évolution croissante des « spams » reçus sur les téléphones mobiles

M. le président. Tout à l’heure, M. Braye faisait remarquer que nombre de ministres ne venaient pas répondre en personne aux questions et qu’ils se faisaient remplacer par d’autres.

M. Roland Courteau. C’est vrai !

M. le président. Mme Bachelot-Narquin, pour sa part, vient. (Mme la ministre sourit.)

M. Roland Courteau. C’est vrai aussi !

M. le président. Je souhaite donc lui dire que la Haute Assemblée apprécie beaucoup cette attitude.

La parole est à M. Alain Fouché, auteur de la question n° 879, adressée à M. le secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation.

M. Roland Courteau. En l’occurrence, la question concerne plutôt M. Novelli…

M. Alain Fouché. Madame la ministre, ma question porte sur l’évolution croissante et inquiétante des « spams » reçus sur les téléphones mobiles.

Rappelons que les spams sont des messages envoyés en grande quantité, le plus souvent à des fins commerciales. En effet, le nombre d’appels ou de SMS frauduleux est en constante augmentation.

Contrairement aux spams « classiques » inondant les boîtes aux lettres électroniques, ceux que nous recevons en masse sur nos téléphones portables permettent à leurs auteurs de bénéficier de gains financiers importants.

Je le rappelle, le principe de ces spams suit deux méthodes de fonctionnement. La première est l’appel frauduleux : le téléphone ne sonne qu’une fois, ce qui ne laisse pas le temps au récepteur de répondre. Par conséquent, ayant manqué cet appel mais disposant du numéro entrant, la personne réceptrice a une forte probabilité de rappeler le numéro. Celui-ci est bien évidemment surtaxé. La seconde méthode est le SMS frauduleux : le récepteur est invité par un SMS à rappeler un numéro, là aussi surtaxé.

Les émetteurs de ces spams se procurent des numéros de téléphones portables en piratant des bases de données sur des sites Internet grand public. Ce sont souvent des sociétés commerciales difficilement localisables du fait de leur durée de vie généralement éphémère. La solution pour éviter ces « arnaques » appartiendrait aux opérateurs ; dans certains pays, des procédés de blocages de SMS et d’appels non nominatifs sont en effet mis en œuvre.

Madame la ministre, pouvez-vous me préciser si ces phénomènes sont actuellement recensés ou à l’étude et quelles sont les mesures ou incitations à mettre en œuvre pour empêcher ces situations frauduleuses qui frisent l’escroquerie ? Pouvez-vous nous dire si le Gouvernement envisage d’agir dans ce domaine ?

Enfin, je vous remercie de bien vouloir nous indiquer les résultats obtenus par la mise en place par le Gouvernement, en 2008, du numéro 33 700, qui permet d’alerter une plateforme en cas de réception de spams, plateforme censée prendre par la suite des sanctions contre les expéditeurs.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports. Monsieur le sénateur Fouché, je tiens tout d’abord à vous présenter les excuses d’Hervé Novelli, à qui s’adressait votre question et qui ne pouvait être présent ce matin au Sénat pour vous répondre. Son absence me donne cependant le plaisir de le faire sa place !

Nombreuses sont les victimes des intrusions que vous dénoncez très justement. C’est pourquoi la lutte contre les SMS frauduleux constitue une action prioritaire pour les pouvoirs publics, ainsi que pour les opérateurs de communications électroniques.

La détection de ces pratiques a d’ores et déjà donné lieu à une condamnation judiciaire, une amende de 300 000 euros ayant été infligée à l’opérateur Cellcast par le tribunal de grande instance de Nanterre au mois de décembre 2008.

Depuis le 15 novembre 2008, les opérateurs de la Fédération française des télécoms, la FFT, ont mis en place un numéro d’urgence, le 33 700, vers lequel les clients recevant un SMS suspect le transfèrent. Le dispositif va d’ailleurs être très prochainement étendu aux spams vocaux, appelés PIM calls. Cette opération permet d’identifier le numéro de téléphone à partir duquel a été envoyé le SMS et de connaître son émetteur, de sorte qu’il est possible d’engager une action contre ce dernier et, si nécessaire, de suspendre le numéro litigieux. Le signalement en ligne est également possible sur le site internet du 33 700.

Les opérateurs peuvent, en outre, procéder à des signalements au service de police spécialisé, à savoir l’office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l’information et de la communication, ou OCLCTIC.

Au mois d’avril 2010, le nombre global de signalements à la plateforme 33 700 a encore baissé, pour atteindre à peine plus de 25 000, après s’être stabilisé pendant deux mois aux alentours de 30 000. Cette diminution fait suite aux actions conjointes et massives prises par les opérateurs fixes et mobiles membres de la FFT.

Ainsi, à la fin du mois d’avril dernier, 758 000 signalements avaient été transmis au 33 700 depuis son lancement, le taux de signalements complets – contenu du message incriminé et numéro de l’éditeur visé – se situant de manière constante entre 60 et 70 %. Sur ces signalements, plus de 543 000 intégraient des numéros de rebond vers des services surtaxés. Plus de 730 coupures de numéros liées à des messages réellement litigieux, avec renvoi vers un service surtaxé, avaient été effectuées par les opérateurs.

Au-delà de ces données quantitatives, un bilan plus qualitatif du dispositif du 33 700 sera effectué dans le cadre d’une enquête en cours du service national des enquêtes de la DGCCRF, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. Cette investigation, qui a donné lieu à des contacts préalables avec la FFT, l’ARCEP – Autorité de régulation des communications électroniques et des postes –, et l’OCLCTIC, permettra notamment d’examiner de façon approfondie le fonctionnement du dispositif du 33 700 et d’apprécier son efficacité.

M. le président. La parole est à M. Alain Fouché.

M. Alain Fouché. Je vous remercie, madame la ministre, d’avoir bien voulu me répondre et je me félicite que le Gouvernement ait mis en place des actions concrètes pour pourchasser les fraudeurs et ait pris des mesures propres à satisfaire les usagers du téléphone portable dans notre pays, beaucoup d’entre eux ayant en effet été victimes de ces pratiques qui relèvent en fait de l’escroquerie.

désertification médicale

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, auteur de la question n° 857, adressée à Mme la ministre de la santé et des sports.

M. Roland Courteau. Madame la ministre, certaines régions françaises sont devenues ou vont à brève échéance devenir de véritables déserts médicaux. Des cantons entiers de mon département, l’Aude, et de la région Languedoc-Roussillon sont particulièrement touchés par le problème de la faible densité médicale.

Depuis des années, les médecins qui partent à la retraite ne sont plus remplacés. Et le mal ne fait que s’aggraver, année après année. Si le milieu rural profond est gravement touché, des problèmes semblables frappent aussi les gros bourgs ou même certaines villes moyennes, où les zones de pénurie se multiplient.

Disons-le tout net, l’accès aux soins n’est plus véritablement garanti dans certains secteurs. Aussi la question à se poser d’urgence est-elle la suivante : comment garantir à tous un égal accès à des soins de qualité, sachant que proximité et qualité sont bien souvent liées ?

Selon les prévisions de la direction de la recherche, des études et de l’évaluation et des statistiques, la DREES, le nombre de médecins en activité devrait baisser d’environ 10 % au cours de la prochaine décennie. Ainsi, jusqu’en 2020, les cessations d’activité seront supérieures à l’arrivée de nouveaux diplômés. Toujours selon la DREES, l’évolution de la démographie médicale dépendra largement des décisions prises aujourd’hui. Dans l’Aude, par exemple, la situation ne devrait pas s’arranger rapidement puisque la moitié du corps médical audois est âgée de plus de cinquante-cinq ans.

On peut faire les mêmes observations pour l’ensemble de la région Languedoc-Roussillon, où les installations sont loin de compenser les départs estimés annuellement à 140.

Or, dans un système comme le nôtre, où les médecins disposent du libre choix de leur installation, les mesures permettant de réguler la démographie médicale ne peuvent guère être qu’incitatives. Force est de constater qu’elles n’ont malheureusement pas été particulièrement efficaces. Je ne méconnais pas celles qui sont déjà mises en œuvre, et elles sont nombreuses ! Mais toutes ces dispositions ont montré leurs limites. En fait, elles n’ont que très insuffisamment enrayé la multiplication des zones de pénurie et n’ont corrigé qu’à la marge l’inégale répartition des professionnels de santé sur le territoire. Je peux même affirmer que, dans certains secteurs, elles n’ont eu aucun effet, ce qui rend plus alarmant encore le problème des inégalités territoriales.

En Languedoc-Roussillon, et en particulier dans l’Aude, des secteurs entiers peuplés de 3 000, voire de 4 000 habitants, répartis parfois sur de nombreuses communes, ne disposent que d’un seul médecin, contre cinq i1 y a quelques années à peine ! Dans l’Aude, sur 438 communes, 343, dont 22 de plus de 1000 habitants, n’avaient pas de médecin généraliste au 1er janvier 2010.

Dans un tel contexte, les solutions ne sont pas légions, d’autant que le mythe du médecin généraliste corvéable à merci sept jours sur sept n’est plus d’actualité !

Je souligne également qu’il est plus difficile encore de favoriser l’installation de leur famille dans les endroits où la plupart des services publics ont disparu, ou encore dans les secteurs où les hôpitaux de proximité ont été dépouillés de leurs services.

Alors, que faire ? Faut-il revoir l’organisation de la médecine générale, qui pourrait passer par la multiplication des maisons de santé pluridisciplinaires, susceptibles d’assurer une prise en charge globale des maladies en réunissant les professionnels dans ces lieux ? Ou bien faut-il conditionner toute installation dans une zone excédentaire à un départ, comme cela fut fait pour les infirmiers et infirmières ? Quelle politique attractive peut-on instaurer pour les jeunes médecins dans les cantons ruraux ? Quelle coopération envisager entre professionnels ? Bref, madame la ministre, quelles pistes le Gouvernement entend-il emprunter ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports. Je vous remercie, monsieur le sénateur Courteau, de cette question, car la répartition des professionnels de santé, et tout particulièrement des médecins, est un sujet de préoccupation constante pour le Gouvernement. Oserai-je vous dire, monsieur le sénateur, que nous ne nous soucions pas à cet égard du seul département de l’Aude ? (Sourires.)

Du reste, on évoque souvent la désertification médicale comme un problème touchant exclusivement les zones rurales. Or il y a des déserts médicaux à quelques kilomètres du Sénat, dans certaines banlieues fragilisées !

M. Roland Courteau. C’est vrai !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je suis, comme vous, attachée à garantir à l’ensemble de nos concitoyens le meilleur accès possible aux soins.

Cela dit, c’est un problème qui touche le monde entier : à l’échelle de la planète, le déficit en professionnels de santé et en médecins atteint plusieurs millions.

De plus, nous sommes confrontés à des évolutions sociologiques, au demeurant très légitimes : en se féminisant, la profession exprime un désir croissant de concilier vie familiale et exercice médical. C’est en partie pour cette raison que le temps consacré à l’exercice de sa profession par chaque médecin a baissé.

Nous payons aussi durement, il faut le dire – mais c’est une responsabilité largement partagée –, le numerus clausus des années 1980 et du début des années 1990. Nous avons rétabli les choses puisque le numerus clausus a été porté à 7 500, alors que, voilà un peu plus de dix ans, il n’était que de 3 000 ! J’ai donc considérablement augmenté le numerus clausus, mais je suis consciente que ces jeunes étudiants en médecine n’entreront véritablement en activité que dans une dizaine d’années, ce qui signifie que la chute de la démographie médicale ne sera totalement enrayée qu’aux environs de 2025.

Autrement dit, ce mouvement n’est pas inéluctable, mais il n’empêche que nous devrons gérer une démographie médicale insuffisante au cours de la décennie à venir, voire un peu au-delà.

De nombreuses mesures ont d’ores et déjà été prises pour lutter contre la faible attractivité de la médecine générale dans certains de nos territoires. L’avenant n° 20 à la convention médicale, qui prévoit de relever de 20 % le prix des honoraires pour les médecins exerçant sur ces territoires, a été reconduit dans le règlement arbitral du 3 mai dernier, et l’on doit s’en féliciter.

Mais ce n’est pas seulement une question d’argent. En effet, si certains médecins sont sensibles à cette incitation, ils ne sont guère plus de 600, ce qui, à l’évidence, ne permet pas de résoudre le problème dans son ensemble.

Des dispositions plus structurelles ont donc également été arrêtées.

Pour encourager l’adhésion des étudiants en médecine à la discipline de médecine générale, j’ai renforcé, en coordination avec Mme la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, la filière universitaire de médecine générale. C’est un vrai succès puisque, dès 2009, des postes supplémentaires d’enseignants dans cette discipline ont été créés, et ce mouvement va se poursuivre au cours des prochaines années. Nous avons donc enrayé le défaut d’attractivité de la médecine générale – on pouvait même parler de désamour pour celle-ci ! – et nous commençons de recueillir les fruits de cette politique : la proportion d’internes choisissant la médecine générale, qui était de 37 % en 2006, est ainsi passée à 49 % en 2009.

Par ailleurs, la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, la loi HPST, va compléter les mesures déjà en place en mettant à la disposition des médecins de nouveaux outils. Vous avez évoqué, monsieur Courteau, les maisons de santé pluriprofessionnelles. Je pense aussi à la souscription de contrats collectifs sur la base du volontariat, aux coopérations professionnelles qui permettront aux médecins de s’organiser avec les autres professionnels pour la répartition des tâches. Il s’agit de libérer du temps médical.

Depuis 2008, une aide financière d’un montant de 50 000 euros est accordée pour la création de maisons de santé pluriprofessionnelles. Ce chiffre est doublé pour les projets concernant les quartiers qui relèvent de la dynamique « Espoir Banlieues ». Nous avons ainsi, soutenus par une aide remarquable des collectivités territoriales, accompagné 85 maisons de santé pluridisciplinaires en 2009. Je lance toutefois une mise en garde pour que les projets soient bien portés par des professionnels de santé : ceux qui relèvent d’un simple choix politique sont en général voués à l’échec.

Le Premier ministre a réuni le 11 mai dernier un comité interministériel d’aménagement et de développement du territoire. Un plan d’action y a été annoncé en faveur de la démographie médicale : 250 maisons de santé pluridisciplinaires seront financées d’ici à 2013 et 400 contrats d’engagement de service public sont prévus d’ici à 2012 en milieu rural. Vous connaissez le système : on attribue une bourse de 1 200 euros par mois à des étudiants en médecine qui s’engagent à exercer dans une zone fragile pendant une durée équivalente à celle durant laquelle ils ont perçu la bourse. Les schémas régionaux d’organisation des soins ambulatoires permettront, sous le pilotage des Agences régionales de santé, les ARS, de qualifier ces zones fragiles et de faire converger les aides et les politiques incitatives.

J’attire votre attention sur le rôle très important que vont jouer les ARS : pivots de l’organisation des soins, elles vont permettre aux professionnels de santé de communiquer les uns avec les autres. C’est dans le cadre des conférences de territoire, auxquelles vous participerez certainement, monsieur Courteau, que les acteurs concernés sont sollicités pour construire une offre de soins cohérente sur l’ensemble du territoire. Jusqu’à présent, l’administration décidait seule. Moi, je veux associer les professionnels de santé, les élus de proximité et les associations de malades à cette définition de la politique de santé, autour des ARS.

J’ai proposé au Président de la République de confier à Élisabeth Hubert la mission de dialoguer avec les professionnels de santé et d’envisager des réponses structurelles aux besoins d’accès aux soins dans le contexte de démographie médicale que nous connaissons.

Certes, monsieur le sénateur, ce sont des politiques à long terme, mais nous tenons à utiliser l’ensemble des leviers qui sont à notre disposition, sans jamais négliger le dialogue avec les professionnels de santé et avec les élus.

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse. Je reconnais que de nombreuses mesures incitatives existent. Mais, comme vous venez de le dire, ce sont des mesures dont les effets ne se feront sentir qu’à long terme.

Serais-je trop pessimiste ? J’ai, hélas, du mal à croire que le problème sera résolu prochainement !

Ce qui est certain, c’est que, lorsque le manque de médecins oblige à effectuer plusieurs dizaines de kilomètres pour se faire soigner, l’égal accès aux soins pour tous est de fait remis en cause, ce qui constitue en soi un problème majeur, et les inégalités territoriales se transforment rapidement en inégalités économiques et sociales.

situation hospitalière dans le val-de-marne

M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, auteur de la question n° 875, adressée à Mme la ministre de la santé et des sports.

Mme Odette Terrade. Madame la ministre, je souhaite vous interroger sur les conséquences de votre politique quant à l’accès aux soins dans les hôpitaux.

Je pourrais choisir bien des exemples dans le Val-de-Marne pour exposer les dramatiques contrecoups d’une politique de rigueur économique sans précédent,…

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports. Mon Dieu !

Mme Odette Terrade. … qui fait peser de lourdes menaces sur le bon accomplissement des missions de service public dévolues à l’AP-HP, l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris.

La restructuration n’est pas sans conséquences sur les conditions de travail des salariés et, surtout, sur l’égal accès aux soins de l’ensemble des Val-de-Marnais.

Pour preuve : malgré les demandes répétées des professionnels de santé, aucun hôpital du secteur 94-2, qui regroupe seize communes, d’Ivry-sur-Seine et Gentilly, au nord, jusqu’à Ablon-sur-Seine et Villeneuve-le-Roi, au sud, n’est pourvu d’un authentique service de cardiologie. Il n’existe sur ce secteur ni lit de cardiologie intensive ni garde de cardiologie, alors qu’il s’agit d’un bassin de population de 430 000 personnes ! Un rapport de la sécurité sociale ferait état d’un défaut de moyens et de personnels par rapport à des situations identiques et d’autres structures de même taille.

De même, alors que le service de maternité de la polyclinique La Concorde, à Alfortville, a cessé dernièrement son activité, il manque un nombre appréciable de places dans de tels services. Une maternité de niveau 3 a bien été ouverte à l’hôpital du Kremlin-Bicêtre, mais les moyens de cette dernière ne lui permettent de fonctionner qu’à la moitié de la capacité prévue, de sorte qu’elle est loin d’être suffisante pour accueillir l’ensemble des patientes du secteur.

Dans sa lettre d’information datée de mars 2010, l’Agence régionale de l’hospitalisation d’Île-de-France constate une augmentation du nombre d’accouchements de 12 % sur la période 1996-2008, alors que la capacité d’accueil des établissements obstétriques est passée, elle, de 5 450 à 4 460 lits, soit près de mille lits en moins, et cela pour toute l’Île-de-France. Je vous laisse imaginer la situation dans notre département…

Je tiens à évoquer également ici la situation de l’hôpital Paul-Brousse, menacé de devoir regrouper ses activités, pourtant unanimement reconnues pour leurs apports à la recherche et au progrès médical, avec celles de Bicêtre, hôpital où la situation n’est pas meilleure puisque, si le plan d’économies est mis en place, 356 emplois non médicaux et 56 emplois médicaux disparaîtront !

À souligner aussi la délicate situation de la neurochirurgie, dont 70 % des patients polytraumatisés ont besoin.

Et que dire enfin des services de pédiatrie, menacés de fermeture ?

Par sa situation géographique particulière, puisqu’il est limitrophe de la capitale et constitue un important bassin de population, le département du Val-de-Marne, renommé pour une excellence hospitalière qui n’est plus à démontrer, est une illustration de l’importance du rôle social de l’hôpital public ainsi que des missions de service public qu’il accomplit.

L’accès aux soins de santé est un droit primordial pour nos concitoyens. La restructuration de l’AP-HP ne doit donc pas faire rimer une offre publique de santé réduite avec une offre d’hospitalisation privée n’offrant que les soins les plus rémunérateurs et, par le fait même, accessibles seulement aux plus favorisés.

Le personnel de l’AP-HP n’est pas opposé à des restructurations, mais à condition que ces dernières soient guidées par le souci d’améliorer l’offre de soins et non par la recherche systématique de rentabilité.

Les récents conflits ne sont que la marque de l’exaspération des salariés, car la direction refuse, malgré les négociations en cours, leurs suggestions de modernisation et d’investissements pour imposer en force votre logique économique, appelée « effort d’efficience ».

C’est pourquoi, madame la ministre, je demande que la réforme de l’AP-HP dans le Val-de Marne ne soit pas engagée avant qu’ait été préalablement organisée une réelle concertation avec les différents partenaires, élus, autorités, professionnels, populations, afin que l’hôpital public prenne en compte les besoins et les réalités sociales locales et que sa gestion ne repose pas sur la seule logique économique.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports. Je veux rassurer Mme Terrade : nous n’obéissons certainement pas à une logique économique !

Puis-je vous rappeler que notre pays a les dépenses hospitalières par habitant les plus élevées du monde, qu’il présente le maillage hospitalier le plus resserré du monde et que nous avons, en pleine période de crise économique, fait bénéficier ce secteur d’une augmentation de 3 % des dépenses publiques ? Peut-on dès lors parler de rationnement ?... J’affirme que non !

Vous m’interrogez plus particulièrement, madame Terrade, sur la situation sanitaire dans le Val-de-Marne et vous appelez mon attention sur le nombre de structures hospitalières, que vous estimez insuffisantes pour répondre aux besoins de la population; ainsi que sur les effets attendus des réorganisations – nécessaires, vous en êtes vous-même convenue – qui pourraient être menées par l’AP-HP.

D’abord, loin du tableau catastrophique que vous en avez brossé, le Val-de-Marne est un département qui bénéficie d’une situation globalement satisfaisante en matière d’offre de soins.

Le SROS, le schéma régional d’organisation sanitaire, ne prévoit certes pas de nouvelle unité de soins intensifs en cardiologie sur le territoire de santé. Néanmoins, il est prévu de créer des lits de soins continus en cardiologie en 2010 au CHU du Kremlin-Bicêtre.

Concernant la neurochirurgie, comme pour les autres départements franciliens, l’urgence relève de la prise en charge de la grande garde de neurochirurgie gérée par l’AP-HP.

En ce qui concerne les maternités, la situation a évolué sur ce département dans le sens d’une amélioration de la qualité et de la sécurité des soins. Certes, la maternité de La Concorde a fermé en 2009, mais elle réalisait à peine plus de 300 accouchements par an, seuil minimal fixé par la réglementation de notre pays, un seuil que, je le signale, l’ensemble des professionnels de la santé des femmes considèrent comme extraordinairement bas.

J’ajoute qu’un tel seuil d’activité est la garantie pour nos concitoyennes d’accoucher dans des structures assurant la sécurité des soins. Il est de mon devoir, en tant que ministre de la santé, responsable de la qualité des soins, de veiller à la réalisation de cet objectif. Il ne s’agit absolument pas, en l’espèce, de réaliser des économies puisque les accouchements ont lieu, là et ailleurs, dans le cadre des tarifications. Il n’y a donc là aucune vision comptable : l’unique souci est d’assurer la qualité des soins.

Je tiens à souligner que nous avons ouvert une maternité de niveau 3, donc de haut niveau, au Kremlin-Bicêtre. Celle-ci assure la prise en charge des grossesses à risque et des nouveau-nés nécessitant des moyens de réanimation néonatale. Cette structure permet de prendre en charge environ 3 300 accouchements.

Je veux également rappeler que la reconstruction, en 2008, de la maternité du centre hospitalier Esquirol, à Saint-Maurice, ainsi que la rénovation de la clinique Gaston Métivet, à Saint-Maur, ont largement contribué à une augmentation des capacités d’accueil.

Enfin, le centre hospitalier intercommunal de Créteil, qui prend aussi en charge les grossesses à risque, les maternités privées situées à Champigny-sur-Marne, Nogent-sur-Marne et Bry-sur-Marne, ainsi que le centre hospitalier de Villeneuve-Saint-Georges ont également une activité obstétricale importante.

La diversité de ces structures, publiques et privées, et le niveau de soins qu’elles proposent, avec notamment deux maternités qui prennent en charge les grossesses à risque et sont dotées d’unités de réanimation néonatale, permettent de répondre de façon satisfaisante aux besoins de la population.

Tous ces éléments se situent évidemment dans le cadre du projet stratégique de l’AP-HP. Ce projet a reçu une validation par le conseil exécutif, mais de nombreux points sont en discussion ; ils font l’objet de cette concertation que vous appelez de vos vœux, madame la sénatrice, et qui est en cours. Ce sera au conseil de surveillance, une fois qu’il sera mis en place – ce qui devrait advenir dans les prochains jours – de se prononcer sur ce projet.

Ces efforts engagés par les pouvoirs publics et les établissements de santé permettent aux habitants du Val-de-Marne de bénéficier d’un accès aux soins tout à fait satisfaisant.

Je me dois en outre de rappeler que nos hôpitaux publics font l’objet de projets de rénovation de très grande ampleur dans le cadre du plan Hôpital 2012, qui y consacre plusieurs milliards d’euros.

Notre hôpital public est le vaisseau amiral de notre système de santé et nous veillons évidemment tant à sa performance en termes de qualité et de sécurité des soins qu’à sa capacité de faire face aux mutations technologiques et sociétales présentes et à venir.