorer la qualité des textes !

Vous voulez interdire les faux EIRL, comme sont interdits les faux travailleurs indépendants. Soyez rassuré, mon cher collègue, car votre amendement est satisfait par les articles L. 8221-6 et L. 8221-6-1 du code du travail.

La présomption de travail indépendant n’est qu’une présomption simple, de sorte que la relation de travail de l’EIRL avec un donneur d’ordre pourra, s’il y a lieu, être requalifiée en contrat de travail, en cas de subordination juridique permanente au donneur d’ordre.

D’ores et déjà, les juridictions appliquent le droit commun du travail. (M. Richard Yung s’exclame.) Franchement, monsieur Yung, votre amendement est purement déclaratif : à quoi voulez-vous qu’il serve ?

La commission émet donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Il faut bien reconnaître, monsieur le sénateur, que votre amendement n’apporte aucune innovation au regard du droit positif. Il ne fait que rappeler la définition du travailleur indépendant entrepreneur individuel. Ce dernier, pour reprendre la définition jurisprudentielle constante du salariat, est entendu comme celui qui n’exerce pas son activité directement ou par personne interposée dans le cadre d’un lien de subordination juridique permanent.

Aussi, il n’est nul besoin d’un nouveau texte pour affirmer que l’entrepreneur individuel n’est pas salarié. C’est au juge qu’il appartient, le cas échéant, de requalifier le contrat au vu des conditions concrètes d’exercice de l’activité et de sanctionner d’éventuelles dérives par des peines qui peuvent aller jusqu’à l’emprisonnement. Tout est prévu !

Je le répète avec force, le Gouvernement est partisan d’une politique de fermeté exemplaire sur ce point.

Aussi, j’émets également un avis défavorable sur votre amendement, monsieur Yung.

M. Richard Yung. Je le maintiens !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 17.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 25 rectifié, présenté par MM. Beaumont et Cornu, est ainsi libellé :

I. Alinéa 10

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Lorsque l'entrepreneur est tenu de s'immatriculer à plusieurs registres de publicité légale, il dépose la déclaration à l'un d'entre eux.

II. En conséquence, alinéa 11

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Gérard Cornu.

M. Gérard Cornu. Il a beaucoup été question de simplification lors de la discussion générale ; précisément, il s’agit d’un amendement de simplification.

Lorsque l’entrepreneur est tenu de s’immatriculer à plusieurs registres de publicité légale, il importe qu’il n’ait à effectuer qu’une seule déclaration.

Mme la présidente. L'amendement n° 27, présenté par MM. J.L. Dupont et Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :

Alinéa 11

Rédiger ainsi cet alinéa :

« 1° bis Soit au registre de publicité légale choisi par l’entrepreneur individuel en cas de double immatriculation ; dans ce cas, mention en est portée à l’autre registre ; »

La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.

M. Yves Pozzo di Borgo. Cet amendement, comme le précédent, est un amendement de simplification.

L’alinéa 11 de l’article 1er prévoit que, en cas de double immatriculation, le dépôt de la déclaration doit être fait au registre national du commerce et des sociétés et la mention de ce dépôt portée au répertoire des métiers. Que de démarches !

Comme Gérard Cornu, je considère qu’il est plus simple de laisser à l’entrepreneur individuel le choix du lieu du dépôt de la déclaration, étant précisé qu’une mention sera portée au registre qui n’aura pas été choisi.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. En cas de double immatriculation d’un entrepreneur au registre du commerce et des sociétés et au répertoire des métiers, la commission a prévu le dépôt de la déclaration d’affectation au registre du commerce et des sociétés, avec mention au répertoire des métiers, pour éviter l’obligation de dépôt de la déclaration aux deux registres.

L’explication de M. Cornu ne correspond pas au texte de l’amendement. La commission avait déjà prévu le dépôt de la déclaration à un seul registre. Vous souhaitez, mon cher collègue, que l’on choisisse librement le registre de dépôt quand il y a obligation de double immatriculation. Pour notre part, nous disions : « S’il y a double immatriculation, le dépôt se fait au registre du commerce et des sociétés. »

Je sais parfaitement qui sont les inspirateurs de ces amendements ; cela fait quinze ans que je suis ce débat. C’est pour cette raison, monsieur le secrétaire d'État, que je suis favorable à ce que nous nous dotions un jour d’un régime unifié, pour que l’on distingue bien l’activité et les répertoires. Il y a là tout un gisement de choses qui ne vont pas dans le sens de l’intérêt des entrepreneurs, des artisans et des commerçants…

Les amendements nos 25 rectifié et 27 prévoient le libre choix du registre de dépôt de la déclaration. Néanmoins, et j’espère que M. Cornu me pardonnera, l’amendement n° 27 me semble mieux rédigé et plus complet, car il prévoit, sur le registre qui n’a pas été choisi, une mention de l’existence de la déclaration d’affectation. C’est un minimum !

Aussi, la commission demande à son auteur de bien vouloir retirer l’amendement n° 25 rectifié, tandis qu’elle émet un avis de sagesse…

M. Yves Pozzo di Borgo. Positive ! (Sourires.)

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. … hésitante sur l’amendement n° 27. (Nouveaux sourires.)

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Chacun des auteurs de ces deux amendements a indiqué que ces derniers étaient à peu près identiques.

M. Yves Pozzo di Borgo. Ils procèdent du même esprit !

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Cela étant, il est vrai que l’amendement n° 27 est plus complet que l’amendement n° 25 rectifié. Aussi, je souhaiterais que Gérard Cornu retire son amendement au profit de celui de M. Pozzo di Borgo, sur lequel le Gouvernement émet un avis favorable.

Mme la présidente. Monsieur Cornu, l'amendement n° 25 rectifié est-il maintenu ?

M. Gérard Cornu. Puisque M. le rapporteur a émis un avis de sagesse, même si elle n’est pas positive, sur l’amendement n° 27, et puisque M. le secrétaire d'État, quant à lui, a émis un avis favorable, je me rallie avec enthousiasme à cet amendement, visiblement mieux rédigé, et je retire le mien.

Mme la présidente. L'amendement n° 25 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 27.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, je vais suspendre la séance.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Je demande la parole.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Madame la présidente, compte tenu du nombre d’amendements restant à examiner sur le présent texte et, surtout, sur le projet de loi relatif au Grand Paris, pourriez-vous nous donner sinon des certitudes du moins quelques indications sur la suite des débats de ce soir et de demain ?

Mme la présidente. Madame Borvo Cohen-Seat, la séance reprendra à vingt et une heures trente. Nous achèverons l’examen du projet de loi relatif à l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée et nous reprendrons ensuite celui du projet de loi relatif au Grand Paris.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Bernard Frimat.)