lutte contre le fléau des campagnols terrestres

M. le président. La parole est à M. Gérard Bailly, auteur de la question n° 883, adressée à M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.

M. Gérard Bailly. Monsieur le ministre, je souhaite attirer une nouvelle fois l’attention du Gouvernement sur les dégâts importants causés par les campagnols terrestres dans les prairies herbagères et les massifs, notamment dans le Jura, le Massif central, le Limousin, l’Auvergne, le Cantal, la Savoie. Peut-être pourriez-vous d’ailleurs m’indiquer, monsieur le ministre, s’il y en a aussi dans ces monts du Lyonnais que vous connaissez bien…

M. Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire. Il y a des rats partout ! (Sourires.)

M. Gérard Bailly. À titre d’exemple, les dégâts sont évalués à 8 millions d’euros, pour une seule année, dans le Jura et le Doubs.

La situation n’a malheureusement pas évolué depuis que, voilà deux ans, je posais la même question à M. Barnier, alors ministre de l’agriculture.

Des sommes considérables ont été dépensées depuis plus d’une trentaine d’années par les collectivités territoriales et l’État, qui financent un nombre important de programmes de recherche et de lutte ; malgré cela, rien ne change.

On observe au contraire une augmentation de la fréquence et de la sévérité des pullulements de ces animaux dans les prairies, ce qui oblige les éleveurs à acheter du fourrage, lequel a battu cette année des records de coût.

Les agriculteurs, qui traversent une crise très grave, ont besoin d’informations détaillées sur les programmes de recherche, d’expérimentation et d’application, car beaucoup d’entre eux ne comprennent pas l’inefficacité de ces derniers depuis de si nombreuses années.

Sachant que les traitements chimiques sont prohibés, j’aimerais avoir plus de détails sur les dernières méthodes en matière de lutte raisonnée, notamment sur l’empêchement de la reproduction.

On m’avait répondu, voilà deux ans, que la solution passait par une coordination européenne du problème pour une mutualisation des programmes d’action. Où en est-on à l’échelle européenne à ce stade ?

Par ailleurs, ne pourrait-on pas envisager que les dégâts causés par les campagnols soient pris en compte dans les assurances récoltes, étant donné la survenue fréquente des infestations ?

Ne pourrait-on pas avoir aussi l’assurance que les parcelles qui ont été dévastées et « resemées » en avoine pour obtenir des fourrages de substitution soient considérées comme prairies pour les aides de la PAC ?

Une autre inquiétude se profile du fait de la recrudescence de la fièvre hémorragique à antivirus, dont le campagnol est le réservoir, dans les secteurs où sévissent ces animaux, notamment – je l’ai dit – dans le massif du Jura et l’est de la France : six cas dont le campagnol a été le vecteur viennent d’être signalés en six semaines par le centre hospitalier universitaire de Besançon.

Je me permets d’insister sur la lassitude et le grand découragement des éleveurs de montagne et des plateaux face à ce fléau qui se reproduit tous les trois ans environ et au manque cruel de résultats.

Je souhaiterais donc savoir, monsieur le ministre, quels progrès a pu accomplir depuis deux ans la recherche.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire. Monsieur Bailly, je vous prie d’abord de bien vouloir excuser Bruno Le Maire, qui est retenu par la préparation de l’examen du projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche à l’Assemblée nationale.

Vous avez interrogé mon collègue sur les dégâts importants causés par les campagnols terrestres dans les prairies herbagères et les massifs, sur les méthodes de lutte raisonnée contre ce nuisible et sur la prise en compte de cette problématique dans le cadre du projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, projet de loi que le Sénat vient de voter

Vous avez raison de dire qu’il s’agit d’un vrai problème, qui se pose d’ailleurs également dans ma région.

Le campagnol terrestre est considéré comme pouvant être nuisible et figure, à ce titre, dans l’annexe B de l’arrêté du 31 juillet 2000 établissant la liste des organismes nuisibles aux végétaux, produits végétaux et autres objets.

En conséquence, si la lutte contre son développement n’est pas obligatoire, sa propagation peut néanmoins justifier des mesures spécifiques de lutte obligatoire.

Le programme interrégional de recherche intitulé « campagnols terrestres et méthodes de lutte raisonnée », qui vient de s’achever, a conforté le bien-fondé d’une stratégie de lutte raisonnée contre ce rat-taupier.

Un dispositif d’épidémiosurveillance, impliquant de nombreux observateurs, a été mis en place sur tout le territoire national pour détecter le plus précocement possible les bioagresseurs des végétaux.

Dans les régions concernées par la prolifération des campagnols, un suivi spécifique sera organisé sur ce modèle et les observations en résultant figureront sur les bulletins de santé du végétal régulièrement diffusés.

Concernant la lutte elle-même, une stratégie de contrôle doit être mise en place dès l’apparition des premières populations, stratégie reposant sur des mesures de lutte directe, comme le piégeage ou l’emploi d’appâts.

Pour être efficaces, ces mesures doivent être doublées de mesures complémentaires, telles que la protection des prédateurs naturels des campagnols – rapaces, renards – et de leurs habitats, ou l’aménagement du territoire – des plantations de haies, par exemple.

L’action collective dès les premiers foyers est la seule solution pour maîtriser les populations de campagnols terrestres à un niveau acceptable économiquement.

Le projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche prévoit par ailleurs la création de fonds de mutualisation dédiés à l’indemnisation des pertes économiques découlant de l’apparition d’un foyer de maladie animale ou végétale ou d’un incident environnemental. Les pertes causées par ce rat-taupier, classé comme nuisible, pourraient potentiellement y être éligibles.

La priorité reste, pour l’heure, la poursuite des programmes de recherche.

À cet égard, un projet d’étude sur la problématique « rongeurs-environnement-santé-territoires » vient d’être proposé au ministre de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche. Il se traduira par la création d’un observatoire national des rongeurs prairiaux et de la taupe.

Il est également envisagé de renforcer les collaborations avec d’autres pays concernés par cette problématique.

Telle est, monsieur le sénateur, la réponse que je suis en mesure de vous apporter au nom du ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bailly.

M. Gérard Bailly. Je remercie M. le ministre de sa réponse. Elle contient un élément positif : la perte importante de fourrage due à l’infestation de campagnols pourrait être prise en compte dans la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche. J’espère que cette promesse se concrétisera...

Les compagnies d’assurance, en revanche, se font un peu prier pour indemniser les risques naturels prévisibles et répétitifs ; j’attends, là encore, de voir ce qu’il adviendra.

J’aimerais en tout cas ne pas être obligé, dans deux ans, d’intervenir à ce même micro pour attirer l’attention de Mme la ministre de la santé sur ce problème. Le CHU de Besançon m’a transmis un rapport établissant que le nombre de personnes contaminées est en augmentation. Un jeune agriculteur âgé de 37 ans expliquait ainsi, au cours d’une réunion à laquelle je participais, dans la région de Nozeroy, qu’il ne pouvait plus exercer son métier, car il venait d’être contaminé par ce virus qui s’attaque aux poumons.

On compte sur certaines exploitations 1 200 campagnols à l’hectare, et vous imaginez quels dégâts ces animaux peuvent causer !

Certains évoquent le piégeage, mais il est impossible de résoudre le problème de cette façon ! Quel que soit le nombre de RMIstes et de chômeurs embauchés à cette fin, ils ne pourraient jamais parvenir à piéger tous les campagnols qui infestent une exploitation ! La situation est donc très grave.

Il n’est pas question non plus d’utiliser n’importe quels produits chimiques, qui peuvent avoir des répercussions négatives sur la faune et sur l’eau.

Les agriculteurs n’ont guère de solutions pour s’en sortir. S’ils essaient de semer de l’avoine pour disposer d’un fourrage de substitution, ils risquent de perdre les aides de la PAC : l’Union européenne ne considérera-t-elle pas que ces parcelles ne sont plus de la prairie compte tenu du fait que des céréales ont été semées ? Le ministre de l’agriculture pourrait-il nous confirmer que les aides de la PAC ne seront pas remises en cause dans ce cas ?

Vous avez évoqué, monsieur le ministre, la poursuite des programmes de recherche. Cela fait trente ans que, au sein du conseil général comme du conseil régional, nous votons des crédits pour lutter contre les campagnols, sans obtenir de résultat tangible. C’est même devenu un sujet de plaisanterie !

Voilà pourquoi je souhaitais attirer l’attention du Gouvernement sur ce fléau. Je vous fais confiance, monsieur le ministre, pour alerter sur ce point vos collègues en charge de l’agriculture et de l’environnement.

Alors même que notre agriculture est très vulnérable, il convient d’engager un véritable travail pour résoudre ce problème.

mise en place d'un fonds assurantiel pour la forêt et aide aux sylviculteurs sinistrés du sud-ouest

M. le président. La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, auteur de la question n° 892, adressée à M. le ministre de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Monsieur le ministre, vous me permettrez une nouvelle fois d’appeler l’attention du Gouvernement sur la situation des sylviculteurs du Sud-Ouest, sinistrés par la tempête Klaus de janvier 2009. Ils considèrent, à ce jour, qu’ils n’ont pas été indemnisés à la hauteur des graves dommages qu’ils ont subis, et ce pour la seconde fois en dix ans.

En effet, le plan Barnier a échoué en partie, semble-t-il, et les sylviculteurs sinistrés n’ont pu bénéficier de la valorisation par l’exploitation des chablis. Et je ne parle pas de la chute considérable des prix, qui sont descendus jusqu’à 50 centimes la tonne !

Les sylviculteurs estiment que les critères d’octroi des aides n’ont pas été respectés, pas plus que l’avis de l’Union européenne. Ils toucheront, in fine, 2 750 euros par hectare pour payer le nettoyage et le reboisement, et devront surtout attendre trente-cinq ans pour dégager un revenu des parcelles sinistrées.

Pourtant, obligation est faite aux sylviculteurs de reboiser. C’est la raison pour laquelle ils ont sollicité une aide complémentaire compensatrice, qu’ils estiment à 1 000 euros par hectare, soit 19 millions d’euros par an pendant huit ans.

Monsieur le ministre, puisque le fonds de solidarité de l’Union européenne, le FSUE, doit rembourser 58 millions d’euros, cette somme ne pourrait-elle être réaffectée aux sylviculteurs sinistrés, sans contrarier les règles comptables de l’Union européenne ?

Par ailleurs, le montant de la bonification des prêts sur 600 millions d’euros aurait dû être de 7 millions par an, et ne sera finalement que d’environ 1,5 million par an. Sur une durée moyenne de trois ans, près de 16,5 millions d’euros pourraient donc être ainsi récupérés et réaffectés.

Je souhaiterais connaître la position du Gouvernement sur la proposition de financement compensateur des sylviculteurs du Sud-Ouest.

Enfin, monsieur le ministre, vous me permettrez d’évoquer les débats que nous avons eus le 29 mai dernier, dans le cadre du projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, sur le compte épargne d’assurance. Le ministre de l’agriculture a voulu recentrer ce dispositif uniquement sur l’épargne précaution, et non plus sur l’investissement, comme l’avait proposé la commission de l’économie du Sénat par voie d’amendement. Si les plantations ou replantations d’arbres ne sont pas des investissements, de quoi s’agit-il, alors ?

M. Le Maire s’est toutefois engagé devant la Haute Assemblée à engager une réflexion sur les moyens de renforcer les investissements dans ce secteur, car il a reconnu qu’il s’agissait à l’évidence d’un facteur indispensable pour la valorisation de nos forêts.

Pouvez-vous me préciser, monsieur le ministre, quelles sont les intentions du Gouvernement à ce sujet, et donner aux sylviculteurs l’assurance qu’ils s’engagent dans une politique forestière durable ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Michel Mercier, ministre de l’espace rural et de l’aménagement du territoire. Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser Bruno Le Maire, retenu par la préparation de l’examen de la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche en commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale.

La tempête Klaus a frappé très durement le massif forestier des Landes de Gascogne, ce qui a justifié la mise en œuvre d’un plan de solidarité nationale. Échelonné sur huit années, celui-ci s’est traduit, dès la première année, par un important soutien financier de l’État : une enveloppe de 220 millions d’euros de subventions a été attribuée, et l’État en a déjà décaissé la moitié ; en outre, 236 millions d’euros de prêts bonifiés ont été accordés, les banques en ayant décaissé 140 millions. Le dispositif est désormais fluide et des décaissements se poursuivent au rythme de l’avancement des projets.

Un peu plus d’un an après, malgré un contexte difficile, les résultats sont tangibles. Tout d’abord, le rythme d’exploitation, exceptionnel, devrait permettre de traiter, d’ici à la fin de 2010, la quasi-totalité des volumes. Ensuite, le recours à grande échelle au stockage sous aspersion permettra de sécuriser l’approvisionnement des industries du massif. Réalisé à la demande de Bruno Le Maire, le bilan de ces mesures établi par le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des territoires ruraux, le CGAAER, a confirmé ces résultats.

Depuis que les bois « tempêtes » ont été évacués, la priorité est désormais d’aider les sylviculteurs à reconstituer leurs forêts. Pour cela, plusieurs mesures ont été prises.

Une enveloppe totale de 415 millions d’euros sur huit ans est réservée aux aides directes en faveur des propriétaires forestiers.

Des opérations de nettoyage des parcelles sinistrées, qui ont débuté en 2009, s’intensifient cette année. Déjà, un peu plus de 75 millions d’euros ont été engagés pour le nettoyage de plus de 50 000 hectares de forêts sinistrées. D’ici à l’été, l’objectif est que ces opérations soient achevées pour 40 000 hectares et que les propriétaires soient payés.

Enfin, pour répondre à la demande forte et légitime des propriétaires forestiers privés, un dispositif assurantiel a été introduit dans le projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche. Il repose sur une épargne de précaution et sur une incitation fiscale au recours à l’assurance privée.

Parallèlement, la ministre chargée de l’économie doit prochainement étudier avec les professionnels de l’assurance les moyens de développer le marché de l’assurance en forêt, qui ne concerne aujourd’hui que 5 % des surfaces forestières.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Je n’ai pas tout à fait les mêmes chiffres que M. Mercier sur la fluidité du dispositif après-tempête !

M. Michel Mercier, ministre. Ce sont les chiffres transmis par M. Le Maire !

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Monsieur le ministre, vous devez prendre conscience du fait que le dispositif du compte épargne d’assurance, adopté par le Sénat au travers d’un amendement gouvernemental dans le cadre de l’examen de la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, ne satisfait pas les sylviculteurs : ils souhaitent même son retrait. Ils considèrent que ce dispositif n’est qu’une prétendue assurance et un moyen pour l’État de se désengager.

Ce système ne fonctionnera pas, car il ne répond pas aux besoins existants. Je tiens à le réaffirmer clairement : ce qu’il faut aux forestiers, c’est un compte épargne d’investissement ; ils le réclament d’ailleurs depuis 1999... Je partage leur analyse. Il en va de l’avenir de la politique forestière de l’État !

avenir des zones de revitalisation rurale

M. le président. La parole est à M. Jacques Blanc, auteur de la question n° 951, adressée à Mme la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche.

M. Jacques Blanc. Monsieur le ministre, votre nomination, s’ajoutant aux déclarations du Président de la République, aux engagements du Gouvernement et du comité interministériel pour l’aménagement et le développement du territoire, le CIADT, ont suscité une grande espérance chez tous ceux qui, comme moi, se préoccupent de l’avenir des espaces ruraux.

Or une inquiétude se fait jour, car des bruits courent quant à une éventuelle remise en cause du dispositif des zones de revitalisation rurale, les ZRR, créé par la loi d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire du 4 février 1995, puis complété par diverses dispositions.

Au prétexte qu’il est difficile d’évaluer les effets directs de ce dispositif sur l’emploi – et même si tous les rapports indiquent que les résultats obtenus sont incontestablement très positifs en termes de maintien d’emplois, sinon de création d’emplois nouveaux ! –, il serait question de supprimer plusieurs mesures dont bénéficient les ZRR.

C’est le cas, ainsi, de l’exonération de cotisations sociales qui s’applique à toutes les entreprises implantées dans ces zones, pour une durée de douze mois, ainsi qu’aux entreprises de moins de cinquante salariés. Une autre mesure concernée serait l’exonération de cotisations sociales applicable aux organismes d’intérêt général implantés dans les ZRR.

La preuve a pourtant été apportée de l’efficacité de ces dispositions ! Je vous invite à revenir en Lozère, où vous êtes toujours le bienvenu, monsieur le ministre. Vous verrez que ces mesures ont permis de maintenir l’activité dans les établissements sanitaires et sociaux, et médico-sociaux, et de créer de nouveaux emplois. Je précise que toutes ces activités sont autorisées, contrairement à ce qu’on laisse entendre dans un certain rapport. Dans le secteur médico-social, vous le savez comme moi, il faut obtenir des autorisations !

Ma question, monsieur le ministre, est très précise. Les engagements pris par l’État, modifiés en 2008 – une extinction en sifflet des mesures d’exonération en faveur des organismes d’intérêt général a alors été prévue –, seront-ils tenus ? Et si ces dispositions, qui ont incontestablement permis de maintenir des activités pour lesquelles les financements de l’État et de l’assurance maladie n’étaient pas suffisants, sont remises en cause, quelles mesures financières prendrez-vous alors pour compenser leur suppression ? L’inquiétude est grande. Après les déclarations fortes du Gouvernement en faveur du développement rural, ce geste serait très mal perçu.

Quelles sont les intentions du Gouvernement, monsieur le ministre ? S’il devait y avoir refonte de ces dispositifs, le Parlement devrait en être saisi, car c’est sur son initiative que ces derniers ont été mis en place.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire. Monsieur le sénateur, les zones de revitalisation rurale ont permis le développement de nombre de territoires ruraux. Leur création constitue donc une réussite, confirmée par l’évaluation conjointe de l’Inspection générale des affaires sociales, de l’Inspection générale des finances, du conseil général de l’agriculture, de l’alimentation et des espaces ruraux, ainsi que du conseil général de l’environnement et du développement durable, évaluation qui a donné lieu à un rapport rendu public dès le début de cette année.

Le dispositif des ZRR concerne environ un tiers des communes françaises représentant 8 % de la population. Les entreprises installées dans ces zones et, depuis 2005, les organismes d’intérêt général bénéficient d’exonérations des cotisations sociales patronales et d’exonérations fiscales. Ces allégements s’élevaient à 511 millions d’euros en 2008 – somme extrêmement importante –, dont 409 millions d’euros d’exonérations sociales. Ainsi, cette même année, la Lozère a profité de près de 18 millions d’euros d’exonérations au titre des seules exonérations accordées aux organismes d’intérêt général.

Le Gouvernement estime que ce dispositif est particulièrement utile dans les territoires les moins peuplés – c’est le cas des zones de montagne –, souvent isolés et fragiles économiquement. C’est pourquoi, lors du CIADT du 11 mai dernier, présidé par le Premier ministre, plusieurs décisions importantes relatives aux ZRR ont été entérinées.

Tout d’abord, le dispositif en faveur de la création d’entreprises sera poursuivi : la durée du bénéfice de l’exonération fiscale sera fixée à huit ans et concernera les entreprises de moins de dix salariés. Cette modification sera présentée au Parlement dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011.

Ce dispositif sera également élargi aux transmissions-reprises d’entreprises en zones de revitalisation rurale. En effet, une part importante du développement des territoires ruraux est endogène : la reprise et le développement d’activités, portés ou non par des entreprises nouvelles, y jouent un rôle déterminant. Cette mesure répond à l’une des demandes récurrentes formulées lors des assises des territoires ruraux. Elle sera également incluse dans le projet de loi de finances pour 2011

Enfin, conformément à une décision prise lors du CIADT, je suis chargé de proposer, d’ici à la fin de l’année, les évolutions relatives aux critères de zonage des ZRR, évolutions faisant suite aux derniers recensements. Ce travail devra être associé à la plus large concertation possible ; il devra être conduit en étroite collaboration avec le Parlement, qui décidera in fine, et les associations d’élus directement concernées par cette problématique, telle l’association nationale des élus de la montagne, l’ANEM, qui connaît bien le sujet. Je commencerai ce travail dès la rentrée.

M. le président. La parole est à M. Jacques Blanc.

M. Jacques Blanc. Je souscris à vos propos, monsieur le ministre : le dispositif des ZRR est une réussite. Or lorsqu’un dispositif fonctionne, point n’est besoin de le remettre en cause ; mieux vaut le conserver tel quel.

Cependant, monsieur le ministre, vous n’avez pas répondu à ma question précise relative aux exonérations en faveur des organismes d’intérêt général. Ce système constitue en Lozère un atout exceptionnel au service des personnes handicapées, des personnes rejetées par la société : il leur permet d’avoir des conditions de vie et d’épanouissement qu’elles ne trouveraient pas ailleurs. Je vous demande donc d’intégrer à la réflexion préalable à vos propositions la nécessité de ne pas « casser » un dispositif qui fonctionne.

Et si, contrairement à ce que je souhaite – je me bats à cet égard –, étaient remis en cause les engagements pris à l’occasion de la loi de finances de 2008, à savoir le maintien des exonérations acquises, maintien qui a été pris en compte pour la préparation des budgets, il faudrait alors prévoir des compensations financières en parallèle.

Comme vous l’avez indiqué, la Lozère a bénéficié d’exonérations à hauteur d’environ 18 millions d’euros au titre des dispositions octroyées aux établissements médico-sociaux. La suppression, demain, de ces exonérations constituerait une catastrophe ! On ne pourrait alors plus répondre aux besoins et apporter ce supplément de vie dont l’espace rural a besoin.

De grâce, monsieur le ministre, plutôt que les technocrates qui vous expliqueront que le dispositif ne sert à rien alors que celui-ci a permis le maintien d’activités, écoutez les parlementaires qui soutiennent l’action médico-sociale et le maintien de la vie dans les espaces ruraux !

L’ANEM est extrêmement mobilisée à cet égard. Je tiens d’ailleurs en cet instant à remercier votre cabinet d’avoir reçu des représentants de cette association, lesquels ont pu exprimer à cette occasion la très grande inquiétude de tous les élus de la montagne.

M. le président. Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente, dans la salle Médicis.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures cinq, est reprise à quatorze heures trente-cinq, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)