M. Brice Hortefeux, ministre. … notamment dans les gendarmeries. J’ai pu rencontrer les associations, en particulier des retraités de la gendarmerie, qui s’étaient émues de ce rapprochement. Je crois pouvoir dire que la gendarmerie a parfaitement compris l’intérêt pour elle aujourd'hui d’être placée sous un commandement unique (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées), naturellement dans le strict respect de l’identité militaire.

Grâce à cette réforme majeure, nous gagnons désormais en efficacité, que ce soit par les synergies logistiques mises en œuvre ou par des synergies opérationnelles, telles que les cellules anti-cambriolages, la création de directions communes, notamment celle de la direction de la coopération internationale, le 1er septembre, qui était souhaitée par la gendarmerie, ou la mise en place d’unités de coordination en matière de sécurité routière ou de sécurité dans les transports.

Ce rapprochement doit aussi nous permettre de réduire les charges indues qui pèsent actuellement sur les policiers et les gendarmes. Je ne connais pas un ministre de l’intérieur qui ne s’y soit pas attelé. J’estime, en effet, qu’il existe actuellement un excès de charges indues qui ne correspondent pas au cœur de métier des policiers et des gendarmes.

Certaines de ces charges relèvent de l’activité judiciaire, et je travaille avec Mme la garde des Sceaux sur ce sujet afin d’améliorer la situation.

D’autres tâches indues sont de nature administrative. Je pense, par exemple – et beaucoup d’entre vous connaissent ce sujet – aux procurations de vote, qui n’ont rien à voir avec le métier des hommes et des femmes qui ont pour mission première de protéger les Français.

Conformément aux souhaits du Président de la République, je vous le dis, j’entends y mettre un terme, et je vous appelle à m’y aider.

Pour vaincre la délinquance, il ne suffit pas d’avoir de nombreux policiers dans les commissariats. Il faut penser et organiser leur action pour leur permettre de se concentrer sur ce qui doit être et demeurer leur cœur de métier.

Certains crient ou appellent « des effectifs, des effectifs, et des effectifs ! ». Mais il faut compléter le message ! Il faut ajouter : « des impôts, des impôts, et encore des impôts ! ». (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Jean-Pierre Sueur. C’est simpliste !

M. Brice Hortefeux, ministre. Je vous encourage à ne pas oublier le témoignage de Marc Bloch et ses réflexions sur l’Étrange défaite de 1940. Entre autres, deux d’entre elles méritent notre attention et s’appliquent parfaitement à la guerre qui est la nôtre contre la délinquance.

Une réflexion de fond, tout d’abord : « Deux guerres qui se suivent, si dans l’intervalle la structure sociale, les techniques, la mentalité se sont métamorphosées, ne seront jamais la même guerre. »

Une réflexion de méthode, ensuite : « Une toute autre maîtrise de soi est nécessaire pour s’imposer, longtemps à l’avance, la peine de dresser, avec soin et souplesse à la fois, les plans d’action [...] qui devront alors pouvoir s’adapter aux nécessités nouvelles d’une époque troublée. »

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Comparaison n’est pas raison !

M. Brice Hortefeux, ministre. Comment mieux dire que la guerre que l’on mène aujourd’hui contre la délinquance n’est pas celle d’hier et a fortiori celle de demain ? Comment mieux dire que l’on ne peut pas combattre avec succès la délinquance avec des recettes qui étaient éprouvées et qui avaient fonctionné voilà quinze ans ? Comment mieux dire qu’il importe de renouveler nos approches au vu de la réalité, qu’il faut en permanence s’adapter et anticiper ?

C’est l’enjeu du combat que nous avons engagé contre toutes les formes de la délinquance, avec le souci permanent d’adapter notre stratégie d’action aux réalités auxquelles sont confrontés nos concitoyens.

La concentration de nos moyens passe aussi par la mobilisation et la coordination de tous les acteurs de la sécurité au plan local, national et international.

À l’évidence, la sécurité est, d’abord, l’affaire de l’État. L’article 1er de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, inscrit dans le préambule de la Constitution, affirme que la sûreté fait partie des droits inaliénables et imprescriptibles de l’homme.

Mais la sécurité, c’est aussi l’affaire de tous. Chacun a un rôle à tenir. Elle est de la responsabilité de tous les élus. C’est une affaire non pas d’opposition, de majorité, de gauche ou de droite, mais d’intérêt général. Elle relève aussi de la responsabilité des collectivités locales, avec notamment le déploiement justifié des polices municipales et, désormais, des agents de sécurité privée, ainsi que des citoyens eux-mêmes qui doivent rester vigilants.

La sécurité exige donc une mobilisation de tous.

C’est pourquoi l’État établit des coopérations opérationnelles entre ses différents services. Je pense tout particulièrement au travail remarquable qui est réalisé conjointement par les services de l’éducation nationale, sous l’autorité de Luc Chatel, et les services de police ou de gendarmerie pour assurer la sécurité de nos enfants dans les collèges et les lycées. Les médias, et c’est bien normal, relatent et relaient les faits les plus graves. Mais on oublie souvent de signaler nombre d’incidents qui ont pu être évités ou gérés grâce aux équipes mobiles de sécurité que nous avons mises en place ou à la vigilance des enseignants et des gestionnaires des établissements. Je pense aussi au travail accompli avec les services du ministère du budget, sous l’autorité de François Baroin, pour frapper les délinquants au portefeuille.

Par ailleurs, à l’échelon local, grâce au plan gouvernemental de prévention de la délinquance et d’aide aux victimes, nous coordonnons plus efficacement l’action des acteurs locaux de la prévention en plaçant le maire au cœur du dispositif. Pour exercer leur pouvoir, les maires disposent de moyens humains, comme les polices municipales, et d’outils, tels que la vidéoprotection ou les contrats locaux de sécurité.

Enfin, la sécurité implique une intense coordination sur le plan international.

Chacun pense naturellement en premier lieu à la lutte contre le terrorisme. L’expérimentation des scanners corporels, en matière de sécurité aérienne, prévue dans le projet de loi, en est l’un des aspects.

Mais la coordination internationale ne concerne pas seulement ce domaine, car c’est souvent au-delà de nos frontières que se développent ou prennent appui des menaces telles que la cybercriminalité ou les trafics de drogue. C’est la raison pour laquelle j’ai proposé, avec le concours du ministre de l’intérieur espagnol, Alfredo Perez Rubalcaba, pendant la présidence espagnole de l’Union européenne, un pacte européen contre la drogue qui a été accepté à l’unanimité par tous mes homologues le 3 juin dernier.

Le deuxième mot d’ordre concerne la mobilité des acteurs. La capacité de mobilité de nos forces doit s’adapter à la mobilité des délinquants. C’est une évidence, mais je veux que vous me compreniez.

Comment était-il tolérable que nos policiers, lancés à la poursuite de braqueurs, par exemple, doivent s’arrêter devant le boulevard périphérique parce qu’ils n’avaient pas le droit administrativement de les pourchasser au-delà ? Le boulevard périphérique n’était pas, bien entendu, une frontière pour les délinquants ! Désormais, avec la police d’agglomération, ce n’est pas non plus une frontière pour les policiers !

Ce perfectionnement, c’est celui de la police d’agglomération. Nous allons fêter son premier anniversaire dans quelques jours, puisqu’elle a été créée le 14 septembre 2009.

Les résultats sont extrêmement encourageants. Nous avons tiré un premier bénéfice évident de la mutualisation de ces moyens. Au cours des dix derniers mois, la police d’agglomération parisienne a enregistré une baisse de 9,8 % de la criminalité organisée et de la délinquance spécialisée, une diminution de 3,8 % des cambriolages, ainsi qu’une chute de 23,2 % des vols à main armée.

Il n’est pas inutile de le répéter encore une fois, ces chiffres ne sortent pas d’un chapeau, ce n’est pas moi qui les maîtrise. Ils sont établis par l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales, organisme dont vous connaissez l’indépendance. Un certain nombre d’élus socialistes publient d’ailleurs des livres conjointement avec son président. On ne peut donc pas dire que les statistiques qui nous ont été communiquées par cette instance soient sujettes à caution.

Puisqu’elle marche à Paris, cette réforme sera transposée ailleurs. À Lille, le projet est en cours de réalisation. À Lyon, le calendrier est d’ores et déjà fixé au 1er janvier. À Marseille, nous définissons le périmètre. Nous l’envisageons, sur la base de la concertation, en liaison avec les élus et les préfets, dans d’autres agglomérations.

De même, s’agissant de la gendarmerie, la mise en place, dès cet automne, d’une « police des territoires » permettra une adéquation renforcée entre les bassins de vie et les bassins de délinquance. C’est en quelque sorte le miroir de ce qui avait été fait pour la police d’agglomération.

Il existe des différences de points de vue, et heureusement dirais-je. Ainsi, certains responsables socialistes veulent concentrer les moyens sur des départements identifiés. Il y a là une certaine logique, que je ne conteste pas. Cependant, mesdames, messieurs les sénateurs, il s’agit de départements urbains. Or, j’entends, pour ma part, qu’aucun territoire, je dis bien aucun, ne soit négligé, et notamment les zones rurales ou semi-rurales.

La mobilité suppose aussi le positionnement de structures organisées. C’est pourquoi j’ai annoncé la création, d’ici à la fin de l’année, de vingt-six Unités territoriales de quartier, ou UTeQ, nouvelle génération, qui sont en réalité des brigades spécialisées de terrain – cette dénomination plus compréhensible correspond à une évolution –, là où le besoin s’en fait sentir, ce qui implique l’établissement d’un diagnostic.

À l’occasion d’un de mes déplacements au mois d’août, notamment à Perpignan et à Toulon, j’ai observé que la délinquance était organisée non pas par quartiers, mais par zones. Il faut donc que ces UTeQ nouvelle génération puissent être assez mobiles.

Elles assureront des missions extrêmement précises et ciblées sur l’intervention et la répression des crimes et délits. Leur champ d’action se situera dans des bassins de délinquance importants au périmètre circonscrit.

Elles auront un seul mot d’ordre : le terrain. En clair, elles ne seront pas composées d’agents d’ambiance ou d’éducateurs sociaux dans des bureaux. Elles assureront d’autres responsabilités.

Une adaptation constante au terrain est nécessaire. À cette fin, j’évaluerai la situation avec l’autorité judiciaire, les élus et les acteurs sociaux, afin de décider, au vu des résultats, des besoins et des attentes, du maintien ou non de l’unité en place, de son adaptation ou de son redéploiement sur une zone devenue plus sensible.

Il s’agit donc non pas d’une suppression des UTeQ, mais d’une évolution, notamment dans leur champ de compétence géographique. Deux de ces UTeQ nouvelle génération vont être mises en place dans les prochaines semaines à Perpignan et à Toulon. J’indique d’ores et déjà que vingt-quatre autres unités suivront.

À partir de là, nous devons avoir une stratégie de ciblage des actions. À chaque problème identifié doit correspondre une réponse ciblée.

« La police, c’est du pragmatisme » écrivait dans un quotidien, voilà quelques jours, Alain Bauer, le président de l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales.

Parce qu’il faut frapper là où ça fait mal, ce sont, aujourd’hui, sept plans d’action opérationnels qui sont mis en œuvre au service de la protection des Français.

Je citerai d’abord le plan anti-cambriolages. Un cambriolage est souvent ressenti, à juste titre d’ailleurs, comme le viol d’une intimité personnelle ou familiale. Les résultats en matière de lutte contre les cambriolages étaient très mauvais et s’étaient dégradés. Des explications sont proposées par les sociologues, mais là n’est pas notre propos.

Après une baisse massive entre 2002 et 2008, le nombre de cambriolages a augmenté l’année dernière, de 13 % en juillet, de 14 % en août et de 8 % en septembre. Face à cette situation, nous avons créé des unités spécialisées : les cellules anti-cambriolages. Mises en place entre septembre et mi-octobre 2009, elles sont aujourd'hui au nombre de 106 en France. Elles ont permis d’inverser la tendance : après l’augmentation incontestable du nombre de cambriolages l’année dernière, nous avons enregistré une baisse de 3,5 % au cours des sept premiers mois de l’année 2010. Ainsi, la tendance a été non seulement endiguée, mais totalement inversée.

Parallèlement, le plan contre les trafics de stupéfiants, avec pour priorité l’éradication des deals de proximité, s’appuie sur l’effort de la police. À côté du combat noble contre le trafic de stupéfiants et les grandes filières, absolument indispensable, il y a le combat du quotidien. Des opérations lourdes ont été lancées, à la satisfaction des élus concernés, me semble-t-il. Je pense au département de la Seine-Saint-Denis – à Sevran, à Saint-Denis, notamment tout autour de l’esplanade. J’ai cru comprendre que ce plan avait répondu aux attentes qui s’étaient manifestées.

Le plan de démantèlement des bandes violentes est lui aussi très important. Mesdames, messieurs les sénateurs, vous êtes majoritairement, par définition, des élus de zones « extra-Île-de-France ». La réalité est très simple : le phénomène des bandes violentes n’existait pas ou très peu voilà une vingtaine d’années. Encore une fois, je parle sous couvert des anciens ministres d’État, ministres de l’intérieur, qui sont présents dans cette enceinte. Le phénomène qui se développe présente deux caractéristiques majeures. D’une part, il est un peu plus violent et implique l’emploi d’armes. D’autre part, on constate une féminisation sensible de ces bandes. Aujourd’hui, le phénomène concerne l’Île-de-France à 80%. Si vous n’aviez pas voté la loi « anti-bandes » au mois de mars denier, la situation se dégraderait inéluctablement et toutes les collectivités importantes, puis moyennes, auraient été concernées.

Il faut souligner aussi le plan de lutte contre le hooliganisme, le plan de sécurisation des transports en commun, le plan de lutte contre les violences scolaires et, enfin, le plan de sécurité des personnes âgées. Je ne peux pas revenir en détail sur chacun d’entre eux.

Permettez-moi cependant de redire un mot au sujet du plan anti-cambriolages. J’ai demandé que la police technique et scientifique intervienne sur chaque lieu de cambriolage. Les résultats sont spectaculaires. Pourquoi ? Parce qu’il est rare que quelqu’un se réveille le matin en se disant : « J’ai un problème de fin de mois, je vais aller cambrioler le voisin ! ». Les cambriolages sont plutôt le fait de petits ou de grands réseaux. Grâce à la police scientifique, on s’aperçoit que le cambrioleur interpellé a non pas un cambriolage à son actif, mais souvent une trentaine au minimum. Je ne veux pas mettre en cause l’insularité, mais je me dois de rappeler que, sur ce territoire de la République, nous avons interpellé, au milieu de l’été, une équipe de cambrioleurs qui en était à son soixante-quatrième cambriolage. Sans l’intervention de la police scientifique, il aurait fallu beaucoup de temps avant d’y parvenir.

À cet égard, je pense également à la délinquance itinérante, qui pose un vrai problème. Je vous le dis comme je le constate, sans céder à l’hypocrisie du politiquement correct : dès l’installation de certains campements illicites bien identifiés s’étaient développés cambriolages et autres faits de délinquance.

Les forces de sécurité ont reçu un mot d’ordre clair : les campements illicites où femmes et enfants vivent dans des conditions inacceptables doivent être démantelés et les réseaux, les malfrats et les crapules qui y sévissent doivent être arrêtés. Le Gouvernement n’entend pas interrompre cette politique. (M. Pierre Hérisson applaudit.)

M. Jean Bizet. Très bien !

M. Brice Hortefeux, ministre. J’en viens au plan de lutte contre le hooliganisme. Là encore, mesdames, messieurs les sénateurs, vous êtes concernés, ce phénomène touchant peut-être davantage les zones urbaines.

Le problème était bien identifié : les violences dans les stades étaient devenues une habitude pour quelques fous furieux, qui se déplaçaient non pas par amour du sport, mais tout simplement pour en découdre. Nous avons donc pris des mesures claires et nettes face à cette dérive relativement récente.

J’ai renforcé les effectifs, puisque 525 unités de forces mobiles ont été engagées, notamment pour couvrir le championnat de France de football. Le nombre de ces unités, je le rappelle, n’était que de 403 lors du championnat 2008-2009. J’ai également créé une Division nationale de lutte contre le hooliganisme et des sections d’interventions rapides dans douze villes, pour assurer la sécurisation des tribunes et interpeller les hooligans identifiés.

Je vous rappelle tout de même que, le 28 janvier dernier, un match qui se déroulait dans la région parisienne a entraîné la mort d’un homme.

Les mesures lourdes que nous avons prises ont porté leurs fruits, comme le démontre le bilan du championnat de France de football 2009-2010.

Ainsi, jusqu’à 828 interdictions de stade ont été appliquées durant la même période. Aujourd’hui, celles-ci sont moins nombreuses, les problèmes étant moindres. Près de 700 individus ont été interpellés au cours de la saison, soit une augmentation d’environ 12 % par rapport au championnat antérieur. Fait sans précédent, sept clubs de « supporters » radicaux ont été dissous à la suite de dégradations et de violences.

Nous allons continuer d’œuvrer en ce sens. Plus aucun acte de délinquance important n’est intervenu dans les stades depuis le début du mois de février. Il ne faut donc pas renoncer, mais au contraire approfondir juridiquement certaines des mesures que nous avons prises.

D’ores et déjà, ce sont 249 individus qui ont été interpellés à Paris, dès la reprise du championnat. S’il le faut –  et non pas pour le plaisir ! – d’autres le seront également. Certaines mesures ont d’ailleurs été intégrées au projet de LOPPSI, comme le « couvre-feu anti-supporteurs » d’un club ou la possibilité de prendre par arrêté une mesure d’interdiction de déplacement de supporteurs pour un club donné.

Je me souviens d’un match qui s’est déroulé à Auxerre devant des tribunes vides, ce qui avait contrarié Henri de Raincourt ! Les supporteurs d’Auxerre avaient été pénalisés de manière injuste. Aujourd’hui, nous prenons des mesures qui leur permettront, dans un cas de figure semblable, d’assister au match, alors que les cinglés trouveront en revanche porte close.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Très bien !

M. Brice Hortefeux, ministre. Permettez-moi, mesdames, messieurs les sénateurs, de donner un troisième et dernier exemple, celui des trafics de stupéfiants. Je m’y suis attaqué avec un plan de lutte méthodique et, surtout, efficace, qu’il s’agisse des gros trafiquants ou des dealers à la sauvette, qui se tiennent à l’angle des rues, au bas des immeubles ou à proximité des écoles. Vous connaissez d’ailleurs les trois « cercles » du trafic de stupéfiants : le premier se trouve dans l’école, le deuxième à la sortie de celle-ci, et le troisième trois cents ou quatre cents mètres plus loin, où l’on deale plus allègrement. J’ai donné à toutes les forces de sécurité le même mot d’ordre : occuper le terrain et démanteler les réseaux, autant que faire se peut. Dans cette optique, elles ont investi les halls d’immeubles.

Je me suis rendu à Sevran avec le préfet Christian Lambert, l’ancien patron du Raid, qui est d’ailleurs salué par l’ensemble des élus, du moins ceux que j’ai rencontrés. Nous avons pénétré dans des halls d’immeubles, sur le fondement, d’ailleurs, d’indications de riverains excédés. Les forces de l’ordre n’y allaient plus depuis un certain temps. Aujourd’hui, elles investissent les halls, les toits, les cours et les parties communes de ces immeubles.

Je vous signale également que, en Seine-Saint-Denis, 2 280 contrôles de halls d’immeubles ont été menés sur quatre mois. Bien sûr, cela ne résout pas tout ! Mais c’est un signal qui se diffuse.

Grâce à ce plan de bataille, les saisies de cocaïne ont augmenté sur les sept premiers mois de cette année de 16 %, celles de cannabis de 16 % également et celles d’avoirs financiers sont, à ce jour, aussi importantes que pour l’ensemble de l’année 2009. Par ailleurs, 7 725 trafiquants de drogue ont été interpellés, contre 7 090, soit une augmentation de près de 10 %. Vous avez pu lire dans la presse le compte rendu des coups de filet réalisés.

Parce que les délinquants se spécialisent, nous apportons une réponse calibrée. Parce qu’ils s’adaptent à l’évolution de la société et aux failles éventuelles de la législation, l’État ne doit leur laisser aucun répit. C’est pourquoi il y aura autant de lois et de règlements que nécessaire, même si le présent texte sera la seule loi de sécurité intérieure du quinquennat.

Nous tenons le cap et les résultats sont là. Depuis sept ans, de 2002 à 2009, la délinquance globale a diminué de 14,41 %, la délinquance de proximité de 35 % et les cambriolages de 28 %. Surtout, le taux d’élucidation – j’insiste sur ce point, puisque l’on m’oppose toujours l’évolution des effectifs – est passé de 25 % à 39 %. Il ne s’agit donc pas seulement d’une question d’effectifs (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.), il s’agit également d’une question d’organisation et de moyens. Si tel n’était pas le cas, le taux d’élucidation n’aurait pas progressé d’une manière aussi spectaculaire. En 2002, on élucidait une affaire sur quatre. Aujourd’hui, on en élucide plus d’une sur trois. Cette réalité est incontestable.

Nous sommes, depuis quelques années, l’un des pays les plus sûrs du monde, mais il nous faut bien sûr encore progresser.

Je signale à cette occasion que le métier de policier, dont certains sourient parfois, est un métier à part. Ce n’est pas une activité professionnelle tout à fait comme les autres. J’ai pu encore le mesurer en me rendant, dimanche soir, dans la famille du jeune Nicolas Debarge, policier de vingt-cinq ans, également sapeur-pompier volontaire, qui s’est noyé en essayant de secourir quelqu’un, déjà connu des services de police, qui avait décidé, de son propre chef, de se jeter à l’eau pour des raisons qui lui appartenaient et que la justice devra préciser.

Quand on rencontre la famille de ce policier, ses parents, son frère, sa compagne, ses collègues de la BAC, qui ont vu leur camarade couler – je parle sous le couvert de l’ensemble des élus, qui sont confrontés à ces situations, et plus particulièrement sous celui des anciens ministres de l’intérieur – et que l’on s’adresse ensuite, comme je l’ai fait dimanche soir dernier, à vingt et une heures, à deux cents policiers rassemblés, on ressent pleinement tous les sentiments que vous pouvez imaginer. Je vous le dis, on est alors non pas dans l’exercice du discours, mais dans l’émotion, la peine partagée, le soutien et même l’affection. Des élus de toutes sensibilités étaient d’ailleurs présents à cette occasion.

Ce métier n’est donc pas comme les autres. Onze policiers et douze gendarmes sont décédés dans l’exercice de leur fonction depuis le début de cette année. J’ai aujourd’hui l’occasion de rendre hommage à leur action.

Le combat n’est jamais totalement gagné, car il ne cesse de se renouveler. Aujourd’hui, nous proposons de renforcer l’arsenal législatif pour aller plus loin et plus fort.

Tout d’abord, je voudrais répondre à certaines critiques, selon lesquelles chaque fait divers suscitant une certaine émotion ferait ensuite l’objet d’un texte. (Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste.)

M. Charles Gautier. Exactement !

M. Brice Hortefeux, ministre. C’est totalement faux ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) La réalité, c’est que la LOPPSI est en réflexion, en préparation, dans le cadre de discussions avec les autres ministères concernés, depuis de nombreux mois. Je le répète, il s’agira du seul texte d’orientation et de programmation sur la sécurité intérieure qui vous sera présenté au cours de ce quinquennat.

M. Daniel Raoul. Qu’est-ce que vous en savez ?

M. Brice Hortefeux, ministre. Je l’affirme, il faut une réponse résolue de l’État à chaque forme de délinquance. Dans cette optique, celui-ci s’est fixé quatre objectifs.

Il convient de nous assurer de l’effectivité de la réponse pénale, ce qui n’est pas rien ; de nous adapter au développement des nouvelles technologies ; de nous assurer de la complémentarité entre les différents acteurs de la sécurité ; et de nous appuyer sur la réactivité offerte par les mesures de police administrative.

Concrètement, nous voulons, tout d’abord, nous assurer que des sanctions pénales dissuasives et effectives seront prises contre les délinquants.

Le projet de loi, dans sa version débattue à l’Assemblée nationale, prévoit d’ores et déjà trois mesures spécifiques : l’aggravation des sanctions pour les cambriolages, et ce quel que soit le mode opératoire ; la création d’un délit spécifique pour la « vente à la sauvette » ; et la création d’une peine contre la distribution d’argent sur la voie publique. Cette pratique a quelque peu agité l’opinion publique l’année dernière, et il faut éviter de nous retrouver de nouveau totalement démunis. L’amende prévue, de 150 euros, était assez modeste, et il convenait donc de créer une peine adaptée.

À ces trois mesures déjà adoptées par les députés, je vous propose de voter cinq nouvelles mesures qui visent le même objectif.

Premièrement, je veux aborder la question des mineurs délinquants. S’il n’est pas question, bien sûr, de contester la spécificité de la justice des mineurs, il est, en revanche, essentiel d’en améliorer et d’en accélérer le fonctionnement. En effet, il est évident que le temps qui s’écoule aujourd’hui entre la commission de l’infraction et le jugement est beaucoup trop long.

Mme Nathalie Goulet. Pour tout le monde !